WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le Front Farabundo Marti de Libération Nationale au Salvador: 1980- 2009

( Télécharger le fichier original )
par Kacou Elom Jean-Michel ADOBOE
Université de Lomé Togo - Maà®trise en histoire contemporaine 2010
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

1.2. L'assassinat de Mgr Romero et la remontée des violences

Parler du Salvador, c'est aussi évoquer la mémoire et le rôle joué par le saint évêque d'alors de San Salvador, Mgr Oscar Romero, dans la lutte contre l'injustice sociale dont est victime la population salvadorienne. Qui est donc Mgr Romero (cf. photo n°2) ? Et quel rôle a-t-il joué dans la société salvadorienne ?

Oscar Arnulfo Romero naît en 1917 d'un modeste télégraphiste de Ciudad Barrios au Salvador. A dix-neuf ans, il part pour Rome où six années de formation théologique à l'Université Grégorienne lui forgent une mentalité très traditionnelle. Ordonné prêtre en 1942, il rentre dans son pays et y demeure relativement effacé (Lemoine 1988 : 299). Les conditions misérables de ses concitoyens l'amènent à travailler avec les communautés chrétiennes de base ; mais en 1977 en raison de ses positions conservatrices, il est choisi pour prendre la tête de l'Eglise salvadorienne.

Ce choix était salué par les milieux tels que la classe oligarchique et l'armée qui, en voyant le caractère simple et conservateur du nouvel évêque, pensaient avoir un représentant de l'Eglise qui ne les dérangerait pas. C'est cet avis que partage le moine bénédictin brésilien Marcelo Barros dans l'un de ses articles : «  Le gouvernement et l'oligarchie se réjouirent beaucoup quand il fut nommé archevêque. Il était si simple et humble qu'ils pensèrent pouvoir facilement le manipuler. Un évêque timide et aussi conservateur était l'idéal pour cette maffia sans miséricorde qui, depuis quarante ans, s'était installée au pouvoir et avait empêché les petites réformes sociales et politiques. Beaucoup de chrétiens qui assistaient à la cérémonie de prise de possession de Mgr Romero comme archevêque de San Salvador retournèrent chez eux tristes et déçus par l'homélie du nouvel archevêque. »48(*). Il commence son ministère pastoral d'archevêque à l'époque la plus dure de la répression contre le peuple et l'Eglise. Le 28 janvier 1977, alors qu'il n'est pas encore été intronisé, plusieurs prêtres étrangers sont expulsés par le gouvernement, dont certains après emprisonnements et tortures.

Cependant la vie de Mgr Romero fut marquée par un changement inédit. Celui qu'on percevait comme un homme conservateur qui pourrait être à la solde du régime militaire et de l'ordre oligarchique, se présentera plus tard comme un opposant au régime répressif installé au Salvador. Certains éléments ont milité au changement de sa pensée et de sa ligne pastorale. La répression, les tortures, les emprisonnements voire les assassinats dont étaient victimes les autorités ecclésiales qui luttaient pour l'amélioration des conditions de vie des salvadoriens, le touchèrent énormément. L'assassinat, le 12 mars 1977, de son ami le jésuite Rutilio Grande49(*), fondateur des communautés de base paysannes d'Aguilares, l'assassinat encore du prêtre Alfonso Navarro, les menaces de mort portées par l'Union guerrière blanche- escadron de la mort paramilitaire- contre tous les jésuites, le touchent profondément et marquent un tournant dans sa vie (Lemoine 1988 : 300).

Après cet assassinat du père Rutilio, Mgr Romero rompt avec le pouvoir militaire, prend le parti des pauvres et légitime la violence révolutionnaire en donnant son appui aux « organisations populaires ». Certains ont même parlé dans son cas de « conversion »50(*). Il déclare alors : « l'Eglise ne peut être absente de la lutte pour la libération » et, s'inscrivant désormais dans la droite ligne de la théologie de la libération, bascule dans l'opposition (Lemoine 1988 : 300).

Durant trois années, dans un climat de répression féroce, l'archevêque de San Salvador se fut la « voix des sans voix » et devient une figure mondiale de l'Eglise engagée dans la lutte contre les injustices sociales et pour l'amélioration des conditions de vie.

Photo n°2 : Mgr Oscar Arnulfo Romero y Galdamèz, archevêque de San Salvador de 1977 à 1980

Source : www._groupes-jonas_com-neaojonas-modules-upload-upload-romero_jpg_fichiers.

Défenseur acharné des Droits de l'homme, Mgr Romero appuie le développement des Communautés de base et se prononça contre toute ingérence étrangère en l'occurrence des Etats-Unis. C'est dans ce sillage, qu'il adresse une lettre au président Carter pour lui demander de cesser l'aide militaire octroyée au gouvernement salvadorien dans sa lutte contre les mouvements révolutionnaires au nom de la lutte contre le communisme. Mgr Romero s'insurgea contre le régime militaire : « le pouvoir politique est aux mains de militaires sans scrupules qui savent faire qu'une chose : réprimer le peuple et servir les intérêts de l'oligarchie. » (Lemoine 1988 : 300). Mais aussi contre l'opposition qu'il dénonce en particulier (9 mars 1980) : « Nous ne passons pas sous silence les péchés de la gauche déclare-t-il, mais ceux-ci sont infiniment moins graves que la violence répressive » (Lemoine 1988 : 300).

Face aux répressions que subissait la population, Mgr Romero appelait les soldats à la désobéissance dans sa dernière homélie du 23 mars 1980 : « Frères, vous êtes du même peuple que nous, vous tuez vos frères paysans. Devant l'ordre de tuer donné par un homme, c'est la loi de Dieu qui doit prévaloir, la loi qui dit : tu ne tueras point. Un soldat n'est pas obligé d'obéir à un ordre qui va contre la loi de Dieu. Une loi immorale, personne ne doit la respecter. Au nom de Dieu, au nom du peuple souffrant dont les cris toujours plus grands montent jusqu'au ciel, je vous en supplie, je vous le demande, je vous l'ordonne : arrêtez la répression ! » (Lemoine 1988 : 300).

Accusé de « communiste infiltré dans l'Eglise », l'archevêque de San Salvador, compte tenu de ses engagements en faveur du peuple salvadorien et le pouvoir militaire, avait fait de nombreux ennemis. Par deux fois des tentatives d'assassinats échouèrent. Mais le 24 mars 1980, pendant qu'il célébrait une messe à l'hôpital de la Divine Providence, il fut assassiné par un groupe de paramilitaires (les escadrons de la mort). Il était exactement 18h 25 minutes. Mgr Romero avait 62 ans. On l'emmena à l'hôpital mais il y arriva mort. Cet assassinat a été commandité par les escadrons de la mort à la solde du gouvernement salvadorien. En l'occurrence ce fut le major Roberto d'Aubuisson, futur fondateur du fameux parti ARENA, qui fut mis en cause dans cet assassinat.

Cet assassinat sera à l'origine de la remontée des violences dans le pays et aussi du déclenchement de la guerre civile salvadorienne meurtrière qui va durer douze ans comme le souligne un rapport de l'ONU51(*). La cérémonie de ses obsèques (30 mars) sera ensanglantée (35 morts et 200 blessés) par tirs déclenchés par la garde nationale (Erdozain et Barth 1982 : 29).

* 48 Information tirée de Barros M. (2005) : « El Salvador- il y a vingt cinq ans, Mgr Oscar Romero était assassiné. L'actualité d'une vie » in www. Alterinfos.org, consulté le 08 mars 2010 à 13h 28 min.

* 49 Le père Rutilio Grande, était curé du Paisnal près de Guazapa, au nord de la capitale (Rouquié 1991 : 107).

* 50 La fe de un pueblo. Historia de una communidad cristiana en El Salvador (1970-1980), San Salvador, UCA, 1983, pp. 100-101, cité par Rouquié (1991: 108).

* 51 En 1993, une enquête de l'ONU a confirmé que le major d'Aubuisson a ordonné l'assassinat de Mgr Romero, déclenchant ainsi la guerre civile salvadorienne cf. Rapport de la commission de la vérité de l'ONU sur le Salvador, le 1er avril 1993, cité par « Salvadorien Civil War » in www. Answers. Com, consulté le 26 janvier 2010.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus