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Analyse sociopolitique de la crise de l'enseignement supérieur au Burkina Faso: Cas de l'université de Ouagadougou

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par SIDI BARRY
Université de Ouagadougou (UO) - DEA Droit Public: Option: Science Politique 2011
  

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    UNIVERSITE OUAGA II

    -=-=-=-=-=-=-

    UNITE DE FORMATION ET DE RECHERCHE EN

    SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES (UFR/SJP)

    -=-=-=-=-=-

    DEA : DROIT PUBLIC/SCIENCES POLITIQUES

    -=-=-=-=-=-

    OPTION : SCIENCES POLITIQUES

     

    BURKINA FASO

    Unité - Progrès -Justice

    ---------

    ANNEE UNIVERSITAIRE : 2010/2011

    THEME :

    ANALYSE SOCIOPOLITIQUE DE LA CRISE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR AU BURKINA FASO : CAS DE L'UNIVERSITE DE OUAGADOUGOU

    Présenté par : Sous la direction du :

    Sidi BARRY Pr Fernand SANOU

    Mai 2011

    SOMMAIRE

    DEDICACE I

    REMERCIEMENTS II

    SIGLES ET ABREVIATIONS III

    SOMMAIRE 1

    Introduction générale 2

    PREMIERE PARTIE : ASPECTS THEORIQUES 4

    Chapitre 1: CADRE CONCEPTUEL ET METHODOLOGIQUE 5

    Section 1 : Problématique 5

    Section 2 : méthodologie de recherche 25

    Chapitre 2 : Evolution du mouvement étudiant et enseignant Burkinabé 29

    Section 1 : Evolution du mouvement étudiant Burkinabé 29

    Section 2 : Le mouvement enseignant Burkinabé 42

    DEUXIEME PARTIE : FACTEURS SOCIAUX ET POLITIQUES DE LA CRISE DE L'ENSEIGNEMENTSUPERIEUR 46

    Chapitre 1 : Les déterminants sociaux de la crise de l'enseignement supérieur 47

    Section 1 : La précarité des conditions sociales d'existence et d'étude des étudiants 47

    Section 2 : Analyse des facteurs de frustration et de contestation des enseignants du supérieur 58

    Chapitre 2:De la mission traditionnelle de transmission du savoir à la lutte politique. 67

    Section 1 : Le syndicalisme étudiant:entre mobilisation corporatiste et instrumentalisation politique . 67

    Section 2 : Articulation entre les franchises universitaires et les crises universitaires 74

    CONCLUSION 80

    BIBLIOGRAPHIE 82

    ANNEXES 87

    INTRODUCTION GÉNÉRALE

    La crise économique des années 1980/1990 a eu des répercussions sur les économies de la plupart des pays Africains amenant du coup les Etats à effectuer un recul sur leurs devoirs régaliens notamment dans les secteurs sociaux (Education et santé). En effet, la Banque Mondiale qui est venue au chevet des Etats en crise proposa des mesures de « redressement » essentiellement basées sur le retrait de l'Etat des secteurs jugés budgétivores et non rentables. L'application de ces mesures connues sous le nom de Programmes d'ajustement structurel (PAS) a eu pour conséquence le tarissement des ressources allouées à l'enseignement supérieur entrainant une montée des remous sociaux et de la contestation dans les Universités un peu partout en Afrique.

    L'enseignement supérieur au Burkina Faso depuis plusieurs années est traversé par des crises multiples et multiformes. Ces crises qui sont nées autour des années 1990 se sont accentuées avec l'application des Programmes d'Ajustement Structurels (PAS) qui ont eu pour conséquences la remise en cause de la pertinence, de la qualité, du financement et de la gestion au niveau de l'enseignement supérieur. Ainsi, le tarissement des ressources au niveau de ce secteur va entrainer la dégradation vertigineuse des conditions sociales d'existence des étudiants, des infrastructures, du milieu d'apprentissage, le déclin de la recherche et l'amplification des conflits entre les syndicats d'étudiants, d'enseignants et l'administration de l'enseignement supérieur. Cette montée en puissance de « l'ajustement éducatif » a entrainé des mobilisations au sein des acteurs de l'enseignement supérieur fortement marqués par des motivations politiques, matérielles et sociales.

    Selon Fernand SANOU1(*) : « La politique du « tout primaire » a en effet conduit le Burkina Faso non seulement à la marginalisation/clochardisation de l'enseignement supérieur et des enseignants universitaires mais aussi à la dégradation de la qualité de l'enseignement de base, via celle de la formation des maîtres. A vrai dire, le Burkina Faso est l'illustration parfaite du bon élève des institutions de Bretton Woods, qui recule dans le classement des nations au fur et à mesure qu'il avance dans l'estime affichée de ces institutions ».

    Cette crise structurelle et conjoncturelle de l'enseignement supérieur va accentuer la recrudescence de l'activité syndicale donnant ainsi naissance à de nouveaux conflits autour de la « question scolaire ». Les acteurs de l'enseignement supérieur qui se plaignent régulièrement de leur mauvaise condition de vie et de travail et n'hésitent pas à manifester leur mécontentement à travers des actions de protestation (marches, meetings). Ces vagues de contestation souvent virulentes paralysent le fonctionnement de l'Université et met à rude épreuve le consensus entre les acteurs du monde Universitaire.

    Pour mieux cerner la crise de l'enseignement supérieur au Burkina Faso, il apparaît difficile d'ignorer les enjeux connexes, c'est- à- dire ceux sociopolitiques, économiques, et culturels qui dominent l'orientation et les motivations de la contestation à l'université de Ouagadougou. Aussi, l'étude du phénomène de la crise de l'enseignement supérieur est-elle indissociable du mouvement étudiant et des syndicats des enseignants qui demeurent le moteur principal de la contestation à l'Université.

    A travers le thème intitulé : « Analyse sociopolitique de la crise de l'enseignement supérieur au Burkina Faso : Cas de l'université de Ouagadougou», nous proposons d'analyser les mécanismes sociopolitiques qui déterminent la crise de l'enseignement supérieur au Burkina Faso.

    PREMIERE PARTIE : ASPECTS THEORIQUES

    CHAPITRE 1: CADRE CONCEPTUEL ET METHODOLOGIQUE

    SECTION 1 : PROBLÉMATIQUE

    L'université de Ouagadougou, bien qu'étant un centre de production et de diffusion des connaissances, a aussi été de tout temps un lieu de luttes, de conflits, à savoir un théâtre où naissent, se côtoient et s'affrontent des forces, des courants idéologiques et politiques contraires. Cette situation a entrainé une forte interdépendance entre la dimension corporatiste et la dimension politique dans les revendications à l'université.

    Depuis 1990, l'université de Ouagadougou s'est enfoncée dans la crise au fur et à mesure que l'Etat, son principal soutien essuyait la contestation démocratique et les mesures d'ajustement structurel. A l'époque, partout en Afrique les Universités sont accusées à tort ou à raison par les institutions de Bretton Woods de coûter trop chères pour ce qu'elles apportent, d'être absentes des recherches, de proposer des formations inadaptées aux besoins et de constituer une fabrique de chômeurs.

    La mise en oeuvre des Programmes d'Ajustement Structurel (PAS) proposés par le FMI et la Banque Mondiale a eu des conséquences désastreuses dans l'enseignement supérieur entrainant, l'émergence des mouvements sociaux qui ont remis en cause et souvent de manière violente les mesures d'ajustement imposées par ces institutions internationales.

    Ces conflits et revendications sont nés du fait de la dégradation continue des conditions de vie et d'étude des étudiants et surtout la dévalorisation de la fonction enseignante au supérieur depuis l'application des mesures de l'ajustement éducatif. L'adoption des PAS a ainsi réduit les budgets de l'éducation, éliminée les aides et avantages aux étudiants et enseignants.

    Par conséquent, à travers les mobilisations et les luttes, le mouvement étudiant et enseignant s'est positionné désormais comme une force sociale capable d'ébranler les idéologies et les institutions étatiques. Les pouvoirs voyaient donc d'un mauvais oeil ces «menées subversives » d'autant plus que leurs « mobiles inavoués » seraient éloignés des préoccupations des étudiants et enseignants.

    Par ailleurs, si tout le monde s'accorde à dire que la crise de l'enseignement supérieur au Burkina est inspirée par des causes multiples, il n'en est pas de même quand il s'agit des motivations et des mobiles profonds qui animent les actions protestataires des syndicats.

    Il est indéniable que les structures sociales, économiques, politiques, idéologiques et morales orientent les comportements, déterminent les attitudes et les choix politiques des acteurs ; en un mot leur participation à l'espace syndical et politique.

    Ainsi, nous conviendrons avec Marcel Mauss qu'un fait social est le produit d'une conscience collective et l'expliquer, c'est le rapporter au tout qui l'a produit.

    Pierre Bourdieu reconnait qu'il faut expliquer les pratiques sociales des acteurs par leurs déterminants sociaux dont  l'habitus en tant que «subjectivité socialisée » est le produit.

    Autrement dit, il existe des logiques sociales et politiques qui servent de terreau à la crise à l'Université de Ouagadougou. C'est pourquoi, l'étude de la crise de l'enseignement supérieur au Burkina Faso est indissociable des mécanismes sociaux et politiques qui sous-tendent, influencent les actions des acteurs à l'Université de Ouagadougou.

    PARAGRAPHE 1 : JUSTIFICATION DU CHOIX DU THÈME, PROBLÈME ET QUESTION GÉNÉRALE DE RECHERCHE

    A. Justification du choix du thème

    L'enseignement supérieur au Burkina depuis plusieurs années traverse une crise structurelle et conjoncturelle. En effet, grèves, année invalidée, campus bouclé par les forces de l'ordre, sont autant d'événements qui s'inscrivent désormais dans le panorama de la vie à l'université de Ouagadougou. Du reste, même si ces maux qui minent l'enseignement supérieur notamment l'université de Ouagadougou sont connus de tous, ils ont rarement été étudiés comme ils le méritent. Donc, ces faits ont suscité notre intérêt sur ce phénomène social assez controversé, à savoir la crise de l'enseignement supérieur.

    Il s'agira donc pour nous de porter un regard sociopolitique sur la crise de l'enseignement supérieur qui prend de l'ampleur et qui est d'actualité.

    Aussi, ce thème revêt une importance particulière car le secteur de l'enseignement supérieur au Burkina est confronté au phénomène récurrent des crises universitaires qui mettent non seulement à rude épreuve l'équilibre fragile qui prévaut dans ce secteur, mais aussi qui menacent la formation, voire l'avenir de la jeunesse estudiantine et partant de là, du développement du pays.

    Cette étude pour nous est une contribution modeste à l'éclairage du phénomène de la contestation estudiantine et enseignante, du mouvement étudiant et enseignant burkinabé et des causes politiques et idéologiques qui l'animent.

    B. Problème général

    Le problème général de la présente étude est lié à la compréhension et à l'analyse des mécanismes sociopolitiques qui déterminent la crise de l'enseignement supérieur au Burkina notamment à l'université de Ouagadougou.

    Nous recherchons à travers cette étude à comprendre et à analyser les mécanismes, les imbrications sociales et politiques qui sous-tendent et influencent la crise dans l'enseignement supérieur au Burkina.

    C. Question générale

    Quels sont les déterminants sociopolitiques de la crise dans l'enseignement supérieur au Burkina en l'occurrence à l'université de Ouagadougou ? 

    PARAGRAPHE 2 : REVUE DE LITTÉRATURE

    La crise à l'université d'Ouagadougou est indissociable de la crise des systèmes d'enseignement supérieur qui secoue le Burkina depuis les années 1990. Mais ce phénomène assez controversé et qui prend de l'ampleur n'a pas fait l'objet d'une véritable analyse sociopolitique en ce sens que la plupart des analyses ont occulté son aspect social et politique. La plus part des écrits sur la crise de l'enseignement supérieur au Burkina est traité dans la presse écrite où souvent, l'accent est plutôt mis sur la grogne estudiantine au détriment des motivations sociopolitiques qui sous-tendent cette crise. On doit noter que certains ouvrages, bien que n'ayant pas traité de façon spécifique la crise de l'enseignement supérieur ont essayé d'étudier les déterminants sociaux, politiques et économiques de ce phénomène en Afrique et au Burkina Faso surtout à l'université de Ouagadougou.

    Cette présentation thématique ci-dessous de notre revue littéraire nous permet à travers une analyse critique de regrouper les auteurs ayant traité le thème selon leurs convergences ou divergences.

    A. Le rôle et la place de l'école dans la société.

    L'école est à la fois reproduction des structures existantes, courroie de transmission de l'idéologie officielle, domestication mais aussi menace de l'ordre établi et possibilité d'affranchissement.

    Ainsi, pour le sociologue : «l'école n'est pas seulement un lieu de rencontre entre les acteurs individuels, mais aussi un espace politique car l'institution scolaire est investie par des groupes internes et externes notamment par l'Etat central, dans une optique stratégique, c'est-à-dire avec des projets qui visent à transformer son fonctionnement »2(*).

    BAUDELOT, ESTABLET, BOURDIEU, SNYDERS, pour ne citer que ceux-là affirment à travers leurs différents écrits que l'institution scolaire dans un pays capitaliste est assujettie au système d'économie de marché et vise une reproduction des structures existantes, donc des rapports sociaux de production.

    Pour Pierre BOURDIEU, cette reproduction des structures sociales se réalise à travers une alchimie qui consiste à perpétuer les inégalités sociales de façon individuelle, en «accordant aux individus des espérances de vie scolaire strictement mesurées à leur position dans la hiérarchie sociale et en une sélection qui, sous des apparences de l'équité formelle sanctionne et consacre des inégalités réelles. »

    Quant aux auteurs comme BAUDELOT et ESTABLET, l'institution scolaire assure deux rôles essentiels qui consistent à : « reproduire matériellement la division en classes, à maintenir, c'est-à-dire à imposer des conditions idéologiques des rapports de domination et de soumission entre deux classes antagonistes. »3(*)

    Pour ces deux auteurs, l'école occupe une place privilégiée dans la superstructure du mode de production capitaliste car elle est de tous les appareils idéologiques la seule à inculquer l'idéologie dominante sur la base de la formation de la force de travail.

    Par ailleurs, même si nous convenons avec ces deux auteurs que l'école assure la reproduction des structures existantes, force est de reconnaître qu'elle apparaît aussi comme un lieu où l'on observe les antagonismes sociaux.

    En effet, Georges Snyders4(*) écrit que l'école serait le lieu, le terrain où s'affrontent les classes dominantes et classes dominées. Selon lui, «l'équilibre des forces dans ce milieu est fragile car ce qui s'y passe reflète l'exploitation et la lutte contre l'exploitation ». L'auteur va plus loin dans son analyse et soutient qu'il s'agit d'une lutte où s'affrontent les forces du progrès et les forces conservatrices.

    Dans cet ordre de pensée, Gilbert MASSON, cité par Georges SNYDERS reconnait que «l'école n'est rien d'autre qu'une arme à deux tranchants en ce sens que la bourgeoisie est obligée d'instruire le prolétariat qui à son tour se sert de cette même instruction pour faciliter son organisation et élever sa capacité de lutte contre la bourgeoisie ».

    Ces analyses, quoique mettant à nu l'antagonisme des classes au sein de l'institution scolaire dans les sociétés capitalistes, ne reflètent pas forcément les réalités en Afrique. En effet, sur le continent, même si ce conflit des classes est perceptible au sein de l'école, force est de constater que chaque camp prétend lutter au nom de la masse dont il se croit porteur d'une mission historique.

    A ce sujet, Paul Nda5(*) analysant les conflits politiques et idéologiques de l'intelligentsia africaine et les enjeux symboliques et réels qui les dominent affirme que : « les conflits et les oppositions des intellectuels se nourrissent des problèmes sociaux, des conflits sociaux et autant qu'ils apportent forces et exacerbations à ceux-ci ».

    En ce qui concerne le cas spécifique du Burkina Faso, Fernand SANOU, pense que l'école joue un rôle essentiel dans la classification des individus ou des groupes sociaux en leur conférant une position sociale dans la société.

    Pour l'auteur : «Il est assez évident que depuis la colonisation, l'éducation scolaire est devenue un, sinon le facteur déterminant de la hiérarchisation sociale en Afrique d'une façon générale, au Burkina Faso d'une façon particulière... »

    Il continue et soutient que « le secteur moderne s'est développé surtout à partir de l'Etat et de l'administration. Les critères d'accès aux emplois dans cette administration, fixés depuis la colonisation, sont des diplômes scolaires dont la hiérarchie académique détermine la nouvelle hiérarchie sociale et économique, comme en témoignent tous les textes de la fonction publique et leur imitation par le secteur privé.» 6(*)

    Ces différents auteurs, en dépit de leurs analyses assez pertinentes sur les conflits, les antagonismes, le rôle et la place de l'école dans la société, passent sous silence le rôle et la place de l'enseignement supérieur notamment l'Université dans la contestation sociale et politique.

    B. L'Université et la contestation politique

    L'Université à travers le monde entier a toujours été un haut lieu de contestation, un espace où s'affrontent en permanence plusieurs groupes sociaux animés par des courants politiques et idéologiques divers. La forte surveillance policière des campus universitaires et le désir des pouvoirs publics de maitriser et contrôler ce lieu sont autant d'indices qui révèlent le caractère stratégique des campus. Ainsi, de nombreux auteurs placent les élèves, étudiants et enseignants dans une sorte de «front anti-pouvoir ».

    Analysant les mobiles profonds de l'agitation estudiantine Alain TOURAINE7(*) s'interroge en ces termes : « la lutte étudiante n'est-elle qu'une agitation où se manifeste la crise de l'université, où porte-t-elle en elle un mouvement social capable de lutter au nom d'objectifs généraux contre une domination sociale ? » 

    Quant à Pierre Bourdieu à travers une lecture sociologique du phénomène de la contestation estudiantine, il affirme sans détour que la «révolte étudiante » s'apparente plutôt à un conflit de génération, qui a pour enjeu réel et symbolique la lutte pour le pouvoir.

    Pour LEFEBVRE, la contestation estudiantine inaugure la grande contestation, à savoir celle de la société entière, de ses institutions, de ses idéologies. Cette alchimie politique qui aboutit à ce stade l'amène à accepter «la théorie de l'étincelle » qui met le feu aux matériaux inflammables. C'est ainsi que selon lui, les étudiants à travers la contestation politique s'attaquent violemment à la forme de l'enseignement qu'ils accusent de masquer les défauts du système. A ce stade, le mot d'ordre d' « université critique » devient essentiel.

    Les évènements de Mai 1968 qui ont ébranlé les pouvoirs à travers le monde ont révélé la force du mouvement étudiant. A travers une lecture marxiste de ce mouvement de contestation parti de Nanterre, Henri LEFEBVRE8(*), reconnait que la «révolution de mai 68 » marque l'année de la contestation étudiante à travers le monde. Selon lui, « le mouvement étudiant de 1968 est allé de la réflexion critique à la revendication, de la revendication à la contestation et de la contestation théorique à la pratique contestante ».

    Il est évident que les analyses faites par ces différents auteurs ne traduisent pas forcément la réalité dans les Université Africaines et précisément au Burkina Faso.

    C'est ainsi que, Diouf et Diop9(*) , analysant les causes profondes des évènements de Mai 1968 admettent que la volonté des étudiants est «de renverser le cours des choses en vue de favoriser l'avènement d'un contexte leur permettant de jouer leur rôle d'élite moderne de l'avenir, rôle traditionnel des étudiants africains ».

    Mais quoique indispensable à un éclairage et à une bonne compréhension sur le phénomène de la contestation politique en milieu universitaire, ces analyses demeurent insuffisantes car survolant les présupposés idéologiques et politiques qui dominent l'orientation des mouvements des acteurs universitaires notamment au Burkina Faso.

    Mamadou COULIBALY10(*) dans un ouvrage consacré à la place de l'enseignement supérieur dans le processus de démocratisation en Afrique admet qu'il faut « «établir une liaison claire entre l'activité cognitive de l'homme et sa prétention à s'opposer au politique. ». Selon lui, l'opposition permanente des intellectuels aux pouvoirs s'expliquerait du fait de leur vocation qui réside essentiellement dans l'affirmation de leur indépendance vis-à-vis du monde politique et qui leur permet de se consacrer à la recherche permanente de la vérité scientifique. Cette position confère aux Universitaires une autonomie de penser et d'action.

    L'auteur va plus loin dans son analyse et affirme que «l'application ou l'imposition de la politique dans les universités, par la suppression des franchises universitaires et les libertés contingentes, par des régimes non démocratiques, bloque inévitablement l'enseignement et la recherche et donc s'oppose à la méthode scientifique de ces centres d'excellence. »

    Ainsi, au nom de la dégradation de leur condition de vie et d'étude et des franchises universitaires bafouées, les universitaires dont les étudiants et les enseignants vont revendiquer des libertés, parmi lesquelles la liberté politique. Et selon COULIBALY, «lorsque ces revendications rencontrent l'ajustement structurel et le contexte de crise généralisée dans un univers d'analphabétisme et d'ignorance rationnelle, cela assure des prétentions de politiciens aux universitaires et chercheurs ».

    Analysant les raisons du contrôle accru des autorités publiques sur l'espace universitaire Pascal Bianchini11(*) soutient que : «La faiblesse de la légitimité des autorités politiques sur les campus et le caractère stratégique que revêt le contrôle de cet espace pour ces autorités les ont souvent conduits à développer une gestion policière et militaire de cet espace. De leur côté, les étudiants par leur activisme organisé (réunions, activités culturelles, sportives) tendent à occuper cet espace à leur manière ».

    En effet, selon les acteurs du monde universitaire, le campus demeure un « sanctuaire », un « territoire » où s'opèrent les alliances politiques, idéologiques et les stratégies de luttes.

    Ainsi, il existe une tradition conflictuelle entre les autorités et les acteurs du monde universitaire pour le contrôle de l'université qui constitue le lieu où s'élaborent les stratégies du mouvement enseignant et étudiant et le point de départ de la contestation.

    C. Ligne idéologique et politique des syndicats enseignants et étudiants burkinabè

    Le milieu universitaire façonne les individus, leur inculque des valeurs symboliques, des préférences, oriente leurs croyances, leurs choix idéologiques et politiques. En effet, la crise de l'enseignement supérieur notamment celle qui secoue l'Université de Ouagadougou depuis plusieurs décennies ne saurait s'étudier sans lien avec le syndicalisme enseignant et étudiant qui demeurent le principal moteur des revendications.

    Selon Pascal Bianchini (1997), le mouvement enseignant au Burkina Faso est né autour des années 1950 avec la création du personnel enseignant africain qui se transformera plus tard en Syndicat des Personnels Enseignants de Haute Volta (SPEAHV), puis en Syndicat National des Enseignants de Haute Volta (SNEAHV).

    Durant cette période le syndicat enseignant n'apparait pas comme une force de contestation mais les évènements du 3 Janvier 1966 marquent un épisode fondateur de l'enracinement et de la politisation du syndicalisme enseignant au Burkina.

    Le syndicat enseignant au Burkina marqué à ses débuts par l'hégémonie du Mouvement National de Libération (MNL) résiste à la confiscation du pouvoir par le régime de Maurice YAMEOGO, puis des régimes successifs. Par la suite, les professeurs estimant que le SNEAHV dominé numériquement par les instituteurs ne prenait pas suffisamment en compte leurs revendications corporatistes créèrent en Juillet 1972 le Syndicat Unique Voltaïque des Enseignants du Secondaire et du Supérieur (SUVESS).

    Lequel syndicat qui à son tour est dominé par des luttes hégémoniques, se politise et se radicalise. En effet, les années 1970 furent une période de la montée de l'action revendicative d'autant plus que ce fut une période, où l'entrée dans la fonction d'enseignant entrainait ipso facto l'adhésion à l'organisation syndicale. Pour Bianchini12(*), « C'est ainsi que se construit la réalité et le mythe d'un contre-pouvoir redoutable pour tous les régimes voltaïques, qu'ils soient civils ou militaires».

    Quand au mouvement étudiant burkinabé, il est né autour des années 1960 avec la création de l'UGEV en Juillet 1960 en tant que section de la FEANF. Son action s'est pendant longtemps exercée aussi à l'extérieur du pays, notamment en France avec l'Association des Etudiants Voltaïques en France (AEVF) et l'Association des Stagiaires Voltaïques (ASV) à Dakar. L'UGEV, dès sa naissance a aussi connu des conflits de courants politiques et idéologiques révolutionnaires proches de la FEANF, du MNL et du PAI.

    En effet, selon Hamidou DIALLO13(*), le mouvement étudiant burkinabè a été, dès sa naissance, fortement influencé par la FEANF dont il adopte les analyses et les mots d'ordre. Il préconise comme elle, le syndicalisme révolutionnaire avec «d'une part sur le plan corporatif, la défense des intérêts matériels et moraux des étudiants africains ; d'autres part, sur le plan politique, la lutte aux côtés des peuples africains pour la libération de l'Afrique du joug colonial ».

    Depuis sa naissance jusqu'en 1971 l'UGEV est dominée par le MNL, qui à cause de sa participation au gouvernement du général LAMIZANA, sera dénoncé au Vè congrès comme un parti « réactionnaire » et ses militants seront exclus de la direction du syndicat. Le MNL sera donc écarté de la direction du syndicat au profit du PAI pendant ce congrès qui adopte le mot d'ordre « d'intégration aux masses ».

    Cependant, l'hégémonie du PAI fut de courte durée car le VIè congrès se rallie au mot d'ordre de la « Révolution Nationale Démocratique et Populaire » de la FEANF qui est la conséquence directe de l'hégémonie des militants étudiants de l'ASV et de l'AEVF pochent des thèses « prochinoises ».

    Le VIIIè congrès de l'UGEV en 1977 marque un tournant décisif dans l'orientation politique et idéologique du mouvement étudiant burkinabé. En effet, le document final de ce congrès annonce clairement que : « si en Haute Volta, il nait un parti communiste qui mobilise et dirige les masses dans la lutte contre l'impérialisme principalement français et ses valets locaux, pour la réalisation de la Révolution Nationale Démocratique et Populaire, et bien, un tel Parti Communiste, nous le soutiendrons et cela dans le cadre du front uni anti-impérialiste que nous préconisons. Le marxisme-léninisme est l'idéologie de la classe ouvrière. Or, en Haute Volta, il nait et se développe une classe ouvrière qui prendra nécessairement connaissance du marxisme léninisme et un parti communiste naitra pour le plus grand bien du peuple voltaïque».14(*)

    Ainsi, à l'issue de ce congrès, l'UGEV se dote d'une ligne «anti-impérialiste et révolutionnaire ». Les analyses qu'elle a faites de la situation nationale la rapproche des groupuscules marxistes léninistes même si elle se défend d'en être la jeunesse, en affirmant son indépendance à l'égard des partis politiques et des syndicats.

    John David KERE,15(*) dans son analyse sur les syndicats et pouvoir au Burkina Faso soutient que cette alliance de l'UGEV d'avec les forces politiques et syndicales connaît son apogée au IXè congrès de l'UGEV tenu en avril 1979 et qui prône le mot d'ordre «d'inféodation aux masses ».

    La création en 1977 d'un nouveau parti communiste en l'occurrence l'Organisation Communiste Voltaïque (OCV) a été le point de départ d'une nouvelle crise au sein de l'UGEV. Cette crise aboutira en 1978 à une scission donnant naissance d'un coté à l'UGEV proche du PCRV et de l'autre l'UGEV dite « M21 » proche de l'Union des Luttes Communistes (ULC).

    Pascal BIANCHINI, analysant les raisons profondes de cette scission intervenue au IXè congrès, conclut à l'aboutissement d'une crise au sein de l'Organisation Communiste Voltaïque (OCV) et qui se scinda en 1978 en deux, avec d'un côté le PCRV et de l'autre l'ULC. Cette période marque la radicalisation du mouvement étudiant révélant ainsi le caractère névralgique de l'Université dans les jeux de conquête du pouvoir politique au Burkina.

    Cette orientation idéologique et politique radicale creusa davantage le fossé entre le mouvement étudiant et le pouvoir qui n'apprécie pas favorablement ces «mauvaises fréquentations » et « menées subversives » dont les mobiles seraient éloignés des préoccupations des étudiants.

    Cependant, les analyses de ces différents auteurs sur l'orientation idéologique et politique du mouvement enseignant et étudiant burkinabè quoique enrichissantes semblent incomplètes. En effet, ces écrits mettent peu l'accent sur les conditions de vie et de travail de ces derniers, leurs trajectoires sociales, géographiques et leurs intérêts particuliers dans un contexte de rareté de ressources et de crise économique généralisée.

    Par ailleurs, elles négligent les conditions socio-économiques des enseignants et étudiants qui se sont fortement dégradées ces dernières années suite aux nombreuses reformes éducatives dictées par les institutions de Breton Woods. Une bonne lecture sociopolitique de la crise de l'enseignement supérieur au Burkina Faso passe nécessairement par l'étude de la condition enseignante et étudiante qui serait l'élément catalyseur des luttes à l'Université de Ouagadougou. Ces analyses sur les organisations syndicales et politiques semblent insuffisantes du fait de la non prise en compte du paysage syndical et politique actuel.

    D. Conditions socio-économiques des étudiants et enseignants

    Analysant les raisons de la participation des étudiants à l'espace syndical universitaire, Gabin KORBEOGO16(*) articule son argumentation autour de l'hypothèse selon laquelle : « l'origine sociale et les conditions sociales d'existence déterminent les rapports des étudiants à l'espace syndical universitaire ».

    Pour lui, la précarité de la condition étudiante, le système de valeurs cristallisé par l'instance familiale, les trajectoires scolaires et géographiques déterminent les rapports des étudiants à l'espace syndical universitaire.

    Par ailleurs, l'auteur analyse «les événements sociaux qui ont occasionné un processus d'intériorisation des valeurs, d'attitudes ou de réceptivité de messages symboliques ».

    Dans ce mémoire de maitrise, les mouvements de grèves de 1991-1992 et celle dite de «52 jours » (1997) furent revisités avec à l'appui les expériences individuelles des acteurs ayant vécu directement ou indirectement les temps forts de ces turbulences à l'université de Ouagadougou.

    Cependant, cette analyse purement sociologique aborde essentiellement le processus d'intériorisation des valeurs et des normes à travers les trajectoires familiales, scolaires et géographiques des étudiants.

    Cette façon d'aborder le sujet nous parait réductrice car ne prenant pas suffisamment en compte les conditions socio-économiques des étudiants et surtout des enseignants qui seraient les principales causes de la colère et de l'engagement syndical de ces derniers.

    Pascal BIANCHI17(*), dans une analyse de la crise des systèmes d'enseignement et des reformes au Sénégal et au Burkina Faso (1960-2000) estime que cette crise s'explique par la place qu'a pris le diplôme dans la construction bureaucratique et qui permet à l'individu d'accumuler le pouvoir social et économique afin de s'intégrer au système socio-économique en place.

    Par ailleurs, l'auteur soutient que cette conflictualité autour de l'enseignement supérieur et les résistances développées par les différents acteurs ne sont pas étrangers à la montée en puissance de « l'ajustement éducatif » prôné par le FMI et la Banque mondiale vers la fin des années 1980.

    En effet, la crise économique ayant entrainé le dérèglement des économies Africaines dans les années 1980 a eu un impact sérieux sur la capacité des Etats à répondre aux fortes demandes sociales notamment en matière de santé et d'éducation. Ainsi les mesures de redressement ou de revitalisation «hyper-interventionniste» des institutions de Bretton Woods ont brisé le lien qui existait entre le diplôme et l'emploi en tarissant la source de financement et de promotion sociale que conférait l'enseignement supérieur aux couches sociales intermédiaires et inférieures.

    Au Burkina Faso, « l'ajustement éducatif » a rencontré de farouches résistances de la part des étudiants et des enseignants. Ces derniers se sont mobilisés autour de la thématique de la défense des libertés académiques, de l'amélioration de leurs conditions de vie et d'étude, de la valorisation du statut d'enseignant du supérieur, contre l'austérité budgétaire mais aussi contre l'impunité et l'injustice. Cette vague de contestation sans précédent des acteurs du monde éducatif a abouti à l'invalidation de l'année académique 1999-2000 et à la refondation de l'Université de Ouagadougou.

    Fernand SANOU18(*) constate que « contrairement aux discours officiels, les politiques éducatives suivies par le Burkina Faso depuis son indépendance ne laissent pas percevoir une foi réelle en l'éducation comme moteur du développement économique et social ».

    Il estime que « la dégradation du statut social et des conditions de vie et de travail des enseignants du supérieur est une conséquence directe de la politique prônée par la Banque mondiale, celle de mettre l'accent sur le primaire et de faire supporter le poids des autres ordres d'enseignement à leurs bénéficiaires ».

    Cette situation contrasterait avec le discours officiel des autorités sur l'importance de la valorisation du capital humain en vue du développement du pays. Ainsi, les enseignants et étudiants cachent mal leur mécontentement et constatent avec amertume que l'enseignement supérieur est devenu au fil des ans le parent pauvre du financement interne et extérieur.

    E. Note finale de lecture

    Au terme de notre revue littéraire, il importe de remarquer que le phénomène de la crise de l'enseignement supérieur a fait l'objet de plusieurs études et publications.

    Le mouvement étudiant et enseignant s'est révélé depuis la chute du régime de Maurice YAMEOGO le 3 Janvier 1966 comme une force sociale capable de s'affirmer, ayant son identité propre, ses motivations politiques et idéologiques.

    Il est clair que par leur grande capacité à échapper à l'emprise idéologique des classes dominantes, les organisations estudiantines et enseignantes ces dernières années ont constitué un important foyer de résistance, voire de la contestation politique. Analysant les raisons de la crise de l'enseignement supérieur au Burkina Faso, de nombreux auteurs soutiennent que cela a pour origine l'orientation idéologique et politique et la dégradation des conditions de vie et d'étude des étudiants et enseignants sur le campus. A cela s'ajoute, l'explosion de colère des enseignants du supérieur las d'attendre des réponses de la revalorisation de leur grille salariale depuis une décennie.

    Cependant, les analyses des différents auteurs sur la crise de l'enseignement supérieur au Burkina sont essentiellement focalisées sur les étudiants, la contestation politique et enfin les présupposés politiques et idéologiques des syndicats estudiantins. Aussi, les conditions socio-économiques des étudiants, des enseignants, leur condition de travail et la valorisation de leur statut n'ont pas été suffisamment abordés.

    Donc, la présente étude se donne pour ambition d'apporter un éclairage sous l'angle sociopolitique du discours, des pratiques et de la condition de deux groupes d'acteurs clés (enseignants et étudiants) profondément impliqués dans cette crise structurelle et conjoncturelle que traverse l'Université de Ouagadougou. Et surtout le récent mouvement du SYNADEC visant la revalorisation du statut des enseignants du supérieur et qui a paralysé l'Université en 2009.

    PARAGRAPHE 3 : PROBLÈME, QUESTION SPÉCIFIQUE ET HYPOTHÈSES DE RECHERCHE

    A. Problème spécifique

    Les études antérieures sur la crise de l'enseignement notamment à l'université de Ouagadougou sont quasi inexistantes et même celles qui existent n'ont pas suffisamment mis l'accent sur l'analyse sociopolitique de cette crise.

    A travers cette étude, il s'agit pour nous de donner la parole aux acteurs du monde universitaire afin de saisir les logiques sociales, économiques, les présupposés politiques et idéologiques qui sous-tendent la crise à l'université de Ouagadougou.

    B. Question spécifique

    Quelles sont les logiques sociales et politiques qui déterminent la crise de l'enseignement supérieur au Burkina notamment à l'Université de Ouagadougou ?

    C. Les objectifs de recherche

    L'objectif de cette étude est de comprendre et de maîtriser les logiques sociales et politiques qui déterminent la crise de l'enseignement supérieur au Burkina.

    Les objectifs spécifiques visent :

    ü à mettre à nu les logiques politiques, économiques, individuelles et collectives qui sous-tendent la participation des étudiants et enseignants à l'espace syndical ;

    ü à analyser la nature des revendications des étudiants et des enseignants;

    ü à identifier enfin les liens, les éventuelles alliances entre les syndicats d'étudiants et d'enseignants et les forces extérieures du champ universitaire, notamment celles politiques et syndicales.

    D. Les hypothèses de recherche

    Quelques hypothèses permettront de mener et d'exploiter la perspective ainsi envisagée.

    Hypothèse 1 : La précarité des conditions sociales d'existence et d'étude des étudiants et la dévalorisation du statut des enseignants sont des facteurs qui favorisent la crise à l'Université de Ouagadougou.

    Hypothèse 2 : La question du respect des franchises universitaires, la quête des valeurs démocratiques et le désir de justice sociale déterminent la crise à l'Université de Ouagadougou.

    E. Intérêt de l'étude

    Une analyse sociopolitique sur la crise de l'enseignement supérieur au Burkina aura pour intérêt d'apporter un éclairage sur les jeux et les enjeux des pratiques contestataires des étudiants et des enseignants à l'université de Ouagadougou.

    Il s'agit aussi d'étudier la contestation estudiantine et aussi la montée du syndicalisme enseignant qui commence à prendre de l'ampleur ces dernières années à l'Université de Ouagadougou. Par ailleurs, cette étude à travers une lecture politique de la condition estudiantine et enseignante peut aider à mieux comprendre le milieu universitaire réputé peu soumis, voire subversif.

    Enfin, les résultats de nos investigations peuvent servir d'outil de référence aux décideurs, aux responsables de l'éducation en vue d'une prise de décisions pouvant pallier les crises multiformes qui minent l'enseignement supérieur au Burkina Faso.

    F. La conceptualisation

    · Définition des concepts

    Le concept est un élément indispensable à toute observation. En effet, pour Madeleine GRAWITZ, « le concept n'est pas seulement une aide pour percevoir, mais une façon de concevoir. Il organise la réalité en retenant les caractères distinctifs, significatifs des phénomènes. Il exerce un premier tri au milieu du flot d'impressions qui assaillent le chercheur. »19(*)

    La définition de certains concepts fondamentaux s'avère nécessaire pour mener à bien notre étude.

    Sociopolitique : Ce concept renvoie à la fois au politique et au social. Il s'agit de deux concepts intimement liés. Le social embrasse tous les aspects de la vie humaine. Et M. Grawitz le définit comme étant tout ce qui concerne les hommes en société. Quant à MAX Weber, il entend par politique : « la direction du groupement politique que nous appelons aujourd'hui Etat, ou l'influence que l'on exerce sur cette direction. »20(*)

    Par ailleurs, selon David EASTON21(*) le système politique se présente comme un ensemble de relations politiques. Pour lui, le système politique n'est pas isolé des autres systèmes sociaux car il entretient des échanges avec son environnement économique, culturel et religieux. Il conçoit le système politique en termes de « réponse » dynamique à son environnement social.

    Dans le cadre de notre étude, ce concept renvoie à l'ensemble des faits et manifestations sociaux et politiques qui caractérisent la crise de l'enseignement supérieur et qui tirent leur origine des structures sociales, économiques, culturelles, idéologiques et politiques.

    Franchises universitaires : Il s'agit d'un concept qui renvoie à la liberté intellectuelle de penser, de critiquer, et de manifester que garantit l'institution universitaire. Les franchises universitaires sont constituées d'un ensemble de textes qui favorisent l'indépendance des acteurs du monde universitaire vis- à- vis des pouvoirs politiques. Donc, c'est la liberté qu'ont les membres de cette communauté de poursuivre leurs activités universitaires dans le cadre de règles éthiques et de normes internationales établies par cette communauté sans pression extérieure.

    Ces franchises universitaires ont connu des modifications sous les régimes qui se sont succédé au Burkina Faso. La dernière modification en date s'est effectuée avec la refondation de l'université intervenue en 1999-2000. Les principaux articles de ces franchises qu'on soumet à l'appréciation de l'étudiant pendant son inscription administrative sont les suivants :

    Article 1er : «l'enseignement et la recherche impliquent l'objectivité du savoir et la tolérance des opinions. Ils sont incompatibles avec toute forme de propagande et doivent demeurer hors de toute pression idéologique ou confessionnelle. A cette fin, des garanties leur sont conférées appelées franchises et libertés universitaires».

    Article 10 : « Aucun étudiant ou groupe d'étudiants ne peut exercer une contrainte physique ou morale sur un autre étudiant ou un autre groupe d'étudiants, un enseignant ou un groupe d'enseignants, dans le but de l'amener à adhérer à ses propres idées, à l'intérieur des locaux et enceintes universitaires, y compris les locaux qui peuvent être mis à leur disposition. Lorsque les étudiants s'abstiennent de suivre les enseignements par suite d'une décision concertée, ils ne peuvent, à l'aide de violence, menaces ou manoeuvres, porter atteinte à l'ordre public, au fonctionnement régulier des institutions universitaires ou au libre exercice par d'autres étudiants de toute activité universitaire. Sont en particulier proscrits les menaces, pressions, coups de sifflets, jets d'eau, jets de pierres faits pour obliger les étudiants à quitter les salles de classes. La liberté de manifester comme celle de ne pas manifester sont reconnues. Toute infraction aux dispositions du présent article entraîne des sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu'à l'exclusion définitive, sans préjudice de poursuites pénales.

    Nom.......................................................................................................

    Prénom..................................................................................................

    Signature précédée de la mention `'lu et approuvé''. »

    Crise : La notion vient du Latin « Crisis » qui signifie manifestation grave. « Une crise est un évènement social ou personnel qui se caractérise par un paroxysme de souffrances, des contradictions ou des incertitudes, pouvant produire des explosions de violence ou de révolte »22(*).

    Selon Marcel MAUSS23(*), « la crise est un état dans lequel les choses irrégulières sont la règle et les choses régulières impossibles».

    La crise est symptomatique d'un malaise, d'une rupture d'équilibre, une manifestation parfois violente provoquée par une inadéquation manifeste entre l'organisation d'une institution et la réalité.

    Dans le cadre de notre étude, le concept de crise renvoie à l'ensemble des phénomènes (grèves, marches, meetings, perturbations des programmes, violences, fermetures du campus, année invalidée, arrestations d'étudiants, procès etc.) qui secouent régulièrement l'Université de Ouagadougou.

    Enseignement supérieur : La mission de l'Université de Ouagadougou est de promouvoir par « l'enseignement et la recherche les principes de liberté, de justice, de dignité et de solidarité humaines, et de développer l'entraide matérielle et morale »24(*).

    Ainsi, tout système d'enseignement au niveau du supérieur cherche « à transmettre, tant via le contenu des enseignements que par les autres activités organisées par l'établissement, les valeurs humanistes, les traditions créatrices et innovants, ainsi que le patrimoine culturel, artistique, scientifique, philosophique et politique »25(*).

    Dans le cadre de notre étude, l'enseignement supérieur désigne l'ensemble des Universités publiques (Université de Ouagadougou, Université Polytechnique de Bobo-Dioulasso, Université de Koudougou) et privées (Université Libre du Burkina, Université Saint Thomas d'Acquin, Université Catholique d'Afrique de l'Ouest et l'Université Ouaga 3s) du Burkina-Faso.

    SECTION 2 : MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE

    PARAGRAPHE 1 : CHOIX DU SITE ET POPULATION D'ÉTUDE

    A. Choix du site

    Notre zone d'étude est la ville de Ouagadougou. Ce choix s'explique par le fait que l'université de Ouagadougou est située dans ladite ville où cette dernière demeure le lieu par excellence où se manifeste la crise de l'enseignement supérieur. En effet, l'université demeure le lieu privilégié où naissent les revendications des étudiants et des enseignants.

    Par ailleurs, ce lieu est devenu au fil des ans le nid de la contestation politique, un espace de rencontre, d'interactions diverses et aussi un champ où s'élaborent les stratégies syndicales des différents acteurs.

    B. Population d'étude

    La population d'étude est essentiellement repartie en population cible et en population ressource. La population cible est constituée par les étudiants actuellement inscrits à l'université et les enseignants de l'Université. Notons que les étudiants et les enseignants d'Université sont les acteurs clés de la présente étude car ils sont les principaux animateurs du mouvement étudiant et enseignant.

    La population cible, il faut le souligner, est caractérisée par une hétérogénéité au niveau du statut, des origines sociales, des filières de formation, des niveaux d'études, et des convictions idéologiques et politiques.

    Par ailleurs, nous avons approché plusieurs personnes ressources notamment les responsables politiques, les responsables des syndicats d'étudiants et d'enseignants, les anciens Ministres de l'Enseignement supérieur, les responsables de l'Université de Ouagadougou et d'autres acteurs de la société civile. Ces personnes ressources ayant vécu directement ou indirectement ces crises universitaires pourront à travers leurs opinions et leurs analyses nous éclairer davantage sur le phénomène de la crise de l'enseignement supérieur au Burkina.

    PARAGRAPHE 2 : ECHANTILLONNAGE, OUTILS ET TECHNIQUES DE COLLECTE DES DONNÉES

    A. Echantillonnage

    Compte tenu de l'importance numérique de notre population d'étude, nous avons opté pour un procédé d'échantillonnage par choix raisonné. Il s'agit d'une étude qualitative basée essentiellement sur des entretiens avec un choix raisonné sur un échantillon assez représentatif de notre population d'étude. Donc, il n'y a pas un effectif déterminé de personnes à interviewer. Nous ferons les entretiens avec notre population cible composée d'étudiants, de professeurs et de personnes ressources jusqu'à un seuil de saturation.

    B. Outils et techniques de collecte des données

    ü La recherche documentaire

    La collecte des données relatives à la phase documentaire s'est déroulée dans les centres de documentation suivants : la bibliothèque universitaire centrale de Ouagadougou, la bibliothèque de l'UFR/SJP, le CIRD, le CNRST, et l'ISSP. Cette recherche documentaire s'est focalisée essentiellement sur les coupures de presse, les statistiques de la DEP du MESSRS, les mémoires, les thèses et les ouvrages généraux et spécifiques sur la crise de l'enseignement supérieur. Cette recherche documentaire a été capitale pour l'élaboration du cadre théorique et à l'analyse des données issues de nos investigations.

    ü L'observation directe

    Cette observation s'est effectuée lors des assemblées générales des syndicats étudiants et enseignants, des meetings et surtout au cours des discussions informelles avec les étudiants et les enseignants. L'observation directe par son exigence d'esprit critique nous a permis de lire, d'aller au-delà des conventions de l'écrit, du dire pour enfin découvrir et saisir certaines réalités qui sont au coeur de ce phénomène. Nous avons tenté de cerner à travers l'observation directe les contours que les acteurs ont passés sous silence.

    ü L'entretien

    Le premier guide d'entretien est adressé aux étudiants tandis que le second est destiné aux enseignants. Un troisième guide a été adressé aux personnes ressources notamment aux responsables des syndicats d'enseignants et étudiants, responsables de l'éducation et aux leaders politiques et syndicaux.

    Ces guides comportent un ensemble de questions, semi-ouvertes et ouvertes nous permettant de recueillir les opinions, les préférences, les représentations et les choix politiques des enquêtés.

    Les thèmes abordés dans ces guides d'entretien sont focalisés sur la question des franchises universitaires, les conditions socio-économiques des étudiants, des enseignants et les mobiles sociopolitiques qui déterminent la crise de l'enseignement supérieur.

    PARAGRAPHE 3 : TRAITEMENT DES DONNÉES, DIFFICULTÉS ET LIMITES DE L'ÉTUDE

    A. Traitement des données

    Les données quantitatives et qualitatives collectées sur le terrain ont été dépouillées manuellement. Ensuite leur analyse à consister à décrire, à catégoriser les informations puis à les analyser en rapport avec les objectifs et les hypothèses de l'étude.

    B. Difficultés et limites de l'étude

    Les difficultés rencontrées dans le cadre de la présente étude sont essentiellement d'ordre méthodologique. En effet, « l'apprenti-chercheur» que nous sommes a été confronté à ce qu'il convient d'appeler l'enracinement social du chercheur. Il nous a été difficile d'appliquer le principe indispensable à toute méthode et technique de recherche et qui consiste selon EMILE Durkheim « à observer les faits sociaux comme des choses ».

    Comment observer avec recul et sans parti pris le phénomène de la crise de l'enseignement supérieur tout en étant nous-mêmes étudiant avec des convictions politiques et ayant souvent pris une part active aux manifestations estudiantines ?

    Par ailleurs, l'absence d'écrits traitant spécifiquement de l'aspect sociopolitique de la crise de l'enseignement supérieur notamment à l'université de Ouagadougou n'a pas permis l'utilisation de concepts politiques appropriés dans nos analyses. A cela s'ajoute l'indisponibilité récurrente des personnes ressources, des enseignants et surtout les cas de refus et de réticences de ces derniers.

    Enfin, à toutes ces difficultés s'ajoute celle relative au caractère trop vaste de notre thème d'où la difficulté à le circonscrire dans le temps et dans l'espace.

    CHAPITRE 2 : EVOLUTION DU MOUVEMENT ÉTUDIANT ET ENSEIGNANT BURKINABÉ

    SECTION 1 : EVOLUTION DU MOUVEMENT ÉTUDIANT BURKINABÉ

    Né dans le contexte général de la lutte pour l'indépendance et l'émancipation des peuples d'Afrique, le mouvement étudiant Burkinabé s'est doté très rapidement d'une ligne politique et idéologique qui lui permit de jouer un rôle majeur dans l'histoire politique du pays. En effet, après le « repli tactique » du RDA qualifié de trahison et d'abandon de la lutte, les étudiants prirent la relève de la lutte anticoloniale à travers la création de la Fédération des Etudiants d' Afrique Noire en France (FEANF).

    L'Association des Etudiants Voltaïques de France (AEVF) fut créée en 1950 en tant que section de la FEANF et six années après, c'est-à-dire en 1956 à Dakar, c'est l'Association des Stagiaires Voltaïques (ASV) qui vit le jour et devint une section de l'Union Générale des Etudiants d'Afrique de l'Ouest (UGEAO) créée la même année. Ces deux associations voltaïques ont pris une part active dans la lutte anticoloniale aux côtés de la FEANF jusqu'à la création de l'Union Générale des Etudiants voltaïques (UGEV) le 27 juillet 1960. L'UGEV a occupé pendant plusieurs décennies la scène syndicale et son histoire s'est toujours confondue à celle du syndicalisme étudiant burkinabè dont elle a été la principale animatrice.

    Depuis sa naissance, elle a toujours prôné un syndicalisme révolutionnaire, avec d'un côté la défense des intérêts matériels et moraux des étudiants et de l'autre, la lutte aux côtés des peuples pour leur émancipation, d'où son opposition traditionnelle aux pouvoirs dits « néocoloniaux ». Son discours politique et idéologique a été marqué par le marxisme-léninisme sous ses différentes variantes, à savoir pro-soviétique, pro-chinois puis pro-albanais jusqu'à la chute du mur de Berlin en 1989.

    A travers une analyse de l'évolution du mouvement étudiant Burkinabé, nous nous intéresserons aux périodes décisives qui ont marqué son évolution. Il s'agit de 1960 à 1971, de 1971 à 1983 et de 1983 à nos jours.

    PARAGRAPHE 1 : DE 1960 À 1971

    Aux côtés de la FEANF, le mouvement étudiant Burkinabé mène une campagne pour le «non » au Référendum de 1958 et demande immédiatement et sans condition l'indépendance des pays africains. C'est dans ce contexte que le pays accède à l'indépendance le 5 août 1960.

    Mais à partir de 1960, l'UGEV qui refuse de s'enfermer dans une orientation corporatiste est traversée par des crises multiples et des dissensions internes. Ces crises portent essentiellement sur la ligne idéologique, la nature, l'orientation et le rôle du mouvement étudiant. Notons aussi que ces contradictions internes et luttes de lignes avaient pour origine réelle les luttes hégémoniques que se livraient les partis politiques pour le contrôle de l'UGEV qui évoluait dans un contexte de sollicitations idéologiques et politiques intenses.

    La première république se radicalise très tôt en proclamant le parti unique et en supprimant les libertés syndicales et politiques. Cette situation contraint l'UGEV et plusieurs forces politiques (MLN, PRA, PAI, GAP) et syndicales à entrer dans la clandestinité. C'est dans ce climat social et politique délétère qu'intervient le soulèvement populaire du 3 janvier 1966 qui voit la chute de la première République. L'UGEV a pris une part active dans ces évènements à travers sa section locale (l'AEVO) car selon les témoignages des acteurs de ce soulèvement, les premiers mouvements seraient partis du lycée Philippe Zinda Kaboré, puis du cours normal des jeunes filles.

    Cependant, l'unité politique et idéologique qui prévaut au sein de l'UGEV vole en éclat suite aux multiples analyses et interprétations des évènements du 3 janvier 1966. En effet, pendant que l'aile proche du MNL, soutient que le soulèvement populaire est une révolution, l'aile dissidente voit plutôt dans ce soulèvement l'instauration d'un « pouvoir pro-impérialiste » qu'il faut vite balayer et préparer l'avènement d'une vraie révolution. Cette situation s'explique en ce sens que de 1960 à 1966, « la seule base d'unité politique au sein de l'UGEV fut l'opposition au gouvernement Yaméogo »26(*)

    Ainsi, la ligne dominante au sein de l'UGEV et inspirée par le MNL est taxée désormais de « courant réformiste » du fait de sa participation au gouvernement du nouveau régime.

    Notons que le mouvement étudiant a toujours été traversé par plusieurs courants politiques et idéologiques et tout changement dans la société entraine nécessairement des interprétations et analyses diverses en son sein. Cela a toujours débouché sur des crises qui ont pour conséquence une grande démobilisation et le désarroi au sein de L'UGEV.

    Ainsi, la ligne «réformiste» proche du MLN est battue en brèche au cinquième congrès de l'UGEV en Août 1971 qui dégage une « ligne anti-impérialiste » proche de la pensée maoïste.

    Le Vè congrès marqué par le renversement de la majorité au profit du PAI, adopte le mot d'ordre d'intégration aux masses en ces termes : «L'objectif fondamental de notre lutte étant la libération totale des masses de toutes les formes d'exploitation, les militants de l'UGEV doivent s'intégrer aux masses ouvrières et paysannes, pour s'éduquer auprès d'elles, s'instruire de leurs problèmes et de leurs aspirations profondes. Pour les éduquer et élever leur conscience politique. Les aider à dégager en leur sein des organisations d'avant garde...».

    Cet important mot d'ordre qui fixe la ligne idéologique et la direction de la lutte fera désormais du mouvement étudiant l'avant-garde pratique, le guide des luttes sociales. Pendant ce congrès, « on procède à l'analyse des couches et classes sociales composant la société voltaïque, en identifiant des catégories sociales qui pourraient constituer le `'camp de la révolution'' et celles qui relèvent du `'camp de la réaction''. Ainsi sont potentiellement révolutionnaires la classe ouvrière, la paysannerie, la petite bourgeoisie, les intellectuels patriotes. Par contre, la bourgeoisie politico-bureaucratique, la bourgeoisie compradore et les vestiges de forces `'féodales'' constituent la base sociale de l'impérialisme français ou le `'camp de la réaction''»27(*).

    PARAGRAPHE 2 : DE 1971 À 1983

    Cette période marque la montée de l'activisme syndical des étudiants voltaïques qui se verront expulsés des universités de Dakar et d'Abidjan pour incitation à la grève suite aux violents évènements de mai 1968 et la chute de Kwamé Nkrumah en 1972. Par ailleurs, en 1971, en visite à Ouagadougou, le cortège du président ivoirien Houphouët BOIGNY taxé de «véritable représentant de l'impérialisme français en Afrique » essuie des jets de tomates pourries. Ces violentes manifestations ont eu pour conséquence l'enrôlement de force d'une quarantaine d'élèves dans l'armée.

    C'est dans ce contexte qu'une crise éclate au sein de l'UGEV car de nombreux militants l'ASV et de l'AEVF proches des thèses « prochinoises » font dissidence. L'aboutissement de cette crise est le ralliement au VIè congrès en 1973 au mot d'ordre de la FEANF qui prône la Révolution nationale démocratique et populaire (RNDP).

    Selon la FEANF et l'UGEV28(*)« la révolution à mener est la `'Révolution nationale démocratique et populaire'', qui obéit à une stratégie de rupture d'avec l'ancienne- puissance colonisatrice (France) : cette rupture concerne tous les domaines (politique, économique, culturel, militaire) ; `'les masses populaires'' mettraient en place des `'institutions démocratiques permettant le contrôle (par elles) de l'édification nationale et la pleine satisfaction de leurs intérêts légitimes ».

    Le mot d'ordre issu de ce congrès aux dires de nombreux analystes a surestimé le rôle du mouvement étudiant en faisant des étudiants `'l'avant- garde'' de la lutte révolutionnaire du peuple voltaïque. Désormais, c'est le mouvement étudiant qui détermine la nature de la révolution à mener, les catégories sociales qui doivent jouer un rôle décisif et la tactique à mener.

    Cette orientation politique et idéologique fortement influencée par la pensée maoïste marque la fin de l'hégémonie du PAI dénoncé comme `'révisionniste''. En réalité, l'UGEV était traversée par des débats au sein du mouvement communiste international entre partisans de l'URSS et la Chine maoïste.

    Ainsi, en 1975-1976, du fait de sa participation au gouvernement du général Lamizana, le MNL est dénoncé comme un parti `'réactionnaire'' et ses militants étudiants sont exclus de l'UGEV. Puis au congrès de 1977, ce sera le tour des militants du PAI qui seront victimes de la lutte contre le `'réformisme''.

    «Si en Haute-Volta il naît un parti communiste qui mobilise et dirige les masses dans la lutte contre l'impérialisme, principalement français et ses valets locaux pour la réalisation de la Révolution Nationale Démocratique et Populaire, eh bien !, un tel parti communiste, nous le soutiendrons et cela dans le cadre du Front uni anti-impérialiste que nous préconisons»29(*).

    Telle est l'annonce de la direction de lutte par le VIIIè congrès qui scelle l'unité idéologique et politique de l'UGEV. En marge de ce congrès en 1977, un groupe d'étudiants marxistes-léninistes crée l'Organisation Communiste Voltaïque (OCV), puis en 1978, le Parti communiste révolutionnaire voltaïque (PCRV) voit le jour.

    La création de ce parti communiste proche du parti des travailleurs albanais d'Enver Hoxha marque une fois de plus le point de départ d'une nouvelle crise qui secoue l'UGEV. En effet, la ligne de la direction de l'UGEV est dénoncée par les militants de l'ASV(Dakar) et de l'AEVF (France) qui lancent une pétition le 21 juin 1978.

    Dans cette pétition, les tenants du Mouvement du 21 juin dénoncent le «sectarisme, le bureaucratisme, le servilisme, la bolchévisation des militants, les étiquetages systématiques et les ragots de couloir du CE dont sont victimes les militants » 30(*).

    Ils s'élèvent aussi contre le travail idéologique visant à « serviliser les militants, capables seulement de prononcer l'éternel: je suis fondamentalement d'accord avec le comité exécutif »31(*). Ce courant est désormais connu sous le nom du Mouvement du 21 juin (M21).

    La ligne défendue par le Mouvement du 21 juin est taxée par ses adversaires de «nouveau courant opportuniste liquidateur» (NCOL) et celle du comité exécutif de l'UGEV de « Mouvement National Populiste Liquidateur » (MONAPOL) par le M21.

    La scission au sein de l'UGEV intervient le 11 Août 1979, à la lecture des rapports du IXe congrès quand une partie des délégations de l'Union Soviétique (AEVUS), de Dakar (ASV) et de l'Algérie (ASVA) proches du M21 quitte la salle.

    Le Mouvement du 21 juin poursuit parallèlement à l'UGEV, son IXe congrès qui marque la naissance officielle de l'UGEV /M21. La célèbre théorie selon laquelle «un se divise en deux» devient réalité. Et le IXe congrès de la tendance «légitime», l'UGEV condamne le M21 comme étant, «un courant d'intellectuels petits bourgeois contemplatifs», «un courant anti-communiste et dans son fond un courant de collaboration de classe».

    Le congrès apporte également une motion de soutien à la République Populaire Socialiste d'Albanie (RPSA), au parti du travail d'Albanie (PTA) avec à sa tête Enver Hoxha et appelle «ses militants à tirer leçons de cette riche expérience révolutionnaire du peuple Albanais pour faire avancer la révolution dans notre pays».

    Les analyses faites par l'UGEV sur la situation nationale et internationale lors de ce congrès la rapproche désormais du PCRV même si elle se défend d'en être sa caisse de résonance. Quant au M21 qui est en réalité inspiré par l'ULC, il «constate avec indignation que le PCRV cherche coûte que coûte à imposer bureaucratiquement la direction idéologique, politique et organisationnelle à l'UGEV pour la transformer en une jeunesse du PCRV au mépris de son caractère d'organisation de masse»32(*).

    Fragilisée par la scission qui venait de naître en son sein et affaibli par les crises multiformes et les dissensions internes, l'UGEV assiste à l'avènement de la révolution d'août 1983, dont la ligne idéologique et politique est inspirée en grande partie par certains animateurs du M/21.

    PARAGRAPHE 3 : DE 1983 À NOS JOURS

    L'UGEV devient UGEB avec le changement du nom du pays par le nouveau régime. Elle inaugure une ère de clandestinité car elle est «Traquée» de toutes parts par les Comités de Défense de la Révolution (CDR) qui menacent régulièrement ses militants.

    Alors s'engagent des luttes hégémoniques entre les factions du CNR sur le campus (UCB, ULC) pour le contrôle de l'Université et surtout de l'AEVO devenue ANEB. En Janvier 1985, l'ULC de Valère SOME remporte les élections du bureau CDR de l'université au détriment de son rival de l'UCB qui contrôle le pouvoir Rectoral dirigé par Oumarou Clément OUEDRAOGO.

    Cette opposition entre les groupuscules communistes au sein du campus s'accentue après l'incident de Tenkodogo le 2 octobre 1987. Ce jour là, Jonas SOME, un étudiant proche de l'UCB, prononce un discours réfutant le point de vue de Thomas SANKARA qui prône l'unification des organisations révolutionnaires. Cet incident a exacerbé les tensions qui ont précipité la fusillade du 15 octobre 1987 qui a couté la vie au président Thomas SANKARA.

    L'année 1990 a été une année charnière pour le mouvement étudiant qui est sorti affaibli du CNR, puis du Front Populaire. Cette période est marquée par un reflux de la mobilisation dû à une faible capacité organisationnelle de l'UGEB sortie affaiblie des persécutions des CDR et des CR pendant la période révolutionnaire.

    Mais la chute du mur de Berlin, l'avènement de la démocratie, puis l'application des premières mesures des Programmes d'ajustement structurels (PAS) vont radicaliser le mouvement étudiant à l'Université de Ouagadougou. Ce mouvement de contestation sera marqué par les luttes dont les principales sont : la lutte menée sous la houlette du Collectif des organisations démocratiques des étudiants (CODE) de 1991 à 1993 ; la grande grève de 1997 dite «grève de 52 jours» et enfin celle ayant conduit à l'invalidation de l'année académique 1999-2000 et à la refondation de l'Université.

    ü Des évènements de mai 1990 à l'avènement du CODE

    Le mouvement étudiant sorti diminué de la période révolutionnaire est en phase de réorganisation et gagne en popularité au sein de la masse estudiantine.

    Au soir du 15 Mai 1990 l'ANEB tient une grande assemblée générale à l'ex- IDR malgré le refus catégorique des autorités universitaires. Ces manifestations sont considérées à l'époque par le ministre d'Etat et le Recteur comme un affront et il s'en est suivi une répression.

    Cette assemblée générale marque le départ d'un grand mouvement car dès le lendemain, c'est-à-dire le 16 mai, une marche s'ébranle de l'ex-IDR et se termine par un meeting devant le Rectorat. Après une intervention radiotélévisée du Bureau CR de l'Université par la voix de son porte parole, la décision fut prise par le Recteur d'exclure tous les membres du Comité Exécutif de l'ANEB de l'université.

    Malgré l'occupation du campus par l'armée, aidée par le Bureau CR de l'Université toujours actif à l'époque, l'ANEB tient un meeting le 19 mai 1990 pour protester contre cette mesure d'exclusion des responsables de l'ANEB. Ce jour là, les choses dégénérèrent avec l'intervention des forces de l'ordre qui procèdent à des arrestations, bastonnades, enlèvements à domicile et des incorporations de force dans l'armée. C'est au cours de cette journée du 19 mai que DABO Boukary, considéré comme le premier martyr du mouvement étudiant burkinabè, est enlevé et conduit au Conseil de l'Entente (caserne militaire et siège du pouvoir).

    L'action conjuguée des partis politiques de l'opposition, la médiation de la société civile et l'adoption de la constitution le 2 juin 1991 rendent possible la décrispation.

    ü La lutte du CODE

    L'entrée en vigueur le 8 octobre 1991 des premières mesures du PAS fragilise une fois de plus l'équilibre précaire qui prévaut sur le campus. En effet, l'adoption de ces mesures a eu pour conséquence la remise en cause des acquis sociaux des étudiants à travers la diminution du taux de la bourse, l'institutionnalisation de l'aide et du prêt FONER. Le taux de la Bourse qui était de 37500 F/mois en 1ere année passe à 27500 F/mois et une aide de 15000 F /Mois est accordée aux non boursiers.

    Le CODE qui est une fusion entre plusieurs organisations estudiantines (ANEB, RENBO, ANBUO, AMIE, MONENB) voit le jour et élabore une plate-forme consensuelle dont les principaux points sont entre autres :

    ü l'octroi de la bourse à tous les étudiants non-boursiers ;

    ü la diminution du prix des chambres en cité qui est de 6000 F/mois à 4000F/mois ;

    ü la diminution du prix des tickets au restaurant universitaire à100 F ;

    ü la création d'une ligne de transport pour les étudiants ;

    ü la lumière sur la mort de DABO Boukary.

    Cette alliance qualifiée de «contre-nature» sera vite confrontée à des dissensions internes à cause des divergences d'appréciations sur les conceptions politiques et idéologiques, les méthodes de lutte et la lecture de la condition étudiante.

    Le mot d'ordre de grève qui devrait durer deux semaines est levé par le président du RENBO à la télévision nationale à la grande surprise des associations et des étudiants. Cette situation va entrainer la fin du mouvement de grève, la `'mort'' du CODE et une démobilisation des étudiants. Néanmoins, la lutte menée sous la houlette du CODE a enregistré quelques acquis dont les principaux sont : la réduction du prix du ticket au restaurant universitaire (100 F), la diminution du prix des chambres en cité (4000 F/mois), la promesse du gouvernement de supprimer l'aide de 15000 F octroyée aux non-boursiers et son remplacement par une bourse de 25000 F en 1ère année.

    Malheureusement, au cours de l'année académique 1992-1993 le gouvernement ne tint pas sa promesse d'accorder la bourse aux non boursiers et la lutte reprit de nouveau mais cette fois-ci sous la direction du CODE II.

    Au cours de cette lutte, l'ANEB prône une unité d'action entre élèves- étudiants et travailleurs tandis que le RENBO II et le MONENB optent pour des actions isolées allant jusqu'à décréter une grève illimitée. Des divergences apparaissent une fois de plus au sein des organisations qui animent le CODE II.

    Malgré les menaces des autorités et l'exclusion de l'ANEB du CODE par certaines organisations comme le RENBO et le MONEB, l'ANEB lance sur le Ministère des Enseignements supérieur une marche qui sera rapidement dispersée par les forces de l'ordre.

    Malgré les nombreux échecs notons que l'expérience du CODE fut une étape assez importante, enrichissante pour le mouvement étudiant Burkinabé. Cette alliance engrangea des acquis non-négligeables en dépit des divergences politiques et idéologiques et les méthodes de lutte qui opposent les organisations membres.

    La lutte du CODE a été une réaction des étudiants mobilisés autour de leurs syndicats respectifs pour exprimer leur mécontentement face à la dégradation de leurs conditions de vie et d'étude suite à l'application des premières mesures du PAS.

    La capacité de mobilisation des organisations estudiantines s'est fortement érodée après la lutte du CODE. Et l'accalmie qui a prévalu pendant cette période de reflux de la mobilisation a préparé la mise en place du prêt FONER.

    ü De la lutte de 1997 à l'invalidation de l'année académique 1999-2000.

    Pendant la décennie 1990, l'essentiel des revendications porte sur l'amélioration des conditions de vie et d'étude des étudiants. Malgré un reflux de la mobilisation suite à la déception des étudiants pendant les luttes de 1992 et 1993, l'ANEB mobilise à partir de novembre 1996 les étudiants autour de la question du remplacement du FONER par une aide de 165000 francs. Le mouvement se radicalise en janvier 1997 avec la répression et l'arrestation du président de l'ANEB. Mais le gouvernement tente de briser le mouvement et fait passer le taux du FONER à 165000 francs et propose une aide exceptionnelle de 75000 francs aux étudiants non boursiers. Ces mesures sont rejetées en bloc par l'ensemble des étudiants qui boycottent le paiement du FONER et continuent la grève en dépit des menaces du Premier ministre. Excédé par les longues et infructueuses négociations et convaincu de la manipulation de l'ANEB par l'opposition, le gouvernement décide de fermer le campus et « vider » les étudiants des cités universitaires.

    La décrispation intervient après cinquante deux jours (52) suite aux propositions de sortie de crise du Médiateur du Faso. Il s'agit de l'octroi d'une aide de 100000 francs aux étudiants qui ne remplissent pas les conditions d'octroi de la bourse, d'une aide exceptionnelle de 75000 francs aux étudiants non boursiers, enfin la reconnaissance de la responsabilité du pouvoir dans la mort de DABO Boukary.

    Estimant que les propositions du gouvernement étaient largement en deçà des attentes des étudiants, l'aile radicale de ce mouvement prône la poursuite de la lutte. Mais dans une ambiance électrique à l'amphithéâtre A600 de l'Université de Ouagadougou, l'ANEB décide de la levée du mot d'ordre de grève au grand mécontentement des étudiants craignant une invalidation de l'année.

    Le 13 décembre 1998, le journaliste Norbert ZONGO et trois de ses compagnons trouvent la mort à Sapouy. L'accalmie qui a suivi la lutte de 1997 est de courte durée car l'Université de Ouagadougou sera l'épicentre de la crise sociopolitique née du drame de Sapouy. En effet, les étudiants à travers leurs organisations respectives vont activement prendre part aux côtés du Collectif des organisations démocratiques de masse et des partis politiques qui réclame toute la lumière et la justice dans cette affaire.

    Profitant de la fragilité du pouvoir suite au contexte national de crise, l'ANEB adopte le 4 décembre 1999 une plate forme revendicative qui s'articule autour des points suivants :

    · L'octroi de la bourse à tout nouveau bachelier de moins de 23 ans ayant une moyenne de 11/20 et l'octroi d'une aide renouvelable à tout étudiant non boursier et son augmentation à 160000 francs ;

    · Les repas en qualité et en quantité au restaurant universitaire et le maintien des oeuvres universitaires durant les vacances ;

    · La mise à la disposition des étudiants de bus pour leur transport et à un prix social. L'augmentation de la capacité d'accueil des cités universitaires, des salles de cours et leur équipement en matériels ;

    · L'extension de la mesure de 20% directe en pharmacie aux étudiants non boursiers ;

    · L'indication de la tombe de DABO Boukary, étudiant en 7è année de médecine, assassiné en mai 1990. La désignation des auteurs et commanditaires du crime et leur traduction en justice ;

    · Le respect des franchises scolaires et universitaires et l'abrogation du décret n° 97-287/ PRES/PM/MESSRS/DEP relatif aux franchises universitaires.

    Les pourparlers avec le gouvernement sur cette plate-forme qui reprenait l'essentiel des points de celle de 1997 piétinent. Et pour l'ANEB « Le ministre comme d'habitude a répondu de façon lapidaire, imprécise et vague à toutes les questions relatives aux points de la plate-forme revendicative. Cela n'est pas étonnant de la part de notre gouvernement... ».33(*)

    Le 6 avril 2000, au cours d'un meeting, l'ANEB lance une grève de soixante douze (72) heures pour exiger la satisfaction de sa plate forme. Convaincu de la manipulation des étudiants par l'opposition et surtout par le Collectif, le gouvernement réprime le mouvement de contestation, procède aux arrestations et à la fermeture du campus en juillet. Par ailleurs, dans une ultime concession appelle les étudiants à la reprise des cours et propose une somme de 20 000 francs comme mesure d'accompagnement.

    Une fois de plus l'unité d'action entre les organisations estudiantines n'est pas de mise et l'UNEF à travers la voix de son président qui craint une année blanche appelle à la radio les étudiants à la reprise des cours en septembre. Ce dernier appelant à la reprise des cours affirme que : « La lutte est collective mais le destin est individuel». Ledit mouvement, contrairement à l'ANEB, se montra favorable au FONER. Jugé proche du pouvoir par de nombreux étudiants, il entra en conflit avec les militants de l'ANEB et des affrontements physiques se déroulèrent sur le campus.

    Malgré l'implication du médiateur du Faso, des autorités coutumières et religieuses pour la résolution de la crise, le gouvernement annonce à la surprise générale le 6 octobre 2000 l'invalidation de l'année académique et la refondation de l'Université.

    Cette crise a révélé que l'Université est un lieu stratégique investi par les acteurs politiques et syndicaux et qui est souvent vu d'un mauvais oeil par le gouvernement. Et la décision d'invalider l'année académique a été considéré par de nombreux analystes comme étant une sanction à l'égard des étudiants. Elle visait aussi à donner un signal fort aux partis politiques et syndicats qui soutenaient d'une manière ou d'une autre ces derniers.

    La marche de soutien du Collectif en novembre 2000 pour dénoncer le «sabotage» de l'enseignement par le pouvoir, le boycott du baccalauréat par des milliers d'élèves, et la mort par balle de l'élève Flavien NEBIE à Boussé au cours des affrontements avec les forces de l'ordre ont sans doute été les faits majeurs qui ont marqué ce vaste mouvement de contestation.

    Au terme de notre analyse, notons que l'histoire du mouvement étudiant burkinabè a été celle d'un mouvement très politisé soucieux de maintenir une cohésion de point de vue en son sein et a aussi constitué un terrain d'affrontement entre partis politiques pour son contrôle. En effet, le verrouillage de l'espace politique et syndical par les régimes successifs a contraint les partis politiques et les syndicats à un repli vers le mouvement étudiant qui se prête fort à ce jeu du fait d'une riche tradition de lutte aux côtés de la FEANF. Enfin, son discours critique et radical a été énormément inspiré par l'idéologie marxiste-léniniste dans ses différentes versions à savoir prosoviétique, prochinois et pro-Ablanais. Mais depuis la chute du mur de Berlin et l'avènement de l'ajustement éducatif, le discours politique anti-impérialiste stricto sensu est de plus en plus un alibi qui ne mobilise plus. Donc, la plupart des revendications sont sorties du cadre idéologique et politique pour s'orienter désormais dans la lutte pour l'amélioration des conditions de vie et d'étude de la masse estudiantine.

    Le mouvement étudiant a été le cadre dans lequel de nombreux hommes politiques Burkinabé ont forgé leurs armes. Malheureusement, c'est en son sein que sont nés les nombreux antagonismes idéologiques et politiques qui continuent toujours de marquer la vie politique actuelle du pays.

    SECTION 2 : LE MOUVEMENT ENSEIGNANT BURKINABÉ

    PARAGRAPHE 1 : CONTEXTE DE NAISSANCE ET ÉVOLUTION

    Le mouvement enseignant au Burkina Faso est né autour des années 1950 avec la création du personnel enseignant africain qui se transformera plus tard en Syndicat des Personnels Enseignants de Haute Volta (SPEAHV), puis en Syndicat National des Enseignants de Haute Volta (SNEAHV).

    Durant cette période, le syndicat enseignant n'apparait pas comme une force de contestation mais les évènements du 3 Janvier 1966 marquent un épisode fondateur de l'enracinement historique et la politisation du syndicalisme enseignant.

    Marqué à ses débuts par l'hégémonie du MNL, le SNEAHV résiste à la confiscation du pouvoir par le régime de Maurice YAMEOGO, puis des régimes successifs. Par la suite, les professeurs estimant que le SNEAHV dominé numériquement par les instituteurs ne prenait pas suffisamment en compte leurs revendications corporatistes créèrent en Juillet 1972 le Syndicat Unique Voltaïque des Enseignants du Secondaire et du Supérieur (SUVESS).

    Le SUVESS qui à son tour est dominé par des luttes hégémoniques se politise et se radicalise. En effet, les années 1970 furent une période de la montée de l'action revendicative d'autant plus que ce fut une période, où l'entrée dans la fonction d'enseignant entrainait ipso facto l'adhésion à l'organisation syndicale. Pour Bianchini34(*), « C'est ainsi que se construit la réalité et le mythe d'un contre-pouvoir redoutable pour tous les régimes voltaïques, qu'ils soient civils ou militaires».

    PARAGRAPHE 2 : LE RÔLE DU MOUVEMENT ENSEIGNANT DANS L'ÉVOLUTION POLITIQUE DU PAYS

    A partir de 1960, le mouvement enseignant est dominé par le MNL qui est un parti de la gauche dont la base sociale est la petite bourgeoisie urbaine majoritairement constituée d'enseignants. Le MNL encore appelé `'parti des enseignants'' contrôle le poste du Ministère de l'éducation nationale (1966-1970 et 1974-1977) sous le gouvernement de coalition du Général LAMIZANNA. Par la suite, tout au long des années 1970, l'hégémonie du MNL sera concurrencée par d'autres forces politiques comme le PAI et le PCRV. Ces conflits pour le contrôle de la direction du SUVESS vont entrainer une série d'exclusion des militants proches du PCRV qui, à leur tour vont créer l'année suivante le Syndicat des travailleurs de l'enseignement et de la recherche (SYNTER). La même année au cours du congrès, le PAI prend le contrôle de la direction du SUVESS.

    Par ailleurs, cette période marque une effervescence et une instrumentalisation de l'action syndicale des enseignants dans le cadre d'une stratégie de blocage des institutions et de conquête du pouvoir. Cela a été le cas en décembre 1972 et janvier 1973 sous la Deuxième République ; ensuite, en avril 1979 à la fin de la Troisième République ou le SUVESS lance une grève pour revendiquer une indemnité de logement pour les enseignants. Enfin, le lancement de la plus longue grève des enseignants en octobre et novembre de l'année 1980 et qui a entrainé la chute du régime du Général Sangoulé. Cette grève dirigée par le SNEAHV s'articule autour des revendications suivantes :

    - La correction à porter au bénéfice des instituteurs sur le déséquilibre administratif provoqué par le reclassement des instituteurs adjoints ;

    - L'annulation du concours d'entrée à l'INAS de Paris, qualifié de `'pirate'' ;

    - La réaffectation à leurs postes initiaux de Mr Ali Pascal Zoungrana et Baba Hamidou Ouedraogo.

    Cette grève qui s'est poursuivie jusqu'au 24 novembre a duré 55 jours. Le lendemain, c'est-à-dire le 25 novembre 1980, le colonel Saye Zerbo renverse le régime et instaure le Comité militaire de redressement et de progrès national (CMRPN). Cette grève, fondée dès le départ sur des revendications corporatistes et méritocratiques est instrumentalisée par les forces politiques et débouche sur un coup d'Etat permettant ainsi au MNL-FPV de participer à la gestion du pouvoir du CMRPN.

    Les dirigeants du SNEAHV présentent leur relation avec le nouveau régime du CMRPN en ces termes35(*) : « Si on nous permettait une métaphore pour expliciter notre pensée, nous prendrions les Régimes Politiques pour des vents du large et notre syndicat pour un Navire de haute mer. Les vents politiques du large qui ont prévalu jusque-là contre notre navire-SNEAHV n'ont été pour la plupart que des ouragans hostiles et dévastateurs. Mais grâce au sang-froid de ses passagers ainsi qu'à l'habileté de ses marins, notre navire-SNEAHV a toujours eu raison des ouragans les plus furieux, dont le dernier cyclone que nous avons traversé pendant 55 jours. Si un jour les vents du large devraient être pour le navire-SNEAHV de doux zéphyrs, nous rendrions simplement grâce au ciel pour que durent à jamais ces vents favorables sans changer pour autant notre cap d'un iota ».

    Sorti vainqueur du bras de fer qui l'oppose au régime, le syndicat hérite une réputation de `'tombeur de gouvernement''. En même temps, il n'échappe pas au soupçon d'être un syndicat `'putschiste'' dont les mobiles réels seraient éloignés des aspirations des enseignants.

    Mais `'la lune de miel'' entre le syndicat enseignant et le régime du CMRPN est de courte durée car quelques mois plus tard le droit de grève est interdit et une répression s'abat sur les militants de la Confédération syndicale voltaïque dont le SUVESS est membre. Il s'en suit un retour de la contestation syndicale dans un climat de succession de coup d'Etat et de régimes militaires (1982, 1983).

    L'avènement du CNR le 4 août 1983 surprend le SNEAHV qui est en plein congrès. Immédiatement, le syndicat rédige une motion et appelle « les organisations démocratiques et de masse à se démarquer de la proclamation du 4 août 1983 et de son Conseil national de la révolution (CNR) »36(*) 

    Cette déclaration est perçue par le nouveau régime comme un acte de défiance. Sommé de revenir sur sa déclaration, le SNEAHV refuse. Alors quatre (04) militants sont arrêtés. Il s'en suit une grève de protestation durement réprimée car les « grévistes » sont dégagés de la fonction publique, soit environ le tiers des enseignants du primaire. Le Ministère de l'éducation nationale est entre les mains du PAI qui est membre du CNR. Quelques mois plus tard, accusé de vouloir noyauter les structures du pouvoir révolutionnaire, c'est la rupture des relations entre ce parti et le CNR. Contrairement au SNEAHV, le SUVESS entretient de bons rapports avec le CNR et s'oppose à « l'anarcho-syndicalisme » incarné par la CSV influencée par le PAI.

    DEUXIEME PARTIE : FACTEURS SOCIAUX ET POLITIQUES DE LA CRISE DE L'ENSEIGNEMENTSUPERIEUR

    CHAPITRE 1 : LES DÉTERMINANTS SOCIAUX DE LA CRISE DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

    SECTION 1 : LA PRÉCARITÉ DES CONDITIONS SOCIALES D'EXISTENCE ET D'ÉTUDE DES ÉTUDIANTS

    L'enseignement supérieur au Burkina Faso est resté pendant longtemps public et entièrement pris en charge par l'Etat. En effet, le fonctionnement de l'administration, la construction des Amphithéâtres, des salles de cours, le recrutement des enseignants, l'équipement des laboratoires et des bibliothèques, la restauration, l'hébergement et enfin les allocations d'études étaient assurés par l'Etat. De ce fait, le sort de l'Université était étroitement dépendant de celui de l'Etat. Or, la crise économique depuis les années 1990 qui a engendré l'application des mesures du PAS a réduit considérablement son intervention dans le secteur public. Par exemple, alors qu'en 1989, 98 % des étudiants étaient boursiers, cette proportion est tombée à 7,2 % en 200837(*).

    La réduction du budget alloué à l'enseignement supérieur et l'application de la politique du « tout primaire » prônée par les institutions de Bretton Woods a conduit non seulement à la « clochardisation » des étudiants et des enseignants.

    PARAGRAPHE 1 : LA DÉGRADATION DES CONDITIONS DE VIE

    Autour des années 1970 et 1980, les principales causes des grèves à l'Université de Ouagadougou tenaient plus à des motivations idéologiques que sociales. Mais pour des raisons d'ordre sociologique cette tendance s'est inversée au cours des deux dernières décennies.

    En effet, l'origine sociale, le revenu, les conditions matérielles d'existence produisent des effets générateurs de comportements et des attitudes qui orientent les choix politiques et idéologiques des étudiants. Ces caractéristiques sociales unissent les étudiants et déterminent leur rapport à la contestation. Par ailleurs, ces facteurs sociaux président non seulement à l'émergence d'une conscience estudiantine mais expliquent aussi la participation de ces derniers à l'espace syndical et aux actions protestataires visant une amélioration de leur condition de vie et d'étude. Cette précarité de la situation des étudiants joue un rôle majeur dans l'engagement syndical de ces derniers.

    Les remous sociaux ont commencé sur le campus depuis que l'Etat Burkinabé s'est progressivement désengagé des secteurs sociaux de base suite à l'application des mesures du PAS. Cette réduction des ressources financières accordées à l'enseignement supérieur a eu pour conséquence non seulement la dégradation rapide des conditions de vie des étudiants mais aussi une montée de la contestation autour des plates-formes de luttes liées à l'amélioration de leur vécu social.

    Pour cet enseignant de l'UFR SEG38(*) : « Il s'agit d'une situation de crise qui n'est pas spécifique à l'Université de Ouagadougou mais qui frappe la plupart des universités francophones en Afrique de l`ouest qui ont calqué le modèle français. L'enseignement supérieur coûte cher et nos Etats allouent un faible budget à l'enseignement supérieur et un peu partout en Afrique, ce budget ne dépasse pas les 30%. Dans notre pays le discours officiel parle de 20% mais dans la réalité cela vaut à peine 12% ».

    Un responsable d'un syndicat enseignant affirme que l'origine de la crise de l'enseignement supérieur au Burkina Faso est liée à la réduction des financements publics dans ce secteur. En effet, selon lui: « La situation n'est pas reluisante et il est difficile que nous puissions nous en sortir avec ce défaut criard de financement. Par exemple, entre 2000 et 2005 l'Université de Ouaga recevait un financement qui tournait autour de 5 milliards par an. Entre 2005 et 2007, théoriquement il ya eu une petite augmentation qui était de 500 millions mais la présidence de l'Université de Ouagadougou recommandait que le gouvernement prenne en charge un certain nombre de dépenses notamment l'eau et l'électricité. Il fut un moment ou Madame la présidente Nacoulma demandait qu'on fasse la part des choses entre les salaires versés et le budget car dans les 5 milliards il y avait les salaires des enseignants et le personnel. Alors quand on sait que les salaires prenaient les 2/3 du budget et cela veut dire que c'est le tiers qui était utilisé pour le fonctionnement de l'UO. Si vous prenez le cas de l'université de Bobo, il fut un moment où leur budget atteignait à peine 100 millions de telle sorte qu'il fut une année et je crois que c'est en 2008 où les enseignants avaient déposé la craie parce qu'ils ont protesté. Quand je dis qu'ils ont déposé la craie, il n'y avait même plus de craie à déposer ». 39(*)

    A. La réduction des allocations d'études et la paupérisation de la masse estudiantine

    « Dans les années 90, la plupart des pays africains ont adopté des programmes d'ajustement structurel qui ont mis l'accent sur la réduction des dépenses publiques. Ils ont ainsi réduit les budgets de l'éducation, éliminé les aides aux étudiants et dévalué leurs monnaies, suivant ainsi les convictions de la Banque mondiale selon lesquelles l'enseignement de base était socialement plus rentable (26%) que l'enseignement secondaire (17%) et supérieur (13%) et donc plus à même de réduire la pauvreté »40(*).

    La conséquence directe de l'application des mesures du PAS est qu'« en 1989, 98 % des étudiants étaient boursiers, cette proportion est tombée à 36 % en 1997 puis 16,5 % en 1999 et à 7,2 % en 2008. Certes, près d'un étudiant sur trois bénéficie d'une aide, mais non seulement cette aide est loin de couvrir les besoins des bénéficiaires mais elle ne concerne que le premier cycle et s'arrête par conséquent au moment où les besoins augmentent avec l'accroissement du niveau académique ». 41(*)

    Donc, l'identification du statut d'étudiant à celui de boursier a été remise en cause avec l'imposition des mesures du PAS qui a entraîné le contingentement des bourses et l'institutionnalisation de l'aide et du FONER. En effet, l'année 1991/1992 a vu non seulement l'application de la mesure du contingentement de la bourse mais aussi la diminution du taux de celle-ci qui passe désormais de 37500 F/mois en (1ère année) à 27500 F/mois.

    La bourse qui constituait la principale source de revenus des étudiants a été progressivement remplacée par le système de prêt et d'aide au grand mécontentement de ces derniers.

    Cette situation a eu pour conséquence le faible revenu et la baisse du pouvoir d'achat des étudiants dans un contexte général d'inflation plongeant ces derniers dans une situation de précarité et de vulnérabilité. Ils sont désormais exposés à toutes sortes de maux sociaux,  à savoir le chômage, les problèmes de logement, le dénuement matériel, la prostitution, les maladies et la délinquance.

    Rappelons que l'origine sociale modeste et la faiblesse du capital social et économique a pour corollaire l'accentuation de la paupérisation et la vulnérabilité de la masse estudiantine d'autant plus que de nombreux étudiants sont issus des couches sociales défavorisées.

    D'ailleurs, cette paupérisation croissante des étudiants est dénoncée par l'ANEB qui déclare que : «Par un jeu de prestidigitateur, le gouvernement burkinabè retire chaque année 500 bourses en faisant croire qu'il attribue 500. En corollaire, le restaurant universitaire a été privatisé entraînant une baisse de la qualité des repas. Le nombre de lits en cité universitaire est de 700 lits pour environ 8500 étudiants, soit une couverture en logement de 8%, le système de transport est inexistant. Le service de santé est réservé uniquement aux 19% des boursiers»42(*).

    Et un enseignant en fait l'analyse suivante43(*) : « Théoriquement on donne entre 500 et 1000 bourses chaque année alors qu'on enregistre entre 15000 et 20000 nouveaux bacheliers. Donc, cela est insuffisant. La conséquence est que les étudiants sont dans la pauvreté. Ceux qui ont des parents qui peuvent les soutenir viennent à l'université et ceux qui sont issus de familles démunies restent à la maison. Et on remarque que la tendance actuelle au niveau de l'université s'inverse car dans les années 1980 c'était les fils de paysans qui étaient les plus nombreux. Mais de nos jours cette tendance s'inverse car les fils de paysans qui n'ont pas un parent qui peut les supporter à Ouaga ne peuvent plus venir à l'université car il ne suffit pas de payer les 15000F mais il faut aussi vivre à Ouaga. On remarque plutôt que ce sont les enfants de la petite bourgeoisie qui viennent s'inscrire à l'Université de Ouagadougou et qui attendent l'aide ».

    En outre, l'éloignement des parents d'étudiants dont la plupart vivent soit à l'étranger ou à l'intérieur du pays constitue un obstacle à leur épanouissement socio-affectif. Cela aussi réduit le soutien économique dont ceux-ci peuvent bénéficier de la part des parents. Dans ces conditions, les réseaux d'amitié et de camaraderie dans lesquels les étudiants sont inscrits apparaissent comme les seuls canaux par lesquels ces derniers, confrontés à des difficultés d'ordre financier, matériel et moral, passent pour trouver des solutions à leurs problèmes.

    Et l'Etat reste impuissant face à la résolution de ces difficultés comme en témoigne les propos du Ministre des enseignements secondaire, supérieur et de la recherche scientifique qui déclare que : « Certes au plan humain, je peux être sensible au sort d'un étudiant laissé à lui même, mais il faut que les uns et les autres sachent que l'Etat n'est pas un organe de pitié qui fait du messianisme.....Si j'étais un cousin de Bill Gates, cela aurait pu se faire, mais en entendant, je suis responsable d'un département et à ce titre, je ne peux pas prélever des sommes n'importe comment.»44(*)

    Ainsi, la précarité de la situation socio-économique a toujours joué un rôle déterminant dans la mobilisation et l'engagement syndical des étudiants d'où l'étiquette de `'syndicats corporatistes'' collée aux syndicats estudiantins.

    Et la persistance de la revendication du maintien de la bourse et l'augmentation des allocations d'étude montre le rôle incontournable de celles- ci dans le quotidien des étudiants et dans les mobilisations estudiantines.

    B. Le revenu

    En effet, il est reconnu que les conditions matérielles d'existence à travers le capital économique et le patrimoine déterminent la conscience politique des individus et leur choix dans l'espace social et politique. Donc, la paupérisation de la masse estudiantine ne peut que favoriser l'émergence d'une identité, voire d'une conscience politique estudiantine et une mobilisation autour des revendications pour l'amélioration des conditions de vie.

    Le faible capital économique et l'absence de biens matériels des étudiants a essentiellement pour conséquence une précarisation de leurs conditions de vie, d'étude et une montée des revendications. Ainsi, « Une véritable paupérisation s'est emparée de l'ensemble de la communauté universitaire, comparativement aux membres des secteurs public ou privé. Les plus vulnérables étant les étudiants, il n'est guère surprenant de les voir arpentant les pavés pour réclamer de meilleures conditions de vie et d'études. Une étude menée à l'ISSP montre que l'origine des étudiants a changé : alors qu'en 1995, les étudiants issus du milieu rural représentaient 32,1% des inscrits, ce chiffre est passé à 39,7% en 2005».45(*)

    C. Difficultés d'accès au logement et à la santé

    «Le mode de logement demeure un facteur important qui peut aggraver les difficultés d'adaptation à la vie de l'étudiant du fait que l'isolement ressenti risque d'entraver la bonne marche des études, soit favoriser l'équilibre de l'individu et par conséquent son efficacité au travail, en même temps que l'épanouissement de sa vie affective».46(*)

    Malheureusement, la massification de l'enseignement supérieur a accentué le problème de logement des étudiants. En effet, l'accès à un logement décent est devenu un véritable « casse-tête » pour les étudiants dans une ville en pleine expansion comme Ouagadougou où le loyer mensuel d'une maison chambre-salon dans des quartiers proches de l'université, varie entre 15000 et 25000F. Ces prix qui ne sont pas loin de la bourse ne sont pas à la portée des étudiants qui préfèrent s'associer à plusieurs pour occuper une maison afin d'honorer le loyer mensuel.

    Cette situation pousse les étudiants, dans leur majorité, à vivre dans les quartiers périphériques précaires appelés zones non-loties qui n'offrent aucune commodité (eau courante, électricité). Ces quartiers sont synonymes de précarité et surtout de vulnérabilité. C'est pour dénoncer cette précarité de logement que les étudiants à travers leur mouvement revendicatif, exigent régulièrement des autorités la construction de cités universitaires.

    Cette crise du logement est d'autant plus préoccupante que les nombreuses cités sensées accueillir les étudiants sont non seulement éloignées du campus mais ont une faible capacité d'accueil obligeant souvent certains locataires à dormir à trois ou à quatre. Il s'agit là de ce qu'on appelle dans le jargon estudiantin «le système de cambodgien».

    En effet, les résidences universitaires ne sont pas en nombre suffisant et selon le Centre National des OEuvres Universitaires(CENOU) : « A Ouagadougou, 7 cités d'une capacité d'accueil de 2500 lits sont fonctionnels dont la nouvelle cité universitaire de Kossodo d'une capacité actuelle de 752 lits et de 1500 lits à court terme».47(*)

    De ce fait, l'accès au logement constitue un aspect assez important dans le vécu quotidien des étudiants comme en témoigne la persistance de cette revendication dans les plates-formes revendicatives des associations estudiantines ces dix dernières années.

    Par ailleurs, l'accès aux soins a toujours été une préoccupation majeure des étudiants qui exigent une extension à l'ensemble des étudiants de la mesure de la prise en charge de 80% des frais des ordonnances qui, jusque-là, ne s'appliquait qu'aux boursiers. Mais les autorités après moult tractations avec les organisations estudiantines ont réussi à mettre en place une mutuelle de santé en vue de résoudre ce problème d'accès aux soins.

    Aussi, n'est-il pas rare de voir les étudiants manifester et exiger un désengorgement des restaurants universitaires et une amélioration de la qualité et la quantité des repas. Il s'agit là des revendications dites « alimentaires » qui mobilisent toujours la majorité des étudiants. Et le slogan « pain et liberté pour le peuple » de l'ANEB en dit long sur l'importance que revêt la question de la restauration en milieu étudiant.

    PARAGRAPHE 2 : LA DÉGRADATION DES CONDITIONS D'ÉTUDE

    La massification de l'enseignement supérieur au Burkina a entraîné un déséquilibre entre les capacités d'accueil et l'augmentation du nombre d'étudiants non compensée par une augmentation du budget. En effet, construite en 1974, l'université de Ouagadougou qui abritait 500 étudiants se voit obliger de faire face à la forte demande sociale en besoin d'éducation. Par exemple, l'année académique 2003-2004 enregistre un effectif de 19202 étudiants malgré le faible taux d'inscription au niveau de l'enseignement supérieur estimé à 1,65 %.

    Cette situation a largement contribué à la dégradation des conditions d'étude. En effet, cela a pour conséquence, la faible capacité d'accueil des amphithéâtres, le manque d'équipements dans les laboratoires, l'absence dans les bibliothèques des ouvrages de qualité, l'absence de sorties d'étude, de travaux pratiques et dirigés dans certaines filières, le manque d'enseignants, l'absence de sonorisation dans les Amphithéâtres et l'ambiguïté des modules d'enseignement. Cette dégradation des conditions d'études à contribuer à la baisse de la qualité de l'enseignement et à l'élargissement du fossé scientifique et technologique.

    Ces dernières années, le Gouvernement a entrepris la construction de plusieurs amphithéâtres de grandes capacités (A600 places, C300 places, B350 places, D libyen 1200 places, F 1500 places, G 1500 places et le `'Hangar' avec 1700 places). A ces installations, il faut ajouter la location pour les cours d'un des grands pavillons du Salon International de l'Artisanat de Ouagadougou (SIAO).

    Mais selon Albert OUEDRAOGO et Abdoulaye TRAORE48(*) : « Si de telles infrastructures permettent de relever le défi du déficit de places assises dénoncé maintes fois par les associations d'étudiants, il n'empêche pas que le confort d'écoute et de visibilité laisse à désirer. Qu'il s'agisse des micros fixes qui tombent constamment en panne ou des coupures intempestives de l'électricité qui plongent les salles dans la pénombre et arrêtent les brasseurs d'air encore fonctionnels, les enseignants et les étudiants éprouvent un véritable malaise dans des amphithéâtres de plus de 1000 places ! Non seulement, il est impossible d'y tisser une relation humaine, mais c'est la porte ouverte à des comportements grégaires de défiance de l'autorité de l'enseignant. Plongés dans l'anonymat d'une foule, certains étudiants n'hésitent pas à laisser filtrer le diable qui est en eux à travers des propos désobligeants et irrespectueux vis-à-vis des enseignants ou du personnel de soutien ».

    Donc, cette faiblesse des investissements dans le secteur de l'enseignement supérieur a été encouragé par les institutions monétaires, notamment la Banque Mondiale, qui estime que «les étudiants des universités africaines coûtent trop cher, ils sont trop nombreux par rapport aux capacités d'absorption du marché du travail, ils sont insuffisamment orientés vers les disciplines utiles pour le développement, leurs diplômes sont de qualité insuffisante et finalement ils consomment des ressources publiques dont l'allocation n'obéit ni à des critères d'équité ni à des critères d'efficacité»49(*).

    Isolés, vulnérables, devenus une sorte de «lumpen Intelligentsia»50(*) car n'ayant ni capital économique, ni capital social, les étudiants fondent tous leurs espoirs dans les oeuvres universitaires sensées être un outil d'intégration et d'épanouissement socio-économique et culturel.

    L'extrême précarité des conditions matérielles et pédagogiques à l'université de Ouagadougou aboutit à la réalité suivante : «Les chimistes qui n'ont jamais effectué un tirage, les biologistes qui n'ont jamais mesuré un courant électrique, les agronomes qui n'ont jamais réalisé des essais sur le terrain, les ingénieurs qui n'ont jamais démonté de machines, les étudiants en sciences sociales qui n'ont jamais effectué une analyse sur des données directement collectées, les juristes qui n'ont jamais eu accès aux jurisprudences récentes»51(*).

    Il apparait clairement que le rythme de réalisation des infrastructures d'accueil des étudiants n'a pas suivi celui de l'accroissement des effectifs comme en témoigne Amadou Ouédraogo étudiant au département de biologie à l'Université de Ouagadougou 52(*): « En physiologie végétale, nous avons le même matériel depuis 1974, un seul labo pour 400 à 500 étudiants qui n'ont plus qu'une séance toutes les deux semaines ».

    Ainsi, face à la détérioration des infrastructures devenues vétustes et dépassées faute de maintenance suffisante, de nombreux étudiants développent un discours critique vis-à-vis de l'Etat et n'hésitent pas à prendre part aux manifestations en vue d'une amélioration de leur cadre d'étude.

    Nous convenons avec KASONGO Ngoy53(*) qu': «Au moment où l'université cumule tous les effets pervers d'une université en déperdition ou de masse à savoir : détérioration de la condition estudiantine, dévaluation des diplômes, amenuisement des perspectives professionnelles liées aux études, voire chômage croissant des diplômés universitaires, n'est-il pas systématique qu'elle demeure encore la pièce maîtresse de la stratégie de positionnement et de survie des acteurs sociaux ? ». 

    Malheureusement, les mesures drastiques des institutions financières à travers l'ajustement éducatif ont eu pour effet de briser le lien jusqu'alors maintenu entre diplôme et emploi, surtout au niveau supérieur. Elles ont aussi contribué à tarir la source de promotion sociale par le biais de l'enseignement supérieur surtout des couches intermédiaires et inférieures, conduisant ainsi à la montée de la contestation estudiantine ayant abouti à l'invalidation de l'année académique 2000 et la « refondation » de l'université.

    Les questions liées à l'hébergement, la santé, au transport, la restauration, et l'augmentation des allocations d'études ont toujours mobilisé les étudiants et ont constitué les principaux points des plates-formes revendicatives des syndicats estudiantins.

    La masse estudiantine confrontée aux problèmes sociaux se sent délaissée par les autorités qu'elle accuse de multiplier les dépenses de prestige avec l'organisation des grands sommets internationaux et des manifestations culturelles coûteuses (FESPACO, SIAO, KORAS, Cinquantenaire de l'indépendance).

    Selon le Cadre des Partis d'Opposition (CPO)54(*), « Les crises universitaires qui secouent les universités du Burkina Faso sont devenues récurrentes ces dix dernières années : en 1997, on a frôlé de très près une année blanche ; en 1999 ce fut l'année invalidée. On l'aura remarqué, les crises de ces dix dernières années ont toujours opposé des étudiants au gouvernement à propos de leurs conditions de vie et d'étude ».

    Au terme de notre analyse, il est pertinent de remarquer que la crise de l'enseignement supérieur au Burkina Faso s'est aggravée sous l'effet des politiques de redressement économique à travers l'application des plans d'ajustements structurels. Ainsi la crise de l'enseignement supérieur depuis plus de dix ans révèle une évidence : il existe un lien entre la crise de l'Etat et la crise universitaire en général. Face à cette dégradation des conditions de vie et d'études, les organisations estudiantines accusent l'Etat de développer une politique de démission vis- à- vis de l'enseignement supérieur et vont revendiquer de meilleures conditions d'étude.

    De nombreux étudiants partagent l'avis de cet ancien responsable d'un syndicat étudiant55(*) qui affirme que : « le pouvoir en place ne marche que quand il y a des revendications et des crises. Quand la pression est suffisante, il concède quelque chose mais quand le mercure baisse, il commence à remettre en cause les acquis».

    Donc, à travers leurs syndicats respectifs, les étudiants vont développer des actions, des plates-formes revendicatives pour se faire entendre et amener ainsi les autorités à améliorer leurs conditions de vie et d'étude.

    SECTION 2 : ANALYSE DES FACTEURS DE FRUSTRATION ET DE CONTESTATION DES ENSEIGNANTS DU SUPÉRIEUR

    L'enseignement supérieur joue un rôle majeur dans le développement d'un pays. En effet, selon la Banque Mondiale56(*) : « Les programmes universitaires de classe mondiale, aux niveaux de la recherche fondamentale et appliquée et du troisième cycle, sont le ferment de la maîtrise des sciences et des techniques, le préalable à une assimilation judicieuse des progrès foudroyants du savoir, la clé de l'indépendance intellectuelle de l'Afrique. Aussi est-il véritablement paradoxal qu'aucun des pays africains n'ait actuellement les moyens d'avoir de tels programmes alors qu'aucun ne peut s'en passer à terme ».

    Mais au Burkina Faso, qu'en est-il de la situation des enseignants qui sont chargés de la transmission de ce savoir ? A ce sujet, répondant à une question d'un journaliste, un enseignant affirme : «Notre état est tel qu'il faut recourir à des consultants pour comprendre ce qui nous arrive ».

    PARAGRAPHE 1 : ANALYSE DES CONDITIONS DE VIE DES ENSEIGNANTS

    Les conditions de vie des enseignants-chercheurs se sont fortement dégradées ces dernières années car l'enseignant-chercheur burkinabè est mal rémunéré, ce qui exacerbe sa frustration. En effet, depuis plusieurs décennies les salaires et les avantages liés ou non à la rémunération ont plus ou moins connu une stagnation pendant que l'inflation et la cherté de la vie à travers leurs effets pervers réduisaient considérablement le pouvoir d'achat de l'enseignant-chercheur. En effet, selon l'Observateur paalga, n°740 du 17 juin 2009, un assistant et un maitre assistant ont respectivement des salaires de 115 000F et 185 000F. Quant au maitre de conférences et du professeur titulaire, ils ont respectivement 301 000 F et 354 000 F.

    Donc, pour faire face aux besoins existentiels de nombreux enseignants sont obligés de mener des activités parallèles ( consultations, commerce, cours dans les établissements secondaires et les universités privées). En plus, de nombreux enseignants désaffectent le système public pour les Universités des pays du Nord, les établissements privés ou pour exercer des activités jugées plus rentables. Cela joue inévitablement sur la qualité de l'enseignement à l'Université de Ouagadougou.

    Par ailleurs, les enseignants rencontrent d'énormes difficultés en matière de santé et surtout du logement. Notons que le problème de logement occupe une place de choix dans leur plate-forme revendicative.

    En effet, pour cet enseignant-assistant57(*), « Les assistants vivent dans les célibatoriums. Ils ne peuvent pas quitter les célibatoriums parce qu'aujourd'hui le coût de la maison a grimpé. Il suffit d'avoir une maison chambre salon et s'il y a un peu de carreau là-dedans c'est au-dessus de 50 000F. Vous allez prendre la moitié de votre salaire pour le logement ? C'est ce qui fait que les assistants vivent dans les célibatoriums. Même quand on est assistant, c'est difficile de prendre deux chambres salon car cela représente le 1/3 de votre salaire. Devant une telle situation nous sommes obligés de réagir ».

    Cette situation entraine la perte du respect et du prestige social dont jouissent les enseignants du supérieur. Or, sans cette considération sociale, la transmission du savoir et le respect pédagogique à l'endroit des étudiants devient difficile. Rappelons qu'au moment de la création de l'Université, la situation financière et le prestige des enseignants suscitaient envie et respect.

    Analysant cette situation, Fernand SANOU58(*) estime que « La dégradation du statut social et des conditions de vie et de travail des enseignants du supérieur est une conséquence directe de la politique prônée par la Banque mondiale, celle de mettre l'accent sur le primaire et de faire supporter le poids des autres ordres d'enseignement à leurs bénéficiaires. Elle entre en contradiction avec la recommandation de cette même institution de la nécessaire formation des enseignants du supérieur ».

    Selon lui, l'enseignement supérieur est pendant longtemps resté le parent pauvre du financement, surtout extérieur, tandis que « le Ministère de l'Enseignement de Base et de l'Alphabétisation (MEBA) a vu sa part du budget public de l'éducation croître régulièrement de 57,2% en 2001 à 62,3% en 2005 et sa part du financement extérieur croître de 60% en 2003 à 90% en 2007».

    Le graphique ci-dessous indique l'évolution des parts des sous-secteurs dans le financement extérieur de l'éducation entre 2003 et 2007.

    Graphique n°1 : Parts des sous-secteurs dans le financement extérieur de l'éducation (en %)

    Source: MESSRS (2009) : Politique sous sectorielle des enseignements secondaire, supérieur et de la recherche scientifique. Document de diagnostic, graphique n°26, p.90.

    PARAGRAPHE 2 : ANALYSE DES CONDITIONS DE TRAVAIL DES ENSEIGNANTS

    Les enseignants se plaignent régulièrement des mauvaises conditions de travail qui constituent un facteur important de démotivation de ces derniers. En effet, nombreux sont les enseignants qui ne disposent pas de bureaux, d'ouvrages d'enseignement, d'outils pédagogiques indispensables pour la recherche et le renouvellement des cours. A cela s'ajoute le problème de l'équipement des salles de cours (pour les travaux dirigés et pratiques) et des laboratoires.

    Rappelons aussi une difficulté pour les enseignants à supporter les frais d'achats des ouvrages spécialisés et de séjour à l'extérieur notamment dans les pays où se réalisent les progrès majeurs dans certaines disciplines.

    Par ailleurs, les effectifs pléthoriques d'étudiants et l'insuffisance des infrastructures posent un problème d'encadrement59(*) vu le nombre assez réduit d'enseignants.

    En effet, « les comparaisons des ratios d'encadrement dans les universités africaines faites par le Pôle UNESCO de Dakar (2008) montrent en effet que l'enseignant burkinabé du public est l'un des plus chargés avec 39,8 étudiants/enseignant, pour une moyenne africaine de 21,1/enseignant, une moyenne mondiale de 17,1/enseignant et une moyenne européenne de 15,6/enseignant. Ce ratio élevé d'encadrement ne peut que nuire à la qualité de celui-ci, de même qu'à la qualité de la recherche. Concernant celle-ci, on soulignera que les primes de recherches n'ont connu d'accroissement que récemment et que les faibles montants disponibles ne permettent pas l'entreprise de réels programmes de recherche »60(*).

    L'Université de Ouagadougou souffre d'un déficit important d'enseignants, ce qui a pour conséquence l'augmentation du volume horaire des enseignants. Notons que le volume horaire statutaire annuel est actuellement de 175 heures pour l'assistant, 150 pour le maitre-assistant, et 100 heures pour le maitre de conférences et le professeur titulaire. Donc, l'institution du système des heures supplémentaires sans limites impératives tient compte du déficit d'enseignants. Ainsi, certains enseignants se retrouvent avec 100, 200 voire 300 heures supplémentaires en sus du volume statutaire.

    Cette situation « entraine de la part des enseignants et personnels administratifs des efforts considérables, des charges insupportables de travail. La conduite des activités pédagogiques est devenue un calvaire et l'évaluation un exercice périlleux et redoutable au regard des milliers de copies à corriger qui s'imposent à l'enseignant »61(*).

    L'insuffisance du nombre d'enseignants s'explique par le fait que les recrutements d'enseignants sont nettement en dessous des besoins. Par exemple, pour l'année académique 2006-2007, seulement 54 postes budgétaires étaient prévus pour toutes les filières confondues mais seulement 33 ont été pourvus. Cela révèle clairement que les postes d'enseignants restent peu attractifs d'où le peu d'engouement des candidats. Or, le personnel enseignant des universités publiques est vieillissant et il n'y a aucune relève à l'horizon. Ce déficit d'enseignants ira en s'aggravant si une solution n'est pas trouvée car dans les années à venir la majorité des enseignants titulaires auront atteint l'âge de la retraite pendant qu'au même moment, les contingents de nouveaux bacheliers vont grossissant.

    PARAGRAPHE 3 : LA QUESTION DE LA VALORISATION DU STATUT DES ENSEIGNANTS

    A. L'amélioration de la grille salariale

    Tableau n° 1: Comparaison des salaires des enseignants du supérieur du Burkina Faso avec ceux de trois pays voisins (en F CFA)

    Pays

    Assistant

    Maître-assistant

    Maître de conférences

    Professeur titulaire

    Burkina Faso

    115 000 F

    185 000 F

    301 000 F

    354 000 F

    Côte d'Ivoire

    858 711 F

    1 000 000 F

    1 317 541F

    1 485 445 F

    Niger

    507 500 F

    681 500 F

    812 000 F

    957 000 F

    Sénégal

    600 000 F

    700 000 F

    800 000 F

    1 000 000 F

    Source : Observateur n°740, 17 juin 2009 : Université d'Ouagadougou, «Le gouvernement veut distraire la galerie», par le cadre de Concertation des partis politiques de l'opposition (CPO).

    Une comparaison des rémunérations des enseignants de la sous-région révèle que le professeur titulaire burkinabè a le tiers du salaire de l'assistant en Côte d'Ivoire, moins d'une fois et demi celui de l'assistant au Niger et près de la moitié de celui de l'assistant au Sénégal (cf. tableau).

    Et selon le Secrétaire Général du SYNADEC62(*), « En décembre 2008, un assistant nigérien en début de carrière percevait exactement le même salaire qu'un professeur débutant au Burkina. Mieux, depuis Janvier 2009, l'assistant débutant au Niger a un salaire nettement supérieur à celui d'un professeur titulaire burkinabè. Alors que l'assistant nigérien débute avec 520 000 francs Cfa (soit 800€), le professeur titulaire burkinabè gagne à peine 400 000f Cfa (soit 609€) ».

    Il continue et s'insurge en ces termes: « Nous sommes mal payés. Nous sommes les plus mal payés de la sous région. Si vous soutenez votre thèse de doctorat, si la situation ne change pas, on va vous mettre en catégorie A1 et le salaire de base correspondant à cette catégorie ne vaut pas 90000F. C'est ça votre salaire. Avec les indemnités moins les impôts, vous avez moins de 125000F. En net à payer, on va vous payer autour de 122000F. Voilà le salaire de quelqu'un qui a un doctorat et qui s'appelle assistant. Quand vous passez maitre-assistant, vous avez un salaire qui va se situer autour de 160000F. Donc, vous voyez. Ces salaires ne vous permettent pas d'abord de vous loger n'en parlons pas de mener une vie de famille alors que votre rang vous exige que vous ayez un domicile décent avec une possibilité d'avoir un bureau la dedans ou vous pouvez vous retirer pour travailler ».

    Ainsi, mobilisés autour du syndicat autonome des enseignants-chercheurs (SYNADEC), les enseignants ont lancé une série de grève en décembre 2008 puis en mai-juin 2009. Les principaux points de leur plate-forme revendicative reposaient sur la valorisation du statut de l'enseignant-chercheur, l'apurement de la dette sociale, la convocation d'assises sur l'état des lieux et l'avenir de l'Université, l'augmentation de la grille salariale et le rétablissement de certains avantages liés à leur fonction, notamment l'accès au logement, suspendus sous le CNR (Conseil National de la Révolution). En ce qui concerne le point relatif au salaire, le SYNADEC propose la grille salariale suivante au gouvernement : Un salaire initial de 809.812 FCFA à l'Assistant, 938.582 au Maître-assistant, 1.247.595 au Maître de conférences et 1.319.550 au Professeur titulaire.

    Mais face à ces revendications, le gouvernement avance comme argument l'insuffisance de ressources financières et la difficulté d'application de certaines mesures sans l'adoption de textes spécifiques accordant un statut particulier aux enseignants qui seraient régis par la loi n°13/98/AN du 28 avril 1998 portant régime juridique applicable aux emplois et aux agents de la fonction publique. Mais en réalité, le gouvernement craint, à travers la satisfaction de ces revendications, l'ouverture de `'la boîte aux pandores'' et la création par là une avalanche de revendications auprès des autres corps de la Fonction Publique.

    Dans une déclaration parue le 13 juin 2009 dans le quotidien l'Observateur Paalga, le Cadre de Concertation des partis politiques de l'Opposition (CPO) déclare, « Au lieu de chercher à résoudre les problèmes concrets posés par les enseignants-chercheurs, le gouvernement de la quatrième république, comme à son habitude sur tous les autres sujets qui préoccupent les Burkinabè, se lance dans des tergiversations inutiles et ridicules. Le gouvernement n'a pas le courage de mener les concertations entamées jusqu'à leurs termes et tout en s'arc-boutant sur la perspective d'un statut particulier de l'enseignant-chercheur tente par les manoeuvres dilatoires de briser la lutte légitime du SYNADEC ».

    Par ailleurs, la négociation engagée entre le gouvernement et le SYNADEC bute sur certains points. A ce sujet, le secrétaire général du SYNADEC s'en explique : « Pour qu'on puisse nous payer un salaire conséquent il faudrait qu'on nous sorte du régime général de la Fonction Publique. Il nous faut un statut particulier et il faut qu'on nous décroche donc de la loi 013.  On nous a conviés à l'élaboration de l'avant projet de la loi qui a été adopté. Il fallait maintenant élaborer les décrets d'application. Après, on ne nous convie plus. On met en place une commission gouvernementale qui s'assoit et qui fait ses textes et maintenant on nous appelle pour venir discuter. Donc, nous avons exigé de voir tous les textes afin d'examiner leur conformité avec la loi. Ils ont dit non en disant qu'ils n'étaient pas compétents pour discuter des questions financières. C'est ainsi qu'on a claqué la porte aux négociations. »63(*)

    Finalement, le conseil des ministres du 26 janvier 2011 examine et adopte deux décrets relatifs à la loi 025-2010/AN du 18 mai 2010 portant régime juridique applicable aux emplois des enseignants-chercheurs, des enseignants hospitalo-universitaires et des chercheurs au Burkina Faso.

    Le premier décret relatif à cette loi porte sur le relèvement des indices des enseignants-chercheurs et le second sur la modification des taux des indemnités académiques, d'encadrement et la création d'une indemnité de charge de l'assistant. Cette revalorisation selon le gouvernement prend effet pour compter du 1er janvier 2011 et a une incidence financière de un milliard trois cent quarante trois millions quarante quatre mille huit cent trente trois (1 343 044 833) F CFA.

    Interrogé au sujet de cette loi, de ces décrets et de la possibilité d'une incidence financière sur les salaires en fin janvier, le secrétaire Général du SYNADEC64(*) déclare, sceptique : « Nous sommes des Saint Thomas au niveau du syndicat ; tant que nous n'avons pas vu, nous ne croirons pas. Mais pour nous c'est quand même quelque chose de très singulier. Dans la tradition administrative burkinabé, il n'y a pas de correction de salaire en janvier et février. Les corrections de salaire, c'est généralement en mars lorsque le budget de l'Etat est mis en place, mais là on nous parle de janvier. On se demande si c'est vrai. C'est quand on va mettre le doigt dans le trou (rires), c'est lorsqu'on aura palpé les sous à la fin du mois de janvier, qu'on croira ».

    Dans un contexte de valorisation des ressources humaines en vue de faire du Burkina un pays émergent, il est urgent de trouver une solution aux difficultés des enseignants. Il y a quelques décennies, les ressources naturelles et le capital jouaient un rôle prépondérant dans le développement des pays. Mais de nos jours, c'est la promotion du savoir, de la matière grise et la capacité d'innovation qui sont les principaux leviers du changement, de la croissance économique et du développement durable.

    B. La promotion de la carrière

    En matière de qualification, l'enseignant-chercheur Burkinabé occupe une place de choix dans la sous-région et même dans le continent. En effet, selon l'étude du Pôle UNESCO de Dakar sur l'enseignement supérieur africain (2008), « l'enseignant-chercheur burkinabè se situe parmi les mieux qualifiés du continent. La proportion des enseignants de rang magistral (le plus élevé) serait en effet de 25%, proportion la seconde meilleure après celle de la République Centre-Africaine (33%) pour une moyenne africaine d'environ 18% et un plancher de 8% pour la Tunisie »65(*).

    Aussi, les enseignants-chercheurs constituent une catégorie particulière dont la promotion à un grade supérieur est liée aux résultats des prestations pédagogiques et scientifiques. Or, une telle promotion s'avère difficile à réaliser dans des conditions de travail particulièrement difficiles auxquelles ils sont confrontés.

    En effet, depuis plusieurs décennies, les enseignants se retrouvent dans un environnement de travail qui bloque ou ralentit le déroulement normal de leur carrière. Ils consacrent plus de temps à l'enseignement (heures réglementaires et supplémentaires) alors qu'en principe ils devraient disposer aussi de plus de temps pour la recherche, élément indispensable à la promotion de leur carrière. Donc, ce blocage de la carrière et la lenteur dans la promotion occupe une place de choix dans les plates-formes des différents syndicats d'enseignants du supérieur.

    Par ailleurs, après les longues grèves déclenchées par le SYNADEC depuis 2008, le conseil des ministres du 26 janvier 2011 au titre du Ministère des enseignements secondaire et supérieur a examiné et adopté trois (03) décrets en application de la loi 025-2010/AN du 18 mai 2010. Le premier décret porte organisation des emplois des enseignants-chercheurs, des enseignants hospitalo-universitaires, chercheurs, et réglementation des fonctions d'assistant, d'enseignant à temps plein, d'attaché de recherche et d'ingénieur de recherche. Il précise les attributions, les modes, les conditions d'accès et les classifications catégorielles.

    Ensuite, le second décret fixe à soixante cinq (65) ans la limite d'âge d'admission à la retraite des enseignants-chercheurs, des enseignants hospitalo-universitaires et des chercheurs. Enfin, le troisième décret détermine les conditions de réquisition des enseignants-chercheurs, des enseignants-hospitalo-universitaires et des chercheurs, qui sont exclusivement justifiées par les nécessités de service.

    CHAPITRE 2 : DE LA MISSION TRADITIONNELLE DE TRANSMISSION DU SAVOIR À LA LUTTE POLITIQUE

    SECTION 1 : LE SYNDICALISME ÉTUDIANT : ENTRE MOBILISATION CORPORATISTE ET INSTRUMENTALISATION POLITIQUE

    Le milieu social façonne les individus, leur inculque des valeurs symboliques, des préférences partisanes en un mot une conscience politique qui détermine leur rapport à la politique. C'est le cas des acteurs du monde universitaire à savoir les enseignants et les étudiants qui à travers leur trajectoire sociale et académique sont prédisposés à la contestation. Dans ces conditions, ces derniers intériorisent des schémas de pensée et des perceptions qui orientent nécessairement leurs discours, attitudes et choix politiques.

    Ce processus d'inculcation et `'d'épidémisation'' des valeurs politiques et syndicales est tributaire du milieu universitaire réputé rebelle et insoumis.

    PARAGRAPHE 1 : CONDITION DE PARTICIPATION À L'ESPACE SYNDICAL ET POLITIQUE

    Rappelons avec Jules BERGUES que toute jeunesse se définit par «son rapport au monde». En effet, la jeunesse est l'âge de la contestation par excellence. Cette jeunesse estudiantine, de par sa position sociale d'élite et son ouverture sur le monde, aspire au changement et ne cache pas ses penchants pour la justice, l'égalité, la liberté et la démocratie.

    A ce sujet, un ancien Ministre de l'enseignement secondaire, supérieur et de la recherche scientifique66(*) reconnait que : « Dans toute société, là où il ya le savoir et la connaissance, il y a les ferments du changement. Quand l'homme est éclairé, il formule nécessairement des souhaits, des revendications. Donc, les universités ont toujours recelé ce que les pouvoirs ont appelé les noyaux d'agitation. Nous sommes formés pour créer et transmettre des connaissances et cela crée souvent un aspect revendicatif qui pose problème aux gouvernants. Ce n'est pas nouveau. C'est normal... »

    Cependant, la position idéologique et politique a une influence considérable sur les attitudes et comportements des acteurs du monde universitaire et détermine leur adhésion aux syndicats et partis politiques. Ces derniers participent à l'espace syndical et politique dans le seul souci de favoriser un changement qualitatif dans leur condition sociale d'existence.

    En effet, Michel CROZIER67(*), analysant les mobiles réels ou supposés de la participation des acteurs dans l'organisation, affirme qu'« une organisation ne peut-être analysée comme l'ensemble transparent que beaucoup de ses dirigeants voudraient qu'elle soit. Elle est le royaume des relations de pouvoirs, de l'influence de marchandage, et du calcul. Mais elle n'est pas davantage l'instrument d'oppression qu'elle apparaît à ses détracteurs, car ces relations conflictuelles ne s'ordonnent pas selon un schéma logique intégré. Elles constituent le moyen pour d'innombrables acteurs de se manifester et de peser sur le système et sur leurs partenaires même si c'est de façon très inégale».

    Les enseignants et les étudiants, à travers leurs différentes plates-formes revendicatives cherchent à agir sur l'agencement de l'ordre social et à promouvoir les revendications dont ils sont porteurs. Ces actions protestataires seraient donc la production d'un contre-discours du discours des pouvoirs politiques.

    Par ailleurs, analysant la participation des acteurs dans les organisations, Ollo Pépin HIEN68(*) estime que «ce sont des stratégies des acteurs politiques inscrits dans des organisations politiques concurrentielles et visent soit, la célébration et la légitimation de l'ordre social et politique, à travers des manifestations publiques, soit la contestation ou la subversion symbolique du système politique dominant à travers des actions protestataires. Elles sont le lieu privilégié de l'orchestration des stratégies de subversion politique, de la production et de la transaction des symboles nécessaires à la mobilisation collective des acteurs et à l'imposition de leur domination ».

    Le discours et la participation à l'espace syndical et politique des enseignants et étudiants tirent leur essence des conditions matérielles d'existence de ces derniers. On peut affirmer sans exagération aucune que les acteurs du monde universitaire pensent politiquement ce qu'ils sont socialement.

    Par ailleurs, dans l'espace syndical et politique, l'origine sociale, les rôles sociaux et la distribution des divers capitaux dans le champ social sont au fondement de l'adhésion des enseignants et étudiants dans les syndicats et les partis politiques. Ils ne cachent pas leur opposition au pouvoir en place qu'ils accusent à tort ou à raison d'être sourd face aux malaises exprimés par la jeunesse estudiantine et d'être le principal artisan de la dégradation de leur condition de vie et de travail. De ce point de vue le campus universitaire, de par sa position stratégique, apparait comme le lieu par excellence, le terrain où naissent, se côtoient et s'affrontent les forces sociopolitiques.

    Un étudiant en 3e année de sociologie69(*) justifie son opposition au pouvoir en place en ces termes : «Voyez-vous ce que ce régime fait. Pendant que nous mourons de faim et que nos conditions de vie laissent à désirer, il se permet d'organiser de grandes foires internationales à coup de milliards. Je veux parler du SIAO, des Koras music et du FESPACO ».

    Un autre en 4e année de droit70(*) lâche dans une grande colère : «Ce pouvoir tue les enfants sans raison valable et ment sans vergogne. Vous avez vu ce qui s'est passé à Koudougou le 20 février 2011 avec la mort de l'élève Justin ZONGO ? Et ce n'est pas la première fois, il y a eu la mort de Dabo BOUKARY, les élèves de Garango, et celle de Flavien NEBIE à Boussé. Nous luttons pour que tous ces crimes prennent fin».

    Ces propos confirment les rapports souvent tendus entre les étudiants et le pouvoir en place qui, souvent exaspéré par les longues et humiliantes négociations, a tendance à utiliser la répression physique.

    Conscient de son impopularité auprès de la masse estudiantine et des enseignants, le pouvoir est fréquemment sur ses gardes et est prêt à intervenir pour endiguer la contestation estudiantine capable de réveiller et d'entraîner derrière elle d'autres forces sociales à même de le déstabiliser.

    PARAGRAPHE 2 : DYNAMIQUE DES LUTTES UNIVERSITAIRES POUR LA PROMOTION DES VALEURS DÉMOCRATIQUES

    Le mouvement étudiant et enseignant a toujours pris une part prépondérante dans le combat politique en s'affichant comme une force avant-gardiste dans les luttes sociales. L'une des caractéristiques des organisations universitaires réside dans le fait qu'elles ont toujours depuis leur naissance refusé de s'enfermer dans les revendications corporatistes en s'engageant aux côtés des forces de changement d'où leurs liens réels ou supposés avec les syndicats et les partis politiques plus ou moins de gauche. En effet, à l'issue de son congrès le 4 août 1963 à Paris, l'UGEV adopte ce qu'il convient d'appeler la charte de l'étudiant voltaïque qui stipule en son article 1er que «tout militant doit être considéré comme un engagé et mobilisé contre l'impérialisme sous toutes ses formes, il doit lutter avec les syndicats progressistes et oeuvrer pour l'unité africaine et le maintien de la démocratie»71(*).

    L'adoption de cette charte a scellé désormais l'union entre le mouvement étudiant et les forces politiques de gauche.

    Le développement de cette ligne radicale et de contre-pouvoir s'est poursuivi après l'indépendance avec l'hégémonie des partis politiques de gauche à la tête de l'UGEV. Cela a permis à ce mouvement de développer une grande capacité de résistance face aux tactiques répressives des régimes successifs. L'UGEV fut une école, un vivier, un cadre de formation de l'élite politique et syndicale actuelle du Burkina Faso. Plusieurs dirigeants de partis politiques ou de syndicats ont été des anciens dirigeants ou militants de l'UGEV.

    Ainsi, le mouvement étudiant a toujours été la locomotive des changements politiques au Burkina Faso. La chute de la 1ère République a été l'oeuvre des élèves et étudiants qui ont lutté aux côtés des syndicats et des partis politiques pendant le soulèvement populaire du 3 janvier 1966. C'est également au sein du mouvement étudiant que les antagonismes idéologiques entre les partis communistes ont donné naissance à la révolution du 4 août 1983. «La révolution burkinabè, on l'a accouchée sur mon lit de célibataire-étudiant, SANKARA, Blaise et moi» dira un ancien dirigeant de l'UGEV72(*).

    Par ailleurs, la jeunesse estudiantine et scolaire a joué le rôle de fer de lance dans la lutte du Collectif des organisations démocratiques de masses et de partis politiques (CODMPP)73(*) après l'assassinat du journaliste Norbert Zongo.

    A propos de cette crise Pascal BIANCHINI74(*) déclare que « Cet épisode est aussi une illustration exemplaire de l'absence d'hégémonie du régime sur l'intelligentsia et, à contrario, de sa prédilection pour le recours à la coercition. Au passage, cette épreuve a montré également, à l'Université comme ailleurs, une polarisation de l'espace des prises de position poussée à son maximum qui montre ainsi les limites de l'institutionnalisation des compromis et du rôle des groupes de médiation qui ont brillé par leur absence ».

    Le rôle d'avant-garde du mouvement étudiant dans les luttes sociales fera dire au Collège des sages75(*) que le militantisme étudiant serait à l'origine de la corruption, des détournements et de l'introduction de la violence en politique au Burkina Faso. En effet, on peut lire ceci dans le rapport du collège des sages76(*) : «Devenus leaders politiques, les étudiants d'hier n'ont pas su effectuer la maturation nécessaire pour devenir des hommes d'Etat tant et si bien que les valeurs telles que le patriotisme, l'humanisme, le respect de la vie humaine, morale, les us et coutumes qui incarnaient l'ancienne génération de politiciens, ont cédé la place à la violence politique avec les assassinats, les disparitions, le vandalisme, les tortures et les actes répréhensibles comme la corruption, les détournements, etc.».

    Or, en initiant le vaste mouvement de protestation en février 2011 à Koudougou suite à la mort de l'élève Justin ZONGO, les élèves et étudiants ont une fois de plus été à la pointe de la lutte contre l'impunité. D'ailleurs, suite à ces évènements, le Gouverneur de la région du Centre-Ouest a été relevé de ses fonctions le 26 févier 2011. Donc, le mouvement étudiant aux dires de nombreux analystes a su démontrer qu'il restait attaché aux idéaux de la démocratie, de liberté et de justice. Ce serait au nom de ces valeurs que les étudiants rejettent les mesures socialement injustes et participent massivement aux combats pour la démocratie et le respect des droits de l'homme. D'ailleurs, la surveillance policière intensive, voire la militarisation du campus lors des grèves serait un indice qui montre la position stratégique du mouvement étudiant dans les combinaisons sociopolitiques à même d'opérer des changements de régime.

    A travers ces analyses, l'on est tenté de s'interroger sur les raisons profondes qui guident et orientent l'action du mouvement étudiant au Burkina Faso. Les organisations estudiantines sont-elles à la solde des syndicats et des partis d'opposition qui se cachent derrière elles pour déstabiliser le pouvoir ? A ce sujet, un ancien Ministre77(*) déclare : « J'ai toujours exécré le PCRV mais je dois reconnaitre qu'il a toujours joué un grand rôle dans la mobilisation des étudiants. Le PCRV depuis sa naissance a pris comme champ d'action spécifique le mouvement étudiant. Donc, ils sont accusés à tort ou à raison d'être derrière l'ANEB. Les syndicats comme l'ANEB, le SYNTHER, le SYNTSHA sont considérés par beaucoup comme étant les instruments du PCRV ».

    En effet, si l'on observe de près l'actualité, on s'aperçoit vite que les élèves et étudiants font l'objet de sollicitations politiques et idéologiques de la part des partis politiques et des syndicats. Aussi, les syndicats d'étudiants partagent souvent les mêmes analyses que d'autres organisations, notamment les formations politiques et les organisations clandestines comme le PCRV. Et ces dernières en quête de bases sociales rivalisent pour le contrôle de ces organisations qui deviennent souvent leur caisse de résonance.

    Par exemple, depuis 1979, en décidant de se placer ouvertement sous la tutelle politique et idéologique du PCRV, et en se rapprochant des syndicats plus ou moins radicaux, l'ANEB s'est vu nier son autonomie de pensée et d'action. Dès lors, la thèse de la manipulation des syndicats étudiants par les forces politiques est devenue récurrente pendant les crises universitaires et est utilisée par le pouvoir comme un épouvantail. Du reste, cette devise commune au PCRV et à l'UGEB (ANEB) qui est « pain et liberté pour le peuple » tend en apparence à accréditer la thèse de la collusion entre ces deux structures.

    Réfutant cette thèse un ancien dirigeant de l'ANEB déclare : «Je ne crois pas en cette prétendue manipulation de l'ANEB par le PCVR. C'est une pure invention du pouvoir en place pour réprimer durement la contestation estudiantine. A mon avis, les étudiants sont plutôt manipulés par la colère, la misère et l'injustice dont ils sont victimes... »

    Interrogé au sujet de la manipulation des étudiants par les partis politiques et les syndicats, un enseignant à l'UFR/SVT78(*) lance : « Personnellement, je pense que cette thèse est fondée car on a souvent vu des étudiants prendre part à des luttes politiques qui n'ont rien à voir avec l'université. Ce fut le cas en 1999-2000 ou les étudiants ont âprement lutté aux côtés du Collectif pour demander lumière et justice sur la mort de Norbert ZONGO. Cela a plus tard conduit à l'invalidation de l'année académique 1999- 2000 ».

    Par ailleurs, on peut reconnaître que les partis politiques et les syndicats à travers la manipulation affective ou idéologique peuvent rallier les étudiants à leur cause et mots d'ordre. Mais peut-on soutenir sérieusement que les effets de la manipulation et du conditionnement des étudiants par les partis politiques et les syndicats sont beaucoup plus puissants que la marge de liberté dont disposent ces derniers et qui leur permet de se soustraire ou de participer volontairement aux actions de protestation?

    En effet, l'homme ne peut être considéré seulement comme une main et un coeur selon CROZIER et FRIEDBERG79(*). Il est aussi et avant tout une tête, c'est-à-dire une liberté, un agent autonome qui est capable de calculs et de manipulation ; qui s'adapte et invente en fonction des circonstances, de ses intérêts et des mouvements de ses partenaires. Donc, accusés à tort ou à raison d'être manipulés par des forces invisibles, les acteurs du monde universitaire disposent néanmoins d'une marge de manoeuvre leur permettant de contourner ou d'utiliser ces situations à leur profit.

    SECTION 2 : ARTICULATION ENTRE LES FRANCHISES UNIVERSITAIRES ET LES CRISES UNIVERSITAIRES

    «Mais dans quels pays au monde les franchises universitaires sont-elles respectées même ? Frappez-les !». Ces propos sont attribués à un chef d'Etat Africain qui, débordé par une grève d'étudiants, donnait l'ordre de réprimer durement cette contestation. Pourtant, le respect des franchises universitaires, objet d'enjeux divers, a de tout temps été une revendication traditionnelle des acteurs du monde universitaire.

    PARAGRAPHE 1 : GÉNÉRALITÉ SUR LES FRANCHISES UNIVERSITAIRES

    Les franchises universitaires sont définies comme un ensemble de dispositions, de textes visant à créer un environnement propice à la recherche, notamment à la création de l'esprit sans aucune forme de contrainte. Il s'agit donc de la liberté qu'ont les membres de cette communauté universitaire de poursuivre leurs activités universitaires dans le cadre de règles éthiques et de normes internationales établies par cette communauté sans pression extérieure. Les franchises universitaires riment avec liberté d'expression, d'association et de manifestation.

    Ainsi, l'article 1 des textes qui régissent les franchises universitaires au Burkina Faso stipule que «l'enseignement et la recherche impliquent l'objectivité du savoir et la tolérance des opinions. Ils sont incompatibles avec toute forme de propagande et doivent demeurer hors de toute pression idéologique ou confessionnelle. A cette fin, des garanties leur sont conférées appelées franchises et libertés universitaires».

    Ce qui signifie que l'université étant un haut lieu de la recherche et de l'autorité intellectuelle, les franchises universitaires constituent donc les privilèges et immunités accordés à la communauté universitaire et cela en vue de favoriser sans pression aucune, la liberté d'opinion, de critique, d'association et de manifestation.

    Par ailleurs, les franchises universitaires riment avec «l'esprit universitaire », c'est-à-dire la transparence, le consensus dans les prises de décisions et surtout la démocratisation de toutes les instances délibératives et structures de l'université.

    Mais malheureusement, cette liberté d'association, de manifestation dont doit jouir la communauté universitaire et surtout la question du maintien de l'ordre sur le campus ont toujours constitué un point d'achoppement entre enseignants/étudiants et le pouvoir qui s'accusent mutuellement de violer ces franchises universitaires.

    Les franchises universitaires qui sont censées définir les libertés syndicales, apporter le calme et la sérénité sur le campus constituent souvent un obstacle majeur à un climat de paix à l'université de Ouagadougou. En effet, il n'est pas rare de voir des étudiants descendre dans la rue manifester bruyamment leur colère suite à une descente des forces de l'ordre sur le campus pour disperser un meeting ou empêcher une assemblée générale.

    PARAGRAPHE 2 : REPRÉSENTATION DES ACTEURS SUR LES FRANCHISES UNIVERSITAIRES

    On note des divergences dans la lecture et l'appréciation des textes relatifs aux franchises universitaires entre le pouvoir et la communauté universitaire. Ces divergences ont entraîné des modifications et des toilettages des textes relatifs aux franchises universitaires sous le CMRPN en 1981, puis en 1987, en 1997 et enfin en 2000 après la « refondation » de l'université.

    Un ancien ministre80(*) pour sa part en fait l'analyse suivante : « Les franchises universitaires restent un principe fondamental car l'Université est un centre où se forment des hommes et des femmes à l'approche de la création du savoir et leur vulgarisation. C'est un domaine où la liberté est fondamentale. Mais il faut aussi reconnaitre que cet espace-là est un domaine public que l'Etat doit contrôler à travers des textes clairs de sorte à éviter le désordre. Donc, la question de la violation des franchises universitaires relève d'une divergence d'appréciation de part et d'autre. Pour moi, il ne doit y avoir à l'Université un activisme politique paralysant la maison. Donc, il ya un problème dans l'appréciation de la notion des franchises universitaires. Si quelqu'un veut faire autre chose que celle qui l'a amené sur le campus, cela pose problème. Par exemple, celui qui prend un caillou et brise une vitre et dit que la police n'a pas le droit d'intervenir, cela pose problème».

    Ce ministre fait surtout référence au chapitre 1 du titre VI de l'arrêté n°2006-009/MESSRS/SG/UO/P portant règlement intérieur de l'université de Ouagadougou qui stipule que « Les membres de la Communauté universitaire s'obligent au respect mutuel. Ils ne doivent en aucun cas porter atteinte aux droits et libertés d'autrui. Pour ce faire, ils veilleront :

    - à exercer leurs droits et libertés dans les limites qui leur sont imparties ;

    - à n'obliger personne à s'engager dans une action à laquelle elle ne souscrit pas ;

    - à bannir l'usage de toute forme de violence sur un ou des membres de la Communauté universitaire ».

    Cet arrêté qui vise à prémunir les acteurs de tout acte de violence qu'ils viendraient à commettre ou à subir apparait comme un texte légal garantissant la liberté de pensée et d'opinion des universitaires.

    Par ailleurs, le décret n°97-PRES/PM/MESSRS/DEP portant prévention des troubles à l'ordre public, à la sécurité et à la répression des infractions relatives aux troubles dans les locaux et enceintes universitaires suscite un mécontentement de la part des étudiants. En effet, ce décret stipule clairement que le président de l'Université de Ouagadougou peut faire appel aux forces de l'ordre en cas de trouble à l'Université.

    A propos de ce décret, l'UGEB lors de son XIXè congrès déclare : «L'intitulé du décret traduit la volonté du pouvoir de la IVè République d'abattre une répression barbare et légale sur les étudiants».

    Pour un étudiant81(*), « les franchises universitaires sont une bonne chose. Elles doivent être scrupuleusement respectées car elles garantissent la liberté d'opinion, de rassemblement et l'indépendance de l'Université. L'histoire a montré que leur violation par les autorités a toujours provoqué des troubles à l'Université ».

    Un autre déclare : «La descente régulière des forces de sécurité sur le campus, au lieu de ramener l'ordre et le calme, a toujours entrainé le désordre et la paralysie des activités académiques. Les étudiants ont le droit de manifester leur mécontentement en cas de problème. On ne doit pas les empêcher de le faire car nous sommes dans un Etat de droit. C'est quand les franchises universitaires sont violées que les étudiants entrent en colère et cherchent à tout casser car ils sont violentés et matraqués par les policiers ».

    En outre, un autre décret divise les autorités de l'Université et les syndicats d'étudiants. Il s'agit du décret n°2000-560 PRES/PM/MESSRS/SECU qui interdit les meetings sur le campus pendant les heures de cours. D'ailleurs, c'est ce texte qui est à la base de la création de la `'très controversée'' Police Spéciale des Universités (PSU). Cette police est autorisée à appréhender «... toute personne qui empêche ou contribue à empêcher le bon fonctionnement, la bonne administration, l'ordre dans les établissements universitaires ou la réalisation des activités académiques et pédagogiques ; ...toute personne qui interrompt ou tente d'interrompre, de quelque manière que ce soit, les activités universitaires ou nuit à la bonne marche de telles activités... ».82(*)

    Mais un enseignant83(*), visiblement contre cette police, s'interroge : « Comment un syndicat ou un mouvement associatif peut-il organiser une grève, une marche, un sit-in sans interrompre, d'une manière ou d'une autre, les activités académiques ? Il s'agit de marquer les étudiants de près. Quel peut être le rôle de cette police même si l'on parle de sécuriser les étudiants ? Il y a des vigiles sur le campus, mais chaque jour on agresse, on enlève les vélos et les motos des étudiants. Si on installe cette police, c'est pour réprimer les étudiants. On veut installer une bureaucratie répressive sur le campus. La création de cette police là est foncièrement contre l'esprit universitaire. On ne peut pas mettre une armée sur le campus et demander aux intellectuels de réfléchir, de produire. C'est une violation des franchises universitaires».

    En réalité, l'installation de cette PSU viserait vraisemblablement à contenir l'agitation estudiantine et à réprimer toute velléité de contestation sur le campus. La surveillance policière intensive, voire le désir des autorités de `'militariser'' le campus seraient autant d'indices de la position stratégique du campus et des organisations estudiantines dans les combinaisons sociopolitiques à même d'opérer un changement de régime.

    En effet, Selon Bianchini (1997): «La faiblesse de la légitimité des autorités politiques sur les campus et le caractère stratégique que revêt le contrôle de cet espace pour ces autorités les ont souvent conduit à développer une gestion policière et militaire de ce espace. De leur côté, les étudiants par leur activisme organisé (réunions, activités culturelles, sportives) tendent à occuper cet espace à leur manière».84(*)

    En définitive, de nombreux étudiants estiment que la liberté de manifestation et d'opinion est un acquis non négociable. Dans ces conditions, vouloir remettre en cause ces acquis à travers la création d'une police et l'intervention des forces de l'ordre pour empêcher les manifestations sur le campus, c'est de `'la pure provocation''. De l'autre côté, les autorités estiment que les syndicats estudiantins se servent des franchises universitaires pour troubler l'ordre public, perpétrer des actes de vandalisme et contraindre la majorité des étudiants à suivre les mots d'ordres de grèves. De nombreuses crises universitaires naissent suite à la colère des étudiants dispersés au cours d'un meeting ou d'une assemblée générale. Et pour manifester leur mécontentement, ils descendent dans la rue et s'en prennent aux feux tricolores et aux automobilistes.

    Par exemple, les évènements ayant conduit à l'arrestation et à la condamnation à un mois de prison ferme du président de l'ANEB et cinq de ses camarades en décembre 2002 avaient pour origine l'interdiction de la tenue d'une assemblée générale dans une des salles de cours de l'université au nom du respect des franchises universitaires. Quelques années plus tard, c'est-à-dire en 2008, la relaxe après un procès de plusieurs étudiants proches de l'ANEB avait aussi pour origine la violation de l'interdiction d'organiser un meeting sur le campus. Cet évènement a plongé l'Université dans une grave crise qui a paralysé le déroulement des activités académiques pendant quelques mois.

    Pour aplanir les divergences entre syndicats et autorités, une relecture consensuelle des textes sur les franchises universitaires s'impose.

    CONCLUSION

    Ce thème nous a permis de faire une lecture sociopolitique de la crise que connait l'enseignement supérieur au Burkina-Faso et particulièrement celle qui touche l'Université de Ouagadougou. En effet, la crise que traverse l'Université de Ouagadougou est déterminée par des logiques sociales et politiques. Elle est née du mécontentement des acteurs (étudiants, enseignants) suite à une dégradation vertigineuse de leur condition de vie, d'étude et de travail. Aussi, l'insatisfaction de ces derniers par rapport aux valeurs, idées et surtout dans les règles de jeux qui gouvernent le système universitaire en est une cause.

    Ainsi, la crise que traverse l'Université de Ouagadougou révèle une évidence: il y a une corrélation entre la dégradation des conditions de vie, d'étude et de travail des étudiants et enseignants et le déclenchement des crises. Cette précarité des conditions de vie, d'étude et de travail inculque aux étudiants et enseignants des schèmes de perception de valorisation et des ferments d'actions qui conditionnent leur rapport à la contestation. Donc, la `'clochardisation'' des étudiants et enseignants a une influence sur le déclenchement et l'orientation des grèves à l'université de Ouagadougou. C'est fort de ce constat que nous sommes tentés de dire que ces derniers pensent politiquement ce qu'ils sont socialement et ces grèves à répétition sont fortement inspirées par le désir de l'amélioration des conditions matérielles d'existence qui n'ont cessé de se détériorer depuis l'application des plans d'ajustement structurels.

    Par ailleurs, notre étude révèle que la question du respect des franchises universitaires et la quête des valeurs démocratiques et la lutte contre l'impunité sont souvent à l'origine de certaines crises à l'Université de Ouagadougou.

    En effet, la jeunesse scolaire et estudiantine, qui réclame la responsabilité historique d'être l'avant-garde des luttes sociales au Burkina Faso, a un sens aigu de la liberté, de la justice d'où sa présence perpétuelle aux côtés des syndicats et des partis politiques pour dénoncer les mesures socialement injustes et les dérives des régimes politiques. C'est ce qui fait dire à certains que le mouvement étudiant est essentiellement infiltré et manipulé par l'opposition et les syndicats radicaux.

    C'est également au nom de cette liberté d'expression, et de manifestation que les étudiants revendiquent perpétuellement contre la restriction des libertés syndicales et la violation des franchises universitaires qui se manifestent selon eux par l'interdiction des meetings sur le campus et l'intervention des forces de l'ordre pour réprimer les grèves. Cette violation des franchises universitaires est considérée par les étudiants comme une volonté des autorités politiques de `'museler'' et de `'caporaliser'' l'Université. C'est ce qui explique la révolte de ces derniers et la radicalisation des luttes sur le campus.

    La crise que traverse l'enseignement supérieur au Burkina Faso, ne saurait être qualifiée d'agitation ou de subversion. Elle est née du contexte de la paupérisation grandissante des étudiants et enseignants, de l'absence de débouchés, de perspectives et des injustices sociales dont ces acteurs se disent être victimes. L'Université de Ouagadougou est devenue au fil des ans un lieu de turbulence d'une jeunesse en manque de repère et en proie à tous les doutes.

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    UGEV-AEVF-FEAN, « Deux pratiques, deux lignes politiques au sein de l'AEVF ».

    Observateur PAALGA, n°6150 du jeudi 27 mai 2004.

    Le Pays, n°3135 du 31 mai 2004

    L'Etudiant burkinabè, n°26- novembre 1999

    L'Etudiant burkinabè, n°27- décembre 1999

    L'Etudiant burkinabè, n° 28, janvier 2000.

    L'Etudiant burkinabè, n° 32, avril 2000

    TABLE DES MATIERES

    DEDICACE I

    REMERCIEMENTS II

    SIGLES ET ABREVIATIONS III

    SOMMAIRE 1

    INTRODUCTION GENERALE 2

    PREMIERE PARTIE : ASPECTS THEORIQUES 4

    Chapitre 1: CADRE CONCEPTUEL ET METHODOLOGIQUE 5

    Section 1 : Problématique 5

    Paragraphe 1 : Justification du choix du thème, problème et question générale de recherche 6

    A. Justification du choix du thème ...........................................................................6

    B. Problème général 7

    C. Question générale 7

    Paragraphe 2 : Revue de littérature 7

    A. Le rôle et la place de l'école dans la société. 8

    B. L'Université et la contestation politique 10

    C. Ligne idéologique et politique des syndicats enseignants et étudiants burkinabè 13

    D. Conditions socio-économiques des étudiants et enseignants 17

    E. Note finale de lecture 19

    Paragraphe 3 : Problème, question spécifique et hypothèses de recherche 20

    A. Problème spécifique 20

    B. Question spécifique 20

    C. Les objectifs de recherche 20

    D. Les hypothèses de recherche 21

    E. Intérêt de l'étude 21

    F. La conceptualisation 22

    Section 2 : méthodologie de recherche 25

    Paragraphe 1 : Choix du site et population d'étude 25

    A. Choix du site 25

    B. Population d'étude 25

    Paragraphe 2 : Echantillonnage, outils et techniques de collecte des données 26

    A. Echantillonnage 26

    B. Outils et techniques de collecte des données 26

    Paragraphe 3 : Traitement des données, difficultés et limites de l'étude 27

    A. Traitement des données 27

    B. Difficultés et limites de l'étude..................................................................................................27

    Chapitre 2 : Evolution du mouvement étudiant et enseignant Burkinabé 29

    Section 1 : Evolution du mouvement étudiant Burkinabé 29

    Paragraphe 1 : De1960 à 1971 30

    Paragraphe 2 : De 1971 à 1983 32

    Paragraphe 3 : De 1983 à nos jours 35

    Section 2 : Le mouvement enseignant Burkinabé 42

    Paragraphe 1 : Contexte de naissance et évolution 42

    Paragraphe 2 : Le rôle du mouvement enseignant dans l'évolution politique du pays 42

    DEUXIEME PARTIE : FACTEURS SOCIAUX ET POLITIQUES DE LA CRISE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR 46

    Chapitre 1 : Les déterminants sociaux de la crise de l'enseignement supérieur 47

    Section 1 : La précarité des conditions sociales d'existence et d'étude des étudiants 47

    Paragraphe 1 : La dégradation des conditions de vie 47

    A. La réduction des allocations d'études et la paupérisation de la masse estudiantine 49

    B. Le revenu 51

    C. Difficultés d'accès au logement et à la santé 52

    Paragraphe 2 : La dégradation des conditions d'étude 54

    Section 2 : Analyse des facteurs de frustration et de contestation des enseignants du supérieur 58

    Paragraphe 1 : Analyse des conditions de vie des enseignants 58

    Paragraphe 2 : Analyse des conditions de travail des enseignants 60

    Paragraphe 3 : La question de la valorisation du statut des enseignants 62

    A. L'amélioration de la grille salariale 62

    B. La promotion de la carrière 65

    Chapitre 2 : De la mission traditionnelle de transmission du savoir à la lutte politique 67

    Section 1 : Le syndicalisme étudiant : entre mobilisation corporatiste et instrumentalisation politique. 67

    Paragraphe 1 : Condition de participation à l'espace syndical et politique 67

    Paragraphe 2 : Dynamique des luttes universitaires pour la promotion des valeurs démocratiques 70

    Section 2 : Articulation entre les franchises universitaires et les crises universitaires 74

    Paragraphe 1 : Généralité sur les franchises universitaires 74

    Paragraphe 2 : Représentation des acteurs sur les Franchises Universitaires 75

    CONCLUSION 80

    BIBLIOGRAPHIE 82

    ANNEXES 87

    ANNEXES

    Guide d'entretien adressé aux étudiants

    Age :

    Sexe :

    UFR / Filière :

    Niveau d'étude :

    Situation matrimoniale :

    1- Quelle est votre appréciation de la crise actuelle que traverse l'Université de Ouagadougou ?

    ......................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

    2- Quelle est votre opinion sur les conditions de vie et d'étude des étudiants ?

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    3- Quelles sont selon-vous les raisons politiques et sociales qui poussent les étudiants à manifester ?

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    4- Pouvez-vous nous faire un bref récit de quelques luttes estudiantines sur le campus de Ouagadougou ?

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    5- Quelle est votre opinion sur la question des franchises universitaires ?

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    6- Que pensez-vous de la thèse de la manipulation des élèves et étudiants par des forces politiques et syndicales ?

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    Guide d'entretien adressé aux enseignants

    Age :

    Sexe :

    UFR :

    Grade :

    Situation matrimoniale :

    1- Quelle est votre appréciation de la crise actuelle que traverse l'Université de Ouagadougou ?

    .........................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

    2- Quelle est votre opinion sur les conditions socio-économiques des enseignants du supérieur ?

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    .........................................................................................................

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    3- Quelles sont selon-vous les raisons politiques et sociales qui poussent les enseignants à manifester leur mécontentement face à la dégradation de leurs conditions socio-économiques?

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    4- Pouvez-vous nous faire un bref récit de quelques luttes des enseignants sur le campus d'Ouagadougou ?

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    5 Quelle est votre opinion sur la question des franchises universitaires ?

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    6 Que pensez-vous de la thèse de la manipulation des étudiants et enseignants par des forces politiques et syndicales ?

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    Guide d'entretien adressé aux personnes ressources

    Age :

    Sexe :

    Profession :

    Situation matrimoniale :

    1- Quelle est votre appréciation de la crise actuelle que traverse l'Université de Ouagadougou ?

    ..........................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

    2- Quelle est votre opinion sur les conditions socio-économiques des étudiants et enseignants du supérieur ?

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    3- Quelles sont selon-vous les raisons politiques et sociales qui poussent les enseignants et les étudiants à manifester?

    ....................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................4- Pouvez-vous nous faire un bref récit de quelques luttes des étudiants et enseignants sur le campus d'Ouagadougou ?

    .........................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

    5- Quelle est votre opinion sur la question des franchises universitaires ?

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    6- Que pensez-vous de la thèse de la manipulation des enseignants et étudiants par des forces politiques et syndicales ?

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    * 1Fernand SANOU, Maryvonne CHARMILLOT : L'éducation supérieure dans les politiques éducatives en Afrique subsaharienne : Le cas du Burkina Faso, PNUD, Ouagadougou ; FAPSE, Genève, 2009, P4

    * 2Marie Duru Bellat Agnès, Henrricot Van Zanten, Sociologie de l'école, Paris, Armand Collins, 1992, p.9.

    * 3 Pierre Bourdieu, l'école conservatrice, les inégalités devant l'école et devant la culture, Revue Française de sociologie, vol VII, 1966, p 325

    * 4 Georges SNYDERS, Ecole, classe et lutte des classes : une relecture critique de Baudelot, Establet, Bourdieu, Passeron et Illich, Paris, PUF, 1982.

    * 5 Paul NDA, Pouvoir, lutte des classes : idéologie et milieu intellectuel africain, Présence africaine.

    * 6 Fernand  SANOU: Avant-propos pour une reforme de l'Education au Burkina Faso : les intérêts des bureaucrates burkinabè dans l'école et sa reforme, Annales de l'INSHUS et de l'INSULLA, Université de Ouagadougou, 1986, P201.

    * 7Alain Touraine Lutte étudiante, Seuil, Paris 1978, p18.

    * 8 Henri LEFEBVRE, L'irruption de Nanterre au sommet, édition Anthropos, Paris, 1971 ; P28

    * 9 La revanche des élèves et étudiants sur l'Etat et la société civile, AKUT Conférence UPPSALA, oct. 1989.

    * 10 MAMADOU COULIBALY in Démocratisation, économie, et développement : la place de l'enseignement supérieur ; colloque 12-14 nov. 1991, Paris.

    * 11Pascal BIANCHINI, Crises de la scolarisation, mouvements sociaux et reformes des systèmes d'enseignement en Afrique noire : cas du Burkina Faso et du Sénégal (1966-1995), thèse de doctorat, Université, Paris VII, 1997, 395cm, 30cm

    * 12 BIANCHINI Pascal, Crises de la scolarisation, mouvements sociaux et reformes des systèmes d'enseignement en Afrique noire : cas du Burkina Faso et du Sénégal (1966-1995), thèse de doctorat, Université, Paris VII, 1997, 395cm, 30cm ; p86.

    * 13 Cf. HAMIDOU Diallo, le rôle du mouvement étudiant dans l'évolution politique du Burkina Faso 1960-1983 ; in D'ALMEIDA-TOPOR, COQUERY VIDROVITCH ; Les jeunes en Afrique : La politique et la ville, tome2, l'Harmattan, 1992.

    * 14 Jeune Volta, Spécial VIIIè congrès ; 12, 13, 14 et 15 Aout 1977 ; P120.

    * 15 John David KERE, Syndicat et pouvoir au Burkina Faso, Mémoire de DEA, université de Bordeaux février 1988

    * 16 KORBEOGO Gabin, Logiques sociales et participation à l'espace syndical étudiant : cas de la FLASHS, mémoire de maîtrise en sociologie, Université de Ouagadougou, Département de Sociologie, 1997

    * 17 BIANCHINI Pascal, Crises de la scolarisation, mouvements sociaux et reformes des systèmes d'enseignement en Afrique noire : cas du Burkina Faso et du Sénégal (1966-1995), thèse de doctorat, Université, Paris VII, 1997, 395cm, 30cm

    * 18 Fernand SANOU, Maryvonne CHARMILLOT : L'éducation supérieure dans les politiques éducatives en Afrique subsaharienne : Le cas du Burkina Faso, PNUD, Ouagadougou ; FAPSE, Genève, 2009, P4

    * 19Méthodes des sciences sociales, éditions Dalloz, 1984, p307.

    * 20 Essai de MAX sur le concept de politique.

    * 21 In Claude LECLERCQ : Droit constitutionnel et institutions politiques, Ed Bitec, Paris, 1990, p48-49

    * 22 Définition.ptidico.com/crise.html

    * 23 Cité par Albert OUEDRAOGO, Abdoulaye TRAORE : Etude crises Universitaires: Etat des lieux et perspectives, rapport provisoire, 2010, P15.

    * 24 Enseignement supérieur et développement socioéconomique dans les pays d'Afrique de l'Ouest : Exemple des Universités du Burkina Faso ; Réseau Ouest et Centre Africain de Recherche en Education (ROCARE), Juin 2007, Pvii.

    * 25 WWW.studyrama.be/spip.php

    * 26 Document du IXè congrès de l'UGEV, p 47.

    * 27 HAMIDOU Diallo, le rôle du mouvement étudiant dans l'évolution politique du Burkina Faso 1960-1983 ; in D'ALMEIDA-TOPOR, COQUERY VIDROVITCH ; Les jeunes en Afrique : La politique et la ville, tome2, l'Harmattan, 1992 ; p315.

    * 28 Idem, p316

    * 29 UGEV VIIIe congrès. P 20

    * 30 Rapport du `'M21'' sur le `'IX congrès de l'UGEV ; une ouverture commune, deux clôture différentes'' P4

    * 31 Idem P4

    * 32 Rapport du `'M21'' sur le `'IX congrès de l'UGEV ; une ouverture commune, deux clôture différentes''

    * 33 L'étudiant Burkinabé, n°29, février 2000, p7.

    * 34 BIANCHINI Pascal, Crises de la scolarisation, mouvements sociaux et reformes des systèmes d'enseignement en Afrique noire : cas du Burkina Faso et du Sénégal (1966-1995), thèse de doctorat, Université, Paris VII, 1997, 395cm, 30cm ; p86.

    * 35 Conseil syndical extraordinaire, 6-7 juin 1981, La Voix des enseignants, 60, 1980-81 : P 6-7

    * 36 SNEAHV, Travaux du XXVIIIe congrès tenu à Bobo Dioulasso du 2 au 7 août 1983 : P116.

    * 37Fernand SANOU, Maryvonne CHARMILLOT, l'éducation supérieure dans les politiques éducatives en Afrique subsaharienne : Le cas du Burkina Faso, PNUD, Ouagadougou ; FAPSE, Genève, 2009, P15

    * 38 Entretien avec O.M enseignant à l'UFR SEG ; le12/02/2011

    * 39 Entretien avec S.M responsable du SYNDEC ; le 13/02/2011

    * 40Fernand SANOU, Maryvonne CHARMILLOT, l'éducation supérieure dans les politiques éducatives en Afrique subsaharienne : Le cas du Burkina Faso, PNUD, Ouagadougou ; FAPSE, Genève, 2009, P10.

    * 41 Idem, P15.

    * 42 Etudiant burkinabè, novembre 1999, n°26.

    * 43 Entretien avec M.S enseignant à l'UFR/SH; le 20/02/2011

    * 44 Le Pays du Lundi du 31 Mai 2004 ; n°3135

    * 45 Pr Albert OUEDRAOGO, Dr Abdoulaye TRAORE : Etude sur les crises Universitaires : Etat des lieux et perspectives, Rapport provisoire, Ouagadougou, 2010. P14

    * 46 KORBEOGO Gabin, Logiques sociales et participation à l'espace syndical étudiant : cas de la FLASHS, mémoire de maîtrise en sociologie, Université de Ouagadougou, Département de Sociologie, 1997 ; P38.

    * 47 Centre national des oeuvres universitaires (CENOU), site web. http://www.cenou.bf; p.2, cité par Pr Albert OUEDRAOGO, Dr Abdoulaye TRAORE in Etude sur les crises Universitaires : Etat des lieux et perspectives, Rapport provisoire, Ouagadougou, 2010. P27

    * 48 Albert OUEDRAOGO, Abdoulaye TRAORE : Etude crises Universitaires: Etat des lieux et perspectives, rapport provisoire, 2010, P32.

    * 49In Institut de Développement Economique, Banque Mondiale, «coûts, financements, et efficacité des universités de l'Afrique subsaharienne francophone»... La place de l'enseignement ...

    * 50 Selon l'expression de Pascal Bianchini (1997)

    * 51 Education in sub -Saharan Africa. A World Bank Policy study, Washington, 1988, p 77. In le financement de l'éducation dans les pays en développement. « Les options », Banque Mondiale, 1986

    * 52 Le Monde du 5 février 2009, Les universités africaines saturées et démunies, P3.

    * 53 KASONGO Ngoy Makita Makita : Capital scolaire et pouvoir social en Afrique : à quoi sert le diplôme universitaire, Paris, l'Harmattan, 1958, 215p

    * 54 Déclaration du Cadre des Partis d'Opposition, dans l'Observateur Paalga; le 13 juin 2009

    * 55 Entretien avec AT ancien responsable de l'ANEB ; le 20/02/2011

    * 56 L'éducation supérieure dans les politiques éducatives en Afrique subsaharienne : Le cas du Burkina Faso ; Fernand Sanou, PNUD, Ouagadougou ; Maryvonne Charmillot, FAPSE, Genève, 2009

    * 57 Entretien avec AM enseignant à l'UFR/SH; le 21/02/2011

    * 58 Fernand SANOU, Maryvonne CHARMILLOT, l'éducation supérieure dans les politiques éducatives en Afrique subsaharienne : Le cas du Burkina Faso, PNUD, Ouagadougou ; FAPSE, Genève, 2009, P16

    * 59 Il existe une disparité des ratios étudiants/enseignants entre l'ensemble des universités y compris les trois universités publiques: l'Université Polytechnique de Bobo avec 12 étudiants par enseignant, l'Université de Koudougou avec 55 étudiants par enseignant et l'Université de Ouagadougou avec 60 étudiants par enseignant (MESSRS, 2007).

    * 60Fernand SANOU, Maryvonne CHARMILLOT : L'éducation supérieure dans les politiques éducatives en Afrique subsaharienne : Le cas du Burkina Faso, PNUD, Ouagadougou ; FAPSE, Genève, 2009, P15.

    * 61 Tahirou BARRY : Les défis de la motivation du personnel dans l'organisation : cas de l'Université de Ouagadougou ; DESS, management des Ressources Humaines, IAPM, 2007, P49.

    * 62 Entretien avec M.S responsable du SYNADEC; le 20/02/2011

    * 63 Entretien avec MS, SG du SYNADEC; le 20/02/2011

    * 64 Entretien avec MS SG du SYNADEC, Faso. Net ; le 19 janvier 2011

    * 65 Fernand SANOU, Maryvonne CHARMILLOT: L'éducation supérieure dans les politiques éducatives en Afrique subsaharienne : Le cas du Burkina Faso, PNUD, Ouagadougou ; FAPSE, Genève, 2009, P16.

    * 66 Entretien avec Laya SAWADOGO, ancien Ministre des enseignements secondaires, supérieur et de la recherche scientifique ; le 21/02/2011

    * 67 Michel Crozier et Erhard Friedberg : L'acteur et le système, éditions du seuil, Paris 1977, P45.

    * 68 HIEN Ollo Pépin : Individus et Participation à l'espace public en pays Lobi : De la révolution à la démocratie. Mémoire de maîtrise en sociologie, Université de Ouagadougou, Département de Sociologie, janvier 2004 ; P23.

    * 69 Entretien avec OE étudiant en 3e année de sociologie à l'UFR/SH; le 15/02/2011

    * 70 Entretien avec KD étudiant en 4e année de droit à l'UFR/SJP; le 15/02/2011

    * 71 Claude CISSAO, L'association des étudiants burkinabè en France, P187 in D'ALMEIDA-TOPOR, COQUERY VIDROVITCH ; Les jeunes en Afrique : La politique et la ville, tome2, l'Harmattan, 1992.

    * 72 Entretien avec VS ancien dirigeant de l'UGEV 

    * 73 Le président de l'ANEB dans un quotidien de la place affirme que : «l'ANEB est le bras droit du Collectif».

    * 74 Pascal BIANCHINI, Crises de la scolarisation, mouvements sociaux et reformes des systèmes d'enseignement en Afrique noire : cas du Burkina Faso et du Sénégal (1966-1995), thèse de doctorat, Université, Paris VII, 1997, P239.

    * 75 Elle a été mise en place pendant la crise née du drame de Sapouy. Elle dépose son rapport et fait des recommandations pour une sortie de crise.

    * 76 L'Etudiant Burkinabè, n°27- décembre 1999, p4.

    * 77 Entretien avec Laya SAWADOGO ; ancien Ministre des enseignements secondaire, supérieur et de la recherche scientifique ; le 21/02/2011

    * 78 Entretien avec TC enseignant à l'UFR/SVT; le 27/02/2011

    * 79 Michel Crozier et Erhard Friedberg : L'acteur et le système, éditions du seuil, Paris 1977; P202.

    * 80 Entretien avec Laya SAWADOGO ; ancien Ministre des enseignements secondaire, supérieur et de la recherche scientifique ; le 21/02/2011

    * 81 Entretien avec K.J étudiant en 6è année en médecine à l'UFR/SDS; le 28/02/2011.

    * 82 Article 10 de la PSU, Le Pays du lundi 31 mai 2004, N°3135.

    * 83 Le Pays du lundi 31 mai 2004, N°3135.

    * 84 BIANCHINI Pascal, Crises de la scolarisation, mouvements sociaux et reformes des systèmes d'enseignement en Afrique noire : cas du Burkina Faso et du Sénégal (1966-1995), thèse de doctorat, Université, Paris VII, 1997, 395cm, 30cm






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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon