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Le pilotage maritime dans l'Union Européenne: statuts, organisations et responsabilités civiles des pilotes en 2010

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par Pierre CASTETZ
Université du Havre faculté des affaires internationales - Master 2 droit de la mer et des activités portuaires 2009
  

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Chapitre II) Des organisations professionnelles différentes face à des impératifs identiques

I) Un statut de monopole voué à la sécurité

A) Le monopole du pilotage intracommunautaire

i) Le monopole du pilotage français

En France aucune entreprise privée de pilotage ne pourrait mettre en place un service de pilotage des navires. Le pilotage est en effet protégé par un monopole d'état, basé sur l'article 16 de la loi du 28 mars 1928 qui punit de sanctions pénales toutes personnes qui entreprendrait un pilotage sans en être officiellement commissionné par l'état :

« Est punie d'une amende de 3 750 euros, et de huit à quinze jours de prison, ou de l'une de ces deux peines seulement, et du double en cas de récidive, toute personne qui, sans une commission régulière de pilote de la station, aura entrepris ou tenté d'entreprendre la conduite d'un navire en qualité de pilote commissionné ».

La Loi punit sur le plan pénal toute personne qui tenterait d'usurper ce caractère exclusif des

pilotes.

Par un arrêt daté du 2 juin 1972, le Conseil d' État a statué sur cette position exclusive des pilotes : « le service du pilotage dans les ports constitue un service public qui s'exerce sur le domaine public de l'état ; il appartient à l'autorité administrative d'organiser ce service en vue d'assurer la meilleure utilisation du domaine ; qu'à cette fin elle est en droit, lorsqu'une concurrence serait de nature à compromettre l'efficacité de ce service, de n'en confier la gestion qu'à une seule entreprise ».

Non seulement, l'arrêt du Conseil d' État vient confirmer la qualification déjà exprimée précédemment de service publique de pilotage, mais vient également ajouter la notion de monopole légitime de la station de pilotage française.

Toutefois, ce monopole des pilotes est restreint par la délivrance des licences de capitaine pilote.

ii) Le monopole en Europe : application des principes communautaires et pilotage

La profession de pilote maritime peut faire l'objet de vives critiques car elle engendre des frais obligatoires pour les armateurs (environ 7/8 % des coûts d'escale), mais aussi par ailleurs, parce qu'elle détient largement un statut de monopole exclusif en Europe, qui pourrait être discuté au regard des principes de libre concurrence et de libre prestation de service.

Pendant de nombreuses années, en Europe, en France et même dans le monde, le pilotage maritime était une pratique concurrentielle, dans laquelle les pilotes couraient au devant des navires à servir. Au même titre qu'une activité commerciale de transport maritime, le principe de libre prestation de service pourrait s'appliquer au service de pilotage maritime au sens du Règlement CEE n°4055/86 du Conseil du 22 décembre 1986, portant application du principe de la libre prestation des services aux transports maritimes entre États membres et, entre États membres et pays tiers. Faisant suite au Livre vert sur les ports et les infrastructures maritimes paru en décembre 1997, qui prévoyait la mise en place d'un nouveau cadre communautaire pour l'accès au marché des services portuaires, et donnant effet aux règles du Traité sur les grandes libertés et la concurrence dans le domaine spécifique des services portuaires, le Parlement a ouvert le débat des « Paquets portuaires 1 et 2 ».

Le 13 février 2001, afin d'améliorer la qualité des services dans les ports maritimes, la commission Européenne a soumis le paquet portuaire I, première proposition de directive visant à reformer les services portuaires. Après deux années de tentative de conciliation, le projet de directive est présenté lors de sa séance plénière du 20 novembre 2003, et est finalement rejeté. Au cours de cette première lecture, le Parlement Européen avait décidé d'exclure le service de pilotage du champ d'application de la directive, au motif que « du fait de leur rôle dans la sécurité du trafic maritime, ils ne pourraient être regardés comme des services de nature commerciale devant être soumis à la concurrence24 ».

Si le modèle initial avait été suivi, le pilote serait devenu un employé d'une concession de pilotage en concurrence directe avec d'autre sociétés, qui aurait sans doute négocié ses prix avec les armateurs ; par ailleurs, dans le cadre du contrôle par l'état du port, le pilote ayant perdu son indépendance, et dans un but purement lucratif et commercial, serait tenté de perdre son impartialité, et son objectivité quant au signalement des navires défectueux.

24 Rapport d'information déposé par la délégation de l'assemblée Nationales pour l'Union européenne, sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l'accès au marché des services portuaires (COM [2004] 654 final / E 2744), présenté par M. CHRISTIAN PHILIP, Député.

En mars 2005, une nouvelle proposition qui reprend quasi-totalement l'ancienne version, est rapportée, mais en y incluant des solutions à certaines interrogations importantes soulevées précédemment. Notamment, le Parlement avait demandé le retrait du service de pilotage des « services techniques nautiques » (pilotage, lamanage, et remorquage) couverts par le champ d'application de la directive. Le Conseil avait proposé d'accorder aux Autorités Nationales compétentes la possibilité d'assurer elles-mêmes les services de pilotage ou de les confier à un fournisseur de services, notamment pour des raisons de sécurité, et donc de limiter les effets d'une libre prestation des services.

La libre prestation des services est considérée comme une liberté fondamentale partout dans l'Union européenne pourtant, la Commission décide, le 8 mars 2006, de retirer ces propositions de réforme rappelant qu'il est possible que la libre prestation des services soit limitée, pour des motifs « objectifs», qui pourraient diminuer la qualité du service de pilotage, et surtout pour des raisons de sécurité et de protection de l'environnement tenant compte du fait que des pressions commerciales sur cette profession nuiraient considérablement à la prestation.

Entre 2001 et 2006, la commission européenne a tenté par deux fois de libéraliser les services portuaires, (pilotage, lamanage, et remorquage) et le 18 janvier 2006, pour la deuxième fois consécutive, le projet Paquet portuaire II visant à ouvrir à la concurrence les services portuaires de l'Union européenne, a été rejeté.

Pour Robert Rezenthel, « il ne paraît pas concevable d'admettre le libre exercice du pilotage au sein de la CEE, car une concurrence effrénée pourrait mettre en péril le fonctionnement du service public25 ». Le rôle de cette exclusivité est donc de contrôler le service public rendu, mais aussi d'assurer un niveau maximal de sécurité de la navigation. La notion de sécurité de la navigation, de protection de l'environnement et de protection des populations riveraines exigent que les pilotes maritimes puissent travailler dans un environnement leur permettant d'exercer leur jugement professionnel de manière indépendante. L'application des règles commerciales de libre concurrence dans ce domaine seraient un retour en arrière.

Qu'ils aient un statut privé, ou qu'ils soient fonctionnaires d'état, organisés nationalement, régionalement, ou régie localement par une autorité portuaire ou une municipalité, dans tous les états membres, le service de pilotage est fourni de manière totalement exclusive par des structures qui conservent le monopole de la profession.

Pour des raisons de contrôle public et de maintien du plus haut niveau de sécurité, l'institution actuelle, de type unipolaire est largement préférable à une libre concurrence de l'activité, qui amènerait sans aucun doute une baisse de la qualité du pilotage, créant des obstacles à la continuité du service.

25 Robert REZENTHEL, op. cit, p. 362.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery