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Le BIR et la GP dans la politique de défense et de sécurité du Cameroun. Socioanalyse du rôle présidentiel, des concepts stratégiques et d'emploi des forces

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par Hans de Marie HEUNGOUP
Université catholique d'Afrique centrale - Master en gouvernance et politiques publiques 2011
  

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II.B- Les atouts stratégiques du Cameroun

Le Cameroun dispose de plusieurs atouts stratégiques pour la défense de la nation. Parmi ces atouts, certains sont militaires et d'autres non-militaires. Parmi les atouts militaires, on peut citer : les FAC, la réserve, le concept de défense, les accords de défense, la culture

stratégique. Parmi les atouts non-militaires, on retient : la politique étrangère pacifiste et neutre du Cameroun, le réseau d'alliance diplomatico-militaire camerounais, son indépendance stratégique, le nationalisme camerounais, la capacité de résilience des populations, le relief et le climat camerounais, et le fait que le Cameroun constitue un Étatpivot dans la CEEAC ; ce qui fait que sa déstabilisation pourrait entrainer celle de la région toute entière.

S'agissant des atouts militaires, les FAC constituent à elles seules déjà un élément de dissuasion contre toute attaque éventuelle d'un pays frontalier du Cameroun ou de quelque pays africains que ce soit. Mais face à une armée de plan mondial comme la Grande Bretagne, la France, les États-Unis, les FAC ne pourraient pas résister. D'autres avantages stratégiques du Cameroun pourraient alors contribuer à consolider la « sanctuarisation défensive »144 du territoire. La réserve mobilisable et la réserve non mobilisable pourraient jouer un rôle fondamental dans la défense nationale en cas de conflit de haute intensité. De même le concept d'emploi des forces camerounais, même s'il ne cadre pas vraiment avec l'environnement sociopolitique, est un élément cardinal de la dissuasion camerounaise. Une armée qui fait corps avec le peuple serait impossible à vaincre. Les Américains ont rencontré ce problème au Vietnam. Malgré leur supériorité militaire incontestable, ils n'ont pas su triompher des Viêt-Cong. La réserve et le concept d'emploi des forces, s'ils sont bien utilisés pourrait permettre de sanctuariser le territoire camerounais. Ensuite, les accords de défense entre le Cameroun et la France, et, la culture stratégique camerounaise concourent à la sanctuarisation défensive du territoire national. Dans le conflit opposant le Cameroun au Nigéria, la France n'a pas mis en oeuvre les accords de défense dans la mesure où elle souhaitait éviter un embrasement de la région pour éviter l'embrasement de deux pays où elle a des intérêts pétrostratégiques, mais la simple menace de l'intervention française, plus la riposte camerounaise a poussé le Nigéria a renoncé à d'autres attaques. Au sujet de cette menace, on sait qu'en 1996, la France a fait atterrir 4 hélicoptères Gazelle à Douala, remplis de conseillers et d'experts militaires français.145 Il est fort probable que la France ne serait jamais allée jusqu'à l'engagement général, mais cela a contribué à dissuader le gouvernement nigérian, ou au moins à donner à son peuple une excuse officielle par rapport aux pertes subies par les soldats nigérians lors de la riposte camerounaise.

144 Par opposition à la « sanctuarisation agressive » qu'obtient tout État nucléaire (Corée du Nord), la sanctuarisation défensive permet juste d'annihiler tout projet d'agression extérieure, du fait du coût prohibitif que représenterait une telle initiative.

145 EBA'A Guy Roger, Affaire BAKASSI. Genèse, évolution et dénouement de l'affaire de la frontière terrestre et maritime entre le Cameroun-Nigéria (1993-2002), Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2007.

S'agissant des atouts non-militaires, la politique étrangère du Cameroun milite en faveur de la sanctuarisation du territoire. Le pacifisme et la neutralité qui la constituent fait que le Cameroun n'a jamais soutenu ou encourager une rébellion d'un pays voisin. Ce pacifisme et cette neutralité jouent en faveur du Cameroun, dans la mesure où elle lui évite des rancunes des pays voisins et contribue à relativiser les occasions de conflit. A chaque fois que les camerounais ont été expulsés manu militari de Guinée Équatoriale, le gouvernement de Yaoundé n'a pas véritablement protesté. Au plan stratégique, cette politique prive les potentiels adversaires du Cameroun des occasions de conflit. L'indépendance stratégique et la variabilité du réseau d'alliance diplomatico-militaire camerounais renforcent sa dissuasion. En refusant l'implantation de bases étrangères sur le sol camerounais et en promouvant une culture stratégique d'indépendance, le président AHIDJO avait posé les jalons de l'indépendance stratégique du Cameroun. Cette indépendance se décline tant au plan militaire qu'au plan non-militaire. Au plan militaire, le Cameroun ne dépend pas d'un seul pays ou d'un groupe d'alliance pour l'achat des armes et la formation de ses soldats. Le réseau d'alliance diplomatique et militaire du Cameroun est très varié. Ce qui permet au pays de ne pas être dépendant d'une puissance, et donc d'avoir une certaine marge d'autonomie et de manoeuvre. Cette indépendance est visible au plan économique, le pays ne dépendant d'aucun pays riverain pour ses exportations et ses importations, pour son alimentation, etc. Bref, le Cameroun dispose d'un ensemble de ressources économiques qui font que, bien géré, il serait autosuffisant sur les plans énergétiques, alimentaires, commerciaux, etc.

Par ailleurs, le Cameroun est considéré comme l' « État-pivot »146 dans la région Afrique centrale CEEAC. Le concept d'État-pivot est d'origine américaine. Avec les attentats du Wall Street center, la lutte contre le terrorisme mondial passe par la pacification et la stabilisation des failed state, des collapsed state et des collapsing state. Le gouvernement camerounais a su tirer partie de ce contexte en se présentant aux yeux des États-Unis comme l'exception de paix dans une Afrique centrale rongée par les conflits et l'instabilité. Les ÉtatsUnis étant favorable à un Cameroun État-pivot de la région CEEAC, les autres puissances ne peuvent que suivre. Ce qui traduit le souci des puissances mondiales de construire la paix dans le golfe de guinée et l'Afrique centrale CEEAC à partir du noyau camerounais.

Après avoir présenté les capacités opérationnelles et les atouts stratégiques du Cameroun, nous allons étudier la dimension prospective de cette défense.

146 Un état pivot est un état considéré comme garant de la stabilité d'une région.

SECTION II ELEMENTS DE PROSPECTIVE SOCIOPOLITIQUE,

SOCIOGEOPOLITIQUE ET SOCIOSTRATEGIQUE

Quelle politique de défense et de sécurité pour quel Cameroun en 2035 ? Comment adapter le concept stratégique à l'environnement sociopolitique et sociogéopolitique ? Quels harcèlements, contraintes et conflits pèseront d'ici 2035 sur la sécurité nationale ? L'objectif ici n'est pas de prévoir le futur, mais plus humblement d'essayer d'en être des artisans, plutôt que de simples spectateurs ou des victimes.

I- La fragilité sociopolitique et sociogéopolitique du Cameroun

La prospective est une praxéologie ; le diagnostic est la base de la prospective.147 Dans le contexte camerounais, projeter sur vingt-cinq ans un plan général d'emploi des forces requiert un diagnostic des faiblesses de notre politique de défense. Ces faiblesses sont d'ordre sociopolitique et sociogéopolitique. Il s'agit des clivages entre les unités spéciales et l'armée régulière d'une part ; et de l'étiolement du lien armée-nation d'autre part.

I.A- Les clivages entre les unités spéciales et l'armée régulière : frictions internes,

mutinerie, conventionnalisation et routinisation

La défense et la sécurité camerounaise sont marquées par les clivages entre les unités

spéciales des forces armées et l'armée régulière. Ces clivages apparaissent au niveau du recrutement, de la formation, de l'équipement, de l'entraînement des forces et de la prise en charge matérielle du soldat. La sociologie militaire camerounaise permet d'expliquer les frustrations et les ressentiments que peuvent avoir les soldats des forces armées à l'encontre de leurs frères d'armes des forces spéciales. Ces frustrations se sont accentuées ces dernières années; ce d'autant plus que le pouvoir politique en accordant toute son attention aux unités spéciales a marqué sa défiance vis-à-vis des forces traditionnelles. Les clivages sont aggravés par l'arrogance des forces spéciales ; en particulier, le BIR et la GP. Celles-ci sont bien conscientes que le pouvoir compte sur elles pour se reproduire et pour la stabilité du pays. A rebours, l'arrogance des forces spéciales accroit les ressentiments et les frustrations des soldats de l'armée régulière. Au lieu que la création des forces spéciales aboutisse à ce qu'Elie MVIE MEKA appelle « l'émulation totale des forces armées régulières»148, on assiste

147 Première année à l'école militaire Saint Cyr.

148 Entretien avec Elie MVIE MEKA, Op. cit. 2011.

au contraire à ce qu'Alain FOGUE a appelé « la logique de défiance interne entre les forces spéciales et les forces armées régulières».149

Les clivages entre les forces de l'ordre ont généré par le passé des affrontements entre forces spéciales et forces armées régulières, d'une part; entre forces spéciales et forces de sureté nationale, d'autre part. De même, le classement des forces agit comme un marqueur social et symbolique. Un policier avec qui nous avons eu un entretien nous a dit détester les militaires. Nous lui avons demandé s'il détestait plutôt les forces spéciales ; il a répondu les militaires « tous bords ».150 Son sentiment n'est, sans doute pas, celui de toute la police camerounaise, mais il exprime la frustration des forces de 1ère catégorie face aux forces de 2ème, de 3ème, puis de 4ème catégorie. Comme il le soulignait, « les militaires se croient tout puissants. Ils croient que parce qu'ils ont les plus long fusils ; ils sont plus forts. Je ne sais même pas ce qu'on leur met dans la tête à KOUTABA. Un petit que tu as vu hier-hier grandir, dès qu'on lui donne son fusil, il croit qu'il est le plus fort ».151 A propos des soldats du BIR, il affirme : « c'est les voyous. Tu as déjà discuté avec eux. C'est les gars qu'on ramasse au village ».152 Pour TCHOUNGUI Charles Condition, un civil qui dit avoir été agressé par les éléments du BIR, « les gars là sont pires que les bandits. Les gars-là t'ont déjà agressé un jour ? Je t'assure que je suis un gars qui sort la nuit, mais on ne m'a jamais fait peur comme ca ».153 Le même verbe continue lorsque nous interrogeons un Colonel de la Gendarmerie au SED. Celui-ci affirme que les gendarmes sont supérieurs aux militaires et aux soldats du BIR. A ce sujet, il dit précisément : « Nous les gendarmes, nous subissons la même formation que ces gens. Nous faisons tous ce qu'ils font ; et en plus nous assumons les missions policières. La Gendarmerie est un corps de l'armée complet. Elle dispose d'atouts militaires et policiers. Face aux militaires, nous sommes plus instruits et mieux aguerris pour relever les défis de défense et de sécurité fixés par le chef de l'État ».154 Au cours des entretiens suivants avec les forces armées, de la GP et de la DSP, des paragraphes de ce type reviennent. Il y a des soldats du BIR qui estimaient qu'ils étaient « mieux habiles »155 que ceux de la GP ; ceux de la GP qui nous rétorqué que le BIR c'était la « force brute ».156 Enfin, un Commandant de la DSP nous a fait savoir que son corps était le plus sensible. Au départ de l'entretien, en plus de la

149 Entretien avec Alain FOGUE, 25 mai 2011.

150 Entretien avec un policier 12 mai 2011.

151 Idem.

152 Idem.

153 Entretien avec un Colonel de la Gendarmerie au SED, 25 mai 2011.

154 Ibidem.

155 Entretien avec des éléments du BIR.

156 Entretien avec des éléments de la GP.

lettre d'autorisation de recherche du ministre de la défense, il exige celle du Directeur de la sécurité présidentielle, le Général de division Yvo DESCANCIO. Puis, nous discutons. Lorsque nous abordons la sécurité présidentielle, il nous demande ce que nous voulons faire avec la sécurité du président. Puis, il dit « tu sais que c'est un domaine très sensible. C'est nous qui contrôlons tout. Ca c'est mon petit frère, et, s'il t'a conduit vers moi ; je te fais confiance. Mais avec le contexte de ces derniers temps, je ne peux rien dire ».157 Nous lui demandons de quel contexte il s'agit. Il répond : « toi-même tu ne vois pas. La Lybie, la Côte d'Ivoire. Tu suis les informations ? ».158 Nous lui demandons ensuite si le BIR est désormais associé à la sécurité du président, et n'y a-t-il pas cacophonie avec la GP ? Il répond : « laisse les gens-là s'embrouiller. Les vraies choses se passent chez nous ».159 Nous lui demandons quelles vraies choses ? Il répond « les vraies choses ».160 Nous poursuivons en demandant, est-ce à dire que le BIR et la GP ne sont pas les vraies choses ? Il répond : « c'est le décor ».161 L'analyse que l'on peut faire de ces entretiens est qu'il y a, parmi les forces armées et de police du Cameroun, les frustrés et les frustrants. Parmi les frustrants, il y a un conflit de centralité et de primauté dans la défense et la sécurité du territoire. Les éléments du BIR, de la GP, de la gendarmerie, de la DSP se pensent chacun être le noeud de la stabilité du Cameroun.

Ces divisions constituent le talon d'Achille de la défense camerounaise. Elles ont déjà conduit à des frictions au sein de l'armée ; ou entre l'armée et la police. A long terme, elles pourraient catalyser une mutinerie. A long terme la sur-utilisation des forces spéciales au détriment des FAC régulières pourrait causer la « routinisation » et la « conventionnalisation » des forces spéciales, principalement du BIR.

En ce qui concerne les frictions, elles sont nombreuses. Ces dernières années, les colonnes des journaux Mutations et Le Jour ne cessent de livrer au public des informations sur les cas de bagarres entre policiers et militaires. A Douala les éléments du GMI ont tabassé les policiers du commissariat du 7ème arrondissement, après que ceux-ci aient gardé à vue par erreur leur Colonel. Au stade Marion les soldats du BBR et les éléments d'ESIR se sont affrontés. A Yaoundé, des éléments du BIR sont régulièrement pris dans les bagarres avec les éléments des autres corps. Sur ce dernier point, un éclairage du Code militaire est important. Au Cameroun, le Code militaire prévoit que c'est le Gendarme qui peut procéder à une

157 Entretien avec un Commandant de la DSP, 04 mai 2011 à ODZA.

158 Ibidem.

159 Ibidem.

160 Ibidem.

161 Ibidem.

arrestation d'un militaire ; ou à défaut la SEMIL. Or, lorsque les militaires se retrouvent en infraction au Code civil, pénal ou militaire, il est arrivé que des policiers arrivés en urgence essaient de leur passer des menottes. Cela peut en partie expliquer la rixe entre les éléments d'ESIR et un militaire du BIR ; rixe qui a coûté la vie au soldat. Toutefois, cela n'oblitère pas le fait que les frictions de tous ordres sont le lot actuel des FAC et des FSN. Ces cas de bagarres font peser sur la défense un risque sérieux à long terme de mutinerie et de routinisation.

Jusqu'à présent, le collectif bureaucratico-présidentiel n'a pu se maintenir au pouvoir qu'en associant les FAC et les FNS à l'alliance hégémonique. Le pacte d'acier entre l'armée et le pouvoir pourrait fondre, du fait de la limite des ressources de l'État. En réalité, même dans un État néopatrimonial, le gouvernement reste contraint par la pression des « sans importance »162 et la finitude des ressources de l'État. Le gouvernement ne peut pas ponctionner les ressources étatiques à l'infini, dans la mesure où celles-ci s'amenuisent. Le danger lorsqu'elles finissent, c'est qu'elle entraine les injonctions des institutions financières internationales et des grandes puissances. Il y a donc lieu vu cette exigence de modérer l'embourgeoisement du collectif. Dans ce contexte, l'armée camerounaise, avec ses 40 000 effectifs se voit de plus en plus écartée du collectif, au profit des officiers généraux et d'une frange de l'armée. L'exclusion d'une partie de l'armée du collectif est de nature à provoquer une mutinerie ; étant donné que même si ceux-ci appartiennent désormais à la classe des cadets sociaux, ils conservent le privilège d'avoir des armes, et donc de pouvoir imposer leur volonté plus facilement que le ferait la société civile et le bas peuple. A ce jour, le CRM et la SEMIL sont constamment en veille. Lors des évènements de février 2008, c'est cette frange de l'armée qui a laissé faire les émeutiers, au point où le pouvoir fut obligé de faire venir le BIR et les troupes de KOUTABA pour mater la grogne sociale. Le risque d'une mutinerie au sein des FAC est bien réel. Ce risque serait négatif pour la défense du territoire s'il aboutit à la partition du pays en deux armées ou à la constitution d'un groupe rebelle. En revanche, si la mutinerie aboutit plutôt à une transition politique, cela pourrait déboucher sur un adoucissement des tensions entre militaires.

La guerre civile et les dynamiques fragmentaires ne sont pas les seuls dangers qui menacent la défense et la sécurité du territoire national. Cette sécurité est d'ores et déjà affectée du fait de la sur-utilisation des Forces spéciales. En confiant à des forces spéciales

162 BAYART Jean-François, Op. cit., 1985.

des missions des forces armées régulières, en les sur-utilisant, le danger qui guette la défense camerounaise et même la sécurité présidentielle, c'est la routinisation, voire la conventionnalisation de ces forces, qui à terme perdent de leur lumière. En effet, le principe même des forces spéciales, c'est leur exceptionnalité, leur dimension enchanteresque. L'image du soldat du BIR ou de la GP, mal vêtu, que l'on peut désormais croiser à MOKOLO, ou saoul dans une vente à emporter (Bar) de la capitale, contribue à démystifier et à démythifier ces corps. Ce sont les forces spéciales dans l'ordinaire, la banalité du quotidien. La clé de l'atomisation des libertés, de la congestion cérébrale et du maintien au pouvoir est d'exercer une emprise psychologique forte sur les populations. Pour y parvenir, il faut non seulement de la distance entre la classe dirigeante et la classe dirigée (pour éviter le mépris), mais surtout des forces de l'ordre craintes. Au Cameroun, la police est moins crainte que le reste des forces de l'ordre, pas forcément parce qu'elle serait la moins capable de réprimer la population. Mais tout simplement parce qu'elle ne bénéficie pas de cet effet de distanciation dont bénéficient les autres corps armés. Au-delà des questions de corruption, de sa formation et de son armement insuffisant par rapport à celui des autres forces, la question de la distance et de la proximité est centrale dans l'exercice de la tyrannie. De ce fait, au Cameroun, lorsqu'un nouveau corps vient d'être créé, il bénéficie les premières années de cet effet distance ; ce qui contribue à le crédibiliser auprès de populations. Il suscite à la fois la peur et la fascination. Puis, quelques années après, ce corps rentre dans l'ordinaire de la nudité des FAC. Ce fut le cas pour le GSO qui, les deux premières années de sa création, était aux dires de tous le corps qui allait ramener la tranquillité dans le pays. Le même bruit a eu court avec ESIR, le GPIGN. Du côté de l'armée, les années AHIDJO étaient à la gloire de la gendarmerie, les GMI. Puis, il y a eu le BBR. Bref, la profusion de l'image nue, fatiguée, assommée, sale, bref de l'image humaine des forces spéciales camerounaises contribue à les dé-déifier. C'est dans ce sens que nous parlons de fragilité de la sécurité présidentielle, étant donné que ces forces spéciales, en occurrence le BIR et la GP, constituent le liquide amniotique du pouvoir politique actuel. Au niveau de la défense nationale, la sur-utilisation des forces spéciales finira par entrainer leur routinisation ; ceteris paribus, l'on assistera à rouille mécanique des forces conventionnelles. Depuis 2008, le BIR a remplacé les FAC de l'opération DELTA. Il est présent à ce jour dans quasiment toutes les opérations de défense du Cameroun. En 2010, le BIR est intervenu au Gabon pour sécuriser les élections présidentielles. A Douala, Yaoundé, à l'Est, dans le grand Nord, le BIR est associé dans le cadre des Brigades d'intervention rapide des REMIL à presque toutes les opérations. Leur contribution dans la sécurisation des cortèges présidentiels de l'aéroport ; de la sécurisation de

la ville lors des grandes manifestations est également régulière. Le danger qui guette le BIR d'ici quelques années est sa routinisation. Pour l'instant, le fait qu'ils dépendent directement du président de la République et soient associés à la protection présidentielle maintien leur standing élevé par rapport aux autres forces spéciales déjà en voie de routinisation. Si cela arrive, la mécanique de défense nationale se grippera.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe