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La persistance des sciences sociales coloniales en Afrique

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par Jean Barnabé MILALA LUNGALA
Université de Kinshasa RDC - Doctorat 2009
  

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Les marxistes théoriciens congolais et l'épistémologie des sciences sociales

Une bonne partie d'universitaires pratiquent encore les sciences sociales au Congo sans dire leur épistémologie. Nous saluons la mémoire de Benoit Verhaegen même si il est mis en cause dans la mort de Lumumba, le travail d'Yves Valentin Mudimbe qui se fait encore, Ilunga Kabongo d'heureuse mémoire, et les autres chercheurs qui s'étaient attelés à définir la position épistémologique d'une science sociale qui s'élaborait par eux au Congo-Kinshasa. Les épistémologues -philosophes congolais restent très coupés des sciences sociales qui se pratiquent au Congo, ils semblent les considérer comme naturelle et innocentes.

De ce point de vue le groupe de Vehraegen, de Mudimbe , d'Ilunga Kabongo, et aussi Mabika Kalanda. Mabika Kalanda, tourmenté par l'impertinence des résultats des recherches coloniales des sciences sociales et humaines en Afrique et au Congo-Kinshasa, et soucieux de trouver une méthode appropriée à l'étude des sociétés africaines contemporaines, s'interpelle : « on peut faire oeuvre de sociologue selon les méthodes de cette science : élaborée, à la manière de M.G. Balandier, une sociologie objective (...) conclure que l'Afrique est ambiguë ».334(*) Ils ont, comme intellectuels congolais, marqués une différence fondamentale pour prendre distance avec des hommes des sciences sociales d'avant et d'après eux, et des répétiteurs de savoirs occidentaux en Afrique ou qui décrivent simplement les phénomènes sociaux. La discussion épistémologique et conceptuelle est profondément voulue mais pudiquement évitée.

Ces dernières années, il ne pouvait en être autrement, on voit se développer le besoin d'une discussion conceptuelle et théorique accrue à propos des études qui sont menées sur nombre de phénomènes sociaux au Congo. Il ne s'agit pas ,dans un tel dialogue qui doit s'instaurer entre épistémologue et spécialiste des sciences sociales ,de se perdre dans des conjonctures philosophiques mais de reconstruire pas à pas la proximité. La lecture des réflexions épistémologiques de Benoit Verhaegen dans son l'Introduction à l'Histoire Immédiate et la production subséquente en sciences sociales, antérieure ou postérieure, m'a paru très impressionnante. La « dialectique » lui a imposé le thème de la rébellion au Congo.

Les scientifiques des sciences sociales, armés d'épistémologie des sciences sociales - les philosophes congolais abordent souvent ces question sous le prisme des épistémologies classiques européennes plus générales au lieu de tabler sur une épistémologie proprement sociale ( Jean Michel Berthelot) - (politologue, sociologue, anthropologue, spécialistes des sciences de l'information et de la communication, spécialistes des sciences juridiques, etc.) qui réfléchissent sur leurs disciplines les font autrement qu'un philosophe-épistémologue dans la tradition dominante des philosophes congolais.

De notre coté ,philosophe, nous sommes toujours restés sur ma soif quant à l'épistémologie elle-même telle qu'elle s'enseigne généralement encore chez nous au Département de philosophie de l'Université de Kinshasa, coupée largement des sciences sociales congolaises pour ainsi dire. Au plan pratique il s'agit de savoir comment tabler sur la biographie de ces savants qui portent la réalisation épistémologique de l'approche/méthode qu'ils ont promu et utilisé, sinon examiner la justesse de leur position en sociologie de connaissance (ou épistémologie de la sociologie) ? Les sciences sociales doivent transformer la société. Nous aurions pu nous proposer de réfléchir sur la biographie de ces hommes des sciences sociales en Afrique et au Congo, mais nous avons opté pour penser leurs présupposés épistémologiques d'abord. Benoît Verhaegen a produit une oeuvre immense incrustée dans la réalité sociale congolaise spécifique. Son intérêt pour l'épistémologie des sciences sociales et humaines était fondamental. Pour lui, en plus, il ne suffit pas de produire et de faire la science sociale, ou de la reconduire, mais de faire bouger les choses sociales. C'est encore un enjeu très important. Ceci est devenu véritablement un besoin.

Benoît Verhaegen est parti d'une conviction épistémologique et d'une sociologie de connaissance claire : «  la science bourgeoise positiviste  perd dans une proportion (...) croissante - la possibilité de maîtriser en pensée la société comme totalité et, par la même, elle perd aussi sa vocation à la diriger. »335(*) Pour lui justement, la dialectique a la capacité d' « agir sur la réalité sociale. »336(*)

Peut-on dire que maîtriser et diriger théoriquement la société congolaise a été un objectif atteint ? Là c'est une autre question, les sciences sociales ont un effet sur les habitudes et sur les mentalités dont il faut restaurer l'histoire. Verhaegen a en partie imprégné, à l'Université de Kisangani d'abord et à l'Université de Kinshasa ensuite à la faculté des sciences sociale, politique et administrative, de son esprit.

Les sciences sociales ont pris pied à partir des métaphores puissants puisés dans les mythes, aujourd'hui les sciences pour se rénover, c'est notre hypothèse, doivent y retourner. Les images linguistiques (la pensée) influencent les actions humaines et les mentalités des peuples et des groupes, les croyances, les habitudes, etc., L'évaluation de leurs effets n'est pas toujours aisée.

Certains chercheurs croient que le terrain pertinent pour les sciences sociales a toujours été le territoire national. L'internationalisme socialiste sombrerait dans une célébration esthétique des connaissances révolutionnaires. Nous y reviendrons avec Jean Copans. Toute fois, il faut dire qu'il est temps de tirer les conséquences d'une telle pratique scientifique telle qu'elle a été théorisée par tout le cercle de ces savants congolais et congolisés et leurs disciples. L'épistémologie qui est une analyse critique des principes et des hypothèses conceptuelles des diverses sciences pour en déterminer la portée, la valeur et l'origine logique, est un des instruments indiqué pour une telle évaluation.

L'épistémologie des sciences sociales montre que le « matérialisme historique » sera reconstruit par Benoit Verhaegen à partir de principe da la totalité, le Tout dans le cadre des théories des systèmes. La configuration dictée par l'Histoire Immédiate, est la recherche de mise en exergue des médiations épistémologiques dans un programme historique et institutionnel : dévoiler les instances, les structures sous- jacentes, les différents niveaux, etc., ayant comme toile de fond le principe de lutte et de « travail social », c'est-à-dire ce mélange d'institutions, de pratiques, des symboles, des normes humaines, de la formation de la conscience, c'était le sens de l' Immédiat (voir le concept de médiation comme des formes a priori ou habitus ).

Aujourd'hui on peut se poser une question bien pertinente : que représente la perspective actuelle de reconstruction des sciences sociales à partir des théories de l'action ou de l'habitus (interaction) ? Tout en restant liées aux théories de systèmes, les théories de l'action ont pris un élan nouveau au sein des sciences sociales dans le monde.

Chaque approche dicte toujours déjà le chemin à suivre. Toute la thématique guerrière de Verhaegen tient à son choix épistémologique. Une telle oeuvre était la conséquence d'un choix épistémologique qui dictait la prédominance de la thématique de la dialectique et le mode interdisciplinaire de son traitement théorique qui culmine dans la politique. L'interdisciplinarité mise en exergue par Benoît Verhaegen est de plusieurs côtés une exigence d'un retour à l'esprit philosophique dicté par la reconstruction de matérialisme dialectique de Marx, la praxis. Il se différencie cependant de Marx. Son appel au concept de la « totalité » - ce qui renvoie entre autre au concept de « travail social » chez Marx, est une de base de sa doctrine qui met en exergue l'unité théorique de la duale conceptuelle : la techno- économie et les innovations normatives des rapports sociaux selon le stade de développement de la formation sociale. La circularité de ces deux pôles bannissant l'instance techno- économie comme la « dernière instance » était le point de vue spécifique de Vheraegen. Il se démarque ici de Marx.

L'antidote de la thématique de la rébellion serait la recherche de consensus dialogal , les accords recherchés après des guerres intestines par les institutions internationales , de la première mission des nations unies aux accords de Sun City peuvent être compris sous ce présupposé : ce choix épistémologique est celui de proceduraliste qui se situe dans la reconstruction du matérialisme historique de Jürgen Habermas avec la pragmatique formelle qui part de la situation de la parole (voir Après Marx) qui place le concept de consensus au centre , pris au sens de concept architectonique de reconstruction théorico-pratique comme chez Tshiamalenga Ntumba. Ce dernier se situe au niveau d'une lutte bestiale d'élimination raciale comme C.A.Diop.

La Dialectique exprime la réalité sociale changeante ou le Réel processuel - doctrine philosophique - en tant qu'elle est l'inverse de la Mécanique, celle-là met en exergue les forces inhérentes ou internes dans la tâche de l'émancipation alors que la Mécanique est une approche de continuum qui va de l'externe vers l'interne (voir avec Aristote le Dieu premier moteur non mû). La Dialectique est un principe de la philosophie de la Nature qui trouverait Dieu superflu. L'approche traditionnelle structuro-fonctionnaliste compte contre la dialectique des grands adeptes. Nous allons essayer une large reconstruction de ces approches au point de vue de ses schèmes et concepts centraux depuis les fondateurs des sciences sociales. Cette approche nous semble lapidairement présentée par les praticiens des sciences sociales eux-mêmes. On peut dire que les sciences sociales au Congo restent dominées par une approche traditionnelle structuro- fonctionnaliste, qui semble restée un peu moins thématisée au point de vue épistémologique,- savoir dégager les principes et les hypothèses de cette approche, la portée, la valeur et l'origine logique de ses principes pourra être notre tâche. La philosophie de sciences sociales que nous présentons au départ de notre étude, à propos, n'est pas originale, ce n'est qu'une entrée en la matière. Nous avons ressassé des points de vue connus avec une légère reconstruction autour de quelques présupposés.

De chercheur - grand savant marxisant comme Benoit Verhaegen qui a contribué à la création de la Faculté des sciences sociales à l'Université de Kisangani autour des années 1980 au temps fort de Mobutu avec les financements étonnant de Rockefeller - n'est pas seul au Congo,337(*) Kabeya Tshikuku est aussi un de ceux qui pratiquent une recherche qui suppose de plusieurs cotés une épistémologie plutôt partie de l'expérience africaine et du marxiste, et il continue de réfléchir dans ce sens ; les autres économistes congolais reconduisent en gros la théorie du choix rationnel que suppose l'économie politique classique.

* 334NTUMBA LUKUNGA , « La remise en question théorique et méthodologique des sciences sociales et humaines au Congo : Effort de contextualisation » dans Sylvain SHOMBA KINYAMBA( Dir.) , Les sciences sociales au Congo -Kinshasa :Cinquante ans après :quel apport ?,L'Harmattan, Paris,2007,p.52.

* 335 Benoit VHERAEGEN, Introduction à l'Histoire Immédiate, Sociologie nouvelle, Théorie, éd.J. Duculot , 1974,p.162.

* 336Ibidem, p.159.

* 337 Mgr Gillon qui a bâti l'Université Lovanium, aurait aussi bénéficié de ce même genre de fonds.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote