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La fratrie en droit

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par Thibaut GOSSET
Université Paris Sud - Master II Droit 2013
  

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§2. L'origine des liens fraternels

110. Les critères de définition de la fratrie semblent être naturellement réunis du fait de l'existence d'une parenté commune. Pourtant, il apparaît rapidement que la qualité de frère n'est pas indissociable de la filiation (A) et dépend également des liens de fait qui existent au sein de la fratrie (B).

A/ Le rôle de la filiation dans la construction de la fratrie

111. Filiation et fratrie - De manière évidente, la filiation commune aux frères et soeurs justifie certaines règles qui leur sont applicables. Les dérogations admises s'agissant des dons d'organes entre vifs au profit des frères et soeurs (cf. supra n° 82) s'expliquent par la compatibilité immunologique des donneur et receveur, découlant de leur même parenté biologique.

En dehors de ces hypothèses où le lien de sang est une condition patente, la place de la filiation biologique ou juridique ne semble pas devoir recevoir l'importance que certains y attachent175(*). Il arrive que l'existence d'une filiation commune ne suffise pas à justifier l'existence d'une fratrie, et que, réciproquement, la fratrie découle de liens non juridiques.

112. Filiation et éclatement - D'une part, la fonction d'éclatement de la fratrie se justifie par l'existence de liens susceptibles d'entraver l'émancipation des frères et soeurs (cf. supra n° 73). Certainement, l'existence d'une parenté commune peut faire présumer de tels liens, subis et tournés vers une généalogie passée : le lien entre fraternité et parenté semble si naturel qu'il n'est pas discuté.

113. Toutefois, le droit n'accorde pas toujours une place déterminante à la filiation biologique des frères et soeurs. En effet, en dépit de l'existence d'un patrimoine génétique identique, les enfants issus de mêmes dons de gamètes ne peuvent établir leur filiation à l'égard du donneur commun (C.civ., art. 311-19). Il en découle que les enfants issus de mêmes dons, biologiquement frères et soeurs, sont traités par le droit comme des tiers. La situation est inédite, car le droit a toujours maintenu les empêchements à mariage entre frères et soeurs biologiques, après une adoption plénière (C.civ., art. 356) ou lorsque l'établissement de leur filiation se heurtait à des obstacles de droit (C.civ., art. 342-7). Désormais, au hasard des rencontres, il se peut que les enfants issus du même géniteur entretiennent des relations qui seraient en principe qualifiées d'incestueuses176(*).

L'évolution des techniques d'assistance médicale à la procréation rend donc la parenté biologique impropre à justifier la prohibition de l'inceste et, plus généralement, la fonction d'éclatement de la fratrie177(*). Cette fonction semble se justifier bien davantage par les rapports de fait existant entre frères et soeurs que par lien juridique qui, lorsqu'il est purement abstrait, ne crée aucun obstacle à l'autonomie des collatéraux : la filiation n'y est pas déterminante.

114. Filiation et solidarité - D'autre part, la fonction de solidarité dépend peu du lien de parenté commun aux frères et soeurs. Cette fonction résulte, en majorité, de facultés offertes aux frères et soeurs en cas de défaillance des débiteurs légaux d'obligations alimentaires, le frère se présentant comme une « "réserve" face au manque ou à l'adversité qui affaiblirait la famille »178(*).

115. La fonction de solidarité de la fratrie repose sur la carence de la famille à laquelle appartiennent les frères aidant et aidé179(*). Selon le principe de subsidiarité (cf. supra n° 90), la justification de la fraternité réside donc dans l'existence d'une obligation d'assistance de la famille défaillante à l'égard du frère dans le besoin et l'appartenance du frère aidant à cette même famille180(*). Or, cette appartenance à une même famille peut résulter d'une parenté reconnue ou non juridiquement.

Un enfant légitime pourrait ainsi entretenir l'enfant incestueux de son père en cas de défaillance de ce dernier. Le frère aidé serait effectivement lésé par la carence du parent, débiteur d'une obligation naturelle181(*), et le frère aidant appartiendrait incontestablement à la famille du défaillant. Seraient caractérisées les conditions de mise en oeuvre de la fraternité, en dépit de l'absence d'une fratrie juridiquement reconnue. Là encore, la filiation juridique est indifférente au régime de la fratrie.

117. Certainement, le critère de la parenté commune est déterminant dans l'attribution de qualité de frère. Toutefois, il n'apparaît ni exclusif, ni impératif, et doit être corroboré, voire suppléé par d'autres données plus factuelles.

* 175 Véronique TARDY, « Les fraternités intrafamiliales et le droit », art. cit.

* 176 Didier GUÉVEL, « La famille incestueuse », Gaz. Pal., 16 oct. 2004, n° 290, p. 2, spéc. n° 24

* 177 Agnès FINE, « Liens de fraternité », IS, mai 2012, n° 173, p. 36, spéc. p.42-43

* 178 Annette LANGEVIN, « Frères et soeurs, les négligés du roman familial », dans La fratrie méconnue, op. cit. p. 19

* 179 Vivien ZALEWSKI, Familles, devoirs et gratuité, Thèse, L'Harmattan, 2004, p. 205

* 180 Pascal BERTHET, Les obligations alimentaires et les transformations de la famille, op. cit., p. 86, n° 141

* 181 Req., 3 avr. 1882, D. 1882, I. 250 ; George RIPERT, La règle morale dans les obligations civiles, op. cit., p. 389

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