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La dilution des marques renommées

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par Marion Pinson
CEIPI - M2 droit européen et international de la propriété intellectuelle 2012
  

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A/. Une solution contra legem

Au vu des textes, il semble que le titulaire se trouve dépourvu de protection face à l'usurpation de sa marque renommée pour des produits ou services similaires qui n'entraîne aucun risque de confusion. Il est vrai que la cohérence de cette solution laisse à désirer puisque si le tiers usurpateur n'avait pas été un concurrent, le titulaire de la marque renommée aurait pu bénéficier d'une protection sans avoir à prouver un risque de confusion. Il est dès lors surprenant que la protection d'une marque renommée soit moins efficace dans le cadre concurrentiel que dans le cadre non concurrentiel.

Partant de ce constat, la Cour de justice a, dans un arrêt Davidoff de 2003, permis aux Etats membres octroyant aux marques renommées une protection renforcée d'étendre celle-ci au cadre concurrentiel. Elle justifie sa décision en affirmant que l'article 5.2° de la directive doit être interprété « en considération de l'économie générale et des objectifs du système dans lequel il s'insère » et qu' « il ne saurait être donné dudit article une interprétation qui aurait pour conséquence une protection des marques renommées moindre en cas d'usage d'un signe pour des produits ou des services identiques ou similaires qu'en cas d'usage d'un signe pour des produits ou des services non similaires »93(*).

Cette solution, rendue contre l'avis de l'avocatgénéral Jacobs94(*), contredit ouvertement la lettre des textes communautaires. Les articles 4.4° a) et 5.2° de la directive sont en effet explicites : le régime de faveur des marques renommées ne s'applique qu'en présence de produits ou services différents, doncdans un cadre non concurrentiel. Dès lors que l'on est en présence de signes en conflit désignant des produits ou services similaires, les articles 5.1° a) et 5.1° b) trouvent exclusivement à s'appliquer95(*).

Les juges ont pourtant redoublé d'audace dans un arrêt Adidas de la même année en transformant cette faculté en une obligation : « l'option de l'Etat membre porte sur le principe même de l'octroi d'une protection renforcée au profit des marques renommées, mais non sur les situations couvertes par cette protection lorsqu'il l'accorde »96(*).

B/. Une solution inopportune

Cette solution est pour le moins critiquable. Les régimes de protection ne sont pas censés être à la carte, laissant au titulaire le choix de l'action la plus favorable. Les différentes dispositions correspondent en effet à des hypothèses bien distinctes qu'il convient de respecter, car le mélange des genres ne fait que nuire à la cohérence du droit des marques.

Par ailleurs, la doctrine a pu signaler que cette extension de la protection renforcée au cadre concurrentiel ne présente pas de grand intérêt pratique, notamment parce que l'appréciation globale du risque de confusion, en prenant en compte la renommée de la marque, rend déjà très aisée la preuve d'un tel risque97(*). Elle a également pu dénoncer les effets pervers d'un possible cumul d'actions98(*).

Ainsi, le champ d'application de la protection renforcée des marques renommées, censé être initialement très restreint, est aujourd'hui démesurément étendu. D'une part, la conception particulièrement laxiste de la renommée permet à un nombre de marques considérablement élevé de bénéficier de la protection. D'autre part, la marque renommée bénéficie de cette protection renforcée dans un nombre d'hypothèses démultiplié. La protection exceptionnelle dont devait jouir le titulaire d'une marque renommée se trouve dès lors généralisée. Le droit des marques s'égare et le principe de libre concurrence en pâtit sévèrement.

Le champ d'application de la protection contre le préjudice de dilution est ainsi particulièrement extensif. Cette solution, loin de tourner à son avantage, conforte l'opposition de ses détracteurs et nuit à sa cohérence.En effet, la protection contre la dilution ne devrait être un fondement général d'action ; elle était censée, et devrait rester une défense spécifique et particulière des marques renommées. La généralisation de la protection contre la dilution bouleverse l'équilibre et la cohérence du droit des marques et remet ainsi en cause toute sa légitimité. Il est dès lors nécessaire que les juges remédient à cette dérive en affinant la conception de la dilution. Les excès que les juges se sont permis sur le terrain du champ d'application de la protection devront être modérés sur celui de la notion de dilution.

* 93CJCE, 9 janv. 2003, aff. C-292/00, Davidoff, Rec. 2003, I-389, pts. 24 et 25.

* 94 M.F.G. JACOBS, concl. 21 mars 2002, aff. C-292/00, Davidoff, pt. 25.

* 95 Le dixième Considérant de la directive, par ailleurs, affirme bien qu'en cas de similitude entre les signes et entre les produits ou services désignés, le risque de confusion constitue la « condition spécifique » de la protection.

* 96CJCE, 23 oct. 2003, aff. C-408/01, Adidas-Salomon et Adidas Benelux, Rec. I-12537, pt. 20.

* 97 V. pour plus de détails : A. BOUVEL, « Etendue de la protection des marques renommées en droit communautaire », JCP E, n° 36, 4 sept. 2003, 1249, n° 13.

* 98 A. BOUVEL, op. cit., n° 7.

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