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La persistance des sciences sociales coloniales en Afrique

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par Jean Barnabé MILALA LUNGALA
Université de Kinshasa RDC - Doctorat 2009
  

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CHAPITRE CINQUIÈME :

LA SOCIOLOGIE CLASSIQUE ET L'AFRIQUE

Pour Albert Muluma Munanga G.Tizi, la sociologie africaine est plus marquée par son occidentalisation poussée sur le plan conceptuel, méthodologique voir paradigmatique. C'est une sociologie hybride fondée sur son caractère « de pot pourrie », poursuit-il, c'est-à-dire tributaire des écoles de sociologie européenne et Nord-américaine, marquée par l'influence des recherches effectuées par des africanistes, anthropologues occidentaux en l'occurrence : G. Balandier, J .Ziegler, R. Dumond, P.Mercier, M.Glucham, P.Bouvier, De Heusch, Margaret Mead, Crawfort Young, L.Maunier, B.Verhaegen , Jan Vansina, L.De Sain Moulin (s.j),etc.205(*) La contribution de la sociologie africaine à la démarche sociologique, poursuit-il encore, ne peut être qu'une sociologie critique, saisissant la réalité africaine dans toute sa dimension. Cette considération soulève d'emblée deux questions : celle de savoir s'il peut exister une sociologie africaine et si la « réalité sociale africaine » appelle d'autres modes d'approches distincts de ce que propose la sociologie classique.206(*)

Pour nous, la première question de revendication des sciences sociales africaines recèle un mal entendu grave tant que la reconstruction d'un des principes fondateurs ,celui de paradigme de principe de « Tout et ses Parties » qui se trouve au coeur du fonctionnalisme (voir Emile Durkheim ) pour ne citer que cet auteur, à la base de la fondation des sciences sociales est puisé certes dans plusieurs cultures (chez les Milésiens dont Anaximandre avec son apeiron, les Grecs avec la théorie de la forme et de la matière qui donne l' hylémorphisme de Stagirite) mais aussi et bien avant en Egypte antique,en Afrique avec le concept de kheper. C'est au point de départ des images mythiques du monde ( Weber).

Pour nous, disons -le d'emblée, cette vision de Muluma part de la négligence relative d'une reconstruction génétique des concepts, qui sont largement africains. Pour nous, il ne faut pas demander à devenir africain ce qui l'est déjà. Notre position à ce sujet ce qu'on ne peut pas africaniser ce qui est déjà africain. Ceci justifie le fait que ceux qui défendent cette thèse sont tout simplement pris dans un cul de sac parce qu'ils tiennent comme acquis la science occidentale comme épistémè dominante au sens où le noyau théorique de base en la matière proviendrait de l'hylémorphisme d'Aristote.

Cette problématique globale inclut la conceptualisation d'Yves Valentin Mudimbe ou celle de la diaspora tiers-mondiste de la question pendante de la décolonisation intellectuelle qui doit se résoudre en dépassant le langage de la modernité en philosophie et en se réappropriant l'épistémè dominante par une critique africaine. C'est une critique historiographique des connaissances. Pour nous, il ne s'agit pas d'élaborer un autre discours, car dans ces conditions le point de vue africain restera toujours une épistémè subalterne dans une sorte d'épistémologie de frontière qui n'élabore pas une reconstruction inscrite dans un régime d'historicité très longue.

Notre stratégie argumentative est la suivante : le dépassement du langage de la modernité depuis le rationalisme fondé par René Descartes, langage qui configure les fondateurs des sciences sociales tels qu'Emile Durkheim (Les Règles de la méthode sociologique), le dépassement qui nous amène, à la philosophie pragmatico - cognitiviste (nous aurons comme réflecteur John Searle avec qui nous débattrons longtemps ) qui fait des reconstructions théoriques d'envergure à partir des sciences sociales classiques. La reconstruction historique non eurocentrique nous amène au concept de kheper. L'étude pragmatico - intentionnaliste des sciences sociales aujourd'hui est de plusieurs cotés une étude plutôt structuro -intentionnaliste avec un arrière-fond évolutionniste ou historique.

Au demeurant, la question de la rénovation des sciences sociales se pose avec acuité dans le monde entier à cause de changement profond de la réalité sociale.

La rénovation des sciences sociales africaines est pour nous un programme épistémologique inspiré par le travail de comparer les types d'anthropologies. Dans la même ligne, nous reconstruit l'approche anthropologique de Karl Marx au moyen de concept de lutte darwinienne de races. Les mêmes apories de Marx sont des présupposés des auteurs comme Jürgen Habermas ou John Searle, qui en restent à une anthropologie qui semble ne pas avoir une chronologie historique judicieuse ou un présupposé d'une unité biologique ou psychique du genre humain clair.

Au demeurant, il y a un besoin d'échange théorique réel entre l'anthropologie (matrice des sciences sociales) et la philosophie, entre les sciences sociales et humaines en général et la philosophie. Un tel contexte contraste avec l'épistémologie telle qu'elle s'enseigne dans nos Universités congolaises qui semble rester plutôt « générale » avec des présupposés protophysiques dominants, alors que des chercheurs en sciences sociales et Humaines attendent un échange théorique « compréhensible » de notre part pour qu'ils se dédouanent des multiples « impasses » relatifs qui ont jeté leurs sciences dans une véritable routine, en même temps de notre côté leurs calculs statistiques et méthodes quantitatives pour les enquêtes sociales de tous ordres nous laissaient pantois, alors que le Cours de statistique est inscrit au programme de philosophie. C'est avec la volonté de tenter de rencontrer ces multiples attentes que nous avons amorcé ces recherches.

Ce qui préoccupe en général ou, pour être plus concret, ce que la « réalité sociale » aussi bien en Européen qu'en Afrique ailleurs, change profondément  et continuellement.

Etudier la « réalité sociale » exige une prise en compte des changements qui agitent la société. La théorisation dite actionniste ou constructiviste s'effectue dans un esprit d'innovation complexe. Elle présente plusieurs registres d'analyses où s'imbriquent aussi bien le niveau de constructions sociales partie d'un savoir partagé et d'une situation de la parole, des constructions sociales attributives (des attributs langagiers) consécutives aux « mondes vécus» avec Jürgen Habermas se situant aux antipodes avec des constructions abstraites à l'instar des modèles classiques construits à partir du modèle de Tout et de ses parties ,de systèmes d'action et de monde vécu.

Le paradigme constructiviste se cristallise dans les approches interprétatives qui visent à expliquer les significations subjectives qui font consensus sur l'interprétation de la réalité sociale. En ce sens, ce paradigme considère la société comme une construction théorique constituée des expériences subjectives de ses membres et du chercheur. Ce paradigme est un ensemble des diverses traditions philosophiques incrustées dans les sciences sociales notamment dans la sociologie classique. Le paradigme interprétatif est inspiré de plusieurs traditions et alimente deux approches : naturaliste et symbolique.207(*)

Cette reconstruction est due à la nécessité de comprendre la « réalité sociale » au moyen des instruments scientifiques adéquats. Autant de « mondes vécus » africains, par exemple, deviennent des lieux des transactions illicites, en marge de pouvoirs officiels, d'un espace public inféodé caractérisé par l'absence de crédit des animateurs et l'amoralisme portés par les membres du groupe ; telles apparaissent les pratiques de la prostitution, de la drogue, sous le mode de la régulation de la violence des identités inédites, de nouvelles figures de paternité, etc.

Pour Ibrahima Amadou Dia , les constructions théoriques des tenants de l'approche quantitative apparaissent aussi comme des prismes déformant de la réalité sociale gommant les singularités dans des sociétés de classes et des espaces structurés par les poids d'une société industrielle périphérique.  

Le Professeur Ntumba Lukunga208(*) relève à la suite de la triple dimension et des problèmes que posent les sciences sociales en Afrique, le fait qu'il était déjà bien longtemps opportun de lancer un programme d'africanisation de la recherche.  Prendre la réalité africaine comme objet de recherche consisterait surtout à élaborer progressivement une méthodologie, des théories et concepts qui soient adaptés à cette réalité sociale. Ces travaux qui se trouvent aux confins de l'histoire, de l'anthropologie et de la sociologie et autres linguistique, économie et Droit, doivent s'engager dans des voies nouvelles.

Toutefois, ce qui semble à première vue relevant épistémologiquement dans les sciences sociales comme approches communes et dichotomiques - récit/système, individualisme méthodologique/holisme méthodologique, etc.- ce sont justement les bases d'une part théoriques biologico- linguistiques et d'autre part historiques : la démarcation de la causalité par rapport à l'intentionnalité dans le fonctionnalisme, le structuralisme, la systémique et la dialectique.

En fait, en tant que telle cette recherche de rénovation a comme objectif de lutter contre l'infirmité des sciences sociales et humaines africaines due en majeure partie à l'esprit du conformisme et à la peur de l'innovation. Les chercheurs dénoncent finalement  l'exercice scientifique par procuration,  la production et la reproduction des discours aliénés et aliénants, et l'inhibition théorique, méthodologique et définitionnelle chez le scientifique africain.

Comme on peut le remarquer, l'ambition affichée est celle de pouvoir répondre à cette évolution des réalités sociales par des politiques scientifiques efficaces ; il faudrait logiquement avoir en premier lieu une compréhension approfondie : l' « ontologie sociale » en sociologie reconstruit les théories et concepts puisés dans les modèles anciens de la philosophie de la Nature des Temps modernes européens. Emile Durkheim recourt au « mécanisme » de René Descartes, d'autres recourent à la monadologie de Friedrich Leibniz avec ce que tout cela comporte en tant que présupposés onto-théologiques antiques : celui là plus proche de l'arithmétique privilégiant l'espace géométrique homogène, et celui-ci la monade, l'unité. La critique des modèles anciens (le Tout et ses parties) cristallise la recherche sur les conventions et les êtres abstraits d'une causalité avec les états mentaux pour l'explication des phénomènes sociaux.

Les modèles « constructivistes » qui rallient l'objectivité et la subjectivité des « faits sociaux » aujourd'hui font globalement prévaloir aussi bien l'unité ou les individus que le collectif. En fait, la recherche constructiviste tend vers des modèles nouveaux qui mettent en exergue la signification collective et la subjectivité pour cadrer la réalité sociale. Les fondateurs de la sociologie ont offert plusieurs modèles sur la primauté de la totalité. Emile Durkheim, tire de cela que c'est la psychologie collective qui façonne la mentalité individuelle, il n'y a pas de relation de continuité inverse entre les deux. Aujourd'hui ces vues sont reconstruites ; on ne traite plus exclusivement « les faits sociaux comme des choses moins encore comme des idées », parce que les faits sociaux n'existent pas en réalité sous le mode des choses de la physique, de la chimie ni de la biologie. Ils forment une réalité sui generis qui intègre la subjectivité humaine et la signification commune.

En somme, dans cette étude nous nous occupons à proprement parler de la « réalité sociale », de ses a priori représentationnels, et de sa fondation et de son renouvellement théorique et conceptuel. La question des techniques et des méthodes n'est pas proprement l'apanage de notre réflexion.

Le travail de restitution des principes ou de concepts centraux des sciences sociales, la reconstruction historique et systématique des postulats, et la reconstruction créative est épistémologique (Marcel Tshiamalenga Ntumba, le quatre moments de la philosophie en Afrique). Notre thèse est la suivante, les sciences sociales classiques et les reconstructions postérieures sont à des degrés divers redevables à des principes théoriques fondateurs ou à des concepts formels de base. Nous allons essayer de reconstruire le potentiel d'un des principes fondateurs, celui de « Tout et ses parties » à la base des sciences sociales classiques et contemporaines. Les sciences sociales africaines dépendent-elles des corpus théoriques occidentaux ? Dans quelle mesure et en quel sens une telle position est-elle véridique ?

Problèmes méthodologique et épistémologique

Plusieurs philosophes et scientifiques sociaux occidentaux se sont attelés à renouveler l'axe méthodologique pour articuler les bases scientifiques théoriques  et réflexives.209(*) En sociologie « à l'heure de la modernité avancée et du sujet réflexif, affirment Luc Van Campenhoudt et alii, il est nécessaire de contribuer au renouvellement de la démarche sociologique, non seulement dans ses concepts, mais également dans ses outils méthodologiques ».210(*)

A la question de savoir : Pourquoi advient la nécessité de la remise à plat des approches théoriques et conceptuelles devenues contradictoires (ci-dessus), du réexamen du concept de la « réalité sociale » et de la révisitation de la méthodologie en sciences sociales  sous la mouvance constructiviste, la réponse pour Luc Van Campenhoudt, Jean-Michel Chaumont et Abraham Franssen, est que c'est parce que les sociétés européennes sont depuis un temps confrontées à des problèmes sociaux et culturels profonds.

Disons d'emblée que ce point de vue a posteriori qui postule un constructivisme consécutif aux mutations sociales et culturelles devrait être associé au point de vue a priori qui consiste à choisir des modèles théoriques anticipant sur les mutations socio- culturelles possibles. Le point de vue a postériori est aussi soutenu par le livre édité par l'Unesco, Les sciences sociales dans le monde, écrit sous la double direction d'Ali Kazancigil et de David Makinson.

Au cours des années 1980 qui correspondent approximativement à la reprise économique après la crise pétrolière, le développement théorique principal qui s'y développe mise sur la relation entre l'individu et la société. En d'autres termes les théoriciens se focalisent sur la relation entre l'individu et la rationalité collective sous le postulat selon lequel « la société n'existe pas », et que les seules réalités étaient l' « individu et la famille » que les sciences sociales semblaient négliger. Les travaux de Raymond Boudon, Pierre Bourdieu, Norbert Elias, Anthony Giddens, Allesandro Pizzorno et Alain Touraine, parmi d'autres, se sont penchés sur ces problèmes. On a qualifié cet effort de « constructivisme ».

On considère que les faits sociaux sont des constructions des agents collectifs et individuels. La plupart des raisonnements subsumés sous ces termes ont été développés pendant une période assez longue par les intellectuels qui puisaient à la fois dans les sciences sociales de l'après guerre et celles, classiques, de l'Europe.211(*)

Quels sont les problèmes ? On assiste plus récemment en Europe occidentale, dans beaucoup de domaines, notamment dans le service public, au déplacement d'interventions des institutions vers de simples dispositions. En effet,  « alors que les politiques publiques « classiques » étaient mises en oeuvre au niveau central, s'appliquant généralement à l'ensemble du territoire national de manière homogène et standardisée, et selon un découpage disciplinaire (politique d'éducation, de santé, d'emploi, etc.), les nouveaux dispositifs se caractérisent généralement par des logiques d'actions spécifiques.... Alors que le déploiement des institutions et des interventions dans la société industrielle s'est caractérisée par un mouvement de différenciation des sphères d'activités et de spécialisation des fonctions, le travail en réseau répond davantage à une logique transversale, de dédifférenciation inter-champs et inter-institutions entraînant une hybridation des logiques d'interventions, par opposition au découpage disciplinaire classique. ... Les maîtres mots deviennent communication et négociation ».212(*) De ce qui précède, nous voyons s'amorcer une abondance d'études sur la nature des institutions.

Il y a surtout des mutations sociales et culturelles en termes de « recomposition des modes de régulation sociale (...), des dispositions de médiation et de gestion de normes (médiation, ombusdman, pratique du contrat) qui traduisent le passage d'un mode de socialisation ... fondée sur la participation des usagers à la définition des objectifs et à leurs évaluations (« autoévaluation ») ».213(*) Ceci donne lieu à un certain nombre d'études théoriques sur la normativité. C'est probablement dans ce contexte que les théories des normes feront l'objet des études approfondies au Centre de Philosophie du Droit de l'Université Catholique de Louvain. Ainsi, « le Centre de Philosophie du Droit offrait donc un milieu de travail universitaire tentant de prolonger et d'évaluer les hypothèses de la procéduralisation formulée à partir de Habermas et de son école grâce à une théorie générale de la normativité sociale dont l'originalité est de faire du rapport cognitif à la norme la clé du mouvement instituant toute forme d'ordre collectif ».214(*)

Au demeurant, la régulation se pose de plusieurs façons : « des nombreux problèmes de développement global ou de manipulation du vivant appellent de nouvelles formes de régulations. Mais c'est la capacité même de produire des règles ou de légiférer sur un nouveau mode de vie et de développement social qui fait défaut ».215(*) Ce qui est en jeu, c'est l'ajustement entre normes, jugements, expertises des scientifiques sociaux, et les contextes complexes d'effectuation de nos sociétés.

Les causes des mutations à la base de la rénovation des sciences sociales sont nombreuses, plusieurs questions sont déjà analysées à partir de la crise dite de la modernité et du modèle de Progrès et de la Raison. Nous commencerons ici à partir de trois modèles, celui de la désintégration de l'Empire romain, celui des cristallisations ou des limites de la mondialisation économique, et celui de l'émergence des problèmes institutionnels contemporains.

Pour la reconstruction théorique, nous partirons de quelques postulations en droit : dans le système institutionnel central, Droit et démocratie constituent deux faces d'une même réalité, la société démocratique se reproduit, au demeurant, au moyen du droit. Dès que les codes du droit et des pouvoirs s'établissent, les délibérations et les décisions prennent la forme différenciée d'une formation de l'opinion et de la volonté politiques ; car la formation de la volonté débouche sur des programmes, et les programmes traduits dans le langage du droit ayant une forme légale. La collectivité conçoit donc des programmes pour ce faire.

Ces programmes doivent être élaborés sur base des principes du droit de partage équitable pour tous. En effet, « la dynamique de cette action réflexive se trouve encore accélérée par le droit de partage qui fonde les prétentions à la réalisation des conditions sociales, culturelles et écologiques pour bénéficier à chance égale aussi bien des droits de disposer de la liberté que de ceux qui permettent de participer à la vie politique ».216(*)

Il est pertinent de signaler que le principe de Devenir qui est au coeur des sciences sociales comme chez Emile Durkheim est désigné sous le concept de l'hylémorphisme d'Aristote. Il pourrait paraitre superflu de montrer, et ici gît notre rappel : l'hylémorphisme est de plusieurs cotés une reprise on ne peut plus clair de l'apéiron d'Anaximandre, le devenir indestructible infini. En Afrique antique, c'est plutôt le concept de Kheper symbolisé par le « scarabée» qui, non seulement est antérieur mais aussi fort et manifestement bien élaboré. Le Devenir est une rampe théorique de lancement des grands paradigmes qui se partagent la modélisation, notamment celui de « Tout et ses Parties », paradigme fondateur et formel, d'une ontologie matérialiste et dualiste.

Ce paradigme n'admettait pas, depuis Emile Durkheim, une continuité entre les faits sociaux, le Tout et les psychiques individuels. Pour ce classique le Tout (la société) a ses lois propres situées et comprises bien loin des lois des parties (des individus). Individualisme méthodologique contre l'holisme méthodologique.

Ce ne sont pas les mentalités individuelles qui façonnent la mentalité collective comme chez Auguste Comte qui par ailleurs met l'Humanité au centre de sa sociologie que Durkheim remplace par le concept problématique de la société. Pour ce dernier, il n'y a pas non plus de relation de réciprocité entre les faits sociaux et les faits psychiques individuels sinon nous tomberions dans la science psychologique.

Toutes ces thèses sont celles que nous trouvons dans les Règle de la méthode sociologique. Les systèmes financiers, les règles morales, les règles juridiques, les mythes, etc., dépendent en tant que faits sociaux des principes distincts de la psychologie individuelle, ils sont régis par d'autres principes spécifiques, la sociologie consisterait à les chercher.

Nous rappelons cette théorie sociologique des fondateurs pour marquer l'instance à reconstruire supposée par le paradigme actionniste et interactionniste qui a repris aujourd'hui cette problématique d'un point de vue épistémologique. A travers elle, la théorie de Durkheim pose la question irrésolue de savoir si les faits sociaux dépendent de nos intentions, de nos désirs, de nos croyances, etc., de file en aiguille, se pose le problème du mode d'être de ces faits sociaux et le fondement des sciences sociales même.

Sous quelle forme existent les institutions lorsqu' elles ne sont que la résultante des règles, des principes consignés dans des registres, dans les codes ou sur un papier ou à partir d'une causalité de l'Arrière-plan de disposition ou d'un Habitus - voie médiane entre le Tout et ses parties- comme référence incorporée collectivement dans toute culture. Comme on peut bien le remarquer, le paradigme constructiviste ou actionniste cherche aujourd'hui à donner un contenu subjectif des faits sociaux et combler ce dualisme du type cartésien non sans difficultés.

Il faut donc aller au-delà des systèmes de ces unités élémentaires qui s'encrent dans le mental, dans l'action ou dans les actes de langage qui opèrent comme des fonctions, des variables, bref comme des structures profondes de la « réalité sociale ». Les fonctions et structures sont saisies comme des variables dont il faut mesurer la prégnance.

Sommes toutes, la formulation logico-mathématique ne peut se dispenser du fait majeur selon lequel toute enquête sociale commence et finit par la matrice socio -culturelle. Les variables répondent à des valeurs et des fins humaines. Historiser le fonctionnalisme. On en arrive ainsi à la mise en exergue de l' « intentionnalité » dans la construction de cette réalité sociale.

* 205 Albert MILUMA MUNANGA G.Tizi, Sociologie générale, sociologie africaine, Notions d'anthropologie, éditions SOGEDES, Kinshasa, 2009, p.211.

* 206 Albert MULUMA MUNANGA G.Tizi, Sociologie générale, sociologie africaine, Notions d'anthropologie, éditions SOGEDES, Kinshasa, 2009, p.203.

* 207 L'approche naturaliste englobe l'interactionnisme symbolique et l'ethno- méthodologie. L'approche culturelle des organisations se compare à l'étude anthropologique de forme de travail, du folklore et d'une culture.

* 208 Ces recherches devaient se développer à l'instar des travaux d'élan novateur tels que la remise en question de Mabika Kalanda, l'histoire immédiate de Benoit Verheagen, le schéma sociologique de Front J.J.,la sociologie immédiate de Nyunda ya Kabange,l'anthropologie et la critique praxéologique de O. Longandjo, la praxio interdiscursive de Kambayi Wa K.,la psychanalyse sociologique de Ntumba Lusanga, etc.

* 209 Voir François DUBET, Sociologie de l'expérience, Le Seuil, Paris, 1994 ; CURCOFF Ph., Les nouvelles sociologies, Nathan, Paris, 1995.

* 210Luc Van CAMPENHOUDT, Jean-Michel CHAUMONT, Abraham FRANSSEN, La méthode d'analyse en groupe ; applications aux phénomènes sociaux, Dunod, Paris, 2005, p.34.

* 211 Voir Ali KAZANCIGIL et David MAKINSON (Dir.), Les sciences sociales dans le monde, l'Unesco,Maison des sciences de l'homme, Paris, 2001.

* 212 Luc Van CAMPENHOUDT, Jean-Michel CHAUMONT, Abraham FRANSSEN, La méthode d'analyse en groupe, p.27.

* 213Ibidem, p.29.

* 214Ibidem, p.1.

* 215Ibidem , p.313.

* 216Jürgen HABERMAS, Droit et démocratie, entre faits et normes, traduit de l'Allemand par Rainer Rochltz et Christian Bouchindhomme, Gallimard, Paris, 1997, p.152.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe