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Le transfert de connaissance chez les experts.

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par Emmanuel DELARUE
CFA IGS - Master 2 - Responsable en Management et Direction des Ressources Humaines 2016
  

Disponible en mode multipage

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    Emmanuel DELARUE Promotion 18 - Année 2015 - 2016

    LE TRANSFERT DE

    CONNAISSANCE CHEZ

    LES EXPERTS

    En quoi le transfert des connaissances chez les experts
    est-il un enjeu stratégique dans la recherche de
    croissance d'une entreprise de l'industrie du nucléaire
    français ? Le cas d'AREVA

    Mémoire de recherche appliquée

    CFA - Institut de Gestion Sociale

    Titre de l'IGS certifié Niveau I

    Responsable en Management et Direction des Ressources Humaines

    Maitre d'apprentissage : Madame Valérie CAILLOT Tuteur de mémoire : Monsieur Bernard MERCK

    CONFIDENTIALITÉ

    Les documents et informations de toute nature contenus dans ce rapport sont
    confidentiels et ne peuvent être utilisés dans un autre but que l'évaluation de
    l'étudiant l'ayant rédigé.

    Tout lecteur s'interdit avant, pendant ou après l'évaluation, de révéler,
    communiquer à tout tiers ou utiliser directement ou indirectement, partiellement
    ou totalement, les informations qu'il contient.

    REMERCIEMENTS

    Je remercie mon maître d'apprentissage, Madame Valérie CAILLOT pour m'avoir permis de réaliser ce mémoire et pour avoir m'avoir fait porter attention sur certaines problématiques sujettes à l'expertise chez Areva.

    Je remercie aussi mon tuteur de mémoire, Monsieur Bernard MERCK qui m'a apporté son encouragement sur la problématique du mémoire, son aide à la rédaction et son soutien pour la réalisation de l'enquête.

    Je tiens aussi à remercier Monsieur Martin ROULLEAUX-DUGAGE pour les encouragements et le temps passé à me transmettre son savoir qui m'a guidé tout au long de la réalisation de ce mémoire. Son aide m'a ainsi permis de mieux cerner l'ensemble des problématiques du sujet et de prendre le recul nécessaire pour l'analyse qui y est réalisée.

    Je remercie également Monsieur Laurent DADA pour avoir pris le temps de m'aider à mieux comprendre le contexte global de l'entreprise ainsi que pour les encouragements qu'il m'a apporté.

    Je remercie également Mademoiselle Céline FRIEDRICH, pour les encouragements et le soutien qu'elle m'a apporté tout au long de cette année, et particulièrement durant la rédaction de ce mémoire.

    Je remercie aussi toutes les personnes qui ont participé de près ou de loin à ce mémoire, par les éléments qu'ils m'ont fournis dans l'enquête, par l'écoute de mes problématiques rencontrées et des réponses qu'ils ont su y apporter. Je remercie également les personnes qui m'ont conseillés et aidés sous différentes formes.

    Enfin, je remercie le corps enseignant et professionnel de la formation de titre de niveau I, Responsable en Management et Direction des Ressources Humaines de l'Institut de Gestion Sociale pour toutes leurs connaissances qu'ils m'ont transmis.

    INTRODUCTION

    SOMMAIRE

    INTRODUCTION 1

    PREMIERE PARTIE - APPRIVOISER LA CONNAISSANCE 6

    1.1. La connaissance chez AREVA 6

    1.1.1. AREVA, un leader sur marché en évolution 6

    1.1.2. La connaissance créer de la richesse 11

    1.1.3. Le transfert des connaissances est capital pour subsister 17

    1.2. Les experts possèdent la connaissance 20

    1.2.1. Les experts sont les acteurs clés de l'industrie du nucléaire 20

    1.2.2. Le processus de transfert des connaissances chez les experts 26

    1.2.3. La spécificité des communautés de savoir 30

    DEUXIEME PARTIE - LE TRANSFERT DES CONNAISSANCES SOUS TOUTES

    SES FORMES 33

    2.1. Protocole d'enquête 33

    2.1.1. Travail en amont 33

    2.1.2. Les interviews et le débriefing : les difficultés rencontrées 35

    2.2. Les programmes mis en place par Areva 37

    2.2.1. GapExpert : un programme pour les jeunes générations 37

    2.2.2. L'arrivée des nouvelles générations 40

    2.2.3. Un dispositif spécifique pour les experts à la retraite 43

    2.3. Des initiatives individuelles de transfert de connaissances 45

    2.3.1. Les transferts ponctuels 45

    2.3.2. Les moyens de partage de connaissance dans la carrière de l'expert 48

    2.4. Le transfert collectif de connaissances 51

    2.4.1. L'identification des connaissances critiques 51

    2.4.2. Les différentes formes de communautés existantes chez Areva 56

    2.4.3. Les outils informatiques 61

    TROISIEME PARTIE - SOUTENIR LES EFFORTS ENTREPRIS PAR AREVA 65

    3.1. Un outil pour agir rapidement 65

    3.1.1. Création d'un guide de transfert de connaissance 65

    3.1.2. Cadrer le projet 68

    3.2. Modéliser la connaissance chez Areva 71

    3.2.1. Proposer une méthode de modélisation des connaissances 71

    3.2.2. KALAM® ou MASK : deux méthodes différentes de modélisation de la

    connaissance 72

    3.3. Développer une vision collective à long terme 78

    3.3.1. Favoriser une vision globale 78

    3.3.2. Développer les communautés 81

    CONCLUSION 87

    BIBLIOGRAPHIE 90

    GLOSSAIRE DES CIGLES 94

    Annexe 1: Prévision de croissance de la production d'électricité par l'énergie nucléaire

    dans le monde en 2007. 95

    Annexe 2 : Âge moyen des parcs nucléaires 96

    Annexe 3 : Modèle systémique d'un Système de Gestion des Compétences 97

    Annexe 4 : La fiche « Expert model » AREVA 98

    Annexe 5 : Le guide d'entretien semi-directif 102

    Annexe 6 : L'analyse des entretiens : Extrait du tableau Excel 104

    Annexe 7 : Le logiciel de partage SharePoint 105

    Annexe 8 : La plate-forme Yammer 106

    Annexe 9 : Les différentes méthodes MASK 107

    TABLE DES ANNEXES 108

    TABLE DES FIGURES 109

    TABLE DES MATIERES 110

    Page 1 sur 113

    INTRODUCTION

    INTRODUCTION

    « L'actuelle accélération des progrès de la science et de la technologie doit s'interpréter par le fait que les économies des pays de l'OCDE sont de plus en plus fondées sur la connaissance »1. Le rapport de l'OCDE en 1999 est clair : le rapport à la connaissance a changé et la croissance accrue des nouvelles technologies en est le symptôme. Deux ans plus tôt, Lionel JOSPIN parlait de « bataille de l'intelligence »: « les produits issus de l'activité intellectuelle représentent déjà, et représenteront encore davantage dans l'avenir, une part déterminante de la richesse collective »2. Peter Drucker est alors encore plus catégorique puisqu'il nous dit dans la même période « Les organisations, notamment les plus grandes, auront peu d'autres choix : elles devront s'organiser autour du savoir et de l'information »3. Depuis 15 ans, la situation confirme ces intuitions et des entreprises comme Apple, qui ont basé leur croissance sur l'innovation, ont des chiffres d'affaires qui dépassent les centaines de milliards de dollars, soit le PIB réuni de plusieurs pays. Pourtant, les richesses physiques et matérielles de ces entreprises sont parfois loin de ces chiffres. Pour en arriver là, il leur a fallu capitaliser de la connaissance. Mais ils ne sont pas les seuls à le faire. La nature est la plus grande encyclopédie qui nous ait jamais été donnée. Son répertoire de connaissances semble illimité. Idriss J. Aberkane, chercheur en gestion de la connaissance et en biomimétisme,4 nous dit que la nature est un livre ouvert que nous ne savons pas lire ou dont nous ne connaissons même pas l'existence. La nature possède des technologies bien plus développées que l'être humain avec des impacts proches du zéro. Elles sont totalement biodégradables. La nature en sait plus sur nous que nous-mêmes. Et tout cela, pour une simple raison : elle a développé une gestion parfaite de la connaissance. Elle ne sait pas détruire sa connaissance et ne peut donc pas partir de zéro pour se développer. Grâce à cela, elle a développé les meilleurs écrans au monde dont Samsung tente de s'inspirer aujourd'hui pour développer les

    1 OCDE, Science, technology and industry scoreboard 1999 : benchmarking knowledge-based economies, septembre 1999, http://www.oecd.org//dsti/sti/stat-ana/prod/scorebd_summ.htm

    2 Lionel Jospin, discours inaugural au Programme d'action gouvernemental pour la société de l'information (PAGSI), Hourtin, août 1997, [en ligne], consulté le 12 juin 2016, URL : http://discours.vie-publique.fr/notices/993002100.html

    3 Peter Drucker, L'émergence de la nouvelle organisation, Le knowledge management, Harvard Business Review, aux Editions d'Organisation pour la traduction française, Paris, 1999.

    4 Etopia, Introduction au biomimétisme - « L'innovation inspiré par la nature », traduction par Lydia Blaise, [en ligne], consulté le 17 juin 2016, URL : http://www.etopia.be/IMG/pdf/biomimetisme.pdf

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    INTRODUCTION

    siens. Elle a développé des matériaux plus résistants et plus légers que ceux développés par l'armée américaine pour le blindage. Elle a mis au moins une colle que même la NASA n'a encore jamais réussie à réaliser et un système de propulsion sous l'eau que les plus grandes puissances militaires tentent, en vain, de mettre au point. Nous l'avons compris : la nature, en capitalisant et en transférant son patrimoine génétique à elle-même, a développé des technologies extrêmement efficaces, à coût zéro et non polluantes. Autrement dit : à efficience parfaite. Et cela ne semble pas vouloir s'arrêter. Et pour cause : la connaissance a la capacité d'être illimitée. Elle s'enrichit lorsqu'on la partage, c'est-à-dire qu'on devient plus riches lorsqu'on décide de la mettre en commun. Les matières premières sont inutiles sans la connaissance. Le bois ne peut brûler si nous ne savons pas allumer un feu, le pétrole ne peut faire tourner un moteur si nous ne savons pas le raffiner ni construire le moteur. L'uranium ne peut pas produire d'énergie si nous ne savons pas l'enrichir, le transporter et le maitriser. Aujourd'hui, nous avons accès à des richesses minières ou fossiles, limitées dans le temps et l'espace. Demain, nous aurons probablement épuisé la majorité de ces ressources. Nous devrons en trouver d'autres. Pour cela, l'innovation est obligatoire et passe par le transfert des connaissances (TC) car si nous perdons nos connaissances, nous revenons au point de départ. C'est pourquoi l'Homme cherche depuis toujours à conserver sa connaissance, à la partager pour l'enrichir et s'enrichir lui-même. L'apparition de l'écriture, du papier, de l'imprimerie, des ordinateurs et maintenant d'internet ont été des révolutions qui lui ont permis de faire de nouvelles découvertes. Aujourd'hui, la quantité de savoir double tous les 7 ans5. Ce qui signifie que l'homme crée plus de savoir en 7 ans et 1 jour que tout ce qu'il a créé durant les 100 000 dernières années. Nous recherchons la croissance et pour cela, nous devons continuer à échanger, enrichir et transférer nos connaissances, car il y a une corrélation entre augmentation de la connaissance et richesse. Certains pays l'ont bien compris et avec moins de matières premières, exportent bien plus que les gros producteurs d'hydrocarbures. Pour exemple, la Russie est 171 fois plus grande que la Corée du Sud avec trois fois plus d'habitants. Elle a tous les hydrocarbures, minéraux et terres rares qu'elle souhaite. Pourtant, la Corée du Sud exporte 20% de plus que la Fédération de Russie. C'est 100 milliards de dollars supplémentaires chaque année. En 1957, le PIB de la Corée du Sud était équivalent à celui de la Somalie. Aujourd'hui, leur PIB est supérieur à celui de la France. La différence ?

    5 Idriss J. Aberkane, Economie de la connaissance, Fondation pour l'innovation politique, mai 2015, 52p, [en ligne], consulté le 12 juin 2016, URL : http://www.fondapol.org/etude/idriss-j-aberkane-economie-de-la-connaissance/

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    INTRODUCTION

    Un bâtiment, un nom, quelques personnes : Un ministère de la connaissance. Les Coréens l'ont bien compris, la gestion de la connaissance (GC) est stratégique. Elle est facteur de création de richesse et l'Homme le sait depuis plusieurs milliers d'années. Ainsi, la première forme de savoir a été développée il y a plus de quarante mille ans. Il s'agissait d'entailles réalisées dans la roche qui permettait de réaliser des calculs à des fins commerciales6. Puis avec Aristote, est venue la gestion des connaissances. A force d'accumuler des informations qui sont elles-mêmes une accumulation de données, l'Homme en a constitué une connaissance grâce à ses capacités cognitives et en a formalisé un savoir. Aristote a alors introduit l'idée de mettre en place une organisation collective (le lycée) afin de l'identifier, de le classer, de se l'approprier, d'en discuter et enfin de le transmettre. En effet, sans chacune de ces étapes le savoir perd de sa valeur. S'il n'est pas identifié, personne ne saura où il se situe et peu ou pas d'individu en profiterons. S'il n'est pas classé, il sera peu utilisé, car les individus ne voudront pas perdre de temps à le retrouver. Si personne ne se l'approprie, il ne deviendra pas une connaissance et aura peu d'utilité. Si aucun d'entre nous ne choisit d'en discuter, il n'évoluera ni ne s'enrichira. Enfin, si personne ne la transmet, elle meurt et disparait. Cette dernière étape est alors la plus importante. En effet, tant qu'un individu détient un savoir, quelle qu'en soit la forme, elle subsiste. Si cet individu décède sans le transmettre, le savoir disparait. Ainsi, la clé de voute de la connaissance réside dans son transfert. On en prend alors conscience lorsque l'on fait le parallèle avec l'apparition des modes de transcription. En effet, plus ces derniers évoluent dans l'histoire de l'humanité plus la quantité de savoir augmente et plus les inventions sont nombreuses et innovantes. Petit à petit, l'Homme s'enrichit.

    Ainsi, le savoir est créateur de richesse, uniquement lorsque ce dernier se l'approprie, créant une connaissance, puis le transfert. La connaissance doit donc être transmise pour subsister, évoluer et être synonyme de croissance pour celui qui la détient. Dans l'industrie du nucléaire, cette réalité est d'autant plus vraie que le savoir y est en quantité. En effet, la capacité de l'Homme à produire de l'énergie électrique grâce à la fission des atomes d'uranium est la résultante d'une étonnante quantité de savoir accumulé et intégré par l'homme. Il s'agit en effet de la maitrise d'une longue chaîne de processus partant de l'extraction minière de l'uranium jusqu'au retraitement des déchets en passant par la fission des atomes de la matière. Les techniques utilisées sont extrêmement complexes et évoluent sans cesse afin de donner un

    6 Jean-François Ballay, Tous managers du savoir I La seule ressource qui prend de la valeur en le partageant, Editions d'Organisation, 2002, p.6

    INTRODUCTION

    meilleur rendement, d'être plus puissant et plus sûr. Ainsi, une course au développement des technologies se joue dans le secteur du nucléaire. Elle est courue par les plus grandes multinationales du nucléaire. L'une d'entre elles, nommée Areva, y participe activement. Cette multinationale Française née dans les années 2000 est aujourd'hui un des fleurons de l'industrie du nucléaire avec EDF. Présente dans de nombreux pays dans le monde, elle se distingue par sa particularité à maitriser l'ensemble du cycle du combustible nucléaire. L'exploitation des centrales est le métier d'EDF. Cependant, Areva maitrise à ce jour la construction et le démantèlement d'une centrale nucléaire, l'extraction, l'enrichissement et la fabrication du combustible nucléaire (l'uranium), son retraitement après usage ainsi que son stockage ou son recyclage. Cela inclut alors la maitrise de l'ensemble de ces technologies. Il y a ainsi un savoir-faire très important qu'Areva détient dans le domaine du nucléaire. Cependant, ce savoir-faire a un jour été rendu possible grâce à un groupe de personnes qui ont su maitriser la technologie en connaissant ses origines, en sachant pourquoi un composant réagit avec tel autre. Ils avaient ainsi la connaissance de la réaction chimique des composants concernés. Ils avaient la possibilité d'expliquer les différents scénarios possibles existant à sa connaissance. Ils savaient pourquoi et comment les maitriser. Ils étaient experts. Ainsi, les experts ont un poste qui peut se révéler stratégique pour l'entreprise, car ils « savent pourquoi ».

    Aujourd'hui, Areva traverse une crise importante. La revente de ses activités de construction et de démantèlement de centrales nucléaires à EDF devrait être réalisée en 2017 et l'entreprise a dû mettre en place un Plan de Départ Volontaire afin de réduire ses effectifs. Ces évènements voient alors des experts quitter l'entreprise. En parallèle, les experts les plus qualifiés ne sont plus qu'à quelques années de la retraite. Les nouvelles générations arrivent dans l'entreprise et prennent petit à petit la relève d'un papy-boom, résultant d'une embauche massive suite à la croissance rapide du secteur du nucléaire dans les années 1980. Ainsi, si les connaissances détenues par les experts les plus qualifiés ne sont pas transférées, Areva perdra ces connaissances qui disparaitront avec le départ de leurs détenteurs. Il semble pourtant que ces connaissances soient stratégiques pour l'entreprise, car elles permettent de répondre aux questions des autorités de sûretés, des clients demandant conseil ou encore pour développer de nouvelles technologies plus sûres dans le nucléaire. Le groupe Areva fait donc face à un défi de taille : transférer les connaissances de ses experts. Le groupe doit aussi relever un second défi : traverser sa période de crise et reprendre le chemin de la croissance. Nous avons vu que le fait de ne pas transférer une connaissance la faisait disparaitre. Or pour traverser sa

    période de crise et se développer, Areva a besoin de toutes ses connaissances et en particulier celles qui lui permettent de maitriser une technologie qui la différencie de ses concurrents, afin de les mettre à profit auprès de ses clients. Nous nous demandons ainsi légitimement en quoi le transfert des connaissances chez les experts peut être un enjeu stratégique pour elle dans sa recherche de croissance.

    Ainsi, tout au long de ce mémoire nous allons chercher à répondre à la problématique suivante : En quoi le transfert des connaissances chez les experts est-il un enjeu stratégique dans la recherche de croissance d'une entreprise de l'industrie du nucléaire français ? Le cas d'AREVA

    Pour cela, il nous faudra analyser en détail le transfert des connaissances chez les experts au sein de l'entreprise Areva grâce à des interviews réalisés auprès d'une population d'experts, mais aussi de managers et responsable au sein de la Direction Recherche & Développement d'Areva. Nous nous pencherons particulièrement sur la nouvelle entité nommée New Areva et nous en analyserons les différentes activités et processus mis en place.

    Ainsi, dans un premier temps nous chercherons à mettre en avant l'ensemble des enjeux de cette problématique en posant le contexte de l'industrie du nucléaire et d'Areva puis en définissant les termes nécessaires à la compréhension complète du sujet. Nous chercherons à définir un cadre théorique clair et précis permettant d'éclairer l'analyse de l'entreprise qui suivra. Dans un deuxième temps nous analyserons les différents processus de transfert de connaissance au sein de la population des experts Areva. Pour cela, nous réaliserons l'analyse suivant le type de transfert de connaissance afin de tirer des conclusions par thème. Cela nous amènera alors dans un troisième temps, à fournir des préconisations qui seront à mettre en place progressivement dans le temps, suivant l'urgence de la situation rencontrée par Areva.

    Page 6 sur 113

    Première partie - Apprivoiser la connaissance

    Première partie - Apprivoiser la

    connaissance

    1.1. La connaissance chez AREVA

    1.1.1. AREVA, un leader sur marché en évolution

    1.1.1.1. Une industrie basée sur des connaissances pointues

    Avec 58 réacteurs nucléaires, la France possède le parc nucléaire le plus important du monde au vu de sa population. Cela lui permet ainsi d'exporter une partie de son énergie électrique à l'Europe et de réduire son importation d'énergie fossile. Cependant, cette industrie ne s'est pas construite en trois jours. Si certains facteurs, comme le choc pétrolier de 1973, ont poussé la France à investir à grande échelle dans ce domaine, cela n'aurait pas été possible sans les recherches scientifiques préalables. Les bases en ont été jetées dès la fin du XIXe siècle. Ainsi, de nombreux scientifiques effectuent des recherches sur l'uranium et Henri Becquerel, physicien diplômé de l'École polytechnique, découvre en 1896 la radioactivité7. En 1903, avec Pierre et Marie Curie, il reçoit le prix Nobel de physique pour la découverte de nouveaux matériaux potentiellement utilisables dans l'énergie nucléaire. En mai 1939, quatre physiciens français8 déposent trois brevets pour la production d'énergie à partir d'uranium9. La France est alors titulaire des premiers brevets en la matière. À la suite de la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement a conscience de l'importance de cette énergie. Pour continuer les recherches scientifiques, il crée le Commissariat à l'Energie Atomique (CEA) en octobre 1945 et une branche nommée CEA-Industrie est créée plusieurs années après pour débuter l'industrie du nucléaire. Les enjeux militaires et les démonstrations de forces liées au contexte de la guerre froide forcent les recherches. La France décide alors d'être totalement autonome sur le développement de cette technologie et arrive rapidement à maitriser l'ensemble du cycle nucléaire tant militaire que civil (Extraction d'uranium, fabrication du combustible, construction de centrale ou d'arme nucléaire, traitement et recyclage des déchets radioactifs). En 1963, le premier réacteur nucléaire est construit et en 1971, six réacteurs sont en service et

    7 Bernard Pire, Découverte de la radioactivité naturelle, Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 17 août 2016. URL : http://www.universalis.fr/encyclopedie/decouverte-de-la-radioactivite-naturelle/

    8 Frédéric Joliot-Curie, Hans von Halban, Lew Kowarski et Francis Perrin

    9 Paul REUSS, L'épopée de l'énergie nucléaire: une histoire scientifique et industrielle, Paris, EDP SCIENCES, 8 février 2007, 167 p.

    Page 7 sur 113

    Première partie - Apprivoiser la connaissance

    produisent 5% de l'énergie consommée par la France10. Le développement de l'industrie du nucléaire civil bat son plein, les entreprises comme Framatome (société Franco-Américaine), la Compagnie Générale d'Électricité (CGE), CEA-Industrie, puis COGEMA (COmpagnie Générale des MAtières nucléaires) ou encore EURODIF Production font surface. Cependant, la mondialisation générale des marchés n'épargne pas l'industrie du nucléaire français. La loi n°2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du Service public de l'Électricité ouvre ainsi le marché de l'énergie à la concurrence. Les catastrophes nucléaires freinent aussi la progression du marché. En 1999, la Cogema devient l'actionnaire principal de Framatome. Puis en septembre 2001, AREVA naît de la fusion de Cogema, Framatome, CEA-Industrie et Technicatome. Anne Lauvergeon, PDG de la Cogema, devient alors présidente du directoire d'AREVA, leader mondial du Nucléaire.

    La réussite de l'Industrie du nucléaire français n'est pas due au hasard et son statut d'acteur majeur sur l'échiquier du marché de l'énergie atomique est en partie la résultante de l'ensemble des connaissances qu'elle a su mettre à profit. Ainsi, Areva a été créée en s'appuyant sur un ensemble colossal de connaissances.

    1.1.1.2. Le parcours d'Areva

    À la suite de sa création, le groupe a connu une croissance rapide grâce à l'acquisition de nombreuses sociétés. Son objectif est alors de proposer une offre complète en rachetant les sociétés nécessaires à la maitrise du cycle du Nucléaire. En 2001, la société américaine Canberra est intégrée au sein d'Areva pour les solutions de mesures nucléaires relatives à la sûreté et à la sécurité. En 2002, Areva acquiert la société américaine Duke Engineering and Services, dans le domaine des services et ingénieries nucléaires. Puis en 2004, le groupe élargit ses activités en intégrant Areva T&D, ancienne branche d'Alstom, afin de couvrir le domaine de la transmission et de la distribution d'électricité. C'est alors qu'en 2006, le nom des principales sociétés du groupe est modifié. Ainsi Cogema devient Areva NC et Framatome ANP est renommée Areva NP. Avec plus de 350 entités légales réparties dans le monde, le groupe devient la seule entreprise multinationale en mesure d'intervenir sur l'ensemble de la chaîne nucléaire presque partout dans le monde. En 2010, en tant que leader

    10 Alain MALLEVRE, L'histoire de l'énergie nucléaire en France de 1895 à nos jours, [en ligne], consulté le 3 juillet 2016. URL : http://arcea-dif.fr/bulletins/133/energie.pdf

    n°1 sur son marché, la société s'organise en « Business Groups » (BG), divisés eux-mêmes en « Business Units », pour sectoriser ses activités. Il est alors mis en place le pôle Mines, axé sur la recherche, l'extraction et le traitement de l'uranium. Les activités Amont s'occupent de la conversion et de l'enrichissement de l'uranium avec la conception et la fabrication du combustible des centrales nucléaires. Le pôle Réacteurs et Services conçoit, fabrique, réalise la maintenance, modernise et contrôle les réacteurs. Le BG Aval a pour mission principale de recycler les matières valorisables (uranium et plutonium), mais aussi d'emballer, de transporter et d'entreposer les matières nucléaires usagées. Ses activités sont aussi tournées vers l'assainissement des équipements et des installations et la direction du démantèlement de sites nucléaires. Enfin, le BG Energies Renouvelables travaille sur les éoliennes avec Areva Wind, l'énergie solaire avec Areva Solar, les bioénergies avec Areva Koblitz et réalise des recherches dans l'énergie à base d'hydrogène avec la société Hélion. Par ailleurs, le groupe est soutenu par les BG Corporate, Services partagés et Ingénierie. Ainsi, la Direction des Ressources Humaines et la Direction Recherche & Développement (DRD) que nous verrons par la suite se situent au sein du BG Corporate. L'expertise détenue par un seul groupe dans le domaine du nucléaire civil est sans précédent. Il y a derrière plusieurs dizaines d'années de recherches scientifiques, de tests, de retour d'expérience, de pratiques et des connaissances qui semblent percer les plafonds de l'imaginable.

    Cependant, en 2015, avec près de 44 000 salariés, le groupe annonce une perte nette de 4,83 milliards d'euros pour l'année précédente. Les retards pris sur la construction d'une centrale nucléaire de type EPR (Evolutionary Power Reactor) en Finlande, les dépréciations d'actifs sur l'acquisition de la société canadienne UraMin dont les mines d'uranium se sont révélées inexploitables ou encore les difficultés rencontrées dans les activités sur les énergies renouvelables sont les principales causes de cette perte. Depuis, c'est toute une restructuration qui a été lancée. Un Plan de Départ Volontaire (PDV) a été mis en place en 2016 pour permettre à 2700 salariés de quitter le groupe. Depuis le 1er juillet 2016, deux entités distinctes ont été créées dans le but de céder les activités Réacteurs et Services en 2017 à EDF. Il s'agit de New CO11 centrée sur les activités liées au combustible nucléaire et d'Areva NP liée à la construction, entretien et démantèlement des centrales nucléaires. C'est cette

    11 New Co est l'appellation temporaire de la nouvelle structure d'Areva chargée de reprendre le coeur de métier du groupe avec Areva Mines, Areva NC, Areva Projet et Areva Business Support. New CO est aujourd'hui filiale d'Areva SA. Areva NP étant cédé à EDF, Areva SA est chargé de continuer et clôturer les projets en cours (comme la construction d'OL3, le réacteur nouvelle génération en Finlande).

    dernière qui va alors être rachetée par EDF. Le système de fonctionnement en BG a été remodelé et le groupe fonctionne aujourd'hui uniquement par BU, l'objectif étant de décentraliser les activités aux unités. Enfin, les sociétés Areva Énergies Renouvelables, Areva TA et Canberra seront elles aussi revendues. Areva doit maintenant se recentrer sur son coeur de métier. Ainsi, les activités Mines, Amont et Aval seront conservées pour la maitrise du cycle du combustible. Philippe KNOCHE, président du groupe annonce en juin 2016 que « la structure financière solidifiée, l'outil industriel renouvelé, ainsi que le renforcement du socle technologique et d'innovation de NEW CO seront la base de cette stratégie »12. En octobre 2016, le groupe Areva a 8 ans de carnet de commandes devant lui, soit environ 33 milliards d'euros, ce qui lui permet de rassurer les acteurs prenant part à son projet de restructuration. Il a aussi d'autres arguments comme celui d'être le seul industriel à maitriser, à ce jour, la vitrification et la fabrication du combustible MOX13 à grande échelle pour l'industrie civile. Les connaissances du groupe sont ainsi une des clés de réussite du développement d'Areva. Pour mieux situer Areva et l'intégrer dans un contexte plus global, il est important de comprendre les perspectives d'avenir de son marché.

    1.1.1.3. Une industrie qui n'a pas dit son dernier mot

    Les critiques sur l'énergie nucléaire sont nombreuses et Areva est loin d'être la seule entreprise à être la cible des attaques de mouvements écologiques. En 1979 un premier incident grave intervient aux États-Unis14. Aucune victime n'est cependant à déplorer. Puis en France un deuxième incident grave se déroule à la centrale nucléaire de Saint-Laurent en 1980. C'est le 26 avril 1986 que survient la crise la plus importante du nucléaire civil. Suite à des défauts de conception et des erreurs humaines, le coeur du réacteur nucléaire n°4 de Tchernobyl rentre en fusion puis explose, créant un nuage radioactif15. De là, les questions sur la sûreté nucléaire ont commencé à surgir en nombre et un sérieux doute a plané sur la

    12 Philippe KNOCHE, Président du groupe AREVA, Flash Areva n° 929 - Feuille de route Areva 2016-2020, 15 juin 2016

    13 Combustible nucléaire performant utilisant un mélange d'uranium et du plutonium (majoritairement utilisé dans la technologie nucléaire militaire).

    14 Institut de Radioprotection et de sûreté nucléaire, Three Mile Island (États-Unis) 1979, [en ligne], consulté le

    11 juillet 2016, URL : http://www.irsn.fr/FR/connaissances/Installations_nucleaires/Les-accidents-
    nucleaires/three-mile-island-1979/Pages/sommaire.aspx#.WAH2QcnS7K0

    15 Bernard Bigot, Point sur les conséquences sanitaires de l'accident de Tchernobyl, [en ligne], consulté le 11 juillet 2016, URL : http://www.cea.fr/Documents/CONSEQUENCES%20SANITAIRES%20DE%20L%E 2%80%99ACCIDENT%20DE%20TCHERNOBYL.pdf

    longévité d'une industrie potentiellement dangereuse pour l'Homme. Après une reprise difficile, c'est en 2011 que l'industrie subit son deuxième choc : Fukushima. Une nouvelle fois les autorités, et l'industrie avec elle, sont prises pour cible. Cependant le constat est là : la demande en électricité dans le monde est en croissance de 2% chaque année, et ce jusqu'en 2035 au moins. Or le secteur électrique est responsable d'un quart des émissions de gaz à effet de serre. Les énergies fossiles, estimées à haute émission de CO2, restent majoritaires dans la production d'électricité, mais leur épuisement futur et leur bilan carbone ne laissent pas d'autres choix aux Etats que de trouver de nouvelles alternatives. Le nucléaire, estimé bas carbone, ne représente que 12% de la production mondiale d'électricité. Et selon l'AIE (Agence Internationale de l'Énergie) le nucléaire permettrait en 2040 de réduire les émissions annuelles de CO2 de 50% pour la Corée du Sud, de 8% pour la Chine ou encore de 10% pour les États-Unis. C'est donc une des nombreuses raisons pour laquelle une centaine de réacteurs nucléaires pourraient être construits d'ici à l'horizon 203016. L'AIEA (Agence Internationale pour l'Énergie Atomique) donne aussi son chiffre en 2014 : de 8% à 88% de développement de l'énergie nucléaire d'ici à 203017. La Société Française d'Énergie nucléaire (SFEN) est confiante à ce jour : « Sur un marché en forte croissance, qui compte 430 réacteurs en exploitation (autant de clients potentiels en biens et services) et 72 en construction, les perspectives de croissance pour les entreprises de la filière française sont excellentes et pérennes »18. Chez Areva les prévisions sont aussi à la hausse (cf. Annexe 1: Prévision de croissance de la production d'électricité par l'énergie nucléaire dans le monde en 2007. p.95). Ainsi, malgré les controverses connues du nucléaire, ce dernier apparait aujourd'hui comme une alternative sérieuse pour pallier à un besoin croissant d'électricité tout comme le besoin de diminuer les émissions de CO2. Par ailleurs, le vieillissement des centrales (cf. Annexe 2 : Âge moyen des parcs nucléaires p.96)19 va amener le parc existant à se renouveler. Certaines seront démantelées, d'autres verront leurs composants remplacés. Dans sa publication « Énergie : les clinquantes prochaines années » (2015), l'OECD souligne l'arrivée de la

    16 Sabrina Tiphaneaux, Le marché mondial du nucléaire et ses perspectives - Quels sont les groupes les mieux positionnés pour tirer profit de l'évolution du marché ?, Les Echos Etudes, [en ligne], consulté le 25 juillet 2016, URL : https://www.lesechos-etudes.fr/etudes/energie-services-collect/etude-marche-mondial-nucleaire/# fndtn-presentation

    17 AIEA, Rapport d'ensemble sur la technologie nucléaire pour 2015, 13 juillet 2015, [en ligne], consulté le 25 juillet 2016, URL : https://www.iaea.org/About/Policy/GC/GC59/GC59InfDocuments/French/gc59inf-2_fr.pdf

    18 Société Française d'Énergie nucléaire, Le nucléaire dans le monde, sfen.org, [en ligne], consulté le 25 juillet 2016, URL : http://www.sfen.org/fr/lenergie-nucleaire/le-nucleaire-dans-le-monde

    19 Sophie Fabrégat, Vieillissement du parc nucléaire : la prolongation de la durée de vie, un enjeu stratégique et économique, Actu-environnement, [en ligne], consulté le 25 juillet 2016, URL : http://www.actu-environnement.com/ae/dossiers/nucleaire/viellissement-parc-centrales-nucleaires-prolongation.php4

    nouvelle génération de réacteurs plus sûrs et plus performants. Pour elle, l'avenir du nucléaire se joue dans le perfectionnement de la technologie, dans sa viabilité commerciale et dans son acceptation par le public avec les sujets liés à la sûreté et la sécurité. Or, la sûreté, la sécurité, le perfectionnement de la technologie sont directement liés au monde de la recherche et des sciences. La connaissance y prend une place prépondérante. La gérer semble fondamental. Avant d'aller plus loin, il nous est nécessaire de creuser sa définition.

    1.1.2. La connaissance créer de la richesse

    Dans un premier temps, nous allons regarder plus précisément pourquoi nous parlons de connaissance et non de savoir, de savoir-faire ou de compétence.

    1.1.2.1. Éviter les confusions

    De nombreuses définitions existent et les livres et ouvrages scientifiques tentent tant bien que mal de donner une définition des différents termes pouvant exister. Nous retiendrons ici les principaux : le savoir, le savoir-faire, la compétence et la connaissance. Dans ce mémoire, nous aborderons le thème de la connaissance et utiliserons parfois le terme de « savoir ». La principale distinction entre les deux est que la connaissance est liée à un individu tandis que le savoir est lié à un groupe. Par exemple, un savoir est « certifié par une autorité institutionnelle ou morale »20. Ainsi, le savoir s'inscrit dans le temps. Il est en quelque sorte figé par la certification donnée par l'autorité. Tandis que la connaissance est en mouvement puisqu'elle est liée à une personne. Ainsi, les communautés d'experts ont déterminé le « savoir » sur le comportement des atomes d'uranium tandis qu'un expert a la « connaissance » du comportement des atomes d'uranium.

    Cependant, il est fréquent de confondre la connaissance avec le savoir-faire ou la compétence. Le savoir-faire permet à un individu d'effectuer une tâche en sachant quoi faire. Par exemple, la réalisation d'une soudure sur un matériau. La compétence, elle, englobe un ensemble de savoir-faire, de savoir-être et de connaissances permettant d'atteindre un objectif plus large que la réalisation d'une tâche. Exemple : la réparation des fuites sur les matériaux par différents procédés comme le soudage. En effet, d'après un expert en gestion des

    20 Brice Mallié, Transformer le savoir en profit - Enjeux et bénéfices du knowledge management, Village Mondial, Pearson Education France, Paris, 2003, p.30

    connaissances chez Areva, la compétence est la « capacité pour un individu à tenir un poste », comme celui de « Soudeur ».

    Ainsi, nous n'aborderons pas la notion de compétence, car elle se rattache plus généralement aux notions de poste. Les compétences sont le « comment-faire » tandis que les connaissances sont le « savoir-pourquoi ». Il est donc possible de savoir quoi faire sans savoir comment le faire. Et il est possible de savoir comment faire sans savoir pourquoi. C'est la raison pour laquelle, la notion de connaissance est plus généralement liée à l'idée de conceptualisation et au domaine de l'expertise tandis que la compétence est liée à un poste.

    1.1.2.2. Replacer le sujet dans son contexte

    Pour situer un peu mieux ce qu'est la connaissance, il nous faut la replacer sur une échelle de valeurs permettant de mieux la différencier des autres termes s'y rapprochant. Appelé « spectre » ou « pyramide » du savoir, le schéma ci-contre donne une première vue claire et synthétique de ce dont nous allons parler tout au long de ce mémoire. Ainsi, la donnée constitue la base de l'échelle. C'est une notion « factuelle, neutre, objective, souvent unitaire et autonome »21. Par exemple : « 1650 MégaWatt ». C'est factuel et cela ne porte pas de sens. L'information est quant à elle marquée

    Figure 1 - La pyramide du savoir

     

    par la subjectivité de son émetteur, car elle regroupe plusieurs données pour leur donner un sens avec un objectif précis. Ainsi : « Les réacteurs de troisième génération ont une puissance de 1650 MW ». En intégrant une donnée dans un contexte et en lui donnant un sens, nous créons de l'information. Enfin, la connaissance est l'interprétation cognitive d'une masse d'informations. La personne qui la détient la modifie et la fait évoluer en fonction de ses nouveaux besoins. En accumulant des données, nous créons de l'information. En accumulant des informations, nous les intégrons dans un contexte et nous leur donnons un sens grâce à

    21 Brice Mallié, Transformer le savoir en profit - Enjeux et bénéfices du knowledge management, Village Mondial, Pearson Education France, Paris, 2003, p.27

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    Première partie - Apprivoiser la connaissance

    nos capacités cognitives. Nous transformons ainsi les informations en une connaissance La connaissance contient ainsi de l'information ayant un sens et un contexte particulier.

    Il y a alors plusieurs types de connaissance. En 1966, Polanyi ou encore Nonaka et Takeuchi en 1995 (experts en Knowledge Management) distinguent deux types de connaissances : celles qui sont tacites et celles explicites.

    Les connaissances explicites sont celles qui ont été formalisées sous forme de textes, vidéos, sons ou images. Elles peuvent être facilement transmises d'un individu à un autre. Les données qui la composent sont clairement identifiables. Ce sont en quelque sorte des connaissances « conscientes » comme, par exemple, lorsqu'un expert crée un document pour démontrer la résistante d'un matériau. Ces connaissances, si elles sont bien organisées, peuvent être stockées et réutilisées pendant plusieurs dizaines d'années. Elles sont rendues statiques. Certaines seront utiles dans un avenir proche par l'expert lui-même ou par ses pairs. D'autres ne seront utiles que dans 10, 20 ou 30 ans du fait qu'elles ne peuvent être exploitées, par exemple, en raison de la non-compatibilité d'un nouveau matériau avec d'autres. Si un expert trouve une compatibilité possible dans 20 ans, alors le stockage de la connaissance aura été très profitable. Son utilisation la rendra pendant un temps, non plus statique, mais dynamique.

    Les connaissances tacites sont celles qui sont les plus difficiles à définir. Jean-François Ballay le reconnait, la définition de la connaissance tacite « pose même, à dire vrai, un sérieux problème épistémologique, trop peu souligné »22. Cependant, dans sa tentative de définition, l'auteur parle de « connaissance incorporée »23. La connaissance tacite est donc inhérente à un individu. Elle lui est indissociable et regroupe ses aptitudes, habilités et intuitions. Elle est difficile à traduire et fait souvent référence à une situation particulière. Elle doit être remise dans son contexte. Son transfert d'un individu à un autre n'est donc pas réalisé de façon formelle. Elle se transmet généralement dans l'action via des groupes de travail, des communautés de savoir, car cela nécessite que les interlocuteurs aient un niveau de connaissance relativement proche. Ce type de connaissance est d'ailleurs souvent inconscient. L'expert lui-même qui transmet cette connaissance de façon naturelle ne la reconnait pas nécessairement comme telle. La connaissance est vivante. À ce titre : « Sans cette conception

    22 Jean-François Ballay, « Tous managers du savoir ! La seule ressource qui prend de la valeur en la partageant », Editions d'Organisation, 2002, p.18

    23 Idem

    vivante de la connaissance, il est impossible d'expliquer ce qui se passe dans les situations professionnelles d'action, de communication, de coopération, de décision, de production », nous dit Jean-François Ballay.24

    Pour appuyer cette vision, l'auteur précise que les modalités de la connaissance doivent être vues sous deux angles : une version statique et une autre dynamique. C'est d'ailleurs ce que nous pouvons voir lorsque nous mettons en parallèle les connaissances explicites (qui ont tendance à être stockées, tout du moins inscrites sur un support et figées dans le temps et l'espace) et tacites (sans cesse en mouvement, vues comme dynamique). La connaissance est donc soit stockée soit dans un flux dynamique. Ces deux formes ne doivent pas être sous-estimées.

    La connaissance revêt ainsi plusieurs formes et se définit comme le traitement cognitif dynamique d'une accumulation de données ayant un sens dans un contexte précis.

    1.1.2.3. Les enjeux de la connaissance

    Pour le domaine du nucléaire, la quantité de données qui a été cumulée depuis plusieurs générations est colossale. Il est donc nécessaire de la conserver. De plus, son avenir étant basé sur les recherches dans la sécurité, la sûreté et le développement des nouvelles technologies, il est capital de la développer en faisant appel aux nouvelles générations. Le domaine du nucléaire est fondé sur la connaissance. Cette situation est aussi vraie, mais dans une moindre mesure, pour l'ensemble des autres industries. En effet, depuis l'ère post-industrielle, les métiers ont évolué, le mode de fonctionnement des entreprises a changé. Déjà en 1996, la différence entre les chiffres de capitalisation boursière des entreprises et la valeur de leurs actifs physiques et matériels était très importante. Cette différence était composée de perspectives de croissance, de gains futurs, et de biens dits « immatériels ». Ces derniers sont alors composés pour partie, de la connaissance que possède l'entreprise [MALLIE (2003, p.15-16)]. Nous pouvons donc facilement affirmer que la connaissance est aujourd'hui valorisée financièrement de façon indirecte. Par exemple, Microsoft avait en 1996 une valeur boursière totale de 85,5 milliards de dollars et comptabilisait seulement 930 millions d'actifs

    24 Ibid

    physiques et matériels (locaux, équipements...)25. La différence étant donc due aux éléments que nous avons cités plus haut. De plus, la part des métiers dit « intellectuels » faisant appel à la manipulation de concepts et d'idées est en forte hausse dans notre société post-industrielle. Les métiers de l'ingénierie, de l'innovation ou de la créativité sont en pleine croissance. Les technologies avançant, les recherches scientifiques sont poussées toujours plus loin et sont toujours plus nombreuses. L'apparition récente (une vingtaine d'années) des métiers de la Gestion des connaissances (GC) en est d'ailleurs un symptôme marquant. Si ces métiers sont en croissance, c'est que la demande est bien présente. Pour Brice Mallié (2003), « le retour sur investissement du Knowledge Management [ou Gestion des Connaissances] n'est plus à démontrer »26. En effet, d'après lui, deux types de gains se dégagent d'une démarche de GC. Le premier est lié aux économies directes facilement identifiables permettant une optimisation de la connaissance au sein de l'entreprise. Ainsi, des gains de productivités de 13% ont été observés au centre d'appels clients de 3M suite à la mise en place d'un outil de GC. Cela a permis aussi une baisse de 35% en besoins de formation des téléconseillers. Avec un simple intranet permettant l'échange de bonnes pratiques entre techniciens, l'entreprise Xerox économise plus de 7 millions de dollars chaque année. L'entreprise Dow Chemical, quant à elle, a vu la valeur de ses brevets augmenter de plus de 400% grâce à de nouvelles méthodes de gestion des connaissances. Le deuxième type de gains est plus indirect. Il est lié à un changement de culture au sein de l'entreprise avec une meilleure communication, des échanges de bonnes pratiques et un développement accru des compétences. Ainsi d'après les responsables de l'entreprise Buckman, les ventes de nouveaux produits de l'entreprise ont augmenté de 50% et les bénéfices par associé de 93% après la mise en place d'un projet de GC. Brice Mallié identifie alors la potentialité d'une autre utilisation de la connaissance : celle dirigée vers la création de valeur directe. C'est-à-dire, la « vente » de la connaissance. Celle qui est directement dirigée vers les clients. Il montre que le savoir peut être utilisé comme une arme commerciale et marketing et qu'il peut aussi être sujet à la vente par des « produits » comme le conseil, la formation, les brevets, les supports informatiques, etc... Chez Areva, cette « vente » de connaissance existe déjà sous une forme indirecte. En effet, les experts sont souvent à l'appui des projets de vente. Ils « vendent » alors leur expertise aux clients en les accompagnant. Le client veut être suivi et soutenu. Il veut avoir l'assurance, d'autant plus

    25 Brice Mallié, Transformer le savoir en profit - Enjeux et bénéfices du Knowledge management, Village Mondial,Pearson Education France, Paris, 2003, 236 p.

    26 Idem

    dans le nucléaire, que son produit est sans danger et que le fournisseur maitrise parfaitement les produits et services. Ce n'est plus le client passif, apolitique et relativement compréhensif qui existait dans les années 1970. Le client d'aujourd'hui est exigeant, car le milieu économique est exigeant. Il veut comprendre comment et pourquoi il lui est préférable de choisir tel produit ou service plutôt qu'un autre. Ainsi les entreprises doivent prendre conscience de l'importance de la maitrise et du développement de leurs connaissances pour répondre aux attentes du client. Tôt dans la Gestion des Connaissances, la notion de business apparait. Dès 1994, Stan Davis et Jim Botkin mettent en avant le caractère avantageux à fournir des informations à ses clients. Pour eux, les entreprises qui réussiront le mieux seront celles qui auront réussi à transformer des informations en savoir. Aujourd'hui, les entreprises spécialisées sur la mise à disposition d'experts dans un domaine de connaissance spécialisé pour les entreprises se sont développées. L'entreprise Experconnect27, dont Areva est cliente, en est un bon exemple. Pour Areva, l'enjeu de la connaissance est primordial. En effet, comme nous l'avons vu, le secteur du nucléaire est particulièrement rattaché à la gestion de la connaissance. De plus, d'après le Directeur des Ressources Humaines du groupe, l'innovation pour Areva est inévitable, car l'énergie atomique est aujourd'hui plus chère que d'autres sources d'énergie. Les études réalisées par Jean-François Ballay ou Jean-Louis Ermine, deux experts en GC, sur le domaine du nucléaire montrent à quel point ce secteur est en besoin. La rareté des connaissances au sein du nucléaire amplifie ce phénomène et permet aux entreprises de se distinguer sur un marché concurrentiel.

    Dans le secteur du nucléaire, il peut être vital pour une entreprise de conserver les connaissances acquises depuis plusieurs générations. Or, les départs à la retraite et l'arrivée des nouvelles générations peuvent être synonymes de perte de savoir. Il est donc fondamental de s'intéresser au transfert de connaissances (TC).

    27 Experconnect propose aux entreprises d'accéder à des compétences de jeunes retraités souhaitant apporter leurs connaissances (pointues ou rares) à des projets de haute valeur ajoutée dans l'industrie ou les services.

    1.1.3. Le transfert des connaissances est capital pour subsister

    1.1.3.1. Approche théorique du processus de transfert des connaissances

    À ce propos, Nonaka et Takeuchi ont identifié plusieurs flux de connaissances en distinguant l'explicite du tacite. Désignés sous le sigle SECI ([Nonaka 2000]), les deux experts ont identifié quatre mouvements : la socialisation, l'externalisation, la combinaison et l'internalisation qui se résument dans le schéma suivant :

    Figure 3 : Le processus de capitalisation et de partage des connaissances

    Socialisation

    Externalisation

    Connaissances explicites

    Connaissances tacites

    Combinaison

    Connaissances explicites

    Connaissances tacites

    Internalisation

    Nous identifions ici deux méthodes pour transférer des connaissances. La première est celle de la socialisation. Jean-Louis Ermine, président de l'Association pour la gestion des connaissances dans la société et les organisations, parle de « transfert direct »28lorsqu'un expert sénior forme un expert junior par un accompagnement. Le transfert se fait lorsque le deuxième s'imprègne du premier. Ce processus est aussi rencontré dans les réseaux, les différents types de communautés ou encore les équipes projet. La deuxième façon de transférer est le « transfert indirect »29 décomposé en trois sous-processus. L'externalisation est basée sur l'explicitation de la connaissance. On externalise une connaissance qui était tacite pour qu'elle devienne explicite et ainsi exploitable par d'autres. C'est le point de rupture par lequel passe toute connaissance explicite. Il n'existe pas de connaissance explicite avant qu'elle ne soit passée par le stade de l'externalisation. Ce qui signifie que la connaissance tacite est à l'origine de la connaissance explicite. Cette dernière a été exprimée pour la première fois avec l'arrivée du langage et des codes puis lors des premiers écrits. Ce point est à retenir, car il est fondamental pour la suite du mémoire. Il est cependant impossible d'expliciter toutes les connaissances, car comme nous l'avons vu précédemment, certaines d'entre elles sont totalement inhérentes aux personnes. Pour externaliser une connaissance, on peut la transcrire sur un support. Cela ne demande aucune méthode ni savoir-faire et peu de

    28 Jean-Louis Ermine. Management et ingénierie des connaissances. Modèles et méthodes. Hermes-Lavoisier, 2008, p.20.

    29 Idem

    moyens. Cette méthode est donc simple et applicable par un grand nombre d'individus. Une deuxième méthode consiste à modéliser la connaissance via des codes et des langages spécifiques demandant plus de ressources - comme des logiciels informatiques - que la transcription simple. Cette méthode demande une expertise dans le domaine de la gestion des connaissances pour être pleinement appliquée. Le second processus de transfert indirect des connaissances est celui de la combinaison. C'est ici que se transmettent les connaissances explicitées sur un support (papier, vidéo, audio, ...). Les principaux lieux de combinaison des connaissances sont les intranets, les Sharepoints ou les disques réseau. Le troisième sous processus est celui de l'appropriation. C'est lorsqu'un individu acquiert une connaissance explicite qu'il la travaille pour qu'elle devienne sienne. En quelque sorte, il code la connaissance pour pouvoir résoudre les situations problématiques qu'il rencontre. Il intègre la connaissance. On retrouve ce processus généralement dans les formations ou dans les laboratoires dans lesquels les scientifiques expérimentent un savoir théorique.

    Dans son ouvrage sur l'ingénierie des connaissances30, Jean-Louis Ermine met en avant le système AIK (cf. Annexe 3 : Modèle systémique d'un Système de Gestion des Compétences p.97)31. « À » étant le réseau d'acteur dans l'entreprise, « I » le système d'information et « K » le patrimoine de connaissance. Ce système montre l'importance des flux de connaissances qui résultent de l'interaction des acteurs avec le système d'information au sein des entreprises. En effet, ces interactions créent un patrimoine de connaissances (K) qui s'accumule chaque jour. K ne pourra alors créer de la valeur que s'il revient vers A. Le flux de connaissances est alors crucial. La connaissance est stérile si elle ne circule pas. Sans flux de connaissances, pas de création de valeur. C'est pourquoi tout au long de ce mémoire nous essaierons de nous focaliser uniquement sur le processus de transfert des connaissances qui est une pièce importante du puzzle de la gestion des connaissances.

    30 Jean-Louis Ermine, Management et ingénierie des connaissances. Modèles et méthodes. Hermes-Lavoisier, Paris, 2008, 212p.

    31 AIK : A = réseaux d'acteurs ; I = Système d'information ; K = Le patrimoine de connaissance

    1.1.3.1. Les enjeux du transfert de la connaissance

    Comme nous l'avons vu précédemment, la réussite du secteur nucléaire tient en grande partie aux recherches sur la sûreté, la sécurité et les nouvelles technologies. Les entreprises doivent ainsi continuer leurs recherches. Pour cela, elles doivent maintenir et développer leurs connaissances. Le départ à la retraite, suivi de près par la réorganisation de tous types (fusion, acquisition, externalisation, recentrage sur le coeur de métier, changement de projet, etc...) sont les deux principales causes de perte de savoir pour les entreprises. Et ces deux facteurs touchent particulièrement le domaine du nucléaire. Avec une croissance rapide du marché dans les années 1970-1980, les embauches ont été importantes, ce qui a créé une pyramide des âges hétérogène. Au sein d'Areva, les experts de niveau 3 (les fellows), qui détiennent les connaissances les plus pointues au sein du groupe, sont plus de 69% à avoir plus de 58 ans en 2015. Il peut paraitre logique que ce soient les plus âgés qui détiennent un plus grand nombre de connaissances. D'ailleurs, cette tendance est aussi observable au sein du CEA puisque la majeure partie des experts de niveau 4 (correspondant au niveau 3 chez Areva) ont entre 56 et 62 ans32. Or, ce sont aussi eux qui sont les plus proches de la retraite. L'effet « papy-boom », que rencontre actuellement le secteur nucléaire, accroit considérablement le risque de perte de connaissances pour l'entreprise. Les réorganisations sont aussi un facteur de cette perte. Lors des réorganisations, le risque de perdre les plus qualifiés est d'ailleurs bien connu. Chez Areva, c'est plus de 2600 départs qui ont été enregistrés depuis l'annonce du Plan de Départ Volontaire (PDV) dont des experts hautement qualifiés. Si aucun processus de transfert de connaissances n'est mis en place, ce sont des domaines entiers de connaissances que l'entreprise peut voir disparaitre. De plus, comme nous l'avons vu, si la connaissance reste figée, elle se stérilise. Il ne suffit donc pas de gérer uniquement le transfert de connaissances lors des départs, mais durant toute la carrière des détenteurs de connaissances. Il s'agit donc de continuer les recherches et de les partager sans cesse pour que la création de valeur se réalise. La concurrence sur le secteur nucléaire est bien présente et les entreprises doivent se démarquer. Pour cela, elles doivent répondre du mieux possible au client en l'accompagnant. Transférer de la connaissance n'est pas un transfert de marchandise. Sans transfert de connaissances, l'entreprise sera dans une situation de perte constante de connaissances. Si ces dernières sont critiques, et que leur perte est avérée, le chiffre d'affaires peut être impacté et le coût financier pour retrouver les connaissances acquises durant plusieurs années sera

    32 Olivier MUSSEAU (CEA/DEN/DRH), L'organisation de l'expertise scientifique et technique à la Direction de l'Énergie nucléaire du CEA, Revue Générale Nucléaire, numéro 4 Etre un expert, Juillet-Août 2014, p.22-28

    important. D'autres situations nécessitent un transfert de connaissances. Par exemple, lorsqu'un expert évolue et change de domaine de travail, il doit transférer ses connaissances à un autre. Sinon, l'entreprise sera à nouveau en perte de connaissances. Cette situation moins fréquente est généralement peu abordée, car les risques encourus par l'entreprise sont moins importants. Le salarié reste dans l'entreprise et de ce fait, le transfert de connaissances semble toujours possible. Cette situation est en fait perverse. La connaissance étant en partie dynamique, cette dernière sera nécessairement perdue si elle n'est pas partagée ou mise en mouvement par l'expert.

    Nous avons pris conscience maintenant que la connaissance est un facteur important sur l'échiquier de la performance des entreprises et en particulier celle du nucléaire. Son transfert entre les différents acteurs d'une organisation est synonyme de création de valeur. Il nous faut alors dès à présent identifier les acteurs et les différents moyens de transfert des connaissances possibles.

    1.2. Les experts possèdent la connaissance

    1.2.1. Les experts sont les acteurs clés de l'industrie du nucléaire

    1.2.1.1. Pourquoi l'expert : définition et différenciation

    En soi, la connaissance ne peut être gérée. Peter Drucker disait « On ne peut pas gérer la connaissance. La connaissance est entre deux oreilles, et seulement entre deux oreilles ». Cette phrase montre à quel point la connaissance peut être inhérente aux individus. Ainsi, il est important de déterminer les personnes qui détiennent la connaissance pour pouvoir réaliser un transfert. Dans ce mémoire, nous souhaitons cibler en priorité les personnes pour lesquelles l'enjeu du transfert de connaissance est le plus fort. Cela amène à se diriger vers les populations qui détiennent un haut niveau de connaissance potentiellement stratégique pour leurs entreprises. Il est alors possible d'acquérir de la connaissance de plusieurs manières comme nous l'avons vu précédemment (cf. Figure 2 : Le processus de capitalisation et de partage des connaissances). Ce processus de capitalisation et de partage se réalise notamment lors d'expériences où les informations ayant un sens dans un contexte donné sont capitalisées. Et la personne qui capitalise le plus de connaissances semble être l'expert. En effet, Niels

    Bohr, physicien danois, définit l'expert comme « une personne qui a découvert par sa propre expérience douloureuse toutes les erreurs que l'on peut faire dans un domaine précis »33. L'idée de niveaux élevés de performance de par sa pratique prolongée dans un domaine donné est centrale (Ericsson et al., 1993)34. L'expert est aussi un individu reconnu comme légitime par la société35 et selon Jean Baechler (Membre de l'Académie des Sciences Morales et Politiques), cette reconnaissance doit aussi se faire au niveau de ses pairs36 et c'est ce qui fait sa légitimité37. Ainsi, on ne s'autoproclame pas expert. Il doit par ailleurs être en capacité de répondre à une question précise inhérente à son domaine d'expertise. Pour les entreprises, cela doit leur permettre de s'adapter aux particularités qu'elles rencontrent dans un monde globalisé et normalisé. À ce titre, en mai 2003 la norme AFNOR NFX 50-110 a défini l'expertise comme une démarche permettant l'élaboration d'avis, ou de recommandations avec comme objectif de prévoir, d'innover ou d'expliquer l'origine d'évènements ou de catastrophes et d'établir des responsabilités ou d'évaluer des dommages, des objets ou des services. Le travail d'analyse et la compréhension des origines des phénomènes grâce à la connaissance acquise lors de ses expériences sont donc le coeur de l'expertise. Une expertise est alors « l'expression d'une connaissance formulée en réponse à une demande » 38 s'inscrivant dans un processus de décision. L'expert n'est donc pas à confondre avec le spécialiste ou le savant. Le spécialiste travaille dans un domaine déjà maitrisé techniquement. Les situations que ce dernier rencontre sont relativement simples. Il obtient une réponse immédiate grâce à la mémoire des évènements. Les réponses sont préétablies. Quant au savant, il intervient pour des problèmes et des questions générales et universelles. Il a pour objectif principal la création de connaissances et mobilise ce que Le Boterf appelle le savoir-faire cognitif39. Ainsi, ce qui distingue l'expert du spécialiste et du savant, ce sont les sujets

    33 Robert Coughlan, Dr. Edward Teller's Magnificent Obsession, LIFE magazine (6 September 1954), p. 62, [en ligne], consulté le 25 juin 2016, URL : https://books.google.fr/books

    34 Jean-Philippe Bootz, Eric Schenk, L'expert en entreprise : proposition d'un modèle définitionnel et enjeux de gestion, Management & Avenir, 2014/1 (n°67), p.78-100.

    35 Philip Schlesinger, Frédéric Junqua, « Expertise, politiques publiques et économie créative : le cas britannique », Actes de la recherche en sciences sociales2012/3 (n° 193), p. 80-95.

    36 Académie des technologies, Charte de l'expertise de l'Académie des technologies, 4 juillet 2012, [en ligne], consulté le 2 août 2016, URL : http://academie-technologies-prod.s3.amazonaws.com/2014/08/22/15/56/26 /231/CHARTE_DEF_vot_e_le_4_juillet_2012_.pdf

    37 Jean-Philippe Bootz, Eric Schenk, L'expert en entreprise : proposition d'un modèle définitionnel et enjeux de gestion, Management & Avenir, 2014/1 (n°67), p.78-100.

    38 Académie des technologies, Charte de l'expertise de l'Académie des technologies, 4 juillet 2012, [en ligne], consulté le 2 août 2016, URL : http://academie-technologies-prod.s3.amazonaws.com/2014/08/22/15/56/26 /231/CHARTE_DEF_vot_e_le_4_juillet_2012_.pdf

    39 Jean-Philippe Bootz, Comment définir et gérer l'expert ?, [en ligne], consulté le 25 juin 2016, URL : http://www.agecso.com/wp/wp-content/uploads/2016/01/BourbaKeM-5.pdf

    relatifs à la capitalisation et aux transferts de connaissances d'experts qui lui sont réservés40. De plus, leur mission est en partie d'apporter une réponse adaptée à une question particulière. Il apporte en quelque sorte, des outils d'aide à la décision. Et pour le domaine du nucléaire, où chaque décision est surveillée, où chaque information est regardée de près, où il n'est laissé aucune place à l'erreur, l'expert tiens un double statut stratégique. Il est à la fois acteur de développement, d'innovation, de recherche de performance, tout en étant un « outil » d'aide à la décision. Enfin, l'expert est celui qui détient des connaissances et compétences particulières par rapport aux autres membres d'une entreprise. Il fait donc l'objet d'une attention particulière dans le champ de la gestion des compétences41.

    C'est donc pour ces raisons que ce mémoire porte exclusivement sur la population des experts.

    1.2.1.2. Les experts chez Areva

    1.2.1.2.1. Des experts opérationnels

    Pour Areva, un expert est un collaborateur qui est reconnu comme ayant une expertise dans un domaine en particulier. Il est missionné avec un objectif comme celui de résoudre un problème ou de fournir des conseils avisés. Enfin, il est évalué suivant la réalisation de sa mission ce qui fait alors sa réputation. Il est distingué de l'expertise qui est la compétence ou la connaissance dans un domaine précis. Elle peut être individuelle ou collective, utilisée pour la conception et le développement de nouvelles offres ou dans la gestion de problèmes divers. Pour Areva, l'expertise est une accumulation d'expérience qui se transfère soit « au fil de l'eau », par le tutorat, le contrôle par les pairs, soit en mode projet par la formation, les retours d'expériences, etc... La meilleure façon de construire l'expertise est alors de garder les experts dans un même domaine. Il y a quatre règles pour cela : La première est de permettre à l'expert de rester focalisé sur un domaine particulier en évitant qu'il se disperse dans d'autres domaines. La deuxième est de développer le réseau pour lui donner la possibilité de savoir où son expertise est nécessaire à l'instant « t ». L'expert doit aussi développer sa collaboration afin qu'il puisse être là où c'est nécessaire en tant que véritable expert. Le développement des

    40 Jean-Philippe Bootz, Eric Schenk, L'expert en entreprise : proposition d'un modèle définitionnel et enjeux de gestion, Management & Avenir, 2014/1 (n°67), p.78-100.

    41 Idem

    partenariats est la quatrième règle afin de travailler avec les plus grands experts dans le monde. Un expert est donc une personne ayant de l'expérience et des connaissances dans un domaine précis travaillant potentiellement collectivement, pour la création de nouvelles offres ou la résolution de problèmes. Nous observons que la définition des experts est difficile à maitriser. Elle peut être différente selon le contexte dans lequel se situe l'expert.

    Les principales différences à noter entre la définition de l'expert au sein d'Areva et la définition donnée dans le monde scientifique s'expliquent par la nécessité de donner un rôle opérationnel à l'expert chez Areva. Dans le monde scientifique, l'expert est consulté sur des questions parfois plus théoriques pour faire avancer la recherche par exemple. La notion d'analyse est mise en avant. Chez Areva, l'expert est orienté « terrain » avec la conception de nouvelles offres pour les clients, leur accompagnement ou la gestion des problèmes présents au sein des unités. Il est investi d'une mission particulière.

    Pour comprendre qui est aujourd'hui un expert chez Areva, il est important de prendre conscience de l'évolution de son rôle au sein de l'entreprise. Dans les années 1980, les experts étaient un groupe de spécialistes en support au développement des affaires et orientés sur des produits à haute valeur ajoutée. Leur responsabilité n'était pas nécessairement définie et la reconnaissance passait par le titre d'expert. Dans les années 1990, où chacun était un gestionnaire, ils étaient axés sur les technologies et les produits et ils avaient souvent des responsabilités managériales. Ils étaient reconnus de par leur fonction. Puis dans les années 2000, l'expert était celui qui réalisait une troisième carrière après celle de management et de gestion de projet. Il était orienté technologie et étroitement lié à la Recherche & Développement ou à la gestion de l'ingénierie. Il était identifié de par son rôle au sein de l'organisation. Enfin, depuis les années 2010, la carrière d'expert prend une identité bien spécifique. Elle se différencie de celle du management ou de la gestion de projet. Elle est à l'origine d'un choix à réaliser qui se distingue et non une suite de carrière après le management, due à une longue expérience dans un domaine. Il est orienté aujourd'hui innovation et technologie et se distingue par les missions qu'il effectue. Par ailleurs, une fiche appelée « Expert model » (cf. Annexe 4 : La fiche « Expert model » AREVA p.98) clarifie les rôles et responsabilités de l'expert qu'il doit s'efforcer de remplir au fur et à mesure de sa carrière. Ses objectifs, qualifiés de « SMART » sont décomposées en 5 grands domaines. Ainsi, il est chargé d'accompagner les activités de l'entreprise. Cet objectif peut se décliner concrètement par la contribution à des appels d'offres afin de résoudre des problèmes techniques, la collaboration avec les autorités de sûreté nucléaire ou l'apport de conseils

    scientifiques à des équipes projets par exemple. L'expert participe aussi à l'innovation en générant de nouveaux concepts, en évaluant les innovations au sein de l'entreprise ou encore en déposant des brevets. L'expert doit également communiquer au sein de son réseau. Ainsi, il publie des articles en interne ou en externe pour améliorer l'image scientifique et technique d'Areva. Il participe à des conférences nationales ou internationales et développe sa visibilité au sein d'Areva comme à travers le monde. Il est actif sur les réseaux internes comme externes pour le soutien des communautés techniques ou scientifiques. Il est aussi chargé de soutenir la stratégie de développement d'Areva. Il planifie des processus pour le développement de l'expertise, il assure des vieilles technologiques et s'implique dans la modélisation et la simulation pour la capitalisation des connaissances. Enfin, l'expert a une mission de transfert des connaissances vers les nouvelles générations. Cela se traduit par le développement de formations, des relations avec des écoles et des laboratoires ou encore l'accompagnement des doctorants dans leurs travaux. L'expert Areva est donc tourné vers des missions « opérationnelles ».

    1.2.1.2.2. Spécificités et processus

    Nous le voyons, entre être expert chez Areva et être expert en dehors du groupe, il y a des différences. En dehors d'Areva, un expert n'a pas à candidater pour l'être (il est défini expert en étant reconnu par ses pairs, en appartenant à un groupe d'experts). Chez Areva il est en revanche nécessaire de respecter un processus défini pour prétendre au statut d'expert. Une campagne de nomination est donc lancée tous les deux ans. L'objectif est double. Il s'agit de mettre à jour régulièrement la liste des experts, ce qui montre que ce type de carrière n'est ni définitif, ni exclusif. Mais cela permet aussi à l'entreprise de vérifier que les différents domaines d'expertise lui sont toujours utiles. Ainsi en 2014, il existait 15 domaines d'expertise, en 2015 il n'en existait plus que 14. Comme nous le voyons, l'expertise ne reste pas figée dans le temps. Elle évolue en fonction des besoins de l'entreprise. La responsabilité de la candidature est donnée au manager qui la préremplit de son initiative. Si le collaborateur est en accord avec cette dernière, il complète le document. La décision de passer expert doit donc être motivée et justifiée. Il est important ici de souligner la notion de volontariat des candidatures. À noter par ailleurs qu'à ce jour, Areva ne distingue pas le statut d'expert par une reconnaissance financière. Cependant, tous ne peuvent prétendre à ce statut puisque cela nécessite de posséder une ou des connaissances dans les 14 domaines scientifiques et

    techniques identifiés par Areva à ce jour. Un comité donnera ensuite son avis sur la pertinence des dossiers en validant ou non la candidature. Comme nous avons pu le voir précédemment, la carrière d'expert devient de plus en plus le résultat d'un choix et non d'une situation subie. Ainsi, dans sa politique, Areva a distingué trois niveaux d'experts, précédés d'un niveau « spécialiste » qui permet de se préparer à devenir expert. Ces derniers doivent démontrer un niveau de pratique et de développement de leurs connaissances sur un certain nombre de domaines. L'expert de niveau 1 est reconnu soit dans sa « Business Unit » (BU), soit au sein de son « Business Group » (BG). Il doit démontrer une pratique sur la majorité de ses domaines de connaissance. Au niveau 2, l'expert est reconnu soit dans son BG soit dans le groupe Areva. Il doit démontrer un certain niveau de maturité sur une majorité de ses domaines de connaissance. Ils sont aussi appelés « séniors experts ». Et enfin, l'expert de niveau 3, appelé « Fellow », est reconnu tant au sein du groupe qu'à l'international par la Communauté scientifique. Il doit quant à lui, montrer un niveau excellent dans la majorité de ses domaines de connaissance. Il est intéressant de voir dès à présent que ces 4 niveaux (comprenant le « spécialiste ») correspondent aux 4 niveaux mis en place au CEA qui comprenait en 2014 près de 4000 experts42. Cela montre que ce système semble déjà avoir fait ses preuves dans d'autres organisations du nucléaire. Chez Areva, chaque niveau d'expert possède son propre comité de validation des candidatures. Au niveau BU pour le niveau 1, au niveau BG pour le niveau 2 et niveau groupe pour le niveau 3. Cette distinction de niveau permet d'identifier la filière « expert » comme ouvrant à une réelle possibilité de carrière avec des évolutions possibles. Par ailleurs, avant de devenir experts, les collaborateurs deviennent dans un premier temps des « spécialistes ». Ce sont principalement de jeunes ingénieurs qui ont l'ambition de devenir experts par la suite.

    Cette approche par niveau montre l'importance du statut d'expert tout en mettant aussi en relief les différences de connaissances entre les niveaux. Ainsi, les « Fellows » seront plus à même de transmettre leurs connaissances aux « séniors experts », les « séniors experts » aux « Experts niveau 1 ». Par ailleurs, les 5 domaines de missions fixés dans la fiche « Expert model » doivent être inscrits à différents niveaux dans les objectifs lors de l'entretien annuel d'évaluation. Pour les experts de niveau 1, 20% des objectifs doivent concerner les missions définies dans la fiche « Expert model ». Pour les experts de niveau 2, il s'agit de 40% et pour

    42 Olivier MUSSEAU (CEA/DEN/DRH), L'organisation de l'expertise scientifique et technique à la Direction de l'Énergie nucléaire du CEA, Revue Générale Nucléaire, numéro 4 Etre un expert, Juillet-Août 2014, p.22-28

    les experts de niveau 3, il s'agit de 60%. Après avoir cerné de façon précise ce qu'est un expert et en particulier chez Areva, nous pouvons maintenant nous intéresser au processus de transfert de connaissances sur cette population.

    1.2.2. Le processus de transfert des connaissances chez les experts

    Dans le cadre d'un transfert de connaissances, nous avons pu définir jusqu'à présent la nature de ce qui est déplacé (la connaissance) d'un point A à un point B. Nous avons aussi déterminé quels étaient les principaux flux de connaissances d'un point de vue systémique. Il est maintenant important d'aborder le processus d'un point de vue concret en déterminant les acteurs, les rôles et les facteurs d'influence.

    1.2.2.1. Identifier les différents acteurs y prenant part

    En reprenant le flux systémique de la capitalisation et du transfert de connaissances, deux questions principales doivent être posées : qui sont les acteurs jouant un rôle dans le flux de la connaissance et comment ce flux est-il permis ?

    Il y a plusieurs situations pour lesquelles la connaissance se situe dans un flux. Ainsi, lorsqu'un expert cherche à capitaliser la connaissance pour elle-même ou son entreprise, l'externalisation et l'internalisation seront les deux flux de connaissances qui seront concernés. Par exemple, lorsqu'un expert souhaite expliciter une connaissance dans le souci d'en établir un référentiel dans son domaine de connaissance. Ou bien lorsqu'il s'agit de la présenter à ses pairs dans le cadre d'une conférence, notamment dans le cadre de découvertes réalisées à la suite de ses recherches. L'acteur qui participe au flux de connaissance est l'expert lui-même. Son manager est cependant aussi acteur, car c'est lui qui décide d'allouer, ou non, du temps et des moyens à l'expert pour effectuer ce travail. Il est aussi possible qu'il se fasse aider par une personne de type « documentaliste éditeur » dans la mise en forme du savoir43. Enfin, les autres acteurs principaux sont les personnes qui recevront la connaissance. En quelque sorte, les « clients » qu'il faudra mobiliser via les réseaux professionnels, mais aussi parfois personnels. Il existe encore d'autres acteurs, parfois plus indirects, qui peuvent

    43 Jean-François Ballay, « Tous managers du savoir ! La seule ressource qui prend de la valeur en la partageant », Editions d'Organisation, 2002, p.251

    être les unités techniques qui pourront avoir accès à la connaissance dans un temps plus ou moins long.

    Un autre acteur qui est identifié ici est le département des Ressources Humaines. En effet il intervient dans les processus de mobilité, départs et arrivées, des collaborateurs d'une société. Il organise la mise en place d'un contrat d'apprentissage, d'un tutorat, d'une formation ou de la décision de recruter un collaborateur pour remplacer l'expert quittant l'entreprise ou pour superviser les opérations de transfert de connaissances. Il sera celui qui soutient la démarche par la mise en place de ressources adaptées. De plus en plus, en collaboration avec la Direction des Systèmes d'Information, la fonction Ressources Humaines met en place dans les entreprises les outils nécessaires à la collaboration, à la gestion des compétences ou à la formation. Ainsi, l'arrivée des TIC (Technologies de l'information et de la communication) a totalement bouleversé les méthodes d'apprentissage. Or la GRH est pleinement centrée sur ce domaine. Par ailleurs, dans leur rôle de « partenaire du business », les RH doivent être centrées sur l'accomplissement des objectifs stratégiques et donc en particulier sur le partage des connaissances (Ballay, 2002).

    Dans toutes ces situations et bien d'autres encore, il est nécessaire que la direction de l'entreprise soutienne la démarche. Cela est d'autant plus vrai si elle se fait de façon continue, c'est-à-dire lorsqu'il s'agit de la mise en place d'une stratégie globale où la culture du partage devient une valeur première dans l'entreprise. Les directeurs doivent avoir conscience que leur rôle est primordial dans ce type de situation. Ce sont en effet les décisionnaires sur le modèle d'organisation de l'entreprise qui va favoriser, ou non, le partage en son sein. Ils sont aussi allocataires de ressources et sont à ce sens les acteurs permettant la mise en place d'un processus global de gestion des connaissances.

    Avec l'arrivée des TIC, le processus de transfert des connaissances est de plus en plus demandeur d'outils informatiques. Il peut s'agir de logiciels de mise en commun de documents (SharePoint) pour un partage simple. Il existe de plus en plus aujourd'hui de logiciels de solutions intégrées permettant de relier les acteurs entre eux, de créer des communautés de partage et/ou de modéliser rapidement de la connaissance. Le service informatique est donc un acteur qui peut se révéler fondateur dès lors que la situation le demande.

    Enfin, les métiers autour de la gestion des connaissances comme le « Knowledge manager » sont chargés d'orchestrer toute la démarche en pilotant les ressources, en animant les

    processus, en identifiant les besoins, en accompagnant les parties prenantes ou encore en effectuant une veille sur les outils et les méthodes. Il possède donc un rôle central et travaille en équipe avec tous les acteurs énoncés précédemment afin de les articuler du mieux possible pour en tirer un profit plus grand.

    Nous venons de voir ici que les situations de transfert sont multiples et que chaque situation semble unique tant les situations peuvent être spécifiques dès lors que l'on adapte un processus au système d'organisation. Cependant, en prenant un peu de recul sur la démarche nous allons nous apercevoir que la connaissance se transmet de deux façons différentes.

    1.2.2.2. A chaque connaissance sa méthode

    Jean-Louis Ermine parle de transfert « direct » et « indirect ». Cette distinction est fondamentale pour comprendre les deux approches que nous allons identifier dans le transfert de connaissances. Comme nous l'avons vu, la connaissance est d'abord implicite avant d'être explicite. Il est donc nécessaire de passer par différents moyens pour expliciter la connaissance.

    Durant toute sa carrière, l'expert rédige de manière continue des documents de tous types à différentes occasions (présentations, articles, travaux de recherche, etc...). Cela consiste en la première explicitation de la connaissance. Cette méthode a l'avantage de demander peu de ressources et d'être incluse dans les missions de l'expert. Ces documents sont présents sur le disque dur du collaborateur, sont parfois partagés (articles), mais pas toujours classés ou enregistrés sur une base spécifique. Pour qu'ils puissent être utilisés par d'autres, il est nécessaire de les classer par des systèmes de modélisation de la connaissance.

    Aujourd'hui, plusieurs outils de modélisation ont été mis en place, à l'image de la méthode MASK44 (anciennement MKSM) développée par Jean-Louis Ermine. Cet outil a été élaboré la première fois en 1989 en université puis au CEA (Commissariat de l'Énergie Atomique). D'après l'auteur, cet outil qui a fait l'objet de nombreuses expérimentations, est aujourd'hui opérationnel et sert au sein de nombreuses entreprises telles que PSA ou Cofinoga. Il permet de créer un « Livre de la connaissance » dans l'entreprise avec pour objectif final de capitaliser et de faciliter la transmission de la connaissance. Il s'inscrit dans une approche

    44 Méthode d'Analyse et de Structuration de Konnaissances

    « processus » globale et son principal avantage est de pouvoir fédérer plusieurs démarches existantes regroupant tous les domaines de connaissance, à tous niveaux dans l'entreprise. En effet, il peut être facilement utilisé, modifié, documenté par tous et nécessite des outils informatiques de mindmapping bien connus de nos jours. Cependant, la modélisation de la connaissance n'est pas toujours connue de tous.

    Les documents écrits ne sont pas les seules sources de connaissance dans une entreprise. Ainsi, les enregistrements vocaux ont aujourd'hui plus d'intérêt à l'utilisation qu'auparavant. Depuis quelques années, des logiciels de reconnaissance vocale, ouverts au grand public permettent de traduire sous format texte l'enregistrement d'interviews, de notes orales, etc... Encore onéreuse pour certains logiciels, cette technologie se développe et trouve petit à petit sa place dans les entreprises. Dans la catégorie de conversion de données, il existe les logiciels de reconnaissance optique de caractères (OCR) permettant la conversion de données papier en données numériques. L'avantage considérable de cette technologie est d'une part sa fiabilité qui a très largement progressé depuis une dizaine d'années et d'autres parts, son accessibilité et sa rapidité de réalisation. L'expert y trouve généralement l'avantage de structurer ses travaux dans une base de données. Chez Areva un « Record manager » est d'ailleurs chargé d'enregistrer des documents via un logiciel OCR.

    Enfin, il est aussi nécessaire de transmettre la connaissance tacite comme vu précédemment. Pour cela, parmi les méthodes classiques, le compagnonnage par tutorat est une des méthodes les plus classiques et reconnues. Il se développe aussi dans les entreprises (la tendance est à la hausse) le coaching. Cette méthode est cependant plus orientée et développée de nos jours sur le développement personnel que sur le transfert de connaissance. Dans les autres méthodes connues de socialisation, il existe le retour d'expérience ou la revue par les pairs. Moins connue, elle est présente dans les communautés de personnes et notamment celles ayant trait spécifiquement au savoir. Toutes ces méthodes de socialisation ont l'avantage de valoriser les personnes qui s'y attardent. Les actions de « faire savoir », de discussion et d'exploration sont les fondements de cette méthode qui est un levier de reconnaissance à mettre en place dans l'entreprise (Ballay, 2002). Cela comporte aussi l'avantage de légitimer la connaissance par la proximité des acteurs en action. Une méthode parait alors à la fois puissante et légitime par le nombre d'acteurs qu'elle touche. Il s'agit de la communauté de savoir. Nous allons donc nous y intéresser plus particulièrement et nous verrons qu'elles ont un fort potentiel dans le domaine du partage de connaissances.

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    Première partie - Apprivoiser la connaissance

    1.2.3. La spécificité des communautés de savoir

    1.2.3.1. Définition d'une communauté

    La notion de communauté de savoir est implicitement liée à celle de capital social. En effet, ces deux notions sont basées sur l'échange. Le capital social est ce qui permet aux individus et aux organisations d'échanger leurs connaissances de façon fluide et à moindre coût. Plus fort est le capital social, moins onéreux et plus libres seront les échanges. Ainsi, une communauté sera d'autant plus forte et efficace si le capital social de l'entreprise est important. De plus, il est aussi la marque d'une confiance entre les personnes qui est un facteur de fluidité dans l'échange. Il favorise la communication par la capacité à accepter de façon optimiste de se rendre vulnérable en laissant un autre s'occuper au mieux de ses intérêts (Roulleaux-Dugage, 2007). L'existence et l'efficacité d'une communauté de savoir sont donc conditionnées par le capital social de l'entreprise. Par ailleurs, cette communauté est caractérisée par une construction cognitive collective. Il y a donc un processus d'apprentissage entre les individus qui amène à la création d'une connaissance collective. Le principal avantage de ce type de communauté est sa transversalité au sein des organisations. Le deuxième avantage considérable est celui de l'autogérance. Les membres de la communauté adhèrent volontairement sur la base de la passion pour le domaine d'activité. Les normes sont généralement implicites et générées par les collaborateurs eux-mêmes au cours de leurs échanges. Jean-Yves Prax identifie quatre périodes de vie pour une communauté. La première durant laquelle les membres s'identifient et apprennent à se connaître, à trouver une identité commune. Pour le moment ils sont un réseau informel et non reconnu. Puis ils se mettent à participer ensemble à la réalisation d'un objectif commun qu'ils définissent eux-mêmes (pour les communautés de savoir, il s'agit de développer la connaissance). Vient ensuite le moment de la performance, c'est-à-dire que l'organisation qui accueille la communauté lui demande de justifier son existence par la production de livrable à son égard. Des rapports officiels apparaissent et les normes se développent. Enfin, les communautés s'ouvrent à l'organisation, elles sont pleinement reconnues. Leurs productions profitent à l'organisation dans son ensemble et le savoir est partagé. C'est le principe des communautés autoapprenantes, car les « utilisateurs » créent eux-mêmes le contenu. Les hiérarchies sont moins imposantes que dans l'organisation qui l'accueille, ce qui a tendance à favoriser la coopération. Un autre avantage notable est celui de l'apprentissage en action. L'énergie cinétique de la connaissance qui se développe dans ces milieux dynamiques est très favorable à la promotion de ce mode de fonctionnement. Ainsi, non seulement les coûts de fonctionnement sont nettement inférieurs à

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    Première partie - Apprivoiser la connaissance

    ceux des communautés basées sur une organisation formelle et hiérarchique, mais elle crée en plus une valeur de connaissance potentiellement supérieure. En exemple, nous pouvons prendre le cas de l'entreprise qui réussissait à conserver ses clients avec des produits parfois plus défectueux que ses concurrents. Grâce à ses communautés d'experts, le client était accompagné, quelle que soit la situation. Ce dernier préférait alors être accompagné et avoir des produits moins performants que de bénéficier de meilleurs produits sans avoir la possibilité de les réparer. Par ailleurs, la confiance d'un client se gagne sur l'image qu'il se fait de l'ensemble de l'entreprise. Ainsi, s'il s'aperçoit que les services rendus pour une même prestation sont différents à deux endroits de la planète (cf. le cas de Schlumberger, entreprise pétrolière multinationale), alors la confiance avec le fournisseur sera dégradée. Aujourd'hui, le client veut à la fois avoir un accompagnement personnalité et uniformisé. Les communautés répondent pleinement à cet enjeu puisqu'elles permettent d'uniformiser un processus par sa modélisation, tout en accompagnant le client. Cependant, les communautés de savoirs tenus par les experts présentent des caractéristiques quelque peu différentes en vue du profil des experts. Chez Areva, il y a les communautés de métier, dont l'objet est de faire circuler les bonnes pratiques et les retours d'expériences. Elles se différencient des communautés technologiques qui ont pour objectif de partager sur les profits et la mise en oeuvre spécifique de technologie nouvelles. Et enfin il existe les communautés d'expertise dont l'objet est de partager, voire de modéliser la connaissance scientifique et technique.

    1.2.3.2. La différenciation avec les communautés d'experts

    Nous l'avons vu, l'expert se caractérise par la détention de connaissances dans un domaine précis dans l'objectif de répondre à une question ou une demande de création d'offres, de donner un avis. La connaissance détenue donne ainsi à l'expert la capacité de répondre à ses missions. Cette fonction influe alors sur le comportement des experts au sein de leurs communautés. Cela traduit une plus forte réglementation entre les membres des communautés d'experts (P. Chohendet, F. Créplet, O. Dupouët, 2006). Les procédures, les rôles et les « recrutements » implicites sont définis de façon plus stricte que dans les communautés de savoir classique. Les sentiments de cohésion sont parfois plus faibles et les interactions sont moins fréquentes et nombreuses. C'est la raison pour laquelle des coordinateurs ou des leaders sont appréciés dans ce type de communautés afin d'assurer la circulation de l'information et la mise en valeur de connaissances novatrices pour l'entreprise. Il y a donc en

    quelque sorte une institutionnalisation de ces communautés. En revanche, il est remarqué que les experts peuvent former des communautés sans pour autant travailler dans un même domaine de connaissance et sans se connaître particulièrement bien. Cela peut venir du statut d'expert particulier qui tend à l'isoler. Par réaction à cela, ce dernier se tourne vers d'autres experts pour former une communauté de façon spontanée. On observe alors un effet de groupe qui tend à faire converger les idées pour arriver à l'acceptation d'un consensus global. Il est alors intéressant de remarquer que la définition d'expert renvoie à l'appartenance à un groupe (Trépos, 1996).

    Cela montre que l'expert présente des caractéristiques différentes d'un collaborateur qui ne se situe pas dans ce type de carrière. L'approche du transfert des connaissances peut donc être sensiblement différente à son égard. Or, les enjeux pour cette population sont forts de par la rareté des connaissances qu'ils détiennent, de par leur capacité à influencer les décisions, à jouer un rôle dans la relation client, l'innovation et la résolution de problématiques parfois critiques. Les avantages concurrentiels que peuvent en retirer les entreprises pour se différencier sur un marché en plein rebond sont stratégiques aujourd'hui. Pour Areva en pleine restructuration occasionnant des départs d'experts, le transfert des connaissances est plus que jamais cruciale pour ses performances futures. Nous allons donc étudier en profondeur le système de transfert des connaissances chez les experts Areva afin de proposer des pistes de développement pour répondre aux enjeux du groupe.

    Deuxième partie - Le transfert des

    connaissances sous toutes ses formes

    Pour réaliser l'analyse du transfert de connaissances chez les experts au sein de l'entreprise Areva, il a été nécessaire de rechercher l'information au plus près de la population. Ainsi, une enquête auprès des experts a été menée sous la forme d'interviews.

    2.1. Protocole d'enquête

    2.1.1. Travail en amont

    2.1.1.1. L'interview et la socialisation

    Nous avons vu jusqu'à présent que le modèle le plus approprié pour transférer de la connaissance tacite était la socialisation. Or la socialisation se réalise soit par des échanges ponctuels sur une longue durée, soit par des échanges physiques, en profondeur, sur une courte durée, soit par des échanges longs sur une longue durée. Dans un objectif d'enquête, d'analyse d'un système, l'interview qui est caractérisée par des échanges longs sur une courte durée semble être le meilleur moyen de capter les connaissances à la fois explicites et tacites. C'est à ce titre que l'interview est utilisée notamment dans l'externalisation des connaissances pour la création de livres de connaissances par exemple. La méthode MASK utilise d'ailleurs prioritairement l'interview pour modéliser la connaissance. Ainsi, durant l'interview il est possible de s'imprégner de l'expérience d'une personne. Et c'est en effet, ce qui a été recherché durant les entretiens. Cela a permis de mettre en avant le fait que chaque personne se retrouve dans une situation unique avec un angle de vision qui peut être parfois très différent de celui d'une autre personne. Les propos doivent être remis dans leur contexte et il est nécessaire de comprendre qu'il s'agit de vision spécifique. Cependant, l'avantage est considérable, car il permet de creuser les problématiques rencontrées que les interviewés ont bien souvent en tête, mais qu'ils n'expriment pas nécessairement. Les systèmes, programmes, modes d'organisation, et modes de travail sont ainsi mieux décrits pour être mieux analysés. Cela permet aussi de faire avancer la réflexion en apportant aussi à l'interviewé des éléments de réponse et de construire durant l'entretien de potentielles solutions. Ainsi, les préconisations sont alors d'autant plus adaptées aux situations qu'elles sont formulées en cohérence avec le schéma de pensée du terrain. Certains interviewés ont plusieurs dizaines d'années d'ancienneté et connaissent parfaitement l'entreprise et les problématiques.

    L'interview est alors un excellent moyen de prendre connaissance de situations ancrées dans l'entreprise.

    2.1.1.2. Cibler la population

    La vente des activités Réacteurs et services à EDF va scinder profondément le groupe en deux entités totalement autonomes. Le monde de l'expertise qui fonctionne sur le mode des communautés et réseaux va donc voir les communautés se scinder en deux. Aujourd'hui, les experts sont situés dans l'ensemble du groupe et sont tous concernés par le transfert de connaissances. Cependant, afin de déterminer une population précise durant l'enquête, les interviews ont été menées exclusivement auprès de la population présente à la Direction Recherche & Développement du Corporate (fonction support). Les résultats des interviews montrent malgré cela que les problématiques touchent la totalité du groupe. Avec la création des deux entités, les préconisations qui seront réalisées dans ce mémoire porteront cependant exclusivement sur New Areva (New CO). En effet, les deux sociétés sont dès aujourd'hui soumises à des choix stratégiques différents. Analyser et proposer des préconisations pour une même population dont les directions sont différentes pourraient les rendre inadaptés à leur situation. Par ailleurs, l'enquête a été réalisée auprès de différents profils afin de réunir des informations de plusieurs points de vue. Au fur et à mesure de l'avancement de l'enquête, il est apparu nécessaire d'adapter le type d'interlocuteur. Les premières interviews ont en effet montré l'importance d'appuyer l'analyse sur des domaines devant faire l'objet d'attentions particulières comme celui des communautés de savoirs. C'est donc la raison pour laquelle, les populations interviewées ont été les suivantes : 6 experts (dont 3 étaient aussi directeurs ou anciens directeurs), 4 collaborateurs ou responsables (dont 1 sur l'innovation, 1 sur la gestion des connaissances, 1 responsable d'une communauté, 1 ancien expert et responsable dans le programme GapExpert que nous verrons par la suite). Enfin, 2 entretiens complémentaires ont été réalisés auprès de la même population afin d'approfondir des sujets nécessitant des éclaircissements.

    2.1.1.3. La rédaction du guide d'entretien

    Afin de recueillir un maximum d'informations permettant de construire une connaissance dans le domaine, il fut nécessaire de ne pas se restreindre à un mode de fonctionnement. Un guide d'entretien semi-directif (cf. Annexe 5 : Le guide d'entretien semi-directif p.102) a donc été réalisé afin qu'il permette d'atteindre deux objectifs : le premier était de répondre à des questions précises. En effet, le guide a été réalisé une fois que les premiers travaux de recherche exploratoire ont été réalisés. À ce moment-là venaient déjà des questions sur la place de certains acteurs ou le rôle des communautés d'experts par exemple. Il fut aussi nécessaire de cerner les enjeux, les différents acteurs ou encore les actions mises en place au sein de l'entreprise. Le deuxième objectif fut de conserver tout au long des entretiens une vision ouverte permettant d'être à l'écoute des expériences, des difficultés rencontrées par les collaborateurs, de la réussite des projets. Le guide se composait d'une première page d'informations à remplir pour une part avant l'entretien et pour une autre, au début de l'entretien (poste, missions du collaborateur, domaines de connaissances). Venaient ensuite trois chapitres principaux regroupant eux-mêmes trois questions. L'ensemble était donc constitué de 9 questions. Le premier visait à mieux connaître le système (processus) de transfert des connaissances chez Areva en essayant d'être le plus objectif possible. Le deuxième avait pour but de cerner les points forts et les points faibles, d'indiquer les évolutions nécessaires et/ou les changements à effectuer. Et enfin, le troisième portait sur des questions relatives à des propositions de solutions. Après plusieurs phases de rédaction et de vérification (tutrice, collègues de travail puis membre de la direction R&D et expert), les interviews ont pu démarrer.

    2.1.2. Les interviews et le débriefing : les difficultés rencontrées

    2.1.2.1. La réalisation des entretiens

    Comme nous l'avons vu précédemment, les connaissances tacites se transmettent par socialisation. Cela signifie que moins la distance entre deux individus est grande, plus le niveau de socialisation est élevé. Ainsi, 8 entretiens ont été menés en face à face avec les collaborateurs, les 3 autres ont été réalisés par écrit ou par téléphone. La durée des interviews était de 1h15 en moyenne avec une amplitude allant de 45 minutes à 2h. Cela dépendait de temps dont disposaient les interviewés ou du type des réponses qui étaient recherchées et

    apportées. Ils ont été réalisés dans le respect de l'anonymat et de la confidentialité des informations.

    Les entretiens ont été réalisés à partir du mois de juillet 2016 pour se terminer au début du mois d'octobre. Globalement, le guide d'entretien a permis de conserver une ligne directrice, un « fil rouge », durant les interviews. La multitude des acteurs, des enjeux, des processus de transfert de connaissances et la nécessité de garder le cap sans digresser, ont été les principales difficultés durant ces interviews. Le guide semi-directif a ainsi permis de retrouver le sujet principal sans pour autant casser la dynamique de l'entretien. Il fallait en effet capter un maximum d'informations de chaque personne, tout en vérifiant qu'il s'agissait bien du sujet de ce mémoire. En effet, les connaissances apportées par chacun des interviewés ont formé une base d'information importante. Cependant, il fallait les remettre constamment dans leurs contextes afin de retrouver le sens qu'elles portaient pour ce mémoire.

    Les prises de notes durant les entretiens ont d'abord été réalisées par ordinateur puis sur papier. En effet, l'écran s'est rapidement révélé être un élément gênant pour instaurer un climat propice aux échanges et à la convivialité nécessaire pour un partage de connaissances ouvert. Lors de certains entretiens, l'utilisation d'un enregistrement a été réalisée avec l'accord de la personne. Cela a permis de ne pas rester focalisé sur la prise de notes, mais plutôt sur l'écoute et l'échange.

    En plus des 12 interviews réalisées, 5 échanges informels d'au moins 20 minutes chacun ont aussi été réalisés auprès de collaborateurs différents. Ils ont permis de mieux cerner certains enjeux, de compléter certaines visions du sujet ou de mieux comprendre la globalité du sujet.

    2.1.2.2. Le débriefing

    À la suite de chaque entretien, il était nécessaire de revenir sur les éléments importants et sur certains détails afin de les retranscrire. La difficulté fut de savoir sur quel format les informations devaient être recueillies. Le format informatique permettait de conserver longuement l'information. Le risque de perte restait cependant présent. Le format papier était parfois le plus pratique dans certaines situations. La multiplicité des supports utilisés a donc rendu plus compliquée l'analyse des entretiens. Lors de l'analyse, il a fallu réunir les différents supports. Pour que le travail permette une vraie compréhension de l'ensemble tout en conservant les détails de l'enquête, toutes les informations des interviews ont été

    retranscrites dans un tableau Excel. Le travail d'analyse a enfin pu commencer. Chaque information a été classée suivant les différentes thématiques repérées durant les interviews (cf. Annexe 6 : L'analyse des entretiens : Extrait du tableau Excel. p.104). Cela a permis d'analyser les enquêtes de la façon la plus rigoureuse possible. Enfin, la très grande majorité des informations qui ont été retranscrites ont pu être exploitées dans ce mémoire.

    Par ailleurs, lors des enquêtes, des documents techniques faisant état des lieux de la gestion de l'expertise au sein d'Areva ont été analysés. Leurs contenus strictement confidentiels ne peuvent être divulgués dans ce mémoire, mais les conclusions des analyses permettent tout de même d'étayer les interviews.

    Ce qui est ressorti en premier lieu des entretiens et ce qui a été mis en place par Areva pour permettre le transfert des connaissances, fut la création de programmes divers que nous allons voir dès maintenant.

    2.2. Les programmes mis en place par Areva

    2.2.1. GapExpert : un programme pour les jeunes générations

    2.2.1.1. Former les futurs experts

    Depuis toujours, Areva a conscience que sa force et sa compétitivité passent par la maitrise de ses technologies ainsi que par la recherche d'innovation afin de se distinguer sur le marché du Nucléaire. Comme nous l'avons vu, les experts détiennent la connaissance. Ils l'enrichissent, la font circuler et participent ainsi activement à sa performance. Pour amortir le choc du « papy-boom », Areva a mis en place un programme en 2008 visant à former de jeunes ingénieurs, doctorants, appelés « GapExpert ». Du même nom, le programme a pour objectif de transformer ces jeunes ingénieurs, ou doctorants, en de futurs experts par une expérience terrain. Ce programme est alors « sponsorisé » par la Direction Recherche & Développement (DRD) du Corporate localisée au siège, qui prend alors en charge financièrement les salaires pour une durée de trois ans. Le responsable hiérarchique de ces jeunes ingénieurs est situé au siège et appartient à la DRD. Leur tuteur est alors un manager de l'unité, basé en région. Ce programme a pu aussi servir dans le cadre de la recherche et du développement de nouveaux domaines de connaissances ou de nouveaux projets chez Areva. Pour résumer la situation, à la page suivante, un schéma aide à mieux comprendre son fonctionnement.

    Figure 4 : Schéma du fonctionnement du programme GapExpert

    Comme nous le voyons dans le schéma ci-contre,

    l'unité (de production) est largement bénéficiaire de ce

    programme. Elle ne

    supporte peu ou pas les coûts financiers. Cependant

    elle a comme objectif de former le GapExpert. Il est donc à sa charge de le faire monter en compétence. Au fur et à mesure de ces trois années, celui-ci acquiert ainsi le savoir-faire et les connaissances dans un ou plusieurs domaines de l'unité. À la fin de cette période, il intègre l'unité pour y travailler à temps complet et continuer à monter en compétences et à acquérir des connaissances. Selon son niveau, il pourra par la suite prétendre à une carrière d'expert. Le transfert de connaissances est donc ici réalisé grâce au tutorat. L'expérience est d'autant plus intéressante qu'il s'agit d'être formé avec les connaissances du terrain. Ainsi, la majorité des connaissances explicites et implicites sont transmises. Cela permet à la société non seulement de conserver ses connaissances, mais de se donner aussi les capacités de les développer pendant de longues années à venir. Toute la carrière de l'expert peut ainsi être pleinement profitable à l'entreprise.

    2.2.1.2. Un avenir prometteur

    Pour des raisons majoritairement financières, ce programme a été arrêté en 2014. Aujourd'hui il est en phase d'être reconduit. Rien d'étonnant, car la majorité des personnes interviewées ont une bonne vision de ce programme. Pour eux, il s'agit d'une réussite. Ainsi, avec le seul soutien de la DRD, 75 jeunes ont été formés en 6 ans ce qui représente plus de 10 personnes formées par année uniquement grâce au programme. La DRD a ainsi contribué à une partie du renouvellement de l'expertise Areva. Au début de l'année 2015, c'est-à-dire après l'arrêt du programme, 7 jeunes étaient devenus « spécialistes », c'est-à-dire, en phase de devenir de nouveaux experts, 14 d'entre eux étaient déjà experts et 1 « expert sénior ». Pour une unité au sein d'Areva nommée « HRP », 6 GapExperts ont été formés et aujourd'hui 3 d'entre eux sont expert niveau 1. Cela signifie que moins de 4 ans après la sortie du programme (qui dure 3

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    Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous toutes ses formes

    ans), 22 anciens GapExperts sont aujourd'hui dans la filière « expert » du groupe Areva. D'autres finalisent leurs parcours et d'autres encore sont en passe de devenir des experts.

    Cependant, certaines difficultés ont tout de même été rencontrées. Elles sont à la fois liées à la mission de tutorat, mais aussi à la place que tient ou a pu tenir le jeune ingénieur. En effet, les entretiens de performance et de développement (nommé « PDA » chez Areva) étaient menés par le tuteur de l'unité en région. Il était donc difficile pour le responsable hiérarchique, basé au siège, d'être présent lors de l'entretien. Les collaborations tuteur / responsable et GapExpert / responsable, ont donc été impactées principalement par la distance géographique. Certains responsables ont néanmoins décidé de collaborer avec les tuteurs en amont des entretiens PDA. Par ailleurs, les responsables ou tuteurs n'étaient pas nécessairement des experts. Ainsi, alors que le programme va être relancé, certains directeurs et managers émettent l'idée que le responsable hiérarchique puisse être un expert afin de faciliter à la fois la collaboration et le transfert de connaissances. L'idée de permettre au GapExpert de travailler à la fois sur des sujets académiques et techniques auprès des unités est aussi remontée. L'objectif serait ainsi de faire progresser plus rapidement les futurs experts dans leur domaine de connaissance.

    Par ailleurs, les GapExperts participaient à des programmes de formations spécifiques comme celui du cycle du combustible nucléaire, de la propriété intellectuelle ou de la gestion de sl'innovation. Ils participaient aussi à des conférences techniques leur permettant de mettre un pied dans le monde de l'expertise. Pour certains, ces mesures ont alors survalorisé ces collaborateurs. Un problème d'équité s'est alors posé entre les experts, qui avaient parfois des difficultés à dégager du temps et des moyens pour cela, et les GapExperts, encore jeunes ingénieurs ou doctorants.

    Néanmoins, ce programme est une réussite dans sa globalité, les volontés de le relancer en sont un bon indicateur. Quelques mesures pourront alors être prises afin de permettre à chacun de prendre une place encore plus juste dans ce processus de formation et de transfert des connaissances.

    Toujours en direction des jeunes, l'entreprise développe aujourd'hui des partenariats visant à créer une émulation intellectuelle dans les domaines du nucléaire. Ainsi, Areva a mis en place le mécénat en direction de thèse ou de chaire.

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    2.2.2. L'arrivée des nouvelles générations

    2.2.2.1. Le mécénat des chairs

    Depuis que la très renommée Business School ESSEC a créé la première chaire d'entreprise en 1986, le système de partenariat entre l'enseignement et l'entreprise n'a cessé de croitre. Il permet en effet de développer à la fois des expertises d'enseignements pour les écoles et les universités, tout en faisant avancer les recherches scientifiques profitables aux entreprises. Areva a alors de multiples avantages à développer de telles relations. Une chaire peut se résumer en la conclusion d'un contrat de financement entre une école ou une université, un laboratoire de recherche et une entreprise. Le concept est le suivant : une ou plusieurs entreprises financent un programme de recherche d'une école ou d'une université, en lien avec un laboratoire sur un sujet qui les intéressent. Cela permet aux entreprises de faire avancer les connaissances dans un domaine qui peut leur être stratégique tout en favorisant la création d'un vivier de futurs experts. Les chaires sont composées de professeurs généralement connus dans leurs domaines, de doctorants et/ou d'ingénieurs. Les recherches sont réalisées sur des sujets pointus et spécifiques. Les partenaires de la chaire bénéficient alors des avancées scientifiques qui auront été réalisées. Les avantages sont donc nombreux : avancées réalisées dans les domaines scientifiques intéressés, formation de doctorants qui deviennent de potentiels candidats ou encore mise en relation de problématiques industrielles avec le monde académique. Cependant, ce système a un coût. Celui-ci monte parfois à plusieurs centaines de milliers d'euros qu'il est important de nuancer grâce à l'exonération d'impôt à 60%, car il s'agit bien d'un don réalisé aux écoles. Ce système permet donc aux entreprises de découvrir de nouvelles connaissances de façon ponctuelle à l'aide de coûts maitrisés et budgétés. Cependant, les jeunes formés peuvent aussi partir à la concurrence, et les résultats ne sont pas exclusivement partagés avec les partenaires. Ils prennent d'ailleurs la forme d'une revue de littérature académique et professionnelle. Pour certains résultats de chaire, une conférence internationale est organisée. Jusqu'à aujourd'hui, Areva a réalisé plusieurs mécénats de thèse et en réalise encore aujourd'hui. En effet, les missions de l'expert sont donc claires à ce sujet puis la fiche « Expert model » mentionne explicitement les missions de relations avec les universités, les instituts ou les laboratoires. L'enseignement dans les écoles et l'établissement de liens étroits avec des laboratoires de recherche sont ainsi au programme.

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    Ce système de recherche permet donc de transférer de la connaissance de l'externe vers l'interne et les résultats restent disponibles, quelle que soit la situation et à tout moment, même après le départ d'un expert. De plus, le recrutement en cas de besoin de l'ex-doctorant peut se révéler être une excellente opération pour l'entreprise. Areva peut aussi marquer, à travers ce dispositif, sa présence dans des domaines de connaissances pointus. Ainsi, elle montre la maitrise qu'elle possède dans ces domaines ce qui a pour effet d'attirer à la fois de potentiels candidats plus éloignés, mais aussi des clients. Cela peut donc aussi être vu en quelque sorte comme un outil de mise en valeur de ses connaissances.

    Nous voyons donc ici qu'à travers ce système, le transfert de connaissances ne se réalise pas toujours qu'en interne. Il existe aussi d'autres possibilités qu'Areva utilise aujourd'hui. Il s'agit des contrats CIFRE.

    2.2.2.2. Les contrats CIFRE

    Via le dispositif CIFRE (Convention Industrielle de Formation par la Recherche) géré par l'ANRT (Association Nationale de la Recherche et de la Technologie), il est possible pour une entreprise de recruter en CDI ou en CDD, un diplômé de niveau M (doctorat) à qui elle confie une mission de recherche stratégique pour son développement économique. Le salarié-doctorant réalise alors en partenariat avec un laboratoire, des travaux de recherche qui conduiront à la soutenance d'une thèse. Ce qui permet à ce dernier de bénéficier d'une formation tant professionnelle qu'académique. Ces travaux peuvent être réalisés dans tous les domaines de recherche souhaités par l'entreprise. Cependant, la CIFRE doit être validée par un comité d'évaluation qui statue en fonction des expertises réalisées par le DRRT (délégué régional à la recherche et à la technologie) sur les conditions suivantes : « la santé financière de l'entreprise, son implication effective sur le domaine d'expertise, sa capacité à donner une formation « professionnalisante » au candidat ». Le DRRT évaluera aussi « la pertinence du partenariat avec la formation doctorale »45. Ainsi, le jeune doit pouvoir justifier à la fin de sa thèse d'une réelle expérience professionnelle de recherche et la valoriser. L'entreprise est alors subventionnée par l'État sous deux formes. La première subvention est constituée d'un

    45 ANRT - Association Nationale de la Recherche et de la Technologie, CIFRE - Définition, mode d'emploi, [en ligne], consulté le 6 septembre 2016, URL : http://www.anrt.asso.fr/fr/espace_cifre/mode_emploi.jsp?p=40# .WA0CtcnS7K0

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    versement direct de 14 000€ par année, la deuxième est réalisée par la possibilité d'être subventionné par le Crédit Impôt Recherche (CIR) à hauteur d'au moins 10 595 € par année. Enfin, si le doctorant est embauché, son salaire est éligible pour deux ans au CIR. Hormis l'aspect financier, les avantages de ce dispositif peuvent être d'ordre plus stratégique encore. En effet, sous certaines conditions préalablement justifiées par l'entreprise, il est possible pour elle de bénéficier de licence d'exploitation des résultats de la thèse, du droit au brevet déposé, du droit à la confidentialité des informations. Tout ceci est cependant très règlementé et impose une justification stricte des droits. Jusqu'à présent, Areva a pu faire appel à de nombreuses CIFRE pour le développement et le transfert de ses connaissances. Ainsi, en 2014 Areva a fait appel à 131 étudiants doctorants. En effet, les experts ont la possibilité de demander la mise en place d'une CIFRE et de tutorer le jeune. Par cette méthode, ils peuvent à la fois transmettre et créer de la connaissance en collaboration avec le doctorant. Le tutorat se fait alors uniquement en binôme. Une fois de plus, le dispositif montre que l'environnement de l'entreprise peut être un formidable moyen d'acquisition de connaissances. Cependant, il n'y a aujourd'hui pas de vue globale de ce dispositif au sein d'Areva. Peu ou pas de consolidation des données à ce sujet n'a été recensé durant l'enquête. Il semble alors assez difficile d'observer une transversalité de l'information. Chaque unité peut faire appel à ces contrats occasionnant ainsi l'existence de risques de sujets doubles, identiques ou proches. En consolidant les informations, Areva gagnerait à une meilleure gestion et attribution de ses ressources.

    2.2.2.3. Le tutorat chez Areva

    Que cela se fasse avec des stagiaires, avec le programme GapExpert ou la CIFRE, les possibilités de tutorat par des experts sont nombreuses. Nous avons pu voir jusqu'à présent que le programme GapExpert avait permis la formation de plusieurs experts à ce jour et qu'il s'agissait donc d'un programme efficace. Le dispositif CIFRE suivi par un expert Areva permet de déboucher sur des licences, des brevets ou plus simplement, sur l'accès aux résultats de thèses accessibles et donc potentiellement profitables à Areva. Le groupe fait aussi régulièrement appel à des stagiaires. Outre l'aspect financier intéressant, ce dispositif est pour certains experts Areva, un « bon moyen de recruter des ingénieurs », notamment lorsqu'il s'agit de stage de fin d'études. Pour un expert Areva, tuteur d'un stagiaire de 6 mois (durée maximum), 4 phases de formations sont distinguées : La première consiste en

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    l'explicitation (« le débroussaillage ») du problème, la deuxième en la formation aux logiciels, aux modes de calcul. Puis les travaux de recherche sont effectués afin de déboucher sur un rapport. Enfin, le rapport est soutenu par le jeune dans sa formation et les travaux peuvent être exploités. C'est donc un dispositif de formation qui débouche sur de nouvelles thématiques de scientifiques et qui fait donc avancer la recherche. En effet, pour plusieurs experts, il s'agit de développer un sujet académique qui présente plusieurs avantages : sa formation aura permis à la fois de faciliter son recrutement et son intégration (s'il y a lieu) et en même temps, de lui apporter de la connaissance tacite et explicite. En revanche, en cas de recrutement en CDI ou CDD, les connaissances transmises devront être complétées. Dans le cas où le stagiaire ne serait pas embauché, les travaux de ce dernier sont conservés par le tuteur (ici un expert) sous format papier. Areva conserve ainsi les recherches et leur exploitation est possible. Dans ce cadre, un expert Areva interviewé a pu former plus de 35 stagiaires. 10 d'entre eux ont été embauchés par la suite. Cependant, les embauches se font rarement sur les domaines de recherche étudiés durant le stage.

    D'une manière plus générale, le choix d'Areva de faire appel aux jeunes est inscrit dans la fiche « Expert model ». Ainsi, dans un objectif de transfert de connaissances le recours au mentorat, au tutorat et à la supervision sur une période relativement longue est encouragé. Les experts « sénior » et « fellow » doivent ainsi pouvoir dégager du temps pour former leurs « jeunes collègues » à hauteur de 3 à 5 personnes par expert. La fiche « Expert model » précise que les missions de transfert de connaissances doivent pouvoir être réalisées en dégageant du temps à cet effet. Cependant, comme le remonte l'enquête, la difficulté est justement liée à une problématique de disponibilité.

    Cette fiche mentionne aussi la possibilité d'utiliser le dispositif « Experconnect » pour tous les experts de niveau 2 ou 3 qui ont atteint l'âge de départ à la retraite.

    2.2.3. Un dispositif spécifique pour les experts à la retraite

    2.2.3.1. « Experconnect » : ou mettre en relation l'expertise et

    l'entreprise

    « Experconnect » est une société de mise à disposition de personnels scientifiques et techniques de haut niveau provenant de retraités experts dans leur domaine. Son ambition est de devenir une plate-forme d'échange de compétences par filière. Ainsi, depuis 6 ans environ,

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    lorsqu'un expert part à la retraite, il a la possibilité de mettre ses connaissances et l'ensemble de son savoir à disposition d'Areva. Il peut s'agir de rédactions de documents, d'articles, de supports techniques sur un domaine d'expertise en particulier, de participations à des conférences ou encore de transferts de connaissances. L'expert doit pour cela créer une société d'autoentrepreneur (ou une SAS) à son nom. Experconnect est chargée d'établir un contrat de prestation entre l'expert et Areva. Elle s'occupe alors des formalités administratives (sociales, juridiques, fiscales). Ce service a l'avantage de garantir la propriété intellectuelle au sein de l'entreprise et de garantir l'entreprise face à d'éventuelles poursuites judiciaires de l'expert. Le processus est simple et aucune formalité spécifique n'est à réaliser pour les deux parties. Il doit ainsi permettre à Areva de pallier en cas de besoin à un manque d'expertise. Cela peut ainsi être un bon moyen de réaliser que la connaissance est cruciale, au point d'avoir à faire appel aux services de ce type de société. Cas en effet, rappeler un expert à la retraite montre combien ses services et ses connaissances sont utiles à l'entreprise.

    2.2.3.2. La vision terrain du dispositif

    Dans l'enquête, il ressort cependant que le dispositif est utilisé à des fins quelque peu différentes. Ainsi, pour certains, ce dispositif permet de continuer la transmission de ses activités aux unités, de piloter les sorties de projets, d'effectuer des rapports dans un objectif de capitalisation et de transmission de connaissances ou plus généralement de gérer la fin d'affaire en recherche & développement. Toutes ces actions se résument alors en la gestion de transfert d'activités et montre que parfois, le passage d'un expert à la retraite peut se révéler plus compliqué qu'il n'y parait. Bien des services réalisés à ce titre pourraient alors être effectués en amont au sein d'Areva. Et les coûts peuvent rapidement grimper. En effet, les services d'Experconnect sont facturés à hauteur du dernier salaire de l'expert, majoré de 20 à 30%. Ainsi, il n'est pas rare que les prestations soient facturées plusieurs dizaines de milliers d'euros pour les services d'un expert sans que des retours sur investissements ne soient calculés. En effet, ces commissions sont payées par Areva pour une durée de 3 ans après le départ à la retraite. La difficulté à connaître les coûts globaux de ces services semble montrer qu'il n'existe pas à ce jour de consolidation des informations à ce sujet. L'enquête met aussi en avant la difficulté des experts à « sortir de leur métier » lors de l'arrivée à la retraite. Après de nombreuses années engagées dans un domaine de connaissance au service d'une entreprise, l'arrivée de la retraite peut parfois être difficile à gérer. Ce phénomène observé

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    plus particulièrement auprès de populations ayant un haut niveau de connaissance semble logique. En effet, l'attachement au travail qui peut naître d'un fort investissement de ces populations dans leur travail rend plus difficile le détachement du monde de l'entreprise.

    Ainsi, l'existence d'un tel dispositif montre deux actions qu'Areva pourrait mettre en place. Il s'agirait d'anticiper plusieurs années auparavant le départ à la retraite de l'expert d'un point de vue métier, transfert des activités et transfert des connaissances. Dans un deuxième temps, il s'agirait de préparer l'expert à quitter le mode de fonctionnement qu'il a pu avoir pendant des dizaines d'années.

    En conclusion, nous voyons ici que les programmes et dispositifs au sein d'Areva sont divers et variés. Il ne semble pas exister de centralisation de l'information ce qui est parfois vu comme la capacité des unités à s'adapter aux situations rencontrées. Globalement les projets mis en place sont plutôt indépendants. Cela montre que des initiatives variées sont lancées en termes de transferts des connaissances sans pour autant faire l'objet d'une stratégie au niveau groupe. Les initiatives sont laissées principalement aux unités. Nous allons donc voir que dans le prolongement de cette logique, il existe d'autres initiatives à un niveau plus individuel cette fois-ci.

    2.3. Des initiatives individuelles de transfert de connaissances

    2.3.1. Les transferts ponctuels

    Chez Areva, la filière « expert » est chargée d'établir une stratégie globale et centralisée autour de la gestion de la connaissance. Cependant, elle demande aujourd'hui à être développée. Nous avons vu qu'il existe des programmes, des dispositifs qui sont impulsés soit par les unités elles-mêmes (CIFRE, mécénat) soit par la DRD au Corporate (GapExpert). Avec Experconnect, les experts ont la possibilité de transférer de la connaissance. Ce dernier dispositif permet de pallier de potentiels manques de transferts de connaissances, d'activités, d'arrêts de projets, etc... D'autres pratiques au sein d'Areva permettent cependant de transférer des connaissances ponctuellement, pour des raisons précises. Chaque unité met ainsi en place ses propres processus, sa propre capitalisation des connaissances, son propre système de transfert. Chaque individu peut aussi mettre en place des pratiques plus ou moins complexes et que chacun adapte à sa situation.

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    2.3.1.1. Les différentes façons de transférer de la connaissance

    Dans cette enquête, trois types de pratiques ont été identifiées. Le premier est appelé « succession planning », qui se traduit simplement par « planning de succession ». Elle consiste en la planification d'actions en coopération avec le manager, visant à « externaliser » ou mettre à disposition ses connaissances. Cela peut se faire grâce à la transmission ou au stockage de documents, à la mise à jour d'une base documentaire ou encore à la réalisation et la mise en ligne de cours sur des sujets de connaissances. Une fois de plus, ces actions sont réalisées sans coordination avec le reste du groupe Areva. Il est alors parfois difficile d'identifier les actions à réaliser puisque les experts comme les managers n'ont pas de vision globale. Ils ne savent donc pas toujours s'il est nécessaire de transmettre la connaissance, si une autre personne détient cette connaissance dans le groupe et à qui la transmettre. Ainsi, il est régulièrement décidé que seules les connaissances immédiatement utiles soient transférées. On remarque assez aisément que le temps investi et les actions réalisées dépendent principalement de l'intérêt qu'ont les acteurs (expert et manager) à transférer une connaissance. S'il s'agit de faciliter une prise de poste, des actions seront entreprises en ce sens, si aucun enjeu direct n'est identifié alors les connaissances auront moins d'intérêt à être transférées. Cette méthode n'aboutit donc pas toujours.

    Avec les experts Areva, le système de tutorat pour un recrutement fonctionne particulièrement bien. Cependant, il est nécessaire de distinguer le tutorat dans le cadre d'une passation et dans le cadre d'une formation, de l'accompagnement et dans le développement de l'expertise d'un collaborateur. Dans le cadre de la passation, il s'agit d'intégrer le successeur de l'expert avant le départ de ce dernier. Malgré cela, l'objectif peut être commun. Car il s'agit de transférer ses connaissances au successeur en l'accompagnant tout au long de son intégration. Cela passe par le transfert de dossiers, de documents, de savoir-faire, par des conseils afin de mieux appréhender un sujet. Lors du programme GapExpert, les jeunes étaient accompagnés par un tuteur qui jouait aussi le rôle de formateur, de mentor. L'avantage principal de cette pratique et que le transfert est complet (cf. Nonaka & Takeuchi). L'expert se socialise avec son successeur. Les connaissances tacites sont ainsi transmises. Il produit des documents, externalisant ainsi sa connaissance qui est ainsi transmise et internalisée par son successeur. Étant complet, ce programme est globalement apprécié par la sphère des experts, c'est pour eux, un des meilleurs moyens de transférer de la connaissance. Dans le cadre d'un recrutement, l'investissement se calcule sur le nombre de semaines ou mois indexés sur le salaire du tutoré. C'est un avantage qui peut devenir un inconvénient. En effet, la qualité du

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    transfert de connaissances dépend de sa durée. Or d'un point de vue financier, les managers auront plutôt tendance à vouloir réaliser des économies. Suivant l'enjeu du transfert pour le manager, la durée sera ainsi plus ou moins longue. Cependant, afin de réaliser le tutorat, tout comme le « succession planning », il est important de déterminer les actions de chacun.

    2.3.1.2. Chaque acteur joue un rôle particulier

    Les rôles sont tenus par un ou deux experts qui transfèrent leurs connaissances de façon directe (par socialisation) ou indirecte (par le transfert d'une base documentaire essentiellement). Cependant, quelle que soit la situation, d'autres acteurs peuvent entrer en jeu. Par exemple la planification d'actions pour le transfert de connaissances lors d'un recrutement est réalisée avec le manager. L'expert et le manager s'entendent sur une série de tâches nécessaires avant le départ à venir. Pour le manager, cela demande d'accompagner l'expert et pour ce dernier de réaliser ces tâches, ce qui prend du temps. Cependant, sur le terrain, par manque de temps et de moyens, ces actions ne sont pas toujours réalisées, voire planifiées. En ce qui concerne le système de tutorat, deux acteurs doivent s'entendre auparavant : il s'agit du département des Ressources Humaines qui intervient sur le processus de mobilité d'un point de vue administratif et des managers qui prennent la décision d'intégrer ou non le nouveau collaborateur avant la date de départ de l'expert. Ainsi, soit le manager et l'expert font part aux RH d'un projet de départ, soit les RH effectuent une veille sur leur population et alerte le manager et l'expert d'un potentiel départ. Sur le terrain, les situations sont là aussi très différentes. Il n'y a pas de règle et chaque unité étant indépendante sur ce sujet, il n'est pas possible de faire ressortir un état des lieux à la fois précis et global. De plus, il n'existe à ce jour aucune personne qui soit chargée de vérifier le bon transfert des documents, fichiers informatiques ou connaissances lors des mouvements de personnels. Ainsi les RH effectuent le processus de mobilité sans pour autant être engagées sur cette question de transfert de connaissances. Les managers mettent en place ce système selon les ressources et le temps dont ils disposent. Aujourd'hui, comme partout ailleurs, le manager est en demande de ressources de tous types, dont le temps. Une posture proactive, de coopération entre RH et manager permettrait de mieux gérer les ressources afin de réaliser ce transfert de façon optimale. Prévenir les parties prenantes d'une mobilité (interne ou externe) devient alors un enjeu qui peut se révéler important. Pour cela, il est nécessaire que les acteurs puissent se coordonner et prévoir plusieurs mois, voire années, pour la mobilité des experts.

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    Cette coopération entre RH et manager devient alors le point central pour la réalisation d'un transfert efficace de connaissances. En effet, plus le transfert est réalisé en amont, plus il pourra passer d'un « succession planning » à ce que l'on peut nommer un « proactive planning » et plus le système de tutorat pourra être efficace. En outre, il est nécessaire de mettre en place un système d'incitation pour les managers et experts, car chaque acteur doit y trouver un intérêt personnel afin que le système fonctionne au mieux et sur du long terme.

    Tous ces systèmes de transfert de connaissances que nous avons vus jusqu'à présent sont la résultante d'actions coordonnées entre plusieurs acteurs et non uniquement de l'expert. Nous avons pu identifier les difficultés rencontrées, ce qui nous permettra d'apporter des éléments de réponses. En prenant un regard différent, nous voyons que l'expert a d'autres moyens de transférer ses connaissances tout au long de sa carrière. Ce transfert est alors réalisé de façon plus ou moins intense selon son niveau d'expertise, son réseau, son domaine d'activité et sa personnalité. Ainsi, plus le niveau d'expertise est élevé, plus il sera amené à exporter ses connaissances en interne comme en externe.

    2.3.2. Les moyens de partage de connaissance dans la carrière de l'expert

    En matière de transfert de connaissances, Areva a mis en place un moyen permettant de réaliser des formations en interne.

    2.3.2.1. Créer des cours

    Ainsi, les experts peuvent réaliser des cours à destination d'ingénieurs ou pour d'autres experts au sein du groupe. Cela a l'avantage de transmettre de façon explicite des connaissances à un plus grand nombre de personnes. Les capacités d'externalisation et d'internalisation de connaissances des experts sont alors fortement mises à contribution. Cependant, ce support est utilisé de façon très ponctuelle pour diverses raisons. Pour réaliser un cours, il est nécessaire de connaître ses interlocuteurs, il doit y avoir un besoin, une demande. Cette règle vaut pour tout transfert de connaissances. S'il n'y a pas de demande ni de besoin, soit aucun transfert n'a lieu, soit le processus n'est pas conservé. Par ailleurs, cela ne peut se faire sans investissement, soit sous la forme du temps passé à réaliser les cours soit sous la forme d'un support (outil d'enregistrement, support documentaire, plate-forme informatique). Ce dernier doit alors être en cohérence avec les besoins. L'expert doit saisir

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    pleinement les tenants et aboutissants de l'opération. Une coopération entre les différentes parties prenantes est donc une nouvelle fois nécessaire.

    Les cours sont ainsi une bonne méthode de transfert de connaissances. Cependant, peu d'experts en réalisent, car ils sont très spécifiques. Il existe alors un autre moyen de transférer des connaissances, plus largement ouvert à la communauté scientifique.

    2.3.2.2. Les documents de synthèse

    Durant leurs travaux de recherche ou lorsque les résultats souhaités ont été obtenus, certains experts prennent la décision d'écrire des documents de synthèse. Ils permettent de récapituler la démarche, les calculs, les outils utilisés, les méthodes employées et enfin les résultats d'une ou plusieurs recherches. Ils permettent aussi à un expert de clôturer sa carrière d'expertise. Le nombre de pages dépend du contexte et de l'objectif du document qui peut faire plusieurs centaines de pages notamment lors du départ à la retraite d'un expert. L'objectif est de pouvoir mieux capitaliser les connaissances et ainsi de pouvoir les développer plus aisément par la suite. Cette réalisation dépend principalement du mode de fonctionnement des experts et de leur niveau d'expertise. Plus il sera élevé, plus la réalisation de tels documents sera opportune à des fins de partage. Ils peuvent d'ailleurs aider l'expert à réaliser plus tard des cours, des conférences et des articles qui participent à la circulation des connaissances explicites au sein de l'entreprise. Cette méthode est relativement répandue puisqu'elle ne demande pas de moyen particulier ni de coopération obligatoire avec d'autres acteurs. Cependant, plus le document est conséquent, plus il sera important d'effectuer des relectures pour s'assurer que le contenu est non seulement compréhensible, mais aussi exploitable.

    De plus, la démarche devra être soutenue grâce à des outils d'hypertexte46 afin d'améliorer les capacités de ces documents à transmettre de la connaissance de façon efficace. Par ailleurs, il est important pour tous les documents que l'expert indique scrupuleusement les sources des informations données, ce qui permet alors de revenir sur certaines notions non maitrisées. Ces notions sont fondamentales, car si elles font défaut, le document sera inexploitable et tous les jours de travail passés à sa réalisation seront perdus. Par ailleurs, le stockage de ces

    46 Dictionnaire Larousse : Technique ou système permettant, dans une base documentaire de textes, de passer d'un document à un autre selon des chemins préétablis ou élaborés lors de la consultation, [en ligne], consulté le 3 octobre 2016, URL : http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/hypertexte/41106

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    documents est aussi une question importante, car il définira son accessibilité au sein de l'entreprise. D'après les experts Areva, il est crucial de faire en sorte que les connaissances soient disponibles en interne pour ainsi limiter les investissements. En effet, un simple abonnement à une revue scientifique peut coûter 200k€. La gestion documentaire est donc importante. Il existe à ce jour des plates-formes de type SharePoint pour stocker les documents. Cependant, leur utilisation n'est pas toujours optimisée en vue des capacités du logiciel. La qualité des méthodes de classement des documents et des plates-formes pourra alors déterminer une partie de la valeur du document. En effet, un document qui n'est pas consulté est un document qui n'a potentiellement pas de valeur au moment présent. Cela demande aussi du temps pour le réaliser, ce que n'a pas toujours l'expert.

    2.3.2.3. Organiser des conférences

    La sphère scientifique a régulièrement recours aux conférences pour présenter les résultats des travaux de recherche. C'est sur ce principe que les thèses sont soutenues en public ou que les résultats des chaires sont publiés dans les revues scientifiques. Il en va de même pour les experts appartenant au monde de la science et de la technique. Les experts de niveau 3 (Fellow) participent à des conférences tant nationales qu'internationales ou les organisent en relation avec des entreprises et organismes reconnus. Par exemple, un expert Areva peut participer à une conférence avec l'AIEA ou l'ASN où il va côtoyer des membres d'EDF et de nombreuses autres multinationales. Bien entendu, ce type de rencontres ne va pas nécessairement permettre à l'expert de découvrir un nouveau mode de calcul pour ses recherches. Cependant, elles lui permettront d'enrichir son réseau professionnel tout en lui ouvrant des axes de recherches ou des enjeux sur certains domaines scientifiques. Cela peut être l'occasion de découvrir de nouvelles technologies et d'ouvrir un nouveau champ de réflexion lui permettant de capter des connaissances directement applicables dans son domaine scientifique. C'est ainsi à ce titre que la reconnaissance par les pairs, inclue dans la définition même de l'expert, prend forme. Le transfert de connaissances est ici basé sur une connaissance plus tacite qu'explicite. Il se réalise sur un plan transverse, avec ses pairs, et les conférences participent à la création d'un réseau d'experts.

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    2.3.2.4. Rédiger des articles scientifiques

    Enfin, selon son niveau, l'expert écrit plusieurs fois dans sa carrière des articles scientifiques avec plusieurs objectifs. Le premier est de participer à la création d'un savoir et à la capitalisation de connaissances tant internes qu'externes à l'entreprise. Il s'agit de conserver les traces des travaux réalisés. Il s'agit aussi de faire connaître ses recherches auprès de ses pairs. En effet, conformément à la définition d'un expert, ce dernier recherche l'approbation, la reconnaissance de ses pairs sur le résultat de ses travaux. C'est en effet ce qui lui permettra de « dire vrai », d'avoir un poids, de montrer la maitrise de son sujet. Ces articles peuvent être publiés soit en interne, soit en externe, car selon le niveau de l'expert, la reconnaissance doit se faire aussi à l'international. Par ailleurs, les publications sont aussi réalisées à plusieurs. En effet, les sujets d'expertises sont « multi-physiques », « multi-métiers » d'après les experts interviewés. Les domaines étant aussi très pointus, il est nécessaire de faire appel à son réseau. Il est alors fréquent que les experts publient leurs travaux sur internet grâce à des sites professionnels destinés aux scientifiques comme le désormais renommé « Research Gate »47. Chez Areva, des réseaux formels et informels se sont développés comme nous allons le voir dès maintenant.

    2.4. Le transfert collectif de connaissances

    2.4.1. L'identification des connaissances critiques

    2.4.1.1. L'état actuel des domaines de connaissances chez Areva

    Avec la mise en place de l'expertise et des carrières d'experts, les connaissances ont été regroupées par domaines et sous-domaines. Ainsi, une vue globale et un état des lieux sont devenus possibles. Leur identification est aussi un repère pour les groupes, les réseaux et les communautés d'experts. C'est un préalable indispensable à la structuration de l'expertise au sein d'une entreprise. Ainsi, pour l'ensemble du groupe Areva, 14 grands domaines et 100 sous-domaines d'expertises scientifiques et techniques ont été identifiés pour la dernière campagne de nomination des experts. Deux autres domaines spécifiques ont été identifiés regroupant à eux deux 20 sous-domaines. Suite à cela, le directeur scientifique Areva et le

    47 Ce site créé en 2008 est un de plus importants réseaux de scientifiques, en libre accès avec plus de 100 millions de publications et 11 millions de chercheurs inscrits. Ce site permet alors la mise en relation des experts partout à travers le monde.

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    responsable de la gestion des connaissances, appuyé par le collège des fellows et les experts séniors ont effectué une analyse précise de l'état des recherches scientifiques, des nouvelles offres et activités quotidiennes de chacun des domaines au sein d'Areva. Pour chacune d'elles une analyse a été effectuée sur les niveaux d'expertise suivant trois critères : le niveau d'impact pour Areva, les exigences actuelles des autorités de sûreté et les exigences futures. À noter que chez EDF, l'identification des connaissances se fait par l'expert lui-même tous les trois ans lorsque la mission de l'expert est « questionnée », mais aussi tous les ans lorsque la « Revue de compétences » a lieu à la R&D48. Pour Areva, cela se fait tous les deux ans. Pour chaque domaine de connaissances, Areva peut identifier les éventuelles actions à réaliser afin de répondre aux enjeux stratégiques qui s'imposent à elle (être en adéquation avec les attentes des organisations types clients et autorités de sûreté). Hormis l'aspect stratégique d'une connaissance pour l'entreprise, cette dernière devient « critique » par le niveau de maitrise et le nombre d'experts détenant cette connaissance. Ainsi, moins il y a aura d'experts sur une connaissance stratégique, plus elle sera en capacité d'être perdue. Il est donc important de s'intéresser à la population des experts présents sur chaque domaine d'expertise.

    2.4.1.1. Identifier la population des experts

    Sur le courant de l'année 2015, 180 « Experts clés »49 ont été identifiés permettant un état des lieux et la mise en relief de certains domaines en difficulté. Ainsi, le niveau de criticité a pu être évalué pour chaque domaine de connaissances selon l'importance stratégique, le nombre d'experts-clés présents et les besoins de développement des technologies. Dans certains domaines, les Experts-clés sont en sous-nombre par rapport aux besoins de l'entreprise, ce qui occasionne des risques importants de perte de savoir. Cette identification permet de mettre un point d'attention sur le transfert, le développement et le partage des connaissances des Experts-clés au sein du groupe. Leurs potentiels départs doivent ainsi être surveillés de près. De manière générale, c'est sur cette population que les plus grands efforts de vigilance doivent porter. Cependant, étant données l'actualité du groupe et sa séparation en deux entités principales, les domaines et les experts se retrouvent eux aussi divisés entre New Areva et

    48 Stéphane Andrieux (Directeur scientifique EDF R&D), Reconnaitre l'expertise, mais surtout mieux la solliciter, Revue Générale Nucléaire, numéro 4 Etre un expert, Juillet-Août 2014, p.34-37

    49 Les « Experts clés » ont été identifiés par les managers et leurs pairs comme ayant un haut niveau de connaissance qui, en cas de départ sans transfert de connaissances, représenterait pour Areva une perte de connaissances certaine.

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    Areva NP. Ainsi, avant le plan de départ volontaire, 414 experts (tous niveaux confondus) ont été identifiés pour la structure New Areva. Au 22 août, 40 experts étaient enregistrés comme étant partis ou sur le départ d'ici à 2017 ce qui donne un ratio de départ de 9,6%. Pour comparaison, le pourcentage des départs d'experts sur les mêmes périmètres avant le PDV, entre 2013 et la fin 2015, était de 7% environ. Cependant, ce chiffre aura probablement augmenté à la date de fin des départs possibles avec la PDV. De plus, selon le niveau d'expertise, ce ratio augmente. Ainsi, à l'horizon 2017, ce serait plus de 80% des experts de niveau 3 qui seraient partis grâce au PDV. En effet, le dispositif intègre plusieurs possibilités pour permettre le départ des collaborateurs vers la retraite. Or les experts de niveau 3 ont, logiquement, la moyenne d'âge la plus élevée. C'est donc cette population qui est la plus à même de partager ses connaissances.

    En parallèle, il est important de noter qu'une connaissance seule n'existe pas. Comme nous l'avons vu précédemment, les technologies sont multiphysiques. Elles regroupent plusieurs domaines de connaissance. La carte à la page suivante (créée par un collaborateur au sein d'Areva) montre 110 domaines et sous-domaines d'expertises.

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    Figure 5 : Représentation graphique de l'expertise chez Areva

    Sur cette carte, plus un noeud est épais, plus cela montre son interconnexion avec d'autres domaines. Les liens entre chaque noeud représentent les experts et les couleurs une communauté de connaissance distincte. Cette carte montre à la fois l'isolement et l'interconnexion des domaines ou sous-domaines. Nous voyons ici que certains sont maitrisés par un seul expert et d'autres par plusieurs dizaines d'experts et la carte met ainsi en avant le niveau de criticité des domaines et sous-domaines.

    2.4.1.1. L'identification des technologies critiques chez EDF

    Au sein d'EDF, le raisonnement n'est pas effectué en termes de domaines et sous domaines de connaissance, mais suivant la « capacité à maitriser une technologie ». L'entreprise raisonne ainsi selon la maitrise d'une connaissance globale. Pour chaque technologie, il existe un responsable qui identifie les collaborateurs travaillant pour cette technologie avec leur niveau de maitrise de cette dernière. Leur importance est évaluée selon trois niveaux. Certains sont identifiés comme « non nécessaires à la maitrise » de la technologie, car leurs

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    connaissances sont « génériques », c'est-à-dire qu'elles peuvent être retrouvées aisément sur le marché du travail. Le deuxième niveau regroupe ceux dont le départ rendra difficile la maitrise de la technologie. Il faudra environ 6 mois pour remettre une nouvelle personne au niveau de connaissance nécessaire pour que la technologie soit maitrisée. Enfin, le troisième niveau concerne ceux dont le départ engendre la perte totale de la capacité de l'entreprise à mettre en oeuvre la technologie50. Il faudra alors plusieurs années pour reformer une personne afin de réunir les conditions nécessaires à la maitrise et à la mise en oeuvre de la technologie. Pour la majorité des technologies, il faut plusieurs experts sur un ou plusieurs domaines de connaissance pour que l'entreprise en ait sa maitrise. Par ailleurs, pour Stéphane Andrieux, Directeur scientifique de la R&D, « l'essentiel pour l'entreprise est de savoir transmettre ce qui ne s'apprend pas dans les livres ou hors d'elle » parce que « la vraie transmission de l'expertise, ce n'est pas la transmission des connaissances, mais la transmission de la culture d'entreprise, de son expérience et de son patrimoine technique »51. Par ce témoignage, EDF montre à quel point la prise de recul et une vue globale sont importantes.

    Cette vision par technologie permet alors d'identifier plus rapidement les acteurs clés dans une société. La connaissance collective priorise l'idée de pouvoir mettre en oeuvre une technologie face aux connaissances individuelles qui sont improductives si elles sont isolées. La direction d'une entreprise aura alors plus d'incitation à investir dans un programme visant à conserver une technologie, car elle en voit directement les enjeux. Le transfert des connaissances des acteurs identifiés comme critiques aura alors plus de probabilité d'aboutir, car les enjeux seront plus rapidement identifiables.

    En effet, l'objectif de l'entreprise est de répondre au client par la maitrise de ses technologies nécessaires à la vente de biens ou de services. La stratégie de l'entreprise est alors directement en adéquation avec la nécessité de transfert des connaissances. Le résultat reste le transfert de connaissances, mais l'approche différente de la situation donne de meilleures capacités d'action de la part des dirigeants. Une vision ainsi globale semble plus profitable.

    50 Comme nous l'avons vu, les domaines de connaissance sont multiphysiques, ce qui signifie qu'une technologie réunit plusieurs domaines de connaissance pour être mise en oeuvre.

    51 Stéphane Andrieux (Directeur scientifique EDF R&D), Reconnaitre l'expertise, mais surtout mieux la solliciter, Revue Générale Nucléaire, numéro 4 Etre un expert, Juillet-Août 2014, p.34-37

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    2.4.2. Les différentes formes de communautés existantes chez Areva

    2.4.2.1. Le collège des fellows

    Chez Areva, les groupes d'experts peuvent se retrouver sous plusieurs appellations. Ainsi, le « Collège des Fellows » (CdF) est un groupe d'experts de niveau 3 fondé en 2014 par le directeur scientifique d'Areva. Son objectif a été dans un premier temps de réaliser un bilan complet à destination du COMEX permettant d'évaluer les forces et les faiblesses de la filière expertise afin de fournir des préconisations nécessaires pour anticiper les besoins futurs. Il a donc été nécessaire de donner une vue globale sur l'expertise chez Areva. C'est la raison pour laquelle trois documents récapitulant l'état actuel de l'expertise ont été communiqués à la fin de l'année 2015 au COMEX. Nous l'avons vu, cela a permis l'identification des connaissances critiques et des « Experts-clés ». Des recommandations ont été émises et une partie d'entre elles ont été mises en oeuvre. Ainsi, les communautés « Tech Talks », dont nous parlerons par la suite, sont apparues. La mise en place de « Domain leader »52 a été soutenue pour favoriser le développement des communautés. Un rapport scientifique annuel a aussi pu être publié permettant de recenser les réalisations scientifiques importantes sur l'année écoulée. Il a eu pour objectif de démontrer la valeur créée par les sciences et techniques au sein d'Areva. Il participe ainsi activement à montrer les enjeux des connaissances chez Areva et donc à la nécessite de les capitaliser et de les transférer. Ainsi, cette communauté n'a pas pour objectif le partage de connaissances, mais la protection directe et indirecte de l'entreprise contre ses éventuelles pertes de savoir. Si l'on devait calculer son ROI53, cela reviendrait à calculer les éventuelles pertes économiques (dues aux pertes de savoirs) par rapport aux gains réalisés si les connaissances étaient restées présentes chez Areva. Par ailleurs, les recommandations du CdF ont été de redémarrer le programme GapExpert. Recommandation suivie, puisque le programme va être relancé prochainement. Par ailleurs, nous avons vu précédemment que les Chaires et CIFRE avaient besoin que les programmes, informations et budgets soient consolidés, ce que le CdF a recommandé de faire. Il a aussi fait la même recommandation pour les projets scientifiques menés par les experts séniors et fellows, ainsi que pour les participations aux conférences internationales dont l'accès serait donné en priorité aux réseaux techniques. Par ailleurs, avec la cession d'Areva NP à EDF, il a été recommandé de dupliquer le collège des fellows dans les deux entités avec la mise en place

    52 Domain leader : personne chargée d'animer une communauté. Il a aussi un rôle dans le transfert des connaissances.

    53 ROI (Return On Investment) : Retour sur investissement

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    d'une réunion annuelle commune sur la gestion des experts. Le CdF a aussi recommandé la mise en place des « Tech Talks » et il a encouragé le développement des « Peer Reviews » qui constituent des réseaux au sein d'Areva.

    2.4.2.2. Les « Tech Talks » et « Peer Reviews »

    Les Tech Talks sont des conférences données par des experts à destination des managers et des « spécialistes » (futurs experts) qui sont suivies soit en présentiel, soit sur le réseau internet d'Areva. Elles portent sur divers domaines de connaissances maitrisés par Areva. Ainsi entre juillet et décembre 2014, 4 Tech Talks ont été organisés sur des technologies comme la « vitrification » ou les « effets d'irradiation sur le matériel des réacteurs à eau légère ». Ces conférences ont pour objectif de permettre la compréhension globale et non la maitrise pleine d'une technologie par les managers et spécialistes. Cependant, elles permettent de faire circuler l'information sur les technologies d'Areva d'autant plus qu'elles sont enregistrées et stockées pour des utilisations futures. Elles contribuent ainsi à la capitalisation de la connaissance. Ce partage de connaissances est d'autant plus intéressant qu'il permet aussi d'identifier les experts travaillant sur ces technologies et donc les réseaux qu'ils constituent. Lors des Teck Talks, de vrais réseaux se constituent, ce qui contribue aussi à la création de connaissances collectives.

    La Peer Reviews, littéralement la « revue par les pairs », entre pleinement dans le processus de collaboration entre les experts. Il n'a pas pour vocation de participer au transfert de connaissances à proprement parler. Cependant, il s'agit de donner la capacité pour Areva de développer l'autocontrôle au sein des réseaux de la filière expert. Cela passe alors par une collaboration et donc un transfert de connaissances tacites. Les BU et la DRD choisissent des projets sur lesquels des Peer Reviews seront mis en place. Elles ont pour objectif d'aider à identifier et à atténuer les risques technologiques, scientifiques et techniques des projets. Concrètement, des experts de niveau 3, par exemple, vont émettre des recommandations sur un projet de recherche afin d'en améliorer la qualité. Ce système était déjà mis en place chez Areva et le CdF a permis de confirmer et soutenir ces actions.

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    2.4.2.3. Les réseaux techniques

    Comme nous le voyons, les communautés chez Areva sont plus ou moins organisées. Le témoignage d'un expert montre que plus le réseau est développé et dynamique, plus les flux de connaissances sont puissants et permettent une transmission rapide des connaissances. En effet, cet expert a pu travailler aux États-Unis et s'est aperçu qu'après un an de travail, il avait réussi à acquérir au moins autant de connaissances qu'après 5 ans de travail en France. Dans les raisons évoquées, l'omniprésence des communautés et du travail en groupe ainsi qu'une réelle capacité à faire circuler la connaissance. Ainsi, pour cet expert, il est beaucoup plus intéressant de travailler en réseau que de travailler seul. Cette caractéristique très ancrée sur le sol américain l'est dans une moindre mesure en France ce qui explique cette différence de capacité à internaliser de la connaissance en une seule année.

    Par ailleurs, il est dénombré pas moins de 29 réseaux techniques regroupés sur des technologies différentes dans l'ensemble du groupe Areva. Ainsi il existe le réseau « ION-A (Uranium Chemistry) », « Robotics », « Virtual reality » ou encore « Vitrification ». Chacun d'eux est soutenu par un SharePoint dédié. Ils ne sont pas composés exclusivement d'experts et ils ont pour objectifs de partager de la connaissance, d'acquérir une culture globale, une ouverture sur le groupe afin d'obtenir une synergie entre les acteurs et d'avoir une approche multiphysique. Il est important de distinguer les « réseaux ouverts », c'est-à-dire la mise en relation de plusieurs collaborateurs se connaissant respectivement et échangeant partiellement des connaissances, des communautés organisées et reconnues officiellement. En moyenne les réseaux techniques chez Areva aujourd'hui sont à mi-chemin entre un réseau ouvert et une communauté. Pour les plus développés d'entre eux, un responsable dirige le réseau en collaboration avec un « Knowledge Manager » et des experts. Ce noyau de collaborateurs est généralement chargé de faire vivre ces communautés. Leur objectif est de tirer parti des économies d'une collaboration entre des entités indépendantes en facilitant la libre circulation des connaissances, des ressources et des personnes. Pour cela, elles partagent les connaissances, aident à résoudre les problèmes clés de l'entreprise, font évoluer les meilleures pratiques et développent les collaborateurs dans le but d'ajouter de la valeur à l'entreprise. Elles sont sponsorisées par une organisation, une direction (comme la DRD). Concrètement cela se traduit par la mise en place de conférences, de réunions téléphoniques, de contacts fréquents entre les membres du groupe sous différentes formes. Plusieurs fois dans l'année, les réseaux peuvent se retrouver soit en face à face soit via le Net, pour partager sur des sujets particuliers. Une partie des membres de ces réseaux sont actifs et peuvent créer du contenu,

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    d'autres sont passifs et uniquement « consommateurs » de contenu. Leur situation dépend aussi de leurs relations avec la DRD. Plus cette relation sera étroite, plus elle sera soutenue. Quatre niveaux de relations ont été identifiés : celui où aucun support n'est réalisé par la DRD (11 réseaux), celui pour lequel des supports de base (outils, assistance) sont apportés (7 réseaux), celui où la DRD apporte une aide financière (4 réseaux) et enfin, le 4e niveau, celui où le réseau est dirigé en collaboration avec la DRD (7 réseaux). À titre d'exemple, le réseau « ION-A » fait partie de ceux ayant un support financier et réalise des conférences grâce aux experts tous les 2-3 mois sur des thématiques différentes.

    Les différentes formes de communautés que nous avons vues jusqu'à présent ont des problématiques qui se rejoignent.

    2.4.2.4. Les problématiques communes pour la mise en place et le développement des communautés

    Chaque communauté est différente. Leurs objectifs, la forme sous laquelle elles se présentent, les ressources qu'elles utilisent, les moyens de communication, leur structure organisationnelle, leur durée d'existence ou les plans de développement sont tout autant de facteurs qui définissent leur identité. Cependant, dans un contexte donné, des similitudes peuvent apparaitre. Areva est une société dont la structure organisationnelle est en silo (BU, Directions et sites géographiques sont relativement indépendants les uns des autres). L'industrie du nucléaire et l'ensemble du cycle du nucléaire rassemblent des métiers différents et poussent ainsi à ce mode de fonctionnement. La collaboration et le partage au sein, ou même en dehors, des communautés sont parfois rendus compliqués par une culture qui a tendance à s'opposer à la notion de transversalité. En effet, la confidentialité dans le domaine du nucléaire est très présente, en particulier de par l'enjeu des informations qui y circulent. Cette culture est ancrée dans l'histoire du nucléaire qui s'est développée sur deux fronts : la technologie militaire et la technologie civile. On retrouve à ce titre certaines similitudes avec le domaine militaire, soit dans le langage, soit dans l'organisation de l'entreprise. Par ailleurs, de par son histoire et son secteur d'activité (l'industrie), l'héritage Taylorien par une segmentation des activités et des tâches est elle aussi ancrée dans l'entreprise. L'information y est contrôlée. La transversalité des communautés est donc rendue plus compliquée. Le premier constat est le suivant : le niveau de la culture de partage

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    d'une entreprise est influencé par son histoire, son secteur d'activité et l'héritage tiré d'un courant de pensée de son pays d'origine.

    Ainsi, il est nécessaire pour les communautés d'être soutenues dans leurs développements. Au sein d'Areva, deux acteurs principaux peuvent avoir cette capacité d'influence : Le département des Ressources Humaines et le « Top management » (COMEX, Directeurs de BU, de directions). Dans plusieurs entretiens, les interviewés ont identifié ces acteurs pour plusieurs raisons. Pour le « Top management », ils ont la capacité de mettre sur la table des ressources financières nécessaires au développement d'outils qui peuvent soutenir les communautés. Ils ont une capacité de décider la mise en place de projets et de communautés. Ce sont eux qui peuvent donner leur autorisation pour leur création et leur développement. Nous avons vu précédemment que les communautés de savoir se développent sans que l'organisation hiérarchique y soit intégrée. Cependant, au sein d'Areva, le contexte et la forme que peuvent prendre les communautés diffèrent sur certains points. Les Ressources Humaines sont aussi un appui sur plusieurs points. Dans un premier temps, ils sont présents dans le processus de transfert de connaissances et de mobilité en organisant les systèmes hiérarchiques au sein de l'entreprise. Or les communautés ont aussi pour objectif chez Areva, le transfert des connaissances et peuvent y participer activement selon leur niveau de structure. Dans un deuxième temps ils appuient les communautés en traitant directement avec les managers sur la thématique de la gestion des ressources. Ils n'ont pas vocation à agir directement sur les communautés, mais à en être « sponsors ».

    Dans une ère de difficulté financière, les ressources sont à ce titre très contrôlées et les réductions budgétaires ont plus tendance à être à l'ordre du jour. Ainsi, le temps donné et les ressources accordées pour l'animation et la participation des acteurs dans leurs communautés sont aussi une barrière non négligeable. D'où la nécessité d'être soutenu par le « Top management ».

    La difficulté vient aussi de la nature des communautés : elles ne sont réellement productives et efficaces que sur le long terme, ce qui est vrai aussi pour un système de transfert des connaissances. En effet, la connaissance est transférée pour qu'elle soit toujours disponible dans 20 ou 30 ans. Ainsi, pour que les communautés soient efficaces et légitimes, une vision et une stratégie doivent être données sur plusieurs dizaines d'années. C'est ce qui fait défaut aujourd'hui dans une économie instable.

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    Les communautés ont aussi besoin d'être dirigées et animées par des leaders, des responsables qui ont le temps et les ressources nécessaires pour cela. La gestion du contenu des sites intranet ou internet, l'organisation des conférences ou le contact avec les membres d'une communauté chez Areva doivent être organisés. En 2014, une technologie a fait son apparition au sein d'Areva : la fabrication additive. Autrement dit : La fabrication d'objet par imprimante 3D. Parce que cette technologie peut avoir d'importants retours sur investissement, une communauté a été créée. La personne qui s'est intéressée de près à cette technologie a pu mettre en place une communauté. Des publications sortent tous les trimestres, des réunions et des journées dédiées spécifiquement à cette nouvelle technologie sont organisées chaque année. Des liens et des réseaux se créent avec les unités. Tout cela prend du temps à la fois pour être animé, mais aussi pour que la technologie se répande au sein d'Areva. Les difficultés sont alors de faire en sorte que les acteurs y trouvent un intérêt particulier et qu'ils participent eux-mêmes à la création de contenu et aux échanges.

    De plus, pour partager et transférer ses connaissances dans un objectif de créer une connaissance collective, l'expert a besoin d'être confiant dans la stratégie de long terme de l'entreprise. En effet, si la connaissance devient collective, qu'elle est détenue par d'autres et qu'elle a été externalisée à son maximum, l'entreprise peut être tentée de réduire les effectifs d'experts puisqu'elle détient au moment voulu, les connaissances dont elle a besoin. Cependant, si elle se situe dans une stratégie de long terme et de développement, elle n'aura aucun intérêt à réduire le nombre d'experts, car elle risquerait alors de perdre sa capacité d'innovation et de maitrise des technologies en évolution. Ainsi, nous le voyons, la vision à long terme de l'entreprise est primordiale pour créer de la confiance et donc favoriser le partage.

    Enfin, avec l'arrivée des jeunes générations de plus en plus mobiles et de la numérisation des échanges, les communautés doivent aujourd'hui s'équiper d'outils informatiques performants.

    2.4.3. Les outils informatiques

    2.4.3.1. Stocker de la connaissance

    Comme nous avons pu le voir, les outils informatiques sont des supports nécessaires au transfert de connaissances. Ils permettent de stocker des masses de données très importantes et sont de plus en plus populaires avec la numérisation des entreprises. Parce que la masse

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    d'information est devenue importante au fil des années, de nombreux outils de gestion documentaire sont apparus et se sont considérablement améliorés.

    Aujourd'hui, Areva possède plusieurs plates-formes de stockage. La plus communément utilisée est le logiciel « SharePoint » (cf. Annexe 7 : Le logiciel de partage SharePoint. P.105), développé par Microsoft pour le partage de documents. Il permet de stocker des documents principalement conçus par Microsoft. Peu ou pas de fonctionnalités et documents non conçus par Microsoft ne peuvent donc y être ouverts (ex : Mindmapping54). Cependant, il a la capacité d'héberger des pages du style « Wiki »55 pour le partage de connaissances et le travail en groupe. Areva utilise ce système sous le nom de « Wikipiti ». Pour les experts, ou de manière générale pour tous les collaborateurs, il offre la possibilité de partager et rédiger du contenu dans un système collaboratif. Pour les experts, le logiciel SharePoint est un outil intéressant, mais il reste cependant encore aujourd'hui à la marge des utilisations et n'est pas toujours dynamique.

    Aujourd'hui, les experts ont besoin d'un outil qui permette d'effectuer des recherches rapides et efficaces sur l'ensemble des documents appartenant à la société. Les recherches se font aujourd'hui principalement pas mots-clés. Or, il n'existe à ce jour aucun logiciel existant chez Areva qui réponde à ces critères. Cela est d'autant plus difficile qu'aucune méthode globale de gestion documentaire n'a été imposée. De plus, les recherches par mots-clés nécessitent que les documents de type PDF et images soient retravaillés via un logiciel de type OCR56 et les documents audios via des logiciels de reconnaissance vocale afin de retranscrire les informations. À noter que ces derniers ne sont pas toujours fiables. Chez Areva, il existe une personne dédiée au traitement de document via un logiciel OCR, mais la quantité de documents détenus par les experts de la société ne permettrait pas de stocker numériquement tous ces documents. À ce titre, l'enquête montre aussi qu'il existe une masse importante de documents dits « dormants ». Cela signifie que des documents contiennent de l'information qui pourrait être exploitable sans pour autant être ni classé, ni enregistré et partagé.

    54 Mindmapping : Carte heuristique très utilisée dans la gestion de projet, l'éducation, la formation, ou le travail d'équipe.

    55 Un « Wiki » est une application permettant la création et la modification de pages à l'intérieur d'un site web par tous les collaborateurs y ayant accès. Grâce aux balises il est possible de circuler dans les différentes notions existantes dans le Wiki.

    56 OCR : Optical Character Recognition. Traduction : Reconnaissance optique de caractère

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    Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous toutes ses formes

    2.4.3.2. Les plates-formes de réseaux

    La plate-forme SharePoint a deux fonctions pour les experts Areva. Elle permet de stocker des données comme nous avons pu le voir tout en servant de support pour la gestion et l'animation des communautés. Il est ainsi possible de créer un profil et de renseigner des informations sur ses expériences, ses travaux. Les utilisateurs peuvent effectuer des recherches par mots-clés pour retrouver un expert, un spécialiste dans un domaine de connaissance. Depuis quelque temps, une nouvelle version a été installée, ce qui a profondément modifié son fonctionnement. Ses fonctionnalités ont été rendues plus compliquées à utiliser d'après certains experts. En effet, il existe maintenant plusieurs pages accessibles par onglets au lieu d'une seule regroupant toutes les informations. Ainsi, pour certains, cela semble ralentir la fluidité de la plate-forme et sa facilité d'utilisation.

    Un autre outil permet aussi de prendre contact avec les collaborateurs du groupe Areva. Il s'agit d'un annuaire disponible et ouvert à tous. Il donne accès aux coordonnées pour contacter la très grande majorité des collaborateurs du groupe (mail, numéro de téléphone, numéro du bureau, site géographique...). Il permet d'identifier les personnes dans l'organisation grâce à leurs informations administratives et à un organigramme que la personne peut renseigner (entité d'appartenance, groupe de métier, ...). Les principales difficultés sont liées à l'actualisation des fiches personnelles, le renseignement et la nature des informations. En effet, la fiche est liée à une base de données où les erreurs peuvent subsister et des données peuvent être manquantes. Enfin, toutes les informations nécessaires aux experts (domaines de connaissances, niveau de recherche, etc...) ne sont pas accessibles.

    Le logiciel SharePoint permet aussi de structurer une communauté via des modules pour la création de présentation et de partage d'informations utiles pour les communautés. Par ailleurs, chaque réseau technique possède une page spécifique. Cependant, elle n'est pas toujours optimisée, car les fonctionnalités semblent compliquées à utiliser. Il est aussi possible de retrouver tous les domaines d'expertises chez Areva grâce à un annuaire intégré au SharePoint. Cependant, les tests montrent qu'il est difficile, dans les faits, de retrouver rapidement une information et que la fluidité de navigation et une réorganisation de son fonctionnement permettraient certainement d'améliorer le résultat des recherches.

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    Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous toutes ses formes

    Une autre plate-forme indépendante à Areva, nommée « Yammer »57 (cf. Annexe 8 : La plate-forme Yammer. p.106) est apparue il y a quelques années. C'est un réseau social d'entreprise (RSE) qui permet la collaboration, le partage des idées, le transfert de documents. Racheté par Microsoft, il permet aujourd'hui d'être intégré à un service global avec « Office 365 » pour réaliser des documents à plusieurs ou effectuer des recherches sur les documents partagés. Le réseau prend progressivement de l'ampleur. Ses marges de progression sont importantes comme le montre son utilisation par plus d'un million de personnes et une présence au sein des plus grandes multinationales (CapGemini, L'Oréal, AMD, Alfa Laval, Cisco ou encore Telefonica). Ce réseau a ainsi de nombreuses capacités de développement au sein d'Areva. À ce jour 31 communautés ont été recensées. Cependant, toutes ne sont pas actives et d'autres sont composées de 1 à 5 personnes, ce qui est relativement faible. La sécurisation des informations et des contenus serait certainement un bon moyen de rendre Yammer plus intéressant à utiliser.

    Il existe donc à ce jour plusieurs moyens de stocker des données au sein d'Areva. À ce titre, le groupe étant organisé en silo, il est possible que d'autres outils informatiques soient utilisés sans pour autant être connus par le plus grand nombre.

    Chez Areva, il existe une multitude de moyens pour que le transfert de connaissances se réalise au sein du groupe. La difficulté est ainsi de consolider les informations pour permettre une optimisation des processus tout en laissant aux unités la capacité de s'adapter à leur situation spécifique. L'avenir du nucléaire oblige les entreprises à innover et développer leurs connaissances ce qui inclut de devoir les transférer afin de les conserver.

    Un terrain favorable au partage des connaissances est nécessaire pour que les transferts se généralisent au sein d'une entreprise. Une culture du partage et une vision par technologie peuvent être un terreau fertile pour le développement des initiatives et des processus de transfert de connaissances. Les communautés sont des puissants outils de maitrise des technologies grâce à la connaissance collective qu'elles génèrent. Leur développement est nécessaire pour créer un climat de partage et pousser à des perspectives de long terme.

    Nous allons donc voir dès à présent les moyens qu'Areva pourrait éventuellement mettre en oeuvre pour pallier les difficultés identifiées dans l'analyse.

    57 Yammer est un réseau social d'entreprise totalement gratuit. Créé en 2008 sur un style « Tweeter ».

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    Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par Areva

    Troisième partie - Soutenir les efforts

    entrepris par Areva

    3.1. Un outil pour agir rapidement

    3.1.1. Création d'un guide de transfert de connaissance

    3.1.1.1. Faire face au départ des volontaires

    Nous avons vu précédemment que la situation de l'entreprise avait poussé à la mise en place d'un Plan de Départ Volontaire. Avec le dispositif spécifique incitant au départ à la retraite, le nombre d'experts en mobilité externe en particulier de niveau fellow a fortement augmenté. Nous avons pu voir aussi qu'il existait des dispositifs que les unités ou les experts eux-mêmes pouvaient mettre en place. Cependant, la mise à disposition d'un guide complet aux experts et aux managers permettrait de pallier les questions comme celles qui apparaissent sur le réseau Yammer58:

    Ainsi, chaque collaborateur Areva aurait la possibilité de mettre en place de lui-même un transfert de connaissances. Cela présenterait alors l'avantage de conserver l'autonomie et la capacité d'adaptation des BU au sein d'Areva.

    Le guide ne serait cependant qu'une mesure d'urgence dont la mise à disposition ne pourrait remplacer un processus et une culture globale de transfert de connaissance au sein du groupe. Il est ainsi important de cibler précisément son rôle sur une durée définie. Ainsi, le guide a pour objectif de pallier l'absence potentielle d'un dispositif « groupe » unique de transfert de connaissances. Il doit pouvoir faire office de référence dans le cas d'un départ d'un expert, mais pourra aussi être utilisé, en adaptant les étapes, pour la formation de futurs experts. Il devra être pragmatique et flexible pour s'adapter le plus possible aux situations du terrain.

    Afin de répondre aux besoins de l'entreprise et en vue du contexte, il est recommandé que la date du livrable soit au plus tard le 28 février 2017. En effet, sur l'année 2017 à partir du 1er

    58 La question a été posée le 7 octobre 2016 par un expert de niveau 2 sur le réseau Yammer d'Areva, URL : https://www.yammer.com/areva.com

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    Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par Areva

    avril, 10 départs d'experts (dont 2 experts fellow) sont déjà prévus dans le dispositif du Plan de Départ Volontaire et 5 autres après 2017 (dont 1 expert fellow). Ces chiffres ne prennent bien entendu pas en compte les départs et mobilités qui peuvent se réaliser en dehors du PDV. Nous l'avons vu, les départs étaient d'environ 7% entre 2013 et 2015. Ainsi, il peut être intéressant pour Areva de mettre en place un guide ouvert à toute la communauté des experts. Cependant, les « Experts-clés » identifiés par leurs pairs et les managers seront prioritairement concernés. Par ailleurs, ce guide doit pouvoir être réalisé en présence des acteurs majeurs qui auront un rôle défini dans le processus de transfert de connaissances. Chaque acteur doit ainsi pouvoir se sentir concerné et adhérer au dispositif à l'image de la méthode Cognicoach®59 de recueil ponctuel de connaissances60. Ainsi, le guide aura d'autant plus de réussite que chacun des acteurs participe à sa rédaction. Nous allons donc voir dès maintenant les différentes étapes nécessaires à sa réalisation.

    3.1.1.2. Réaliser le guide de transfert de connaissance

    Nous avons déterminé plus haut que les différents acteurs directement concernés par un guide de transfert de connaissances sont les experts, les managers et les ressources humaines. Pour réaliser le guide, il nous est nécessaire d'identifier plus précisément chaque acteur afin qu'il soit intégré dans la démarche. Ainsi nous différencions pour les experts, le « donneur » et le « bénéficiaire » (même s'il n'est pas encore expert ou s'il s'agit d'un groupe de personnes). L'expert « donneur » pourra alors être un des 180 « Experts-clés ». Le collège des fellows représenté par le directeur scientifique de la DRD pourra être bien entendu intégré à la démarche. La présence d'un Knowledge Manager (KManager) sera bien entendu une force dans l'établissement du guide. Pour les managers, il faut distinguer le « top management » c'est-à-dire le COMEX qui validera la démarche et les « managers » des deux experts concernés (dans certaines situations il y a potentiellement un seul manager). Enfin en ce qui concerne les ressources humaines, le RRH fournira un appui, des conseils et se portera avec le manager, garant de la bonne réalisation du processus. Le DRH validera la démarche et le département des Ressources Humaines pourra effectuer les actions de communication. Dans

    59 La méthode montre que si la réalisation d'un référentiel se fait de façon collective en utilisant les interactions (questions & réponses) de chacun, alors le taux d'appropriation des informations et des rôles sera largement supérieur à une rédaction individuelle.

    60 Jean-Yves Prax, Le manuel du Knowledge Management - Mettre en réseau les hommes et les savoirs pour créer de la valeur, Dunod, Stratégies et management, Paris, 3e édition, 2012, p.238

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    Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par Areva

    un premier temps il est nécessaire de réunir les principaux acteurs (experts, KManager, directeur scientifique, manager(s) des deux experts, RRH et/ou DRH) afin d'établir un rétroplanning des différentes tâches. Cela permettra aussi de donner à chaque acteur une vision globale et unifiée du guide, de définir les rôles de chacun, de faire remonter les remarques sur le projet et d'établir une première ligne directive du guide. La première réunion pourrait donc avoir lieu dans le courant du mois de novembre 2016. Puis des réunions seront organisées entre les experts (« donneur », « bénéficiaire »), le KManager et le(s) manager(s), pour la réalisation du guide. Les phases de vérifications du guide seront réalisées avec l'équipe précédente ainsi que le RRH et la validation faite par le COMEX et le DRH. Enfin une réunion de lancement présentera le guide dans sa version finalisée.

    Afin d'aider à le réaliser à l'aide d'un premier brouillon, voici des pistes pour l'identification des étapes d'un transfert de connaissances ponctuel :

    Étape 1 : Identifier le « donneur », les connaissances essentielles à risque qu'il détient et la date de démarrage de début du processus en fonction de : l'impact de la connaissance sur la maitrise d'une technologie au sein d'Areva, de l'isolement de la technologie et de l'expert sur son domaine, du temps nécessaire pour former une personne sur cette technologie et des besoins futurs d'Areva.

    Étape 2 : Identifier le « bénéficiaire » et ses besoins, ses domaines de connaissances, son style d'apprentissage (auditif, visuel, kinesthésique). Puis mettre en relief les points de correspondance et de divergence entre « donneur » et « bénéficiaire » (que cela soit sur les besoins en connaissance, la situation géographique ou le niveau d'expertise)

    Étape 3 : Déterminer les outils les plus adaptés à la réalisation et au contexte du transfert (entretiens, collaboration, questionnaires, externalisation sur document, schématisation des processus, mentorat, formation à distance, ...)

    Étape 4 : Définir les objectifs et les indicateurs de réussite du processus. S'assurer qu'ils sont réalisables en vue du contexte et de la situation. Donner des dates limites pour les actions et créer une fiche de suivi renseignée à plusieurs reprises durant le processus, permettant d'identifier les freins et d'engager des actions pour les résoudre. Enfin, il s'agira de s'assurer avec le manager que les rôles sont compris par chacun.

    Étape 5 : Mettre en place les actions, les surveiller et les évaluer. Pendant et à la fin du processus, il faudra déterminer si les objectifs sont atteints dans la limite du temps fixé.

    Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par Areva

    En annexe du guide sera récapitulé l'ensemble des dispositifs de transfert de connaissances réalisables, dont une brève description sera donnée avec les définitions afférentes au transfert de la connaissance (les différentes formes de connaissances, le schéma SECT,...). Ce guide servira ainsi d'appui au transfert ponctuel de connaissance et ne devra pas dépasser une quinzaine de pages, contenu et annexes confondus. Nous devons maintenant voir plus en détail les bénéfices qui peuvent être attendus tout en ayant conscience des limites qu'il peut représenter.

    3.1.2. Cadrer le projet

    3.1.2.1. Évaluer les coûts et la réussite

    En ce qui concerne le coût financier du processus de transfert, il dépend nécessairement des outils utilisés et de l'investissement de chaque acteur. Tl est donc flexible, ce qui lui permet d'être accessible à tous, et peut parfaitement ne nécessiter aucun investissement financier. Cependant, tout comme la mise en place du guide, le processus de transfert nécessite un investissement en termes de temps de chacun des acteurs. Ainsi, pour la création du guide, aucun investissement financier n'est à prévoir. Les moyens de réalisation et de communication utilisés seront ceux déjà en place chez Areva (Intranet, mail, word, etc...). Voici un calcul, théorique a priori, du temps passé pour sa réalisation :

    Actions

    Nombre de
    parties prenantes

    Nombre
    d'action

    Durée

    Total

    Identification des acteurs comme vu précédemment et communication pour la mise en place de la réunion

    1

    1

    4h

    4h

    Réunion des acteurs pour la création du guide

    8

    1

    3h

    24h

    Réunions des experts et managers avec le KManager

    5

    6

    2h

    60h

    Travail nécessaire entre les réunions

    5

    5

    1h

    25h

    Réunions de vérification du guide

    5

    2

    1h

    10h

    Validation (COMEX et DRH)

    2

    1

    1h

    2h

    Lancement / Communication / Mise en ligne du guide

    1

    1

    3h

    3h

    Total sur le projet

     

    17

    13h

    128h

    Ainsi, la durée totale, tous acteurs confondus, pour la création du guide est de 128h. Ce qui signifie que l'entreprise investira 128h de travail de ses salariés pour la création du guide. La

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    Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par Areva

    durée du projet en heures est égale au nombre d'actions multiplié par leur durée soit un total de 30h.

    Voici un planning théorique en projetant de commencer la première réunion mi-novembre : Avec une première réunion entre experts et managers sur la semaine du 21 au 25 novembre et un intervalle d'une semaine et demi entre chacune d'elle, la dernière réunion serait planifiée sur la semaine du 23 au 27 janvier. Les 2 réunions de vérification à une semaine d'intervalle se finiraient sur la semaine du 6 au 10 février. La validation du COMEX et du DRH pourrait alors être réalisée au maximum fin février avec un lancement entre le 27 février et le 3 mars 2017.

    Pour que le projet soit marqué comme partiellement réussi, en 1 an, 50% des départs d'experts devront avoir fait l'objet d'un transfert de connaissances grâce au guide. Pour qu'il soit réussi, le pourcentage précédent devra atteindre 70%. Enfin, s'il atteint 85%, le guide pourra être considéré comme ayant dépassé les objectifs initiaux qui étaient principalement d'en faire un usage ponctuel.

    3.1.2.2. Les limites au guide de transfert de connaissance

    Les bénéfices d'un tel guide sont clairs : comme nous l'avons vu au début de ce mémoire, son enjeu est celui d'éviter la perte du savoir et de la capacité à maitriser une technologie. Ce guide vise ainsi à minimiser ce risque en donnant la capacité aux experts de transférer leurs connaissances même quelques semaines avant leur départ. Le calcul des bénéfices se réalise aisément lorsqu'un expert, détenant une connaissance-clé pour la maitrise d'une technologie Areva, est sur le départ. Si le transfert est réalisé, Areva conserve sa maitrise, si le transfert n'est pas réalisé, Areva perd la maitrise de sa technologie est les contrats commerciaux en sont affectés. Par ailleurs, le principal avantage d'une telle démarche est son adaptation au terrain. Il ne porte en aucun cas l'obligation de privilégier un outil de transfert plutôt qu'un autre. Par exemple, en fonction des besoins le tutorat ou la création de documents sera plus sollicité. Ce sont les besoins des parties qui feront le choix des moyens utilisés. De plus, cette méthode permet aussi de s'adapter au niveau de connaissance de l'expert. La rédaction et les méthodes de classement sont parfois bien différentes selon les experts. La durée de sa mise en place est variable, ce qui laisse le choix aux principaux concernés de réaliser un transfert plus ou moins important, plus ou moins long suivant les capacités de chacun à dégager du temps et

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    Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par Areva

    des moyens. Les acteurs participant au transfert peuvent être plus ou moins nombreux (en faisant appel à une tierce personne pour mettre en place un cours, un retour d'expérience, etc...). Par ailleurs, les technologies évoluant, certaines connaissances sont devenues « obsolètes ». Transférer une connaissance n'a donc pas toujours une utilité pour l'entreprise. Ce guide doit ainsi pouvoir être mis en application à bon escient. Enfin, comme nous l'avons vu, aucun investissement financier n'est requis pour la réalisation du guide, ce qui peut inciter l'entreprise à le mettre en place.

    Cependant, ces avantages peuvent rapidement devenir les limites de ce processus. Tout d'abord, il est nécessaire que chaque acteur puisse reconnaitre ce guide comme un moyen légitime de transférer de la connaissance au sein d'Areva. Sans cette reconnaissance, il ne sera pas ou peu utilisé. Ainsi, la communication a une importance capitale et c'est aussi la raison pour laquelle le COMEX doit porter sa validation. La faiblesse de ce projet réside dans son statut. En effet, il ne doit pas s'agir d'un processus standardisé qui remplacerait une politique et une culture globale de transfert de connaissances chez les experts. En effet, cela réduirait le transfert de connaissances à un seul projet ponctuel. Et comme nous l'avons vu, pour être pleinement efficace, le transfert de connaissances chez les experts doit être un ensemble de processus passant par la capitalisation et l'échange de connaissances tout au long de sa carrière. Le statut de processus ponctuel le rend ainsi moins efficace et donc potentiellement moins légitime aux yeux de tous. Enfin, ce projet peut potentiellement ne pas aboutir pour deux raisons principales. Tout d'abord, les acteurs participant à sa création peuvent ne pas approuver la démarche parce que certains enjeux ont été incompris ou inconnus lors de la réalisation de l'enquête et de l'analyse. Ensuite, parce que les directions et Business Units décideraient de ne pas adopter le processus.

    Ainsi, ce guide d'entretien devra être rédigé avec rigueur et par l'ensemble des parties prenantes afin de bien cerner les enjeux et besoins de chacun. Une phase de test pourra être à prévoir.

    Comme nous l'avons vu dans l'enquête, Areva a besoin de consolider les données, notamment celles qui ont trait aux programmes mis en place et certains experts ont mis en avant la nécessité d'établir une gestion documentaire permettant de retrouver rapidement les documents produits au sein d'Areva.

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    Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par Areva

    3.2. Modéliser la connaissance chez Areva

    3.2.1. Proposer une méthode de modélisation des connaissances

    3.2.1.1. Pourquoi proposer de modéliser la connaissance au sein d'Areva

    Durant l'enquête nous avons remarqué qu'Areva avait mis en place diverses méthodes de gestion des connaissances. Elle fait aussi appel à des logiciels comme SharePoint de Microsoft. Dans leur volonté de transférer de la connaissance, les experts ont aussi identifié la problématique du stockage de l'information. Entre les cours, les conférences, les articles ou encore les écrits des jeunes en contrat CIFRE ou stages, la masse d'information est conséquente. Nous avons vu que les communautés avaient la capacité à créer de la connaissance collective en agissant comme un catalyseur des connaissances individuelles. Cela permettait alors de la modéliser. Or la modéliser permet de la transmettre beaucoup plus aisément. En effet, la modélisation est l'« opération par laquelle on établit le modèle d'un système complexe, afin d'étudier plus commodément et de mesurer les effets sur ce système des variations de tel ou tel de ses éléments composants » (GIRAUD-PAMART, Nouv. 1974). Ainsi, modéliser de la connaissance revient à la rendre accessible à d'autres pour en étudier les composantes. Ce qui se traduit par le fait d'externaliser de la connaissance pour permettre de l'internaliser. En réalisant ces actions, la connaissance se dynamise, trouve un canal lui permettant d'être transmise à d'autres individus. Ainsi, la modélisation de la connaissance trouve pleinement son sens dans le transfert de connaissances.

    Cartographier les connaissances d'une entreprise est in fine un processus nécessaire au transfert de connaissances au sein de l'entreprise. Sa réalisation donne la capacité aux acteurs d'agir sur un capital de connaissances qui devient commun à tous. C'est aussi le moyen de donner aux futures générations la possibilité d'aller y puiser une capacité d'action. Pour l'entreprise, c'est un formidable outil qui permet d'accompagner un processus plus global et en même temps, la garantie de pouvoir reprendre de façon optimisée les travaux entrepris il y a plusieurs années de cela par un expert. En quelque sorte, il s'agit de la sécurisation des travaux sur une technologie. Cela peut être une base solide pour la création de connaissances collectives. Dans sa recherche de performance, de développement et de compétitivité, Areva pourrait ainsi dépasser une partie des facteurs qui freinent le processus de transfert de connaissances.

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    Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par Areva

    Cependant, cela demande de pouvoir réaliser un travail de modélisation de manière régulière. Selon les méthodes de modélisation, les capacités d'actualisation, les outils utilisés ou les processus mis en place pour leur réalisation peuvent être profondément différents. Des méthodes plus ou moins développées sont ainsi apparues depuis les années 1980. Durant les recherches pour ce mémoire, deux méthodes se sont distinguées par les preuves qu'elles ont faites dans de nombreuses entreprises et leur capacité à pouvoir être suivies et mises en place par des entreprises et acteurs externes.

    3.2.2. KALAM® ou MASK : deux méthodes différentes de modélisation de la

    connaissance

    KALAM® ou MASK®, voici deux méthodes qui ont été développées après de nombreuses années de recherche, de développement et de phases d'amélioration. Mises en place aujourd'hui dans de très grandes entreprises françaises et multinationales, ces deux méthodes présentent des similitudes et des différences notamment sur le type de population ciblée.

    3.2.2.1. La méthode KALAM® : tournée vers l'humain

    KALAM® signifie Knowledge And Learning in Action Mapping, ce que nous traduirons ici « Cartographie des connaissances et de l'apprentissage en action ». La méthode développée par Jean-Yves Prax, auteur du livre « Le manuel du knowledge management », a pour objectif d'« animer la cartographie participative des connaissances et compétences utiles à l'exécution des tâches d'un processus de l'entreprise ». Pour la société Polia Consulting qui a déposé la marque KALAM®, l'Homme doit être au coeur du dispositif. Ainsi, la dimension participative est très largement mise en avant afin de démultiplier les capacités de réappropriation des apprenants (que nous avons appelés précédemment « bénéficiaires »). La société propose ainsi d'animer une cartographie participative des processus qui se fera uniquement sur les connaissances clés, c'est-à-dire les éléments prioritaires pour l'entreprise. En effet, pour l'auteur, il n'est ni bon ni nécessaire de vouloir tout documenter. Cela peut même être contreproductif puisqu'un trop-plein de documentation n'incitera pas les « bénéficiaires » à revenir sur un tel processus. Comme le spécifie le cabinet Polia Consulting, KALAM® permet une approche par processus. C'est aussi d'après lui un véritable outil de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) nécessaires à la maitrise des technologies. La transversalité y est aussi un avantage. L'outil permet alors de concilier deux approches : la partie gestion des connaissances et la partie gestion des compétences. L'expertise est ainsi

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    Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par Areva

    imbriquée dans un système de gestion globale avec une dimension participative pour permettre d'appliquer cette méthode à tous les niveaux de l'entreprise. Polia Consulting s'appuie d'ailleurs sur cet argument en montrant que des ouvriers ou des agents de maitrise mettent la méthode KALAM® en oeuvre au sein de leur service.

    Dans son livre Jean-Yves Prax détaille 9 étapes dans la modélisation collective de la connaissance et de l'apprentissage.

    Dans un premier temps il s'agit de cibler les processus (uniquement) critiques pour l'entreprise qui feront l'objet d'une cartographie. Pour cela, il sera nécessaire de réunir les acteurs des différentes unités ou départements (si le processus est transverse) qui y participent. L'objectif sera alors de déterminer collectivement sur un logigramme toutes les étapes, partant de l'évènement déclencheur jusqu'à la réalisation finale du processus. La deuxième étape permettra d'identifier et de travailler sur les différents flux d'information afin de déterminer dans quel sens ils se dirigent, leurs points de départ et d'arrivée, leurs formes. En troisième lieu il sera nécessaire de déterminer « Qui fait quoi » qui se résume par un détail des actions menées par chacun. Ensuite, en fonction de cette dernière analyse, un indice de criticité et de vulnérabilité des tâches sera calculé. De la même manière que nous l'avons vu dans ce mémoire : si un expert proche de la retraite quitte l'entreprise alors qu'il permettait l'accomplissement d'une tâche nécessaire à la mise en place de la technologie, l'entreprise perd sa capacité à produire cette technologie. La tâche aura un niveau de criticité et de vulnérabilité maximal. La cinquième étape est celle de la cartographie des compétences génériques aux fonctions. L'avantage sur une démarche GPEC interne est de voir le processus dans sa totalité, y compris dans le cas où une activité a été externalisée auprès d'un sous-traitant. C'est à la sixième étape que la cartographie des connaissances spécifiques à chaque tâche peut être réalisée. Tous les documents, y compris les plans, cartes, modes opératoires, consignes d'exploitation sont analysés. Il sera bien entendu nécessaire de soutenir la démarche par un outil en ligne qui recueillera l'ensemble des documents nécessaires à la réalisation du processus qui constitue la septième étape. Puis l'avant-dernière étape consistera en la réintégration du processus au sein de l'organisation afin de permettre l'appropriation de la démarche pour tous les acteurs dans leurs activités. Enfin, le support managérial consiste à manager l'ensemble du processus dans une démarche qualité. Le processus étant observé d'une façon plus globale, l'évaluation de chaque tâche remonte et permet le retour d'expérience, une analyse a posteriori. C'est le reengineering (ou l'application des leçons du

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    Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par Areva

    retour d'expérience) du processus qui se met en place avec pour effet, une amélioration du processus.

    Cette méthode complète met ainsi l'accent sur une vision globale et participative de la solution. La méthode MASK est quant à elle axée sur la connaissance en elle-même.

    3.2.2.2. La méthode MASK : orientée capitalisation

    En effet, la méthode MASK est basée uniquement sur la modélisation de la connaissance. Les aspects de type GPEC ne sont pas pris en compte, car la méthode part de l'analyse de ce qu'est la connaissance. Son auteur, Jean-Louis Ermine, l'a mise au point en 1989 après de nombreuses phases de développement dans différentes entreprises et en particulier au CEA qui en a alors déposé une marque « MKSMTM ». Elle peut être traduite par « Modèle d'Analyse et de Structuration de Konnaissances »61. Ce modèle propose une vision systémique d'un projet de capitalisation des connaissances dans une organisation. Cette dernière fonctionne alors avec trois sous-systèmes indispensables, le système opérant (ici les experts), le système de décision (la direction et managers) et le système d'information (où se situe l'information, comment elle est stockée). Pour les besoins de la capitalisation des connaissances, on identifie le patrimoine des connaissances apportées par les « agents » des sous- systèmes. Il est alors nécessaire pour modéliser la connaissance, de faire appel à un Ingénieur des Connaissances ou Ingénieur Cogniticien (IC). Il peut être interne ou externe à l'organisation. Dans le cas d'un projet où l'IC est externe, on a souvent en plus un Chef de projet qui fait le lien entre l'organisation et l'IC. La particularité de cette méthode est qu'elle peut s'adapter à tous les processus et méthodes de fabrication d'une entreprise. Cela peut être la création d'une fiche technique, le démarrage d'un réacteur nucléaire ou le processus de nomination des experts. Elle ne comporte pas d'aspects collaboratifs particuliers. En effet, la méthode se base sur la réalisation d'entretiens entre l'IC et la population interviewée (ici, les experts). Les connaissances prendront la forme d'un Livre de la Connaissance (LC) sous format numérique grâce à des outils de plus en plus connus comme Microsoft Visio, PowerPoint, MindManager ou Xmind (pour le mindmapping). Certains de ces outils sont payants (MindManager), d'autres gratuits (Xmind, FreeMind, FreePlane, Mindmapple). Les

    61 En gestion des connaissances, la lettre « K » fait souvent référence à la connaissance.

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    avantages du mindmapping sont la fluidité de l'outil, sa rapidité d'utilisation et de lecture ainsi que son aspect à la fois synthétique et parfaitement complet.

    Pour pouvoir réaliser les interviews, l'IC se base sur le « macroscope de la connaissance » 62 qui est une méthodologie pour identifier tous les aspects de la connaissance et ainsi externaliser le plus de connaissances tacites possibles. Ainsi, la modélisation de la connaissance avec la méthode MASK se base sur deux hypothèses cumulées : la première appelée « sémiotique » part du principe que la connaissance se perçoit comme un signe qui contient de l'information, du sens, et un contexte. La deuxième appelée « systémique » voit la connaissance comme un système global ayant une structure, une fonction et une évolution. Par exemple, sur une montre, lorsque l'aiguille est tournée vers le haut (c'est l'information), je prends conscience qu'il est midi (c'est le sens que je perçois) et qu'à cette heure-ci j'ai un rendez-vous (c'est le contexte). Par ailleurs, une montre donne l'heure (c'est sa fonction), possède un mécanisme particulier (c'est sa structure) et peut avoir la dernière technologie inventée (c'est l'évolution). Puis à partir de chaque point de vue « sémiotique » (information, contexte, sens), on peut analyser l'aspect « systémique » (structure, fonction, évolution).

    Figure 6 : Le macroscope de la connaissance

    Ci-contre, le schéma du

    « Macroscope de la connaissance » par J-L Ermine, montre l'imbrication entre le système sémiotique et systémique.

    Pour exemple, l'information (du système sémiotique) se décrit en termes de données (qui est l'aspect structurel de l'information dans le système systémique), de traitements

    62 Jean-Louis Ermine. Management et ingénierie des connaissances. Modèles et méthodes. Hermes-Lavoisier, 2008, p.13

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    Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par Areva

    (qui est l'aspect fonctionnel du système systémique), de datation (qui est l'aspect évolution de l'information dans le système systémique). Par souci de synthèse, nous ne détaillerons pas ici les deux autres caractéristiques de l'hypothèse sémiotique.

    Grâce à ce système, la personne en charge des interviews va décrypter puis modéliser une connaissance dans un processus global. C'est donc une méthode exhaustive qui structure la connaissance. Cela peut être très apprécié par les experts. À la fin des trois à sept entretiens (pour la capitalisation poussée), il en résulte le Livre de Connaissance qui modélise les connaissances en six points de vue : les connaissances fondamentales, les activités, le contexte historique, les savoirs faire, les concepts ainsi que l'historique des solutions et de leur justification.

    À ce jour, trois versions de la méthode existent (voir Annexe 9 : Les différentes méthodes MASK. p.107) : MASK I pour la réalisation du livre de la connaissance, MASK II pour l'alignement entre la stratégie de l'entreprise et les compétences et les domaines critiques, MASK III pour le partage et le transfert des connaissances. Cependant, MASK II et MASK III sont exclusivement mis en place par le cabinet KIP en lien avec Serge Ariès et Jean-Louis Ermine. En effet, ces méthodes ne sont pas modélisées à ce jour. À ce titre, il existe un Livre de la Connaissance sur la méthode MASK I. Ainsi, toute la méthode est accessible sur internet et permet de se former. Le livre « Management et ingénierie des connaissances : Modèles et méthodes » (2008) de Jean-Louis Ermine permet aussi de comprendre le macroscope de la connaissance. Cependant, il semble peu probable que cela permette sa maitrise totale. Par conséquent, les recours à un Ingénieur des Connaissances ainsi qu'à une prestation globale sont très recommandés afin de pouvoir maitriser la démarche.

    À noter que la méthode MKSMTM (aujourd'hui MASK) a déjà été mise en place chez Areva à une autre époque et dans des circonstances différentes. En effet, avant la formation du groupe en 2001, Areva NC (anciennement COGEMA), avait mis en place cette méthode. Il s'agissait en effet de mettre à disposition de l'entreprise les connaissances accumulées pendant la phase de R&D (dix ans par 300 personnes) du procédé SILVA d'enrichissement de l'uranium. L'objectif final étant alors d'industrialiser le projet dans les meilleures conditions.

    La méthode MASK semble donc être une forte alternative à la méthode KALAM®.

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    3.2.2.3. Définir les besoins pour choisir la méthode

    Areva a ici le choix d'adopter deux démarches différentes. Il y a l'approche qui consiste à se focaliser sur les connaissances, la création d'un livre avec la possibilité de développer une démarche de transfert comme le montre l'annexe 9 (p.107). Ce LC donne accès à une documentation très exhaustive. La méthode KALAM® se base plus sur une approche plus globale avec une gestion participative, voir collective de la connaissance, mais aussi des compétences, proche des communautés, faisant appel à tous les acteurs d'un processus. Cette méthode intègre directement le retour d'expérience dans son fonctionnement.

    La question pour Areva doit alors être : a-t-on besoin d'enrichir un capital de connaissance scientifique et technique ? De l'organiser et de créer une base commune pour tous ? Ou a-t-on plus besoin d'avoir une approche par processus ? Par capacité à maitriser une technologie ?

    Dans ce mémoire, l'ensemble de l'enquête ne permet pas de répondre à ces questions. Ce sont deux approches possibles ayant leurs avantages et leurs inconvénients qu'il sera nécessaire d'étudier plus en profondeur par la suite. Il est important de prendre aussi en compte le contexte de l'entreprise et son évolution future ainsi que les choix stratégiques de ses dirigeants. Cependant, quelle que soit la méthode, l'urgence est de pouvoir sécuriser les connaissances des « Experts-clés ». Ainsi, modéliser leurs connaissances devrait pouvoir être une priorité lors de la mise en place d'une de ces deux méthodes.

    Par ailleurs, chacune des méthodes nécessite des investissements dans la formation, le consulting, la mise en place d'outils de supports. Ainsi pour la méthode MASK il existe deux cabinets qui forment à la méthode : la société Plénitudes, ou la société KIP (agrées pour la formation continue). Le « Club Gestion des connaissances » présidé par Jean-Louis Ermine, permet aussi la formation pour les entreprises adhérentes (possibilité d'y adhérer. Formation en janvier 2017). Par ailleurs, une école forme à cette méthode de modélisation, l'ENSC de Bordeaux INP. Il est alors proposé des partenariats avec la mise en place de stagiaires sur trois niveaux d'enseignements. Areva peut ainsi faire appel à un stagiaire pour la gestion des connaissances et soutenir la mise en place de MASK. Pour la méthode KALAM®, une seule possibilité de formation / mise en place, semble possible avec le cabinet Polia Consulting. A priori donc, la méthode MASK offre plus de possibilités de mise en place et un soutien plus important. Cependant, elle demande aussi peut-être plus d'investissement avec l'intégration de logiciels de mindmapping et la méthode peut être plus fastidieuse. Ainsi, le choix entre ces deux méthodes dépendra des besoins de l'entreprise et des capacités d'investissement. Cela

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    demandera une étude plus approfondie qui nécessitera la réalisation d'entretien avec les principaux acteurs (experts, DRD, KManager) puis l'établissement d'un cahier des charges avec la validation du COMEX.

    Enfin, nous avons vu dans ce mémoire qu'Areva fonctionnait en silo avec des BU indépendantes les unes des autres.

    3.3. Développer une vision collective à long terme

    3.3.1. Favoriser une vision globale

    3.3.1.1. Consolider les budgets et les données RH

    Lors de l'analyse sur les programmes mis en place par Areva, il a été remonté que les budgets des chairs, des contrats de CIFRE ou encore des services d'Experconnect étaient directement gérés par les unités de manière indépendante. Dans un contexte de réorganisation, Areva doit pouvoir optimiser ces budgets. Pour cela, il est nécessaire de les consolider au niveau de la DRD afin de permettre le pilotage de ces programmes sur l'ensemble du groupe. Il serait aussi intéressant de faire remonter les informations par domaine d'expertise concerné puis de réaliser une analyse afin d'harmoniser les pratiques. Il s'agirait d'avoir une vision d'ensemble et de chiffrer les montants sur chaque domaine d'expertise. L'objectif final sera de pouvoir mieux contrôler les coûts de ces programmes. Le calcul du retour sur investissement pourra alors être plus facilement réalisable en coordination avec les BU. Sa réalisation peut ainsi mettre en évidence l'efficacité, ou non, d'un dispositif afin d'engager les actions nécessaires à son amélioration. L'objectif final est de fluidifier le transfert de connaissances lors de ces processus. En ce qui concerne le dispositif Experconnect, le résultat de l'enquête montre qu'une partie des actions peuvent être réalisées avant le départ de l'expert. L'analyse des budgets consolidés et des motifs de recours au dispositif permettra ainsi de cibler les actions à anticiper en priorité. À cela devra s'ajouter une étude plus approfondie des besoins des experts lors de leur départ à la retraite afin de fournir les outils nécessaires facilitant la démarche. Bien entendu, le guide de transfert des connaissances pour les experts, préconisé précédemment, pourra servir de base de travail afin de créer un processus plus élaboré sur le transfert des connaissances dans le cadre d'un départ.

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    À la suite de la consolidation de ces données concernant directement la DRD, il sera intéressant de réaliser une veille spécifique sur les mobilités (internes et externes) des experts. Une fois de plus, il est nécessaire de se situer dans une posture proactive en anticipant les situations à venir. Le département des Ressources Humaines doit ainsi, grâce aux données administratives et au dispositif de « people review » tous les deux ans, anticiper le départ des experts. Cette veille consistera en la réalisation d'un tableau de bord pour l'ensemble du groupe, récapitulant en particulier les données suivantes : âge, âge théorique de départ à la retraite, durée théorique avant mobilité (interne, externe), motif de départ, appartenance à la population des « Experts-clés », domaine de connaissance, présence d'un livre de connaissance (Si le processus est adopté). Ce tableau de bord, réactualisé chaque année devra permettre l'identification anticipée des départs à la retraite. Cette identification devra être suivie d'actions d'accompagnement à mettre en place avec les Ressources Humaines, l'expert et le manager.

    3.3.1.2. La culture du partage

    Nous avons vu jusqu'à présent qu'il existait de nombreuses façons de transmettre de la connaissance et une partie d'entre elles ont été analysées dans l'enquête. Chacune d'elle possède ses caractéristiques, ses avantages et ses inconvénients. À ce titre, sur le terrain, chacun soutient une méthode plutôt qu'une autre suivant ses expériences, son niveau de connaissance, sa perception de la réalité ou encore la réussite de telle ou telle méthode. Tous peuvent tout de même s'accorder sur un point : le partage est la condition sine qua non du processus. Ainsi, développer le transfert de connaissances se résumerait à développer la culture du partage. C'est-à-dire insuffler au sein de l'organisation une atmosphère qui fluidifie les échanges et incite les acteurs à transmettre ce qu'ils ont eux-mêmes appris. Développer cette culture serait comme réduire les points de frottement d'un engrenage. La force nécessaire pour le faire tourner est alors fortement réduite. La confiance agit de même avec la circulation du savoir. En effet, c'est la confiance qui motive les personnes à partager (Roulleaux-Dugage, 2007). En fait, le transfert de connaissances est proportionnel à la confiance entre les individus. Si une entreprise souhaite transférer de la connaissance en interne à moindre coût, elle doit favoriser l'apparition de la confiance entre ses collaborateurs. Martin Roulleaux-Dugage montre alors dans son livre (2007) intitulé « Organisation 2.0 : Le knowledge management nouvelle génération », que la confiance se construit dans la

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    collaboration. Or la collaboration, qui n'est pas naturelle, commence lorsque les personnes développent une attention et une écoute permettant de développer un intérêt pour l'autre. Après le dialogue vient alors la revue par les pairs lorsque chacun est prêt à accepter la critique de l'autre. À ce titre, Areva développe petit à petit la revue par les pairs (« peer reviews »). Au sommet de la pyramide de la confiance se situe la collaboration synergique. Les acteurs s'ajustent constamment entre eux, formant un groupe autonome. Ils n'ont plus besoin du système hiérarchique pour tourner leurs regards sur l'atteinte d'un objectif commun, ils s'auto-organisent de façon totalement autonome pour cela. Ainsi, développer la confiance dans une organisation par la collaboration revient ainsi à permettre aux acteurs d'atteindre d'eux-mêmes les objectifs de cette dernière. Les gains peuvent être considérables (économie du système hiérarchique, rapidité, efficacité, augmentation de la fiabilité du travail, etc...). Areva a donc de nombreux avantages à développer la culture du partage. Comme nous l'avons vu dans ce mémoire, les réseaux sont à l'origine des communautés. Cependant, ils ne se transforment pas toujours en communauté. Pour Areva, développer un processus de transfert de connaissances global reviendrait ainsi à favoriser l'apparition des communautés. Pour qu'une communauté apparaisse, il est nécessaire qu'elle soit visible au sein de son organisation accueillante. Elle doit donc être soutenue en fonction de son niveau de développement (les quatre périodes de vie de Jean-Yves Prax). Lorsque la communauté est encore sous la forme d'un réseau, l'organisation accueillante doit pouvoir favoriser sa mutation en structurant les espaces communautaires. Martin Roulleaux-Dugage en identifie sept : le hall d'accueil qui est l'espace d'information, puis l'espace privé, là où les membres peuvent converser. Il y a aussi le café, là où le dialogue se noue, puis les tables rondes où les échanges sont plus formels, il peut d'ailleurs y avoir les revues par les pairs. Il y a ensuite l'espace projet où la collaboration est menée, les livrables y sont produits. Enfin viens l'amphithéâtre, lieu de communication à toute la communauté et avec l'extérieur, et la bibliothèque, là où se situe la mémoire de la communauté. Lorsque le réseau se transforme et commence à être connu et reconnu, il devient une communauté. L'organisation peut alors agir directement pour la soutenir en communiquant dans un premier temps puis en l'aidant à s'animer et se structurer. Nous allons donc voir les points sur lesquels il serait intéressant qu'Areva agisse.

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    3.3.2. Développer les communautés

    3.3.2.1. Les multiples ressources des communautés

    Nous avons vu qu'il y avait chez Areva, des communautés plus ou moins formalisées, plus ou moins développées. Le collège des fellows est une communauté qui a été créée par la direction scientifique Areva. Elle est donc officielle et a eu des missions précises à réaliser. Les « Tech Network », sont des réseaux, moins officiels, qui ne possèdent pas de Lettre de Mission. Leurs niveaux de développement semblent assez hétérogènes. Pour Martin Roulleaux-Dugage (2007), lorsqu'une communauté arrive à maturation (le troisième niveau d'une communauté si l'on réalise un parallèle avec Jean-Yves Prax), une alliance se noue avec l'organisation formelle (l'entreprise). Un soutien financier apparait et des outils de gestion et de collaboration viennent soutenir sa croissance. Ce qui est alors intéressant de voir, c'est que l'organisation se met à accompagner les nouveaux entrants dans la communauté. L'apprentissage prend forme et la publication de documents montre ses capacités à dégager de la connaissance et à la partager. Pour une culture du partage, il est donc nécessaire pour l'entreprise de porter ses communautés vers la maturation. Il existe pour cela plusieurs moyens.

    Pour les réseaux au sein d'Areva, il est important de pouvoir les soutenir de l'intérieur afin qu'ils puissent se développer de façon structuré. Pour cela, certaines actions peuvent les aider de façon directe comme la mise en place d'un animateur et d'un co-animateur. Un animateur de communauté est un collaborateur interne à la communauté qui prend entre 20% à 50% de son temps pour faire vivre sa communauté (ROULLEAUX-DUGAGE, 2007). Son investissement dépendra du niveau de développement et des besoins de la communauté. Il s'agit d'une personne qualifiée et reconnue dans son domaine. Pour cela, il doit avoir un large réseau professionnel afin de communiquer et mobiliser rapidement. Son réseau peut être constitué de collaborateurs internes et/ou externes à l'entreprise. L'objectif sera en effet d'organiser des conférences ou d'obtenir un soutien pour « vendre » sa communauté auprès de potentiels sponsors. Il a ainsi pour tâche de permettre l'intégration de sa communauté dans l'organisation. Pour cela, il est chargé de lui donner du sens, de définir sa mission principale et de la communiquer. En développant les règles et en gérant le « recrutement » des membres, il permet une croissance structurée et contrôlée. Si besoin, il devra refondre la communauté pour lui permettre de s'adapter à un nouveau contexte ou pour faire évoluer sa structure. Enfin, il facilite les rencontres importantes et élabore le calendrier des évènements.

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    Cependant, il est important de bien concevoir que le rôle d'un animateur de communauté ne peut être tenu uniquement grâce à un bon réseau. En effet, sa position nécessite un vrai savoir-faire professionnel et des méthodes très spécifiques à maitriser. Deux techniques (ROULLEAUX-DUGAGE, 2007) semblent plus particulièrement appropriées pour Areva : la première est la revue par les pairs et est déjà mise en place chez Areva sous son nom anglais « peer reviews ». La deuxième est l'analyse de scénario qui est conçu pour faire face à des changements importants et incertains dans l'environnement de l'entreprise. Le processus consiste à rassembler un large éventail de perspectives (des évolutions technologiques, de la concurrence, d'un marché spécifique ou global ou encore de l'économie) afin d'envisager des scénarios différents des prévisions déjà réalisées par le groupe. Ainsi, cette technique a comme avantage de permettre aux dirigeants d'une entreprise d'être en mesure de reconnaitre une situation dès ses débuts. Pour exemple, le groupe Shell a mis en place cette méthode avant le choc pétrolier de 1973, ce qui lui a permis d'être largement préparé à la situation. La marque a ainsi considérablement amélioré sa position concurrentielle sur son marché durant le choc63. Cela donne aussi la possibilité de prendre les bonnes décisions bien en amont d'une situation difficile à affronter pour l'entreprise. Elle réunit alors essentiellement les cadres supérieurs de l'entreprise avec des experts ainsi que certains managers de l'entreprise afin d'identifier le plus possible de scénarios dans les moindres détails (qui pourraient se révéler important). En mettant en place cette technique, l'animateur valorise largement sa communauté en faisant participer ses membres à une vision stratégique du groupe. Il pourra ainsi plus largement « vendre » sa communauté.

    Les investissements de l'entreprise pour la mise en place d'un animateur peuvent être tout de même rapidement importants. Si l'on considère que ce dernier investit en moyenne 35% de son temps à la réalisation de cette tâche, l'investissement sera de 35% du salaire de cette même personne. Comme il s'agit d'un expert de reconnu par ses pairs, au moins sur un plan national, parfois international, et constituant un bon réseau professionnel, le montant de l'investissement peut rapidement grimper. Suivant les entreprises, un ingénieur chimiste confirmé gagne en moyenne 102k€/ an64, s'il est animateur dans sa communauté, l'investissement peut être ainsi de 35,7k€ / an (pour un investissement à 35% de son temps en

    63 NetMBA, Scenario Planning, [en ligne], consulté le 19 octobre 2016, URL : http://www.netmba.com/ strategy/scenario/

    64 Romain Proton, Salaire ingénieur : métier par métier, [en ligne], consulté le 23 octobre 2016, URL : http://www.ingenieurs.com/infos/salaire-ingenieur-1535.php

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    moyenne). À titre informatif, le guide « Travailler, apprendre et collaborer en réseau » du CEFRIO (Québec) estime le coût total d'une communauté d'environ 15 membres (actifs chaque semaine), à 125,5k$. Le coût comprend 73,5k$ de frais annuels récurrent, dont 20k$ pour l'animateur ayant un investissement à 40% de son temps65. Les 52k$ restants sont essentiellement composés des frais de licence pour l'achat d'une plate-forme informatique ainsi que le coaching et différentes interventions extérieures. À noter que les deux autres principaux points de dépenses sont le coût du temps passé de chacun des membres (1h/ semaine à la participation de la vie de la communauté), ainsi que leurs frais de déplacement aux réunions. En proportion permet d'estimer le coût moyen d'une communauté au sein d'Areva à environ 90k€ de frais annuels. Ce chiffre est donné bien entendu à titre indicatif afin de mieux prendre conscience de l'investissement dans un tel dispositif. Il peut évoluer suivant l'utilisation les investissements souhaités dans les outils de partage, le niveau d'engagement des membres, la fréquence des conférences, etc... Pour le CEFRIO, les données recueillies dans leur analyse montrent que l'animation est la seule pratique de gestion des communautés qui soit significativement associée à la réussite d'une communauté. Afin d'appuyer le travail de l'animateur, l'entreprise peut faire appel à des jeunes pour la co-animation. Chez British Telecom ou Schneider Electric, de jeunes étudiants ont été recrutés en stage afin de prendre ce rôle. En effet, au sein de leur université, ces derniers développent des réseaux qu'ils mettent à profit pour l'entreprise. Ils sont aussi connus pour leur connaissance des outils de collaboration qui se développent particulièrement dans ce milieu. Facebook qui était à l'origine, une plate-forme d'échange entre universitaires à Harvard University, en est le meilleur exemple à ce jour. Le rôle du co-animateur est tourné vers un relationnel interne et sur un support à la communication et à la circulation de l'information. Il est chargé en particulier de publier les articles écrits par les experts, de partager des informations sur la plate-forme d'échange et de collaboration afin de faire vivre les échanges. En publiant du contenu, les membres vont pouvoir réagir à ce contenu, commenter, argumenter et ainsi créer de façon indirecte des nouvelles connaissances. Nous voyons ici l'importance des outils de collaboration. Nous allons donc nous y intéresser particulièrement.

    65 CREFRIO, Travailler, apprendre et collaborer en réseau - guide de mise en place et d'animation de communautés de pratique intentionnelles, 2005, p.29, [en ligne], consulté le 23 octobre 2016, URL : http://www.cefrio.qc.ca/media/uploader/2_travailler_apprendre_collaborer.pdf

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    3.3.2.2. Les outils numériques de collaboration et de partage

    Pour une communauté, il existe plusieurs outils à mettre en place pour favoriser la collaboration et le partage. Il y a d'une part ceux qui sont liés au monde du numérique et d'autre part ceux liés à la présence physique du collaborateur. Dans ce dernier, nous avons vu qu'il existe des outils pour animer une communauté comme la revue par les pairs ou l'analyse des scénarios. Ces derniers sont aussi des outils qui déclenchent une collaboration entre les membres d'une communauté ou avec le reste de l'organisation. Il en existe d'autres réunissant physiquement les collaborateurs comme l'open space, les projets ou encore les congrès. Cependant, à l'ère de l'ultra-connexion, les outils informatiques de réseaux sont de plus en plus développés et performants. Ils sont d'ailleurs fortement appréciés par les nouvelles générations comme vu dans la sous-partie précédente. Les pages internet de collaboration comme les pages « Wiki » explosent en nombre depuis quelques années. Elles offrent la possibilité pour chacun d'apporter sa connaissance. Cependant, encore à ce jour, ce sont majoritairement des individus passionnés dans un domaine qui vont contribuer à la création et à la modification du contenu de ces pages. En effet, l'adhésion volontaire à une communauté se fait sur la motivation et la passion pour une activité. Leur nombre doit alors être suffisant pour que le site internet soit actif. Ainsi, dans l'hypothèse où les membres des communautés adhèrent par passion ou intérêt personnel et dans le cas où le nombre d'adhérents est suffisant le fonctionnement de page Wiki pourrait avoir une place toute particulière chez Areva. En effet, pour le moment, les pages « Wikipiti » ne sont pas toujours actives, optimisées, ni développées dans les domaines d'activités du groupe. Pourtant, si les conditions sont suffisantes, leur généralisation l'entreprise pourrait être un atout puissant, car la collaboration y est forte. Par ailleurs, si la méthode de modélisation de la connaissance, KALAM®, ou MASK, venait à être effectivement développée au sein d'Areva, les connaissances dégagées pourraient être incluses dans les « Wikipiti ». Ainsi des modifications pourront être apportés régulièrement afin faire évoluer les Livres de Connaissances notamment. Une ouverture du Wiki à l'ensemble du groupe serait alors intéressante pour développer et diffuser une connaissance tout en favorisant la collaboration. Un suivi des modifications devra bien entendu être mis en place pour reconnaitre la contribution de chacun. Ainsi les experts, principaux concernés par la contribution à la création du contenu des connaissances, peuvent très largement participer à la création d'une connaissance collective. Ce sont en effet les plus à même de maitriser une technologie, un processus de fabrication grâce aux connaissances qu'ils ont développés dans leur domaine.

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    Cependant, pour pouvoir collaborer rapidement et augmenter le niveau d'échange, il est nécessaire de pouvoir communiquer grâce à une plate-forme de type Yammer (cf. Annexe 8 p.106). Les fonctionnalités permettant l'intervention de chacun, les commentaires, les simples « Like », la publication d'une demande comme celle que nous avons vue précédemment, et d'autres encore permettent à chacun de se sentir concerné. Elles ont pour fonction d'inciter au partage, même les plus simples. Le « Like », mis en place et popularisé par Facebook est un des plus formidables outils permettant aux membres de rester en contact. En effet, même s'il n'y a rien à dire, même si aucune connaissance particulière n'est à partager, il permet de montrer sa présence, d'être vu dans la liste des personnes qui ont « liké » et de montrer son intérêt pour le sujet. Ils sont des indicateurs efficaces sur l'activité d'un réseau, l'importance et l'utilité des sujets partagés. Pour la personne qui publie, il s'agit d'un outil de mesure qui permet de savoir si son sujet est intéressant, accrocheur, vendeur ou bien utile à la communauté. Il participe aux mesures et indicateurs d'activités d'une communauté. Il est intéressant de noter que le « Like » suit les règles définies par Karl-Erik Sveiby et Roland Simsons (2002) sur les indicateurs de performance des communautés. Ainsi, les indicateurs doivent être définis par la base afin que toutes les parties soient impliquées, ils doivent être utilisés par ceux qui les produisent et les résultats doivent être rendus publics afin que chacun puisse apprendre des autres. Martin Roulleaux-Dugage (2007) identifie quatre types d'indicateurs appelés « métrique typique » : les indicateurs d'activité communautaire (réunions, documents produits, etc.), les indicateurs de capital social (densité des liens entre personnes, centralité, etc.), les indicateurs de production communautaire (problèmes résolus, publications, séminaires, etc.) et enfin les indicateurs de résultat (satisfaction des membres, des clients, marge sur affaire, etc.). Pour vendre les communautés auprès d'Areva et obtenir des soutiens de tout ordre (finance, communication, mise à disposition de ressources, ...), les communautés doivent s'aider d'indicateurs. Cela leur donnera alors la capacité de montrer leurs valeurs, leur développement au sein du groupe ou encore leurs capacités de progression.

    Pour résumer la troisième partie de ce mémoire, l'entreprise doit pouvoir agir rapidement en soutenant le transfert des connaissances par un guide à destination des experts et des managers. Areva peut aussi avoir intérêt de mettre en place la méthode KALAM® ou MASK pour modéliser et transférer son capital de connaissance. Enfin, le groupe a tout intérêt à développer une vision globale et une culture de partage. Pour cela, il sera nécessaire de développer les communautés en les soutenants grâce à des animateurs et co-animateur, de développer la collaboration avec des outils de type Wiki et des plates-formes comme

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    Yammer. Il faudra alors vendre ces projets en créant des indicateurs qui donneront des éléments tangibles de leur participation aux résultats du groupe.

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    CONCLUSION

    CONCLUSION

    Nous savons maintenant que l'économie mondiale tend vers l'économie de la connaissance. Les exemples comme celui de la Corée du Sud sont des preuves vivantes que les organisations ont tout intérêt à capitaliser à long terme sur leurs connaissances, les technologies qu'ils ont développées et donc sur ceux qui les maitrises. Avec le développement des populations, les demandes en énergie sont en constante évolution. Le développement exponentiel des technologies connectées fait croitre de façon proportionnelle la demande en électricité. Cependant, l'Homme ne peut se permettre de se tourner indéfiniment vers les énergies à haute émission de CO2 qui sont principalement utilisées à ce jour. Les défis environnementaux poussent ainsi l'Homme à développer ses technologies pour les rendre plus performantes et à innover pour trouver de nouvelles solutions. L'énergie nucléaire est une des alternatives qui a encore de forts potentiels d'évolution. Ainsi, l'arrivée de nouvelles technologies dans ce domaine permet d'augmenter les capacités de production. Cependant, la sûreté et la sécurité des installations sont parfois remises en cause. L'industrie doit ainsi prouver qu'elle peut parfaitement répondre à ces défis. Pour cette raison, Areva développe ses technologies à la fois pour les rendre plus sûrs et en même temps plus performante pour répondre aux attentes de ses clients. Ses experts détiennent ses connaissances les plus avancées dans l'entreprise. Le départ de certains identifiés comme « clés » peuvent faire perdre à Areva la maitrise de certaines technologies qui étaient essentielles à la production de service ou de biens envers le client. Il est alors crucial pour Areva de conserver leur maitrise au sein de son organisation. Pour cela, le transfert de connaissance dans la population des experts est fondamental. Or, avec le Plan de Départ Volontaire et une population d'experts de niveau 3, majoritairement proche de la retraite, Areva fait face à un défi stratégique de taille. Il s'agit en effet de transférer leurs connaissances, explicite comme tacite, afin de continuer à répondre aux attentes de son marché. De plus, avec le développement du marché asiatique du nucléaire, Areva a aujourd'hui une importante opportunité de développement à saisir si elle continue à accompagner ses clients en particulier grâce à son réseau d'expert. Cela permettra ainsi au groupe de retrouver le chemin d'une croissance confortable après plusieurs années difficiles.

    Pour faire face à ces différents enjeux, l'entreprise a mis en places différents programmes et plusieurs initiatives locales sont lancées par les unités. Cependant, elles sont aujourd'hui

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    CONCLUSION

    indépendantes les unes des autres et certains programmes ont besoin d'être ajustés. Afin de mieux organiser la filière expertise, le collège des fellows a fourni de nombreuses recommandations qui permettent à l'entreprise d'orienter plus justement sa politique et ses actions à ce niveau. L'enquête a ainsi montré un besoin d'obtenir une vision d'ensemble. Dans un premier temps, la mise en place d'un guide de transfert des connaissances pour les experts a été préconisée. Ce guide a pour objectif de soutenir les besoins accrus de transfert des connaissances des experts dues au PDV et aux importants départs à la retraite des experts les plus qualifiés. Dans un second temps, il a été recommandé de réaliser la modalisation des connaissances des experts, en particulier, ceux définis comme « clés ». Cela permettrait à la fois de sécuriser leurs connaissances, de les capitaliser, et en même temps, d'en faire une base commune pour un partage transverse au sein de l'entreprise. Cela doit ainsi lancer une vision d'ensemble et une culture de partage au sein de toute l'entreprise. Pour cela, Areva doit obtenir une vision d'ensemble. La consolidation des données et des informations a ainsi été préconisée afin de mieux anticiper les départs, d'optimiser les programmes mis en place chez Areva et de mieux contrôler les ressources. Ces mesures doivent alors s'inscrire dans une dynamique plus large de culture du partage. Cela doit permettre de transférer la connaissance entre les individus tout au long de leur carrière, et en particulier en ce qui concerne la population des experts. Un des avantages serait de tendre vers une homogénéisation des pratiques et du niveau de service du groupe envers ses clients qui engendrerait une plus grande confiance de ces derniers envers Areva. Pour cela, les communautés qui sont vecteurs de collaboration, de connaissance collective et donc de création de richesse doivent être soutenues et encouragées dans leur développement. Des animateurs soutenus par des stagiaires doivent ainsi permettre de créer une dynamique à la fois interne et externe à la communauté. L'énergie cinétique ainsi développée devra permettre de tirer vers le haut les performances et la croissance d'Areva.

    Cependant, toutes ces actions nécessitent un investissement qui est à la fois humain et financier. Or, pour Areva la difficulté est justement de pouvoir investir sur du long terme pour mettre en place une culture du partage grâce aux communautés par exemple. À ce jour, l'entreprise est dans une situation instable avec la vente d'Areva NP à EDF qui n'est pas encore réalisée. Il reste plusieurs opérations financières en attente, comme l'augmentation de capital du groupe afin de garantir la vente à EDF.

    Aujourd'hui, le groupe doit aussi faire face à une économie toujours instable et difficilement prévisible. Sa nécessité d'obtenir des résultats à court terme (1 à 3 ans) influence nettement

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    CONCLUSION

    ses investissements qui seront dirigés vers des actions de courts termes. Ainsi, le soutien aux communautés peut sembler aujourd'hui difficile. En effet, les arguments pour le développement d'une culture de partage par les communautés sont valables sur le long terme et moins sur le court terme. Comme le précise Martin Roulleaux-Dugage, une communauté ne commence à être réellement à son plein potentiel qu'à partir de 5 ans d'existence minimum et cela peut parfois mettre 10 ans. Les résultats opérationnels des investissements seront donc particulièrement visibles qu'au bout de plusieurs années. Il peut donc y avoir de fortes réticences à réaliser ces investissements. De plus, Areva est une entreprise qui a eu plusieurs phases de croissances alternées par des réorganisations. En effet, malgré l'augmentation du parc nucléaire mondial, chaque centrale est un projet important pour l'entreprise et mobilise plusieurs milliers de collaborateurs. Ainsi, avec le développement du marché en Asie (en Chine principalement), Areva va à nouveau faire face à une demande importante. Les communautés doivent pouvoir s'adapter alors aux différentes phases de croissances. Pour cela, elles doivent être suffisamment matures pour supporter ces évolutions. Les difficultés auxquelles doit faire face l'entreprise pour la mise en place d'une culture de partage, sont donc liées à des choix stratégiques à poser. Il s'agit en effet de préparer l'avenir de l'entreprise en instaurant une culture de partage qui nécessite des investissements. Le contexte actuel n'y semble pas favorable, cependant Areva a ici les moyens de contribuer à la reprise de sa croissance en réalisant ces investissements.

    Certaines entreprises, comme Google, ont compris que la connaissance pouvait être un facteur de réussite et leur développement en est le signe. Leur fonctionnement interne le montre : la collaboration et le partage de connaissance y sont très largement favorisés. Facebook ou Wikipédia sont des preuves vivantes que les mentalités ont aujourd'hui profondément évolué sur le partage de l'information. Les utilisateurs sont aujourd'hui des parties prenantes actives dans la création et le partage de connaissances. Chez les jeunes générations particulièrement, l'information circule de plus en plus vite. Les organisations apprenantes montrent qu'aujourd'hui la collaboration est de plus en plus ancrée dans les mentalités en cette première partie du 21e siècle. Alors que les individus sont de plus en plus autodidactes, allons-nous observer un changement profond dans le mode d'apprentissage professionnel ? La formation telle que nous la connaissons aujourd'hui, va-t-elle un jour, disparaitre pour laisser place aux communautés de pratique ?

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    Bibliographie

    Bibliographie

    Livres :

    P. Cohendet, F. Créplet, O. Dupouët, La gestion des connaissances- Firmes et communautés de savoir, Economica, Gestion, Paris, 2006, 202 p.

    Martin Roulleaux-Dugage, Organisation 2.0 - Le Knowledge management nouvelle génération - Mettre en place des communautés de pratique dans l'entreprise, Eyrolles, Stratégie, Paris, 2007, 258 p.

    Jean-Yves Prax, Le manuel du Knowledge Management - Mettre en réseau les hommes et les savoirs pour créer de la valeur, Dunod, Stratégies et management, Paris, 3e édition, 2012, 528p.

    Hirotaka Takeuchi, Ikujiro Nonaka, La connaissance créatrice : La dynamique de l'entreprise apprenante, De Boeck, Management, 1997, 303p.

    Jean- Yves Trépos, La sociologie de l'expertise, Presses Universitaires de France (PUF), Que sais-je ?, Paris, 1996, 127p.

    Jean-François Ballay, Tous managers du savoir ! La seule ressource qui prend de la valeur en le partageant, Editions d'Organisation, Paris, 2002, 429p.

    Paul REUSS, L'épopée de l'énergie nucléaire: une histoire scientifique et industrielle, Paris, EDP SCIENCES, 8 février 2007, 167 p.

    Brice Mallié, Transformer le savoir en profit - Enjeux et bénéfices du knowledge management, Village Mondial, Pearson Education France, Paris, 2003, 240p.

    Jean-Louis Ermine, Management et ingénierie des connaissances. Modèles et méthodes. Hermes-Lavoisier, Paris, 2008, 212p.

    Articles scientifiques :

    J-P Bootz, E. Schenk, L'expert en entreprise : proposition d'un modèle définitionnel et enjeux de gestion, Management & Avenir, 2014/1 (n°67), p.78-100.

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    Bibliographie

    Stéphane Andrieux (Directeur scientifique EDF R&D), Reconnaitre l'expertise, mais surtout mieux la solliciter, Revue Générale Nucléaire, numéro 4 Etre un expert, Juillet-Août 2014, p.34-37

    Olivier Musseau (CEA/DEN/DRH), L'organisation de l'expertise scientifique et technique à la Direction de l'Énergie nucléaire du CEA, Revue Générale Nucléaire, numéro 4 Etre un expert, Juillet-Août 2014, p.22-28

    K-E. Sveiby, R. Simsons, Collaborative Climate and Effectiveness of Knowledge Work - an Empirical Study, Journal of Knwoledge Management, Vol. 6 Iss: 5, pp.420 - 433

    Peter Drucker, L'émergence de la nouvelle organisation, Le knowledge management, Harvard Business Review, aux Editions d'Organisation pour la traduction française, Paris, 1999.

    Jean-Philippe Bootz, Eric Schenk, L'expert en entreprise : proposition d'un modèle définitionnel et enjeux de gestion, Management & Avenir, 2014/1 (n°67), p.78-100.

    Robert Coughlan, Dr. Edward Teller's Magnificent Obsession, LIFE magazine (6 September 1954), p. 62, [en ligne], consulté le 25 juin 2016, URL : https://books.google.fr/books

    Ressources en ligne :

    Académie des technologies, Charte de l'expertise de l'Académie des technologies, 4 juillet 2012, [en ligne], consulté le 2 août 2016, URL : http://academie-technologies-prod.s3.amazonaws.com/2014/08/22/15/56/26/231/CHARTE_DEF_vot_e_le_4_juillet_2012_ .pdf

    Jean-Philippe Bootz, Comment définir et gérer l'expert ?, [en ligne], consulté le 25 juin 2016, URL : http://www.agecso.com/wp/wp-content/uploads/2016/01/BourbaKeM-5.pdf

    ANRT - Association Nationale de la Recherche et de la Technologie, CIFRE - Définition, mode d'emploi, [en ligne], consulté le 6 septembre 2016, URL : http://www.anrt.asso.fr/fr/ espace_cifre/mode_emploi.jsp?p=40#.WA0CtcnS7K0

    OCDE, Science, technology and industry scoreboard 1999: benchmarking knowledge-based economies, septembre 1999, http://www.oecd.org//dsti/sti/stat-ana/prod/scorebd_summ.htm

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    Bibliographie

    Lionel JOSPIN, discours inaugural au « Programme d'action gouvernemental pour la société de l'information (PAGSI) », Hourtin, août 1997, [en ligne], consulté le 13 juin 2016, URL : http://discours.vie-publique.fr/notices/993002100.html

    Etopia, Introduction au biomimétisme - « L'innovation inspiré par la nature », traduction par Lydia Blaise, [en ligne], consulté le 17 juin 2016, URL : http://www.etopia.be/IMG/pdf/ biomimetisme.pdf

    Bernard Pire, Découverte de la radioactivité naturelle, Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 17 août 2016. URL: http://www.universalis.fr/encyclopedie/decouverte-de-la-radioactivite-naturelle/

    Alain MALLEVRE, L'histoire de l'énergie nucléaire en France de 1895 à nos jours, [en ligne], consulté le 3 juillet 2016. URL : http://arcea-dif.fr/bulletins/133/energie.pdf

    Institut de Radioprotection et de sûreté nucléaire, Three Mile Island (États-Unis) 1979, [en ligne], consulté le 11 juillet 2016, URL : http://www.irsn.fr/FR/connaissances/Installations _nucleaires/Les-accidents-nucleaires/three-mile-island-1979/Pages/sommaire.aspx#.WAH2 QcnS7K0

    Bernard Bigot, Point sur les conséquences sanitaires de l'accident de Tchernobyl, [en ligne], consulté le 11 juillet 2016, URL : http://www.cea.fr/Documents/CONSEQUENCES%20 SANITAIRES%20DE%20L%E 2%80%99ACCIDENT%20DE%20TCHERNOBYL.pdf

    Sabrina Tiphaneaux, Le marché mondial du nucléaire et ses perspectives - Quels sont les groupes les mieux positionnés pour tirer profit de l'évolution du marché ?, Les Echos Etudes, [en ligne], consulté le 25 juillet 2016, URL : https://www.lesechos-etudes.fr/etudes/energie-services-collect/etude-marche-mondial-nucleaire/# fndtn-presentation

    AIEA, Rapport d'ensemble sur la technologie nucléaire pour 2015, 13 juillet 2015, [en ligne], consulté le 25 juillet 2016, URL : https://www.iaea.org/About/Policy/GC/GC59/GC59 InfDocuments/French/gc59inf-2_fr.pdf

    Société Française d'Énergie nucléaire, Le nucléaire dans le monde, sfen.org, [en ligne], consulté le 25 juillet 2016, URL : http://www.sfen.org/fr/lenergie-nucleaire/le-nucleaire-dans-le-monde

    Sophie Fabrégat, Vieillissement du parc nucléaire : la prolongation de la durée de vie, un enjeu stratégique et économique, Actu-environnement, [en ligne], consulté le 25 juillet 2016,

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    Bibliographie

    URL : http://www.actu-environnement.com/ae/dossiers/nucleaire/viellissement-parc-centrales -nucleaire-prolongation.php4

    NetMBA, Scenario Planning, [en ligne], consulté le 19 octobre 2016, URL : http://www.netmba.com/ strategy/scenario/

    Romain Proton, Salaire ingénieur : métier par métier, [en ligne], consulté le 23 octobre 2016, URL : http://www.ingenieurs.com/infos/salaire-ingenieur-1535.php

    CREFRIO, Travailler, apprendre et collaborer en réseau - guide de mise en place et d'animation de communautés de pratique intentionnelles, 2005, p.29, [en ligne], consulté le 23 octobre 2016, URL : http://www.cefrio.qc.ca/media/uploader/2_travailler_apprendre_ collaborer.pdf

    Serge Ariès, MASK, [en ligne], consulté en ligne le 17 octobre, URL : http://aries.serge.free.fr /index.php?page=content/MASK/SA32#MASKI

    Ressources internes à Areva :

    Philippe KNOCHE, Président du groupe AREVA, Flash Areva n° 929 - Feuille de route Areva 2016-2020, 15 juin 2016

    Fiche « Expert model »

    Prévision de croissance de la production d'électricité par l'énergie nucléaire dans le monde en 2007

    Le logiciel de partage SharePoint

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    Glossaire des cigles

    Glossaire des cigles

    GC : Gestion des connaissances

    TC : Transfert des connaissances

    KM : Knowledge Management

    AIEA : Agence International de l'Énergie Atomique

    CEA : Commissariat à l'Énergie Atomique

    DRD : Direction Recherche & Développement

    PDV : Plan de Départ Volontaire

    PDA : Entretien de performance et de développement

    CIR : Crédit Impôt Recherche

    ANRT (Association Nationale de la Recherche et de la Technologie),

    CIFRE (Convention Industrielle de Formation par la Recherche)

    COMEX : Comité Exécutif

    ROI : Return On Investment = Retour sur investissement

    CdF : Collège des Fellows

    RRH : Responsable Ressources Humaines

    Annexe 1: Prévision de croissance de la production d'électricité par l'énergie nucléaire dans le monde en 2007.

    Annexe 1: Prévision de croissance de la production d'électricité par l'énergie nucléaire
    dans le monde en 2007.66

    66 Source : AIEA, Areva Direction Stratégie Corp.

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    Annexe 2 : Âge moyen des parcs nucléaires

    Annexe 2 : Âge moyen des parcs nucléaires67

    67 Sophie Fabrégat, Vieillissement du parc nucléaire : la prolongation de la durée de vie, un enjeu stratégique et économique, Actu-environnement, [en ligne], consulté le 25 juillet 2016, URL : http://www.actu-environnement.com/ae/dossiers/nucleaire/viellissement-parc-centrales-nucleaires-prolongation.php4

    Annexe 3 : Modèle systémique d'un Système de Gestion des Compétences

    Annexe 3 : Modèle systémique d'un Système de Gestion des Compétences68

    68 Source : Jean-Louis Ermine, Management et ingénierie des connaissances. Modèles et méthodes. Hermes-Lavoisier, 2008, p.20.

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    Annexe 4 : La fiche « Expert model » AREVA

    Annexe 4 : La fiche « Expert model » AREVA

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    Annexe 4 : La fiche « Expert model » AREVA

    de develappernent intere9sante pur les experts hauLerrenl qualifia, dill l'ayancement de cerrlére esl base prindpelerrtient Sur l'experIFM. et le rratarielk proless.anneiles au se.i et en derxAs d'AFEVA.

    sien que la principale ms9ian d'un expert Salt de latrnir un support métier a court terme. San entité Sur des Sujets acienitngum el techniques_ les experts AREVA sont censés également coltacrei une partie de leur temps de travai a des r7iesens

    qui ,rant eu de ce périmètre, soit pare
    qu'elles recouuren1 leg leriMes alternes du
    Gratpe AREVA, Sail parce qu'elles concernent des questions slrtilexuesa moyen strong larme.

    Lea Marins types d'un expert AREVA sant les sulvenles

    1-Accur 1pagner les activity s de le ritrc prise

    · Inleracrian avec Ins LIIer11B pour resbudre des probiérnes techniques .

    çantrr>buer sok appela «Mes cvrmtiereieux Ut les problèmes iechriques loua en adoptant tel état d'esprit métier; proposer des ex lainons realisabies, slides et mies aux pradtérnes lschrig as rencontres air le terrain_

    § Collabbr9lien BveC les abri /4.S de Sûreté

    Développer une connais solen-Utique
    approlardre du lorraine d'81ude afin d'aider les sourdes de saleté 8 prendre lest bannes déclama réglernentalre3

    · Réelieetian de revue techniques sur les projets tits

    offrir deg aerti,ce de conseil scientifiques et lechr. ues aux tiuipee projet, dans le contexte des examens. de ccnceplian, des revues pat les pairs cu des retours d'expérience.

    2- Encourager l'innovation et la créatI vita

    + Dynamisalibrti le l'esprit d'entreprise

    Agir comme un catalysait d-rrnavaben de 1-entreprise, en générant des concepts .irovanls etyani un potentiel commercial et en les Vanslarmanl en projets réels 3.rec Partie de ccaabaraletrs Lenéllciant de moins d'andennelé.

    § Periicipatlen attire aux delis de l'innovation

    &valuer les Idem einauanLes deg aulnes et gulden les equiles pollard I'Ir.ic,ration pour qu'elles réussissent_

    · Creation i es actifs de le preprieté irSlelktluelle d'AREVA

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    Deventer les breveta dès narwesee Inve hire arsrilrIxer activement aua nouveaux prote simukslion et de rnodéllsairon IirYcrmerique_

    3- Communication et rdseaux

    I. Publication iraniiLfrs

    Publier les rasulLate de le recherche sdentttique eat Interne (MM, rapport sdentrrque, Ilvres blancs, el c4 ou en externe (artmles dans des revues sdentdlques et lechr.ques seedallsée3` etc.) de ragcn donner deuanlege d'exposition 8 l'expert et arnAllarer l'Image aden4M1que et technique d'ARE VA_

    · Participation a des conferences comme urareur ill uilk

    Pertici er corme canlérencier amie 8 des cailérences Inlernallorrales est tri Signe de reoonnel9eancederexcertrse par des pairs_ Erg :Veine, mener deg i< débats teemrques . avec rn public plus large de ccialocwateurs AREVA eel Bellement une raglan d'eccroiLre la Velbaile et I'expasitcn de I'e.erL

    ·

    Être arteriole actif de réseaux Internes tresebu.t LeCh
    ·iique
    ·ml

    Jeerer un role actif dens le cr'aat an el le soutien aux communautés 'techniques, qt scull le pierre argidere des ciretpouee de geslioin des

    cerÏlal d'AREVA .

    § Eire membre men' de rdeeaux externes {sudètes scientifiques et organismes de rlbrmali9-dlidn)

    Jouer uni rale actif dans le eréat i.i e1 le soutien &Jx Societ s edenttri'ques telles que I'AFCEN_ la 5FEN, etc.) au les orgeersmeS de rrarma119aGafi .I. X ii& et mimes), avec l'abjecur de madeler l'Image el l'enulror.ement regiemenleare d'AREVA.

    4- Soutenir la strategic de

    developpanient LT d'AREVA

    § Jouer un rôle de leader dans le plenificetibn tecinnolegique et les processus dee planification

    CantrIIuer activement eui Initiatrres de pianln[aLan techndaglque_ nctarrrne lt en venait le respcnsa11l1l1.5 d'elabllr les plans Cane' associés Cu dér Ioppee ent de reuertr e technique nécessaire parr exéa,ier celteleue de raite.

    Annexe 4 : La fiche « Expert model » AREVA


    ·

    · Assurer une veille Lechn uluyiq ur

    Rester informe des actides déreloppées partout dans le monde dans le drrrlaine de fel.ertrse, natammai1 che2 les oonourrenLs

    d ARE VA.

    · NodéllsatIon et déveluppErriEgit de at simulation

    Être activement Irnpllqué data les pro}ete de rrrDdéli9at~rl eL de sarrulaton. qui sont les me~eurec 2COrCi he9 pour capitaliser les cor.1 iscanees s4ienlinques eL les translerer_

    5-Transfert dos connaissances aux

    n ouvelles generatI ares

    · Conduite de stages de forrnstioe en interne sau thex le client

    D i oçper des 4daclldels. dor ier des coniéraeees et mener des * Débats lechniques

    · Établissement de retch /16 tonstantee awei les unirtrrtit'S, les Inalitut5
    · ou Ins Laboratoires

    Enseigner dans des écales d'Ingénieurs ou é funlverslté et établir des liens étrcltc avec les leboralalres de recherche.

    · AttorripiugnerrIent et mentbrat de dertdraul8

    Superviser le l'aval de Ihéee et accarragner les ruturs experts.

    Support de mission

    Chaque année- las Experte AREVA doivent se llxer des etJectlls SMART clercs au rt1Oirra deux de cox tiny cdrrduriex et s'sficircer de couvrir lea cinq tategorla de mission. au fur et 8 rrresure du d .+eloppernerrt da leur carfare. Ces iecilfs doivent compter pour au moins :

    · 20 "A de !aima ot ecttle connue expert, de

    d 'eau 1-

    · 417 9à comme experts de niveau 2.

    · 60 % comme experts de niveau 3,

    el doivent concerner de plus en plus l'ensemble du Groupe AREVA tandis que le niveau deuerase augmente.

    Demeure. les experts di?vatl elle &values rormenament 8 f.ssue de ces 1117l9 errs par leurs client

    interne. el 'm uniqutinenl peat leur

    nom alter. Per conséquent, Ice experts *Ment comrnunlgr.er le tom de leurs éiraluateur9. el ces deniers dv?c'tt etre adaptés par leur manager. Les evalluateurs doivent fournir trie évaluation l'annelle per écilt au ramager de l'expert dans le cadre de revaluat:on ormaie des perfamicnces. Les experts AREVA sont autorisés 8 rece.+oïr un 9ourllen de leur direction et de l'trganisation de le gourernance de l'expertise clin daoeompir leur missaon de lalaçon la plus éoonorrique.

    Le soutien aux experts oerrorend notamment

    n Du tenrrps is libre 4 preieye peur IC9 atiiritb9 d'expertise

    Les managers des experts AREVA acceptent de renoncer 4 contrôler une partie du temps de t'aval des experts afin que ces dentiers pulsent réaliser les arasions dexpertee dérlriea ci-dessus. parilculléreraent lorsque eella9 1 concernent daut ee enbles AREVA_ Ces missrons peuvent apç araltre 8 premlére vue comme une perte de ressources, mals les managers peuvent réclamer la cnntrlbutlon d-everts AREVA d'autres &ripés pour soutenir écplamenl leurs activités.

    · Aularite sur lei jeunes retruec

    Une des missions Importantes des experts est de transférer leurs canrialssances 8 des colleguee plus Jeunes. Il Faut pour cela recourir au luloral_ au mentoral et le su er.1ek i sur une pémde de 1emprs relativement lampe. Arisa, les excerta serrions et les * rellows dclrent nouialr exercer leur aulnaie 8 temps partiel sur les renourees nécessaires 8 fexeculton de lens Mores d'expertlse-parboulierement leurs pures cdlégues lglealement 3 s 5 Femmes'.

    § Soutien visant 8 Mir une neputation

    Les 'finies aenices ad ulnistralirc doivent 81re fournis par la DFn pour ander les e.kperls AREVA 8 gérer leur noLexlété $ frrterleur du

    Q

    CORPORATE - R&D RH

    AREVA

    rent. pwranary.e

    Page 100 sur 113

    Annexe 4 : La fiche « Expert model » AREVA

    Page 101 sur 113

    Page 102 sur 113

    Annexe 5 : Le guide d'entretien semi-directif

    Annexe 5 : Le guide d'entretien semi-directif

    Questionnaire d'enquête terrain semi-directif pour Expert AREVA

    - Âge :

    - Ancienneté en tant qu'Expert et niveau d'expertise : - Domaines d'activités :

    - Missions réalisées :

    - Compétences spécifiques au poste :

    Objectifs de l'entretien :

    ? Mieux connaître le système de transfert de connaissances au sein d'AREVA

    ? Faire une analyse critique du fonctionnement du transfert : Déterminer les points forts (moteurs) du processus et les points faibles (freins) qui entravent le bon fonctionnement du transfert et indiquer les évolutions et/ou les changements à effectuer.

    ? Proposer des solutions/schémas prenant en compte les résultats de l'analyse critique

    Le transfert des compétences au sein de la filière Expert du groupe AREVA

    1) Mieux connaître le système de transfert au sein d'AREVA :

    - Comment se déroule le transfert des connaissances au sein d'AREVA ? Quelles en sont les étapes ?

    Acteurs :

    Moyens :

    Quand :

    Types de connaissances :

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    Annexe 5 : Le guide d'entretien semi-directif

    - Avez-vous déjà eu à mettre en oeuvre un transfert d'une partie ou de la totalité de vos connaissances ?

    - Comment partagez-vous de façon informelle (ou formelle) vos connaissances aujourd'hui ?

    2) Déterminer les points forts et les points faibles du processus (qui entravent le bon fonctionnement du transfert) et indiquer les évolutions et/ou les changements à effectuer.

    - 2.1/ Tenant compte de votre expérience, quels sont aujourd'hui les points (techniques,

    relationnels) qui, en évoluant, pourraient fluidifier le processus et le rendre plus efficient ?

    - 2.2/ Quelle est la place de la communauté des experts dans le processus ? Comment fonctionne-t-elle ?

    3) Proposer des solutions/schémas prenant en compte les résultats de l'analyse critique

    - 3.1 /En principe quel est l'élément qui devrait être à l'origine du transfert de connaissance ? Est-ce aux Experts d'impulser le processus ? Ou est-ce à un acteur externe à la communauté des Experts (RIT, management, ...) ?

    - 3.2/Et plus particulièrement, dans votre cas, quel est l'élément qui vous pousse à effectuer le transfert des connaissances ?

    - 3.3/ Selon vous, quel est le meilleur schéma type pour le transfert de compétences ?

    Annexe 6 : L'analyse des entretiens : Extrait du tableau Excel

    Annexe 6 : L'analyse des entretiens : Extrait du tableau Excel69

     

    Date

    Moyen I

    Entretien n°1

    31/08/2016

    Face à face

    Entretien n°2

    22/08/2016

    Face à face

    Entretien n°3

    02/09/2016

    Face à face D

     
     
     
     
     
     

    Entretien n°4

    27/09/2016

    Face à face E5

     
     
     

    Entretien n°5

    04/10/2016

    Face à face Ea

     
     
     
     
     
     

    Entretien n°6

    10/10/2016

     
     
     
     

    Entretien n°7

    05/07/2016

    G

     
     

    5

    Entretien n°8

    25/08/2016

    r

    u

    Face à face

    Entretien n°9

    22/08/2016

    c

    Téléphone j E

    Face à face

    Entretien n°10

    27/07/2016

    n

    Par écrit G

     
     

    Face à face A

    Entretien n°11

    27/07/2016

    d

    Par écrit

    dée 1 : Les programme mis en place Problématique identifiées Solutions Idée 2 : GC / TC Problématique identifiée Solution

    FCEN par ex)

    etraite, il se créer une société d'auto-entrepreneur (ou ne SAS). Experconnect s'occupe alors des formalités xperconnect : Depuis 5-6 ans. avant relation avc des dministratves (social, juridique, fiscal) et met ensuit

    on effectués. Il le reconnait, "pas grand-chose" n'est

    éalisé.

    vantage : Fourni des garantis sur les risques de poursuite

    0% du temps pour résoude des problémaiques xperconnect : Chez Areva, lorsqu'un expert part à la rticles scientifiques : 70% à l'initiative de l'expert, 10% emandés par les unités ou pour des projets. Ils ermettent de se faire connaitre, d'activer et de travailler

    iagramme

    ap expert :

    0% du temps sur des problématiques académiques

    ap experts, Financements de thèses, mécénat (chairs,

    nsultants, des universités, des laboratoires.

    iciaire et sur l propriétés ntellectuelle (clause d

    'est un moyen de rattraper des transfe

    ud xperconnect : c rts

    rapport à d'autres experts. Ex : Invitations aux congrets Experconnect : Pas de ROI calculé Pas de budget consolidé au niveau groupe

    Les BU dépenses slon les besoins

    Continuer à financer les thèses et

    de

    temps et de moyens) fait que peu

    L'expert, cest une personne qu

    de choses sont mises en place.

    Des connaissances sont dans la

    Le problème principal est

    d'identifier les connaissances

    critiques.

    GAPexperts : Trop valorisés par

    les chairs. Financer les réseaux. (Pb

    = les attentes pourraient être trop

    La réalité des situations (peu

    tête

    Tutur : au sen de a RDI

    mais pas écrites

    Difficultés de compréhension entre

    Trouver un équilibre entre livre et

    discussion (tacite / explicite)

    calcul de ROI pour prendre

    conscience du coût. Puis, si

    Biblithèqu virtuel avec les Consolider les budgets, effectuer un Des documents et des formations sur le transfert de connaissances ont été dispensés pour 3 experts. La phase pilote na pour le mo Formation commune entre opérationnels et expert pour la collaboration.

    Il faut désigner une personne qui va

    rassembler les personnes du

    domaine de cette compétence (en

    Areva a recruté un Knowledge manager notamment pour mettre en place des outils et des moyens de réseaux afin d'aider les Transfert se fait sur un long terme (20 à 30 communautés en proposant des supports

    ans) pour avoir une efficacité et une vrai vision stratégique. Le transfert ponctuel

    Un TC se fait au fil de l'eau, qui peut se faire

    un peu plus intense lors des départs à la

    retraite. Pas de transfert "encyclopédique"

    de

    KM

    Page 104 sur 113

    A

    r

    p

    I

    69 Les données ont été floutées pour conserver l'anonymat de l'enquête

    Annexe 7 : Le logiciel de partage SharePoint

    Page 105 sur 113

    Annexe 7 : Le logiciel de partage SharePoint

    Annexe 8 : La plate-forme Yammer

    Annexe 8 : La plate-forme Yammer

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    ® L'expertise technologique d'AREVA a longtemps été reconnue comme son actif le plus

    précieux, et nos dirigeants le rappellent dans quasiment tous leurs discours. Pensez-vous que cette expertise...

    sera moins importante demain car les outils de conception et de modélisation prennent la

    relève Ajoutez des fichiers ou

    7% des liens de référence

    sera tout aussi importante qu'aujourd'hui en raison du besoin de comprendre et d'innover pour ce groupe.

    50%

    sera encore plus importante demain en raison d'un marché qui se mondialise GROUPES LIÉS

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    Annexe 9 : Les différentes méthodes MASK

    Annexe 9 : Les différentes méthodes MASK70

    70 Source : Serge Ariès, MASK, [en ligne], consulté en ligne le 17 octobre, URL : http://aries.serge.free.fr/index.php?page=content/MASK/SA32#MASKI

    Page 107 sur 113

    Page 108 sur 113

    Table des annexes

    Table des annexes

    ANNEXE 1: PREVISION DE CROISSANCE DE LA PRODUCTION

    D'ELECTRICITE PAR L'ENERGIE NUCLEAIRE DANS LE MONDE EN 2007 95

    ANNEXE 2 : ÂGE MOYEN DES PARCS NUCLEAIRES 96

    ANNEXE 3 : MODELE SYSTEMIQUE D'UN SYSTEME DE GESTION DES

    COMPETENCES 97

    ANNEXE 4 : LA FICHE « EXPERT MODEL » AREVA 98

    ANNEXE 5 : LE GUIDE D'ENTRETIEN SEMI-DIRECTIF 102

    ANNEXE 6 : L'ANALYSE DES ENTRETIENS : EXTRAIT DU TABLEAU EXCEL

    104

    ANNEXE 7 : LE LOGICIEL DE PARTAGE SHAREPOINT 105

    ANNEXE 8 : LA PLATE-FORME YAMMER 106

    ANNEXE 9 : LES DIFFERENTES METHODES MASK 107

    Page 109 sur 113

    Table des figures

    Table des figures

    Figure 1 - La pyramide du savoir 12

    Figure 2 : Le processus de capitalisation et de partage des connaissances 17

    Figure 3 : Schéma du fonctionnement du programme GapExpert 38

    Figure 4 : Représentation graphique de l'expertise chez Areva 54

    Figure 5 : Le macroscope de la connaissance 75

    Page 110 sur 113

    Table des matières

    Table des matières

    INTRODUCTION 1

    PREMIERE PARTIE - APPRIVOISER LA CONNAISSANCE 6

    1.1. La connaissance chez AREVA 6

    1.1.1. AREVA, un leader sur marché en évolution 6

    1.1.1.1. Une industrie basée sur des connaissances pointues 6

    1.1.1.2. Le parcours d'Areva 7

    1.1.1.3. Une industrie qui n'a pas dit son dernier mot 9

    1.1.2. La connaissance créer de la richesse 11

    1.1.2.1. Éviter les confusions 11

    1.1.2.2. Replacer le sujet dans son contexte 12

    1.1.2.3. Les enjeux de la connaissance 14

    1.1.3. Le transfert des connaissances est capital pour subsister 17

    1.1.3.1. Approche théorique du processus de transfert des connaissances 17

    1.1.3.1. Les enjeux du transfert de la connaissance 19

    1.2. Les experts possèdent la connaissance 20

    1.2.1. Les experts sont les acteurs clés de l'industrie du nucléaire 20

    1.2.1.1. Pourquoi l'expert : définition et différenciation 20

    1.2.1.2. Les experts chez Areva 22

    1.2.1.2.1. Des experts opérationnels 22

    1.2.1.2.2. Spécificités et processus 24

    1.2.2. Le processus de transfert des connaissances chez les experts 26

    1.2.2.1. Identifier les différents acteurs y prenant part 26

    1.2.2.2. A chaque connaissance sa méthode 28

    1.2.3. La spécificité des communautés de savoir 30

    1.2.3.1. Définition d'une communauté 30

    1.2.3.2. La différenciation avec les communautés d'experts 31

    Page 111 sur 113

    Table des matières

    DEUXIEME PARTIE - LE TRANSFERT DES CONNAISSANCES SOUS TOUTES

    SES FORMES 33

    2.1. Protocole d'enquête 33

    2.1.1. Travail en amont 33

    2.1.1.1. L'interview et la socialisation 33

    2.1.1.2. Cibler la population 34

    2.1.1.3. La rédaction du guide d'entretien 35

    2.1.2. Les interviews et le débriefing : les difficultés rencontrées 35

    2.1.2.1. La réalisation des entretiens 35

    2.1.2.2. Le débriefing 36

    2.2. Les programmes mis en place par Areva 37

    2.2.1. GapExpert : un programme pour les jeunes générations 37

    2.2.1.1. Former les futurs experts 37

    2.2.1.2. Un avenir prometteur 38

    2.2.2. L'arrivée des nouvelles générations 40

    2.2.2.1. Le mécénat des chairs 40

    2.2.2.2. Les contrats CIFRE 41

    2.2.2.3. Le tutorat chez Areva 42

    2.2.3. Un dispositif spécifique pour les experts à la retraite 43

    2.2.3.1. « Experconnect » : ou mettre en relation l'expertise et l'entreprise 43

    2.2.3.2. La vision terrain du dispositif 44

    2.3. Des initiatives individuelles de transfert de connaissances 45

    2.3.1. Les transferts ponctuels 45

    2.3.1.1. Les différentes façons de transférer de la connaissance 46

    2.3.1.2. Chaque acteur joue un rôle particulier 47

    2.3.2. Les moyens de partage de connaissance dans la carrière de l'expert 48

    2.3.2.1. Créer des cours 48

    2.3.2.2. Les documents de synthèse 49

    2.3.2.3. Organiser des conférences 50

    2.3.2.4. Rédiger des articles scientifiques 51

    2.4. Le transfert collectif de connaissances 51

    2.4.1. L'identification des connaissances critiques 51

    2.4.1.1. L'état actuel des domaines de connaissances chez Areva 51

    2.4.1.1. Identifier la population des experts 52

    Page 112 sur 113

    Table des matières

    2.4.1.1. L'identification des technologies critiques chez EDF 54

    2.4.2. Les différentes formes de communautés existantes chez Areva 56

    2.4.2.1. Le collège des fellows 56

    2.4.2.2. Les « Tech Talks » et « Peer Reviews » 57

    2.4.2.3. Les réseaux techniques 58

    2.4.2.4. Les problématiques communes pour la mise en place et le développement des

    communautés 59

    2.4.3. Les outils informatiques 61

    2.4.3.1. Stocker de la connaissance 61

    2.4.3.2. Les plates-formes de réseaux 63

    TROISIEME PARTIE - SOUTENIR LES EFFORTS ENTREPRIS PAR AREVA 65

    3.1. Un outil pour agir rapidement 65

    3.1.1. Création d'un guide de transfert de connaissance 65

    3.1.1.1. Faire face au départ des volontaires 65

    3.1.1.2. Réaliser le guide de transfert de connaissance 66

    3.1.2. Cadrer le projet 68

    3.1.2.1. Évaluer les coûts et la réussite 68

    3.1.2.2. Les limites au guide de transfert de connaissance 69

    3.2. Modéliser la connaissance chez Areva 71

    3.2.1. Proposer une méthode de modélisation des connaissances 71

    3.2.1.1. Pourquoi proposer de modéliser la connaissance au sein d'Areva 71

    3.2.2. KALAM® ou MASK : deux méthodes différentes de modélisation de la

    connaissance 72

    3.2.2.1. La méthode KALAM® : tournée vers l'humain 72

    3.2.2.2. La méthode MASK : orientée capitalisation 74

    3.2.2.3. Définir les besoins pour choisir la méthode 77

    3.3. Développer une vision collective à long terme 78

    3.3.1. Favoriser une vision globale 78

    3.3.1.1. Consolider les budgets et les données RH 78

    3.3.1.2. La culture du partage 79

    3.3.2. Développer les communautés 81

    3.3.2.1. Les multiples ressources des communautés 81

    3.3.2.2. Les outils numériques de collaboration et de partage 84

    Page 113 sur 113

    Table des matières

    CONCLUSION 87

    BIBLIOGRAPHIE 90

    GLOSSAIRE DES CIGLES 94

    ANNEXE 1: PREVISION DE CROISSANCE DE LA PRODUCTION

    D'ELECTRICITE PAR L'ENERGIE NUCLEAIRE DANS LE MONDE EN 2007. 95

    ANNEXE 2 : ÂGE MOYEN DES PARCS NUCLEAIRES 96

    ANNEXE 3 : MODELE SYSTEMIQUE D'UN SYSTEME DE GESTION DES

    COMPETENCES 97

    ANNEXE 4 : LA FICHE « EXPERT MODEL » AREVA 98

    ANNEXE 5 : LE GUIDE D'ENTRETIEN SEMI-DIRECTIF 102

    ANNEXE 6 : L'ANALYSE DES ENTRETIENS : EXTRAIT DU TABLEAU EXCEL

    104

    ANNEXE 7 : LE LOGICIEL DE PARTAGE SHAREPOINT 105

    ANNEXE 8 : LA PLATE-FORME YAMMER 106

    ANNEXE 9 : LES DIFFERENTES METHODES MASK 107

    TABLE DES ANNEXES 108

    TABLE DES FIGURES 109

    TABLE DES MATIERES 110






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