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Le phénomène d'acquisition des anciennes demeures par les étrangers, un processus de mise en tourisme de la médina de Fès?

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par Widad Jodie BAKHELLA
Université Mohammed V  - Master recherche en aménagement, développement local et gestion des territoires 2008
  

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II- Etat des lieux du phénomène des acquisitions de vieilles maisons dans les médinas marocaines

De plus en plus d'étrangers investissent dans les médinas marocaines. Ceux-ci acquièrent de vieilles demeures pour y séjourner en tant que résidence secondaire, y monter un commerce ou s'y établir. Ainsi, plusieurs médinas, quelles soient grandes ou petites, ont été touchées, à des degrés différents, par ce flot.

Des médinas comme celle de Tanger, Asilah, Chaouen, Tétouan, Rabat s'ouvrent de plus en plus à un public international. Cependant, le développement d'une communauté étrangère aussi importante reste l'apanage de villes comme Marrakech, Essaouira ou encore Fès.

C'est ainsi que nous nous arrêterons, dans ce titre, sur l'état des lieux de ce phénomène dans les deux villes de Marrakech et Essaouira, car c'est par ces deux médinas que le phénomène a commencé, avant de traiter le cas de la ville de Fès.

1- Marrakech : le nouvel Eldorado

La médina de Marrakech est la plus grande médina du Maroc en superficie et en hommes. Elle s'étend sur 700 ha dont 450 ha bâtis, et sa population a atteint 250 000 habitants en 2004, selon le Recensement Général de la Population et de l'Habitat.

La place de la médina dans l'ensemble du périmètre urbain demeure prépondérante avec en 1981, 20% du total des espaces urbanisés31.

31 Chiffres extraits des études préliminaires au Schéma Directeur de la ville de Marrakech, cité par A-C. KURZAC SOUALI (2006, p.87).

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L'espace intra-muros est éventré par de nombreuses portes qui permettent la circulation routière en ses périphéries, et est entouré de remparts discontinus qui laissent la médina s'ouvrir vers l'extérieur.

A l'heure du protectorat, Hubert Lyautey, le premier Résident Général français, a condamné Marrakech à devenir la capitale du tourisme et a concentré ainsi tous ses efforts exclusivement à cette fin. Ainsi, Marrakech devint, et grâce à ses particularités, la destination la plus prisée par les touristes. C'est ainsi que le seul nom de Marrakech évoque toute une série d'images enracinées dans l'imaginaire occidental.

Au cours des deux dernières décennies, et devant une croissance continue du nombre des touristes, la médina de Marrakech a été principalement transformée par les actions conjointes des acteurs publics et d'acteurs privés particulièrement étrangers.

En effet, outre les interventions des acteurs publics pour la revalorisation du tissu traditionnel et de son environnement urbain, la médina de Marrakech a été inscrite sur la Liste du Patrimoine Mondial de l'UNESCO en 1985 et la place Jamaâ El Fna a été proclamée Chef-d'oeuvre du patrimoine oral et immatériel de l'humanité en 2001. Toutes les deux bénéficient d'une double reconnaissance internationale au titre de patrimoine matériel et immatériel. La médina se transforme ainsi et peu à peu d'un espace à visiter et à parcourir à un espace de séjour. On parle ici des riads et anciennes maisons qui y sont achetés par des étrangers. Le phénomène semble avoir commencé à Marrakech effectivement, dès les années 1960 (BERRIANE, 2003). Les adeptes de ce type de logement étaient, à l'époque, des hippies, des artistes et de grands couturiers. Cependant, il y a des années avant, que le peintre Jacques Majorelle avait découvert le charme de l'Orient à Marrakech, la ville ocre. En 1917, il décide de s'y établir en achetant un riad dans l'ancienne médina avant d'être obligé de la quitter par la suite au début des années 1920 à cause de la politique d'urbanisme liée au protectorat qui interdisait l'installation des Européens dans le centre historique.

Aujourd'hui, le cercle s'est élargit et le phénomène s'est amplifié à partir de la moitié des années 1990 pour concerner d'autres couches de la société occidentale. Des intellectuels, des cadres supérieurs, des touristes branchés...etc. tous se bousculent aux portillons de ces demeures. Le développement d'une communauté aussi dynamique qu'à Marrakech reste

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inégalé au Maroc (ESHER, 2000). En effet, selon les travaux de relevés menés par le géographe allemand A. ESHER, à la fin de l'année 2000, 457 étrangers ont acheté plus de 500 maisons dans la médina de Marrakech. Ces nouveaux venus sont de nationalités différentes dont les français représentent 60%. Leur présence est attestée dans presque toute la médina comme l'illustre la Carte 2.

Carte 2. Répartition géographique des propriétés étrangères dans la médina de Marrakech

Source: ESCHER A., PETERMANN S., CLOS B., (2000), "Le bradage de la médina de Marrakech?"

In: Le Maroc à la veille du troisième millénaire- Défis, chances et risques d'un développement durable, Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Rabat, Colloques et Séminaires, 93, Rabat, p.224.

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Au départ, ce sont des étrangers qui ont exprimé un enthousiasme pour l'acquisition de riads ou maisons traditionnelles dans l'objectif de les rénover pour y habiter une partie de l'année. Mais, ce mouvement, d'abord disparate et varié, a vite intéressé ceux qui font de leur habitation en médina une résidence principale mais aussi et surtout les investisseurs qui donnent aux vieilles demeures une vocation touristique en les aménageant comme maison d'hôtes. En effet, sur les quelques 400 riads répertoriés à Marrakech, presque 120 ont été transformés en maisons d'hôtes32. Sur ce total, plus de 90% sont détenus par des Européens.

Ces étrangers ne s'installent pas aléatoirement, le choix de la localisation est très sélectif, il obéit à des critères bien précis liés, d'une part à la proximité du noyau urbain et de la place Jamaâ El Fnaa où sont présents les commerces et l'artisanat, et d'autres part, à la facilité d'accès au quartier d'habitat, sa sûreté et son bon état.

Aujourd'hui, Marrakech, qualifiée de "la capitale des riads" par la presse marocaine, est devenue saturée, les prix y sont exorbitants et hors de portée des jeunes investisseurs de classe moyenne qui préfèrent investir dans d'autres médinas comme celle d'Essaouira, à des prix encore plus ou moins accessibles.

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