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La scène alternative de Poitiers

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par Maxime Vallée
Université de Poitiers - UFR Sciences Humaines et Arts - Master 1 Civilisation Histoire et Patrimoine 2011
  

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Annexes

Entretien avec Gilles Benèche et Marie Bourgoin #177; La Fanzinothèque de Poitiers #177; 31 janvier 2011

Pour commencer, est-ce que vous pourriez me donner votre définition d'un fanzine ?

Marie Bourgoin: Un fanzine, c'est une revue amateur. Ca n'a pas changé, le sens n'a pas changé, mrme si maintenant c'est plus classe, parce qu'il y'a plus de facilité pour accéder à une imprimante, la couleur et tout, mais ça reste et ça restera toujours une revue amateur, faite par des amateurs pour des amateurs. C'est vraiment la définition de fan. C'est pour ça qu'on n'appelle pas un fanzine un truc qui est très généraliste, qui va parler de je ne sais pas moi... de la société en général. Normalement, il y'a quand mrme dans la notion de fanzine, la notion de fan. On est fan de musique, classiquement de musique, de BD... Principalement, parce que notre fond c'est quand mrme musique/BD, en gros. Donc voilà, la définition, je ne pense pas qu'elle ait évolué.

Donc il y a quand mme une différence notoire entre ce qu'on appelle la presse alternative et la presse traditionnelle ?

MB : La différence, c'est évidemment que la presse traditionnelle, c'est quelque chose de commercial, avec des salariés... Ca peut aussi parler de choses très intéressantes, hein, ça n'empêche pas, « Auto-Moto Magazine », (sourire) ce genre de brtises... Mais voilà, le truc c'est que les amateurs, enfin un fanzine, c'est fait par des amateurs qui ne sont pas payés pour ça, ce qui te donne une grande liberté de ton, parce que tu n'es pas soumis aux impératifs commerciaux etc.

Gilles Benèche: Et puis ça reste des petits tirages, ce qui n'est pas possible dans la presse nationale.

Comment est-on passé concrètement de la décision du Conseil Communal des Jeunes de créer un lieu pour stocker la presse lycéenne de l'époque, à la création effective de la Fanzinothèque ?

MB : Effectivement la Fanzino avait été conçue par le CCJ. Ça aurait du être un truc de presse lycéenne : ça correspondait avec le festival < Scoop En Stock ». Leur idée à eux, c'était de récupérer plutôt ce genre de journaux lycéens. Et en fait, comme Didier était déjà disquaire, il avait déjà des fanzines dans la cour, là-bas ou il y'a Lionel [à l'emplacement de l'actuelle boutique < Transat », anciennement < la Nuit Noire », nda], on a dévié assez facilement sur les rockzines, et puis c'était en pleine explosion, il y'en avait plein, c'était vraiment la période d'or. Et puis, il se trouve que la ville n'a pas tiqué plus que ça, enfin elle n'est pas venue voir non plus ce qui se passait dans les contenus, donc liberté quoi. On a dévié un peu sur le rock.

Alors justement, quels ont été les rapports entretenus avec les institutions telles que la Mairie ou la DRAC ?

MB : La DRAC, dans les premières années, je pense qu'on n'était pas trop... Je pense qu'on était beaucoup, beaucoup plus alternatifs, dans le sens o on se débrouillait tous seuls, je pense. Voilà, dans le Do It Yourself, avec des petits concerts, donc on se débrouillait tous seuls. Je ne pense pas, enfin, dès le début de toute façon, il y'a eu un salarié, embauché par la ville donc le directeur, il rendait compte a la ville de ses activités. Bon il y'a eu une seule personne pendant quatre ans, après il y'a Gilou qui est arrivé. Je crois qu'on ne demandait pas trop trop de sous, et puis on n'était pas trop embrtant. C'était un peu la politique de Didier.

Et donc quel est le fonctionnement de la Fanzinothèque ? Il y a une association qui gère et des employés ? Quels sont les rapports qu'ils entretiennent ?

GB : Il y'a une association avec un C.A., avec des adhérents qui viennent emprunter. Le C.A. a un bureau et après il y'a cinq salariés.

Que pensez-vous de la place que Poitiers a prise dans le monde du fanzine (avec l'organisation de Scoop En Stock, la Fanzino...) ?

GB : Il y'a la Fanzino qui est a Poitiers, donc... oui elle a une place. Après je pense qu'il y a eu « Scoop en stock » quoi, toute la presse jeune.

MB : Oui et puis il y a eu des fanzines depuis vachement longtemps sur Poitiers. Tant Qu'Il Y Aura Du Rock, des gens qui ont commencé à 13 ans... Et puis il y'avait le Confort Moderne qui a vachement boosté aussi quand mrme, c'était cool d'avoir un truc culturel, alors ça te donne envie de faire un fanzine, de raconter des trucs etc. Après il y'avait un peu la radio : en 81/82, ça commençait plus par la radio, et puis, je ne sais pas, il y'avait des gens qui écrivaient depuis super longtemps. Pourquoi ? Ça je ne saurais pas te dire.

Comment expliquer qu'il n'y a qu'à Poitiers qu'une telle structure existe, et que ce ne soit pas le cas dans certaines villes ayant été motrices dans le mouvement alternatif comme Paris, mais aussi Rouen, Le Havre, Montpellier... ?

MB : C'est simplement une volonté municipale. Parce qu'il y'a eu des tas de gens qui ont créé des Fanzinothèques, des coins... des choses... Seulement, ça a toujours fonctionné sur du bénévolat. Forcément au bout d'un moment, les gens ils s'épuisent, ils cherchent du travail, ils s'en vont et puis voilà, les choses se plantent quoi. Et ici, c'est pourquoi ça dure depuis vingt ans, c'est parce qu'il y'a des salariés. Avec une subvention assez importante pour faire des actions. Sinon, sinon malheureusement, ça ne peut pas tenir. Enfin le bénévolat, si tu n'as pas une volonté derrière, politique, et des moyens, c'est pas du tout facile, hein. Ça s'explique par ça moi je pense. Simplement que la ville euh... je sais que Mireille Barriet avait défendu la culture crade contre la culture clean. C'est une prise de position assez courageuse et pas si fréquente que ça. On a une ville de gauche... Ça joue.

La Fanzinothèque vient donc contrecarrer le caractère éphémère du fanzine.

MB : Alors, Didier sur le coup, ce n'est pas lui qui a créé le mot « Fanzinothèque », ça doit venir du CCJ. Ca semblait totalement une hérésie de

mettre ce mot « fanzino » et « thèque a». Oui, c'est paradoxal quoi. Et, oui pour des trucs éphémères, underground, cachés, d'un seul coup les révéler comme ça au grand jour, bref c'était un peu bizarre. Mais bon, on s'y est habitué.

Alors justement, Didier Bourgoin indique lors de la création de la Fanzinothèque vouloir « faire connaître la culture zine » : comment la définiriez-vous ?

MB : Effectivement, on appellerait ça, moi j'appellerais ça « culture populaire ». Parce que vraiment c'est des gens de la base, ce ne sont pas des professionnels, qui s'expriment, qui veulent soutenir une scène. Parce que je pense que le fanzinat, c'est quelque chose de local. Même si tu parles de concerts qui se passent partout en France, ou New York et tout, c'est souvent le désir de soutenir une scène, ou des artistes de proximité, qui sont dessinateurs, ou des implications politiques sur le terrain. C'est souvent assez comme ça, tu vois ? Ça part d'un groupe de copains, ça part vraiment du terrain. Donc moi j'appellerais plus ça des cultures populaires. C'est underground et puis effectivement si, maintenant, si tu veux chercher les prémices d'un groupe de rock, les premières interviews du truc, ce sera dans les fanzines. C'est moins vrai maintenant avec internet, qui permet a tout le monde de diffuser à toute vitesse n'importe quoi : un groupe qui a fait un morceau : hop ! on le retrouve sur internet. Mais il y'a 20 ans, il y'avait que les fanzines qui parlaient... je sais pas les Thugs, des tas de groupes... Les fanzines en parlent, les fanzines en parlent et puis après la grande presse s'en empare, mais après. C'est vraiment un travail de défricheurs quoi.

On a vu certains fanzines approchés par des labels, voyant en eux un moyen peu onéreux de promouvoir leurs artistes, ou par des magazines spécialisés, d'autant plus que les rédacteurs avaient parfois besoin d'argent pour pérenniser leur rédaction. Est-ce que la Fanzinothèque a été approchée par l'industrie du disque ou des médias plus importants à des fins lucratives ?

MB : Il y'a eu plein de newsletters qu'ont fait les labels. Il y'avait le label News, il y'avait Tripsichord, je ne sais plus quoi. Enfin en plus, c'était la mode, déjà parce

que oui, il n'y avait pas internet, c'est toujours pareil, si tu voulais communiquer, il n'y avait pas mieux que la newsletter. Ça coute pas cher, tu en mets partout, tu en envoies... Et voilà on a eu plein de labels qui nous ont appelé, nous appelaient pour avoir des listes de fanzines pour faire leur promo. Nous on faisait des listings avec le genre musical : « c'est un label de ska ? » Hé bien comme ça, paf ! On a fait ça vachement longtemps. Maintenant, ça n'existe plus, puisque tout se fait par internet. Mais oui, on avait vachement...D'ailleurs, les labels étaient assez souvent désagréables, parce qu'ils disaient « ouais il faut les listes tout de suite », enfin comme si on était à leurs ordres, comme ça peut fonctionner. Enfin nous, on a toujours filé les infos qu'ils voulaient, parce que c'est aussi une manière de favoriser, malgré tout, la reconnaissance du fanzinat, peu importent les moyens.

Alors que ce soit label type petits indépendants ou mme des gros... ?

MB : Oui, enfin, on est toujours resté dans les labels euh... de rock quand même. Tripsichord, c'était quand mrme des petits labels hein... Et puis rock, hardcore, machin... On n'a jamais bossé avec Virgin euh... enfin ce n'est pas qu'ils nous demandaient pas des trucs, mais... Qu'est ce qu'il y'a d'autre comme gros label ? Sony etc. ils ont d'autres ... Eux ils sont à un autre niveau, hein.

Alors au niveau de la sélection de ce que vous diffusez, est ce que vous consultez de manière un peu draconienne les contenus pour pouvoir sélectionner, ou est-ce que ce que vous choisissez de diffuser doit avoir une ligne éditoriale spécifique ?

MB : On ne peut pas. Parce que si tu veux, les fanzines, déjà c'est une presse des débuts et des fois, tu as des trucs qui ne sont vraiment pas biens du tout. Et puis tu vas retrouver cinq ou dix ans après, je te jure qu'il y'a des dessinateurs, ils ont la honte. Ils veulent surtout pas retrouver leurs premiers trucs, donc voilà... On ne peut pas faire ce tri là, sinon on enlève 80% de ce qu'il y'a ici quoi. On m'a déjà posé cette question en parlant des prozines et tout ça. J'ai dit « mais attends il faut bien qu'ils commencent les fanzines a». Au début tu reconnais, ça n'est pas terrible. Donc

nous on accepte tout, sauf les trucs fachos, voilà. C'est le seul truc, on n'est pas dans ce réseau là, quoi. En mrme temps, on n'est pas tellement contactés (sourire).

Avez-vous, avant ou pendant la Fanzinothèque, mais indépendamment de votre activité en son sein, tenu votre propre fanzine ?

MB : Oui...

Est-ce que ça a influé sur votre façon de tenir la Fanzino ?

MB : Oui, parce qu'on faisait des fanzines avant que la Fanzino existe, on avait déjà tout un réseau : on correspondait, par courrier a l'époque, on se baladait dans la France, on connaissait déjà le réseau des fanzines... Donc après, on a fonctionné exactement de la mrme manière. C'est quand un réseau, un petit réseau d'amis en général, donc des gens qui ont des affinités, on a continué tout pareil quoi. C'est pour ça que c'est bien passé d'ailleurs auprès des fanzines. Parce que ça pouvait ~tre, ça aurait pu être perçu comme un truc institutionnel, et puis non pas du tout.

L'idée qui prédomine au niveau national, c'est celle d'un vrai réseau, d'une toile qui constitue le mouvement alternatif. À l'échelle de Poitiers, est-ce qu'on retrouve un réseau qui lie les différentes structures alternatives ?

MB : Oui, et puis c'est un peu... Dans toutes les villes, il y'a le fanzine, l'émission de radio, l'association de concerts, les groupes... Qu'est ce qu'il y'a d'autres ? Les dessinateurs. Enfin dans toutes les villes, je pense que dans toutes les villes, ça a été le mrme truc. Et puis c'est une culture de génération. Les gens entre seize et vingt-deux/vingt-trois ans qui se retrouvaient ensemble à faire la fête, enfin, voilà, surtout dans des villes moyennes comme Poitiers, c'était assez soudé quand mrme. Après sur les vingt ans, il y'a des périodes différentes mais... C'est vrai que c'est un réseau quoi.

Pensez-vous que l'Oreille est Hardie et le Confort Moderne, qui ont été précurseurs dans la promotion et la diffusion de la culture alternative aient provoqué une certaine émulation à Poitiers qui a poussé des gens à créer des groupes, des associations, ou cela venait-il d'ailleurs (contexte, relations avec la mairie comme vous l'avez dit...) ?

MB : Euh, je ne sais pas, parce que le Confort Moderne c'était quand mrme, enfin le Confort, L'oreille est hardie, c'était quand mrme des trucs plus jazz, expérimental, et ce n'était pas du tout un truc de punks. Et nous on faisait des concerts à part, parce que ce qu'ils faisaient ce n'était pas ce qu'on voulait voir. C'était bien, mais ce n'était pas suffisant.

GB : Oh il y'en avait quand mrme, on participait, mrme si ce n'était pas le mouvement alternatif, indépendant...

MB : Ce n'était pas trop leur trip ça. Mais bon Sonic Youth... ils ont été précurseurs c'est vrai. Il y'a plein de gens à Poitiers qui ont fait des groupes, ou des fanzines «... à cause de ça, qui se sont pris des super claques ici. Plein de concerts, ça a vachement porté, parce que, ça on l'a toujours dit, mais les fanzines, ils arrivent après la musique. C'est dans cet ordre là hein, ce ne sont pas les fanzines qui sont précurseurs. Et il y'a des gens qui ont pris, qui se sont mangés des super claques ici en concert, ça les a « boum », vachement motivés quoi.

Est-ce que la Fanzino a eu ce même impact, qui a poussé des gens à créer leur fanzine ?

MB : Non je n'ai pas connaissance que la Fanzino ait... Je crois que ça existait déjà les fanzines à Poitiers, il y'en avait. Mais est ce que la Fanzino était directement euh... ?

GB : Oh oui. Oui ça arrivait oui. C'est arrivé qu'ils fassent un fanzine à Angoulême après avoir fait un atelier, une initiation à la sérigraphie. Après ils avaient fait la raclette... Après sur Poitiers, oui, ça a pu contribuer à certains fanzines. Forcément ils sont passés par là. Pour une aide quelconque, des fanzines qui sont venus ici, faire leurs photocopies ici.

Vous venez de dire que le fanzine suivait la musique, et justement en 1989, l'idée est que le mouvement s'essouffle : est-ce que cette soi-disant fin a eu une incidence sur le monde du fanzine, qui n'avait plus vocation à relayer d'infos sur cette scène ?

MB : Peut être que les fanzines rock indépendant se sont arr~tés. Et puis il y'a eu d'autres mouvement musicaux qui sont arrivés, plus excitants, comme la techno, je ne sais pas moi, le rap, tout ça. Et donc ils se sont tournés vers autre chose. C'est vrai que le rock indépendant en 1989, c'est presqu'une insulte. (sourire).

GB : Oui il n'y en a plus tant eu, autant. Enfin moins de musicaux, parce que ça s'est calmé avec l'arrivée d'internet, sinon il y'en avait autant.

Mais le fanzinat a plus été rattaché au mouvement dit « rock », que « rap » par exemple ?

GB : Ah oui ! Parce que c'est arrivé avec ça. En fait avant, c'est avant ça qu'il y'en avait pas beaucoup. Donc c'est arrivé avec ça, mais après, il en est resté autant...

MB : Oui et puis, classiquement, la culture hip-hop et la culture techno, ce n'est pas du tout du papier hein. C'est forcément... c'est numérique, donc très peu... Il y'en a eu un petit peu au début des fanzines techno, ou hip hop, mais très peu, quoi.

Pour parler de la nature même du fanzine, est ce que la Fanzinothèque serait plus une bibliothèque ou un musée, si on devait la mettre dans une case ?

MB : Bibliothèque normalement... une bibliothèque, c'est quelque chose d'encyclopédique. Voilà, donc on n'est pas une bibliothèque, c'est clair. Si tu veux venir chercher quelque chose sur les sciences humaines, ou sur l'histoire, ou si tu cherches un bouquin sur Clemenceau, il ne sera pas là quoi. C'est un centre de documentation. Ça veut dire que c'est un truc spécialisé. Alors on fait fonction de bibliothèque parce que les adhérents peuvent emprunter, cet aspect là comptera, mais c'est plutôt un centre de documentation quoi, qu'une bibliothèque.

Pour la dimension de musée, j'entendais le caractère unique d'un fanzine. GB : Oui tu as des pièces uniques, oui.

Le caractère esthétique joue beaucoup.

MB : Mais on ne peut pas dire musée, parce que ça veut dire quelque chose qui est figé, qui est fini. Mais c'est un peu l'idée quand mrme. Enfin c'est un fonds d'archives, on essaie de conserver des documents qui auraient complètement disparu, d'en avoir un maximum ici.

Le fait de recevoir des productions de toute la France et même d'ailleurs vous a-t-il permis d'être associés à des manifestations à l'extérieur de Poitiers ?

GB : Oh oui, régulièrement.

MB : Des festivals de musique, des festivals de BD, on a fait des stands, voilà. Surtout au début oil la Fanzino n'était pas connue, oil il fallait absolument bouger de là, sinon... enfin : « qu'est ce que c'est que ce truc ? » C'est vrai qu'au début on a pas mal bougé.

Le mouvement alternatif mêlait largement politique et culture, j'imagine qu'on le retrouve beaucoup au sein des fanzines également ?

MB : Les fanzines sont classiquement de gauche, voire d'extr~me gauche.

GB : Pas forcément dans la BD, mais bon tout ce qui touche à la musique, oui.

MB : C'est quand mrme ce qu'on appelle une contre-culture hein, c'est quand mrme l'idée. Un petit peu anarchiste, etc... Après c'est aussi beaucoup de choses qui sont des naïvetés parce que c'est aussi des gens qui écrivent, qui ont dix-huit ans, qui sont dans le genre « aaah ! A bas le capitalisme, tatata », des trucs, un peu caricaturaux quoi. Donc c'est bien, ils s'expriment !

Et vis-à-vis de cela, vous n'avez jamais eu de problèmes avec la mairie, ou d'autres partenaires, quant à des propos qui auraient pu être tenus dans certains fanzines ?

MB : Il y'a bien l'histoire de « Canicule a» mais c'est bien le seul truc ... Et puis d'abord la mairie ne venait pas ici, voir ce qu'il y'avait dans les fanzines. Mais bon ils savaient ce que c'était. Ils savaient bien que dedans, il y'avait des tas de gros mots, et des filles nues et bon, ils savaient quand même grosso modo ce que c'était. S'ils avaient du venir lire les contenus, euh je crois que la Fanzinothèque aurait du fermer direct. Ça c'est clair. Après oui, il y'a eu cette histoire de Canicule, bon, une censure établie par le maire, enfin le maire a porté plainte contre euh ?

GB : Contre le journal qui a dû arr~ter après, parce qu'il pouvait plus...

MB : Interdit de publicité dans les kiosques, et donc c'est vrai que, parce qu'il y'avait dedans euh « jeune maastrichien... »

GB : Non c'était un numéro « spécial drogue ».

MB : Spécial drogue. Et ça, c'est quand on était à l'extérieur, on était au Local, et c'était un truc du CCJ d'ailleurs...

GB : Oui.

MB : Oui, et donc il y'avait plein d'élus qui sont venus feuilleter et puis là... Sinon ici, ils ne sont pas venus éplucher nos trucs. Après je vois, quand je propose des trucs à la médiathèque, je regarde bien qu'il y ait pas une paire de seins qui se balade ou des propos trop...

Oui donc c'est quand mme...

MB : Oui mais la médiathèque, c'est pour tout public alors bon. Sinon ils nous embrtent pas ici, dans nos murs, on n'est pas emb~tés sur les contenus, c'est sûr.

GB : Ca pourrait arriver hein, on reçoit régulièrement des visites d'écoles, ou quoi...

MB : En général, on interdit aux gamins d'aller là-bas, parce que c'est toujours làbas qu'ils se précipitent évidemment, mais ce n'est pas trop pour les enfants.

Entretien avec Gil Delisse - On a faim ! - 7 mars 2011

Alors pour commencer, explique-moi d'où vient le label On a faim !

Gil Delisse : Alors, le label On a faim ! vient du fanzine On a faim !, qui est né en 1984 à Rouen. Pour situer l'année de naissance du fanzine, ça remonte à la grande grève des mineurs britanniques qui a duré un an a peu près, donc il y avait plein d'actions, de concerts, de trucs, et sur la région rouennaise justement, Jean-Pierre Levaray, comme il était vraiment investi là-dedans, du même coup il est parti sur un fanzine. Qu'il a arr~té en 2001 ou 2002 je crois.

Donc le label a débuté en 1989, et comment es-tu arrivé dedans ?

GD : Moi j'ai quitté la Région Parisienne, donc je suis arrivé ici en 1990. Moi j'étais déjà investi dans le fanzine depuis le début et puis dans les prémices du label, puisque la toute première compilation qui avait été faite, c'était si je me souviens bien « Cette machine sert à tuer tous les fascistes a», ou non c'est « A bas toutes les armées », qui remonte encore avant, quand on était avec VISA. Ça, ça se faisait à moitié à Paris, à moitié à Poitiers, donc j'étais déjà dans le truc. Donc tout naturellement, j'ai rejoint l'équipe qu'il y avait.

Justement, avec cette idée de coopération avec VISA, est-ce qu'il y'en a eu d'autres et comment ça se passait ?

GD : Après oui il y'en a eu beaucoup. Il y'en a eu avec REFLEXes, forcément, avec le réseau No Pasaran, avec la Réplik (on a coproduit leur disque), avec le comité de soutien aux indiens d'Amérique. Si tu veux, le principe, c'était que pour les compilations à thèmes militants, il y'ait une partie des rentrées qui soient reversées à des associations.

A l'échelle de Poitiers, y'a-t-il eu des coopérations avec des structures locales ?

GD : Sur Poitiers, il y'a eu l'album de Un Dolor qui a été coproduit avec Weird parce que bon justement c'étaient de bons potes. Mais sinon localement je ne m'en rappelle pas. Non parce que c'était surtout au niveau national. Localement, pas de disques etc., non.

Avez-vous pu rencontrer des difficultés particulières au développement du label ?

GD : Non parce que, si tu veux le principe c'était : tout le monde étant bénévole, on n'était pas tenu à produire des trucs qui étaient rentables ou quoi, donc on jonglait en produisant des compilations qui assumeraient suffisamment de rentrées, pour prendre le risque ensuite de sortir des trucs qu'on avait envie de sortir en sachant que commercialement, ça ne marcherait pas forcément. Mais on s'en fichait parce que ça impliquait pas de problèmes ou autre de salaires pour les uns et les autres. Donc quand il y'avait des sous on faisait des choses, et quand il n'y en avait pas, on faisait rien.

En termes de ventes, On a faim!, c'est un label qu'on retrouve facilement en s'intéressant au mouvement alternatif français, et paradoxalement, ces ventes ne correspondent pas forcément à l'audience du label.

GD : Ce n'était pas lié, si tu veux On a faim !, c'est une réputation que... On a tout le temps été, comment expliquer ? Moi c'était une autre conception de l'équipe qui s'est constitué après Luc et les autres. Il faut revenir à l'origine du truc : au départ c'était un label qui a été monté entièrement par des gens qui étaient à la Fédération anarchiste, dont moi j'ai fait partie il y'a une vingtaine d'années aussi. Et tout, que ce soit le fanzine ou le label ensuite, c'était vraiment... Ensuite, moi je n'étais pas du tout pour rattacher un label de disques à une organisation politique, connaissant en plus le milieu libertaire qui est quand même assez compliqué, on voulait faire un truc bien plus simple que ça. C'était à la limite pas tant le discours politique des groupes qui nous intéressait, mais leurs pratiques. Ce qui fait qu'on a

produit et des compilations de fait politiques avec des groupes très militants et engagés, et puis des albums de groupes qui ne sont pas du tout des militants, mais qui par contre au niveau de leurs pratiques, du business, par rapport au public, étaient dix fois plus alternatifs que des gens qui ont des grandes gueules avec marqué « anarchiste a» dessus. C'est plus la démarche des gens qui nous intéressait, ce qui fait qu'On a faim ! au départ produisait essentiellement du punk rock. Après c'est parti tous azimuts, dans le reggae, dans le ska, le blues, le hip hop, tu trouvais des groupes qui avaient des pratiques qui nous convenaient parfaitement, et c'était plus un courant musical, voilà, c'était des gens.

C'est donc comme ça que se faisait le choix des groupes ?

GD : Ce n'est que de l'affinitaire. On n'a quasiment jamais sélectionné un groupe a partir d'une démo. t part sur les compilations, mais c'étaient des groupes qu'on a croisés sur plein d'autres choses que la musique. Le seul groupe qu'on a pris à partir d'une démo, c'était les Kargols. On avait reçu une démo au moment ou on faisait une compil « Ni Jah Ni Maître », mais avant même de mettre le truc on a voulu les rencontrer, et puis là c'était parti.

En termes de pratiques justement, comment ça se passe à Poitiers pour faire un disque, avec la production etc.

GD : Nous, au départ c'était fait à Poitiers. Le master était fait à Poitiers. Surtout les compilations. Il y'avait un studio, je ne sais pas si ça existe encore, et puis après ça s'est fait... Le matériel a évolué aussi, donc les dernières années, tu recevais un truc quasiment terminé. Nous on s'occupait de la pochette, c'était notre graphisme, mais le disque lui-même arrivait, les groupes étaient de Toulouse, ou de Perpignan, ils avaient un studio à

Perpignan, donc on recevait le truc c'était fini quoi. Localement, il y'a eu quelques compilations qui ont été fabriquées vraiment à Poitiers, mais pas tant que ça en fait. Suivant ou étaient les groupes, le disque était fait sur place.

Que penses-tu de la période où tu es arrivé dans le label, c'est à dire au début des années 1990, où l'idée qui prévaut aujourd'hui, c'est que le mouvement est en train de mourir ?

GD : Nous, on ne s'est jamais situé dans le mouvement alternatif. Nous on s'en fichait. Même avant les Bérurier Noir, avant tout ça, parce que mouvement alternatif ça ne veut pas dire grand-chose, c'est une étiquette, concrètement, vendre de la musique dans des petites boites en plastique, si c'est ça l'alternatif, par rapport à d'autres c'est... Nous on n'était pas trop dans ce truc-là, on n'a pas une image d'avoir défendu un truc, on faisait ce qu'on avait envie de faire. Maintenant les critères alternatifs, vu qu'ils étaient posés essentiellement sur Paris, le mouvement alternatif c'est une histoire parisienne beaucoup. On n'était pas trop là-dedans, ce n'était pas une problématique qui nous intéressait de trop. Compte tenu de ce que c'est devenu quoi. Aujourd'hui rock alternatif c'est juste une étiquette de plus dans les bacs a disques à la FNAC.

Au niveau de ce qui était en train de se passer, il y avait quand une autre façon d'envisager la musique, sa diffusion, sa production etc...

GD : On présente toujours le truc comme : tu as eu le mouvement alternatif et puis l'apogée ce serait en 1989 avec la fin des Bérurier Noir, et après il n'y aurait plus rien. Mais c'est complètement faux. Regarde le nombre de groupes qui existaient, le nombre de fanzines qui existaient, et qui continuaient d'ailleurs, surtout ici, ça ne s'est pas arrIté comme ça, à date fixe, je sais plus quand, en novembre 1989, quand Loran [guitariste des Bérurier Noir, nda] a posé sa guitare. Il y a eu plein d'autres trucs après, ça a continué. Alors si tu veux, les Bérurier Noir ont été le moteur, c'est évident. On n'aurait peut-être pas fondé On a faim ! s'il n'y avait pas eu tout ça avant. Mais le fanzine est né plus de la grève des mineurs que du mouvement alternatif musical.

Et est-ce que vous avez justement ressenti la fin d'un moteur, qui aurait influé ?

GD : Moi non en tout cas. Parce que ça continuait, ça n'arr~tait pas. En sous-terrain, ça n'a jamais arrYté. Et ça a mrme été plus vite parce que il y'avait du matériel de plus en plus pratique. Pour un fanzine c'est plus simple aujourd'hui que de le faire à la photocopieuse et a l'agrafeuse.

En parlant de ça, on remarque sur le fanzine le caractère sommaire de l'objet (des feuilles agrafées) du début, alors qu'à la fin, le résultat était beaucoup plus professionnel

GD : C'est justement gr~ce à des logiciels de mise en page.

Et est-ce que ces améliorations se sont retrouvées dans le label ?

GD : Oui. On a appris à s'en servir aussi. Les premières lettres d'information qu'on faisait, c'était à la va-vite forcément, mais oui on avait du matériel beaucoup mieux c'est tout.

A Paris, le mouvement alternatif a beaucoup été lié aux squats, est-ce qu'on retrouve ça à Poitiers ?

GD : C'est plus compliqué que ça. Si tu veux, tu as eu le mouvement autonome dans les années 1970 qui a ouvert les squats. Et dans ces squats, tu as eu les prémices de concerts qui ont commencé à se faire. Et le temps est passé, et vingt ans après, on demandait à des groupes comme les Bérurier Noir de porter, à la limite d'rtre moteur d'un mouvement, alors qu'au départ ce rock venait du mouvement des squats. Après on a fait l'inverse : on demandait à des musiciens de lancer un mouvement social, alors que vingt ans avant, tu avais un mouvement social et des musiciens en sortaient. Il y'a une espèce de boucle et si on compte sur des artistes pour changer le monde t'es pas rendu là (rires). C'est que des haut-parleurs c'est tout.

Quel regard portiez-vous sur les subventions ?

GD : On n'en a jamais demandé. On n'en voulait pas. Le principe c'était : On a faim ! existe parce que les gens y trouvent leur compte, ils achètent des disques, ils achètent des fanzines, et si les gens n'achètent pas, c'est que le truc n'a pas lieu d'itre. C'était ça le principe.

Quelle était la finalité du label : amener les groupes à la reconnaissance ou... ?

GD : La finalité c'était Anarchie et Musique, c'était vraiment ce qui était marqué. Alors anarchie au sens plus large après. J'ai fait partie d'un truc monté par des militants de la Fédération anarchiste, à la fin, il y'avait des copains qui étaient militants au Parti Communiste, il y'en avait qui étaient au Nouveau Parti Anticapitaliste, il y'avait des libertaires ; c'était plus aussi homogène qu'avant. Mais le principe était toujours le même : c'était relier les luttes sociales à la ou les musiques qu'on aime bien, de lier ça sans arr~t. Sans faire du prchi-prêcha non plus, sans, justement, au départ il y'avait un coté un peu #177; même si ce n'était pas voulu ~ c'était quand mrme le truc de la Fédération Anarchiste. C'était un peu ramener des jeunes à la Fédération Anarchiste. Mais nous, après, c'était : « on a des opinions, on les exprime et puis si les gens ne sont pas contents tant pis, si ça leur plait tant mieux », mais voilà c'est tout.

On remarque qu'à Poitiers, on retrouve les composantes d'une scène locale active (labels, fanzines, salle de concerts, disquaire). Est-ce que vous vous êtes servis de tout ça dans le cadre de votre activité ?

GD : Les liens avec la Fanzinothèque allaient de soi. On a faim! c'est un fanzine au départ. Après, la salle, oui, on a fait une fois ou deux fois des concerts en commun avec Weird, parce que Weird avait son local qui était juste en face sur le parking. Donc des groupes des deux labels ont joué deux fois ici puisque il n'y a pas eu de... Sur Poitiers on n'a pas fait... On a fait plus de trucs à Cap Sud, il y'a eu au Local, il y'a eu des concerts la bas, des Kargols par exemple, ça se faisait plus là-bas.

Et les liens avec ces structures, ils étaient affinitaires ? Musicaux ?

GD : Affinitaires, donc ça englobe le reste. Vraiment la base du truc c'est ça. C'est plutôt le fruit de rencontres, de hasards qui ont engendré ou un disque ou un article dans le fanzine.

Ce que je peux te dire d'autre c'est donc que le label a arr~té en mrme temps que le fanzine quasiment, aux alentours de 2000, de la mrme façon que ce qu'on a toujours fait, c'est-à-dire, sans l'annoncer, sur la pointe des pieds. Et rien ne dit qu'un jour ou l'autre quelque chose ne redémarre d'ailleurs. On a arr~té parce qu'on avait tous d'autres activités donc à un moment donné, on a été bouffé par ça. Tous les gens qui étaient dans le truc ont tous maintenant des activités qui font qu'on se voit tout le temps. Il n'y a pas beaucoup de différences entre le moment oil on le faisait et le moment oil on ne le fait pas. Il y'en a qui sont dans la vidéo, dans le dessin, il y'en a un qui continue dans la musique, Jean-Pierre Levaray écrit, Fernando peint... Tout le monde est parti sur d'autres trucs, mais personne n'est parti bosser chez Darty si tu veux.

Ah oui, on n'a pas parlé du distributeur aussi. Donc, avant on était distribué par New Rose, au début. Et puis un jour ils ont dit : « Bon. On arrête de distribuer des petits labels » parce que ce n'est pas rentable du tout, quand ils ont commencé à avoir des problématiques de rentabilité. Un truc ou tu vends 400 disques, ce n'est pas intéressant du tout. Donc ils nous ont virés et on s'est retrouvé sans distributeur. Làdessus, il y'a Mélodie oE Duduche bossait, et il nous a dit : « moi je peux m'en occuper. » Lui il était dans le mileu rock, actuellement il fait un énorme site internet qui s'appelle « vidéorock » je crois. Il met des archives de concerts de 1980 à 1990, entre autres tous les concerts qu'il y'a eu au Fahrenheit à Paris. Donc il a créé le département rock jà l'intérieur de Mélodie et puis en fait, il gérait sa petite cuisine, ce qui nous a permis même de faire des disques assez improbables en distribution nationale. Donc il nous distribuait, Weird, Esan Ozenki (le label de Negu Gorriak) ; et sans vraiment avoir de contrat parce que lui c'est un vrai militant de la musique ce mec là. Donc là, on a eu une distribution beaucoup plus large. Et donc on a pu avoir une distribution nationale, parce qu'il y'avait Duduche qui bossait chez Mélodie.

Sinon, on se serait retrouvé sans distributeur. Du coup, on aurait touché moins de monde aussi. Encore que le gros des ventes, c'est quand mrme ce qui se vendait en vente par correspondance, c'était vraiment énorme. C'est pour ça que j'ai arr~té, parce que tu bosses huit heures par jour et tu n'es pas payé. Tous les jours tu devais emmener des cagettes à la Poste. Ça tournait vraiment bien. C'est pareil, il fallait batailler pour que ce ne soit pas venu trop cher. À l'époque c'était quatre-vingt-dix francs, maximum. Dès que tu pars en distribution, tout le monde fait sa marge, donc tu arrives à 120/130 francs, à l'époque. Alors ce n'est pas possible. Donc Duduche passait son temps à jongler pour se battre a la fois avec sa boite, parce que quand tu vends des disques il faut quand mrme que ça rapporte, et puis de l'autre coté justement faire en sorte que ça rapporte le moins possible à sa boite pour que les prix restent le plus bas possible. On s'amusait bien à cette époque. Et dans l'ensemble ça a été respecté, parce que les disques n'ont jamais été vendus trop chers, même en FNAC etc. on surveillait ça de près.

Ah, vous étiez mame distribués en FNAC ?

GD : Ah oui, en FNAC, dans les Virgin etc. C'est ça qui devenait énorme aussi, c'était un boulot à plein temps, et nous on avait quand mrme d'autres choses à faire. C'est ce qui a permis de faire des compil qui se sont vendues, surtout « Ni Jah Ni Maître a». Là par contre, c'est plus parti sur le fait que ce soit en magasin, ça assurait des rentrées d'argent qui permettaient de financer des disques oE tu savais d'avance que tu allais droit dans le mur.

Entretien avec Luc Bonet #177; On a faim ! #177; 14 janvier 2011

Explique-moi d'où vient le label On a faim!.

Luc Bonet : Alors le label On a faim! c'est la fin des années 80, et il vient du fanzine On a faim!, qui était donc assez connu dans le milieu rock alternatif, et puis dans le milieu anar. Moi j'étais militant anarchiste, j'étais en relation avec Jean-Pierre Levaray, qui était donc l'animateur principal du fanzine et l'idée à cette période là, c'est « tout partait un peu en sucette, donc compliqué, donc l'idée générale, c'était de dire, à la limite comme une maison d'édition, « pourquoi on ne ferait pas un label ? » Pour préserver un certain nombre de choses qui nous semblaient importantes dans le rock alternatif, et puis il y avait une opportunité à Poitiers, c'est qu'on avait des sous, et donc j'ai contacté Jean-Pierre pour lui proposer de faire un label. Il y avait une activité régulière du fanzine, des articles sur la production de la scène mais aussi des cassettes et des disques. Je crois que la compilation « Cette machine sert à tuer tous les fascistes » était déjà sortie. Et puis il y'avait des groupes qui étaient un peu soutenus par le fanzine donc il y'avait un vivier. L'idée c'était de faire quelque chose de très modeste mais continuer à faire des compilations de manière un peu régulière. La compilation sur des sujets politiques avaient deux aspects intéressants : c'était que d'un coté on parlait politique, donc d'un certain milieu, et d'autre part, une compilation ça voulait dire qu'on contactait les groupes et donc qu'on mouillait un peu les groupes dans une démarche politique. Et puis ensuite, il y'a des groupes qui font des choses intéressantes, qui ne trouvent pas... donc encore une fois, c'était une période de crise, donc pourquoi on ne les produirait pas ?

Et donc justement, au niveau des groupes, comment se faisait la sélection ?

LB : Alors la sélection, c'était en fait par des cassettes. De fait, le fanzine recevait donc des cassettes de groupes. Il faut rappeler que dans cette période, il faut se remettre on va dire fin des années 1980, le CD émerge à peine et c'est un problème commercial. Et donc ce qui marchait très bien, on est avant internet, c'est la distribution de cassettes et voilà. Donc voilà, le fanzine recevait des choses

intéressantes dedans, le fanzine en parlait et donc nous on avait des groupes pour les compilations On a faim!. Donc nous, quand on a commencé, alors je vais employer le « je », parce que c'est quand mrme essentiellement moi au début du label, ce qui m'a paru important c'est que le label soit déconnecté du fanzine. C'est à dire qu'on avait le mrme titre, mais chaque structure était autonome. Donc la sélection c'était ce que j'aimais (rire), donc très subjectif quoi. Donc évidemment c'était la qualité musicale et puis la qualité des textes quoi.

D'accord. Pour partir complètement ailleurs, est-ce qu'il y'avait à Poitiers des rapports entre les structures dites « alternatives » ?

LB : Non, enfin, nous on ne faisait pas partie du milieu on va dire musical poitevin. Moi je n'y connais rien en musique. Voilà, je ne suis pas musicien, j'ai une oreille disons mais je suis militant politique avant tout. J'allais au Confort Moderne, il y avait la boutique de disques, les concerts et un milieu oil les gens se lookaient différemment, etc. Mais non, on ne peut pas parler de liens ayant donné lieu à des projets etc. C'était vraiment une démarche complètement autonome, à coté.

Et donc, comme tu viens de le dire, on peut parler selon toi d'un mouvement vraiment politique pour le rock alternatif, à l'échelle nationale et à Poitiers ?

LB : Oui, alors c'est un peu, enfin, oui complètement politique, on va dire que les groupes qui étaient écoutés à ce moment là avaient tous une démarche politique. Mais enfin il y'a deux aspects, il y'a le message politique, on va dire plus ou moins clair avec, bon on peut le critiquer, ce n'est pas forcément terrible, mais après il y'avait une forme de démarche qui, elle, est politique. Il y avait une démarche qui était vers quelque chose qui se déroule en dehors du système, pas forcément contre le système, mais toujours en dehors. Et donc ça, moi, comme militant libertaire, c'est ce qui m'intéresse. Pas que les gens soient tous anars, mais qu'ils construisent des choses sur leurs propres capacités. Et ça c'était quand mrme l'aspect global qui était quand même intéressant là-dedans. Et à chaque fois qu'il y a eu des ruptures, avec le phénomène des Garçons Bouchers, ou Mano Negra, ou d'autres, la rupture, elle se faisait là-dessus. C'est à dire des groupes qui allaient spontanément vers le business,

et puis les groupes qui restaient sur une volonté de construire quelque chose d'autre. Donc ça, c'était vraiment le point important.

Souvent, le mouvement alternatif est souvent lié, et notamment à Paris, au mouvement squat. Est-ce que c'était le cas à Poitiers ?

LB : Non je n'ai pas connaissance de squats à cette période-là.

Quelles difficultés (s'il y'en a eu) ont pu se poser à la création et au développement du label ?

LB : Les difficultés, c'est d'abord que moi, je n'y connaissais rien (rires). C'est quand même assez gonflé de faire venir un groupe du Jura comme Désert Culturel, leur proposer un studio, etc. et d'ailleurs le studio et le producteur n'étaient pas adapté au son qu'ils voulaient.... En fait si on sortait du circuit simplement cassettes, donc distribué par le fanzine, il fallait une distribution à l'extérieur, donc « qui contacter pour la distribution ? a» En fait, voilà c'étaient des questions comme ça, donc j'ai eu des contacts avec New Rose et donc New Rose a été notre distributeur. Démarche super volontariste basée sur rien. Après les difficultés en fait, c'étaient finalement, les mrmes que pour d'autres structures. C'est-à-dire à quel moment on faisait la part entre démarche militante et puis une démarche finalement oil les groupes voulaient quand même être reconnus. Par exemple pour les discussions avec New Rose, ils s'en foutaient un petit peu de ce qu'on voulait ~tre, par contre ils ne voulaient pas passer à côté d'une opportunité. Donc il y'avait un travail qui était pas très sérieux au niveau de la distribution, mais ils le faisaient parce que...voilà. C'était vraiment une période charnière : « qu'est ce qui allait se passer ? » etc. Moi je me rappelle d'une discussion avec les mecs de New Rose oil ils se posaient la question « est-ce que le rap allait bouffer le rock ? », ils naviguaient à vue, business.

