WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La persistance des sciences sociales coloniales en Afrique

( Télécharger le fichier original )
par Jean Barnabé MILALA LUNGALA
Université de Kinshasa RDC - Doctorat 2009
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

CHAPITRE SEPTIÈME :

A LA SCIENCE HUMAINE ET HUMAINE EN AFRIQUE D'ANTICIPER, DE LIRE ET D'INTERPRÉTER LES PHÉNOMÈNES SOCIAUX

La sémiotique en sciences sociales

Pour notre méthode de la rénovation des sciences sociales en Afrique, la sémiotique permet de réaliser plusieurs tâches reconstructives. La sémiotique décrit les systèmes de Signes au sein de la vie sociale « primitive » ou civilisée en prenant en compte leur dimension conventionnelle (car c'est en vertu d'une convention spécifique à une époque et à un lieu qu'un signe signifie quelque chose) et montre le rôle joué par l'Interprétant.

Ici, nous nous proposons de montrer le rôle capital qu'a joué l'indigène d'Afrique dans la fondation des sciences sociales modernes. C'est dans cet ordre que nous essayons de construire le rôle joué par la reconstruction des images mythiques du monde et des corpus conceptuels africains dans la fondation des sciences sociales en générale.

Le « scarabée » était une image très rependue dans les castes de guerriers de l'Afrique antique, bestiole dont le système de défense n'est pas très loin de fonctionnement de moteur à vapeur, bestiole qui était abondamment étudiée en Angleterre avant la révolution industrielle. Jürgen Habermas à la suite de Max Weber, parle à propos d'une rationalisation des images mythico-religieuses du monde en tant que processus de scientifisation.

C'est l'épineuse question de l'interprétation anthropologiques des symboles et la prise en compte des « sujets interprétants » indigènes gardiens de ces symboles ou de ces signes (Quine). Ces types de connaissances sont aujourd'hui, rappelons-le, élevées au rang de patrimoine immatériel de l'Humanité par l'Unesco depuis le sommet de Rio en dépit de leur charge magique supposée par les pourfendeurs de la « pensée sauvage » convertis sournoisement depuis.

L'analyse sémiotique du langage archaïque permet de reconstruire le langage moderne qui marque les sciences et les sciences sociales classiques en particulier, transformées aujourd'hui au sein d'une épistémologie pragmatique et cognitiviste pour saisir la « réalité sociale » de notre temps.

Il faut dire aussi que le naturalisme est lié à la sémiotique. La sémiotique peircienne anticipe la révolution pragmatique de Ludwig Wittgenstein. Il s'agit de la transformation des présupposés physico-mathématiques vers les théories intentionnalistes de l'action en vue d'une « formalisation logique » plus complexe de l' « activité sociale » qui reconstruit le naturalisme et le modèle de Tout et de ses Parties qui se trouvent au coeur des sciences sociales classiques.

La sémiotique percienne éclate le réel en une série de soixante-dix classes de signes dont : la métaphore, les images, les icônes, les graphes, les signes algébrique, les foncteurs logiques, les hiéroglyphes, les index, les diagrammes, les symboles, (dénotatif et connotatif), la pensée, etc. La rénovation des sciences sociales passe par la modélisation faite à partir de cette sémiotique. Ainsi, la métaphore organiciste domine l'approche structuro-fonctionnaliste jusqu'aux approches plus récentes de modèle de l'information parallèle et distribué ou le modèle neuronal en réseau, et le modèle de traitement sériel de l'information, et autres. La sémiotique reste utile pour l'analyse des organisations sociales. La méthode littéraire de l'indéxicalisation avec l'externalisme référentiel permet l'étude de la situation énonciative et des embrayeurs.

Le constructivisme, c'est-à-dire le conventionnalisme en sciences sociales nous permettra de reconstruire le point de vue naturaliste à la suite de la querelle des universaux de réaliste et de nominaliste contemporains.

La sémiotique est conçue comme le fondement même de la logique, la science des lois générales nécessaires des signes, elle est un cadre théorique qui nous donne la possibilité de présenter une logique des sciences sociales dont nous allons esquisser des ébauches avec la logique pratique ou illocutoire.

La sémiotique turn transforme la philosophie de la conscience des temps modernes. C'est la philosophie de la culture qui complète la philosophie de la Nature par delà la philosophie de Conscience initiée par René Descartes. La sémiotique transforme la conception philosophique de R. Descartes et de G. Liebnitz, et de tout ce courant qui imprègne les sciences sociales.

Le schéma d'image mythique de scarabée ou de concept de kheper est naturalisme et s'apparente au naturalisme biologique américain qui refuse « de chercher en dehors de la nature un principe explicatif de la nature. C'est dans la nature qu'il se trouve, car la raison est dans la nature, soit qu'elle y oeuvre (Dewey), soit qu'elle en émerge à un niveau donné(Sellers)».285(*) Cette dernière alternative coïncide bien avec la conscience qui, chez John Searle -nous allons analyser en priorité sa philosophie des sciences sociales dans ce livre - émerge du processus neurophysiologique d'un processus physicaliste. Dans le naturalisme américain en général « la conscience dans un être qui possède le langage dénote l'aperception (awarness) ou la perception des significations. L'esprit est au corps ce que la raison est à la nature, son entéléchie seconde ».286(*)

Dans l'ensemble, « héritier de Peirce, le naturalisme américain est métaphysique, d'une métaphysique qui se nourrit de la science, en utilise les méthodes et en adopte les conclusions : il est à la fois ontologique, expérimental et évolutionniste. Peirce, dit Schneider, «conclut la théorie des universaux comme faisant partie intégrante des sciences de la nature et considère son système des catégories comme une analyse formelle des procédés scientifiques et une ontologie ».287(*)  La nature est donc « la somme totale de ses propres conditions », elle est -« l'objet global, les parties observées plus les parties interpolées »- le seul fait existant en soi. L'esprit est un élément de ce complexe, mais il n'est ni sa propre condition ni la condition des autres objets ».288(*) Ce point de vue n'est pas substantialiste, il est processuel.

John Dewey qui est plus proche de William James d'un pragmatisme qui mise sur les résultats de l'action, « dirait volontiers d'ailleurs qu'il n'y a rien à voir dans la nature, pas de substances en tout cas, rien que des transactions. Les distinctions établies entre, `l'homme et le monde, l'intérieur et le public, le moi et le non -moi', le sujet et l'objet, l'individuel et le social, le privé et le public, etc... sont en réalité des parties (au sens de participants : parties) dans des transactions biologiques ».289(*)

Le concept d'expérience transactionnelle est central dans sa philosophie considéré par Gérard Deledalle comme un de père de la démocratie américaine. Et d'ajouter à propos de position de Peirce que « l'esprit dénote tout le système de signification en tant qu'incorporé dans les opérations de la vie organique ».290(*)

La notion du Devenir d'où vient - elle, que veut -elle dire ? En effet, la conception du devenir a donné lieu à l'élaboration de la question du changement en philosophie et du modèle de Tout et parties en sciences sociales de la manière suivante : « lorsque je change je reste le même. Il faut donc combiner le principe de permanence et le principe de changement au lieu de les renvoyer dos à dos. (...) Le principe dit matériel (hyle) est le principe de changement et le principe dit formel (eidos) est le principe de permanence.  Eidos désigne le tout et peut être traduit par structure (ou ce qui fait d'une collection de parties un organisé) (...), et hyle désigne les parties ou les éléments du tout ».291(*) Ainsi « lorsque le tout change de forme (la forme suit le principe de permanence, elle se transforme), ses transformations sont déterminées par les relations entre ses parties, c'est-à-dire entre les composants ».292(*) Il y a donc différents axes de transformation : « l'axe de déterminations horizontales et ce qui détermine (verticalement) le tout et ses changements ».293(*)

Comment se présentent les déterminations de différents niveaux  inhérents au principe du devenir et à celui de l'auto- organisation ? « Pour expliquer le devenir d'une unité à un niveau quelconque, il s'agit donc de décrire comment ses composants au niveau inférieur se rapportent entre eux (déterminations causales ou autres déterminations horizontales : distributionnelle, etc.) (...) Il faut aussi décrire comment les relations horizontales entre les parties déterminent le tout (détermination fonctionnelle) ; et il faut pourvoir décrire comment le tout, ou 'l'arrangement `des parties, détermine celles-ci (détermination structurale, `loi' structurale et `loi' du devenir) à se rapporter entre elles comme elles le font ».294(*) C'est en fait la question de « la détermination des activités par la société et de leurs déterminations par les agents individuels ».295(*)

D'où vient- elle cette notion ? Au chapitre XVII du livre des Morts (des anciens égyptiens), le Maitre Universel, s'exprime de la manière suivante : 

 

C'est moi le Devenir de khepra, lorsque devint pour moi le Devenir des Devenirs

après mon Devenir, car nombreux ont été les désirs sortant de ma bouche... 296(*)

Le Devenir est ici une notion qui est associée à la divinité (aux puissances) qui

crée par la parole (concept d' « acte de parole ») base de la révolution linguistique et pragmatique en philosophie, en tant que ce qui est créé est les désirs de son coeur (cognitivisme). Notre thèse justement est que c'est tout le programme épistémologique de base en sciences sociales (aux niveaux structural, fonctionnaliste, pragmatique, connexionniste ,cognitiviste et autres constructiviste) qui a été ici consigné depuis des âges en Afrique ,et que nous allons tenter de reconstruire. Présenter un programme et y travailler sont justement des tâches différentes.

En somme, il est supposé qu'à travers le structuralisme, la pragmatique et le cognitivisme ,nous construisons le « monde social » au moyen du mental, du langage et de l'interaction dans notre oeuvre culturelle à travers des structures profondes qui sont ces éléments minimaux synthétisés : croyance, désir, intention, acte de langage, etc.

Nous pouvons reconstruire ce modèle des sciences sociales avec les concepts postérieurs de l'apeiron d'Anaximandre et d' hylémorphisme de Stagiritte. « L'apeiron d'Anaximandre rappelle bien des aspects du Kheper égyptien qui est un principe infini dans le Devenir, et selon la 'vérité-Justice' toujours jeune en tant que principe de Khepri ».297(*) Et « Aristote dans son livre la (Physique, a 6) parle de l'Infini d'Anaximandre qui est, `immortel et indestructible' comme élément divin (théion). Il y a donc identité entre to theion (le divin) et to apeiron (l'infini, le devenir infini)».298(*)

Dans l'esprit des Egyptiens anciens et de l'Egypte antique :

Ô pays du silence où se font des choses mystérieuses,

Qui crée les formes comme khepri.299(*)

« La création est un processus. Kheper est bien le principe qui assure la transformation de la matière. (...) L'esprit se trouve au départ de l'action ».300(*)

Cet effort d'élucidation conceptuelle et théorique suppose la compréhension de la philosophie de la nature et de la sémiotique (théorie générale de signification).

* 285 Gérard DELEDALLE, La philosophie américaine, De Boeck  Université, Bruxelles, 1998, p.96

* 286Ibidem, p.99.

* 287 SANTAYANA, Scepticisme and Animal Faith, New York, Charres Scribner 's, Ins. 1923, p.VII, cité par Gérard DELEDALLE, La philosophie américaine, De Boeck  Université, Bruxelles, 1998, p.96.

* 288Ibidem.

* 289Ibidem, p.101.

* 290 Gérard DELEDALLE, La philosophie américaine, p.96

* 291 Robert FRANCK, « Les explications causales, fonctionnelles, systémiques ou structurales et dialectiques, sont -elles complémentaires ? » in Faut-il chercher aux causes une raison ? L'explication causale dans les sciences humaines, VRIN, Paris, 1994, p.294.

* 292Ibidem, p.294.

* 293Ibidem.

* 294Ibidem, p.295.

* 295 Pierre LIVET, « Action et cognition en sciences sociales », dans (Dir. Jean-Michel BERTHELOT) dans Epistémologie des sciences sociales, Puf, 2001, p.295.

* 296 Voir Paul BARGUET, Le livre des morts des anciensEgyptiens, Editions du Seuil, Paris, 1979 ; cité par Cheikh MOCTAR BA, Etudes comparatives entre les cosmogonies grecques et africaines, L'Harmattan, Paris, p.251.

* 297Ibidem.

* 298 Théophile OBENGA, L'Egypte, la Grèce et l'école d'Alexandrie : histoire culturelle dans l'Antiquité : aux sources égyptiennes de la philosophie grecque, L'Harmattan, Kinshasa, Budapest, Paris, 2006, p.33.

* 299 Guy RACHET (Présentation et notes), Le livre des morts des anciens Egyptiens, France Loisirs, Paris, 1994, p.111.

* 300 Mbog BASSONG, Les fondements de l'état de droit en Afrique précoloniale, L'Harmattan, Paris, 2007, p.215. 

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo