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Analyse sociopolitique de la crise de l'enseignement supérieur au Burkina Faso: Cas de l'université de Ouagadougou

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par SIDI BARRY
Université de Ouagadougou (UO) - DEA Droit Public: Option: Science Politique 2011
  

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C. Ligne idéologique et politique des syndicats enseignants et étudiants burkinabè

Le milieu universitaire façonne les individus, leur inculque des valeurs symboliques, des préférences, oriente leurs croyances, leurs choix idéologiques et politiques. En effet, la crise de l'enseignement supérieur notamment celle qui secoue l'Université de Ouagadougou depuis plusieurs décennies ne saurait s'étudier sans lien avec le syndicalisme enseignant et étudiant qui demeurent le principal moteur des revendications.

Selon Pascal Bianchini (1997), le mouvement enseignant au Burkina Faso est né autour des années 1950 avec la création du personnel enseignant africain qui se transformera plus tard en Syndicat des Personnels Enseignants de Haute Volta (SPEAHV), puis en Syndicat National des Enseignants de Haute Volta (SNEAHV).

Durant cette période le syndicat enseignant n'apparait pas comme une force de contestation mais les évènements du 3 Janvier 1966 marquent un épisode fondateur de l'enracinement et de la politisation du syndicalisme enseignant au Burkina.

Le syndicat enseignant au Burkina marqué à ses débuts par l'hégémonie du Mouvement National de Libération (MNL) résiste à la confiscation du pouvoir par le régime de Maurice YAMEOGO, puis des régimes successifs. Par la suite, les professeurs estimant que le SNEAHV dominé numériquement par les instituteurs ne prenait pas suffisamment en compte leurs revendications corporatistes créèrent en Juillet 1972 le Syndicat Unique Voltaïque des Enseignants du Secondaire et du Supérieur (SUVESS).

Lequel syndicat qui à son tour est dominé par des luttes hégémoniques, se politise et se radicalise. En effet, les années 1970 furent une période de la montée de l'action revendicative d'autant plus que ce fut une période, où l'entrée dans la fonction d'enseignant entrainait ipso facto l'adhésion à l'organisation syndicale. Pour Bianchini12(*), « C'est ainsi que se construit la réalité et le mythe d'un contre-pouvoir redoutable pour tous les régimes voltaïques, qu'ils soient civils ou militaires».

Quand au mouvement étudiant burkinabé, il est né autour des années 1960 avec la création de l'UGEV en Juillet 1960 en tant que section de la FEANF. Son action s'est pendant longtemps exercée aussi à l'extérieur du pays, notamment en France avec l'Association des Etudiants Voltaïques en France (AEVF) et l'Association des Stagiaires Voltaïques (ASV) à Dakar. L'UGEV, dès sa naissance a aussi connu des conflits de courants politiques et idéologiques révolutionnaires proches de la FEANF, du MNL et du PAI.

En effet, selon Hamidou DIALLO13(*), le mouvement étudiant burkinabè a été, dès sa naissance, fortement influencé par la FEANF dont il adopte les analyses et les mots d'ordre. Il préconise comme elle, le syndicalisme révolutionnaire avec «d'une part sur le plan corporatif, la défense des intérêts matériels et moraux des étudiants africains ; d'autres part, sur le plan politique, la lutte aux côtés des peuples africains pour la libération de l'Afrique du joug colonial ».

Depuis sa naissance jusqu'en 1971 l'UGEV est dominée par le MNL, qui à cause de sa participation au gouvernement du général LAMIZANA, sera dénoncé au Vè congrès comme un parti « réactionnaire » et ses militants seront exclus de la direction du syndicat. Le MNL sera donc écarté de la direction du syndicat au profit du PAI pendant ce congrès qui adopte le mot d'ordre « d'intégration aux masses ».

Cependant, l'hégémonie du PAI fut de courte durée car le VIè congrès se rallie au mot d'ordre de la « Révolution Nationale Démocratique et Populaire » de la FEANF qui est la conséquence directe de l'hégémonie des militants étudiants de l'ASV et de l'AEVF pochent des thèses « prochinoises ».

Le VIIIè congrès de l'UGEV en 1977 marque un tournant décisif dans l'orientation politique et idéologique du mouvement étudiant burkinabé. En effet, le document final de ce congrès annonce clairement que : « si en Haute Volta, il nait un parti communiste qui mobilise et dirige les masses dans la lutte contre l'impérialisme principalement français et ses valets locaux, pour la réalisation de la Révolution Nationale Démocratique et Populaire, et bien, un tel Parti Communiste, nous le soutiendrons et cela dans le cadre du front uni anti-impérialiste que nous préconisons. Le marxisme-léninisme est l'idéologie de la classe ouvrière. Or, en Haute Volta, il nait et se développe une classe ouvrière qui prendra nécessairement connaissance du marxisme léninisme et un parti communiste naitra pour le plus grand bien du peuple voltaïque».14(*)

Ainsi, à l'issue de ce congrès, l'UGEV se dote d'une ligne «anti-impérialiste et révolutionnaire ». Les analyses qu'elle a faites de la situation nationale la rapproche des groupuscules marxistes léninistes même si elle se défend d'en être la jeunesse, en affirmant son indépendance à l'égard des partis politiques et des syndicats.

John David KERE,15(*) dans son analyse sur les syndicats et pouvoir au Burkina Faso soutient que cette alliance de l'UGEV d'avec les forces politiques et syndicales connaît son apogée au IXè congrès de l'UGEV tenu en avril 1979 et qui prône le mot d'ordre «d'inféodation aux masses ».

La création en 1977 d'un nouveau parti communiste en l'occurrence l'Organisation Communiste Voltaïque (OCV) a été le point de départ d'une nouvelle crise au sein de l'UGEV. Cette crise aboutira en 1978 à une scission donnant naissance d'un coté à l'UGEV proche du PCRV et de l'autre l'UGEV dite « M21 » proche de l'Union des Luttes Communistes (ULC).

Pascal BIANCHINI, analysant les raisons profondes de cette scission intervenue au IXè congrès, conclut à l'aboutissement d'une crise au sein de l'Organisation Communiste Voltaïque (OCV) et qui se scinda en 1978 en deux, avec d'un côté le PCRV et de l'autre l'ULC. Cette période marque la radicalisation du mouvement étudiant révélant ainsi le caractère névralgique de l'Université dans les jeux de conquête du pouvoir politique au Burkina.

Cette orientation idéologique et politique radicale creusa davantage le fossé entre le mouvement étudiant et le pouvoir qui n'apprécie pas favorablement ces «mauvaises fréquentations » et « menées subversives » dont les mobiles seraient éloignés des préoccupations des étudiants.

Cependant, les analyses de ces différents auteurs sur l'orientation idéologique et politique du mouvement enseignant et étudiant burkinabè quoique enrichissantes semblent incomplètes. En effet, ces écrits mettent peu l'accent sur les conditions de vie et de travail de ces derniers, leurs trajectoires sociales, géographiques et leurs intérêts particuliers dans un contexte de rareté de ressources et de crise économique généralisée.

Par ailleurs, elles négligent les conditions socio-économiques des enseignants et étudiants qui se sont fortement dégradées ces dernières années suite aux nombreuses reformes éducatives dictées par les institutions de Breton Woods. Une bonne lecture sociopolitique de la crise de l'enseignement supérieur au Burkina Faso passe nécessairement par l'étude de la condition enseignante et étudiante qui serait l'élément catalyseur des luttes à l'Université de Ouagadougou. Ces analyses sur les organisations syndicales et politiques semblent insuffisantes du fait de la non prise en compte du paysage syndical et politique actuel.

* 12 BIANCHINI Pascal, Crises de la scolarisation, mouvements sociaux et reformes des systèmes d'enseignement en Afrique noire : cas du Burkina Faso et du Sénégal (1966-1995), thèse de doctorat, Université, Paris VII, 1997, 395cm, 30cm ; p86.

* 13 Cf. HAMIDOU Diallo, le rôle du mouvement étudiant dans l'évolution politique du Burkina Faso 1960-1983 ; in D'ALMEIDA-TOPOR, COQUERY VIDROVITCH ; Les jeunes en Afrique : La politique et la ville, tome2, l'Harmattan, 1992.

* 14 Jeune Volta, Spécial VIIIè congrès ; 12, 13, 14 et 15 Aout 1977 ; P120.

* 15 John David KERE, Syndicat et pouvoir au Burkina Faso, Mémoire de DEA, université de Bordeaux février 1988

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