Est-ce qu'à Poitiers, comme au niveau national, on peut parler d'un réseau qui se serait tissé ?

LB : Oui alors, enfin à Poitiers encore une fois, moi j'étais un peu en dehors. Le réseau c'était certaines salles, et certains libraires, libraires et disquaires indépendants, c'étaient les radios hein, ce qu'on appelait les radios libres, avec la création de Radio Béton à Tours. Mais c'est vrai qu'à Poitiers, moi, les rapports que j'avais, c'était vraiment d'aller voir des choses de moi-même au Confort Moderne. Le Confort Moderne était quand même important parce que tu te retrouvais dans une ville moyenne, assez peu active enfin voilà, et quelque chose d'assez connu comme le Confort Moderne c'était quand mrme assez extraordinaire.

Tu en as déjà un peu parlé, mais qu'est ce que tu penses de la période où s'est créé le label ?

LB : C'était une période de crise. Je ne me souviens pas très bien si les Bérurier Noir étaient déjà en procès avec Bondage, etc. Il y'avait le phénomène aussi de la scène alternative plus ou moins récupérée, on en a parlé : Garçons Bouchers, Mano Negra... Donc c'était une période de crise au sens ou quelque chose était monté et puis là, visiblement redescendait, sur des problèmes que le mouvement, je parle de manière très très générale, mais que le mouvement n'était pas capable de résoudre. Problèmes essentiellement économiques, c'est parce qu'il y'avait crise qu'il y'a eu l'idée de créer le label. Voilà on ne voulait pas bouleverser la donne, mais on se disait : « quelque chose est monté, qui concerne beaucoup de gens, donc ce serait trop bête que tout retombe a». Parce qu'effectivement, on savait bien ce que ça voulait dire que tout retombait : c'est que tout retombait aux mains du business. Donc après tout, comme souvent dans le milieu libertaire, créer un peu d'ilots de résistance et d'autonomie, c'était un minimum. Donc c'était vraiment une période de crise.

Quel regard portiez-vous sur les subventions publiques ou privées ?

LB : A ce moment là, on ne se posait même pas la question. On ne se posait même pas la question parce qu'on avait cette autonomie financière de départ. Après voilà, il y'a vingt ans, je sais très bien dans quel état d'esprit j'étais à ce moment là, l'état

d'esprit aujourd'hui, ce serait « on peut y mettre un peu les doigts, il faut garantir notre autonomie a». Aujourd'hui j'ai un certain nombre d'expériences qui font que je pense que manoeuvrer avec ces choses là, en étant prudent, on peut manoeuvrer. On ne s'est pas posé la question vraiment, la question qui taraudait à ce moment là tout ce milieu, c'était la question du business pur quoi, c'est-à-dire : il y'avait des groupes qui avaient de l'audience, cette audience ça voulait dire des gens qui viennent aux concerts, des gens qui achètent des disques, derrière des radios qui diffusaient des morceaux. Toute cette audience, elle a forcément un caractère économique, et, à partir de cette audience, est ce qu'on peut faire vivre une scène de manière autonome ? Donc voilà, on n'était pas dans le cadre de subventions quoi. Il est évident que par exemple, le Confort Moderne, quand il s'est créé, nous on était très critiques, parce qu'il y'avait une armée de ce qu'on appelle aujourd'hui des contrats aidés (c'étaient des TUC à l'époque il me semble), et donc nous on était très critiques là-dessus. Objectivement, le Confort Moderne n'aurait certainement pas pu se monter sans ça, et c'est quand mrme bien que le Confort existe... Mais nous, ce n'était pas notre préoccupation. Notre préoccupation c'était comment faire par rapport au business, vraiment les subventions, c'est quelque chose qui est quand même très lié à toute production qui demande pas mal de capital. Le Confort Moderne c'est quand mrme une salle, c'est énorme hein, donc on btit, il y'a des personnes derrière. C'est un lieu artistique et pas commercial, comme peut l'tre un distributeur de disques, ou un organisateur de concerts, donc forcément la gestion économique et l'autonomie financière va rtre compliquée, il faut des recettes extérieures au lieu lui-mrme, après on n'était pas dupe sur l'avenir mais on n'avait pas de réponse par rapport à ça. On n'était pas dupe des efforts de Jack Lang pour organiser, pour créer des festivals à droite à gauche, c'était une manière de se positionner positivement par rapport à la jeunesse. C'est comme ce que tu disais par rapport aux squats : en quoi ils étaient importants ? C'étaient des lieux oE il se passait des choses, et sans que personne ne puisse avoir un regard dessus. Après les squats avaient leurs propres limites, y compris financières... Pour le label, les problèmes qui étaient importants, c'était l'organisation de concerts, le tournage, la distribution des skeuds [disques, nda] ce qui pouvait se faire autour de la publicité au bon sens du terme, de rendre public, de faire connaitre, tout cela était hors du champ des subventions.

De manière pragmatique, comment ça se passe à Poitiers en 1989 pour produire un disque du début à la fin ?

LB : Euh, le problème, c'est l'enregistrement, c'est-à-dire la production de manière générale. Et ensuite c'étaient les circuits qui étaient assez connus déjà, puisque, le fanzine avait lui même produit déjà des disques. On travaillait avec New Rose, donc les skeuds [disques, nda] étaient un petit peu dans les bacs des disquaires. On était déjà dans le réseau fanzine, on se posait des questions par rapport aux radios (comment les contacter, se faire connaitre). Toutes ces questions là, on était quand même très novices là-dedans quoi.

La finalité du label, n'était pas comme celle d'un label traditionnel, de promouvoir des groupes et de les amener jusqu'à...

LB : Non ce n'était pas ça, c'était vraiment établir une espèce de, comment dire, encore une fois un peu de résistance, permettre à des groupes qui, quand la machine business se met en place, n'auront pas leur place. Et ensuite voilà, le contrat moral entre guillemet, était : on vous permet de faire un album, on essaie de le faire un peu connaitre, et après pour les concerts on avait quelques contacts, on pouvait évidemment filer quelques tuyaux, mais le groupe se débrouillait, et puis on n'était pas dupe, si les groupes marchent et ont une certaines audience, ils auraient continué sans nous. Donc c'était plus vraiment parce qu'on sentait que la scène était coupée entre les gens, on va dire à la base qui jouaient dans leur garage, qui faisaient leur truc, et puis l'audience qu'avait permis le rock alternatif et entrainait vers du formatage.

Tu l'as dit tout à l'heure, quand tu as débuté dans le label, tu étais complètement novice. On voit au niveau du fanzine que tant au niveau du contenu que de la forme, qu'au fil du temps et des numéros, on a une production quasi-professionnelle. Est-ce qu'on a retrouvé ça au niveau du label ?

LB : Euh, enfin moi, je n'ai pas eu le temps de voir cette progression, parce que j'ai quitté le label assez vite. Mais le label On A Faim! a continué après avec une

nouvelle équipe mais il y'avait cette volonté là. C'est-à-dire qu'en fait, par exemple dans la nouvelle équipe, est arrivé un couple parisien. Gil était un dessinateur, donc il avait certaines exigences esthétiques, Martine était plus au fait des choses administratives, donc quelque chose d'un peu plus pro qui se mettait en place. Donc après, il faudrait voir la suite du label lui-même quoi. Mais, enfin, il n'y avait pas de raison pour qu'on ne fasse pas quelque chose qui ne soit pas agréable ou un peu pro. Ça veut pas dire grand-chose agréable et un peu pro, mais tu peux avoir des choses qui soient faites de manière foutraque, parce que c'est comme ça et il y'a des choses qui sont faites de manières foutraque parce que c'est une esthétique voulue. Nous on a fait un petit fanzine, il y'avait un coté foutraque, mais il était voulu, donc voilà, c'est une question esthétique. Je pense que la démarche du zine (au départ je rappelle que c'est avant les ordinateurs etc,) donc on tape à la machine, on fait des découpages aux ciseaux, on colle, donc voilà, il faut imaginer l'esthétique punk, elle correspond aussi à certains état d'esprit imaginatif. Entre le zine de Poitiers, vu par 30 personnes et le zine national vu par 500 ou 1000, il y a une différence ! Il y'a une logique interne et donc encore une fois, même chose pour le rock alternatif. Industriel au bon sens du terme, c'est-à-dire qu' il y'a des métiers qui se mettent en place.

Et toi quand tu fondes le label, est ce que tu as dans l'optique d'en faire ton métier, en quelque sorte de travailler pour ça ?

LB : Pas du tout, c'est-à-dire pour moi c'est un acte politique. Comme je militais jà ce moment là à la Fédération Anarchiste. Donc c'est du militantisme avec un coté un peu artistique, voilà, parce que j'aimais la musique que j'écoutais, quelque chose qui n'était pas strictement militant. Alors plus tard dans le label, je ne sais pas très bien, ce n'est pas toujours très clair comme ça, mais bon je pense que les copains qui après ont repris le label n'étaient quand même pas dans cette démarche là, mais ils y pensaient peut-~tre en se rasant le matin....

Penses-tu que ce qui s'est passé en termes de mouvement alternatif aux EtatsUnis puisse être mis en lien avec ce que vous avez fait chez On a faim! , y'a-t-il eu des passerelles ?

LB : Des passerelles non. Je ne pense pas qu'il y ait eu des passerelles. D'abord avec les États-Unis c'est compliqué, c'est-à-dire que, dans un milieu militant, les passerelles, elles se font par des connaissances un peu plus précises. Donc notre contexte, il restait européen, alors c'est vrai qu'en Europe c'était quand mrme l'exemple italien, avec les centres sociaux qui commençaient à émerger, s'organiser Aussi, je me souviens avoir visité des squats berlinois très organisés, ça, ça nous inspirait. Mais les États-Unis, pas directement, je crois qu'il y a des différences de culture, et puis de taille. Un groupe connu aux States c'est en nombre de « fans » quelque chose d'énorme par rapport à l'Europe. Ce qu'on voyait c'était que ce milieu persistait, et ne se trouvait pas prisonnier du business apparemment comme chez nous. Une vraie scène alternative, c'est quand mrme ce qui manquait particulièrement en France. Et c'est ce que des groupes comme les Bérurier Noir n'ont pas réussi à faire, ce n'est pas une critique, mais on peut voir que ce n'est pas une fatalité. Des groupes comme The Ex, NoMeansNo, existent encore dans une démarche alternative.

Alors justement, en terme de vente, est-ce que les productions On a faim! ont trouvé un écho auprès du public ?

LB : Les compilations se vendaient relativement bien, alors moi les chiffres... je te disais, je ne sais pas, alors relativement bien ça va être autour des 1000, quoi. En fait, de mon temps, on a assez fait peu de choses à part les compilations, donc c'était Désert Culturel, des choses comme ça, et là c'était quand mrme beaucoup plus modeste, quoi, c'était quelques centaines.

La politique de prix des disques, j'imagine qu'elle était en adéquation avec vos idées politiques ?

LB : Oui, on essayait de faire les choses le moins cher possible. Alors après c'est toute la difficulté d'édition. La distribution prend sa marge, etc. Et puis on devait

éditer sur plusieurs supports (cassettes, vinyles, CD), c'était quand mrm compliqué...

Et dans le cadre de cette crise, est-ce qu'il a pu exister des coopérations entre le label On a faim! et d'autres labels ?

LB : Des coopérations, ce serait un grand mot, disons qu'il y'avait deux types de réseaux : il y'avait le réseau lui-même, qui lui était donc en crise forte et puis après, il y'avait le réseau anar. Dans le réseau anar, y'avait un autre label qui est arrivé à survivre, qui était un label historique qui s'appelait VISA. Donc la coopération, ça passait surtout par Jean-Pierre et par le fanzine, et ça se situait plutôt en termes de publicité encore une fois au bon sens du terme. C'est-à-dire, on croisait entre les productions VISA et les productions On a faim!, et puis quelques plans on va dire techniques etc.

Et donc ce réseau de publicité (fanzines, radios libres etc.), est ce qu'il a été efficace pour l'activité d'On a faim! ?

LB : Hum, oui... oui et non. Enfin, parce que ce réseau là, si tu veux, il y'avait la partie très pratique, donc lui était efficace. Mais en termes de pub, c'était quand mrme très limité. C'était une période un peu charnière, on sentait bien qu'on était à la queue de la comète. C'était moins le problème de notre réseau qu'en fait, derrière, un réseau qui était déjà orienté vers quelque chose qui était beaucoup plus commercial. La nouvelle équipe du label, a choisi un positionnement moins militant, qui était aussi un positionnement musical spécifique (plus dub/reggae que rock).

Le label était un outil de propagande : donc a-t-il réussi à rallier des gens à la cause libertaire ?

LB : Ce n'était pas le but, on voulait participer à maintenir une scène alternative, et à l'intérieur de cette scène une référence anar. On a échoué me semble-t-il mais parce que la scène alternative, du moins telle qu'on l'imaginait alors, a échoué.

Quel bilan tires-tu de ton action au sein de On a faim !?

LB : Je me suis bien amusé et j'ai vécu beaucoup d'angoisse, voilà. Non c'est vrai que le label sur cette période là (encore une fois, le label a continué après moi, c'est quand même en grande partie on va dire une aventure personnelle, beaucoup d'angoisse). Je pense qu'après, j'ai aussi eu une ouverture sur du réel, c'est-à-dire pas seulement être dans la propagande anar par exemple, participer a des manifs, faire des communiqués de presse, ces choses quoi, le goût de construire on dira...

Historique de L'oreille est hardie

ADV : 1256 W 175 - 1987 - DRAC - Musique et Danse - LOH Poitiers -
Dossier promotionnel du Confort Moderne - saison 1986-1987

Article de presse concernant l'ouverture du Confort Moderne

ACM : « Press Book de l'Oreille est Hardie » (septembre 1985-juillet 1986)
Liberation du 18 novembre 1985.

Récapitulatif des productions On a faim !

AFP : On a faim I, mai 1990 (n° 14).

Article de presse concernant la Fanzinothèque

ACM : « Press Book de l'Oreille est Hardie » (septembre 1990-juillet 1991)
Calades de mai 1991.

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"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera