I.3. Relation entre la
disponibilité en nutriment et la prolifération des plantes
aquatiques
La CEE, dans sa Directive du 21/05/1991 relative au traitement
des eaux urbaines résiduaires définissait: l'eutrophisation
comme: «l'enrichissement de l'eau en éléments nutritifs,
notamment des composés de l'azote et/ou du phosphore, provoquant un
développement accéléré des algues et des
végétaux d'espèces supérieures qui perturbe
l'équilibre des organismes présents dans l'eau et entraîne
une dégradation de la qualité de l'eau en question». Il
convient donc de traquer Les teneurs en azote et/ou en phosphore des cours
d'eau pour maîtriser le " développement
accéléré des algues et des végétaux
d'espèces supérieures".
Les lignes qui suivent ont pour but d'approfondir cette
thématique en commençant par décrire ce que sont les
végétaux aquatiques et la façon dont ils utilisent les
substances minérales pour se développer au point de perturber
l'équilibre des organismes présents dans l'eau
et d'entraîner une dégradation de la qualité
de l'eau en question.
I.3.1.
Généralités sur les plantes aquatiques.
Les plantes aquatiques, également appelées
macrophytes du fait qu'elles sont visibles à l'oeil nu, elles
comprennent pour l'essentiel des végétaux supérieurs qui,
munis de racines de tiges et de feuilles, portent des fleurs, produisent des
graines (angiospermes). On distingue les plantes qui flottent librement en
pleine eau de celles qui sont fixées au fond, ces dernières se
subdivisant à leur tour en plantes émergées
(jusqu'à 1,5m d'eau), plantes à feuilles flottantes
(jusqu'à 3m d'eau) et plantes immergées (dans toute la couche
euphotique, les angiospermes s'arrêtant à 10m de profondeur).
Figure 7: Types de
plantes aquatiques
I.3.2. Nutrition
minérale.
En supposant favorables la lumière, la
température, l'hydrodynamique et toutes les autres conditions
environnementales, c'est la biodisponibilité des nutriments
présents dans l'eau, gaz et minéraux en solution, qui commande la
prolifération des végétaux strictement aquatiques
(microalgues, macroalgues et macrophytes flottants). La demande exercée
par ceux-ci est fonction de la composition de leurs tissus vivants. La
composition moyenne du végétal aquatique, algues et plantes
aquatiques enracinées confondues, fait apparaître le carbone comme
constituant majeur, mis à part bien entendu l'oxygène et
l'hydrogène. Vient ensuite le silicium, peu abondant chez les
végétaux terrestres mais omniprésent dans le monde
aquatique au travers des diatomées, riche classe d'algues dont le
protoplasme est contenu dans un exo-squelette siliceux. L'azote est
l'élément suivant, précédent le calcium, le
potassium et le phosphore (BARROIN, 2000).
Les éléments nutritifs jouant un rôle
important dans ce processus sont le phosphore (sous forme de phosphates) et, de
moindre importance, l'azote (sous forme d'ammonium, de nitrates, et de
nitrites). Ces deux éléments présentent des ratios
«besoin/disponibilité» très élevés, ils
sont donc limitant pour la croissance des végétaux. Ainsi, une
augmentation de la concentration en phosphore dans l'eau permet une forte
croissance des végétaux, alors que le manque de phosphore limite
leur prolifération (BARROIN, 2000). L'eau se charge naturellement
d'éléments chimiques en solution (carbone, phosphore, azote,
calcium, magnésium, etc.) et de matières solides en suspension
(minéraux du bassin versant, matière organique) à travers
son parcours dans le bassin versant (ABRINORD, 2008).
Que du point de vue de la composition tissulaire le carbone
soit l'élément principal ne signifie pas que la
prolifération des algues et plantes aquatiques dépende de sa
biodisponibilité. En effet, la demande en nutriment est satisfaite en
puisant dans une eau où les éléments sont présents
à des concentrations différentes de celles de cette composition
tissulaire, c'est l'élément pour lequel la demande est la plus
forte par rapport à l'offre qui va limiter la synthèse de
nouveaux tissus. En considérant la composition moyenne d'une eau
naturelle, et en établissant pour chaque élément le
rapport [Demande/Offre], on constate qu'avec un rapport de 80 000 le phosphore
vient en tête, devançant l'azote (30 000) et le carbone (5 000).
Le phosphore est dit " facteur limitant ", concept emprunté à
l'agronomie, l'ordre d'importance des éléments en termes de
facteur limitant, P-N-C, étant très exactement l'inverse de ce
qu'il est en termes de composition tissulaire, C-N-P. Qu'en conditions
naturelles le phosphore soit facteur limitant signifie qu'il faut en augmenter
la quantité biodisponible pour augmenter la quantité d'algues et
plantes aquatiques produites, ce qui correspond à l'application
agronomique du concept. Mais cela signifie également qu'il faut en
réduire la quantité biodisponible pour réduire la
quantité d'algues et plantes aquatiques produites, type d'intervention
étrangère à la pensée agronomique.
En résumé, en conditions naturelles le phosphore
est le facteur limitant de l'augmentation de la prolifération des algues
et plantes aquatiques, il est également le facteur de maîtrise de
son augmentation autant que de sa réduction. Le phosphore est essentiel
à la croissance des organismes vivants. Il est, avec l'azote et le
potassium, un élément nutritif majeur et essentiel pour la
croissance des plantes. Le phosphore dans les eaux naturelles vient
principalement du drainage des terres agricoles, de l'utilisation des
détergents ainsi que des eaux usées provenant de déchets
humains ou domestiques. Un excès de phosphore dans les cours d'eau peut
provoquer des résultats indésirables, comme la
prolifération des plantes aquatiques. Une telle surabondance peut
entraîner l'eutrophisation du milieu.
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