CHAPITRE 4: DISCUSION-CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES DE
RECHERCHES
4. 1-DISCUSSION-CONCLUSIONS
Les bassins versants des koris du Fakara sont des organismes
vivants dont les mécanismes dynamiques évoluent constamment. La
question de la dégradation des bassins est en fait un problème
aigu au Sahel. Ceci s'explique par la complexité des relations liant les
aspects physiques et humains de ces derniers. La dynamique hydro-érosive
des bassins est liée à la péjoration climatique mais
surtout aux changements d'usage des sols donc aux actions humaines sur les
principales ressources que sont: les sols, les eaux et les
végétaux. La dynamique des bassins versants du Fakara se traduit
par le renforcement du ravinement accompagnés par une importante
mobilisation de matériaux solides et cela à l'échelle de
presque tous les états de surface végétatifs et
état d'occupation du sol représentatifs de la région du
Fakara: Brousse tigrée, mil, jachères. L'encroûtement
s'accentue de plus en plus et l'on assiste à une dynamique
hydro-érosive récente dont le moteur actif est: l'augmentation du
ruissellement. Cette augmentation du ruissellement est en fait la
conséquence directe de la dégradation des sols et de la
couverture végétale. Les taux de ruissellement et
d'érosion sont en nette progression sur presque tous les états de
surface du sol de la région (Travaux 2004-2005 sur les parcelles
d'érosion, Alzouma I. à paraître).
Tableau 21: Erosion et coefficients de ruissellement
annuels sur trois types de parcelles d'érosion dans le bassin versant
de Wankama en 2004.
Types d'état de surface
|
Taux d'érosion en g/m2/an
|
coefficient de ruissellement en %
|
Mil
|
35
|
20
|
Jachère
|
20
|
30
|
Croûte d'érosion
|
150
|
85
|
Source: DESCROIX et al., 2005
Le tableau 21 nous montre l'importance des croûtes
d'érosion dans la fourniture de matériau pris par les eaux et sur
ces versants. Ce tableau traduit la situation actuelle des risques
d'érosion dans le bassin versant de Wankama en particulier et du Fakara
de façon générale. La croûte d'érosion est
bien un état de surface du sol. Très répandu dans le
Fakara et son importance dans la production
du ruissellement et des pertes en terres, la classent dans la
série des types d'occupation du sol pour l'évaluation des risques
d'érosion.
La croûte d'érosion appelé localement
<<gangani>> se généralise dans les champs mis en
valeur et même sur les jachères vielles ou jeunes. En fait 150 g /
m2 /an sont en moyens annuellement décapés (Tableau 21).
Malgré la nette diminution des pluies au Sahel en général,
l'érosion hydrique actuelle s'accentue et ses facteurs majeurs sont les
coupes rases des végétaux. Les espèces ligneuses les plus
utilisées ou menacées sont Prosopus africana, Guiera
senegalensis, Combretum micranthum, Combretum gluttinosum, Faidherbia albida,
Balanites aegyptiaca etc. Ces ligneux sont coupés pour les besoins
de bois de feu, d'art et d'oeuvre des populations de ces villages et surtout
des centres urbains comme Niamey. La consommation de la ville de Niamey se
chiffre à 201000 tonnes (2001) (PAFN 2003). Près de 11% du bois
consommé à Niamey transite par l'axe routier
Niamey-Filingué (ATTARI 1997). Il estime l'utilisation des ressources
ligneuses à des fins énergétiques par plus de 98% de
ménages au Niger. Il ne faut surtout pas négliger les besoins en
bois des populations rurales. Car dans le Fakara, le bois est une source de
revenus (vente), et est utilisé comme matière première
pour les constructions des cases, les toits et haies des cours, comme support
de greniers etc. Les herbacées vivaces et graminées annuelles
(Andropogon gayanus, Cenchrus biflorus) sont aussi recueillies et vendues aux
marchés ou utilisées pour les toitures des cases aussi. A vert,
elles sont utilisées comme pâturages d'animaux.
En prenant la moyenne nationale de besoins en bois des
villages ruraux au Niger qui est de 0. 8 kg de bois par personne et par jour,
évaluée par le Plan National de Lutte contre la
Désertification (1990) et cité par SIDIKOU H. A (1997). On peut
estimer à 214, 328 tonnes de bois /an de besoins de bois à
Wankama, 314, 484 tonnes de bois /an à Banizoumbou et 80, 3 tonnes de
bois /an à Tondi Kiboro (Figure 54). Le marché du village de
Wankama est un grand centre de transit de bois vers la ville de Niamey.
D'ailleurs ce marché de bois n'est pas un marché de bois
contrôlé (mais ils exploitent le bois vert). La pression animale
sur les ligneux arbustifs et le tapis herbacé est de plus en plus
renforcée par des pratiques d'élevage de divagation, de
pâturages aériens et du non respect de la capacité de
charge donc le surpâturage.
Photos 33 & 34: Evolution de la mise en culture
sur le versant de Wankama, situation de 1950 (Photo 33) et situation en 2004
(Photo34) (Interprétation Photos aériennes 1950-2004,
LE-BRETON E. 2004)
La mise en culture de ces bassins versants explique en partie
la dégradation de ces bassins versants. Entre 2003, les cultures
(systèmes culturesjachères) occupent plus de 70% du versant
(Photo 34). Alors qu'en 1950, ce système n'occupait que 20 à 25%
du versant en 1950. A cette période aussi, les
formations denses de savanes occupent plus des trois quarts de
la superficie du versant (Photo 33). Le croît démographique a bien
un impact sur l'évolution de l'occupation du sol, mais c'est
plutôt tout le système socio-économique, culturel et
même la péjoration climatique qui constituent les facteurs
essentiels de cette évolution. Les temps de jachères sont
fortement réduits. Car la très forte pression
démographique oblige les chefs de ménage à morceler
plusieurs fois les grands champs familiaux pour servir les jeunes chefs de
ménages. Chaque lopin de terres a son propriétaire de droit. Les
friches et les vielles jachères (5 ans à plus) sont devenues
rares. Les mauvaises pratiques agricoles se traduisent par le peu ou absence de
moyens et techniques de gestion, restitution et de récupération
des sols. Car beaucoup de paysans de la région de Fakara ne connaissent
pas l'utilisation des engrais dans les champs pluviaux. La seule méthode
de restitution est la pratique de la jachère et actuellement sur une
période très courte maximum 3 ans. Tout cela aboutit à la
mise à nu de vastes états de surface des bassins versants qui
ruissellent et s'érodent à grande échelle. L'on observe
sur la photo de 1950, que le réseau des ravines est très faible
et entre-coupé. Mais en 2003, il devient plus fonctionnel et mieux
structuré. La mobilisation des grains de sables sur ces bassins versants
trouve son origine à travers une dynamique systémique: hydrique,
éolienne et humaine qui est peu soucieuse de la restauration et la bonne
gestion des ressources eaux et sols. Cela aboutit à un important recul
du couvert végétal, apparition des zones nues et
dégradées, augmentation du ruissellement et mobilisation des
matériaux. A ce propos KEITA (2003) explique les causes la
dégradation de l'environnement dans le bassin versant de la mare de
Sormo, région de Gaya au Niger. Selon KIETA, cette dégradation se
marque essentiellement sur trois de ses composantes, la
végétation, par la diminution du degré de couverture, les
sols par les modifications de la structure physique et appauvrissement en
éléments minéraux et en matières organiques. Et
pour la troisième composante, toutes les formes d'érosion
hydrique et éolienne s'activent. L'ampleur des concentrations solides
enregistrées à partir des prélèvements
effectués sur la station aval atteste de l'importance de la
sédimentation dans les bas-fonds et autres fonds de mares
sahéliens. A comparer nos résultats aux données obtenues
par KARAMBIRI et al., (2003) l'on constate que les taux de concentrations
solides de nos bassins versants sont plus importantes que ceux
enregistrées par Karambiri et al. (2003). Malgré la similitude
climatique du Fakara
avec le Nord Burkina Faso, les bassins versants de Wankama et
Tondi Kiboro sont plus anthropisés. L'on note sur ces derniers une
dominance de formations superficielles essentiellement sableuses sur les
versants. L'évolution des ravines (plus de vingt mètres de
progression pour la ravine principale de Wankama) et la présence de
végétation en forme de fourré sur les berges attestent du
caractère récent de la dynamique hydro-érosive de ces
bassins versants. Cette nouvelle dynamique hydro-érosive entraîne
à l'échelle des bassins versants, une dégradation des
réseaux hydrographiques. RODIER (1964) explique cette dégradation
du réseau hydrographique par deux phénomènes:
-en saison sèche la dégénérescence de
la végétation herbacée favorise l'érosion
éolienne et l'érosion hydrique en début de saison des
pluies;
-le caractère sporadique des crues et les pentes
faibles des terrains induisent des débits insuffisants pour charrier les
dépôts de l'érosion et entretenir les lits des cours
d'eau.
En plus la cyclicité des mares dans les fonds du kori
de Dantiandou à l'échelle de quelques années voire de
celle de la crue exceptionnelle montre la rapidité des changements
morphologiques des unités hydrogéomorphologiques des bas-fonds
principalement les fonds de mares (niveau de base des ravines alimentant ces
dernières) et les cônes de déjection. Par exemple en 2004,
les échanges de flux d'écoulements entre mare Ouest et mare
Sud-Ouest sont très variables. Car une bonne partie des
écoulements de la ravine alimentant la mare Ouest se dirigent vers la
petite mare Sud-Ouest et la plus récente dans le secteur du village de
Wankama (moins de 20 ans). D'ailleurs DESCONNETS (1994) explique la
cyclicité des mares par l'ensablement localisé
(dépôts des transports solides à la jonction du drain
principal et du collecteur) et ou généralisé (effacement
de la pente du lit par apport sableux éoliens et colluviaux) des
principaux collecteurs. Cela a pour conséquence de rendre inefficace la
fonction de transport de ces collecteurs à la jonction de la
vallée principale. Ces collecteurs latéraux déposent leurs
charges et bloque le ruissellement aval. Ils se forme finalement un chapelet de
mares au cours de la saison des pluies. C'est ce que ROUSSEL B, & LUXEREAU
A, qualifient de <<cycles des mares>> (ROUSSEL & LUXEREAU
1997).
Enfin, nous disons que toutes ces observations et conclusions
confirment notre hypothèse de base. La dynamique actuelle de ces
bassins versants sahéliens du
Fakara est vraiment récente. Elle est essentiellement
due à l'anthropisation. Et cette forte anthropisation est la
conséquence directe de la démographie galopante. La région
du Fakara enregistre un taux d'accroissement de 5. 54%, largement
supérieur à la moyenne nationale. La cyclicité des mares
est aussi une conséquence de l'augmentation du ruissellement. En plus de
cela, l'augmentation des débits de ruissellement linéaire dans
les ravines, et sur les états de surface représentatifs de cette
région du Fakara (prolifération de l'encroûtement et
ruissellement en nappe) à l'échelle tant des bassins versants que
du Fakara, explique et confirme les conclusions de LEDUC et al. (1994) et
Favreau (2000) sur la hausse de la nappe dans ces systèmes
endoréiques du Fakara. Car on note le développement des zones
d'importantes infiltrations que sont: les fonds de ravines, les fonds de mares,
les zones d'épandage sableuses. La dynamique d'occupation du sol montre
de façon globale, un important recul des couvertures
végétales naturelles. Les mises en culture progressent fortement.
Une forte mobilisation de matériau sédimentaire se
développe tant sur les interfluves que dans les fonds de ravines et
koris. Les pertes en terres énormes par encroûtement se traduisent
par les comblements en matériaux des zones
préférentielles: bas-fonds et replat intermédiaires.
Toutes ces conséquences émanent des processus
hydro-érosifs très actifs encore aujourd'hui:
désertification, encroûtement, ravinement et accumulation de
sédiments pris par les eaux du ruissellement. Cette dynamique
véritablement active est bien récente et ses causes ci dessus
énumérées sont très complexes. Mais au centre de
cette dynamique se trouve l'homme. Car il déclenche et active tous ces
facteurs de la dynamique dégradante de ces milieux sahéliens.
ROGNON (1989) assimile << en fait la dégradation observée
au Sahel à une densification de l'occupation humaine, une exploitation
excessive des arbres comme pâturage de substitution et comme source
d'énergie, une érosion éolienne sur des sols
dénudés. CHINEN (1999) aboutit presque aux mêmes
conclusions que la présente étude. Il constate une dynamique
actuelle des bassins versants exoréiques de Koutéré et
Saga Gourou et est liée surtout à l'anthropisation de ces milieux
riverains de Niamey. Mais le constat de la dynamique érosive est plus
accusé sur ces bassins versants. Dans le bassin versant exoréique
du Kori de Ouallam, MOUSSA (2005) présente une situation similaire.
Malgré la fonctionnalité saisonnière de ce kori, il
connaît une dynamique hydro-géomorphologique très
dégradante et fortement anthropique. Mais même si
l'homme demeure l'acteur principal de la dynamique tant
hydro-érosive que globale au Sahel en général, il ne faut
pas aussi négliger les influences directes et indirectes de la
variabilité climatique observée au Sahel. Il est
nécessaire de voir les influences directes et indirectes du changement
climatique à travers les impacts de ses manifestations
(réchauffement de la planète, baisse de la pluviométrie
etc.) sur les facteurs de la dynamique érosive globale des milieux
sahéliens, car c'est au Sahel que se situe le plus fort signal du
changement climatique.
A ce niveau et comme l' a dit AMANI (communications
séminaire AMMA du 28 octobre 2005), dans l'explication de la dynamique
actuelle, les changements d'usage des sols expliquent bien l'évolution
récente des bassins versants sahéliens, la dynamique
hydrologique, les évolutions hydrogémorphologiques,
hydrogéologiques et même socio-économiques. Mais
l'influence de la péjoration climatique est nécessaire surtout
dans l'explication de la variabilité pluviométrique, sa
répartition spatiale et temporelle voire aussi son importance. A ce
titre l'on peut se poser les quelques questions suivantes:
-Le prolongement du stress hydrique (plus de dix jours)
à l'échelle de la saison, n'est -il pas un frein important au
développement du couvert végétal (surtout des
herbacées) dans ces milieux sahéliens?
-Quelles seraient les conséquences hydrologiques des
débuts de plus en plus précoces des saisons de pluies
sahéliennes observées ces dernières années (mois
d'avril et mai) et surtout que c'est cette période qui semble
enregistrer les forts événements pluvieux deux dernières
années?
-Quelles seraient aussi les conséquences des prolongements
ou multiplication des stress hydriques généralement
caractéristiques de la saison des pluies au Sahel.
4. 2-Perspectives de recherche et questionnements sur les
stratégies adaptatives d'aménagement dans la zone du
Fakara
4. 2. 1-Amélioration de l'approche
méthodologique de l'étude -Cartographie du réseau de
ravines
Il serait intéressant à ce niveau de continuer
l'inventaire régulier des ravines, l'on peut apprécier
l'évolution à l'échelle de la saison, et de plusieurs
années. En superposant cette cartographie annuelle des ravines, l'on
peut définir les zones d'évolution rapide des ravines.
-Suivi de l'évolution régressive des
ravines et élaboration de leurs profils transversaux
L'utilisation régulière du dispositif
<<peigne>> au niveau des secteurs des ravines bien localisés
va nous fournir des informations plus fiables sur les phases de
stabilité, comblement ou ablation des ravines étudiées.
-Cubage des formes de dépôts
importants
Pour améliorer ces sondages, il nous faut
nécessairement effectuer des sondages de ces zones de
dépôts si possible avant et après la saison des pluies.
Cela permettrait de voir la variabilité des dépôts à
l'échelle annuelle. Et pour la fiabilité des données de
ces cubages, nous devrons en plus du critère de distinction des niveaux
anciens ou argileux, cuber ces zones de dépôt avec une maille
dense de points d'application de tarière) ou coupler cette
méthode avec celle de nivellement (à partir d'un niveau de
référence bien défini et suffisamment
distingué).
-Mesures des débits liquides et solides dans
les bassins versants étudiés
Il est intéressant de faire des
prélèvements à l'échelle de la saison en
choisissant une station pour mieux avoir une série de données
pour la station et à l'échelle de la saison ou de deux pour
plusieurs saisons. Il est indispensable aussi de continuer l'analyse
granulométrique des sédiments calculés pour établir
une typologie des particules transportées selon les débits
liquides. L'on doit surtout privilégier des prélèvements
aux stations aval (à l'exutoire du bassin), afin de mieux
apprécier les comportements spécifiques des bassins versants
étudiés et si possible comparer les données entre les
bassins versants étudiés à l'image des travaux de
KARAMBIRI H. (2003).
-Observations hydrologiques et entretiens des
personnes -ressources
Il serait important de faire une enquête hydrologique
à l'échelle de quelques terroirs voir de l'ensemble du Fakara.
L'étude historique des mares, koris et ravines serait importante dans la
compréhension de la dynamique érosive. La datation orale à
partir d'entretiens doit être prise avec modération sinon il est
plus efficace de dater par exemple les cônes de déjection ou la
naissance des mares et autres zones de dépôts avec recours aux
datations des poteries et morceaux de charbons au Carbone 14. Cette datation
une fois couplée aux résultats des enquêtes et entretiens
permettront de fixer de façon plus précise les dates de formation
de ces unités hydrogéomorphologiques.
4.2. 2-Perspectives de recherche et recommandations
stratégiques d'aménagement
-Compléter l'approche méthodologique de
l'étude
Le travail d'un mémoire ou d'une thèse n'est
jamais fini, après ces deux années d'observations nous nous
retrouvons avec plus de questionnements et d'hypothèses nouvelles.
Certes deux années d'observations ne nous permettent pas de produire des
conclusions générales sur notre thème de recherche
(étude des risques d'érosion), mais des résultats partiels
et dont la validité scientifique nécessiterait plus
d'observations à long terme. En plus il y a la nécessité
de trouver d'autres informations pour pouvoir compléter les explications
complexes: données pédologiques (granulométrie des
formations superficielles) et hydrodynamisme des état de surface) des
bassins étudiés. Par exemple dans l'analyse de cette dynamique
dégradante l'on ne peut tout attribuer à l'eau ! est -il possible
de faire la part des choses entre les agents d'érosion: eau et vent dans
la dynamique sédimentaire des zones de dépôt sableux par
exemple? Des études sur des sites, mais à différentes
échelles spatio-temporelles doivent être entreprises afin de mieux
produire des données et informations permettant de
généraliser les résultats de la dynamique
hydro-érosive des bas - fonds au Niger. Il faut étudier et
quantifier tous les axes et processus moteurs de la dynamique actuelle de ces
bas-fonds. Cela ne serait possible qu' à travers des études
typologiques et l'établissement d'une base de données sur les bas
-fonds à travers le développement d'un SIG fonctionnel sur les
bas-fonds et les milieux humides au Niger et intégrant tous les facteurs
de la dynamique actuelle dans leur complexité. Nous pensons que l'on
peut aborder cette dynamique des milieux sahéliens dans leur
complexité. Ainsi des études à l'image de celle
réalisée par Visser (2004) peuvent être reproduite dans le
Fakara par exemple. Il ne faudrait surtout négliger des études
sur la variabilité des facteurs anthropiques et enjeux
socio-économiques dans l'utilisation des ressources naturelles (cas de
l'étude effectuée par M. LOIREAU 1998 par exemple dans la partie
centrale Est du degré carré). Ces études, une fois
couplées à celle de la dynamique érosive
générale seront un complément nécessaire à
la production des modèles performants et fonctionnels. Les
modèles de la dynamique globale serviront surtout à mieux
évaluer les risques, enjeux et dangers de l'érosion sur toutes
ses formes. Ils permettront de comprendre et caractériser les processus
généraux de la
dynamique globale. Car à travers ce mémoire,
nous pensons contribuer sur un des aspects de la dynamique érosive au
Sahel. De cette analyse de l'évolution actuelle des bassins du Fakara,
l'on risque d'atteindre d'ici peu un degré
d'irréversibilité très menaçant pour les acteurs
locaux. La généralisation des phénomènes de
ravinement, suivi de mobilisation renforcée de matériaux
aboutirait au développement des secteurs de bad-lands et à un
rapide comblement des mares et vallées importantes. Cela aura comme
conséquence l'accentuation du niveau de pauvreté et la
éclatement du tissu socioculturel des populations rurales d'où
crise sociale, économique voire politique et culturelle. Et comme l'a
dit MOHAMMED, & MOHAMMED (2004), pour mieux appréhender ce
phénomène d'envasement ou d'ensablement des barrages, retenues et
cours d'eau en général, il s'impose de proposer des
modèles liant les débits solides aux débits liquides
à différentes échelles temporelles. L'effort de
quantification des processus doit être développé surtout
pour le transport solide à l'échelle des cours d'eau et ravine.
Car le manque de données sur les transports solides dans les cours d'eau
au Niger est un sérieux handicap. L'estimation des taux de
sédimentation des retenues de barrages ou de mares, leur durée de
vie nécessitent une bonne connaissance des apports solides (MOHAMMED,
MOHAMMED 2004). Pour les bassins versants du Fakara, un effort de suivi
régulier des bas-fonds permettra de mieux saisir les rôles et
enjeux de la dynamique actuelle des bas-fonds. Cet effort sera beaucoup plus
axé sur la quantification des phénomènes tant hydriques,
humains et surtout éoliens. D'autre part l'étude des
phénomènes éoliens s'avère primordiale car
l'éolien fournit des flux de matériaux aux bassins versants et
modèle certaines unités des paysages. Par exemple les fonds des
ravines constituent d'importantes zones de dépôts et de
départ de matériaux sablo-limoneux. En fait s'agissant de la
présente étude, nous souhaitons renforcer les capacités
d'analyses et de suivi régulier, par exemple coupler les études
de l'érosion par les méthodes de parcelles à la
présente étude (échelle du bassin versant et de la ravine)
pour mieux appréhender les différents changements de variables
topographiques, lithologiques, hydrologiques et humains et d'échelle.
C'est à dire développer une étude de l'érosion
spécifique par des méthodes et techniques finement
définies et à travers différentes échelles
spatio-temporelles. Pouvoir si possible spécifier la
dynamique des bassins versants et aussi changer et comparer les
échelles d'études.
CHINEN (1999) a étudié les bassins versants
exoréiques de Kourtéré (230 km2) et Saga Gourou (54 km2)
Leur écoulement atteint le fleuve Niger. Ils sont situés aussi
dans le degré carré de Niamey (13°30'N et 2°00'E). Il
en fait les conclusions suivantes: malgré la baisse de la
pluviométrie dans la région (depuis 1960), le ravinement
s'accentue de plus en plus. Il observe une très forte occupation des
sols. Les pertes de terres fertiles se généralisent par l
`érosion. La sédimentation est très marquée par
d'importantes masses de terres arrachées et déposées le
long des deux vallées, dans les champs des dits bassins versants et
surtout drainées directement dans le fleuve Niger. Il montre aussi que
l'origine du ravinement est surtout liée aux déboisements
causés par le besoins en bois de la ville de Niamey surtout et par la
péjoration du climat. Cette évolution morphodynamique de ces
bassins versants de Kourtéré et Saga Gourou, riverains du fleuve
Niger est presque similaire à celle que nous étudions sur le
Fakara. De par les processus érosifs qui commandent la dynamique
actuelle, on observe la même tendance d'évolution:
généralisation du ravinement et pertes en terres, ensablement
des bas-fonds. Cette similitude des résultats doit interpeller tous les
acteurs car à court terme, on risque au cas où rien n'est
envisagé d'assister à une situation de catastrophe
<<éco-sociologique >>. Cette catastrophe risque de poser de
sérieux problèmes de pertes de terres agricoles par ravinement et
ensablement, de forte baisse des rendements agro-pastoraux. Mais surtout
l'ensablement des cours d'eau devient de plus en plus un danger: cas du fleuve
Niger, des mares et autres points d'eau importants. La ressource eau de surface
risque de se raréfier, tout comme la faune aquatique, les sols
humides.
Les sources de revenus seront de plus en plus réduites
d'où les crises multidimensionnelles car toutes les activités
socio-économiques (agricultureélevage - pêche
-artisanat-tourisme etc.) vont connaître à nouveau des impacts
néfastes de la dynamique hydro-érosive actuelle et
dégradante des milieux sahéliens. Cependant il faut rappeler que
cette dynamique hydro-érosive récente est partie
intégrante de la dynamique globale de ces milieux sahéliens du
Fakara. En effet les deux dynamiques sont très liées et sont
systémiques. Car à titre d'exemple, la progression rapide de la
mise en valeur des terres a entraîné le développement des
surfaces nues très ruisselantes. Le déboisement aussi des
versants est la cause directe de l'encroûtement. Et puis
le développement des plages nues des versants du Fakara a
entraîné l'augmentation du ruissellement linéaire dans les
ravines. Le développement des ravines est aussi un des facteurs de la
recharge et hausse de la nappe (infiltration par les fonds des ravines et mares
qui se multiplient aussi) Cependant l'on peut encore chercher à
comprendre comme perspectives de recherche, l'impact récent et à
moyen terme de la hausse de la nappe en milieux endoréiques du
degré carré. On peut voir s'il existe d'effets ou impacts inverse
de la hausse de la nappe (au cas où la tendance actuelle se maintienne)
sur le ruissellement, les comportements de certains végétaux, ou
sur les propriétés hydrodynamiques des sols du Fakara ? Que se
passerait-il une fois que les paysans des milieux endoréiques du Fakara
auront bien perçu la remontée de la nappe et comment
pourraient-ils en tirer profits? D'autres difficultés résident
surtout dans le niveau de pauvreté des populations sahéliennes et
les problèmes de mobilisation des ressources et des moyens à
mettre en oeuvre pour renverser les tendances d'évolution de ces milieux
du Fakara. Mais il serait illusoire de penser à reboiser le Fakara au vu
de la dynamique démographique galopante.
Mais dans ce contexte d'accès difficile à la
ressource eau, de pauvreté du Fakara: -Faut-il chercher à
renverser la tendance actuelle (augmentation du ruissellement) ?
-Ou tirer meilleur profit de la hausse de la nappe
phréatique à travers des stratégies adaptatives nouvelles
(utilisation des pompes solaires ou éoliennes par exemple) ?
Nous pensons qu'il est nécessaire de changer de
comportements paysans, et pratiques agro-pastorales. Ce changement de
comportement ne serait possible qu'à travers une nouvelle reforme
socio-culturelle et éducative. Cette reforme socio-éducative
prendrait en compte les aspects écologiques de la fragilité
environnementale sahélienne. C'est à dire sur la base de
sensibilisation, d'informations d'éducation de base à
l'école et à toutes les échelles, amener les populations
rurales et urbaines vers un respect plus conséquent de l'environnement
végétal surtout. A titre d'exemple, nous pensons que les casernes
militaires peuvent s'adapter mieux à l'utilisation du charbon
(alternative du charbon de Chirozérine, foyers ou fourneaux
améliorés et gaz subventionné) qu'au bois coupé des
brousses tigrées du Fakara. Et voire aussi à moyen terme,
l'utilisation plus généralisée tant dans
les foyers de la ville de Niamey, et à long terme dans ceux du Fakara.
Pour renverser véritablement cette tendance, nous pensons qu'une
approche systémique et intégrée est indispensable. Et
cette approche systémique n'est autre que la réduction des
niveaux de pauvreté. Par exemple pour pouvoir généraliser
l'utilisation du charbon par les foyers nigériens, la question
principale serait: à quel prix? BOUBE (2005 à paraître)
pose la difficulté des approches d'aménagement surtout les
problèmes de choix d'échelles et de démarches
d'aménagement. Ce pendant il est surtout primordial de définir
les rôles des différents acteurs qui sont en jeu:
Etat-Commune-Bailleurs de fondsociété civile et l'acteur
principal qu'est le paysan en amont comme en aval des réalisations
d'aménagements.
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