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Les conséquences juridiques de l'acquittement devant le Tribunal Pénal International pour le Rwanda

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par Jean- Marie TWAGIRAYEZU
Université nationale du Rwanda - Licence en droit 2007
  

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CHAPITRE I. LE MAINTIEN EN DETENTION DE

L'ACQUITTE

Le Règlement consacre dans son article 99 B) la possibilité de maintenir l'acquitté en détention, à la demande du Procureur lorsque ce dernier veut interjeter appel du jugement d'acquittement (Section 1). Animés par le souci de surmonter les difficultés pratiques de cette disposition, les juges ont inventé une alternative à la détention (Section 2).

Section 1. La possibilité de principe de maintien en détention

Analysons d'abord le fondement, le mécanisme et les effets de la mesure (§.1) qui en pratique, ne manque pas de poser des difficultés dont il faudra prendre la mesure (§.2).

§.1. Fondement, procédure et effets de la mesure

Examinons ces trois aspects en commençant en premier lieu par le fondement de la mesure de maintien en détention (A), ensuite sa procédure (B) et enfin ses effets (C).

A. Le fondement de la mesure

Le fondement de la mesure de maintien en détention après acquittement en première instance n'est par clairement défini par les textes; mais généralement une telle mesure est ordonnée autour du triptyque suivant : les garanties de représentation de l'accusé en justice, (1) de préservation de preuves (2) et de sécurité (3)7.

1. La nécessité de représentation de l'acquitté en appel

Dans la première affaire où cette question s'est posée, une mise en liberté de l'accusé était envisagée entre l'acquittement et la considération de l'appel interjeté par le Procureur. Ce dernier a fait valoir que la libération de l'acquitté permettrait à ce dernier de prendre la fuite au cours de la procédure en appel8 .

7 P. CHAMBON, Le juge d'instruction, théorie et pratique de la procédure, 4è éd., Paris, Dalloz, 1997, p. 250.

8 Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA, Affaire no ICTR-95-1A-T, Chambre de première instance I, Décision sur la requête du Procureur sur le fondement de l'article 99 B), 8 juin 2001, par. 2 qui reproduit les termes de la requête orale du Procureur sur le fondement de l'art. 99 B). Voy. aussi Le Procureur c. Sefer HALILOVIC, Affaire no IT-01-48-I, Chambre de première instance I, Décision relative à la demande de mise en liberté provisoire, 1er sept. 2005, par. 13.

On serait tenté de penser que le contexte particulier dans lequel opère le TPIR, c'està-dire sans force policière autonome ni territoire sur lequel il exerce son contrôle9, à la différence des juridictions nationales qui peuvent s'appuyer sur la puissance étatique, justifie le risque inhérent de fuite et légitimer par conséquent les demandes de maintien en détention. En outre, les Etats dans le territoire desquels se trouvent les accusés n'ont pas toujours fait montre d'une volonté de coopération totale, laquelle est indispensable pour assurer la représentation en justice des accusés se trouvant dans leur territoire10.

Toutefois, une telle crainte, fondée généralement sur une simple supposition, a été jugée insuffisante par la jurisprudence du TPIR pour justifier le maintien en détention. Suite à l'acquittement de Ignace BAGILISHEMA, la Chambre de première instance I a décidé de rejeter la requête du Procureur visant à son maintien en détention en attendant qu'il soit statué sur l'appel, au motif que l'accusé avait déjà montré sa coopération au cours des procédures initiales11. Partant de là, il appartient à l'accusation qui demande l'application de la mesure, de démontrer par des moyens convaincants le risque réel de fuite alléguée. Le risque devrait être étayé par des éléments tirés des faits de la cause et de la personnalité de l'acquitté.

2. La nécessité de préserver les preuves

Le deuxième motif pouvant justifier le maintien en détention réside dans le risque de voir l'acquitté remis en liberté faire disparaître les preuves en intimidant les témoins et les victimes12 ou même entrer en contact avec d'autres personnes pour entraver la procédure d'appel. Le risque de disparition de preuves vise tant les éléments matériels de nature à contribuer à la manifestation de la vérité que les déclarations des témoins (risque de subornation)13.

La Chambre de première instance du TPIR a cependant estimé que l'argument tiré du risque de disparition de preuves par intimidation des témoins et des victimes n'était pas fondé, car il est rare que les témoins soient entendus dans la procédure d'appel qui est

9 A. M. LA ROSA, « Défi de taille pour les Tribunaux pénaux internationaux Ó conciliation des exigences du Droit international humanitaire et d'une procédure équitable », in Revue internationale de la Croix Rouge, no 828, Genève, 1997, pp. 693-707, p. 699.

10 G. GASORE, La coopération des Etats avec le TPIR, mémoire de Licence, Huye, U.N.R., Faculté de Droit 2006, p. 2, non publié.

11 Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA, supra note 8, par. 11.

12 Id., par. 2 qui reproduit les moyens du Procureur appuyant sa requête.

13 H. D. BOSLY et D. VANDERMEERSCH, Droit de procédure pénale, 2e éd., Brugge, La Charte, 2001, p. 619.

généralement une procédure sur pièces. Si la situation se présentait, le Procureur pourrait solliciter de la Chambre d'appel des mesures supplémentaires de protection des témoins14.

S'agissant de la nécessité d'éviter le risque pour l'acquitté de se rallier avec des tiers afin de faire obstacle à la procédure d'appel, il semble que ce risque n'est que très relativement évité par le maintien en détention, en raison des possibilités offertes aux détenus du TPIR de communiquer avec l'extérieur, en application du droit à communiquer avec le monde extérieur garanti dans les instruments internationaux15. Le détenu a droit aux visites16 et peut communiquer avec sa famille et toute personne de son choix par téléphone ou par lettre, sous réserves des mesures d'inspection et de surveillance que peut lui imposer l'administration du quartier pénitentiaire17. Si ces restrictions ne sont pas bien assurées, les visiteurs pourraient coopérer pour entraver le cours de la justice18.

3. La nécessité de sécurité

Cette raison n'a pas été concrètement développée par la jurisprudence des deux tribunaux pénaux internationaux ad hoc (TPIR et TPIY) dans les procédures d'appel. Il apparaît que la sécurité des témoins et des victimes n'est pas leur première préoccupation à ce stade de procédure.

Toutefois, la sécurité des témoins et des victimes est intimement liée au deuxième motif puisque s'il est admis que les témoins et les victimes peuvent être intimidés par l'accusé une fois remis en liberté, il s'entend que de tels agissements constituent également une menace à leur sécurité. Le besoin de sécurité est implicitement invoqué par le Procureur lorsqu'il soulève la question de la protection des preuves. De surcroît, on a toujours reproché à l'accusation de demander de maintenir l'accusé en détention pour donner aussi

14 Le Procureur c. Ignace BAGILISHEMA, supra note 8, par. 9.

15 Voir à titre d'exemple par. 37 des Règles minima pour le traitement des détenus adoptées par le premier Congrès des Nations unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants, tenu à Genève en 1955 et approuvées par le Conseil économique et social dans ses résolutions 663 C (XXIV) du 31 juillet 1957 et 2076 (LXII) du 13 mai 1977. Voy. également les Règles pénitentiaires européennes de 1973 telles que révisées jusqu'à ce jour, règle 24. 1.

16 Voir art. 61 du R.D.P.J.A. adopté le 9 jan. 1996 libellé comme suit Ó « Tout détenu a le droit de recevoir à intervalles réguliers la visite de membres de sa famille et de ses amis, sous réserve de l'article 64 ainsi que des restrictions et des mesures de surveillance que peut imposer le Commandant en consultation avec le Greffier.».

17 Voir art. 58 du R.D.P.J.A. ainsi libellé Ó « Sous réserve de l'Article 64, tout détenu a le droit, sous la surveillance et dans les limites de temps que le Commandant juge nécessaires, de communiquer avec sa famille et toute autre personne avec qui il est de son intérêt légitime de correspondre par lettre et par téléphone, à ses propres frais. Dans le cas des détenus indigents, le Greffier peut accepter que les dépenses correspondantes soient prises en charge par le Tribunal, dans des limites raisonnables. ».

18 M. BEN-BELLA, The Defense right to communication of the accused versus the need protection for witnesses at the ICTR, mémoire de Licence, Huye, N.U.R., Faculty of Law, 2006, p. 11, non publié.

satisfaction à la conscience publique émue, troublée, ébranlée par le crime,19une situation probable pour les cas de crimes graves reprochés aux personnes poursuivies par les deux tribunaux pénaux internationaux ad hoc. Ainsi, la sécurité est aussi envisagée au bénéfice de la personne détenue notamment s'il y a des risques de représailles.

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