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Impact de l'introduction de l'ETP sur les transformations des systèmes d'activités et les transformations identitaires des infirmières devenant aussi "éducatrices".

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par Malika Salhi-Bouyagoub
Paul-Valéry Montpellier II - Master 2 2015
  

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    Année universitaire 2015/2016

    Université Paul-Valéry

    Montpellier

    Département des Sciences de l'Éducation UFR6

    Impact de l'introduction de l'ETP
    sur
    les transformations des systèmes d'activités
    et
    les transformations identitaires des infirmières
    devenant aussi « éducatrices »

    Malika Salhi-Bouyagoub
    Sous la direction de Souâd Denoux

    Mémoire de Master 2

    Analyse et Conception en Éducation et Formation

    Date de soutenance : 11 juillet 2016

    Composition du jury :

    - Guy Noël Pasquet - Souâd Denoux

    2

    Université Paul-Valéry

    Montpellier

    Département des Sciences de l'Éducation UFR6

    Impact de l'introduction de l'ETP
    sur
    les transformations des systèmes d'activités
    et
    les transformations identitaires des infirmières
    devenant aussi « éducatrices »

    Malika Salhi-Bouyagoub
    Sous la direction de Souâd Denoux

    Mémoire de Master 2

    Analyse et Conception en Éducation et Formation

    Date de soutenance : 11 juillet 2016

    Composition du jury :

    - Guy Noël Pasquet - Souâd Denoux

    3

    Année universitaire 2015/2016

    4

    5

    Précaution anti plagiat

    Je soussignée, Salhi Bouyagoub Malika,

    Certifie qu'il s'agit d'un travail original et que toutes les sources utilisées ont été indiquées dans leur totalité. Les citations tirées du présent mémoire ne sont permises que dans la mesure où elles servent de commentaires, référence ou démonstration à son utilisateur. Je certifie, de surcroît, que je n'ai ni recopié ni utilisé des idées ou des formulations tirées d'un ouvrage, article, site Internet ou mémoire, en version imprimée ou électronique, sans mentionner précisément leur origine et que les citations intégrales sont signalées entre guillemets. La loi sur le droit d'auteur est applicable.

    Date et signature : le 21/06/2016 Salhi Malika Bouyagoub

    6

    Résumé

    Je rejoins tous les écrits qui ont abordé la thématique de l'éducation thérapeutique du patient (ETP), pour dire que personne ne peut douter qu'elle devient une nécessité dans les pratiques de l'infirmière1. Il s'agit d'un changement de pratique découlant de la loi 2009. La notion « d'éduquer » le patient exige de l'infirmière à devenir éducatrice, imposant des changements paradigmatiques pour ses pratiques au sein de son système d'activités de soins, avec des représentations et des attitudes nouvelles. Nous sommes partis de l'idée que ces nouveautés allaient impacter son identité professionnelle et, solliciter un engagement dans la transformation de ses pratiques, en adoptant une nouvelle posture d'« infirmière éducatrice ». Pour tenter d'identifier les changements identitaires résultant de l'introduction de l'activité ETP aux tâches quotidiennes de l'infirmière, nous avons recueilli les propos de trois d'entre elles, impliquées dans des activités éducatives et, les avons analysés en nous basant sur le concept du processus des mutations identitaires et socialisation professionnelle de Claude Dubar (1998,1992). Nous verrons à travers cette étude, comment l'activité éducative transformerait la posture infirmière en s'appuyant principalement sur des logiques d'accompagnement dans l'apprentissage. Ces changements ont pour impact des transformations à la fois vis-à-vis des représentations de l'éducation thérapeutique, du soin, de la relation infirmière/patient, des pratiques mais aussi, de l'identité professionnelle pour ces infirmières.

    Mots-clés : Education thérapeutique du patient - la pratique infirmière - changement de pratique - activité éducative - système d'activité - accompagnement dans l'apprentissage - identité professionnelle - posture - infirmière éducatrice.

    7

    1 Lire infirmier- infirmière

    8

    Summary

    I joined all the writings that addressed the theme of therapeutic education of the patient (ETP), to say that nobody can doubt that it becomes a necessity in the nurse practices. It is a change of practice under the 2009 law. The notion of "educating" the patient requires the nurse to become an educator, imposing paradigmatic changes to its practices within its system of care, with performances and new attitudes activities. We started from the idea that these developments would affect his professional identity; seek a commitment in the transformation of its practices by adopting a new posture of "nurse educator. To try to identify the identity changes resulting from the introduction of activity ETP in the daily tasks of the nurse, we have collected the words of three of them, involved in educational activities and analyzed based on the concept of the process of identity mutations and professional socialization of Claude Dubar (1998, 1992). We will see through this study; how educational activity would transform nursing posture in relying primarily on logic of accompaniment in learning. These changes have for impact of the transformations both representations of therapeutic education, care, the nurse-patient relationship, practices but also, of professional identity for these nurses.

    Keywords: Therapeutic patient education - nursing practice - practice change - educational activity - activity system - support in learning - professional identity - posture - nurse educator.

    9

    Remerciements

    Malika remercie précieusement toutes les personnes ayant contribué de près ou de loin à la réalisation de ce mémoire, en particulier : Ma directrice de mémoire S. Denoux pour son accompagnement et ses recommandations pour la réalisation de cet écrit. Monsieur Guy-Noël Pasquet d'avoir accepté d'évaluer ce travail de mémoire.

    Mon collègue et conseillé A.Matsimouna pour sa participation à l'aboutissement de ce

    mémoire.

    Mon précieux époux pour son soutien et sa confiance immuable. Ma soeur Lamia pour sa disponibilité auprès de mes enfants. Mes deux petits coeurs Amin et Imen pour leurs encouragements et leurs patiences.

    10

    11

    Sommaire

    Résumé 7

    Summary 8

    Remerciements 9

    1- Introduction 16

    2- Présentation du projet de formation de Master 2 17

    3- Méthodologie de travail 19

    PREMIERE PARTIE : Cadre conceptuel 22

    I- Présentation de l'éducation thérapeutique du patient 23

    1- Les définitions de l'ETP 23

    2- Les fondements et les contextes d'émergence de l'ETP 25

    a) Le facteur social 25

    b) Le facteur philosophique 26

    c) Le facteur économique 27

    d) Le facteur épistémologique 27

    3- La validation de la pratique de l'ETP 28

    4- Les compétences requises pour dispenser l'ETP 28

    5- La démarche pédagogique de l'ETP 29

    5.1- Les étapes de la démarche éducative 30

    a) Le diagnostic éducatif 30

    b) La négociation des objectifs 31

    c) La planification et la mise en oeuvre des séances éducatives 31

    d) La phase d'évaluation 32

    5.2- Les ressources et les techniques éducatives de l'ETP 32

    II- Présentation du métier de l'infirmière 34

    1- Définition du métier de l'infirmière 34

    2- La compétence infirmière en lien avec l'ETP 34

    3- La notion de l'« activité » dans les pratiques de l'infirmière 35

    3.1- Les différentes activités de l'infirmière 36

    a)

    12

    Le rôle propre de l'infirmière 36

    b) La définition législative du rôle propre infirmier 37

    c) Les caractéristiques du rôle propre infirmier 38

    3.2- Les définitions des soins infirmiers 39

    4- Le système d'organisation du travail infirmier 39

    4.1- Définition de l'organisation du travail 39

    4.2- Définition du système d'organisation 40

    4.3- Organisation du travail de l'infirmière 40

    III- Présentation de l'identité professionnelle de l'infirmière 43

    Synthèse de la première partie 45

    DEUXIEME PARTIE : Cadre théorique 48

    I- Présentation des théories de soins infirmiers 49

    1- Présentation de la théorie de Peplau (1952) 50

    2- Le rôle de l'infirmière selon la théorie de Peplau 51

    II- présentation des caractéristiques de l'accompagnement professionnel 53

    1- Les définitions de l'accompagnement 53

    2- Les postures de l'accompagnement professionnel proposées par Paul (2004) 54

    2.1- Une posture éthique 54

    2.2- Une posture de non-savoir 54

    2.3- Une posture de dialogue 54

    2.4- Une posture d'écoute 54

    2.5- Une posture émancipatrice 55

    III- La notion de l'identité et les différentes formes identitaires 56

    1- Définitions de l'identité 56

    2- Identité professionnelle et socialisation 57

    3- Formes identitaires et identités au travail 57

    4- Les dynamiques identitaires et la double transaction 58

    Synthèse de la deuxième partie 60

    TROISIEME PARTIE : Problématique et hypothèses de travail 62

    I- Problématique 63

    13

    Question centrale 64

    II- Hypothèses de travail 65

    Première hypothèse 65

    Deuxième hypothèse 65

    QUATRIEME PARTIE : La phase pratique 66

    I- Objectifs du stage pratique 68

    II- Méthodologie de l'enquête 69

    1- L'observation ethnographique 69

    2- L'entretien semi directif 70

    III- Déroulement du stage 71

    1- Phase de collecte des données 71

    1.1- Présentation des lieux de stage 72

    1.1.1- L'Hôpital de Jour 72

    1.1.2-L'unité de Diabétologie 74

    1.1.3-Le service de Cardiologie 75

    1.2- Le diagnostic éducatif 76

    2- Phase d'observation ethnographique 77

    3- Phase de réalisation des entretiens 78

    3.1- Portrait des interviewées 78

    IV- Traitement des scripts recueillis 80

    1- Synthèse des verbatims 80

    1) Présentation, représentation et organisation de l'activité ETP par les infirmières

    interviewées 80

    2) Distinction entre une activité ETP et une autre activité 87

    3) Différences et similitudes entre la posture de soignante et la posture d'éducatrice 89

    4) Relation et interaction entre infirmière et patient 90

    5) Changement personnel et professionnel 91

    6) Description de l'identité actuelle en lien avec l'intégration de l'activité ETP 94

    7) Communication entre pairs sur l'ETP 95

    2- Analyse qualitative des données 99

    3- Discussion 106

    14

    4- Conclusion 111

    1- Résumé de la recherche 111

    2- Cheminement de la recherche 112

    3- Résultat de la recherche 113

    4- Prolongation de la recherche 113

    Table des abréviations 116

    Bibliographie 118

    Partie Annexes 124

    Annexe n°1 : Le cadre législatif de l'ETP 126

    Annexe n°2 : Les compétences requises pour dispenser l'ETP 127

    Annexe n°3 : Les grands modèles pédagogiques de l'ETP 128

    a) Le modèle de la pédagogie classique 128

    b) Le modèle de la pédagogie behavioriste 128

    c) Le modèle de la pédagogie constructiviste 129

    d) Le modèle de la pédagogie allostérique 129

    Annexe n°4 : Questionnaire adressé aux infirmières éducatrices 131

    Annexe n°5 : 132

    Script de l'entretien avec Infirmière à l'Hôpital de Jour 132

    Script de l'entretien avec Infirmière en unité de Diabétologie 145

    Script de l'entretien avec Infirmière en service de Cardiologie 157

    15

    16

    1- Introduction

    La pratique de l'éducation thérapeutique du patient est actuellement actée dans les textes de loi de la formation initiale, définissant un positionnement professionnel attendu, et concerne l'ensemble des professionnels de la santé. Aussi, la question de cette pratique éducative est particulièrement investie dans les recherches en sciences de l'éducation ces dernières années. L'article R.4311-3 du code de la santé publique stipule qu'en plus de l'éducation pour la santé, l'ETP fait partie intégrante des actes infirmières exercés particulièrement dans le cadre de leur rôle propre. Cette nouvelle pratique éducative pour ces infirmières va-t-elle générer des transformations vis-à-vis de leurs représentations de l'éducation, du soin, et de la relation infirmière/patient dans leurs pratiques quotidiennes ? Ce qui nécessite que toute infirmière devrait actualiser et développer des apprentissages, pour pouvoir « éduquer », « accompagner » et « aider » le malade à acquérir des compétences cognitives et physiques, pour maintenir et préserver sa qualité de vie.

    Ce travail de mémoire aura pour objectif de mieux comprendre comment la mise en oeuvre de l'activité ETP dans les services de soins, provoquerait des transformations dans les pratiques de l'infirmière aux quotidiens, le fait de son implication dans la production de nouvelles pratiques à visée formative. Et comment cette nouvelle pratique impacterait son identité professionnelle2 et sa professionnalité.

    2 Les individus ne se posent que rarement des questions sur leur identité, il nous semble donc judicieux de considérer que les données recueillies abordent plutôt les activités, les rôles, les places... c'est-à-dire ce que l'on pourrait appeler la professionnalité ; aux chercheurs d'en inférer une dimension identitaire...

    17

    2- Présentation du projet de formation de Master 2

    Dans le cadre de ma préparation du diplôme universitaire Master 2 « Analyse et Conception en Education et Formation » à l'Université Paul Valéry de Montpellier, mon cursus dans le domaine des Sciences de l'Education prévoit un travail de recherche sur un thème choisi, en s'appuyant sur mes expériences professionnelles, celles-ci relevant de deux domaines différents notamment : la santé et la formation. Mon choix s'est alors porté sur un thème abordant l'approche de l'introduction de l'éducation thérapeutique au soin du patient, qui me parait constituer actuellement un véritable enjeu de société.

    J'ai choisi ce thème de recherche pour deux raisons, qui découlent de mes expériences professionnelles acquises : dans le domaine de la formation en tant que chargé d'études de la formation professionnelle et continue au Ministère de l'Agriculture en Algérie et actuellement, dans le domaine de la santé, en tant qu'aide-soignante en milieu hospitalier en France.

    Ces deux expériences professionnelles ont suscité en moi une curiosité et un intérêt pour l'enseignement et l'apprentissage en lien avec la pratique éducative en milieu hospitalier, dont l'importance me passionne depuis que j'ai commencé à travailler dans les différents services de soins en poste fixe et/ou en remplacement dans les services de : réanimation, chirurgie digestive, médecine et de psychiatrie.

    Au début de ma fonction d'aide-soignante, mon but était de découvrir les différentes activités en lien avec les différentes pathologies. Ce qui explique mon exercice dans les différents services cités plus haut. En passant d'un service à un autre, je découvris les tâches multiples confiées à mon binôme infirmière, qui devait articuler des notions parfois contradictoires. Certains services lui exigent, une technicité croissante où les soins requièrent des compétences de plus en plus spécialisées tels que les services de réanimations et de soins intensifs. D'autres services, lui demandent de faire preuve de plus d'humanité et donc d'être plus performante dans le domaine des relations humaines comme les services de psychiatrie. En plus de son rôle d'évaluation de l'état du malade, elle devait initier des mesures d'éducation thérapeutique. Ce dernier rôle d'éducatrice, j'avoue que je ne l'ai pas vraiment rencontré lors de mon passage dans les services de soins somatiques. C'est ainsi, que j'ai vu naître en moi une curiosité déclenchée par cette pratique éducative. C'est au cours de mon travail en service de chirurgie viscérale que j'ai découvert l'aspect « éducatif ». En effet, j'ai assisté l'infirmière qui apprenait à un patient, à prendre en charge tout seul la gestion de son « auto soin ». A ce moment-là, j'avais remarqué que le patient n'était pas vraiment intéressé

    18

    par l'apprentissage du soin et, que l'infirmière disposait de très peu de temps pour l'éduquer, vu la charge de travail qui l'attendait. Suite à la réaction du patient et à sa réticence, j'ai demandé à l'infirmière si c'était nécessaire qu'il apprenne à faire lui-même son soin. L'infirmière m'avait répondu, qu'elle devait l'éduquer pour le rendre plus autonome avant son retour au domicile. Et elle avait rajouté, très embarrassée, « il faut l'éduquer à l'auto soin, pour qu'il puisse se prendre en charge une fois chez lui. Mais s'il ne veut pas apprendre, on ne peut le forcer, il aura une infirmière à domicile qui s'occupera de son éducation ». C'est à ce moment-là, que le mot « éduquer » m'a vraiment interpellé. Je me suis alors dit : « pourquoi éduquer et pas apprendre à faire ». A ce stade, je me suis juste rendu compte que l'éducation du patient s'avérait à priori nécessaire pour le patient, mais sans trop savoir des outils qui devaient être mobilisés pour rendre cette forme d'éducation efficace. En fait, j'étais comme la plupart de mes collègues soignantes pensant que, la représentation de l'éducation du patient était principalement centrée sur le soin et la simple information.

    C'est à partir de ce constat que j'ai commencé à m'interroger sérieusement sur la pratique éducative. Je me suis donc questionnée sur le « rôle éducatif ». Faudrait-il à l'infirmière de joindre son rôle éducatif à son rôle de soignante ? Ou bien, cela nécessite-t-il de transformer catégoriquement sa représentation relative à la prise en charge du patient, et à son mode d'organisation vis-à-vis de son activité habituelle dans son service de soins, pour qu'elle puisse accomplir son rôle d'«infirmière éducatrice » ? Dans ces conditions, comment ce rôle d'éducatrice va-t-il influencer son identité d'infirmière ? Jusqu'au là, ces différentes interrogations m'ont permis en effet de développer ma question principale et de la centrer sur la fonction éducative de l'infirmière.

    19

    3- Méthodologie de travail

    Nous avons procédé par une recherche documentaire auprès des ouvrages, d'articles, de recommandations officielles et de sites Internet, dans le but d'identifier les caractéristiques des pratiques professionnelles de l'éducation thérapeutique du patient. Ensuite, afin de dégager des indicateurs pour l'observation et l'analyse de l'activité de l'infirmière, il nous a paru essentiel d'analyser les textes législatifs, les articles de la presse spécialisée et les rapports d'études qui lui sont consacrés. Par ailleurs, nous avons étudié les référentiels du métier, des compétences et de la formation initiale des infirmières, afin de mettre en perspective les orientations définies pour l'ETP.

    Pour un travail rigoureux, nous avions l'intention d'étudié les domaines de compétences définis dans les référentiels et l'architecture initiale des différentes formations des professionnels3 de la santé, impliqués dans l'activité ETP, afin d'étudier les implications des uns et des autres par rapport à la réalisation de cette activité éducative et, de repérer l'intérêt du travail en équipe pluridisciplinaire pour la prise en charge de cette activité. Cependant, par manque de disponibilité de ces professionnels, nous n'avons pas pu réaliser cette partie.

    Nous avons élaboré notre travail en quatre parties distinctes :

    La première partie, portant un éclairage sur les concepts et la pédagogie de la pratique de l'ETP, donne une vue d'ensemble de cette activité thérapeutique et précise ce que recouvre aujourd'hui cette mission d'éducation. Nous avons choisi de décrire et d'analyser la démarche éducative et de dégager les principales activités de l'infirmière dans cette perspective. Ensuite, nous avons présenté le système d'organisation du travail de l'infirmière et son identité professionnelle, afin de pouvoir répondre à la question de savoir : « Si l'introduction de l'ETP aux soins, transformerait le système d'activité actuel et l'identité de l'infirmière en devenant éducatrice ».

    La deuxième partie développe les modèles théoriques de soins et de l'identité, en lien avec la pratique éducative, afin de déterminer les différentes représentations que les infirmières ont sur leur rôle propre et sur leur identité, devant cet autre volet de l'activité d'infirmière qui la

    3 Médecins, Kinésithérapeutes, Psychologues, Diététiciens, Ergothérapeutes...

    20

    transforme en « rôle d'éducatrice » devant le patient. Aussi, dans cette partie, nous avons jugé utile de présenter les caractéristiques de l'accompagnement professionnel, afin de pouvoir interpréter le rôle de l'infirmière dans la pratique éducative.

    La troisième partie traite la problématique et les hypothèses de travail.

    La quatrième partie nous l'avons élaboré suite à notre enquête sur le terrain. Elle précise les options méthodologiques que nous avons choisi pour élaborer la phase de collecte de données et d'acculturation. Il s'agit pour nous d'apprécier les déplacements opérés sur les pratiques (soin- éducation) du fait de la mise en oeuvre de l'ETP et, ce que ceci impacterait du sentiment d'identité professionnelle. Il s'agissait au cours des différentes phases de travail empirique de pouvoir identifier le travail réel des infirmières éducatrices ainsi que les significations qu'elles attribuent à leurs conduites, à leurs postures, à leurs gestes, à leur identité...

    21

    PREMIERE PARTIE

    22

    Cadre conceptuel

    23

    I- Présentation de l'éducation thérapeutique du patient

    Quelle signification et quelle définition peut-on donner à l'éducation thérapeutique du patient ? Que se cache-t-il exactement sous cette expression ?

    1- Les définitions de l'ETP

    D'après J. Foucaud (2006), lorsqu'on aborde le terme de l'éducation dans le champ de la maladie ou du handicap, Deccache et Lavendhomme (1989) ont relevé plusieurs définitions utilisant des terminaisons différentes. Les plus fréquentes sont : « éducation du patient4 », « éducation thérapeutique5 » et « éducation thérapeutique du patient ». Ces termes ont été opposés durant plusieurs années, ils sont aujourd'hui considérés comme des synonymes dans la plupart des écrits (p. 19).

    a) La définition étymologique de l'« éducation thérapeutique »

    Pour nous éclairer davantage sur la signification de « l'éducation thérapeutique », nous nous sommes intéressé à l'étymologie des deux mots qui la composent.

    Pour le terme « éduquer », tous les écrits que nous avons consultés évoquent deux origines : « educare et ex ducere ». Le premier mot « educare » traduit littéralement par « nourrir, élever, instruire par » : sa signification vise à inculquer chez un individu un ensemble de connaissances. Le deuxième, « ex ducere » traduit littéralement par « guider, conduire hors de, développer, épanouir, faire sortir de soi » : sa signification a pour but d'aider la personne à se découvrir et à utiliser au mieux ses potentialités. Dans ce sens, l'éducation thérapeutique « conduit la personne à grandir et à se dépasser. Elle implique également, un conseil et un soutien lesquels, selon les circonstances, peuvent être de nature psychologique ou sociale » (d'Ivernois et Gagnayre, 2011, p. 5).

    Les deux origines de l'éducation semblent fondamentales et indissociables dans le cadre de l'ETP.

    Le terme « thérapeutique » existe depuis le XVIIè siècle, il tient son origine étymologique du grec ancien « therapeia » traduit littéralement par « cure » : c'est le dérivé du terme « therapévô » qui signifie « servir, prendre soin de, soigner, traiter ». Il est aussi originaire du mot « thràpôn » qui veut dire « serviteur » et qui signifie « qui prend soin de ».

    4 Cette notion est très proche de l'éducation thérapeutique du patient qui lui est postérieure.

    5 Cette notion est répondue dans les écrits, renvoie à la partie de l'éducation liée au traitement, à l'apprentissage de techniques de soins et de surveillance.

    24

    Le dictionnaire Larousse définit le mot « Thérapie » comme « une partie de la médecine qui s'occupe des moyens médicaux, chirurgicaux ou autres, propres à guérir ou à soulager les maladies ». Il est défini aussi, comme « une manière choisie de traiter une maladie ».

    A travers ces différentes significations, nous retenons que la notion de la thérapie est liée à l'éducation grâce à son action d'accompagner le patient à prendre soin de sa personne et à connaître son propre corps. Pour d'Ivernois et Gagnayre (2011), « cette éducation est thérapeutique, non seulement parce qu'elle accompagne la thérapeutique mais parce qu'elle est thérapeutique en soi par les effets positifs qu'entraîne tout apprentissage » (p. 5), du fait qu'elle rassure le patient par une meilleure compréhension de la maladie et du traitement en le mettant en confiance par les moyens d'apprentissage.

    b) Les autres définitions de l'ETP

    De nombreuses définitions de l'ETP ont été proposées dans les écrits. Celle que nous proposons émane du travail mené par un groupe d'experts de l'OMS- Europe. Cette définition a été publiée en 19966, traduite en langue française en 1998 et, reprise par la Haute Autorité de Santé :

    « Elle vise à aider les patients à acquérir ou maintenir les compétences dont ils ont besoin pour gérer au mieux leur vie avec une maladie chronique. Elle fait partie intégrante et de façon permanente de la prise en charge du patient. Elle comprend des activités organisées, y compris un soutien psychosocial, conçues pour rendre les patients conscients et informés de leur maladie, des soins, de l'organisation et des procédures hospitalières, et des comportements liés à la santé et à la maladie. Ceci a pour but de les aider (ainsi que leurs familles) à comprendre leur maladie et leur traitement, collaborer ensemble et assumer leurs responsabilités dans leur propre prise en charge, dans le but de les aider à maintenir et améliorer leur qualité de vie » (guide méthodologique de l'ETP, 2007, p. 10).

    C'est la définition qui revient souvent dans les écrits. Nous avons joint à cette définition de l'OMS-Europe quelques interprétations formulées par d'autres auteurs.

    L'éducation thérapeutique du patient représente pour C. Bouchet (2000, p. 6) le moyen de mieux écouter, informer les personnes afin de leur apporter de l'aide selon leur besoin et leur degré de savoir et de savoir-faire afin qu'il puisse gérer au mieux leur santé, grâce aux démarches éducatives. Pour A. Deccache (1989), il s'agit d'un « processus par étapes,

    6 Therapeutic Patient Education - Continuing Education Programmes for Health Care Providers in the field of Chronic Disease, 1996.

    25

    comprenant un ensemble d'activités organisées de sensibilisation, d'information, d'apprentissage et d'aide psychologique et sociale... » (p. 45). Gagnayre et d'Ivernois (2011) considèrent l'ETP comme une pratique singulière qui suscite quelques interrogations sur la participation du patient à la gestion de sa maladie, pour devenir le médecin de lui-même (p. 1). C'est aussi le moyen de considérer le patient comme un sujet et non plus comme un individu (p. 36). Le fait que sa visée est de faire acquérir au patient les compétences nécessaires qui lui permettent de se prendre en charge et « concilier projet de vie avec les exigences de la gestion de la maladie et du traitement » (Gagnayre, 2002, p. 129). Elle favorise aussi « l'expression d'une norme thérapeutique nouvelle, redéfinie par le patient et le soignant, gage de la rencontre du projet médical de l'un et du projet de vie de l'autre » (Barrier, 2010, p. 214).

    Si l'on reprend les différentes définitions, celle de l'OMS-Europe représente une référence fondamentale. Elle clarifie l'activité ETP et lui donne un cadre. Elle centre sa réalisation dans les établissements hospitaliers. Il s'agit d'une priorité de soins centrée sur le patient atteint d'une maladie chronique, le considérant comme un individu qui peut participer à la gestion de sa maladie. Toutes les autres définitions se rejoignent sur le but principal de l'ETP, dont la visée est l'accompagnement par une démarche éducative afin de promouvoir l'autonomie du patient et d'améliorer d'avantage sa qualité de vie. Donc, à travers toutes ces interprétations, nous retenons que l'ETP représente un outil incontournable pour la prise en charge des maladies de longue durée, nécessitant plus d'écoute et d'information de la part des soignants, en incitant une motivation à l'acquisition de connaissances, de compétences et d'attitudes appropriées par le patient. Les apports de ces connaissances doivent s'inscrire dans une démarche éducative. Ces définitions ont poussé notre curiosité à s'intéresser à l'émergence de l'ETP et dans quel contexte elle a été imposée aux professionnels de la santé.

    2- Les fondements et les contextes d'émergence de l'ETP

    L'étude de R. Gagnayre (2002) cité par d'Ivernois et Gagnayre (2011, p. 3) et l'écrit de J. Foucaud (2006, pp. 19-20) engagent des enjeux sociaux, philosophiques, économiques et épistémologiques comme quatre principaux facteurs pouvant être considérés à l'origine de l'émergence de l'ETP.

    a) Le facteur social

    Pour J. Foucaud (2006), l'ETP a émergé dans les pays industrialisés à partir du milieu du siècle précédent grâce à l'accomplissement de certains progrès dans le domaine médical. Des

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    traitements complexes et de longue durée ont été proposés pour ces maladies qui ne se « guérissent » pas mais se « gèrent », nécessitant de la part du malade une participation active. Dans ces pays, l'ETP est historiquement liée au diabète (p. 19). Gagnayre et d'Ivernois (2011, p. 38) témoignent de l'étude de Miller et Golstein (1972), qui a démontré que l'utilisation de l'insuline dans le diabète représente un très bon exemple pour les chercheurs. Sa manipulation demande au patient la mobilisation de connaissance, de savoirs pratiques et d'aptitudes personnelles. D'après ces auteurs, l'ETP s'est, ensuite transposée et adaptée à d'autres maladies chroniques7.

    En France, l'ETP est au coeur des débats des politiques et des professionnels de la santé depuis déjà plusieurs années. Le nombre de personnes vivant avec une maladie chronique est en augmentation constante. En 2007, le Ministère de la santé et de la solidarité a déclaré 15 millions de personnes atteintes de maladies chroniques8, soit près de 20% de la population française. Selon le rapport de l'OMS (1998), ce chiffre étant en progression continue dans un contexte de vieillissement de la population. Ce phénomène est lié aux comportements de santé en lien avec la mauvaise alimentation, la sédentarité, le tabagisme et autres addictions... qui semblent être à l'origine de nombreuses affections chroniques comme les maladies cardiovasculaires, le diabète, le cancer et les maladies transmissibles (HAS, 2007).

    La pratique de cette activité thérapeutique a été reconnue officiellement par la France en 2009, suite au constat de la Société Française de Santé Publique (SFSP) qui avait publié en 2008 : « La plus part des malades chroniques ne [bénéficient] d'aucun programme d'ETP... » (rapport HCSP, 2009, p. 2).

    Le facteur social concerne alors les progrès de la médecine qui permettent aux patients de participer à la prise en charge de leur maladie, afin de vivre au mieux avec une pathologie chronique.

    b) Le facteur philosophique

    Pour J. Foucaud (2006), le facteur philosophique de l'émergence de l'ETP est lié au mouvement de la philosophie existentialiste et à son cortège de revendication de droit à l'égalité et à l'autodétermination, paru dès la fin des années 1950. Ces mouvements se développent et se concrétisent aussi dans le domaine de la santé, par la demande des malades à la participation aux décisions en matière de traitement. Emerge alors l'idée que tout être humain est capable d'autonomie, a des droits en tant que personne malade et, a des

    7 Comme l'asthme bronchique (Gagnayre et al. ,1998), la broncho-pneumopathie chronique obstructive (Bourbeau, 2003), le syndrome d'apnée du sommeil (Engleman, 2003), les maladies cardiovasculaires (strömberg, 2005).

    8 Plan d'amélioration de la qualité de vie des patients atteints de maladies chroniques (2007-2011).

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    compétences en matière de décision. Il s'agit d'une nouvelle relation médecin/malade basée sur l'observance (p. 20). Pour d'Ivernois et Gagnayre (2011), « cette position philosophique du sujet rend à chacun sa possibilité d'être dans sa singularité » (p. 3). C'est-à-dire qu'elle octroie à la personne malade des droits et lui confère des capacités de décision. En France, cette apparition philosophique entreprend un changement de statut du patient, renforcée par la loi du 4 mars 2002, qui stipule le droit des malades à l'autodétermination et à l'information.

    c) Le facteur économique

    D'après d'Ivernois et Gagnayre (2011), l'étude de Tarquinio et al, (2007) témoigne que le plan économique français avait énoncé des effets « désastreux » liés à la non observance des maladies chroniques qui ont souvent pour conséquences : « de prolonger la durée des maladies, d'augmenter le nombre d'arrêts de travail, la fréquence de visite chez le médecin et la durée des hospitalisations des malades » (p. 25). Pour ces auteurs cette situation se traduit par l'insuffisance des réseaux de soutien pour les maladies chroniques en milieu urbain et rural menaçant le maintien à domicile des personnes isolées. Ce qui explique le retour massif de ces malades aux urgences hospitalières. Ce constat a obligé les organisations de santé à mettre en avant les pratiques de l'ETP.

    Pour J. Foucaud (2006, p. 20), l'augmentation de la prévalence des maladies chroniques et l'évolution technologique de la médecine ont contribuer à l'augmentation des coûts de santé. D'après cet auteur, dès les années 1970, « l'ETP va se montrer efficace pour réduire le nombre et la durée des hospitalisations ». Pour lui, l'étude de Miller et Golstein (1972) témoigne de l'efficacité de l'éducation thérapeutique par rapport à la réduction du nombre et de la durée des hospitalisations des personnes atteints de maladies chroniques.

    d) Le facteur épistémologique

    Pour J. Foucaud (2006), le facteur épistémologique est en lien avec le développement des comportements dans le domaine de la santé paru dès le début des années 1960 : « les théories développées dans le champ de la psychologie, de la psychologie sociale, de la santé publique et des sciences de l'éducation notamment, vont permettre de mieux connaître les variables en lien avec le développement de comportements protecteurs de la santé » (p. 20). Progressivement, les apports de ces différentes théories seront intégrés dans le cadre de démarches d'éducation thérapeutique du patient. Tous les écrits témoignent de l'influence des sciences de l'éducation par ces différentes théories. Cette influence représente pour Giordan (2010, p. 2) la source des fondements théoriques de l'ETP. Elle justifie la diversité de ses modèles d'enseignement et d'apprentissage, actuellement, regroupés en quatre modèles

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    pédagogiques, à savoir : le modèle classique, le modèle béhavioriste, le modèle constructiviste et le modèle systémique, que nous avons développé et présenté en annexe 3.

    3- La validation de la pratique de l'ETP

    Le concept de l'ETP a été reconnu par l'OMS-Europe, décrivant l'éducation thérapeutique du patient comme une continuité indispensable à l'éducation à la santé (Charte d'Ottawa, 1998). En France, l'ETP a été reconnu officiellement en 2009, et commence à s'inscrire dans le parcours de soins du patient (Loi CSP, art. L. 1161-1 à L. 1161-4). Ses modalités de mise en oeuvre sont décrites dans l'article 84 de cette loi. Dans ce sens, la loi HPST (2009) a conçu des Programmes d'Education Thérapeutique du Patient (PETP), des Actions d'Accompagnement (AA) et, des Programmes d'Apprentissage (PA) pour les patients atteints de maladies chroniques. Ces actions thérapeutiques s'appuient sur un cadre législatif.9 La mise en oeuvre de ces actions a été confiée aux professionnels de la santé (HAS, 2007).

    4- Les compétences requises pour dispenser l'ETP

    Le décret n°2010-906 du 02 Août 2010, représente la première référence réglementaire qui décrit les compétences fondamentales pour pratiquer l'ETP. Il s'agit des formations continues10 destinées aux professionnels de la santé. Ces formations permettent aux soignants d'acquérir les compétences relationnelles, pédagogiques, organisationnelles et méthodologiques. Elles s'appuient sur les contenus et les objectifs pédagogiques définis par l'OMS (1998, p. 21), permettant la conduite de la séance éducative de l'ETP (HAS, 2007). La formation initiale doit préparer les soignants à mieux prendre en charge l'activité thérapeutique, elle aborde la psychologie, les méthodes pédagogiques, les modèles théoriques et les finalités de l'ETP. Dans ce cadre, suite à une enquête réalisée en collaboration avec un groupe d'expert international et la participation de nombreux acteurs de l'éducation thérapeutique,11 un référentiel12 de compétences pour pratiquer l'ETP a été initié par l'INPES en 2013. Les compétences recueillies regroupent trois domaines techniques (relationnelles, pédagogiques et organisationnelles).13Elles peuvent être reformulées selon les contextes, les

    9 Joint en annexe n°1.

    10 de sensibilisation de 8 à 15 h et des formations dites fondamentales de niveau 1, d'une durée de 40 heures d'enseignements théoriques et pratiques (OMS, p. 21).

    11 Le pilotage du projet a été réalisé par Jérôme Foucaud (chargé d'expertise scientifique en promotion de la santé à l'Inpes).

    12 Décret n°2013-449 du 31 mai 2013.

    13 Joints en annexe 2.

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    situations, et les acteurs concernés. Elles ne correspondent ni à un seul métier de la santé, ni à un seul professionnel, elles concernent une équipe pluridisciplinaire.14 Parmi tous ces professionnels de la santé impliqués dans la pratique de l'ETP, nous avons voulu consacrer notre étude à l'implication de l'infirmière dans la réalisation de cette pratique éducative, étant donné que l'éducation pour la santé et l'ETP font partie intégrante de ses actes professionnels stipulés par l'article R. 4311-3 du code de la santé publique. Elle les exerce particulièrement dans le cadre de son rôle propre, auprès des personnes, à tous les âges de la vie. Que celles-ci soient en établissement de santé, au domicile, en entreprise, à l'école, au collège, au lycée...etc.

    Dans ce cadre, l'ETP va-t-elle concourir à une nouvelle pratique infirmière ? Puisque cette pratique exige une démarche éducative. Sur quelle approche pédagogique se fonde-t-elle ? Afin de pouvoir répondre à ces interrogations, nous présenterons au chapitre suivant, la démarche pédagogique de l'ETP.

    5- La démarche pédagogique de l'ETP

    Avant d'aborder la démarche pédagogique de l'ETP, nous souhaitons citer l'étude réalisée par A. Giordan (2010), 15qui explique que le modèle de référence de l'enseignement en ETP était axé sur l'apprentissage de notions et de gestes thérapeutiques centré sur le biomédical, du fait qu'une maladie est supposée avoir une cause organique ou biologique (microbe, génétique, stress, etc.) L'acteur principal de l'action éducative serait le soignant. Celui-ci avait comme rôle principal d'intervenir sur la maladie et dispenser l'enseignement approprié aux soins. Le patient dans la situation avait plutôt un rôle passif, il appliquait et exécutait les conseils et les recommandations du soignant. Pour ces enseignements éducatifs, deux types de pratique étaient envisagés. La première approche reproduisait le modèle universitaire comportant des cours magistraux, accompagnés de travaux pratiques. La deuxième est moins en usage dans les pays francophone, elle repose sur un entraînement basé sur les principes. (Golay, Laggar et Giordan, 2010, pp. 1-2).

    Progressivement, face à des maladies de plus en plus chroniques, s'est mise en place l'idée que le soignant ne peut plus se substituer au patient (faire à sa place ou penser pour lui). Et les idées de « faire faire » au lieu de faire, « faire dire » au lieu de dire et « faire construire » au

    14 Médecins, diététiciens, kinésithérapeutes, ergothérapeutes, pharmaciens, ...

    15 Etude faite par le laboratoire de didactique et épistémologie des sciences à l'université de Genève, pour le service d'enseignement thérapeutique des maladies chroniques, dirigé par le Professeur A. Golay, Hôpitaux universitaires de Genève, Suisse.

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    lieu de construire pour l'autre, ont incité la préoccupation des politiques publiques qui, ont commencé à encourager les professionnels de la santé à réfléchir comment accompagner le patient à assumer ses propres soins, en prenant des décisions concernant sa santé. Dans ce cadre, l'HAS a proposé aux professionnels de la santé une méthode pédagogique pour construire des programmes d'ETP. Ces programmes doivent s'adapter à l'âge de la personne, à sa fragilité et à ses besoins (HAS, 2007).

    5.1- Les étapes de la démarche éducative

    Selon les recommandations de la HAS (2007), la mise en oeuvre de la démarche éducative comprend principalement 4 étapes à mettre en oeuvre par les professionnels de la santé. Il s'agit d'élaborer un diagnostic éducatif, de définir un programme personnalisé d'ETP, de planifier et mettre en oeuvre des séances éducatives et enfin, de réaliser une évaluation des résultats.

    a) Le diagnostic éducatif

    Appelé aussi « anamnèse éducative », définit par l'OMS (1998) comme la première étape du processus pédagogique. Pour d'Ivernois et Gagnayre (2011), « il permet d'appréhender différents aspects de la vie et de la personnalité du patient, d'identifier ses besoins, d'évaluer ses potentialités, de prendre en compte ses demandes et son projet dans le but de proposer un programme d'éducation personnalisé » (p. 71). Il s'agit d'un recueil détaillé et itératif d'informations, réalisé par un soignant, « il est au mieux le fruit de la collaboration d'une équipe multi professionnelle... » (HAS/INPES, 2007, p. 27).

    Le diagnostic éducatif doit représenter un temps d'apprentissage pour le patient. Au cours de l'entretien, le soignant peut s'aider d'un questionnaire préétabli. Il s'agit d'un guide d'entretien et non d'un formulaire d'enquête, afin de permettre une discussion ouverte basée sur la confiance. Dans ce cadre, d'Ivernois et Gagnayre (2011), ont proposé un guide, aux professionnels de la santé sous forme d'une trame de questions.16 Ce guide doit être utilisé par le soignant comme un support structuré pour l'entretien avec le patient. Il doit être adapté également, aux spécificités de la maladie chronique et à la population concernée. Le soignant durant le diagnostic éducatif doit adopter une attitude d'écoute active favorisant l'expression du patient et l'encourageant à poser des questions à son tour, afin de pouvoir prendre des

    16Qu'est-ce qu'il (elle) a ? Qu'est-ce qu'il (elle) fait ? Que vit-il (elle) ? Que sait-il (elle) et que croit-il (elle) ? Que peut-il (elle) faire ? Qui est-il (elle) ? Quels sont ses projets ? Dans quel environnement est-il (elle) ?

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    décisions en commun et d'assurer la compréhension mutuelle du but du diagnostic éducatif. Aussi, à chaque entretien, le soignant doit transcrire l'ensemble des informations recueillies dans le dossier éducatif du patient, afin d'éviter d'éventuelles omissions ou répétitions. Le diagnostic éducatif n'est pas définitif, il est évolutif et progressif, il doit être réévalué par le soignant à chaque rencontre avec le patient. Il peut être établie en plusieurs séances car il requiert l'investissement d'un temps nécessaire à l'instauration d'un climat de confiance entre soignant/soigné (pp. 72-75).

    b) La négociation des objectifs

    Le soignant à travers le diagnostic éducatif doit identifier avec le patient les compétences à mobiliser, à maintenir ou à acquérir comme les compétences d'auto soins, de sécurité et les compétences à pouvoir gérer la maladie. Ces différentes compétences doivent aboutir à la constitution et à la réalisation du programme individuel de l'ETP. Le patient a toute la liberté de s'engager dans le parcours éducatif ou pas, il peut aussi redéfinir avec le soignant à tout moment les objectifs et les modalités du suivi thérapeutique. C'est pour cela qu'on parle de négociation des objectifs (HAS, 2007, encadré 4).

    c) La planification et la mise en oeuvre des séances éducatives

    A ce stade, le soignant propose aux patients une planification de séances éducatives, sous forme d'un contrat éducatif. La réalisation de ces séances se fait soit dans des structures dédiées aux soins (hôpitaux, réseaux de santé, cabinet libéral médical ou paramédical...) ; soit au domicile du patient ; elle peut être organisé aussi dans le milieu carcéral. La détermination de la nature des séances individuelles ou collectives dépendra de la disponibilité des locaux et des professionnels de santé (HAS, 2007, encadré 5).

    - Les séances individuelles : sont destinées en priorité aux patients qui ont des difficultés à se retrouver en groupe, et qui ont une dépendance physique, sensorielle ou cognitive. La séance se déroule en face-à-face entre le soignant et le patient seul, ou accompagné de sa famille. Le soignant doit choisir le thème de la séance en fonction du projet du patient et des compétences à faire acquérir. La séance personnalisée doit se structurer en trois temps : La préparation avant la séance, la conduite de la séance et, l'analyse après la séance. La durée moyenne d'une séance est de 30 à 45 minutes (HAS, 2007, encadré 7).

    - Les séances collectives : se caractérisent par la présence d'un groupe de patients au même moment, dans un même lieu. Ces patients ont en commun les mêmes objectifs éducatifs. L'avantage de ces séances, c'est le partage d'expériences entre patients. La séance doit être animée par plusieurs soignants, leur rôle est de favoriser les échanges entre les participants. La taille de chaque groupe est de 8 à 10 personnes y compris les accompagnants. Le nombre

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    de participants varie selon le thème de l'activité éducative et la compétence à acquérir. La séance collective se structure aussi en 3 temps comme la séance individuelle. Sa durée est de 45 minutes à 1 heure, entrecoupée de pauses. Eventuellement, les soignants peuvent programmer plusieurs séances collectives au cours d'une demi-journée sans dépasser une durée de 3heures (AHS, 2007, encadré 7).

    - Les séances en alternance : une alternance de séances individuelles et collectives peut être proposée à un patient par les soignants, selon la compétence à vouloir acquérir. Par exemple, pour l'acquisition de compétences d'auto soins complexes, une alternance de séances peut avoir un intérêt pour l'apprentissage. Cette alternance doit être planifiée dans le programme personnalisé du patient. (HAS, 2007).

    d) La phase d'évaluation

    Cette phase aborde l'évaluation des objectifs thérapeutiques définis dans le contrat éducatif. Par exemple, durant la phase d'évaluation, le soignant demande à un patient diabétique, d'expliquer sa maladie, les traitements qu'il prend, la réalisation d'un auto soin, ou vérifier la lecture d'une glycémie. C'est grâce à l'évaluation des objectifs que les soignants peuvent s'interroger sur l'adéquation des méthodes pédagogiques et sur les outils mobilisés pour l'activité thérapeutique. L'évaluation de l'ETP doit être utilisée de manière formative ne portant aucun jugement sur le patient. A travers un dialogue structuré, le soignant doit faire le point avec le patient pour l'aider à développer des compétences d'auto- évaluation. La visée de cette rencontre est l'actualisation du diagnostic éducatif, qui conduit les soignants à proposer au patient ; soit une offre de suivi de « reprise » pour approfondir et compléter l'éducation initiale ; ou bien, de nouvelles séances éducatives sous forme de « suivi régulier » ou de « renforcement », afin de maintenir les compétences ou de les actualiser. (HAS, 2007).

    5.2- Les ressources et les techniques éducatives de l'ETP

    Comme nous l'avons spécifié, la pratique de l'ETP mobilise des moyens humains comme les professionnels de la santé17 travaillant dans les établissements de soins formés spécialement à cette activité (HAS, 2007).

    La pratique de l'ETP mobilise également des moyens techniques et des outils pédagogiques, facilitant les interactions et les médiations avec le patient et sa famille. L'ETP s'appuie sur les ateliers, les exposés interactifs, les tables rondes, les jeux de rôle, les stimulations de gestes et

    17 Aux côtés de ces professionnels de santé travaillant dans les établissements de soins, il y a les personnels de secrétariat, administratifs et techniques, il y a également ceux qui interviennent dans les secteurs mutualiste, assurantiel et industriel aussi concernés par l'action de l'ETP (HAS, 2007).

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    de techniques. Ces pédagogies s'appuient sur le vécu et l'expérience antérieure du patient. D'autres outils pédagogiques peuvent être sollicités (affiches, brochures, bande audio ou vidéo, matériel de soins, ...) Ces outils doivent compléter la séance éducative, mais pas l'interaction soignant/soigné. Le choix des ressources pédagogiques doit se faire en concertation avec toute l'équipe soignante qui met en oeuvre le programme de l'ETP. Ces ressources doivent être disponibles, accessibles et adaptées aux objectifs des séances éducatives (HAS, 2007). Puisque l'infirmière est impliquée dans la pratique de l'ETP, nous allons développer son métier pour le mettre en lien avec cette activité éducative.

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    II- Présentation du métier de l'infirmière

    L'infirmière exerce son métier dans le respect des articles R.4311-1 à R.4311-15 et R.4312-1 à 4312-49 du code de la santé publique.

    1- Définition du métier de l'infirmière

    L'infirmière prévoit, prodigue et évalue des soins de nature préventive, curative ou palliative, visant à promouvoir, maintenir et restaurer la santé de la personne, elle contribue à l'éducation, à la santé et à l'accompagnement d'une personne ou d'un groupe dans leur parcours de soins, elle intervient de manière autonome et en collaboration avec une équipe pluridisciplinaire. C'est la définition donnée par le référentiel du métier de l'infirmière (2009), que nous avons résumée. Ce référentiel décrit les activités du métier de l'infirmière et les compétences requises pour l'exercer. Ces dernières doivent être maîtrisées et attestées par l'obtention du diplôme d'état (IDE), décrit et inscrit dans la réglementation figurant au code de la santé publique. L'infirmière est soumise au respect des règles professionnelles et notamment, au respect du secret professionnel, dans l'ensemble de ses activités.

    En effet, ce métier d'infirmière s'exerce en clinique, à l'hôpital public ou privé, dans des services de courts séjours, de longs séjours avec des patients jeunes, âgés, dialysés...ou dans des services très technique (service de réanimation...), ou très relationnel (service de psychiatrie...). L'infirmière travaille seule (soins à domicile), en binôme (infirmière/aide-soignante pour un secteur de 10 à12 patients) ou en équipe (dans un service hospitalier). En plus de son travaille, elle peut s'inscrire dans la « réserve sanitaire » ou elle peut apporter les premiers soins d'urgences aux personnes touchés par des catastrophes. Le métier de l'infirmière est extrêmement varié, sans oublier les aléas d'être amené à travailler de tout temps : la nuit, le week-end et les jours fériés.

    De cette présentation du métier de l'infirmière, nous tentons de développer la compétence de l'infirmière en lien avec la pratique de l'ETP et les principales activités en lien avec la pratique infirmière.

    2- La compétence infirmière en lien avec l'ETP

    Parmi les dix compétences de l'infirmière décrites par le référentiel de son métier (2009), la compétence 5 intitulée « Initier et mettre en oeuvre des oeuvres éducatifs et préventifs » incite l'infirmière à éduquer le patient. Ce qui explique l'intégration de l'ETP dans le cursus de la formation initiale, en application de l'arrêté du 31 juillet 2009, relatif au Diplôme d'Etat des Infirmières. Cette compétence doit initier l'infirmière à « concevoir et mettre en oeuvre une

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    démarche d'éducation thérapeutique ». Elle repose sur quatre unités d'enseignement, soit plus de 150 heures théoriques et pratiques, réparties sur les trois années de formation. Ainsi, l'infirmière peut assurer pleinement son rôle d'éducatrice (Bulletin officiel santé/ n°7, 2009, p. 276).

    Selon l'Ordre National des Infirmiers (ONI, 2010), bien que l'activité ETP soit très investie par la profession, elle reste très mal connue étant « le contenu des pratiques peu étudié par la recherche en soins, elle reste souvent occultée, dans une perspective organisationnelle et financière médico- centrée, [...j » (p. 3).

    En effet, si les différentes compétences de l'activité de l'infirmière l'incitent à réaliser des soins somatiques et thérapeutiques. Quelle définition peut-on donner à l'activité infirmière ? C'est dans cette perspective que nous voulons définir la notion de l'activité.

    3- La notion de l'« activité » dans les pratiques de l'infirmière

    Nous avons choisi une entrée par la notion d'« activité » car elle représente pour nous la tâche « réelle » souvent distincte de la tâche « prescrite », assignée par le référentiel des compétences. L'infirmière réalise différentes tâches dans le cadre de son activité de soignante. C'est dans ce sens, que nous voulons définir les termes « tâche et activité » séparément. Etymologiquement, le mot « activité » vient du latin « activitas » dérivé de « activus » (actif, relatif à l'action), de « actus » (action), et de « agere » (agir). Et, le mot « tâche » vient du latin médiéval « tasca » qui signifie : redevable, travail donné à accomplir. Ce terme est défini aussi par le dictionnaire Larousse comme un « travail, ouvrage à faire dans un temps déterminé et à certaines conditions », c'est aussi « une conduite dont on se fait une obligation ». Ici, c'est l'activité représentée en « tâche réelle » relevant du rôle propre de l'infirmière qui nous intéresse, étant donné que la « tâche prescrite » relève du rôle prescrit, le fait qu'elle répond à une exécution hiérarchique (médicale). Dans ce cadre, nous nous appuyons sur la théorie de l'analyse du travail de Ombredane et Faverge (1955, p. 2), qui distingue le « quoi » et le « comment » du travail. Donc, le « qu'est-ce qu'il y a à faire » répond à la tâche prescrite pour l'infirmière, et le « comment les travailleurs le font-ils ? » répond à comment cette infirmière s'organisera pour le faire et dans quelle condition (rôle propre). J. Leplat (1997, pp. 16-17) explique que quelques années plus tard, cette distinction a été retravaillée par Leplat et Hoc (1983), qui parlent de tâche et de l'activité séparément : «la tâche indique ce qui est à faire, l'activité, ce qui se fait ». Selon Leplat, ces chercheurs ont démonté que la notion de tâche et différente de celle de l'activité : la notion de tâche véhicule l'idée de prescription, voire d'obligation ; tandis que la notion d'activité renvoie aux tâches

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    réalisées par l'agent pour la réalisation du prescrit, ainsi, il remplit ses obligations. L'activité représente aussi une construction singulière qui « exprime en même temps la tâche prescrite et l'agent qui l'exécute [...]. Elle traduit notamment ses compétences, ses motivations, son système de valeurs... » (Leplat, 1997, p. 33). Alors qu'elle renvoie pour Dubet (1994) à la notion d'« acteur », pour lui, l'expérience est définie comme une combinaison de logiques d'action, qui lie l'acteur à chacune des dimensions d'un système. Dans cette vision « l'acteur est tenu d'articuler des logiques d'action différentes, et c'est la dynamique engendrée par cette activité qui constitue la subjectivité de l'acteur et sa réflexivité » (p. 105).

    Au travers de ces interprétations, nous retenons que l'activité (ce qui se fait) désigne une ou plusieurs missions (initiatives) exécutées par l'infirmière dans le cadre de son rôle propre. Alors que la tâche (ce qui est à faire) indique ce qui relève du prescrit pour l'infirmière, que celle-ci réalise seule ou en équipe, en exécutant un processus de soins. Donc, l'activité attribue une place centrale à l'infirmière, la désignant comme acteur dans son service de soins. Nous pouvons alors, dire que l'« activité » pour l'infirmière désigne un ensemble distinct d'actions identifiées, organisées selon un processus logique, observable en tant que tel. Cela peut être le cas aussi de l'« activité ETP » qui doit être exécuté par l'infirmière, ou par une équipe pluridisciplinaire. La réalisation de cette activité ETP requière la mobilisation de certaines compétences éducatives préalablement identifiées. Dans ce sens, la notion de l'activité renvoie notre curiosité à développer les différentes activités de l'infirmière pour distinguer les tâches qui lui ont été attribuées.

    3.1- Les différentes activités de l'infirmière

    L'activité de l'infirmière est définie et couplée par deux rôles dominants : le rôle prescrit et le rôle propre (code de la santé publique mentionné en page 26 de ce travail).

    ? Le rôle prescrit est induit par la prescription médicale ;

    ? Le rôle propre découle de la fonction de l'infirmière.

    Parmi ces deux rôles, nous allons développer le rôle propre, par lequel l'infirmière se voit reconnaître l'autonomie, la capacité de jugement et d'initiative. Elle en assume la responsabilité.

    a) Le rôle propre de l'infirmière

    Avant de définir le « rôle propre de l'infirmière », nous jugeons utile de présenter d'abord la signification du « rôle propre ». Pour le dictionnaire Larousse, c'est un ensemble de normes et d'attentes qui régissent le comportement d'un individu, du fait de son statut social ou de sa fonction dans un groupe. Hesbeen (1997, p. 36), s'est intéressé aux actions relevant de ce rôle

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    propre pour l'identifier à une manière de faire, qui est toujours différente d'une personne à une autre. Il s'agit « des petits gestes, des petits détails, au caractère anodin, peu mesurable, non spectaculaire nécessitant une analyse et une adaptation constante » (gestion hospitalière n°323, p. 23). C'est aussi une façon dont se joue une activité d'après Collière (1982), « il est constitué d'une infinie de [variables] qui interfèrent, qui sont en interaction, et vont créer des différences dans la façon de faire, la façon de procéder » (p. 235).

    Pour ces définitions, la notion du rôle propre sur le plan professionnel désigne une ligne de conduite, un ensemble d'attitudes requises pour agir en autonomie dans son métier.

    -La notion du « rôle propre infirmière » est décrite dans la terminologie des soins infirmiers comme une expression « employée pour désigner le domaine spécifique de la fonction infirmière dans lequel lui sont reconnues une autonomie et la capacité de jugement et d'initiative... » (p. 41). M. Formarier (1990), le considère comme un « rôle toujours nouveau » le fait que chaque patient porte en lui l'originalité de son application ; un « rôle riche » fondé sur la relation ; un « rôle multidimensionnel » car il ne s'agit pas d'un rôle, mais une pluralité. Pour Formarier, bien que ce rôle soit codifié et décrit, il reste identifié comme un « rôle difficile et exigeant » car « il se joue dans une mouvance existentielle ». L'auteur explique que, la complexité de ce rôle propre n'est pas dans le geste en soi, mais en grande partie dans la finalité qui doit intégrer à ce geste toute une dimension unique et humaine. Pour cet auteur, ce rôle ne peut être que « porteur d'avenir », car « bien qu'il étaye son présent sur les étapes de son histoire, il forge son avenir en s'enracinant de plus en plus dans une véritable science infirmière » (p. 52).

    b) La définition législative du rôle propre infirmier

    Le décret du 15 mars 1993, précise les différentes tâches relevant du rôle propre de l'infirmière et, lui attribut « les soins liés aux fonctions d'entretien et de continuité de la vie et visent à compenser partiellement ou totalement un manque ou une diminution d'autonomie d'une personne ou d'un groupe de personnes ». L'infirmière au début de l'exercice de sa profession, elle n'avait comme rôle que celui « d'exécutante du médecin ». Il a fallu attendre le 31 mai 1978, pour qu'une loi vienne modifier l'article L. 473 du Code de la Santé Publique et instituer le rôle propre. Dans ce cadre, l'infirmière a la compétence pour prendre les initiatives et accomplir les soins qu'elle juge nécessaires conformément aux dispositions des articles R.4311-5 et R.4311-6. Où elle identifie les besoins de la personne, pose un diagnostic infirmier, formule des objectifs de soins, met en oeuvre les actions appropriées et les évalue. Elle peut aussi élaborer, avec la participation des membres de l'équipe soignante, des protocoles de soins infirmiers relevant de son initiative. Elle est chargée aussi de la

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    conception, de l'utilisation et de la gestion du dossier de soins infirmiers. Cette définition législative du rôle propre infirmier renvoie à deux champs d'action : un champ centré directement sur la personne ; et un champ plus administratif centré sur la gestion du dossier de soins.

    c) Les caractéristiques du rôle propre infirmier

    Les différentes définitions citées plus haut font apparaître deux mots clé que nous voulons développer : la notion d'autonomie et celle de la responsabilité, en lien avec le rôle propre infirmier :

    - La notion d'« autonomie » : selon le dictionnaire des Soins Infirmiers (1995), l'autonomie représente la capacité qu'à l'infirmière pour prendre des initiatives et des décisions dans le cadre de son travail. Pour Hesbeen (1997), c'est aussi « la capacité de gérer ses propres limites, de se gouverner à partir de ses propres normes,... » (gestion hospitalière N°323, pp. 123-124). Donc, l'autonomie pour ce rôle propre se représente dans la prise des initiatives d'agir dans et pour l'activité, il s'agit de structurer un savoir être et un savoir-faire qui permettront à l'infirmière d'être reconnue comme une professionnelle à part entière.

    - La notion de « responsabilité » : selon le dictionnaire des Soins Infirmiers (1995), la responsabilité est « l'obligation faite à l'infirmière de répondre de ses actes et de ceux qui ont été confiés aux auxiliaires et aux étudiants qu'elle encadre ; elle découle de son habilitation à dispenser des soins infirmiers ». Donc, l'infirmière est responsable de la totalité du processus du soin et des tâches qui l'entourent : elle analyse la situation que vit le patient ; détermine les interventions adaptées pour atteindre les objectifs du soin à réaliser ; supervisionne la tâche de ses collègues aides-soignantes ; encadre les étudiantes infirmières et décide de ce qui est à faire (du comment et du pourquoi le faire), pour enfin pouvoir le réaliser. C'est ce qu'on appelle «la démarche de soins » (gestion hospitalière N°323, p. 169).

    Nous tenons à préciser que les écrits qui ont abordé le rôle propre de l'infirmière, ont souvent associé à ce rôle des caractéristiques spécifiques comme l'écoute, l'observation, l'aide... En effet, c'est par la valorisation de ce rôle propre que cette infirmière a pu retrouver une zone d'autonomie et de responsabilité pour exercer pleinement ses différentes activités.

    Maintenant que nous savons que l'activité ETP doit faire partie des activités de l'infirmière. Peut-on dégager de ce repère que cette pratique est réellement appliquée par toutes les infirmières ? Si c'est le cas, l'ETP représente-elle un soin au regard de ces infirmières ? Ou bien s'agit-il d'un nouveau rôle qu'elles doivent adopter pour l'exercer ? C'est dans ce cadre, que nous voulons aborder la notion des soins infirmiers afin de dégager le lien avec l'activité ETP.

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    3.2- Les définitions des soins infirmiers

    Le dictionnaire Larousse donne une définition globale au « soin infirmier » le caractérisant par « une attention, une application envers quelqu'un ou quelque chose ». Dans ce contexte, le mot « soin » prend la signification de « moyens par lesquels on s'efforce de rendre la santé à un malade ». Le soin infirmier représente pour le Conseil International des Infirmiers « tous les soins prodigués, de manière autonome ou en collaboration, aux individus de tous âges, aux familles, [...] quel que soit le cadre » (CII, 2015). Selon la théoricienne V. Henderson (1969, p. 65), il s'agit d'« assister l'individu, malade ou bien portant, dans l'accomplissement des actes [...]... » C'est aussi une mission d'aide pour les infirmières, qui doivent accompagner les patients « à réaliser leur potentiel physique, mental et social et à y parvenir dans le contexte de l'environnement dans lequel ils vivent et travaillent » (OMS, 1998). Ce qui explique que l'action du « soin » englobe la notion d'aide mental et social envers les malades. Elle convoque deux questions fondamentales : celle de l'attitude que l'infirmière doit adopter pour soutenir le patient et, celle de la relation infirmière/patient.

    Au regard de ces définitions, nous retenons que les soins représentent la « base » de l'activité de l'infirmière, intégrant à la fois la qualité technique, relationnelle et éducative avec le malade. A ce stade, plusieurs points nous ont poussés en effet, à s'interroger sur l'organisation du système d'activités des soins infirmiers. C'est dans ce cadre que nous nous demandons : si dans le système de soins actuel, les infirmières peuvent pratiquer l'activité ETP ? Si ce n'est pas le cas. Ces infirmières doivent-elles réorganiser leur système d'activités pour qu'elles puissent pratiquer l'ETP ? Dans ce cas, cette pratique éducative bouleversera-t-elle l'organisation des soins infirmiers ? Ces différentes interrogations nous ont guidées vers la nécessité de présenter le système d'activités des soins infirmiers actuel, afin de savoir s'il répond aux exigences de l'activité ETP recommandées par la loi HPST, à moins que les infirmières ne pensent à de nouveaux modes d'organisation pour intégrer cette activité éducative aux soins.

    4- Le système d'organisation du travail infirmier

    Pour comprendre le système d'organisation des soins infirmiers, nous tenons à définir d'abord les notions de « l'organisation du travail » et du « système d'organisation ».

    4.1- Définition de l'organisation du travail

    L'organisation du travail comme concept donne lieu à de multiples définitions. La définition de St-Onge & al. (2009) la présente comme étant « les moyens utilisés pour diviser le travail en tâches distinctes et le coordonner » (p.16). Pour ces auteurs, elle doit faciliter la réalisation

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    des objectifs organisationnels, identifier et reconnaître les capacités et les besoins des employés. Elle ne peut s'accomplir que par l'analyse d'un poste de travail. C'est par l'analyse de celui-ci que l'employeur peut déterminer les activités, les tâches et les responsabilités liées à l'emploi, aux décisions, aux procédures, à la charge de travail, aux équipements nécessaires, aux différents traitements de l'information ainsi qu'aux conditions de travail favorables (pp. 7-11). Les auteurs Fried et Fottler (2010) désignent l'organisation du travail comme un processus qui vise à modifier, enrichir, élargir les fonctions et les tâches des employés (p.162).

    Ces deux définitions nous conduisent à interpréter que l'une des premières missions de l'organisation du travail est de mettre en place un mode de répartition des tâches et, de coordonner le travail qui permet d'obtenir la meilleure efficacité possible. Cette organisation doit être réfléchie pour pouvoir modifier et enrichir les tâches identifiées. Et tout cela grâce à un système d'organisation spécifique à chaque domaine.

    4.2- Définition du système d'organisation

    Pour comprendre le système d'organisation du travail de l'infirmière, nous développons d'abord les significations que sous-entendent les termes « système » et « organisation ». Le dictionnaire Larousse définit le mot « système » par « un ensemble cohérant de notions, de principes liés logiquement ; un ensemble organisé de règles, de moyens tendant à une même fin... » Le mot « organisation » est défini par une « coordination des activités et des tâches en vue d'améliorer les conditions de travail ». Donc pour le travail de l'infirmière, l'organisation du système d'activités représente la répartition des différentes activités d'un service de soins entre les infirmières. Chaque infirmière doit donc réaliser un ensemble de tâches, en vue de la continuité des soins, dans un système ou les différentes tâches sont organisées en fonction des priorités et du but de chaque tâche. Etant le but d'un service de soins est d'assurer des soins de la meilleure qualité possible.

    4.3- Organisation du travail de l'infirmière

    La prise en charge d'un groupe de malades au sein d'un service de soins, demande la mobilisation d'une équipe soignante engageant une organisation spécifique par rapport à la charge de travail. Chaque service de soins a son propre système de répartition des tâches ayant des caractéristiques différentes permettant une prise en charge globale ou personnalisée des patients. C. Mordacq (1972, pp. 86-94), nous présente quatre modèles d'organisation du système de soins infirmiers complètement distincts :

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    ? Le système de type familial : demande peu d'infirmières pour un nombre déterminé de patients hospitalisés pour une longue durée (exemple : les maisons de retraite). Ce modèle n'exige pas une organisation spécifique, l'infirmière s'organise selon ses priorités ;

    ? Le système des soins en séries : chaque infirmière effectue des tâches en série dont la technicité correspondant à son niveau de formation. La relation infirmière /patient est limitée à la catégorie des soins. L'interaction entre les différents soignants du même service est horizontale (les infirmières entres-elles, les aides-soignantes entres-elles, les agents entres eux...) Les transmissions écrites et orales sont d'ordres informels. La responsabilité est d'ordre technique dans l'exécution précise des tâches. L'organisation du travail est hiérarchisée, seul le médecin chef est le cadre de santé (responsables du service) seraient en mesure d'avoir la totalité des informations permettant de faire la synthèse de la situation de chaque malade et d'effectuer un contrôle ;

    ? Le système d'attribution individuelle : chaque infirmière prend en charge un certain nombre de malades selon sa formation et la gravité de l'état du malade. Ce modèle présente peu d'interaction entre les infirmières du même service pendant le travail, à moins que l'infirmière ait besoin d'une aide ou d'un conseil. Ce qui peut provoquer un risque d'isolement pour elle. Les transmissions écrites et orales, inter équipe sont indispensables pour la continuité des soins (système de la relève). Chaque infirmière est responsable de son organisation en fonction de ses capacités. Les responsables supervisionnent l'infirmière et interviennent en cas de besoin ;

    ? Le système des soins en équipe : l'équipe est composée de soignants de niveau de formation et de capacité différentes, affectés à un même service de soins. Le nombre de l'équipe est délimité chaque jour en fonction de la charge de travail estimé par le cadre de service. Chaque soignant rend compte des résultats de son action. Il est informé et organisateur de l'information. Les transmissions écrites sont individuelles à chaque malade et archivées dans son dossier de soins. Les transmissions orales, inter équipe sont indispensable pour assurer le suivi et la continuité des soins. Des réunions d'équipe sont organisées régulièrement pour discuter de la répartition des tâches et s'informer entre soignants sur des sujets précis. Les relations médecin/infirmière/patient et familles sont directes. Chaque professionnel à la parole pour la prise en charge des malades qui lui sont confiés. L'organisation du travail se

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    fait par délégation de responsabilité selon la capacité de chaque soignant. Ce modèle est le plus reconnu dans les établissements hospitaliers de France.

    Pour Mordacq (1972), repérer le système de soins dans un service et en connaître les limites peut permettre à l'infirmière de comprendre son fonctionnement et d'adapter la stratégie qui convient pour travailler selon ses capacités, ses valeurs et en trouver de la satisfaction. Nous rajoutons à cette interprétation que l'infirmière travaillant dans un service hospitalier ne peut éviter l'existence de certains éléments, qui peuvent concourir à un remaniement de l'organisation de son système d'activités, à savoir : la loi HPST du 21 juillet 2009, qui organise les services de soins en pôle dans un système de gouvernance hospitalière, en plus de l'intégration de l'ETP aux soins quotidiens de l'infirmière. Ce rajoute à cela, les contraintes budgétaires actuelles subies dans un contexte de crise économique qu'a vu le système de santé ces dernières années (OCDE, 2013). Nous supposons que ces éléments vont sûrement contribuer à de profondes transformations dans le système d'organisation des soins infirmiers. Force est de constater que cette nouvelle situation va certainement emmener les infirmières à s'interroger sur leur identité professionnelle. C'est dans ce cadre que nous voulons aborder dans le chapitre suivant l'identité professionnelle de l'infirmière, afin de comprendre son évolution et sa construction.

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    III- Présentation de l'identité professionnelle de l'infirmière

    L'identité professionnelle de l'infirmière est étroitement liée à son histoire. Il s'agit de la reconnaissance d'une profession. L'identité professionnelle pour la majorité des infirmières est déjà construite dès son entrée à l'Institut de Formation des Soins Infirmiers (IFSI). Selon Dubar (2002, p.142), « on quitte la formation initiale avec une identité professionnelle reconnue ». La population des étudiantes infirmières est très hétérogène durant la période de formation. Celle-ci regroupe différentes tranches d'âges (entre 17 et 50 ans), de diverses origines et majoritairement féminines. Ces personnes justifient soit du baccalauréat, ou d'autres niveaux d'études équivalent. Ces futures infirmières peuvent être aussi des professionnels de la santé en promotion ( comme le cas des aides-soignantes et des auxiliaires de puériculture) et autres professionnels en reconversion ayant exercés dans d'autres secteurs. Si on se réfère à la socialisation de Dubar (1998, p.135), ces infirmières en formation possèdent déjà une identité personnelle et une conception de la profession en lien avec leur identité, leur culture, leurs expériences, et leur histoire de vie. Ce qui signifie que toute personne qui arrive en formation paramédicale dispose de représentations, de conceptions et de connaissances préalables qui auront forcement, une influence sur les acquisitions ultérieures. Ces étudiantes infirmières vont donc évoluer individuellement de façon différente au cours de la même formation. Elles possèdent déjà une identité personnelle reconnue par les autres et elles construisent une nouvelle identité dont elles revendiquent la reconnaissance (Dubar, 1998, p.139).

    De par la législation qui réglemente la profession des infirmières, celles-ci travaillent en équipe et partagent un ensemble commun de pratiques et de valeurs dans leurs diverses activités quotidiennes, constituant ainsi une part importante de leur identité professionnelle. Une sorte d'identité transmise et partagée dès l'apprentissage par alternance pendant les stages pratiques exigés par la formation initiale (théorie/pratique), et tout au long du parcours professionnel (Dubar, 2002, p.142). Donc, l'infirmière s'identifie et se construit face à cet ensemble commun, qui définit toutefois le rôle attendu de ces professionnelles, c'est-à-dire en quelque sorte leur professionnalité. Cette professionnalité, organisée par les connaissances, les capacités, les compétences et les savoirs, est propre à une profession (Wittorski, 2005, p. 9). En effet, l'identité professionnelle pour l'infirmière ne peut être que le résultat d'un processus collectif comme nous l'a précisé Dubar (2002, p.141). Celle-ci en s'identifiant à un groupe de professionnel dans son service de soins, vit une sorte d'« identification » toute particulière, à

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    savoir : sa personne avec son vécu, ses valeurs, ses expériences qui ont forgé son caractère et son identité personnelle. Si cette infirmière se retrouve face à des interactions nouvelles avec un mode méconnu comme la pratique d'une nouvelle activité ETP, alors qu'elle a déjà une activité bien définie, elle-même marquée d'une identité d'infirmière reconnue par des patients et des professionnels (multidisciplinaire). Elle doit donc s'identifier face à ces mutations dans son activité d'infirmière. Elle doit aussi se sentir reconnu par ses pairs et par les patients dans son nouveau rôle d'éducatrice, pour acquérir une identité d'infirmière éducatrice. Nous supposons que tout changement dans les habitudes de travail de cette infirmière, entraînera des transformations identitaires profondes et une réorganisation de la hiérarchie des activités et des priorités. Selon P. Tap (1998, p. 66), « cette identité constitue un effort constant pour gérer la continuité dans le changement, ce qui n'est pas toujours facile ». L'identité ne devient alors « une préoccupation et un objet d'analyse que lorsque les acteurs n'arrivent plus à s'accorder sur la signification de la situation et les rôles qu'ils sont censés tenir » (Pollak, 1990, p. 10).

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    Synthèse de la première partie

    Nous venons de constater au travers de la première partie de notre travail, que le nombre alarmant des personnes vivant avec une maladie chronique déclaré par le Ministère de la santé et de la solidarité en 2007, représente un problème de santé pour la population et un véritable souci pour notre société, plaçant l'ETP au coeur des débats des politiques et des professionnels de la santé, une des priorités en matière de santé publique. Suite à ce constat, l'activité ETP devient une nécessité, reconnue par l'OMS-Europe en 1998, la décrivant comme une continuité indispensable à l'éducation à l'auto soin. Plusieurs études engagent des enjeux sociaux, théoriques et épistémologiques comme principaux facteurs pouvant être considérés à l'origine de son émergence. La pratique de cette activité éducative a été reconnue officiellement par la France en 2009. Elle s'inscrit dans le parcours des soins du patient atteint d'une pathologie chronique. Les modalités de sa mise en oeuvre sont décrites dans des articles de loi. Dans ce sens, des programmes éducatifs sont conçus pour les patients. Leurs actions s'appuient sur un cadre législatif et, leur mise en oeuvre a été confiée aux professionnels de la santé.

    Cette pratique éducative nécessite une combinaison des modèles de la santé avec ceux de différentes disciplines comme la psychologie, la sociologie, la psychologie sociale, l'anthropologie et les sciences de l'éducation. Elle apparaît comme une activité à part entière qu'on peut assimiler aux autres soins curatifs. Son action d'accompagnement ne peut se réduire à l'information sur des notions de savoirs ou de savoir-faire (information sur une pathologie, ou technique d'auto soin), elle nécessite un accompagnement pédagogique, le fait qu'elle vise l'appropriation des savoirs et savoirs- faire par les patients.

    Nous venons de voir aussi au travers de cette partie, la très grande diversité que revêt l'activité infirmière avec toute sa complexité et sa richesse. En effet, l'activité de l'infirmière, et l'organisation de son système d'activités ne dépendent pas forcément que de l'application des prescriptions médicales, c'est aussi un rôle propre, ou l'infirmière a la capacité de prendre des décisions et des responsabilités pour les différentes tâches qu'elle décide d'entreprendre. L'infirmière donne des soins dans le cadre de ses deux rôles (prescrit et propre), assure la prévention, la sensibilisation, l'information et l'accompagnement, pour une prise en charge du patient. Avec l'intégration de l'ETP à ses activités de soins, il ne s'agit plus, pour elle, de s'en tenir au seul traitement de la maladie, mais aussi de prendre en compte la répercussion de cette maladie sur l'ensemble des besoins de l'individu, afin de maintenir, restaurer et promouvoir la santé du malade. Il s'agit donc de demander à cette infirmière d'effectuer des changements par rapport à : ses pratiques quotidiennes, ses représentations et sa posture

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    d'infirmière. L'ETP considère aussi le patient comme un usager qui sollicite les soignants pour l'aider à opérer ses propres choix. Dans ce cas de figure, cette activité éducative engagera éventuellement un transfert de compétences de l'infirmière vers ce patient. Ce transfert de compétence va sûrement engendrer un changement de statut que ce soit pour l'infirmière ou pour le patient. Ce changement de statut va modifier les rôles de chacun. L'infirmière deviendra une « infirmière éducatrice », et le patient deviendra un « apprenant particulier ». Face à cette situation et à ce nouveau modèle de patient, l'infirmière éducatrice doit avoir recours à de nouvelles compétences dites « pédagogiques » pour intégrer l'activité ETP dans ses pratiques.

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    DEUXIEME PARTIE

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    Cadre théorique

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    Dans cette partie nous proposons la théorie des soins infirmiers de H. Peplau (1952), que nous jugeons qu'elle aborde la pratique éducative. Ensuite, nous présenterons les modes d'accompagnement professionnel proposés par M. Paul (2004) et, en dernier nous aborderons les concepts de l'identité en lien avec la construction et la transformation de l'identité professionnelle.

    I- Présentation des théories de soins infirmiers

    L'activité de l'infirmière nécessite savoir et réflexion, son impact sur la vie des personnes peut être extrêmement grand. Différentes théories de soins ont été proposés par plusieurs théoriciennes de soins. Nous nous basons sur le travail de Kérouac et ses consoeurs (1996), pour présenter les théories de soins, que nous estimons en lien avec la pratique éducative. Ces auteurs ont répertorié dans un livre intitulé « La pensée infirmière conceptions et stratégies », vingt-trois théories relatives aux soins. Ces théories ont été regroupé en six grandes écoles : école des besoins18, école de l'interaction19, école des effets souhaités20, école de la promotion de la santé21, école de l'être humain unitaire22 et en dernier école du caring23. Pour Kérouac, ces théories de soins consistent à expliquer, décrire, prédire, diriger, contrôler et faire

    18 Centre le soin sur l'indépendance de la personne de satisfaire ses besoins fondamentaux et sa capacité d'effectuer ses auto-soins. Le rôle de l'infirmière est d'aider cette personne à retrouver son autonomie. Les principales théoriciennes de cette école sont : Virginia Henderson, Dorothea Orem et Faye Abdellah.

    19 Voit le soin comme un processus interactif entre une personne ayant besoin d'aide et une autre capable de lui offrir cette aide. Les théoriciennes de cette école sont : Hildegarde Peplau, Joséphine Paterson, Loretta Zderad, Ida Orlando, Joyce Travelbee, Ernestine Widenbach et Imogene King ; elles ont réintroduit l'intuition et la subjectivité dans le soin infirmier.

    20 Les théoriciennes de cette école sont Dorothy Johnson, Lydia Hall, Myra Levine, Callista Roy et Betty Neuman), elles considèrent que le but des soins infirmiers consiste à rétablir un équilibre, une stabilité, une homéostasie (préserver l'énergie).

    21 Est représenté par la théoricienne Moyra Allen, qui s'est inspirée de la philosophie des soins de santé primaires et la théorie de l'apprentissage social de Bandura pour fonder son modèle intitulé « modèle de McGill ». Ce modèle est orienté vers la promotion de la santé de la famille.

    22 Sa vision se situe dans le contexte de l'orientation de l'ouverture sur le monde et du paradigme de la transformation. Les théoriciennes de cette école sont Martha Rogers, Margaret Newman et Rosemarie Rizzo Parse. Leurs théories découlent de travaux philosophiques et de théories de la physique.

    23 Elle s'intéresse à l'orientation de l'ouverture sur le monde et le paradigme de la transformation. Les théoricienns de cette école sont : Benner, Wrubel, Watson et Leininger. Pour eux, le caring est formé par l'ensemble des actions qui permettent à l'infirmière, de déceler de façon subtile les signes d'amélioration ou de détérioration chez la personne, en respectant les valeurs, les croyances, le mode de vie et la culture des personnes.

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    comprendre le soin (c'est la fonction de l'infirmière). Elles reposent sur quatre concepts fondamentaux qui sont : la personne, la santé, l'environnement et les soins infirmiers. Parmi ces théories, celle de Florence Nightingale (1859) représentant la première théorie qui a défini les soins infirmiers. Cette théorie consiste à placer la personne malade ou en santé dans les meilleures conditions possibles pour que la nature puisse préserver ou restaurer sa santé. D'après Kérouac, elle définit les soins comme un service à l'humanité basé sur « l'observation et l'expérience ». La théorie des soins représente pour Nightingale, l'observation intellectuelle apportée aux activités en lien avec les soins. Si on se réfère à la signification étymologique du terme « théorie » qui vient du latin « theoria » emprunté au grec « theôrein », qui désigne littéralement « observer ». Les théories en soins infirmiers seraient donc des modèles de soins basés sur l'observation intellectuelle et l'expérience comme le précise la définition de Nightingale.

    Nous tenons à préciser que le modèle de soins infirmiers enseigné dans les IFSI et pratiqué par les infirmières françaises, n'aborde pas la pratique éducative. Son approche du soin se base sur les modèles conceptuels de « l'école des besoins » plus influencée par la théorie de Virginia Henderson (1994). Cette théorie définit les soins infirmiers comme une aide apportée au patient, une assistance dans les activités qu'il ne peut faire lui-même : soit par manque de force, de volonté ou de connaissances, afin de conserver ou de rétablir son indépendance dans la satisfaction de ses 14 besoins fondamentaux24. Donc la théorie enseignée dans nos IFSI, centre le soin sur l'indépendance de la personne malade dans la satisfaction de ses besoins fondamentaux. C'est suite à ce constat, que nous avons décidé de présenter la théorie de Peplau (1952), issue de l'école de l'interaction, pour nous, en plus de prendre soin, elle illustre l'importance de la dimension relationnelle par rapport à l'activité de l'infirmière.

    1- Présentation de la théorie de Peplau (1952)

    Pour présenter cette théorie et le rôle qu'elle donne à l'infirmière, nous avons effectué une synthèse des cours enseigné aux IFSI, il s'agit de l'unité d'enseignement (UE 3.1), intitulée « Raisonnement et démarche clinique ».

    24 Respirer, boire et manger, éliminer, se mouvoir, dormir et se reposer, se vêtir et se dévêtir, maintenir la température du corps dans la limite de la normal, être propre et protéger ses téguments, éviter les dangers, communiquer, pratiquer sa religion et agir selon ses croyances, s'occuper et se réaliser, se récréer et en dernier le besoin d'apprendre.

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    Les soins infirmiers représentent pour Peplau « un instrument éducatif, une force aidant à la maturité, qui a pour but de promouvoir le développement de la personnalité vers une vie créative, constructive, productive pour l'individu et pour la communauté ». Peplau considère qu'il apparaît essentiel de se poser un certain nombre de questions25 avant d'accueillir un patient dans son unité de soins. Le soin représente pour lui, une action « humaine » et « non mécanique ». L'infirmière doit posséder des connaissances systémiques, afin d'évaluer les besoins d'aide de la personne, de poser un diagnostic, et de planifier une intervention. Le patient doit être capable de reconnaître ses besoins. Selon cette théorie, le soin est un « processus interactif » entre une personne ayant besoin d'aide et une autre personne capable de lui offrir cette aide. Donc, l'intérêt du soin est centré sur le processus d'interaction entre l'infirmière et le patient. Où, l'infirmière doit clarifier ses propres valeurs, utiliser sa propre personne de façon thérapeutique et s'engager dans la globalité du soin, qu'il soit curatif ou éducatif. Cette théorie incite l'infirmière et le patient à se connaître et à travailler en coopération pour résoudre les difficultés. Dans cette perspective, la théorie de Peplau questionne et s'intéresse au vrai rôle de l'infirmière, à comment « une infirmière peut aider le patient à prendre conscience de ce qui lui arrive pour mieux développer un comportement coopératif... » A propos de ce rôle, la théorie de Peplau propose différents rôles indispensables à la pratique infirmière.

    2- Le rôle de l'infirmière selon la théorie de Peplau

    Peplau (1952) dans sa théorie propose pour l'infirmière six rôles fondamentaux :

    ? Le rôle de personne étrangère (« stranger role ») : l'infirmière accueille le patient comme une personne à part entière avec son expérience et son histoire de vie, elle tient compte des différents aspects pour établir un climat de communication et de confiance mutuelle ;

    ? Le rôle de personne ressource (« ressource role ») : l'infirmière donne les informations utiles et pertinentes (répond aux questions, donne des explications, des interprétations des données médicales) ;

    ? Le rôle éducatif (« teaching role ») : l'infirmière donne des instructions et participe à l'éducation du patient, elle analyse le degré de compréhension de la personne et adapte le processus éducatif ;

    25Ccomment réagissent les individus lorsqu'ils commencent à se sentir malades ? A quel moment recherchent-ils une aide professionnelle, et quelles attitudes adoptent-ils ? Savent-ils utiliser cette aide professionnelle ? ...etc.

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    ? Le rôle de leader en soins infirmiers (« active leadership role ») : l'infirmière aide le patient à s'impliquer activement dans les soins qui lui sont prodigués, elle veille aussi à ce que la personne soit satisfaite du soin donné ;

    ? Le rôle de substitut maternel (« surrogate role ») : l'infirmière agit pour pallier les besoins du patient, elle l'aide à clarifier la nature de cette relation en lui donnant des repères ;

    ? Le rôle de conseillère, d'assistante psychosociale (« counseling role ») : l'infirmière guide le patient à comprendre et à accepter les changements de son état de santé, elle l'accompagne et l'encourage à faire face aux changements pour améliorer son mode de vie.

    Ces rôles illustrent un schéma au caractère dynamique et typique à la pratique de l'infirmière. Pour nous, cette théorie questionne la posture éducative de l'infirmière et son comportement avec le nouveau modèle de patients (partenaire de soin), le fait qu'il s'agit de les accompagner à l'apprentissage.

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    II- présentation des caractéristiques de l'accompagnement professionnel

    Comme nous l'avons précisé dans la première partie de ce travail, parmi les missions de l'ETP attribués à l'infirmière, relèvent les actions d'accompagnement qui ont pour objectif d'apporter une assistance et un soutien aux malades souffrant d'une pathologie chronique et/ou à leur entourage. Dans ce cadre, l'infirmière doit accomplir des actions d'accompagnement éducative comme : l'accueil et l'écoute du patient et son entourage ; l'information, le conseil et la transmission de connaissances aux patients sur leur maladie ; l'organisation et l'animation de séances éducatives pour l'éducation de ces personnes. C'est dans ce cadre que nous voulons développer la notion de l'accompagnement professionnel dans ce chapitre.

    1- Les définitions de l'accompagnement

    Le dictionnaire Larousse définit l'« accompagnement » comme une action d'accompagner, dont la signification « être avec quelqu'un, lui tenir compagnie, se joindre à quelqu'un pour aller où il va, en même temps que lui ». Le terme « accompagner » est définit par « mener, conduire, soutenir, servir de guide à quelqu'un ou à un groupe ». Donc, l'accompagnement représente l'action et la façon d'accompagner.

    La revue Cahiers Pédagogiques (2001), propose deux types de lecture pour comprendre le concept d'accompagnement :

    ? Une lecture symptomatique : l'accompagnement permet de relier de façon dynamique des pratiques d'aide. Ces pratiques sont connues dans la formation permanente et la formation professionnelle ;

    ? Une lecture anthropologique : l'accompagnement est lié à la relation d'aide et au conseil. Ce terme partage la même signification que le compagnonnage (le partage du pain et des activités). La pratique d'accompagnement relève souvent de la relation duelle d'aide pratiquée dans cinq domaines distincts à dominante pédagogique, faisant appel aux théories psychologiques et psychosociologiques :

    1. La formation initiale (relation maître/élève dans le parcours de formation) ;

    2. La formation continue (accompagnement d'un professionnel par un coach) ;

    3. Thérapeutique (accompagnement d'un patient par un soignant) ;

    4. Social (accompagnement d'une personne menacée de marginalisation...) ;

    5. Existentiel (prise en charge d'un soutien psychologique).

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    2- Les postures de l'accompagnement professionnel proposées par Paul (2004)

    L'accompagnement professionnel pour M. Paul (2004, pp.13-20), représente un choix politique, une commande sociale, qui s'adresse à des professionnels (à qui est confiée la mission d'accompagnement), et à des publics (qui reçoivent l'accompagnement). Pour l'auteur, cette mise en oeuvre de l'action d'accompagnement par les institutions, ne garantit rien sur la posture de l'accompagnateur. Le fait que l'accompagnement n'est pas un métier et ne réfère à aucun cursus de formation identifié comme tel. Paul nous propose cinq postures d'accompagnement :

    2.1- Une posture éthique

    Une posture de non-violence, étant la relation éthique définit comme un rapport non-violent avec autrui. Elle nécessite réflexion et critique. Elle résulte d'un questionnement intransigeant avec soi : « Pour qui je me prends ? Pour quoi je le prends ? A quel type de relation je collabore ? Pour quel monde je travaille ? » Cette posture exclut les attitudes de la domination telles que : la manipulation, l'infantilisation, la réduction, la séduction, la peur, etc. Pour Paul, le principe de cette posture est de ne pas se substituer à autrui (penser, dire, faire à sa place). Cette substitution représente un acte d'ingérence et de négation pour l'autre. 2.2- Une posture de non-savoir

    Selon Paul, cette posture privilégie l'intelligence qui naît des échanges et du dialogue avec l'autre. Pour elle, le professionnel ne doit pas se positionner dans la place de toute-puissance (c'est moi qui sais). Cette posture sollicite le questionnement plutôt que l'affirmation. La mission du professionnel ne consiste plus à donner des recommandations et des interprétations, mais à s'ouvrir au dialogique encourageant une conversation mutuelle ayant du sens. Pour Paul, adopter une posture de « non- savoir » ne demande pas aux professionnels de prétendre l'ignorance ou rester neutre, mais de « rentrer dans le jeu » pour découvrir les connaissances de l'autre.

    2.3- Une posture de dialogue

    Paul explique que c'est dans l'échange et dans des situations de dialogue (de personne à personne) que s'exerce la place de chacun, et non pas de professionnel à usager. Pour l'auteur, la relation de dialogue dépasse la dimension « instituée » qui définit les rôles de chacun (par exemple soignant/soigné).

    2.4- Une posture d'écoute

    Pour Paul, cette posture n'exige pas que d'être attentif. Elle désigne un processus de négociation des compréhensions, de délibération interactive et de conception de partage du sens. Cette posture représente pour l'auteur, une posture et une technique à la fois. C'est elle

    qui soutient la démarche éducative et nourrit son cheminement. Elle s'accomplit tant dans le silence réceptif qui approuve et valide la parole de l'autre que dans l'interpellation.

    2.5- Une posture émancipatrice

    Cette posture vise à recréer un environnement relationnel. Celui-ci doit représenter une opportunité pour l'un et pour l'autre de « grandir en humanité ». Paul explique que si on se met à deux, ce n'est pas parce que l'un serait incapable, mais le fait que personne ne peut apprendre seul, ni grandir ou se construire seul, c'est toujours un travail en interaction avec les autres.

    En complément à ces différentes postures décrites par Paul, la notion de « posture » selon le dictionnaire de l'académie française,26 comprend celle de « l'attitude », c'est-à-dire la manière dont on tient son corps, sa tête, ses bras, ses jambes. Cette attitude peut aussi refléter l'état d'une personne par rapport à sa situation professionnelle, morale ou sociale. Il est vrai que dans certaines situations, la personne ne sait plus dans quelle posture se mettre. Ces postures illustrent pour nous l'attitude qu'une infirmière éducatrice doit adopter dans ses pratiques de soins et d'éducation. Si ces différentes postures doivent être assimilées à l'activité ETP, nous pouvons dire alors que la posture d'accompagnement dans ce cadre peut être caractérisée comme une posture mixte en constante redéfinition et ajustement. Donc, l'accompagnement dans l'ETP fait appel au changement de posture dans la relation infirmière/patient.

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    26 8ème édition version informatisée

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    III- La notion de l'identité et les différentes formes identitaires

    Ce chapitre nous servira de vérifier notre deuxième hypothèse qui s'appuie sur les travaux de Dubar (1998, 1992, 2015).

    1- Définitions de l'identité

    La nature du concept d'identité est très variée puisqu'il existe plusieurs types d'identités : identité personnelle, sociale, groupale, ethnique, sexuelle, nationale, professionnelle (à laquelle nous nous attarderons davantage dans le cadre de ce travail de mémoire). L'identité « C'est une espèce de mot valise dans lequel chacun met son propre contenu ». (Kaufmann, 2009, p.55). D'après C. Dubar (1998), les identités sont d'abord des « noms » servant à désigner des choses ou des personnes, des noms propres, des noms de pays, mais aussi des noms communs (métiers, techniques, groupes, profession...) Dire « qui je suis » ou « qui est l'autre », c'est souvent donner une « valeur au sujet », le « qualifier » (p.135). Les identités ne sont pas seulement une catégorie, ce sont des « valeurs produites » par des jugements. Chaque personne adulte a plusieurs identités. Elle a un statut principal relatif à sa profession, et à son origine ethnique... L'identité sociale n'est pas innée, elle résulte de la socialisation des individus, et dépend du jugement des autres. C'est donc par le regard et la parole des autres que se construisent les identités. J'hérite d'un nom et d'un prénom, j'appartiens à un milieu social et à une culture familiale (p.136). C'est aussi, « un système de sentiments et de représentations de soi, [...] Ce qui me rend semblable à moi-même et différent des autres, c'est ce par quoi je me sens exister en tant que personne et en tant que personnage social (rôles et fonctions), ce par quoi je me définis et me connais, me sens accepté et reconnu comme tel par autrui, mes groupes et ma culture d'appartenance » (Tap, 1986, p.8). Pour M. Pollak (1990), « l'identité ne devient une préoccupation et un objet d'analyse que là où elle ne va plus de soi, lorsque le sens commun n'est plus donné d'avance et que des acteurs en place n'arrivent plus à s'accorder sur la signification des situations et des rôles qu'ils sont censés y tenir » (p.10).

    A travers ces quelques définitions, nous notons que l'identité est à la fois individuelle et collective, personnelle et sociale. Elle exprime en même temps la singularité et l'appartenance à un groupe. Elle traduit un mouvement réflexif par lequel je cherche à me connaître, « qui suis-je ? », à coïncider avec ce que je voudrais être ou devenir.

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    Identité professionnelle et socialisation

    Selon Dubar (1992, p. 523), la socialisation professionnelle consiste pour les individus à construire leur identité sociale et professionnelle à travers le jeu des transactions biographiques et relationnelles. L'identité professionnelle ne se confond pas avec l'identité sociale même si elles ont un rapport étroit : la première renvoie au domaine de l'emploi et des activités économiques ; la seconde concerne le statut social. Dubar (1998, pp.135-136) a écrit : « Chacun dans le cours de sa vie, apprend qui il est, par le biais du regard puis des paroles des autres ». Il explique que « l'identité des individus est sans cesse réajustée et renégociée ». Dans la « socialisation », Dubar spécifie deux types d'identité : une identité par et pour soi « ce que je pense que je suis » et une identité par et pour les autres « ce que je pense que les autres pensent que je suis ». Il affirme que « l'identité est le produit de socialisations successives ». Par contre, il différencie la socialisation primaire (famille, école...) de la socialisation secondaire (travail, formation, ...). Pour lui, les deux socialisations ensembles constituent la biographie de l'individu. Si cette socialisation dépend de l'évaluation et du jugement d'autrui, elle résulte aussi de la capacité à régir, à s'adapter, à inventer des solutions, à rebondir aux échecs, à se frayer sa propre voie du sujet. Pour l'auteur, ce processus de socialisation suppose des transactions entre l'individu et la société, qui s'apparentent à l'équilibration de Jean Piaget (1967) : par « assimilation », le sujet tend à modifier son environnement pour le rendre plus conforme à ses désirs ; par « accommodation », le sujet tend à se modifier pour répondre aux contraintes de son environnement.

    3- Formes identitaires et identités au travail

    Pour Dubar (2015, p. 231), les formes identitaires « s'enracinent dans la sphère socioprofessionnelle mais ne se réduisent pas à des identités aux travail ». Elles correspondent à des « trajectoires sociales différentes », mais ne se limitent pas à des « catégories sociales ». Elles représentent le vécu de la personne et la représentation de soi, et non pas ce que pense autrui. Ces formes identitaires s'articulent entre « transaction objective » et « transaction subjective ». C'est le résultat d'un arrangement « intérieur » entre « identité hérité » et « identité visée », c'est aussi le résultat d'une négociation « extérieure » entre l'« identité attribuée » et l' « identité incorporée par soi ». Les identités dans le champ professionnel, Dubar (1998, pp.138-139) les qualifie de « Formes identitaires ». D'après lui, elles

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    s'apparentent aux « Identités au travail » de R. Sainseaulieu27 (1977), il s'agit d'une manière « d'être acteur » dans les relations de travail. Dubar reprend la théorie de Sainseaulieu pour expliquer la construction de l'identité au travail qui se fait en quatre modèles :

    - Le modèle des identités de type « retrait » ou « hors travail » : le travail est considéré comme instrumental, la carrière comme linéaire, la formation comme uniquement « sur le tas » (acteur ailleurs) ;

    - Le modèle de la négociation : « les identités négociatrices » tendent vers la promotion et implique un fort engagement au travail et une participation intense à la formation continue proposée par l'entreprise. Ce modèle intervient quand les situations de travail permettent un accès aux positions stratégiques (acteur stratégique) ;

    - Le modèle des « identités fusionnelles » ou « catégorielles » : forte identification au groupe qui partage le même métier, la même formation...Ce modèle apparaît dans les contextes marqués par des tâches répétitives et peut qualifier. L'acteur pour se valoriser n'a pas d'autres ressources que le collectif (acteur de masse) ;

    - Le modèle des « identités affinitaires » ou de « réseau », implique un réseau d'amis, de collègues, sur lesquels la personne peut compter pour réaliser son projet professionnel (acteur de soi).

    Ce qui explique que l'identité professionnelle diffère de l'identité au travail, elle est une manière de se situer dans le champ professionnel et, au-delà, dans la vie sociale, elle continue à influencer toute l'existence hors travail.

    4- Les dynamiques identitaires et la double transaction

    D'après C. Dubar (1998, pp 139-141), les formes identitaires se construisent et se reconstruisent tout au long de la vie. Pour qu'elles existent pleinement, elles doivent être négocier et reconnues par les autres (« faire reconnaître ces compétences est une condition pour s'inscrire sur le marché de travail »). Cette reconnaissance exige des transactions avec des employeurs, des collègues, des clients. C'est la « transaction relationnelle » 28 (qui ne se limite pas à une interaction entre l'individu et un seul partenaire, elle engage toute une institution à travers les marchandages). Dans ce cas, un travail sur soi est nécessaire, on ne peut pas convaincre autrui si l'on n'est pas convaincu soi-même des compétences acquises :

    27 L'identité au travail, Presses de la FNSP, 1977.

    28 Vise à se faire reconnaître ou non, par les partenaires institutionnels la légitimité de ses prétentions, compte

    tenu des moyens « politiques » de l'institution.

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    c'est la « transaction biographique »29 (qui se présente comme une sorte de négociation avec soi-même). L'interaction des deux transactions constitue un processus de « double transaction », c'est le mécanisme de base de la dynamique identitaire. D'après l'auteur, on peut se construire des identités, soit en continuité, soit en rupture avec son passé. Ces modes de construction peuvent être valorisés ou pas par les autres. Dubar décrit quatre formes identitaires émanant du processus de double transaction :

    ? Les identités d'entreprises et les identités catégorielles sont construites sur la continuité biographique. Elles ont des difficultés à se faire reconnaître par les institutions de travail ;

    ? Les identités de réseau et les identités hors travail sont construites sur la rupture. Elles sont reconnues par les institutions de travail.

    Pour Dubar (1992, 505-529), la complexité entre « projet d'entreprise » et « projections individuelles » suppose à la fois pour l'individu une construction sociale et mentale de sa situation en termes de « saisie d'opportunités » et, pour l'entreprise, une sélection des individus en termes de « compétences utilisables », de « potentiels mobilisables » ou de « qualifications souhaitables ». La double transaction est donc pour Dubar, au coeur de la mutation des politiques de gestion, passant du simple « donnant-donnant » à l'exigence d'un « toujours plus », en échange d'un avenir présumé moins incertain. Cette mutation modifie en profondeur les mécanismes de socialisation professionnelle. Pour l'auteur, il n'est plus possible de concevoir les relations entre formation (des compétences et identités professionnelles) et emploi (des individus pourvus de ces compétences et identités) comme le rapport entre deux processus distincts dans l'espace et successifs dans le temps. La socialisation professionnelle devient un processus unique, de plus en plus intégré et concernant potentiellement l'ensemble du cycle de vie des individus. La mobilité sociale devient constitutive de l'identité sociale des individus. Elle n'est plus acquise, elle se construit, se déconstruit et se reconstruit. Les formes identitaires pour Dubar, ne constituent donc pas des identités sociales établies.

    29 Consiste à projeter des avenirs possibles en continuité ou en rupture avec un passé reconstitué « trajectoire ».

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    Synthèse de la deuxième partie

    Au travers de ces trois chapitres, si on considère que les différents rôles proposés à l'infirmière, par la théorie de Peplau, rejoignent les exigences de la pratique éducative défini par l'OMS (1998) et, que les différentes postures dans l'accompagnement professionnel décrites par Paul, représentent la posture éducative que l'infirmière doit intégrer à sa posture d'infirmière. On peut déduire alors, que cette nouvelle activité éducative va forcément transformer ou modifier le comportement de cette infirmière en devenant aussi « éducatrice ». Cette nouvelle mission va certainement influencer son identité professionnelle actuelle. C'est dans cette perspective que nous nous basons sur la socialisation et le processus de construction identitaire professionnelle de Dubar pour identifier les différentes transformations identitaires décrites par les interviewés au moment des entretiens.

    C'est dans ce cadre, que nous nous basons sur cette partie théorique pour vérifier nos deux hypothèses dans la partie analyse de ce mémoire. Ce choix est basé sur son avantage de permettre aux infirmières de penser la relation avec le patient en adoptant d'autres rôles, et d'autres postures d'accompagnement. Ce qui, en ETP n'est pas rien face à l'importance de la dimension du prendre soin.

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    TROISIEME PARTIE

    Problématique et hypothèses de travail

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    I- Problématique

    En effet, l'infirmière dans le cadre de son activité réalise des soins dans un système d'organisation spécifique. Nous venons de voir dans la première partie de ce travail, la très grande diversité de l'activité de l'infirmière. Dans les faits, l'infirmière réalise des tâches dans le cadre de ses deux rôles (prescrit et propre). L'ETP fait partie du rôle propre dont elle doit définir l'organisation selon les recommandations de la HAS (2007).

    La nécessité de l'ETP suppose des changements fondamentaux de représentations et de postures tant du côté des patients que du côté de l'infirmière et plus fondamentalement de repenser le système de soins. Ainsi, « éduquer les patients consiste à sortir de la relation duelle soignant-patient pour exercer une action pédagogique » (d'Ivernois et Gagnayre, 2011, p. 33). L'infirmière doit alors s'adapter à son nouveau système de soins et aux conditions de travail dont lesquelles elle est contrainte pour se ressourcer et réaliser ses activités de soin et d'éducation. Il s'agit d'un « travail réflexif » (Dubet, 1994, p.105).

    La pratique de l'ETP demande à l'infirmière d'adopter une posture d'accompagnement éducatif. Il s'agit alors pour elle, de devenir une « infirmière éducatrice » c'est à dire, un « praticien réflexif » selon le concept de Donald Schön (1983), développant des capacités à réfléchir sur sa propre pratique éducative, sur son mode d'organisation, et sur la façon d'intégrer cette nouvelle activité à ses tâches quotidiennes. Dans ce cas de figure, l'ETP va-elle opérée à un véritable changement de conceptions de soins ? Mais, si la représentation des soins pour l'infirmière se synthétise qu'aux actes somatiques, comment va-elle alors intégrer la dimension éducative à ses démarches de soins ? Nous sommes donc amenés à nous interroger sur la représentation que l'infirmière a de son « rôle propre » et de « son identité professionnelle » devant cette activité éducative qui la transforme en « éducatrice ». Sachant que dans son lieu de travail, cette infirmière partage avec ses pairs un ensemble de pratiques et de valeurs dans ses diverses activités quotidiennes. Ces éléments constituent une part importante de son identité professionnelle. Une sorte d'identité transmise et partagée dès l'apprentissage en formation initiale, et tout au long du parcours professionnel comme nous l'avons déjà précisé. L'infirmière s'identifie et se construit face à cet ensemble commun, qui définit toutefois le rôle attendu de cette professionnelle, c'est-à-dire en quelque sorte sa professionnalité. Cette professionnalité est organisée par les connaissances, les capacités, les compétences et les savoirs propres à la profession de l'infirmière. Comment va-elle alors intégrer cette dimension éducative à son activité quotidienne. C'est autour de ce constat que nous avons formulé notre question centrale.

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    Question centrale

    Quel est l'impact de l'introduction de l'ETP sur les transformations des systèmes d'activités et les transformations identitaires des infirmières devenant aussi « éducatrices » ?

    De cette question centrale découlent les trois questions suivantes qui seront particulièrement travaillées :

    1) Comment les infirmières vivent-elles les rapports entre l'activité de soin et l'activité ETP ?

    2) Ces activités sont-elles vécues comme formant un ensemble homogène, ou sont-elles perçues comme dissociées et relevant de logiques différentes ?

    3) Le développement de ces pratiques dites « éducatives » conduit-il les infirmières à redéfinir leur posture actuelle ?

    Pour nous permettre d'avancer dans notre problématique et de répondre à ces questions de départ, voici quelques questions sous-jacentes qui vont nous servir de guide pour nos deux hypothèses.

    1) Comment les infirmières perçoivent le rapport entre l'ETP et le soin ? S'il s'agit de deux activités distinctes ? Comment ces infirmières arrivent à intégrer l'ETP aux soins ? Y-a-il besoin de changer leur système d'activités pour intégrer l'ETP aux soins? Les infirmières ont-elles besoins d'une nouvelle démarche de soins regroupant les deux activités ? Dans ce cas, l'intégration de l'ETP serait-elle déstabilisante pour leur organisation quotidienne ? Sont-elles obligées de redéfinir le sens de leur activité et d'adopter d'autres postures ? Dans quelle mesure le rôle de l'infirmière dans cette dimension du soin est nouveau ?

    2) Comment les infirmières se positionnent dans la relation soignant/soigné ? Comment se sentent-elles dans leur posture d'« éducatrice » ? S'il s'agit du changement des pratiques de l'infirmière, cette soignante est-elle préparée à assumer ce changement ? Sa conception du service infirmier va -t- elle changer ? Que pense telle de son identité professionnelle ?

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    II- Hypothèses de travail

    Nous proposons deux hypothèses qui visent à éclairer nos questions de recherche. Première hypothèse

    La reconnaissance et l'acceptation du rôle d'« éducatrice » par l'infirmière et son implication dans ce rôle lui permettent de mieux se situer dans ses activités.

    Cette nouvelle posture d'éducatrice va permettre à l'infirmière d'agir, de penser autrement le soin et la relation infirmière/patient. En effet, la pratique de l'ETP, nécessite de la part de l'infirmière un autre mode de prise en charge par rapport au patient. Il s'agit : de modifier tout un système d'activités déjà développé et, d'adopter de nouveaux savoirs pédagogiques en lien avec la l'activité ETP.

    Deuxième hypothèse

    L'identité professionnelle de l'infirmière est dans un mouvement de mutation, suite à la transformation de son système d'activités qui inscrit l'ETP dans son rôle propre.

    Cette transformation du système d'activités de l'infirmière, lui exige des modifications dans ses habitudes personnelles et professionnelles, dans sa posture d'infirmière et dans sa relation infirmière/patient. Il s'agit d'une évolution de son métier d'infirmière. Cette évolution génère des besoins d'acquisition à de nouvelles compétences pendant le parcours professionnel, et engendre des transformations identitaires.

    Pour vérifier ces deux hypothèses sur le terrain, nous pensons recourir à deux outils méthodologiques : l'observation ethnographique et les entretiens semi directifs.

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    QUATRIEME PARTIE

    La phase pratique

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    La réalisation de la phase pratique au sein de mon travail de recherche m'a paru difficile à réaliser, par rapport à la difficulté de trouver un lieu de stage répondant à notre problématique. Ayant postulé auprès d'une dizaine de structures hospitalières en Iles de France, j'ai tout de suite été confrontée à des réticences voire des refus relatifs à mon investigation.

    Il faut dire que si on n'accède pas à l'hôpital en tant qu'élève infirmière ou aide-soignante pour effectuer un stage, l'entrée dans le milieu hospitalier s'avère irréalisable pour les stagiaires hors cursus paramédical ou médical. Quel que soit la méthode choisie pour enquêter il faut négocier le droit d'y accéder, cette négociation se déroule à plusieurs niveaux : au service du personnel, au service de la formation, à la direction des soins, auprès des cadres de santés...etc. Et en dernier, après un mois voire deux mois d'attente, les quelques réponses reçues étaient négatives. Les raisons évoquées étaient multiples (non disponibilité pour accueillir un stagiaire en Master, manque de personnel soignants, l'hôpital ne pratique pas l'ETP, trop de charge de travail...). Ces réponses rendaient presque impossible la réalisation d'un tel projet de recherche. J'ai donc fait le choix d'une autre stratégie : élargir mon terrain de recherche et changer la présentation du projet en ciblant les patients et non plus les soignants car, j'ai remarqué que les professionnels de soins ne veulent pas trop parler de leur activité, l'associant au secret professionnel et au faite qu'elle traite de l'humain. Ils peuvent même craindre que l'intrusion d'une personne n'appartenant pas au statut des soignantes perturbe leur fonctionnement, sans oublier l'impression qu'ils peuvent avoir d'être évalué dans leur façon de faire. Il faut dire que ces appréhensions peuvent conduire à une opposition active à la recherche.

    Durant ma présence au dernier regroupement de présentiel à l'université de Montpellier, j'avais pu échanger chaleureusement, avec une cadre de l'IFSI à Blois, qui prépare un master sur l'identité, qui m'a informé de la pratique de l'ETP à l'Hôpital de Blois. J'ai décidé de prendre contact avec la directrice des soins de cet hôpital, qui se situe à 200 km de chez moi. A travers une conversation téléphonique, j'ai brièvement présenté mon thème de recherche et mon souhait d'effectuer des entretiens avec les infirmières qui pratiquent le soin éducatif dans leurs activités quotidiennes. Intéressé par mon projet, la directrice des soins me fixera un rendez-vous dans son bureau. Le jour de l'entretien, j'ai précisé dès le début que la recherche que j'allais mener ne concerne pas la personnalité des soignants mais, que j'allais m'occuper des activités et non des individus. La réponse de la directrice des soins fut immédiatement positive car elle porte un grand intérêt pour la recherche et les sciences de l'éducation, elle m'a même révélé qu'elle menait une recherche sur l'éthique soignante.

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    I- Objectifs du stage pratique

    Une fois sur le terrain de stage pratique, j'ai ressenti la nécessité de poser des objectifs d'investigation afin de donner une intentionnalité et un cadre pratique de réflexion à mon travail. Donc, j'ai pu mettre en évidence trois objectifs principaux.

    1- Être capable de situer la pratique de l'ETP dans un contexte de pratiques infirmières au niveau de l'environnement du travail quotidien et, de l'organisation des activités dans le service. Il s'agit : d'identifier l'organisation des soins infirmiers effectuée par l'infirmière et, d'identifier l'existence de ressources et/ ou de contraintes environnementales pour la réalisation de l'ETP.

    2- Analyser chez l'infirmière les éléments théoriques et pratiques lui servant de référence dans la réalisation de l'ETP (comme les représentations, les concepts théoriques de référence, la méthodologie éducative ou encore des outils pédagogiques employés).

    3- Recueillir le vécu de l'infirmière concernant la réalisation de l'activité éducative dans sa dimension quotidienne.

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    II- Méthodologie de l'enquête

    J'ai décidé avec l'accord et l'orientation de ma directrice de mémoire, d'être présente dans les services de soins et ne pas se contenter que des entretiens avec les infirmières concernées par l'activité ETP. Afin d'explorer d'avantage tous les éléments pertinents pour mon enquête, nous avons opté pour deux méthodes : l'observation ethnographique et les entretiens semi directifs. Nous avons jugé que l'observation directe allait nous permettre de distinguer l'écart, entre ce que les infirmières disent de leurs pratiques et, ce qu'elles font réellement. Tandis que l'entretien allait dévoiler la façon dont ces infirmières se représentent une pratique.

    1- L'observation ethnographique

    L'observation ethnographique relève de l'observation directe ; il s'agit de « regarder ». Ce verbe est issu du francique wardôn « garder », qui signifie « prendre garde à, prêter attention à... ». C'est à dire, si l'on se réfère aux propositions de F. Laplantine (1996) « [...] c'est être attentif, mais aussi et surtout être inattentif, se laisser approcher par l'inattendu et l'imprévu » (cité par Affergan, 1987, p.143). On comprend de cette citation que les manières d'être ne peuvent être anticipées ou programmées. Cependant, pour nous « observer », c'est d'être proche des activités que l'on veut comprendre. Ceci a pour conséquence de créer une dynamique de décentration de l'analyse « habituelle » des études de cas ou de situation pour accéder à l'analyse de la pratique professionnelle réelle. C'est aussi regarder de près et de s'exposer. G. Devereux (1980), affirme qu'inconsciemment, « nous sommes face aux pratiques des personnes observées que nous tentons de copier. Nous ne sommes pas tenus de faire exactement comme eux, nous ne maîtrisons pas l'ensemble des repères, nous pouvons réaliser les mêmes actions qu'eux, avec une autre intensité, sans que cela ne soit préjudiciable... [...] Autrement dit, l'ethnologue peut être maladroit, d'autant plus qu'il est identifié comme un étranger » (pp. 147-153).

    Cette méthode va me permettre de décrire chaque étape de l'activité de l'infirmière éducatrice dans ses domaines d'expériences. Il s'agit, d'une méthode qualitative de collecte de données observables comme les gestes (manière de préparer les soins, les séances éducatives...), l'organisation, gestion du temps et de l'espace par les infirmières, les conditions d'accueil des patients, les formes d'interactions entre infirmières et patients, le nombre de malades dans les services..., etc. Ce qui est préférentiellement visé, c'est la focalisation sur l'agir professionnel en s'intéressant plutôt à la question du « comment » qu'à celle du « pourquoi ».

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    2- L'entretien semi directif

    L'entretien semi directif nous a semblé l'instrument adéquat. Il s'agit d'entretien compréhensif. Selon Kaufmann (1996), « l'enquêteur s'engage activement dans les questions, pour provoquer l'engagement de l'enquêté » (p.17). C'est un entretien orienté puisque nous cherchons à recueillir des informations sur des thèmes particuliers qui constituent nos hypothèses. Selon le manuel de recherche en sciences sociales de Quivy & Campenhoudt (2006), dans ce modèle d'entretien, la formulation des questions n'est pas prédéterminée en détail. Une question de départ doit être posé, celle-ci permet à la personne interviewée de s'exprimer librement. L'enquêteur intervient juste pour assurer d'une bonne compréhension. « L'objectif n'est pas de valider les idées préconçues du chercheur mais d'en imaginer de nouvelles » (p.3). L'enquêteur n'intervient que lorsque l'interviewé s'éloigne du sujet abordé. Des questions supplémentaires peuvent être posé dans un second temps pour explorer des thématiques qui n'avaient pas été évoqués au cours de l'entretien, et pour en approfondir certains éléments. Ce modèle d'entretien respecte le cadre de pensés de la personne interviewée. Cette démarche m'a semblé la mieux adaptée pour réaliser mes entretiens, le fait qu'elle donne un accès au vécu et aux représentations spontanées des personnes interrogées et facilite l'étape d'exploitation des données.

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    III- Déroulement du stage

    Mon stage pratique, s'est déroulé au Centre Hospitalier de Blois (CHB)30 dans le département de Loir et Cher. Nous l'avons réalisé en trois phases : une phase de collecte de données, une phase d'observation ethnographique et, une phase de réalisation des entretiens.

    1- Phase de collecte des données

    Avant de commencer la phase d'observation, j'ai été accueilli par la Cadre de Santé responsable de la Coordination de l'activité ETP. Cette rencontre a eu lieu le premier jour de mon stage, au sein de l'Hôpital de Blois. La Coordinatrice de l'ETP m'a présentée les huit programmes31 de l'ETP validés par l'HAS.32 Ces programmes sont réalisés dans quatre services de soins (l'Hôpital de Jour, l'Unité de Diabétologie, le Service de Cardiologie, et le Service de Chirurgie Viscérale),33 intégrant tous l'ETP dans leurs pratiques quotidiennes.

    Suite à ces explications données par la coordinatrice de l'ETP, j'ai choisi d'effectuer mon stage pratique que dans les trois premiers services34 pour des raisons de non disponibilité des infirmières prenant en charge dans leur activité quotidienne l'éducation du patient. Car l'ETP n'est pratiquée que par des infirmières éducatrices, nommées aussi « référentes35 ». Celles-ci sont en nombre limité (voire une référente par service). Cependant, la condition d'être

    30 Lire CHB, nommé aussi « Mail Pierre Charlot », il a vu le jour le 4 mai 1963. C'est un Centre Hospitalier Général à taille humaine parmi les plus importants en région Centre Val de Loire. Il est situé à mi-distance des villes de Tours et d'Orléans (50km) et à environ 200km de Paris. D'une capacité de 1324 lits et places, il dispose d'un plateau technique complet (Médecine, Chirurgie, Obstétrique, Soins de Suite et de Réadaptation, Psychiatrie, Gériatrie. Les activités du CHB sont regroupées en 6 pôles30. Le CHB dispose aussi d'un Institut de Formation en Soins Infirmiers (IFSI) qui accueille des promotions de 120 élèves et d'une Ecole d'Aides-soignantes pour des promotions de 80 élèves.

    31 Ces programmes concernent : Les patients diabétiques, les patients présentant un diabète gestationnel, les enfants de 6 à 15 ans présentant un surpoids ou une obésité, les patients atteints de rhumatismes inflammatoires chroniques, les patients souffrant d'insuffisance cardiaque, les patients atteints de troubles du rythme ou de maladies thromboemboliques nécessitant un traitement anti vitamine k, les patients atteints du syndrome d'apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) et les patients atteints de pathologies intestinales nécessitant une stomie. Le modèle pédagogique préconisé pour ces programmes est fondé sur une approche systémique qui centre les interventions des soignants sur l'apprentissage du patient et place ce dernier comme sujet de la démarche d'éducation thérapeutique.

    32 Les recommandations de la HAS et de l'INPES (2007) définissent le cadre des programmes d'ETP structurés dans le champ des maladies chroniques.

    33 L'Hôpital de Jour et l'unité de Diabétologie relèvent du Pôle2 (qui regroupe les services de médecine - urgence - prévention) et les Services de Cardiologie et de Chirurgie Viscérale relèvent du Pôle 1 (intitulé Technique Médical et Chirurgical).

    34 Hôpital de Jour, Unité de Diabétologie et Service de Cardiologie.

    35Étymologiquement, ce mot se situe dans le registre du repérage : se reporter à quelque chose, rapporter à quelqu'un. Dans ce contexte, le référent est repéré parmi les autres soignant. C'est lui qui détient l'information, c'est le médiateur et le porte parole selon, Paul Mengal (professeur en philosophie à l'Université de Paris XII-Val de Marne. Séminaire au CH les Murets, 1996).

    72

    infirmière éducatrice, est de justifier d'une formation continue de 40heures.36Cette condition est exigée par l'ASH, et proposée, selon la Coordinatrice, par l'Hôpital dans le cadre de la réalisation des différents programmes d'ETP.

    1.1- Présentation des lieux de stage

    Dans cette partie, je vais présenter les trois différents services dans lesquels, j'ai pu réaliser mon stage pratique, il s'agit de : l'Hôpital de Jour, l'Unité de Diabétologie et le Service de Cardiologie.

    1.1.1- L'Hôpital de Jour

    L'équipe de soins à l'Hôpital de Jour (HDJ)37 est constituée d'un cadre de santé, de médecins spécialistes pour chaque pathologie38, de sept infirmières et un agent de service. La structure dispose de seize lits. Les patients y sont admis en journée de 9h à 18h30, après un rendezvous de consultation.

    A l'HDJ, l'équipe soignante adhère à la dynamique de promotion de l'ETP au Centre Hospitalier de Blois. Son ambition est de devenir un service de référence pour la prise en charge des patients atteints de « Rhumatismes Inflammatoires Chroniques » dans le département de Loir et Cher, en proposant aux patients une offre d'ETP de qualité.

    L'éducation thérapeutique pour cette maladie s'avère indispensable dans l'éducation des règles d'asepsie et du traitement qui est généralement administré à domicile par les patients eux-mêmes ou par leurs entourages. Les gestes respectant les règles de protection articulaire et la connaissance des signes de poussées de rhumatisme supposent une bonne appropriation, par le patient et ses proches. Les compétences acquises par l'éducation thérapeutique permettent au patient d'être plus autonome dans la gestion de sa maladie, ce qui peut contribuer à améliorer sa qualité de vie au quotidien.

    36 A noté que même si le soignant dispose d'un (DU) Diplôme Universitaire en éducation thérapeutique, celui-ci doit être complété par les 40h proposées par l'Hôpital. Voir en annexe le programme de 40h de formation en ETP.

    37 Nommé aussi l'HDJ accueil à la journée des patients nécessitant une surveillance médicale pour des traitements, examens et actes médicaux. La spécificité de ce service est la prise en charge et le suivi des patients dans différentes pathologies37 parmi lesquelles la Rhumatologie, qui bénéficie d'un programme d'ETP (thème de notre période de stage à l'HDJ).

    38 Les Rhumatismes Inflammatoires Chroniques (RIC) Ce sont des maladies gravement invalidantes (douleur physique, douleur morale, déformations). L'impact de la douleur et du handicap, sur la qualité de vie des malades et leur entourage sont majeurs pour ces maladies. La prise en charge médicale de cette maladie chronique consiste en des traitements réguliers à administrer au patient. La prise en charge thérapeutique pour cette maladie a pour objectif principal le soulagement des symptômes.

    73

    a) Présentation de l'équipe éducative : administrativement l'équipe est composée :

    · D'un médecin39 Rhumatologue coordinateur du programme ETP ;

    · D'une infirmière40qui assure l'ETP en plus des soins médicaux.

    A l'HDJ, l'infirmière exerce tous les jeudis pour mettre en oeuvre le programme éducatif41. C'est l'équivalent de 20% de son temps de travail mensuel. Le reste du temps est consacré à la prise en charge du soin curatif. Le médecin dispose d'un demi temps consacré aux programmes ETP (c'est l'équivalent de 50% de son temps de travail mensuel). Les professionnels hospitaliers pluridisciplinaires tels que : la diététicienne, le kinésithérapeute, l'ergothérapeute, le psychologue n'interviennent que pour animer les ateliers ETP, ou sur prescription du médecin. Ces professionnels, par manque de temps par rapport à leur charge de travail, ils doivent assurer aussi la prise en charge des autres services de soins dans tout l'hôpital. Dans le cadre de l'ETP, l'HDJ travaille aussi avec des personnels de santé libéraux et formalise également la collaboration avec les associations de patients atteints de maladies chroniques.

    b) L'activité de l'infirmière éducatrice à l'Hôpital de Jour : le rôle de l'infirmière éducatrice dans le cadre de l'ETP est d'aider le patient à :

    · Acquérir des compétences cognitives comme la connaissance de la maladie et du traitement ;

    · Acquérir des compétences des techniques d'auto-injection de l'anti-TNF alpha42 pour la prévention des complications ;

    · Acquérir des compétences d'adaptation : le patient apprend à gérer les poussées et à adapter son mode de vie (activité physique, diététique).

    Aussi, l'infirmière éducatrice doit programmer, préparer et animer des groupes de 5 à 7 patients par groupe, pour trois ateliers distincts :

    · L'atelier « Parlons-en » en collaboration avec le rhumatologue et un pharmacien ;

    · L'atelier « Comment adapter votre alimentation » avec la diététicienne ;

    · L'atelier « Des outils pour votre quotidien » avec un kinésithérapeute et un ergothérapeute.

    39 Il dispose du Diplôme Universitaire (DU) d'ETP.

    40 A bénéficiée de 40 heures de formation continue en ETP.

    41 Destiné aux patients atteints de rhumatismes inflammatoires chroniques. Ce programme concerne les patients pris en charge à l'hôpital de Blois ou en consultations externes, et leur entourage. A la fin de la consultation ou de l'hospitalisation, et suivant leurs désirs, les patients sont orientés vers trois ateliers de formations. La période d'hospitalisation est de 9h à 18h 30 maximum.

    42 Médicament injectable prescrit pour les maladies des rhumatismes chroniques.

    74

    1.1.2-L'unité de Diabétologie

    Cette unité relève du Service de la Médecine Interne43. L'équipe de soins est constituée de : deux médecins spécialistes du diabète,44 un cadre de santé, seize infirmières dont six éducatrices référentes en ETP, huit aides-soignantes, deux agents de services et une secrétaire. Le service dispose de vingt-quatre lits. Les patients sont admis soit en entrée directe après consultation, soit par le biais des urgences.

    a) Présentation de l'équipe éducative : administrativement l'équipe est composée de :

    ? Deux médecins diabétologues dont un coordinateur45 des programmes ETP ;

    ? Six infirmières46qui assurent l'ETP en plus des soins curatifs ;

    ? Une diététicienne.47

    Les six infirmières éducatrices disposent de 20% de leur temps plein dédié à la réalisation de trois programmes éducatifs48. Le reste du temps étant consacré à la prise en charge du soin médical. La diététicienne et les médecins disposent d'un demi temps consacré aux programmes ETP (un équivalent de 50% de leur temps de travail mensuel). Le kinésithérapeute et la psychologue n'interviennent que sur prescription du médecin. Nous avons constaté l'absence de secrétaire pour assurer les tâches administratives en lien avec l'activité ETP. C'est l'infirmière chargé de l'activité ETP qui doit assurer l'accueil des patients, la réception des appels téléphoniques, la prise en charge du courrier et la gestion des dossiers médicaux ainsi que la prise des rendez-vous.

    43 A orientation Diabétologie et Endocrinologie qui est composé de trois unités (unité de pathologie endocriniennes et vasculaires, unité de la maladie de la nutrition et unité de diabétologie dans laquelle j'ai réalisé une partie de mon stage.

    44 Une affection caractérisée par une glycémie à jeun supérieure à 1,26g/l. Reconnu comme une Affection de longue durée par l'OMS. Le diabète est un véritable problème de santé publique. Sa gravité provient essentiellement des complications à long terme, source de handicap, d'incapacités et d'une altération de la qualité de vie. La prise en charge médicale de cette maladie chronique consiste en des traitements à administrer « à la demande » en cas d'hyper ou d'hypoglycémie, et « en préventif » par des injections régulières. Grâce au traitement préventif, ou prophylaxie, par le moyen le d'ETP cette maladie sera mieux prise en charge.

    45 Il dispose du Diplôme Universitaire en ETP et anime le comité de prévention d'éducation à la santé (COPES).

    46 Tous ont bénéficiés de 40 heures de formation continue en ETP.

    47 A bénéficiée d'une formation de DU en ETP.

    48 Le programme dédié aux patients diabétiques de type II et I, le programme consacré aux patients présentant un diabète gestationnel et, le programme destiné aux enfants de 6 à 15 ans présentant un surpoids ou une obésité. Ces trois programmes se déroulent en intra au sein de l'unité de diabétologie. Ils sont destinés aux patients hospitalisés, aux patients des consultations externes et à leur entourage. La prise en charge thérapeutique de cette pathologie chronique a pour objectifs principaux : le contrôle glycémique et le contrôle des facteurs de risque associés. Les patients sont éduqués durant leur hospitalisation. A leur sortie, suivant leurs désirs, ils sont soit orientés vers le Réseau Santé Nutrition Diabète de la région (41), soit intégrés dans les programmes éducatifs en fonction des rendez-vous médicaux.

    75

    b) L'activité de l'infirmière éducatrice en Unité de Diabétologie : administrativement, dans l'unité de diabétologie le rôle de l'infirmière dans le cadre de l'ETP, est d'accompagner le malade pour qu'il puisse acquérir un savoir-faire adéquat, afin d'arriver à un équilibre entre sa vie et le contrôle optimal de sa maladie. L'infirmière éducatrice doit aider le patient à :

    ? Acquérir des compétences cognitives comme la connaissance de la maladie ;

    ? Acquérir des compétences d'auto-injection de l'insuline ;

    ? Acquérir des compétences d'adaptation comme apprendre à vivre avec la maladie.

    1.1.3-Le service de Cardiologie

    Ce service a pour mission d'assurer la prise en charge des patients adultes souffrant d'une insuffisance cardiaque.49 L'équipe de soins est constituée de : deux médecins cardiologues, un cadre de santé, 20 infirmières dont 1 déférente en ETP, des aides-soignantes, des agents de services et une secrétaire. Le service dispose de vingt-quatre lits, et de huit boxes pour les soins intensifs. Dans ce service, les patients viennent en consultation externe, ou admis en entrée directe après consultation, ou par le biais des urgences.

    a) Présentation de l'équipe éducative : l'équipe éducative est composée de :

    ? Un médecin coordinateur du programme ETP,

    ? Une infirmière50qui assure l'ETP.

    Dans le cadre de l'ETP, l'infirmière éducatrice prend en charge les patients souffrant d'une pathologie cardiaque, tous les jeudis (c'est l'équivalent de 20%51 de son temps de travail mensuel, le reste du temps est consacré à la prise en charge des soins médicaux). Les médecins disposent d'un demi temps consacré aux programmes ETP (équivalent à 50% de temps plein du travail mensuel). Le kinésithérapeute et la psychologue n'interviennent que sur prescription du médecin.

    b) L'activité de l'infirmière éducatrice en service de Cardiologie : dans le cadre de la réalisation des deux programmes éducatifs52. L'infirmière éducatrice, son rôle est d'aider le

    49 Définie comme l'incapacité du coeur à assumer le débit sanguin nécessaire aux besoins métaboliques et fonctionnels des différents organes. Reconnu comme Affection de Longue Durée par l'OMS et représente un problème de santé publique. Ses symptômes sont fortement invalidants (dyspnée, fatigue) et son pronostic est vital (risque de mort subite). La prise en charge médicale de cette maladie chronique consiste en des traitements médicamenteux (traitement anticoagulant).

    50 A bénéficiée de 40 heures de formation continue en ETP.

    51 A signaler que ce temps était de 50% en 2011, est en baisse depuis 2015, à cause de la file active réelle du service qui ne répond plus aux exigences des recommandations de la HAS et de l'INPES (2007).

    52Le programme destiné aux patients souffrant d'insuffisance cardiaque, et le programme destiné aux patients atteints de troubles du rythme ou de maladies thromboemboliques. Ces programmes sont destinés aux patients

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    patient à acquérir les compétences nécessaires pour mieux gérer sa pathologie : en maîtrisant le traitement, en prévenant les complications thrombotiques ou hémorragiques, en stabilisant la progression de l'insuffisance cardiaque (limiter les décompensations cardiaques) afin de préserver sa qualité de vie.

    Dans cette perspective, l'infirmière éducatrice doit aider le patient à :

    ? Acquérir des compétences cognitives comme la connaissance de la surveillance des complications, l'importance des mesures diététiques ;

    ? Acquérir des compétences d'auto-soin comme la prise des médicaments, la mesure du pouls, surveillance des oedèmes, ...

    ? Acquérir des compétences d'adaptation comme avoir le réflexe d'appeler les

    personnes ressources en cas d'aggravation, s'avoir anticipé les ordonnances, ...

    1.2- Le diagnostic éducatif

    Théoriquement, pour les trois services, le diagnostic éducatif doit être réalisé par le médecin spécialiste de la pathologie chronique, l'infirmière éducatrice référente en ETP et les autres professionnels de santé (diététicienne, kinésithérapeute, pharmacien, ergothérapeute...) C'est ce diagnostic qui initiera la démarche éducative. L'infirmière éducatrice doit enregistrée les données formulées par le patient durant l'entretien éducatif, suite à un questionnaire ouvert informatisé. Ce questionnaire permet à l'infirmière éducatrice d'appréhender la vie et la personnalité du patient, d'identifier ses connaissances et ses croyances, d'identifier ses besoins en éducation et d'évaluer ses potentialités d'apprentissages pour lui proposer un programme éducatif adapté. Ce diagnostic éducatif est établi avec chaque patient dès la 1ère consultation. Suite à cette étape, un contrat éducatif est proposé au patient. Si le patient est d'accord, il doit définir avec l'infirmière éducatrice les objectifs souhaités. A savoir que le consentement du patient est obligatoire. Pour les patients qui ont accepté le suivi éducatif, l'infirmière éducatrice programme et prépare des séances éducatives individuelles ou collectives (pour des groupes de 7 à 8 personnes par groupe). La durée d'une séance individuelle est d'environ une heure. La séance collective dure environ 3 heures. C'est à partir du contrat éducatif, que le nombre de séances d'entretien, de suivi, ou de renforcement

    hospitalisés à l'Hôpital de Blois, aux patients des consultations externes et à leur entourage. Les patients sont éduqués durant la période d'hospitalisation selon les recommandations de l'HAS pour cette pathologie. La prise en charge thérapeutique, a pour objectif principal l'éducation du patient. Celui-ci doit être informé de ses contraintes alimentaires, des circonstances susceptibles de déstabiliser son état cardiaque, des modalités de surveillance (poids, quantification de l'essoufflement...), des bienfaits des pratiques d'exercices physiques adaptés et des modalités de la prise des traitements médicamenteux.

    77

    est déterminé. Ce nombre est très variable et dépend des facteurs cognitifs, psychologiques et sociaux des patients, ainsi que des disponibilités de l'équipe pluridisciplinaire.

    Dans ce cadre, l'infirmière éducatrice référente en ETP mobilise des outils éducatifs comme :

    · Le guide d'entretien pour l'élaboration du diagnostic éducatif ;

    · Le dossier éducatif informatisé du patient ;

    · Le carnet du patient ;

    · Les plaquettes d'information et le matériel pour les apprentissages techniques ;

    · Les dessins, les schémas, de la documentation ;

    · Des jeux thématiques, des tables rondes ;

    · La grille d'évaluation des compétences.

    En fin de chaque séance éducative et à l'issu de l'éducation du groupe, l'infirmière éducatrice évalue les acquisitions du patient à l'aide d'un questionnaire de satisfaction. L'atteinte des objectifs de chaque patient est évaluée lors de la consultation de suivi externe ou lors d'une éventuelle ré-hospitalisation. La démarche éducative est alors reprise grâce au dossier éducatif informatisé personnalisé.

    Pour les trois services, les programmes ETP prévoient un volet dossier patient informatisé. Ce dossier n'est pas classé dans le dossier médical du patient. Il s'agit d'un dossier à part, il permet de structurer la prise en charge, le suivi et d'en évaluer le processus éducatif. Les objectifs de la création de ce dossier éducatif informatisé sont : l'amélioration de la prise en charge du patient, l'instauration d'une éducation thérapeutique de qualité et, le suivi de ce dossier par tous les soignants.

    2- Phase d'observation ethnographique

    J'ai opté pour une même méthode de travail pour les trois services (Hôpital de Jour, Unité de Diabétologie et Service de Cardiologie). D'abord, j'ai observé les locaux et leurs aménagements, l'organisation de chaque service, les équipes soignantes, la répartition des tâches, et la mise au travail des uns et des autres. Ensuite, j'ai suivi l'infirmière éducatrice du service. J'ai regardé sa façon d'organiser son activité, j'ai énuméré les différentes tâches réalisées, j'ai observé son attitude et son comportement avec les patients au moment du soin médical, et au moment des séances éducatives. Il s'agissait pour moi de suivre le déroulement de plusieurs consultations53 Donc, j'ai passé plusieurs journées dans les trois services de soins. C'est à la suite de cette phase que j'ai pu réaliser des entretiens semi directifs avec les

    53 Ceci suite à l'obtention de leur accord, et celui de l'administration.

    78

    trois infirmières éducatrices. J'avoue que ma présence dans les services de soins m'a permis d'être connu et reconnu dans le milieu des soins et de faire connaissance avec les infirmières éducatrices, les patients et, de me familiariser avec leur environnement.

    3- Phase de réalisation des entretiens

    J'ai choisi, de mener des entretiens semi directifs avec les infirmières éducatrices que j'avais déjà observé dans leur poste de travail. Les infirmières éducatrices des trois services ont été contactés et informés de mon arrivée sur leur lieu de travail. Le sujet du stage a été précisé ainsi que les conditions de l'entretien et plus précisément son enregistrement. Les trois professionnelles étaient d'accord pour la méthode et n'y voyaient aucun inconvénient. Au contraire, elles se sont montrées très intéressés par le sujet, expliquant que depuis la mise en place de l'activité ETP aucun stagiaire ou autre professionnel ne s'est manifesté pour observer et parler de leurs pratiques. Cette première prise de contact a instauré un climat de confiance entre nous, rendant possible un recueil de données subjectif. Mes entretiens sont appuyés par un questionnaire ouvert54. Chaque entretien a été enregistré, restitué et analysé. Le premier entretien a été concluant car très riche dans les apports sur les différentes notions. Mon guide d'entretien n'a donc pas été modifié. Chaque entretien a duré environ quarante-cinq minutes. Tous se sont faits dans de bonnes conditions et notamment, dans un lieu calme. Des interruptions par le téléphone ou par une personne venant frappée à la porte n'ont pas engendré de difficultés particulières.

    3.1- Portrait des interviewées

    Dans cette partie du travail, l'anonymat est respecté pour les trois infirmières éducatrices.

    Pour faciliter le traitement des données recueillies, j'ai choisi trois prénoms différents pour

    nommer les entretiens restitués :

    « Marie » pour le premier entretien avec l'infirmière de l'Hôpital de Jour,

    « Laura » pour le second entretien avec l'infirmière de l'Unité de Diabétologie,

    « Sophie » pour le troisième entretien avec l'infirmière du Service de la Cardiologie.

    Les mêmes prénoms seront retrouvés dans toutes les interprétations effectuées.

    Dans toutes les parties qui suivent nous avons choisi d'utiliser le terme « éducatrice » à la

    place de référente en ETP, le fait que les infirmières se nomment éducatrices pendant

    l'activité ETP.

    54 Voir en annexe n°4 le support de l'entretien

    79

    - Marie, 36 ans, 8 années d'expérience en qualité d'infirmière en médecine interne, cancérologie, dialyse et 5 années comme infirmière éducatrice en ETP à l'Hôpital de Jour.

    - Laura, 38 ans, 15 années d'expérience comme infirmière en service de médecine interne, aide médicale, diabétologie et éducatrice en ETP depuis 4 ans.

    - Sophie, 35 ans, 13 années d'expérience en qualité d'infirmière en médecine polyvalente de nuit et de jour (en gériatrie, aux urgences, en cardiologie), et infirmière éducatrice en cardiologie depuis 4 ans.

    Les trois infirmières ont suivi une formation de 40 heures pour pouvoir pratiquer l'activité ETP. Elles exercent dans des services différents. Les entretiens ont donc eu lieu dans leur service d'affectation. Les trois infirmières éducatrices déclarent : être engagé dans des programmes ETP, exercer dans leur travail quotidien l'activité éducative, travailler dans des services de soin où les patients souffrant d'une pathologie chronique.

    80

    IV- Traitement des scripts recueillis

    Dans cette partie nous nous sommes intéressé aux idées formulées par les interviewées, afin de présenté un panel le plus représentatif possible des pratiques, convictions, opinions et représentions de ces infirmières éducatrices par rapport à leurs activités et leur identité, de manière à présenter fidèlement les caractéristiques d'une réalité. Dans ce cadre, pour explorer les données obtenues par les entretiens semi directifs, nous avons opté par une méthodologie d'analyse de données selon trois étapes : la phase de catégorisation, la phase descriptive et interprétative et enfin, la phase d'analyse (Quivy & Campenhoudt, 2006). Dans ce sens, nous avons retranscrit intégralement les scripts de chaque entretien et les avons répertoriés dans des tableaux55, ensuite nous avons procédé par un « codage chronométré » des idées qui apparaissent au fil de l'écoute pour chaque enregistrement. En deuxième phase, nous avons effectué le tri à plat des scripts de chaque entretien, pour faciliter l'interprétation des données et, pour faire émerger des convergences ou des divergences dans la pratique de l'ETP par les interviewées. Notre but est de chercher à produire du sens à partir de ces données recueillies, qui ont fait l'objet d'une analyse de contenu, que nous avons élaboré dans cette quatrième partie de ce mémoire. Nous procéderons donc par une méthode d'analyse thématique qui, selon Blanchet et Gotman, est la plus « cohérente avec la mise en oeuvre de modèles explicatifs de pratiques ou de représentations... » (2001, p. 98). En effet, dans la partie qui suit, nous nous contenterons de présenter que la phase descriptive et interprétative, suivi de la phase d'analyse.

    1- Synthèse des verbatims

    Suite à la phase des tris à plat pour chaque entretien, j'exposerai dans cette partie une synthèse des contenus recueillis. J'ai choisi donc, de regrouper les sujets abordés durant les entretiens en 07 thématiques, pour faciliter l'analyse et l'interprétation des données et, pour faire émerger des convergences ou des divergences dans la pratique de l'ETP par les interviewées.

    1) Présentation, représentation et organisation de l'activité ETP par les infirmières interviewées (moyens mobilisés, justification du choix, ...)

    a) Présentation et organisation de l'ETP par les interviewées

    55 Joints en annexe n°5

    81

    L'enquête révèle des intentions différentes par rapport à l'instauration de l'ETP dans les trois services et une organisation distincte d'un service à un autre avec quelques procédés semblables.

    A l'Hôpital de Jour : l'initiative de l'élaboration des programmes ETP répond au projet de l'établissement. C'est le fruit du travail d'une équipe pluridisciplinaire. Marie témoigne : « On a eu une réunion de travail avec la coordinatrice de l'ETP, médecins, diète, kiné, cadre... on a fait une fiche pédagogique avec les déroulements de tous les thèmes. On nous a installé un logiciel pour entrer les infos des patients et créer le dossier éducatif » (00'37).

    Dans ce cadre, la mise en place de ces programmes éducatifs a été confiée au médecin coordinateur de l'ETP et à une infirmière justifiant d'un Master en éducation thérapeutique qui occupait le poste d'éducatrice. Un an plus tard, l'infirmière éducatrice quitte le service pour une promotion. L'HDJ s'est retrouvé alors sans éducatrice. Ces circonstances ont eu un impact important sur la poursuite de l'activité ETP dans le service. C'est à ce moment que Marie une des infirmières du service postule pour le poste d'éducatrice est l'occupe à ce jour, elle est la seule infirmière éducatrice dans son service. Donc, être éducatrice relève d'un choix personnel pour Marie : « oui c'est un choix. En fait, j'avais une collègue DU qui occupait ce poste. Et éduquait les patients. Et quand elle est partie, j'ai demandé d'occuper son poste de référente...et voilà 3 ans déjà. En 2011, j'ai en fait repris les programmes, les ateliers qui n'avaient pas encore était fait (00'10).

    -Marie n'organise que les séances collectives : elle les réalise dans une salle appartenant à l'hôpital, qu'elle réserve tous les jeudis. Elle a mis en oeuvre un prospectus qu'elle propose aux patients pour les initier à la pathologie et aux séances proposées : « j'ai fait un p'tit flayer pour représenter un p'tit peu ce que l'éducation thérapeutique » (01'48).

    -Marie propose aux patients trois programmes éducatifs le jour du diagnostic éducatif : chaque programme représente un atelier éducatif. L'atelier dure environ 3 à 4h, concentré sur une journée dans la semaine (le jeudi) soit le matin, ou l'après-midi. Les trois ateliers sont programmés successivement deux mois plus tard. Le premier atelier, Marie le réalise avec un rhumatologue et un pharmacien. Le nombre de participant est de 5 à 6 personnes. Le deuxième atelier, elle l'accomplit avec une diététicienne. Le nombre de participants est limité à 8 personnes. Le troisième atelier, Marie l'effectue avec un kinésithérapeute et un ergothérapeute. Le nombre des participants est aléatoire, jusqu'à 10 personnes réparties souvent en deux groupes. Marie a réalisé en 2015, 31 diagnostics éducatifs et 12 ateliers.

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    En Unité de Diabétologie : avant l'année 2011, la diabétologie relevait du Service de la Médecine Interne. Laura et les autres infirmières prenaient en charge tous les patients y compris les patients diabétiques pendant 12 ans. Ensuite, les responsables et les médecins du service ont voulu créer une unité indépendante, prenant en charge que les patients diabétiques, cette unité a été intitulée « l'aide médicale ». Le but était de commencer des éducations informelles (une initiative des médecins du service). C'est dans ce cadre que l'infirmière Laura s'est retrouvée dans cette unité, pour elle, il s'agissait de séparer les différentes pathologies traitées dans son service. Ensuite, il y eu l'introduction de la pratique de l'ETP. L'unité de « l'aide médicale » prend donc l'appellation de « l'unité de diabétologie » depuis 2011. Dans cette perspective, des programmes ont été établis par les professionnels de cette unité.

    Laura exprime que la pratique de l'ETP ne relève pas d'un choix personnel pour elle, mais d'une réponse à une volonté de changement de pratiques dans le service : « on n'avait pas vraiment le choix. Au départ, on était l'aide médicale...puis on a parlé de l'éducation thérapeutique dans tout l'hôpital et, on a changé de contenus. Et on a établi des programmes » (00'24).

    -Pour la prise en charge de l'ETP, Laura partage l'exercice de cette activité avec 5 autres infirmières éducatrices. Elles se succèdent selon un planning de travail. Chaque éducatrice prend en charge l'activité ETP pour une durée de 2 mois consécutifs dans l'année. Les autres mois de l'année Laura ne s'occupe que des soins curatifs : « ...on ne travaille pas en même temps. C'est un planning... je suis éducatrice que deux mois dans l'année... » (05'59).

    -Pour la réalisation des séances éducatives, Laura propose aux patients des séances de groupe et des séances individuelles.

    En séances de groupe, Laura réalise deux programmes d'ateliers : le premier est adressé aux patients diabétiques type I et II : Il comporte un parcours de trois séances éducatives pour chaque patient. Le mercredi matin : l'atelier avec un psychologue, le jeudi matin : l'atelier alimentation avec la diététicienne et le jeudi après-midi : l'atelier pieds avec une aide-soignante. Chaque atelier dure environ 3h30. Le deuxième programme concerne les patientes atteintes du Diabète Gestationnelle (DG). Sa durée est de 2h30. Par manque de temps (en lien avec la date de l'accouchement des patientes), Laura n'a pas choisi de méthode pour ce programme. Elle réalise le diagnostic éducatif en séances collectives pour toutes les patientes ensembles. Ensuite, elle personnalise si besoin. Ces patientes sont adressées de la maternité en groupe de 4 à 5 patientes à la fois. Cette mission ne semble pas facile pour Laura : « on n'a pas choisi de méthode, ...il y en a...je prends pas de p'tit déj, il y en a que des boissons

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    sucrées. On a une dame qui mange en continu... Quand on a ce genre de situation...on ne va pas détailler... l'acide essentiel...nanana. On s'adapte, c'est dur de commencer par un diagnostic pour tout le groupe en même temps, ... En fait l'éducation thérapeutique c'est aussi avoir la capacité de s'adapter...voilà » (08'25).

    En séances individuelles : A chaque patient, Laura propose un parcours éducatif de trois séances, (l'initial, le suivi et le renforcement). Elle fixe les rendez-vous, convoque et rappelle les patients. Le suivi est proposé pour revoir les objectifs. Les patients ont le choix de l'effectuer au niveau du réseau. Le renforcement est proposé qu'aux patients qui ont besoin de plus de séances éducatives. Les séances individuelles se déroulent tous les lundis, mardis et vendredis de la semaine. Elles durent environ 1h.

    En Service de Cardiologie : l'initiative de la mise en place de l'ETP dans ce service est naît d'un manque de l'effectif médical et d'une volonté d'aménager la charge du travail des cardiologues aux urgences, le fait que la journée de présence du médecin est partagée entre ce service et le service des urgences. D'après Sophie : « l'idée de l'ETP, c'était de désengorger un p'tit peu les urgences et puis prendre ce qui était spécifique à la cardiologie » (00'34).

    -Pour la prise en charge de l'ETP, le poste d'éducatrice a été proposé à l'infirmière Sophie par son cadre de service : « On m'a proposé le poste d'éducatrice...j'ai accepté » (00'34). Sophie devient la seule infirmière éducatrice dans son service. Depuis l'instauration de l'ETP dans le service, Sophie consacrait deux jours (le mardi et le jeudi) de chaque semaine dédiée à l'activité éducative. Depuis 2015, elle ne pratique qu'une journée par semaine (le jeudi), cette baisse de l'activité ETP est expliquée par la diminution de la file active : « il n'y a pas assez de patients » (00'59).

    -Pour la réalisation des séances éducatives, Sophie ne procède que par des séances individuelles, elle propose un programme de trois jours d'éducation aux patients pendant leur hospitalisation. Un mois après la sortie du patient, Sophie le convoque pour le suivi, et lui propose deux séances d'apprentissage. Chaque séance se concentre sur une journée dans la semaine (le jeudi), dans un bureau. La séance dure environ 3heures.

    Les procédures identiques aux trois services

    -Pour les trois services, la proposition de l'ETP aux patients relève, soit d'une prescription médicale, soit d'une initiative de l'infirmière éducatrice dans le cadre de son rôle propre. Les éducatrices disposent d'un dossier éducatif indépendant du dossier médical, spécialement conçu pour le suivi du parcours éducatif de chaque patient.

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    -Les trois infirmières éducatrices « recrutent » les patients sur l'ordinateur, elles élaborent le diagnostic éducatif (appelé aussi l'initial) et définissent les objectifs avec le patient. A l'HDJ et en service de Cardiologie, Marie et Sophie n'établissent le diagnostic éducatif que si le patient est d'accord pour un suivi éducatif. Alors qu'en service de Diabétologie, Laura élabore systématiquement le diagnostic éducatif pour tous les patients atteints du diabète type I et II, ayant fait un séjour dans l'unité. Les éducatrices organisent soit des séances individuelles, soit des séances collectives. Les autres professionnelles (diététiciens, kinésithérapeutes, ...) collaborent aux séances collectives selon leurs disponibilités. Dans les trois services, les infirmières éducatrices réalisent seules le diagnostic éducatif et les séances individuelles avec les patients.

    -Les activités éducatives reposent sur des méthodes pédagogiques comme la discussion, l'échange, la répétition des termes médicaux, la reformulation, et le partage des informations entre les participants et les différents intervenants. La répétition des termes médicaux représente un des outils éducatifs pour Laura : « Il ne va pas tout retenir d'emblée. Ça va être répété...répété, pendant trois jours » (10'23).

    -Les thèmes abordés sont choisis par les patients, et dépendent des objectifs fixés. Le témoignage de Marie révèle que les patients apportent leurs connaissances sur les thèmes choisis et, les intervenants (l'éducatrice seule ou accompagnée d'un professionnel de santé) contrôlent les acquisitions des patients et interviennent pour plus d'explications : « on leur demande de choisir deux cartes : soit parce que ça les interpelle, soit parce qu'ils connaissent et ils veulent en parler. Soit par ce qu'ils ne connaissent pas du tout, et ils aimeraient en s'avoir. Voilà...par exemple le thème de la douleur, tout le monde est intéressé... et tout le monde peut intervenir pas que la personne qui a choisi cette carte » (13'02).

    -Pendant les séances éducatives, les trois éducatrices mobilisent des moyens humains et matériels comme : les professionnels de santé (diète, kiné, pharmacien,), les patients, les compagnons, les ateliers, le support informatique, le diagnostic éducatif, la programmation, le suivi, l'évaluation, les transmissions, les outils visuels tels que, les cartes, les prospectus, le matériel utilisé par les patients (appareil à glycémie, tensiomètre, ...). Les trois éducatrices réalisent les séances individuelles soit dans la chambre du malade, soit dans un bureau appartenant à leur service, si celui-ci est disponible.

    -Pour l'évaluation des séances collectives, Marie et Laura proposent aux patients un questionnaire de satisfaction en fin de chaque séance. Pour le suivi, les patients ont le choix entre l'Hôpital et le réseau. Laura témoigne : « Il y a le suivi des patients mais c'est nous qui

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    le faisons, c'est le questionnaire de satisfaction pour le groupe et...pour le suivi ils ont le choix. Soit ici soit au réseau... » (34'45).

    -Pour l'évaluation des séances individuelles, les trois éducatrices doivent reprendre le diagnostic éducatif pour évaluer les compétences du patient. Le manque de temps ne leur permet pas de réaliser cette procédure, aussi, les patients ne semblent pas motivés pour revenir à l'Hôpital, Marie témoigne : « ...normalement on devrait refaire un diagnostic. Au niveau timing c'est un peu difficile. Ça prend du temps...moi je passerai trois quarts d'heure sur...mine de rien...et j'essaie de ne pas dépasser une heure avec chaque patient. Et après on a les retranscriptions. Je ne veux pas utiliser l'informatique devant les patients. C'est vrai que...faire revenir les gens pour discuter ce n'est pas évident. Les gens ne sont pas forcément disponibles... Il y a des gens qui viennent de loin » (33'00).

    -Pour l'évaluation de l'activité ETP en tant que telle, le témoignage des trois infirmières éducatrices confirme qu'aucun suivi professionnel n'a été effectué depuis l'intégration de cette activité éducative à leur quotidien. L'analyse des pratiques professionnelles éducatives ne fait pas encore partie des priorités de ces services. Marie et Sophie expliquent que cela est dû au manque d'outil d'évaluation : « ...on n'a pas d'outil d'évaluation de l'activité je pense...notre travail, je ne sais pas, on n'a jamais été évaluer » (43'25). « L'activité

    thérapeutique en tant que telle, je dirai qu'on n'a pas d'outil pour l'évaluer... » (35'41).
    Laura précise qu'il n'y a pas de suivi professionnel pour les infirmières éducatrices : « Il n'y a pas le suivi d'un professionnel. Qui nous dirait si c'est ça ce qu'on fait. L'analyse des pratiques qu'est ce qui la fait. ...l'analyse de l'activité...il faut justifier de nos formations d'éducation thérapeutique. Mais qui vient nous évaluer sur le terrain, pour nous dire que finalement, on ne fait pas juste ce qu'on fait, ...qu'on prend pas juste un thé avec le patient...et ben personne...On remplit des dossiers sur l'ordi...qui regarde et remarque ce que je marque en compte rendu...qui...pas du tout. Personne, il n'y a personne qui regarde ce qu'on fait... je pense... » (35'04).

    b) Les représentations de l'ETP par les interviewées

    Le témoignage de ces trois infirmières éducatrices va nous éclairer davantage sur leur représentation de l'ETP. Pour cela, j'ai demandé à ces infirmières de me décrire leur signification de l'éducation par rapport à l'information et la persuasion, le fait que ces trois vocables sont souvent employés dans la terminologie des soins infirmiers.

    Chaque infirmière a répondu selon sa représentation influencée par sa propre expérience éducative. La représentation de l'éducation est semblable pour les trois interviewées. Elle

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    est représentée par la discussion, l'échange, et le partage des informations entre les participants et les intervenants. Elle privilégie l'effet de groupe, l'intervention des éducatrices est au second plan. C'est un moment d'apprentissage.

    - Laura définit l'éducation comme un apport d'information donné en réponse à un besoin éducatif, n'ayant aucun lien avec l'information en réponse à une demande. L'éducation pour Laura donne un sens au métier de l'infirmière. Elle décrit avec une grande intelligence intuitive sa représentation de l'ETP : « ...c'est un soin qu'on va mettre au même niveau qu'un autre... pour moi l'éducation ça aller de soi...c'est comme ça que je vois mon métier. Je ne le vois pas sans. Sinon c'est un métier qui est dénué de sens...c'est inclus dans la prise en charge... » (16'48). « C'est vrai qu'il a un apport d'information dans le but ensuite de pouvoir réfléchir à quelque chose et pouvoir prendre conscience de se qu'on fait...pourquoi on le fait et qu'est ce qu'on peut en tirer. Parce que pouvoir faire des glycémies ce n'est pas facile...et si on ne fait rien derrière...ça ne sert pas à grand-chose. Le conseil, on peut le faire sans éducation, à moins qu'il réponde à un besoin éducatif, oui, donner...donner...ce n'est pas faire de l'éducation. Donc automatiquement l'éducation vient après l'information » (01'29).

    - Marie différencie l'éducation thérapeutique de l'action thérapeutique : « on parle de la pathologie...le débat reste ouvert... On n'est pas là...pour faire une thérapie de groupe ...et ce n'est pas juste des infos qu'on donne » (21'39).

    -L'éducation pour Sophie aborde la qualité de vie : « c'est une autre prise en charge de la maladie dans sa globalité...ce n'est pas un moment de compassion, ...mais d'apprentissage, ...pour nous ou pour les patients, ... » (02 '44).

    La persuasion en ETP ne fait pas partie des outils de travail des trois éducatrices : par exemple le témoignage de Sophie confirme que le patient a le droit de refuser les soins : « si cette dame n'est pas convaincue et ne réalise pas, moi je ne peux pas être persuasif » (02'44). Les trois interviewées expriment des représentations différentes par rapport aux deux rôles (soignant et éducatif) : Marie n'exprime aucun choix par rapport aux deux rôles. Elle les met au même niveau, malgré leur différence de pratique : « ...je ne sais pas si je voudrai faire que de l'ETP. Parce que j'aime aussi ce que je fais ...en cancérologie. En fait se sont deux activités différentes que j'aime ...mais si je devais faire un choix entre les deux. Je serais bien embêtée » (36'43).

    - Pour Laura, les deux activités se complètent : « c'est un soin qu'on va mettre au même niveau qu'un autre. Pour moi c'est évident... pour moi l'éducation ça aller de soi. Pour moi c'est comme ça que je vois mon métier. Je ne le vois pas sans. Sinon c'est un métier qui est

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    dénué de sens... pour moi c'est inclus dans la prise en charge... Je ne peux pas

    travailler sans éducation... » (16'48).

    -Sophie reconnaît que le rôle d'éducatrice a renforcé son comportement de soignante. Elle remarque qu'elle commence à se lasser du rôle soignant au regard des compétences de l'ETP qui la valorisent plus : « ...l'éducation a renforcé mon côté soignant. J'aime les deux...j'aime bien le curatif mais l'éducation c'est un autre moment. Mais je commence à me lasser du curatif parce que c'est superficiel. Il n'y a pas de communication véritable mise à part le geste technique. On n'va pas connaître les patients, on est satisfait de bien faire le soin, on n'a pas de retour du patient. La communication ne va pas s'approfondir. On essaie de connaître la maladie mais pour le malade s'il n'y a pas d'éducation...pas d'échange. J'ai l'impression qu'on apporte peu...normalement on doit pratiquer les deux » (25'07).

    2) Distinction entre une activité ETP et une autre activité (description, notion du temps...)

    Description de l'activité d'infirmière par les interviewées : Les trois éducatrices travaillent chacune dans son service d'affectation comme infirmière. Elles réalisent à la fois des tâches propres et des actes délégués. Ces infirmières ont une charge de travail différente et intense, qui leur demande une grande technicité.

    A l'Hôpital de Jour, Marie, en dehors de la journée consacrée à l'éducation (le jeudi) ne réalise que les soins techniques. Son planning est de journée (9h-18h), elle ne fait pas de transmissions orales entre équipes, car elle n'a pas de relève, elle prend en charge des patients qui souffrent de pathologie cancéreuse, ou autres pathologies chroniques : « ...il y a des gens qui viennent pour la chimio...les gens qui ont des scléroses en plaques pour un traitement en IV, des gens qui souffrent de polyarthrites, des maladies de crohn, et certains examens qui doivent se faire dans la journée...voilà. Ensuite on fait la chimiothérapie des cancers gastro, ORL, hématologie qui viennent faire leur chimio...en fin le suivi de tout ça... » (36'17).

    A l'unité de Diabétologie et en service de Cardiologie, Laura et Sophie travaillent selon un planning réparti en deux temps, soit un roulement du matin ou du soir. Chacune a une représentation de l'ensemble des malades présents dans son service, des soins qui doivent être prodigués, suivant les transmissions entre équipes et les prescriptions médicales. Laura et Sophie planifient les différentes tâches selon une logique de priorité. Elles réalisent aussi les tâches administratives et travail en binôme avec l'aide-soignante si besoin. Le témoignage de Sophie confirme de l'intensité de la charge de travail et de la diversité des tâches de l'activité infirmière : « Quand je ne fais pas l'ETP les autres jours, j'arrive dans le service à 6h30 et je

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    finis à 14h30, il y a des moments de transmissions. Le temps passé dans les chambres, les traitements, les prises de sang, faire les pansements, faire le tour avec le médecin... Il est déjà midi et, il faut donner de nouveau les traitements, il faut expliquer, il faut faire les transmissions entre équipe. Si je suis d'après-midi, c'est de 14h15 à 21h15, généralement c'est la même chose au niveau des traitements, des soins, sauf qu'on fait en plus les retours de bloc, les surveillances...les préparations des dossiers...les imprévus, les entrées, les sorties, les staffs, les réunions du service, les trans écrites... » (19'44).

    Les trois interviewées différencient l'activité ETP de l'activité des soins curatifs par rapport au temps, à l'organisation, à l'approche du patient et à la posture. Le « face à face » et l'échange représentent une posture communicative pendant l'ETP pour Marie et Laura. Les deux activités se complètent pour Sophie.

    -Le moment du soin est décrit comme pratico pratique, le peu de communication est centré sur le soin pour Marie : « Quand on fait les éducations pour les auto injections, on reste plus dans le soin... Je vais parler de la technique d'injection, du matériel... Et quand on fait une éducation, c'est des séances qui demandent des techniques, des préparations..., En ETP, l'approche du patient n'est pas la même, on se regarde dans les yeux. Dans le soin...je suis plus concentré sur l'acte. ... je ne discute pas avec le patient sur sa vie, je le réassure, je fais mon soin, ... » (21'39). « ...On voit bien qu'on n'est pas du tout dans la même posture. On voit bien que c'est complètement différent de faire de l'éducation au soin et l'éducation thérapeutique... » (28'05).

    Les interviewées expriment les mêmes représentations sur la notion du temps par rapport aux deux activités : l'activité du soin médical leur exige une gestion du temps épuisante. Les infirmières éducatrices mettent en avant le manque de temps et sa gestion difficile, qui peuvent engendrer un stress en lien avec la charge de travail, comme le confirme le témoignage de Marie : « en soins, le temps est partagé entre les patients et les autres tâches...et si une tâche non prévue se rajoute, ça déborde et on sera obligé de rester plus dans le service, ce qui peut engendrer le stress... » (28'57). Sophie rajoute à ce témoignage : « il faut tout faire et finir à temps, c'est super stressant, on court tout le temps après le temps... On n'a pas le temps pour le patient... » (28'44).

    - Pendant l'activité ETP, le temps est mieux géré, même s'il reste aussi fatigant psychologiquement pour les infirmières éducatrices. Il leurs exige beaucoup d'écoute et de concentration. Le temps pour Marie représente un temps d'apprentissage et de partage : « il faut prendre du temps... il faut laisser le temps aux patients...on n'est pas pressés... »

    (28'57).

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    -Laura exprime qu'il faut consacrer beaucoup de temps aux patients souffrant de pathologie chronique, pour elle : « sur la chronicité...on a le temps de travailler l'ETP... Ce n'est pas en 15 jours qu'il va mettre sa vie en péril » (12'11) « Moi je suis là en consultation. On a le temps de recevoir les patients. On ne fait pas d'autres soins...qui nous rappellent en timing... Si un peu mais pas de stress comme en soin... » (06'16).

    3) Différences et similitudes entre la posture de soignante et la posture d'éducatrice (rôle éducatif, bascule entre soin et éducation, ...)

    -Les interviewées perçoivent les mêmes différences entre le rôle d'éducatrice et le rôle de soignante : un qualifiée de technique et l'autre de relationnelle pour Sophie (25'05). La différence est dans l'attitude de l'infirmière et du patient au moment des deux activités. Les trois infirmières éducatrices avouent qu'elles n'adoptent pas les mêmes attitudes en soin et en ETP. Chaque activité a sa propre posture d'après ces infirmières.

    - Pendant le soin, les interviewées témoignent d'une posture de soignante et un rôle d'acteur. Le rôle du patient est de recevoir le soin, Sophie révèle : « je suis plus dans les attentes médicales » (14'05). « Il n'y a pas de véritable communication... à part le geste technique » (25'07).

    - Pendant l'ETP, les infirmières éducatrices s'octroient le second rôle. Elles apportent de l'aide, assurent l'accompagnement, le soutient et l'écoute. Le patient est acteur, il apporte les connaissances et les informations. Marie témoigne : « ce n'est pas la même chose. Le patient apporte l'information. Nous on a le second rôle » (24'45). Elle rajoute « ...Je me considère plus dans l'aide, dans l'accompagnement que dans le soin » (43'46). « Nous on a le second rôle » (24'45). Laura se décrit dans une posture de « non savoir » : « Nous on répond sans ce côté pouvoir ou savoir » (06'36).

    Les interviewées perçoivent différemment leur rôle en séance éducative : Marie prépare seule les ateliers de groupe. C'est elle la régulatrice de son activité. En présence d'un professionnel de santé, elle apporte sa partie « pratico pratique », note les scripts et intervient si besoin. C'est un rôle « interchangeable » :« on est le fil rouge, on fait tous les ateliers avec les patients d'a à z, ...les autres sont là en épisode.... C'est vrai qu'on est les référentes.... C'est nous qui sommes...les régulateurs... » (12'16) « ...quand je suis avec le pharmacien, c'est plus son rôle d'intervenir, moi je note le script...des fois j'interviens... » (17'59) « ...le pharmacien apporte sa partie, moi j'apporte ma partie plus pratico pratique...c'est aussi le rôle qu'on s'est donné...En fait on est complémentaire » (18'17).

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    -Laura s'octroie le rôle d'organisatrice de l'activité ETP, et d'accompagnatrice dans l'apprentissage du patient. En séances collectives, elle partage le rôle d'animatrice avec un professionnel de santé : « En individuel, ...je lui apporte les connaissances, je l'accompagne dans son apprentissage...c'est moi qui gère. En groupe si c'est avec la diète, elle apporte sa partie, moi je note si besoin, j'interviens si ça à un lien avec la physiologie...si avec le médecin, pareil...après moi je rajoute des explications si besoins... chacun son rôle » (08'60). -Sophie organise, gère et réalise son activité d'ETP toute seule, elle n'exprime aucun rôle : « ...je suis toute seule pendant la séance éducative...j'organise et je réalise la séance... j'accompagne le patient dans son apprentissage... » (24'34).

    -Les trois interviewées expriment que la pratique de l'ETP leur exige la maîtrise de certaines compétences éducatives, d'être dans une posture d'accompagnement, de solliciter des attitudes et des capacités tels que : l'écoute, la reformulation, l'accueil, les techniques de la communication et de l'échange (savoir se mettre face à la personne, ...) Ces différentes compétences sont enseignées pendant la formation continue de 40h en ETP. Laura témoigne : « la formation nous aide à prendre conscience de ces compétences...nécessaires à l'éducation comme l'écoute, la reformulation... » (14'57).

    La bascule entre les deux activités et le changement de casquette sont perçus par les interviewées comme un moment difficile. Elles expriment la nécessité d'un temps d'adaptation pour pouvoir accomplir chaque activité.

    -Marie assimile le changement de posture à la tenue de travail. Pendant l'ETP, elle ôte la blouse : « ...c'est difficile, il faut bien être au claire...parce que là...allez up...j'enfile ma blouse et je change de casquette...ce n'est pas évident » (31'39).

    -Pour Sophie, cette bascule lui évite la routine quotidienne, malgré que le changement de casquette, lui octroi plusieurs activités à gérer : « ...en termes de casquette...ça tourne. Je fais les soins intensifs, les soins de médecine, l'ETP et les consultations externes... les étudiants, il faut les encadrer. Ça fait beaucoup de casquettes je veux dire...vous êtes obligé de vous y adapter. Il y a des jours où on n'est pas dedans, dans la casquette qu'il faut. ...moi je me pose pour faire le point et revoir les attentes de chaque activité. ...c'est bien de ne pas faire la routine » (25'16).

    4) Relation et interaction entre infirmière et patient (comportement des uns et autres par rapport au soin, pendant l'ETP et d'éventuels changements...)

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    - La représentation de la relation infirmière/patient au regard des interviewées est différente au moment du soin qu'au moment de l'éducation. Elles la qualifient de relation à sens unique pendant le soin, et d'échange en ETP. La relation se distingue par rapport au rôle de chacun.

    - Pour Marie, la relation infirmière/patient varie en fonction de l'activité, du lieu, du temps et du contexte de la rencontre. Elle exprime qu'elle ne peut être disponible à l'ETP qu'au moment dédié à cette activité. Pour répondre aux sollicitations des patients, en dehors de l'ETP, elle les renvoie vers ses collègues. Le patient ne fait pas forcément la différence entre les deux missions de l'infirmière éducatrice. Il agit par mode relationnel, il l'identifie par rapport à son rôle d'éducatrice. Cette relation représente aussi pour Marie un moment intense, une forme de complicité et de confiance qui se crée autour du soin éducatif. Pour elle, le port de la tenue de travail bloque cette relation harmonieuse : « ...il y a une complicité, le patient se sent plus proche de moi et c'est réceptif ...il m'a vu dans cette posture d'écoute... il vient me solliciter plus par rapport à mes collègues. Mais je comprends aussi. C'est aussi mon rôle... » (38'07). « En fait la blouse met la barrière. ...ça crée tout de suite une différence...le soignant...le soignant » (11'34).

    -Pour Laura, la relation en séance éducative est différente de la relation pendant le soin. Elle se distingue par rapport au rôle de chacun. Chacun reconnaît son rôle. C'est aussi une relation d'échange et d'émotion entre infirmière et patients : « ...en soin, c'est nous qui sommes acteurs déjà. Lui il consent le soin...sans trop de questions. ... le patient quand il voit que le soignant est centré sur le soin, il ne dérange pas trop on va dire comme si qu'il connaît son rôle à ce moment... » (32'24). « ...en ETP, la relation est une sorte d'entretien, de dialogue,

    c'est plein d'émotion... » (31'45).

    -Pour Sophie, le patient ne change pas d'attitude, c'est elle qui le met en posture passive ou d'échange selon la situation : « Le rôle du patient je veux dire c'est moi qui change... le patient c'est moi qui lui dit, qui lui laisse la parole ou pas pendant le soin. En éducation il est acteur donc c'est lui qui parle » (19'24).

    5) Changement personnel et professionnel (au niveau de la pratique au quotidien, de l'organisation du système d'activités, ...)

    - Les interviewées expriment des changements différents influencés par des compétences pratiquées en séances éducatives et, acquises en formation ETP.

    -Marie perçoit des changements par rapport à l'éducation à l'auto-soins influencés par sa posture d'éducatrice. Elle s'inspire des compétences de la pratique éducative pour développer

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    ses pratiques d'infirmière : « forcément...je m'inspire... sur ce que je fais en éducation... c'est de la formation quand même. On n'est pas au même niveau. On n'a pas la même posture quand même » (40'55). « ...C'est des capacités qui se développent... qui évoluent » (40'47). -Sophie perçoit des changements dans ses actions et dans l'organisation de ses tâches d'infirmière influencés par les compétences éducatives. Elle ne procède plus de la même manière. Elle favorise le dialogue, l'écoute et la communication. Elle prend plus de temps avec le patient pour instaurer le relationnel dans son travail au quotidien : « Oui forcement, pour la chimio, je ne commence pas par prendre les constantes, installer le patient...j'essaie toujours...de discuter. ...je prends le temps pour mettre le patient alaise...je laisse parler le patient... Avant, je ne pratiquer pas pareil, j'installé le patient, ...la chimio c'est dur donc j'évite de trop parler...et là je comprends que la communication, l'échange, l'écoute active c'est des choses qui nous rapprochent plus du patient et ça grâce à l'éducation et à la formation... » (19'21).

    -Pour Laura, le changement est dans la prise de conscience pour certaines compétences éducatives pratiquées inconsciemment par le fait de sa posture d'infirmière : « le changement c'est dans la conscience de l'écoute... Peut être que je faisais naturellement. Mais, je n'en avais pas forcement conscience...la conscience de l'écoute et d'autres outils... » (23'48).

    - Les trois interviewées dévoilent un changement dans leurs comportements personnel et professionnel, par rapport à l'approche du patient et à la posture d'infirmière :

    -Marie reconnaît des modifications de certaines habitudes personnelles et professionnelles, elle essaie de rendre l'autre (son enfant ou son patient) plus actif, plus autonome. Elle a adopté les techniques de la communication dans son travail et dans sa relation avec l'autre. Avant, elle dictait au patient ce qu'il devait faire. Maintenant, elle le fait participer : « ... forcément, il y a eu un changement dans ma pratique en tant qu'infirmière. Après...il y a quelque chose que je mets en pratique tout le temps même dans ma vie personnelle » (39'16). « J'essaie de le rendre plus actif. Il participe plus. Il communique plus. Il parle de sa maladie. Moi je mets plus d'écoute... » (39'28).

    -Laura n'impose plus le soin au patient. Elle discute, elle négocie et, parfois elle revoie ses pratiques. Elle témoigne que la technique d'imposer le soin marchait avant d'intégrer l'ETP, parce qu'elle n'avait pas d'autre alternative. Pour elle, ce changement est en lien avec la pratique de l'ETP car l'acquisition de nouveaux outils d'apprentissage lui a permis de voir autrement la pratique du soin : « On ne savait pas faire autrement... » (30'23). « ...on change de comportement personnel, même dans la vie quotidienne on change, on est plus attentif, on

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    est plus dans la dictée...On écoute, on essaie de comprendre les habitudes de chaque patient, on analyse, on discute avec lui, on revient en arrière... » (30'45).

    -Sophie perçoit un changement de comportement par rapport à celui de ses collègues. Elle ne se situe plus dans l'attente, elle est dans l'écoute. Elle ne cherche plus à convaincre le patient, ni à le materner. Il s'agit d'une prise de conscience par rapport à ses habitudes personnelles et professionnelles : « ...j'ai perçu un changement par rapport à mes collègues.

    Je suis plus dans l'écoute que dans l'attente... dans cette posture de convaincre. Je ne suis
    plus dans qu'est-ce qui vous empêche de... Mais j'essaie de comprendre... »
    (17'36). « ...on va faire beaucoup de reproches auprès des patients. ...on materne les patients... » (14'42). « ...ma posture était la même à la maison qu'au travail. Cette prise de conscience...je me suis posé plein de questions... » (16'43).

    - Les trois interviewées ont des repères différents par rapport aux changements de l'organisation de leurs systèmes d'activités, suite à l'intégration de l'activité ETP.

    -Marie identifie des changements progressifs au niveau de l'organisation des tâches, depuis l'intégration de l'ETP dans son service. Avant, la pratique de la chimiothérapie se pratiquait dans les services de la médecine et de la cancérologie. Les soignantes tournaient dans les deux services. Actuellement, cette pratique est réalisée à l'Hôpital de Jour. Dans ce service, Marie témoigne d'une organisation « assez autonome », dans la prise en charge des patients, et du rôle propre infirmier : « depuis qu'on pratique l'éducation on a changé d'organisation, maintenant, sur la journée on est échelonné. On est 5 à 6 infirmières dont une infirmière en programmation qui gère que la paperasse...les coups de fil.... Ce n'est pas évident...on est au top de l'organisation ici » (41'21). « Ça tourne...et puis après dans la journée on arrive à des heures un peu différentes... Mais en éducation on est seul... » (41'41). « La nouvelle organisation s'est faite au fur et à mesure... » (33'52).

    -Laura reconnaît des changements dans les outils de travail, et dans leurs méthodes d'utilisation dans le service. Avant l'intégration de l'ETP, la prise en charge des patients diabétiques relevait des missions attribuées au service de la médecine. Les outils d'évaluation et d'identification des besoins des patients étaient basés sur un questionnaire fermé. Ces méthodes ne sont plus d'actualité. Actuellement, la pratique de la diabétologie a été transférée dans une unité autonome du service de la médecine. L'approche du soin est centrée sur les capacités du patient à l'apprentissage grâce au diagnostic éducatif. Aussi, l'évolution de la technologie (lecteur de glycémie, ...) a contribué à l'allègement des tâches relevant des actes infirmiers. L'intégration de l'ETP a participé à ce changement d'organisation. Laura témoigne : « avant, c'est vraiment, faites 3... faites 6 glycémies..., Maintenant, ...On a

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    changé de formulation des questions. Ce n'est pas des questions fermées : oui, non, ... Ce sont plutôt des questions ouvertes » (00'51). « ...avant, on le voyait une demi-heure avant le médecin...on dépatouillait, la consultation médecin...maintenant il y a des outils qui vont nous aider à pouvoir évaluer l'apprentissage de quelqu'un... » (30'23). « ...les lecteurs de glycémie, avant, on faisait les moyennes tout seul, on faisait les tests...Tout ça, on n'avait pas besoin de le faire. Maintenant c'est la machine, et, même le patient peut le faire, ... » (05'15). -Sophie ne témoigne d'aucune transformation par rapport à l'organisation de son système d'activité, le changement c'est dans ses habitudes de travail depuis l'intégration de l'activité ETP : « L'éducation passe au second plan. Ce n'est pas une priorité. Le curatif est prioritaire dans le service » (19'44). « Les changements, c'est dans mon organisation... » (19'24).

    6) Description de l'identité actuelle en lien avec l'intégration de l'activité ETP (transformation identitaire ou pas, ...)

    - Les interviewées décrivent une identité d'infirmière à forte qualité éducative :

    -Marie décrit une identité d'infirmière qui a développé des qualités éducatives. Cette transformation identitaire, elle l'identifie à l'amélioration de sa pratique de soignante influencée par les compétences éducatives acquises en formation continue dédiée à l'ETP : Marie exprime aussi un sentiment de valorisation par rapport à la pratique de l'éducation, grâce à la reconnaissance verbale et expressive des patients. Cette valorisation n'est pas aussi perçue en soin. Pour elle, la pratique de l'ETP, apporte un équilibre à la pratique du soin : « une identité de soignante...avant tout...de base oui, c'est sur...Après j'ai développé des qualités d'éducatrice... » (37'00) « J'ai...acquis des choses de part cette formation d'éducatrice... c'est sûr que ça modifie certains domaines dans ma pratique. Je dirais de l'influence...ça questionne quand même mon identité. Quand on fait cette formation et quand on la met en pratique on développe vraiment cette capacité d'écoute... » (38'45). L'éducation pour moi c'est valorisant en tant que soignante... » (37'26).

    -Laura se questionne sur sa professionnalité, elle reconnaît que chaque nouvelle pratique influence son identité d'infirmière. Pour elle, c'est une question d'adaptation. Toute nouvelle pratique (l'entretien éducatif, séance de groupe, ...) requiert l'acquisition de nouvelles compétences et la questionne sur ses habitudes de travail et sur ses expériences acquises : « ça perturbe forcément mon identité de soignante à chaque fois qu'il y a quelque chose de nouveau. Je pense que l'adaptation, elle est aussi pour nous. Ce n'est pas si facile de faire l'entretien éducatif...je veux dire. Ça nécessite des compétences...plein de choses...

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    C'est quand même l'expérience qui fait parfois les choses. Si on n'a pas le regard incarné et on n'a pas l'expérience sur l'insuline...sur les petites choses. Je pense que ...c'est l'expérience ...de toute situation vécue, en disant on s'était mal pris...et on revoit nos façons de travailler c'est important » (33'06).

    -Sophie se questionne sur son comportement et sur ses habitudes de travail en lien avec sa nouvelle identité : l'éducation a renforcé son identité d'infirmière. Elle exprime un sentiment de transformation identitaire personnel en évolution sur le plan professionnel. Elle réalise que cette transformation va lui permettre d'évoluer « grandir » dans son comportement, dans sa façon d'être, dans son regard pour l'autre. Elle se qualifie dans une posture d'écoute. Elle reconnaît, que la formation continue à l'ETP, l'a aidée à prendre conscience et, à revoir ses pratiques d'infirmière. Elle exprime que le changement dans les habitudes de travail pourrait faire peur si on ne lui favorise pas les moyens nécessaires pour l'accomplir : « l'éducation a renforcé...oui ça a changé mon identité. Ça bouscule dans mes habitudes. Mais c'est bien. On a tous des choses cachées. ...Je ressens une transformation identitaire. Elle s'est faite déjà sur le plan personnel...Elle continue sur l'axe professionnel. Je sais ça me permet de grandir...dans mon comportement, dans ma façon d'être avec l'autre, de mon regard envers l'autre. ... je me questionne plus sur mon comportement... Je ne suis plus dans la même posture qu'avant. ...je remets en question mes pratiques. Je ne me positionne plus de la même façon... » (21'03) « Quand on est dans la routine on ne se remet pas en question. On ne prend pas du recul sur ce qu'on fait, ...c'est la formation qui m'a aidé à changer... » (25'16).

    7) Communication entre pairs sur l'ETP (formation, faisabilité, freins, propositions d'amélioration, ...)

    - La discussion entre éducatrices « référentes » sur la pratique éducative n'est pas abordée entre pairs. Marie témoigne que certaines éducatrices n'adoptent pas les mêmes méthodes de travail qu'elles, mais elle ne peut avancer la discussion sur le sujet avec ses collègues éducatrices, le fait que l'analyse des pratiques éducatives soit méconnue pour ces professionnelles : « ...parfois je discute avec d'autres collègues qui font de l'ETP, je vois bien qu'ils ne sont pas au second rôle...je ne peux pas leur dire...ce n'est pas mon rôle à moi... » (28'25).

    -Pas de discussion dans l'Unité de Diabétologie sur l'efficacité des outils de l'ETP comme le diagnostic éducatif informatisé. Laura témoigne : « ...non il n'y a pas eu de réunion disant on

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    va parler des problèmes de la gestion de l'éducation. Pour l'outil chacun fait comme il sait... » (39'07) « ...chacun fait comme il peut... » (39'01)

    -Pas de discussion sur les compétences de l'ETP entre les soignants du service de la Cardiologie, Sophie verbalise un sentiment d'isolement, le fait qu'elle ne partage pas ses connaissances éducatives avec ses collègues : « par exemple je vois ma collègue, il lui parle, elle fait autre chose en même temps. Elle répond à côté...c'est normal, elle est centrée sur le soin. Elle n'a pas du tout la posture d'écoute à ce moment. ...moi j'observe ça reste moi. Mais je ne peux pas dire...que c'est comme ça qu'on doit faire...moi...j'ai fait la formation en plus, j'ai plus de connaissance ça reste là... » (24'42)

    - Les interviewées recommandent la formation continue à l'ETP pour les pairs : elles reconnaissent que cette formation ne peut pas être proposée à toutes les infirmières pour des raisons de moyens budgétaires. Mais, elles la recommandent à leurs pairs. Elles expriment que l'exercice dans les services à pathologies chroniques, leur permet d'acquérir certaines capacités (l'écoute, le respect du silence, l'adaptation au patient...) de fait de leurs pratiques d'infirmière, mais la formation a renforcé ses capacités et les a amélioré par l'intégration d'autres compétences comme la posture communicative, l'écoute active, la reformulation, la valorisation, l'importance du « face à face » dans l'échange...

    -Marie révèle que ce n'est pas toutes les infirmières qui pourraient répondre aux exigences de la formation à l'ETP, en matière de l'acquisition de certaines compétences. Le fait que toutes les infirmières ne disposent pas des mêmes capacités, certaines sont prédisposées à être éducatrices que d'autres. Elle témoigne aussi que certaines élèves infirmières ne sont pas attirées par cette pratique éducative : « ... J'ai présenté ...un peu ce que je fais à l'IFSI. Et à la fin ...j'ai posé la question, c'était des 2ème années...j'ai dit : est-ce que ça vous intéresse, est ce que vous vous voyez faire ce genre de chose. Et plus d'un quart, qui, a répondu...pas du tout. Et ...ça ne m'étonne pas. Il faut quand même un côté relationnel, une approche... » (25'51). « ...on a tous comme même des capacités différentes...certains soignants peuvent être en difficultés par rapport à ça... » (26'39).

    - Les interviewées expriment des avis différents sur la généralisation de la pratique ETP dans les services de soins :

    -Marie exprime que l'ETP ne doit pas être imposer à toutes les infirmières, et que sa pratique doit demeurer un choix personnel : « moi je vois bien qu'il y a des collègues qui ne seraient pas à l'aise de faire l'éducation thérapeutique. Et je trouve que c'est dommage de les mettre en difficultés... » (27'18). Pour elle, la pratique de l'ETP exige des qualités

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    personnelles spécifiques : « je serai étonné que des personnes s'orientent à faire la formation si déjà d'emblée n'ont pas ces capacités d'écoute » (26'39).

    -Pour Laura, tous les soignants peuvent éduquer à l'auto soins, mais l'activité ETP pourrait passer « au second plan » pour les infirmières qui exercent dans des services à pathologies aiguës. Le fait que ce type de pathologie ne leur exige pas une maîtrise des compétences éducatives « le relationnel et l'écoute du patient sont un peu négligés », du fait de la charge de travail. L'activité ETP s'avère irréalisable dans ces services, elle est mieux adaptée dans les services à pathologies chroniques, car elle requière une prise en charge de qualité à longue durée. Chaque infirmière développe des compétences dans le champ de sa pratique : « ...ils peuvent éduquer à l'auto sondage par exemple. Mais ça passe au second plan. Dans les services où il y a une pathologie chronique, on se rend compte en fait qu'on n'est pas dans l'urgence. On est dans la qualité et dans une prise en charge à longue durée et du coup l'éducation thérapeutique est mieux adaptée. Mais en chir c'est de l'aigu, on développe beaucoup plus des compétences de soins d'urgences on va dire, le relationnel et l'écoute du patient sont un peu négligés. On ne peut pas il y a beaucoup de soins à faire dans ces services... je ne sais pas si ces soignants veulent vraiment intégrer l'ETP ou pas...c'est une question de personne, de caractère, et...de savoir-faire et être avec le patient... » (16'09).

    -Sophie se demande si les autres infirmières voudraient de cette pratique, du fait qu'elles ne soient pas formées pour. Aussi, changer d'habitude de travail pourrait représenter un frein pour la mise en place de l'activité ETP. Pour Sophie, toutes les infirmières éduquent les patients à l'apprentissage de l'auto- soin. Certaines infirmières proposent mêmes l'ETP, mais elles ne la pratiquent pas, car cette pratique leur exige un autre mode d'organisation et plus de disponibilité : « ... je ne sais pas si elles veulent pratiquer l'ETP et changer d'habitude de travail...déjà, ...elles ne sont pas formés pour, ...Mais elles ont à leur disposition l'outil informatique farma pour expliquer les médocs et pourquoi on les donne. Donc, elles proposent l'ETP, sauf après, qu'elles ne gèrent pas. Mais pour faire de l'éducation il faut plus de temps pour chaque patient, après au moment des soins on ne peut pas faire l'éduc, je ne sais pas, il faudrait une autre organisation peut être » (06'31).

    - Les interviewées expriment de possibles freins à l'activité éducative et des propositions pour son amélioration : les interviewées racontent des difficultés aperçues par rapport à la réalisation des séances collectives et du suivi éducatif des patients liées à la coordination, au manque de temps, à l'environnement et à la démotivation des patients.

    - La non disponibilité des professionnels et, de salle pour la réalisation des séances collectives freine la réalisation des séances collectives pour Marie et Laura.

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    - Les trois infirmières éducatrices racontent que les patients ne sont pas pris en charge par la sécurité sociale pour le transport et le temps de présence. Ce qui explique la non-participation active des patients aux séances éducatives.

    -L'inexistante de secrétaire demande à l'éducatrice de gérer toute seule la partie administrative de l'activité éducative. Cette tâche est considérée comme une perte de temps pour Marie.

    -Le manque de temps empêche les éducatrices à réaliser correctement le suivi des patients, le fait qu'il s'agit de refaire à chaque fois le diagnostic éducatif.

    - L'existence de deux dossiers différents (médical et éducatif) pour le même patient rend l'accès à l'information difficile pour les éducatrices, et désagréable pour le patient. Pour Laura, l'outil de recueil de données n'est pas assez polyvalent : « et ben à chaque fois on fait entrer les données de nouveau, parce que notre dossier d'éducation thérapeutique n'est pas relié au dossier de l'hôspi... » (37'49). « C'est hyper désagréable pour le patient. Et quand il revient pour une autre éducation, il répond à chaque fois aux mêmes questions...lui...tu vois...il faut à chaque fois redire...redire...enfin...tu vois pour lui ce n'est pas pris au sérieux (38'38) ».

    - Les interviewées ont exprimées quelques propositions d'amélioration pour la pratique éducative :

    - Sophie et Marie proposent des améliorations comme faire sortir l'activité ETP à l'extérieur de l'Hôpital. Pour elles, cette initiative changerait la représentation sur l'éducation et sur sa pratique à l'hôpital.

    -Marie propose le suivi téléphonique des patients : « ...j'ai trouvé que c'est assez pratique le suivi au téléphone pour tout le monde, ... » (33'00).

    -Laura propose d'améliorer l'outil informatisé et de joindre le dossier éducatif au dossier médical pour chaque patient, pour un gain de temps et un suivi rigoureux.

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    2- Analyse qualitative des données

    Cette partie d'analyse consiste à affronter la synthèse des données recueillies précédemment avec nos deux hypothèses de travail. Il s'agit de faire le lien et de s'interroger sur ce que nous apprennent les données obtenues par rapport à notre problématique. Notre visée est de valider, ou d'infirmer nos deux hypothèses de travail.

    Rappelons que notre première hypothèse consiste à vérifier la reconnaissance et l'acceptation du rôle d'« éducatrice » par l'infirmière : son implication dans ce rôle, va lui permettre de mieux se situer dans son activité d'infirmière éducatrice. Cette hypothèse nous l'avons vérifié à partir de trois points différents : la posture, la relation infirmière/patient et le système d'activités de l'infirmière éducatrice. Ces trois repères, dévoilent des changements aux niveaux des habitudes de pratiques, des attitudes et des comportements personnel et professionnel exprimés par les interviewées. Ces témoignages nous ont aidé à aborder notre deuxième hypothèse, à travers laquelle, nous avons voulu vérifier si les transformations décrites par les infirmières engendraient des évolutions identitaires pour ces professionnelles, après avoir intégré l'ETP à leurs pratiques infirmières.

    - L'infirmière entre deux postures : une reconnaissance pour l'ETP

    Suite aux témoignages des interviewées, nous avons relevé deux postures distinctes dans le statut de l'infirmière éducatrice. Pour ces professionnelles, chaque activité a sa propre posture : une éducative et l'autre curative. La posture éducative est envisagée dans les différentes activités de l'ETP (diagnostic éducatif, séances de groupe ou individuelle, les temps de parole passés en chambre par manque de salle aménagée pour cette activité...). Elle est planifiée dans le planning de l'infirmière qui l'exerce. Alors que la posture curative est envisagée dans les soins infirmiers.

    Les témoignages nous ont révélé plusieurs représentations pour la posture éducative. Elles ont décrit une « posture d'accompagnement et d'échange ». Dans cette posture, elles s'attribuent le second rôle : elles apportent de l'aide, assurent le soutient et l'écoute. Elles ont décrit aussi une « posture de non-savoir ». Cette posture privilégie l'intelligence qui naît des échanges, du dialogue avec l'autre, et non des savoirs que détiennent les infirmières. Il s'agit pour elles, d'accepter le fait qu'elles ne détiennent pas la vérité et, que cela nécessite l'échange pour connaître le patient et pouvoir répondre à ses besoins. La posture communicative est représentée par le « face à face », qui doit être privilégié en séance éducative pour ces infirmières. Ce qui représente une posture de « dialogue ». La posture en ETP sollicite donc le questionnement plutôt que l'affirmation pour ces infirmières. En effet, la posture éducative pour les interviewées, a influencé leur posture d'infirmière adoptée habituellement dans le

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    soin. Bien que, la bascule entre les deux activités est décrite comme un moment difficile, leur demandant un temps d'adaptation, pour accomplir chaque activité.

    -La relation infirmière/patient entre deux : le soin et l'éducation

    Les trois infirmières éducatrices ont témoigné qu'elles n'adoptent pas les mêmes attitudes avec les patients, en ETP qu'en soin. Elles ont exprimé deux modes de relation perçues différemment : une qualifiée de relation à sens unique et, l'autre de communicative.

    -La relation à sens unique est identifiée au moment du soin. Elle est décrite comme « pratico pratique », le peu de communication est centré sur la technique de l'acte. C'est aussi une relation courte et limitée, justifiée par le statut d'infirmière. Les interviewées se décrivent « dans les attentes médicales » au moment du soin, le fait qu'elles prodiguent le soin. A ce moment, elles s'octroient le rôle d'acteur, d'émetteur. Le patient dans cette relation reste passif, il reçoit les soins.

    - La relation communicative est identifiée dans l'ETP : elle représente un moment d'échange intense, une forme de complicité et de confiance qui se crée autour du soin éducatif. Les interviewées expriment qu'elles se positionnent au « second rôle » et adoptent la posture éducative. Ce mode de relation leur sollicite une concentration sur le patient (l'individu), en le positionnant dans une posture d'échange (il devient acteur, il apporte les connaissances et les informations). D'après les témoignages, le changement de comportement dans la relation infirmière/patient ne se limite pas qu'à l'attitude de l'infirmière, on voit bien qu'il est aussi confirmé par celui du patient au moment des deux activités. Ce qui explique que cette relation duelle est perçue différemment, elle demande une réflexion par l'infirmière vis-à-vis de son attitude envers le patient au moment de telle ou telle activité. En effet, les trois témoignages dévoilent que le mode de la relation et sa qualité dépendent de l'infirmière : de sa personnalité, de sa disponibilité et de sa représentation du malade au moment d'une activité. En soin, le patient est considéré comme un « objet de soin », il s'agit d'une conception du malade encrée dans les représentations des infirmières dès leur entrée en formation initiale.

    Le port de la tenue de travail en ETP est considéré par les interviewées comme un blocage à la relation harmonieuse d'échange, qui se crée au moment de cette activité. Celle-ci est vue comme une barrière pour la relation d'échange de personne à personne qui représente la base de la communication et, renvoie à l'image du pouvoir et du savoir dans les milieux des soins. Sophie en témoigne : « ... là je porte une blouse...ça peut être une barrière. Ici c'est compliquer de retirer la blouse au moment de l'ETP...parce qu'on est dans le même service. Je veux dire en service de soins » (18'43).

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    D'après les témoignages des interviewées, le patient dans cette relation, agit par mode relationnel, il identifie l'infirmière par rapport à son rôle d'éducatrice. Marie raconte qu'en dehors de l'ETP, les patients la sollicitent plus que ses collègues : « ...dès qu'ils me voient en dehors de l'éduc, ils ne se disent pas là...elle est en soin. ...quand ils me croisent dans le couloir, ils ne savent pas forcément que je suis en train de passer une chimio juste à côté. Si je ne suis pas disponible. Je leur dis voilà... » (34'20).

    - L'ETP : une organisation dans un système d'activités spécifique

    Au travers de l'analyse des matériaux recueillis dans les entretiens. Il apparaît que l'organisation du système d'activités des soins infirmiers est liée à la nature des activités de chaque service de soins et, aux missions qui lui sont attribuées. La pratique de l'ETP a été instaurée de manière formelle dans les trois services depuis 4 ans (2011), en réponse soit à un projet de l'Hôpital, soit à des objectifs de réaménagement entre les différentes activités menées dans les services, comme le cas des services de Diabétologie et de Cardiologie. Bien que l'ETP a été intégrée dans le planning des infirmières éducatrices, sa planification est gérée différemment dans les trois services. Nous notons deux modes d'organisations complètement différents : L'HDJ et le service de Cardiologie ont opté pour une pratique à temps partiel, cette mission a été confié à une seule infirmière dans chaque service, qui doit consacrer 20% de son temps plein de travail mensuel à cette activité (tous les jeudis de chaque mois), les autres jours de la semaine, l'infirmière éducatrice prend en charge les activités de soins curatifs. En unité de Diabétologie, l'ETP est pratiqué à temps plein. Sa pratique est confiée à 6 infirmières qui se succèdent selon un planning de travail annuel. Chaque éducatrice prend en charge l'activité ETP pour une durée de 2 mois consécutifs dans l'année. Les autres mois sont consacrés aux autres activités de soins. Les autres professionnels de santé (diététiciennes, médecins, kinésithérapeutes...) ne participent qu'à temps partiel aux séances de groupe et selon leur disponibilité, à l'HDJ et en unité de Diabétologie. Par contre, les séances individuelles et les diagnostics éducatifs ne sont réalisés que par l'infirmière éducatrice. Bien que l'ETP soit pratiqué différemment dans les trois services. Ces modes d'organisation séparent l'ETP des autres activités menées dans ces services de soins et, isole l'infirmière éducatrice de ses collègues, le fait qu'elles ne partagent pas ensemble l'activité ETP. Ces différentes organisations spécifiques à l'ETP, ont provoqué chez les infirmières éducatrices des changements perçus dans leurs habitudes de travail, et au niveau de l'organisation et de la répartition des tâches, par rapport à la gestion de leurs différentes activités aux quotidiens, dans le but de mieux prendre en charge les patients souffrants d'une pathologie chronique.

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    Les verbatims de mes trois interviewées ont bien démontré une reconnaissance pour le rôle d'« éducatrice » de la part des infirmières éducatrices. Leur implication dans ce rôle, leur a permis de mieux se situer dans leurs activités quotidiennes, de mieux aborder la relation infirmière/patient pour mieux situer les besoins du patient en termes curatifs et éducatifs. Ce qui leur a permis d'agir et de penser autrement le soin et d'apercevoir le changement dans : leur posture, leurs habitudes de travail et dans, leur système d'activités comme une amélioration de leurs pratiques d'infirmière. Cette première hypothèse est ainsi vérifiée grâce à tous les outils de notre étude.

    -Processus de transformations identitaires des infirmières éducatrices

    Dans cette deuxième partie de l'analyse, nous allons vérifier si les changements de pratiques et de comportements exprimés par les trois infirmières éducatrices provoqueraient un processus de transformation identitaires chez ces professionnelles, suite à l'introduction de l'activité ETP à leur activité d'infirmière. Dans cette perspective, nous allons tenter de suivre Dubar (1998, 1992) concernant l'articulation entre la socialisation biographique (identité pour soi) et la socialisation relationnelle (identité pour autrui), le fait que les identités professionnelles, pour Dubar, ne sont pas des catégories acquises une fois pour toutes, comme les autres, elles se construisent dans et par les interactions, tout au long de la vie.

    Les propos des trois interviewées, traduisent un processus de transformation identitaire. Avant de pratiquer l'ETP, elles associaient à leur rôle d'infirmière l'image d'une professionnelle qui materne le patient et qui sait ce qui est bon pour lui, avec des attitudes qu'elles qualifient de jugement et de reproche sans le désirer. Sophie raconte : « ...on est souvent dans...on va faire beaucoup de reproches auprès des patients. ...on va leur reprocher d'apprendre leurs médicaments correctement, on ne supporte plus de leur expliquer des choses. Et puis...on pense qu'ils ne comprennent rien...Donc souvent le soignant va se retrouver en train de dire...mais je perds du temps...On les juge en fait...oui oui on les juge sans le vouloir en fait. Peut-être parce qu'on a essayé de faire en sorte à tout bien faire. Moi j'ai eu l'information qu'on materne les patients. On les dirige au lieu de vouloir savoir qu'est ce qu'ils attendaient de nous... » (14'42). Laura témoigne qu'avant, elle dictait au patient ce qu'il devait faire au lieu de rentrée en communication avec lui : « avant, c'est vraiment : faites 3...faites 6 glycémies par jour. Maintenant, on a changé de formulation des questions. Ce sont plutôt des questions ouvertes. On s'est plus adapté aux besoins du patient que l'on lui impose de faire... Mais ça...on l'a travaillé avec la formation en éducation » (00'51). Pareillement, Marie révèle des changements dans sa pratique d'infirmière : « ...avant, je dictais au patient ce qu'il

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    devait faire...maintenant, je le fais participer... » (23'30). Les trois éducatrices ont raconté, qu'avec le temps, leur attitude a commencé à changer au moment du soin. Pour elles, ce changement est influencé par leur posture d'éducatrice. Sophie révèle : « quoique mon attitude à changer un peu, j'essaie d'être à l'écoute même en soin, je ne fais plus à la place du patient pour ce qu'il peut faire. Et tout ça, ...ça s'apprend, forcément » (33'40). Si on se réfère à Dubar, au niveau « transaction biographique », il y a une rupture avec l'identité d'infirmière, qui détient les connaissances, et qui prend la décision pour le patient. Toutefois, pour ces trois infirmières, il y a production d'une nouvelle identité, associée à la pratique de l'ETP, adoptant un rôle d'accompagnement dans l'apprentissage pour le patient. Les compétences éducatives acquises en formation continue à l'ETP, ont permis à ces professionnelles de se situer différemment. Elles témoignent qu'elles ont vécu une évolution progressive dans leur comportement personnel et professionnel avec l'autre. Elles se sont alors investi dans leur relation avec le patient au moment du soin. Elles ont avoué dans leur témoignage, que l'ETP a changé leur manière d'être et de faire. Aussi, leur vision de ce qu'est le rôle d'infirmière avait changé. Sophie a verbalisé qu'elle se questionne sur ses attitudes personnelles et professionnelles depuis qu'elle pratique l'ETP : « Ça arrive une période où je me suis posé beaucoup de questions. Mais aussi dans ma vie personnelle avec mes enfants...Je m'aperçois que ma façon d'aborder mes enfants et là même qu'avec mes patients. Je ne les rendais pas autonome. ... j'ai réalisé que ma posture, elle était la même à la maison qu'au travail... » (16'43). Il s'agit d'une prise de conscience pour ces infirmières : elles revendiquent une identité d'infirmière éducatrice pour la prise en charge globale du patient, centrée sur l'individu et non pas sur le soin ; elles confirment que l'ETP a provoqué un changement identitaire professionnel et personnel profond dans leur attitude et comportement avec l'autre. Au niveau du « processus biographique », ces infirmières s'identifient à la manière de prendre en charge l'ETP : l'entretien avec Sophie a exprimé un sentiment de transformation identitaire personnel en évolution sur le plan professionnel. Elle a réalisé que cette transformation va lui permettre d'évoluer : « de grandir...grandir dans mes habitudes... dans ma façon d'être, dans mon regard... ». L'entretien avec Laura a exprimé une reconnaissance d'une identité de soignante influencée par chaque nouvelle pratique « Ça perturbe forcément à chaque fois qu'il y a quelque chose de nouveau. Je pense que l'adaptation, elle est aussi pour nous. Ce n'est pas si facile de faire l'entretien éducatif... Ça nécessite des compétences... » (33'06). Toute nouvelle pratique génère des changements identitaires et, requiert un temps d'adaptation pour l'acquisition de ses compétences.

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    En ce qui concerne le « processus relationnel », les trois témoignages affirment qu'au niveau organisationnel dans le service, l'infirmière éducatrice reste isolée dans sa pratique ETP. Il y a « conflit de non-reconnaissance » du statut d'éducatrice, par les autres collègues de travail. Ces infirmières éducatrices vivent un processus de forme identitaire « relationnel pour soi » : selon Dubar, il s'agit d'une forme réflexive qui se caractérise par une « conscience réflexive » engageant les infirmières éducatrices dans un projet ETP ayant un sens subjectif. Ces infirmières, s'identifient au même statut de « référente en éducation », elles partagent le même projet même si elles ne travaillent pas dans le même service. Donc, au « Nous » correspond un « Je » réflexif désirant de se faire reconnaître par « des autrui significatifs » exerçant le même métier d'infirmière (les collègues du service). En service de Cardiologie, Sophie raconte que l'activité ETP ne fait pas partie des priorités du service, elle ne témoigne d'aucune transformation par rapport à l'organisation du système d'activités des soins, depuis l'intégration de l'ETP : « L'éducation passe au second plan. Ce n'est pas une priorité. Le curatif est prioritaire dans le service ». (19'44). Les objectifs du service ne coïncident pas avec l'avenir de Sophie. Donc, elle doit défendre son identité d'infirmière éducatrice au sein du service. A l'HDJ et en unité de Diabétologie, Marie et Laura réalisent les séances éducatives de groupe avec d'autres professionnels. Il y a « coopération - reconnaissance » pour l'activité ETP, et une reconnaissance par des « autrui significatifs » pour l'identité professionnelle de ces deux infirmières éducatrices. Les patients représentent aussi des « autrui significatifs » pour ces infirmières éducatrices, le fait qu'ils participent aux séances éducatives et qu'ils adhèrent à la démarche de l'ETP. Ces patients ont permis aux éducatrices : de se sentir reconnu dans cette identité professionnelle et, valoriser par rapport à la pratique de l'éducation. L'interviewé Marie a dévoilé une reconnaissance verbale et expressive de la part des patients en séance éducative : « l'éducation pour moi, c'est valorisant en tant que soignante. Parce que, soignante ...dans un service classique ...on n'a pas toujours le retour. Quand on fait de l'éducation, moi je trouve qu'on a beaucoup de retour...on demande aux patients s'ils sont contents. » Cette valorisation n'est pas aussi perçue en soin. « ...je fais la chimio...je ne vais pas lui demander s'il est content... » (33'51). La pratique de l'ETP apporte un équilibre à la pratique du soin pour les infirmières éducatrices.

    La formation continue à l'ETP, a aidé les infirmières éducatrices à prendre conscience et à revoir leurs pratiques d'infirmière. Grâce cette formation et à la pratique de l'ETP, ces infirmières ont acquis un nouveau « savoir professionnel » impliquant des articulations entre savoirs technique du soin et savoirs relationnel de l'ETP, qui sont au centre de l'identité

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    structurée par le rôle de l'infirmière éducatrice. Ce rôle est bloqué dans sa consolidation. Selon Dubar (2015), ce savoir est associé à une logique de la qualification dans le travail (faire). L'identité de ces infirmières éducatrices « est appelée aujourd'hui à se reconvertir ou à se restructurer en fonction de ces normes nouvelles de compétences » (p. 234). Afin de partager ce nouveau savoir professionnel avec les autres infirmières du service.

    Les interviewées recommandent vivement la formation ETP à leurs pairs. Elles reconnaissent que l'exercice dans les services à pathologies aiguës ne permet pas d'acquérir certaines capacités nécessaires à la pratique de l'éducation. Pour ces infirmières éducatrices, la formation à l'ETP est nécessaire dans les services à pathologie chronique. Toutes les infirmières auront les mêmes habitudes et techniques de travail. Elles reconnaissent aussi que cette formation ne peut pas être imposé ou proposé à toutes les infirmières pour des raisons liées aux moyens financiers. Laura témoigne : « ...la formation nous aide à prendre conscience de ces compétences. ...pour moi un soignant qui va exercer...d'une manière ponctuelle, je dis pour des pathologies aiguës...il ne va pas avoir développé au cours de son expérience une expertise en éducation thérapeutique... » (14'57) « en diabéto je dirai oui, c'est très important du moment qu'on traite une pathologie chronique, aussi tout le monde sera sur le même fil pour la continuité, pour l'organisation, c'est important, en plus si tout le monde pratique l'éduc, on aura les mêmes visions, regard, ...Les mêmes compétences, le même langage... Peut-être là moi je procède autrement , j'ai plus d'écoute, ...oui ça serait bien si tout le monde est formé...Mais, il parait que c'est une question de budget... » (39'42). La formation à l'ETP pourrait offrir une « coopération-reconnaissance » des infirmières aux infirmières éducatrices. Cette reconnaissance va résoudre leur conflit identitaire professionnel. La formation des pairs permettrait aussi d'éviter l'isolement de l'éducatrice dans son activité ETP.

    En effet, les changements décrits par les interviewées, ont impacté leur identité professionnelle d'infirmière. Celle-ci se retrouve dans un mouvement de construction, de déconstruction et de reconstruction suite à l'intégration de l'activité ETP au rôle propre de l'infirmière. Il faut admettre que les différentes pratiques sollicitées par l'activité ETP, exigent une évolution du métier de l'infirmière et génèrent des besoins d'acquisition à de nouvelles compétences pendant le parcours professionnel.

    Tous ces outils nous ont permis de valider notre deuxième hypothèse.

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    3- Discussion

    Cette partie représente pour nous l'occasion de rapprocher les différentes clés théoriques, aux résultats de notre étude après vérification des hypothèses de travail dans la partie précédente. Notre étude ne peut représenter que les trois les infirmières éducatrices exerçant dans les services à pathologie chronique. Les autres professionnels de santé ont probablement un regard différent sur la pratique éducative, étant donné les recommandations de l'HAS qui précisent bien que, l'ETP doit être pratiqué par une équipe pluridisciplinaire. Cela pourrait constituer un autre biais de représentativité. Les réponses obtenues de notre enquête ne peuvent prétendre absolument à l'exhaustivité car, les données recueillies auprès des interviewées sont des réponses orales non accompagnées d'aucun document écrit (synthèse sur l'activité ETP, compte rendu de réunions, bilan de réalisation, ...) et le fait aussi que, la pratique éducative soit récente à l'hôpital de Blois (depuis 4 ans).

    L'infirmière au coeur de la pratique éducative : au travers de cette enquête, je constate que le professionnel au coeur de l'activité ETP est l'infirmière. Elle participe davantage à l'élaboration des programmes éducatifs que les autres professionnels de santé (médecin, diététicienne, kinésithérapeute...), comme le stipule les recommandations de l'HAS (2007). Bien que ces professionnels de santé aient un rôle important dans l'élaboration et l'initiation des programmes d'ETP, ces derniers ne collaborent qu'aux séances collectives, selon les disponibilités de chacun. Par exemple, les kinésithérapeutes n'ont pas de temps dédié à l'activité éducative, et ne participent pas au diagnostic éducatif, alors que celui-ci « ... est au mieux le fruit de la collaboration d'une équipe multi-professionnelle... » (HAS/INPES, 2007, p. 27). Je pense pour ma part que, la réalité n'est pas si simple pour l'infirmière éducatrice, puisqu'en plus du diagnostic éducatif, elle doit aussi assumer seule la prise en charge des séances individuelles. C'est vrai que les interviewées ont avoué que ces séances offrent une meilleure écoute des patients et permettent une prise en charge plus personnalisée. Mais d'un autre côté, elles s'avèrent chronophages pour les éducatrices et ne permettent pas le partage entre patients, puisqu'elles se réalisent dans le cadre d'un « tête à tête » avec l'éducatrice et nécessitent un temps de 45mn à 1h, pour chaque patient. Ces difficultés liées à la coordination et au manque de temps peuvent représenter un frein majeur à l'essor de l'ETP. L'interviewé Sophie a même révélé qu'elle n'avait pas d'autres choix que d'opter pour la méthode individuelle, parce qu'elle ne peut réaliser seule les séances collectives (autres professionnels non disponibles, temps de préparation et de réalisation important, manque de local pour recevoir le groupe...) Ce qui peut diminuer la pertinence de l'activité ETP, qui normalement,

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    se base sur l'échange et l'expérience entre patients et professionnels. D'autant plus que, ces séances individuelles doivent être destinées en priorité aux patients qui ont des difficultés à se retrouver en groupe et, qui ont une dépendance physique, sensorielle ou cognitive (HAS/INPES, 2007).

    L'infirmière entre le soin et l'éducation : deux rôles distincts qui se complètent : l'affirmation de ma première hypothèse me laisse penser que les interviewées se sont bien identifiées dans les six rôles infirmiers (accueil, aide, guide, accompagnement...) proposés par la théorie de Peplau (1952). A travers le statut de « référente en éducation », ces infirmières adoptent d'autres postures pendant l'activité ETP, que la posture habituelle d'infirmière. Il s'agit bien des postures de l'accompagnement professionnel (d'écoute, de non-savoir, d'échange, ...) décrites par Paul (2004). En effet, pour les infirmières éducatrices, l'ETP ne se réduit pas à la simple information mais elle la complète. Cela m'emmène à confirmer ce qu'à écrit Chantal Eymard (2010) : « l'ETP ne peut se réduire à l'information de savoirs ou de savoir-faire, car elle vise l'appropriation des savoirs... » (p.42), par le patient demandant un accompagnement de la part du soignant. Pour mes interviewées, cet accompagnement représente un choix politique, une commande de l'institution hospitalière. Mais cette mise en oeuvre de l'action d'accompagnement, ne garantit rien sur la posture de l'accompagnateur. Le fait que « l'accompagnement n'est pas un métier, il ne réfère à aucun cursus de formation identifié comme tel », comme l'a précisé Paul (2004). Le changement de posture n'est pas si simple pour les infirmières, il s'agit d'une posture d'accompagnement spécifique à l'ETP. Cette mission a été confiée aux infirmières, qui ont reconquis et adopté autre manière d'être et de faire dans le cadre de leur rôle propre considéré par Formarier (1990) comme un « rôle toujours nouveau, riche, multidimensionnel, difficile et exigeant, » (p.52). Cette nouvelle posture a provoqué un changement dans l'organisation du système d'activités des soins pour ces infirmières. Ce changement est vu par les auteurs Fried et Fottler (2010), comme « un processus qui vise à modifier, enrichir, élargir les fonctions et les tâches des employés, [...] améliorer leur satisfaction au travail et la performance de l'organisation » (p.162). Ce changement est aussi aperçu au niveau des habitudes de travail et par rapport à la relation infirmière/patient. Mais, d'après l'enquête, l'activité éducative ne semble pas être imposée à tous les professionnelles exerçant dans les services de soins, les infirmières ont le choix de ne pas être éducatrices. Je me suis aperçue aussi, d'après les verbatims des interviewées, que la pratique de l'ETP peut ne pas être « désirée » par toutes les infirmières, surtout par celles qui exercent en services à pathologie aiguë, la charge et les

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    conditions de travail ne leur permettent pas d'assurer la prise en charge globale du patient. Pareillement, je pense que l'ETP en tant qu'activité n'est pas assez vulgarisée par les responsables pour que les infirmières puissent se familiariser avec les compétences de sa pratique et l'adopter à leurs pratiques quotidiennes. Dans ces conditions l'ETP risque d'être défavorisée par rapport à l'activité de soins.

    Des compétences et des modèles pédagogiques mobilisés pour la pratique éducative : cependant être infirmière éducatrice ne peut s'exercer sans la formation continue à l'ETP. Cette formation est proposée par l'hôpital qu'à une seule infirmière par service sauf pour le service de diabétologie, qui cite six infirmières formées sur 24. Ce chiffre représente le 1/4 de l'effectif infirmier dans ce service. D'après l'enquête, cette démarche est justifiée par le manque de moyens financiers ne permettant pas à l'activité ETP d'être pratiqué par toutes les infirmières. Il faut reconnaître que c'est par le biais de la formation continue, que les infirmières éducatrices ont acquis d'autres compétences que les soins curatifs. Sans oublier que les compétences de l'ETP sont considérées par l'OMS « non comme un état, mais comme un processus qui permet de mettre en synergie des ressources multiples dans une situation professionnelle » (HAS, 2007). Les éducatrices mobilisent donc des ressources à dimension normative comme les attitudes, l'écoute, les normes, l'identité, ... Ainsi, la compétence éducative a permis aux infirmières de mettre en oeuvre un ensemble diversifié de pratiques éducatives (diagnostic éducatif, séances, écoute, échange, reformulation, valorisation...), et coordonner des ressources éducatives aux soins qui leur a permis une meilleure prise en charge du patient. Selon l'INPES (2013), « cette compétence est à appréhender comme un savoir agir reconnu dans un environnement et dans le cadre d'une méthodologie définie ». Ce qui explique le sentiment d'implication dans le rôle éducatif exprimé par mes interviewées. D'un autre point, au travers de l'analyse des matériaux recueillis, il apparaît que les éducatrices se servent des trois modèles pédagogiques pour l'accompagnement en ETP: elles se servent de la « pédagogie traditionnelle », pour pratiquer les séances individuelles ; elles s'appuient sur la « pédagogie béhavioriste » pour l'apprentissage de gestes techniques ou de réflexe de santé (auto soin, choix habitudes alimentaires...) ; et sur la « pédagogie constructiviste », pour réaliser les séances de groupe (l'échange et le partage de connaissances). Le premier modèle reproduit le modèle universitaire, qualifié par A. Giordan, (2010) comme une pédagogie empirique qui suppose « qu'apprendre est un simple processus de communication, comportant un décodage, puis une mémorisation » (p. 2). C'est un modèle pédagogique qui n'apparaît pas totalement dépassé. Il peut se révéler très efficaces en ETP,

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    « si le soignant et le patient se posent le même type de question ,
    · s'ils possèdent le même cadre de référence, à commencer par le même vocabulaire ,
    · ...
    » (p. 3) Le deuxième modèle (béhavioriste) demeure très limité pour Giordan du fait qu'il intervient peu sur la motivation du patient, les désirs et les intentions de celui-ci étant peu pris en compte. Le troisième porte un intérêt pour les expériences d'entraînement en groupe, se contentant de valoriser un apprentissage coopératif et des réunions entre patients.

    L'ETP, une pratique réflexive qui transforme l'activité quotidienne de l'infirmière : il est vrai que ces infirmières avouent que dans certaines situations, elles ne savent plus dans quelle posture se mettre. Le changement de posture ne parait pas si simple, il faut un temps d'adaptation. L'infirmière éducatrice doit s'adapter à son nouveau système et aux conditions de travail dont lesquelles elle est contrainte pour se ressourcer et réaliser son activité. Il s'agit de devenir un « praticien réflexif » selon le concept de Donald Schön (1983), et de réalisé un « travail réflexif », considéré par Dubet (1994), « [...] d'autant plus intense que les individus se trouvent dans des situations qui ne sont pas entièrement codifiées et prévisible, ... » (pp. 103-104). Ce qui explique les situations qui ne relèvent pas du prescrit.

    Pour le suivi des patients et de leur apprentissage, l'éducatrice doit refaire le diagnostic éducatif, une tâche qui n'est pas toujours réalisable, elle voudrait se servir alors des moyens dont elle dispose dans son environnement comme le suivi téléphonique pour réaliser le but qu'elle avait fixé.

    L'identité de soignante éducatrice : une nouvelle façon d'être et de se comporter. L'identité professionnelle de l'infirmière est dans un mouvement permanent de construction, de déconstruction et de reconstruction suite à la mutation de son système d'activité qui inscrit l'ETP dans son rôle propre. Comme je l'ai déjà précisé, ce changement lui exige des modifications dans ses habitudes personnelles et professionnelles, dans sa posture d'infirmière, dans sa relation avec le patient. Il s'agit d'une évolution de son métier d'infirmière. Cette évolution engendre des transformations identitaires. Cette seconde hypothèse a, elle aussi, été vérifié selon plusieurs axes, grâce à la richesse des données au sujet de l'identité professionnelle. Je pense que la référente en éducation a commencé à se distinguer des autres infirmières, depuis l'intégration de l'ETP à ses pratiques. Elle réalise aussi que, les patients l'identifient plus par rapport à son rôle éducatif : « C'est un système de sentiments et de représentations de soi, [...] C'est aussi, ce qui me rend semblable à moi-même et différent des autres, ... ce par quoi je me définis et me connais, me sens accepté et

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    reconnu comme tel par autrui, mes groupes et ma culture d'appartenance », il s'agit de la « connaissance et reconnaissance de ce que l'on est ». (Tap, 1986, p.8).

    J'ai déjà noté que les éducatrices ont pris conscience que la nouvelle façon d'être et de se comporter avec le patient représente pour elles autant d'importance que le soin. Ainsi, l'identité de l'éducatrice se construit à travers la posture éducative par l'acquisition de certaines compétences comme la posture communicative, l'écoute active, ... Ceci n'est pas sans rappeler l'identité au travail que Dubar (1992), considère comme le produit d'une socialisation. Aussi, si je considère le service de soins (curatif et éducatif) comme un lieu de construction identitaire, par voie de socialisation, comme le souligne Dubar, l'organisation dans laquelle s'inscrit l'expérience professionnelle de l'infirmière éducatrice constitue un lieu fondamental pour la reconstruction de son identité professionnelle. Dans ce sens, l'identité d'infirmière peut être rapproché de l'identité d'éducatrice, au sens de l'apprentissage formant ainsi une nouvelle identité d'infirmière, complétée par celle de l'éducatrice. Les infirmières éducatrices considèrent l'éducation comme un moyens efficace de se réaliser, de s'épanouir, de se sentir valoriser. La pratique de l'ETP confère ainsi une identité professionnelle à ces infirmières éducatrices, et contribue également à la construction d'une identité collective, représentée par les infirmières référentes en éducation.

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    4- Conclusion

    1- Résumé de la recherche

    Je suis partie de l'idée que l'ETP devient une nécessité dans la pratique infirmière. Que la loi 2009 allait inciter les professionnels de la santé à changer leurs façons de faire et d'être dans leur travail au quotidien. Que cette activité thérapeutique s'accomplit par une équipe pluridisciplinaire. Que ces nouveautés de pratiques éducatives allaient solliciter un engagement des infirmières dans la transformation de leurs pratiques en adoptant une nouvelle posture d « infirmière éducatrice » et, que ces transformations allaient impacter leur identité professionnelle. Devant ce constat, j'ai centré ma problématique sur l'impact de l'introduction de l'activité ETP sur les transformations à la fois vis-à-vis des pratiques infirmières mais aussi, de l'identité professionnelle pour ces professionnels de santé. Afin de vérifier ces idées, j'ai d'abord procédé par une recherche documentaire dans le but d'identifier les caractéristiques des pratiques professionnelles de l'ETP. Ensuite, j'ai développé deux hypothèses : la première s'appuie sur la théorie de l'interaction de la théoricienne H. Peplau (1952) et, sur les méthodes de l'accompagnement professionnel démontré par M. Paul (2004), pour traiter la question de la reconnaissance et l'acceptation du rôle d'éducatrice par l'infirmière. Afin de vérifier si son implication dans ce rôle lui permet de mieux se situer dans son activité de soins et de mieux situer les besoins du patient en termes éducatifs et curatifs ; La seconde hypothèse, s'appuie sur la socialisation et la construction identitaire professionnelle de C. Dubar (1998 ; 1992). Elle aborde l'identité professionnelle de l'infirmière qui s'est retrouvé dans un mouvement permanent de construction, de déconstruction et de reconstruction suite à la mutation de son système d'activités qui inscrit l'ETP dans son rôle propre.

    Pour vérifier ces deux hypothèses sur le terrain, je me suis appuyé sur deux outils méthodologiques : l'observation ethnographique, et les entretiens semi directifs. Pour tenter d'identifier les changements des pratiques infirmières résultant de l'introduction de l'activité ETP à celle de soignante, j'ai effectué un stage pratique auprès d'un hôpital public prenant en charge les pathologies chroniques. J'ai recueilli des propos de trois infirmières impliquées dans des activités éducatives et, je les ai analysés au regard de leurs propos vis-à-vis de leurs activités, leurs rôles et leurs attitudes avec le patient pendant les deux activités (soin et éducation).

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    2- Cheminement de la recherche

    L'idée de concevoir un travail sur l'impact de l'introduction d'une activité éducative à l'activité de soins infirmiers découle de mes expériences professionnelles, qui relèvent de deux domaines différents notamment, la santé et la formation. Ces deux expériences professionnelles (aide-soignante et chargé de la formation continue) ont suscité en moi une curiosité et un intérêt pour l'enseignement et l'apprentissage en lien avec la pratique éducative en milieu hospitalier. Le terme « éduquer » m'a interpellé, je me suis posé des questions sur le degré de connaissance de l'infirmière des modèles éducatifs, elle qui ne connaît que le curatif, aussi sur sa capacité à intégrer la dimension éducative au soin, elle que je vois constamment « dépasser » par les différentes tâches de soins liés aux conditions de travail. Pour répondre à cette curiosité, j'ai décidé d'orienter mon thème de recherche vers l'intégration de l'activité ETP aux soins. Je sais que je ne vais pas être une future éducatrice, mais cette expérience m'aurait rapproché du vécu des infirmières en situation de changement professionnel et identitaire, le fait que je voudrais réintégrer la formation continue et concevoir des formations d'accompagnement et d'analyse de pratiques professionnelles. Pour concrétiser ma recherche, il me fallait donc trouver des réponses à mes hypothèses et, trouver un lieu de stage pour les vérifier. J'avoue que c'était la tâche la plus difficile, j'ai tout de suite été confrontée à des réticences voire des refus relatifs à mon investigation. Je savais que l'entrée dans le milieu hospitalier était presque irréalisable pour les stagiaires hors cursus médical ou paramédical. Mon statut de soignante m'a encouragé à rester positive. Mais, au contraire je n'étais pas vu comme une aide-soignante en réorientation professionnelle, mais comme un intrus qui vient « espionner » les soignants dans leur travail, c'est ce que j'avais compris à travers les refus successifs. J'ai donc fait le choix d'une autre stratégie : élargir mon terrain de recherche et changer la présentation du projet en ciblant les patients et non plus les soignants, et en me présentant entant qu'étudiante en science de l'éducation. J'avoue que durant toute ma période de stage, je n'ai jamais évoqué mon statut de soignante pour mettre les infirmières en confiance. J'avais raisons, mon stage s'est déroulé dans les bonnes conditions. J'avoue qu'au départ mon intention était d'enquêter auprès d'une équipe pluridisciplinaire, pour bien répondre à ma problématique, mais la non disponibilités des professionnels de santé (médecins, kinésithérapeutes, diététiciens, ...) m'a emmené à consacré mon enquête au travail de l'infirmière.

    Mon expérience de chercheur, m'a permis de me rapprocher du ressenti et du vécu des infirmières, d'apercevoir dans leur regard des étincelles de joie d'être les référentes en

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    éducation, d'entendre des expressions de valorisation pour la pratique éducative, et en même temps, j'ai aperçu des inquiétudes quant au devenir de cette pratique. A l'issue de ce travail de mémoire, je prends conscience de la chance que j'ai, d'avoir découvert une nouvelle vision du travail de l'infirmière et de ce fait aussi, une nouvelle posture d'accompagnement, dont je m'inspirerai éventuellement lorsque je serai en poste de coache.

    3- Résultat de la recherche

    En réponse à mes hypothèses, je sais aujourd'hui que l'introduction d'une nouvelle pratique aux pratiques quotidiennes d'un professionnel transformerait tout autant la pratique habituelle que l'identité des acteurs. Je sais également, que l'activité ETP complète l'activité de soins chez les infirmières éducatrices. Je suis déçu de découvrir que les compétences de l'activité ETP ne soient pas partagées par une équipe pluridisciplinaire : contrairement aux volontés législatives, l'infirmière se retrouve seule dans une nouvelle fonction de soin éducatif, elle réalise seule le diagnostic éducatif et les séances individuelles, à la différence du soin qui mobilise des compétences collectives, formelles et partagées. L'éducation semble ainsi représentée un moment unique séparé du parcours de soin. J'ai compris à travers les propos des interviewés que la pratique éducative les isole de leurs pairs, étant celle-ci non partagée par tous les soignants. Ce qui peut représenter un frein majeur pour l'ETP étant le nombre de détendeurs de la compétence éducative limité dans un service de soin. Enfin, je constate qu'au travers de la pratique éducative apparaît une compétence réflexive commune aux trois infirmières éducatrices. Cette capacité réflexive représente une prise de conscience par rapport aux activités du métier d'infirmière. Les infirmières se sentent connues et reconnues dans ce nouveau statut d'infirmière référente en éducation. Cette activité ETP malgré qu'elle les isole de leurs pairs, elle s'accompagne d'un renforcement identitaire qui a conduit les infirmières interviewées à se sentir valoriser de part cette pratique, malgré qu'elle demeure pratiquée de très peu d'infirmières.

    4- Prolongation de la recherche

    Au travers de l'analyse des données recueillies dans les entretiens, je me suis aperçue que l'activité ETP en tant que telle n'a jamais été évaluée. Les trois éducatrices témoignent qu'aucun suivi professionnel n'a été effectué depuis l'intégration de cette activité à leur

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    quotidien. Néanmoins lorsque j'ai demandé à Laura de me décrire le mode d'évaluation de sa pratique éducative, celle-ci répond qu'il n'y a pas le suivi d'un professionnel : « Qui nous dirait si c'est ça ce qu'on fait. L'analyse des pratiques qu'est ce qui la fait. ...l'analyse de l'activité...il faut justifier de nos formations d'éducation thérapeutique. Mais qui vient nous évaluer sur le terrain pour nous dire que finalement, on ne fait pas juste ce qu'on fait, ...on prend pas juste un thé avec le patient...et...ben personne...on remplit des dossiers sur l'ordi...qui regarde et remarque ce que je marque en compte rendu...qui...pas du tout. Personne, il n'y a personne qui regarde ce qu'on fait... je pense. Il n'y a pas de continuité pour le suivi, rien pour l'instant » (35'04). Ces propos m'ont conduit à réaliser que la question de l'analyse et l'évaluation de la pratique ETP mériterait un prolongement de recherche. L'infirmière a exprimé le besoin de remettre en question son action éducative, les exigences professionnelles l'obligent à jeter un regard critique sur son agir afin d'améliorer continuellement ses savoirs et ses savoirs faire, afin de parvenir à un savoir-être accompli. Il s'agit de devenir un « praticien réflexif » selon le concept de Donald Schön (1983). C'est vrai que, l'HAS/INPES (2007) avait proposé dans le guide méthodologique de l'ETP une grille d'évaluation pour l'ETP, mais celle-ci nécessite que les professionnels de santé aient déjà une expérience en ETP suffisante. A mon avis l'analyse des pratiques professionnelles répondrait bien aux préoccupations des infirmières éducatrices, elle représenterait un moyen informel de procéder à l'évaluation de la qualité des pratiques éducatives. Je me pose alors la question sur l'outil qui répondrait à la question suivante : Quel outil d'analyse de pratiques professionnelles pour évaluer la pratique éducative des infirmières éducatrices ?

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    Table des abréviations

    B.O : bulletin officiel.

    CII : conseil international des infirmiers.

    ETP : éducation thérapeutique du patient.

    HAS : haute autorité de la santé.

    HCSP : haut conseil de santé publique.

    HDJ : hôpital de jour.

    HPST : hôpital, patients, santé et territoire.

    IDE : infirmier diplômé d'état.

    INPES : institut national de prévention et d'éducation pour la santé.

    OMS : organisation mondiale de la santé.

    ONI : ordre national des infirmiers.

    SFSP : société française de santé publique.

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    Bibliographie

    Accompgner: Une idée neuve en éducation. In: Marlyse Pillonel & Jean Rouiller., "Faire appel à l'auto-évaluation pour développer l'autonomie de l'apprenant. (2001). Cahiers Pédagogiques n°393.

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    122

    123

    Partie Annexes

    124

    Annexe n°1 : Le cadre législatif de l'ETP 126

    Annexe n°2 : Les compétences requises pour dispenser l'ETP 127

    Annexe n°3 : Les grands modèles pédagogiques de l'ETP 128

    a) Le modèle de la pédagogie classique 128

    b) Le modèle de la pédagogie behavioriste 128

    c) Le modèle de la pédagogie constructiviste 129

    d) Le modèle de la pédagogie allostérique 129

    Annexe n°4 : Questionnaire adressé aux infirmières éducatrices 131

    Annexe n°5 : 132

    Script de l'entretien avec Infirmière à l'Hôpital de Jour 132

    Script de l'entretien avec Infirmière en unité de Diabétologie 145

    Script de l'entretien avec Infirmière en service de Cardiologie 157

    125

    126

    Annexe n°1 : Le cadre législatif de l'ETP

    Une succession de textes officiels ont fait l'objet d'une volonté politique de faire de l'ETP l'une des priorités en matière de santé publique.

    · En 1980, le Comité des ministères réuni au conseil de l'Europe déclare que toute personne a le droit de connaître l'information recueillie sur sa santé et recommande les programmes privilégiant la participation active des maladies à leur traitement.

    · En 1998, l'OMS rédige les compétences attendues des soignants dans ce domaine. Ils doivent alors être en mesure d'organiser, mettre en oeuvre et évaluer des programmes et des activités d'éducation thérapeutique, en prenant en compte les singularités des patients (expérience, représentation), et en se centrant sur leurs apprentissages à "gérer leur maladie" dans le quotidien.

    · En février 1999, le Manuel d'accompagnement des établissements de santé prévoit que le patient bénéficie "des actions d'éducation concernant sa maladie et son traitement et des actions d'éducation pour la santé, adaptées à ses besoins".

    · En 2000, la conférence nationale de santé souligne l'intérêt de développer la prévention et l'éducation, dans une approche de promotion de la santé. Le souhait de voir se renforcer l'éducation thérapeutique du patient et de diffusion des pratiques professionnelles éducatives à l'ensemble des futurs intervenants du domaine de la santé est mentionné (proposition n°8).

    · En avril 2007, un plan d'amélioration de la qualité de vie des patients atteints de maladies chroniques énonce quatre objectifs : aider chaque patient à mieux connaître sa maladie pour mieux la gérer, élargir la pratique médicale vers la prévention, faciliter la vie quotidienne des malades, mieux connaître les conséquences de la maladie sur leur qualité de vie.

    · En juin 2007, un guide méthodologique présente les éléments fondamentaux de "structuration d'un programme d'éducation thérapeutique du patient dans le champ des maladies chroniques".

    · En juillet 2009, la loi portant réforme de l'Hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires est consacrée à l'éducation thérapeutique du patient. Elle est pour la première fois reconnue comme thérapeutique à part entière avec son cadre, ses finalités et ses modes de financement dans une loi de santé publique.

    · La loi du 4 mars 2002, affirme le droit de toute personne d'accéder aux informations relatives à sa situation de santé [...] et d'être reconnue comme un acteur partenaire de sa santé avec les professionnels.

    127

    Annexe n°2 : Les compétences requises pour dispenser l'ETP Ces compétences sont émises par l'INPES (2013).

    1- L'accueil de la personne soignée et son entourage :

    - Entretien d'accueil de la personne en institution de soins, d'éducation, ou en entreprise,

    - Prise de contact et entretien avec la (ou les) personne (s) pour la réalisation de soins au domicile,

    - Présentation des personnes, des rythmes, des installations et des services mis à disposition pour soigner,

    - Recueil de l'adhésion ou de la non- adhésion de la personne à ses soins,

    - Vérification des connaissances de la personne ou du groupe sur la maladie, le traitement ou la prévention.

    2- Ecoute de la personne et de son entourage :

    - Relation d'aide et soutien psychologique,

    - Entretien d'accompagnement et de soutien,

    - Médiation entre des personnes et des groupes,

    - Accompagnement de la personne dans une information progressive,

    - Entretiens de suivi auprès de la personne, de sa famille et de son entourage.

    3- Information et conseils sur la santé en direction d'une personne ou d'un groupe : - Vérification de la compréhension des informations et recueil du consentement aux soins, - Information sur les soins techniques, les examens, les interventions et les thérapies..., - Informations et conseils éducatifs et préventifs en matière de santé,

    - Conseils à l'entourage de la personne ou du groupe : famille, amis, personnes ressources dans l'environnement (milieu du travail, milieu scolaire...),

    - Informations sur les droits de la personne, l'organisation des soins et les moyens mobilisés,

    - Entretien d'éducation et conseils visant à renforcer ou promouvoir des comportements adéquats pour la santé, ou modifier des comportements non adéquats,

    - Entretien d'aide visant à la réalisation de choix de santé par la personne.

    4- Information et éducation d'un groupe de personnes : - Création et organisation de conditions nécessaires à la dynamique du groupe,

    - Animation de séances éducatives et d'actions de prévention,

    - Transmission de connaissances aux personnes à propos de leur santé.

    128

    Annexe n°3 : Les grands modèles pédagogiques de l'ETP

    Sur quels courants théoriques reposent les diverses pratiques pédagogiques de l'ETP ? Tous les écrits que nous avons consultés, affirment que la notion de l'éducation thérapeutique s'est fondée en combinant les modèles des sciences de la psychologie, de la sociologie, de la psychologie sociale, de l'anthropologie et les modèles de science de l'éducation avec ceux de la médecine (modèle biomédical).

    Nous nous basons sur le travail de C. Eymard (2003, 2010) et sur l'étude de A. Giordan (2010), pour présenter une synthèse des grands modèles pédagogiques, que ces auteurs estiment en lien avec la pratique de l'ETP.

    Comme nous l'avons déjà précisé dans la première partie de ce travail, l'ETP ne peut se réduire qu'à la simple information de savoirs ou de savoir-faire, celle-ci vise l'appropriation de ces savoirs et savoirs faire par les malades. Elle exige un modèle d'apprentissage spécifique. D'après Eymard (2003), malgré la tentation de nombreuses disciplines à faire sortir l'ETP de la seule logique de l'information « Toutefois, les notions et concepts ne sont pas toujours explicités et référés, ce qui rend difficile leur appropriation par les professionnels » (p. 42). En effet, l'ETP se décline suivant les lieux d'enseignement, selon quatre grands modèles pédagogiques (classique, behavioriste et constructiviste), que nous tentons de présenter.

    a) Le modèle de la pédagogie classique

    Nommé aussi « pédagogie traditionnelle, frontale ou transmissive ». La pédagogie classique présente deux caractéristiques à savoir : le guidage par l'enseignant et la mémorisation par l'apprenant. Cette forme classique d'enseignement, nous l'avons tous connue à un moment donné de notre cursus scolaire. L'enseignant transmet des connaissances (fait le cours, expose et explique). L'apprenant écoute, prend des notes et mémorise. Sans l'intervention de l'enseignant par le guidage, ce modèle ne peut être en pratique. Il sollicite la mémoire de l'apprenant par l'assimilation du message transmis par l'enseignant. D'après Giordan (2010, p. 2), la transmission des connaissances de ce modèle serait donc à sens unique, l'enseignant détient le savoir, l'apprenant se contente de le recevoir. Il s'agit d'un rapport unilatéral selon Giordan. Pour lui, si on applique ce modèle pédagogique pour ETP, le soignant serait considéré comme le détenteur du savoir, il a le rôle « d'émetteur », et le patient serait le « récepteur », il enregistre et mémorise les messages transmis par le soignant. En plus du rôle de transmetteur, le soignant peut éduquer en s'appuyant sur des illustrations (photos, schémas...). Giordan rajoute que ce modèle pédagogique n'apparaît pas totalement dépassé. Il peut se révéler très efficaces pour ETP : « si le soignant et le patient se posent le même type de question ; s'ils possèdent le même cadre de référence à commencer par le même vocabulaire ; s'ils ont une façon identique de raisonner ; s'ils produisent du sens de la même façon » (p. 3). Par contre, les limites de ce modèle pour Giordan, peuvent s'identifier dans : le décalage entre le patient et le savoir médical ; la grande distance entre le soignant et le soigné ; le mode de raisonnement et la culture de chacun ; leur préoccupation et attentes qui peuvent être très diverses (p. 3).

    b) Le modèle de la pédagogie behavioriste

    D'après C. Eymard (2010, p. 42), les fondements théoriques du behavioriste remontent jusqu'à Aristote. Le terme béhavioriste a été introduit aux sciences de la psychologie par le psychologue américain John Watson au XXe siècle, qui avait repris les travaux du physiologiste russe Pavlov, en élaborant la théorie psychologique du stimulus-réponse par rapport au comportement humain. Selon Eymard, Watson suppose que les humains naissent avec des réflexes et des réactions émotionnelles (l'amour, la rage...) et tout autre comportement est le résultat des associations stimulus-réponse crées par le conditionnement.

    129

    Donc, l'apprentissage est expliqué par une modification du comportement et cette modification est la conséquence d'une réponse à des stimuli externes d'après Giordan (2010, p. 2). Pour lui, en ce qui concerne l'ETP, cette approche a été appliqué dans des exercices « autoprogrammés » sur papier ou sur ordinateur comme : les enseignements assistés par ordinateur (EAO) et les exercices de pratiques thérapeutiques (Gestalt the-rapy, thérapie familiale) qui sont surtout développé dans les pays anglo-saxons. L'auteur rajoute que le seul avantage de cette pédagogie béhavioriste par rapport à la pratique de l'ETP, repose sur l'apprentissage de gestes techniques (dosage de glycémie), et sur l'apprentissage de réflexe de santé (savoir renoncer à un aliment). Mais, cette approche demeure très limitée pour Giordan, le fait qu'elle intervient peu sur la motivation du patient, étant les désirs et les intentions du patient peu pris en compte. Pour l'auteur, ce modèle pédagogique renonce à comprendre le moral du patient.

    Pour Chantal Eymard (2010), l'ETP s'inscrit dans cette approche behavioriste lorsqu'elle privilégie la transmission des savoirs pour éviter les complications de la maladie d'un patient, étant ce dernier considéré comme ignorant des savoirs en lien avec la santé. Cette méthode apporte des réponses types à mettre en oeuvre par le soignant. Dans ce cadre, l'éducation thérapeutique s'inscrit dans un rapport expert/novice, ne prenant pas en compte l'apprenant dans ses dimensions cognitives, émotionnelles. Pour l'auteur, les compétences de l'éducateur s'évaluent sur son niveau de maîtrise des savoirs à enseigner et sur sa capacité à les transmettre (p. 45).

    c) Le modèle de la pédagogie constructiviste

    Pour C. Eymard (2010, p. 42), le modèle de la pédagogie constructiviste est fondé de la théorie de Piaget qui explique que : « tout est l'affaire d'assimilation et d'accommodation dans l'apprentissage ». L'auteur explique que la théorie de Piaget consiste à rattacher la nouvelle information à ce qui est déjà connu, de la greffer sur des notions en prenant en considération les « schèmes » dont dispose au préalable le sujet. Ces derniers sont réorganisés par les nouvelles données. Donc, l'apprenant fait entrer dans sa propre organisation cognitive les données du monde extérieur, les informations nouvelles sont traitées en fonction des acquis antérieurs, le sujet les « assimile ». En retour, il y a « accommodation », c'est-à-dire modification des pensées en place en fonction des circonstances nouvelles. Dans ce cas, Eymard explique que l'ETP devient « un processus personnel » centré sur l'apprenant. Par contre pour Giordan (p. 2), l'apprenant en ETP construit progressivement son savoir en travaillant avec d'autres personnes (le groupe) par le biais d'expressions et d'activités. Il s'agit de faire exprimer le patient, de le confronter en s'appuyant sur un conflit cognitif. L'auteur exprime qu'il est possible aussi de confronter le patient à la réalité par des exercices qui le conduisent à reformuler les idées ou les questions. Pour Giordan, cette méthode pédagogique constructiviste aborde le vécu du patient, son avantage porte sur le pouvoir de l'apprentissage à enrichir ou à modifier légèrement une croyance en lien avec la santé. D'après Giordan, l'ETP s'inscrit dans cette approche constructiviste lorsqu'elle vise la connaissance de soi du patient dans un environnement social. L'intérêt de cette approche, c'est les expériences d'entraînement en groupe, en valorisant un apprentissage coopératif des réunions entre patients. Le soignant éducateur a le rôle de l'organisateur. Pour l'auteur, ce modèle pédagogique employé en ETP favorise le développement des compétences psychosociales en tant qu'aptitude d'une personne à maintenir un état de bien-être mental, par rapport à sa propre culture, à son environnement et grâce aux relations entretenues avec le groupe.

    d) Le modèle de la pédagogie allostérique

    130

    Ce modèle pédagogique est présenté par A. Giordan (2010, p. 5). Il s'agit d'un nouveau modèle pédagogique proposé pour l'ETP. D'après l'auteur, les limites des trois approches pédagogiques, que nous avons synthétisé ci-dessus, ont conduit les experts de l'ETP à réfléchir sur un nouveau modèle connu sous le nom de « pédagogie allostérique », sans exclure les autres pratiques pédagogiques dans les limites de leurs possibilités. Cette nouvelle méthode, dirigée par le Professeur Alain Golay, est en cours de test et de développement au niveau du service d'Enseignement Thérapeutique pour Maladies Chroniques, auprès des Hôpitaux Universitaires de Genève.

    L'approche de cette « pédagogie allostérique » repose sur trois hypothèses complémentaires, à savoir : (1) l'importance des différentes interactions entre le patient, son corps, sa pathologie, son traitement, son environnement, son entourage, les soignants et le système de soins ; (2) la prise en charge de la personne dans ses cinq dimensions (émotionnelle, cognitif, sensoriel, méta cognitif et inter cognitif) ; (3) l'introduction d'une « pédagogie systémique » basée sur la transformation des conceptions, par le biais d'un « environnement didactique ». D'après Giordan, le but de l'introduction de la pédagogie systémique est d'emmener le patient à décoder un message, à comprendre sa situation et à changer de comportement. Le fait que le patient apprend à partir de ses conceptions (de ce qu'il est et de ce qu'il sait), il va transformer son savoir dans un processus de construction/déconstruction. Le soignant l'accompagne, le sensibilise et met en place l'environnement didactique nécessaire pour l'apprentissage en mobilisant les outils et les ressources éducatives.

    131

    Annexe n°4 : Questionnaire adressé aux infirmières éducatrices

    Sexe

    Age

    type de diplôme

    Ancienneté globale?

    Ancienneté dans le service?

    Quel est votre parcours professionnel ?

    L'activité ETP représente-elle un choix pour vous ?

    Que représente pour vous l'ETP ?

    Quelle distinction faites-vous entre les termes : Information, Éducation et persuasion ?

    Comment percevez-vous le rôle éducatif dans votre activité ?

    Percevez-une différence entre le rôle éducatif et le rôle infirmier ?

    Pouvez-vous me décrire la réalisation d'une activité éducative ?

    Dans votre exercice quotidien, mettez-vous en pratique ces mesures éducatives de l'ETP ? Si oui, de quelle manière et quel intérêt y trouvez-vous ?

    Avez-vous suivi une formation spécifique concernant l'ETP ?

    Quels sont les éléments qui vous paraissent favorables et défavorables à sa réalisation ?

    La pratique d'ETP influence-elle la relation infirmière/patient ?

    Si vous serez contraint de pratiquer l'ETP :

    Pensez-vous que cette pratique transformerait votre système d'activité actuel ?

    Si vous pratiquez l'ETP :

    Quelle est la place de l'ETP dans les soins quotidiens ? Quelle est la place et le rôle de l'infirmier dans une équipe pluridisciplinaire ? Le rôle propre légitime à l'infirmière ne sera t- il pas dissous dans cette équipe ?

    A votre avis quelles sont les qualités professionnelles à adopter pour avoir une posture éducative ?

    Les soignants ont -ils besoin d'une formation pour être éducateurs ?

    Avez-vous des observations à apporter sur le thème évoqué lors de cet entretien ?

    132

    Annexe n°5 :

    Script de l'entretien avec Infirmière à l'Hôpital de Jour
    Hôpital de Blois

    Entretien réalisé le 29/05/2015

    Nous allons faire un entretien d'une quarantaine de minutes, si vous êtes d'accord, cet entretien concerne votre activité d'éducatrice. Je vais donc vous poser quelques questions pour orienter le discours. Notre objectif n'est pas de juger votre façon de travailler. La majorité des questions sont ouvertes volontairement pour vous laisser répondre le plus spontanément possible, sans vous influencer.

    0'00

    Malika

    C'est quand vous voulez!

    0'01

    Marie

    Ça enregistre?

    0'02

    Malika

    Oui.

    0'03

    Marie

    Ben, je suis infirmière depuis 8 ans et référente en éducation thérapeutique depuis 3 ans à l'HDJ. Euh...on dit HDG. C'est l'hôpital de jour...Avant j'étais en médecine interne puis en cancérologie, je suis resté 5 ans.

    0'08

    Malika

    Le poste d'éducatrice thérapeutique est-il un choix pour vous ?

    0'10

    Marie

    Oui, oui c'est un choix. En fait, j'avais une collègue qui occupait ce poste. En fait ce n'est pas vraiment de l'éducation thérapeutique, mais elle éduquait les patients aux soins. Et quand elle est partie, j'ai demandé d'occuper son poste de référente...et voilà 3 ans déjà. Donc, suite au départ de ma collègue... alors, qu'il n'avait pas encore était fait...euh...donc, en 2011, j'ai en fait repris le premier atelier qui n'avait pas encore était fait.

    0'34

    Malika

    Comment vous avez commencé la pratique d'ETP dans votre service ?

    0'37

    Marie

    Alors, en fait en 2011, on a commencé comme ça. On a eu une réunion de travail avec la coordinatrice de l'ETP, médecins, diète, kiné, cadre. Donc, on a bien sûr fait une fiche pédagogique avec les déroulements de tous les thèmes. On nous a installé un logiciel pour entrer les infos des patients et créer le dossier éducatif. Euh...donc, il y a déjà toute la partie administrative à faire, ensuite le patient est recruté.

    0'58

    Malika

    Comment se déroule le recrutement du patient ?

    0'60

    Marie

    A l'HDJ on fait le recrutement sur l'ordi...on a dossier patient éducatif, on fait l'admission et on propose les ateliers après l'entretien éducatif.

    1'05

    Malika

    A qui proposez-vous le recrutement ?

    1'07

    Marie

    En fait au début ça a commencé comme ça. Donc, le recrutement des patients se fait directement à l'hôpital de jour. On recevait les patients qui venaient pour avoir leur injection, ou bien pour avoir une éducation sur les sous cutanés, et qui repartaient. On leur proposait de participer aux ateliers.

    1'25

    Malika

    D'accord, donc ils ne peuvent participer que s'ils sont recrutés ?

    1'27

    Marie

    A oui, il faut faire le dossier éducatif d'abord, le diagnostic éducatif.

    1'30

    Malika

    Le recrutement des patients relève-il d'une prescription médicale ?

    1'33

    Marie

    Au début c'était la rhumatologue de l'HDJ. Maintenant on n'est plus à ce niveau. C'est à dire que la rhumato nous les adressait et nous on faisait le diagnostic, on leur présentait les ateliers...euh...mais maintenant on propose aussi l'éducation...voilà.

    1'46

    Malika

    Et ça se passe comment ?

    1'48

    Marie

    Maintenant...d'ailleurs récemment, j'ai fait un p'tit flayer pour représenter un p'tit peu ce que l'éducation thérapeutique et présenter un p'tit peu tout...euh...les ateliers. Donc, on leur présente en fait à quoi sert un atelier, comment améliorer la qualité de vie, devenir acteur, mieux gérer sa pathologie chronique ... euh ... éviter les complications et les hospitalisations...En gros, c'est ça...créer un lien aussi, de rencontrer d'autres patients atteints de la même pathologie...voila ...mais qui ont des objectifs différents.

    2'17

    Malika

    La participation aux ateliers thérapeutiques est - elle obligatoire ?

    133

    2'20

     

    Marie

    Non, non. Ils valident ou pas. On ne peut obliger les patients à participer. En gros...c'est comme ils veulent...

    2'25

    Malika

    Dans ces conditions. Vous les attirez comment ?

    2'28

    Marie

    En fait, durant la première rencontre du diagnostic éducatif qui dure à peu près entre une demi-heure et une heure même...euh...ça dépend. Et ensuite, on propose les trois ateliers.

    2'42

    Malika

    Comment se fait le déroulement de ces trois ateliers ?

    2'45

    Marie

    Donc, le premier atelier intitulé « parlons-on » c'est avec moi-même et le rhumatologue...euh...et un pharmacien. Donc, à chaque fois, soit polyarthrite, soit spondyno-arthrite.

    2'56

    Malika

    D'accord.

    2'57

    Marie

    Le deuxième atelier avec une diététicienne. C'est sur comment adapter l'alimentation. Et le troisième atelier avec un kiné et un ergo...euh...un ergothérapeute. C'est sur les outils...enfin, les appareils, le matériel utilisé par les patients...son nom c'est pour votre quotidien.

    3'14

    Malika

    Vous proposez les ateliers qu'aux patients de l'hôpital ?

    3'17

    Marie

    Dans un premier temps le recrutement se passait qu'à l'hôpital de jour avec les patients du suivi. Ensuite on a essayé de s'ouvrir euh... on a présenté notre programme aux rhumatologues de ville. Pour qu'eux même puissent nous adresser des patients. Euh...on a aussi présenté le programme aux médecins traitants. Et en fait, on s'est retrouvé avec...voir des gens qui nous appellent. Voilà, on s'est retrouvé avec des gens qui sont suivi déjà même à Tours. Qui n'sont pas du tout suivi ici et qui ont leurs rhumatologues à Tours, et qui ont entendu parler de nos ateliers et qui prennent contact avec nous.

    3'56

    Malika

    Et vous les recrutez ces gens ?

    3'58

    Marie

    Oui, oui, moi je fais un premier contact...je fais un diagnostic éducatif et ils participent aux ateliers. Voilà...là c'est varié que depuis des années...et maintenant, on s'est vraiment ouvert.

    4'12

    Malika

    Comment procédez-vous pour la réalisation d'un atelier éducatif ?

    4'48

    Marie

    En fait le premier atelier...euh...en fait, moi j'ai déjà rencontré les patients lors d'un diagnostic éducatif. On fixe des dates. Je fais un planning sur l'année avec des dates pour les ateliers. Ben...et on bloque les dates et on convoque les patients. Généralement moi, la semaine d'avant je les rappelle deux mois avant pour confirmer les dates. Et je réserve la salle. Ah...je n'arrête pas de demander une collègue qui m'aide à faire l'éduc avec moi...euh...à deux c'est mieux.

    4'45

    Malika

    Combien d'atelier réalisez-vous par an ?

    4'48

    Marie

    Euh...ça nous fait 10 à 12 ateliers à peu près dans l'année.

    4'51

    Malika

    Le nombre de patient est-il limité par rapport aux ateliers ?

    4'55

    Marie

    Euh...alors...par exemple l'année dernière, j'ai fait 31 diagnostics éducatifs...et...on a fait si ma mémoire est bonne 12 ateliers. Alors...les ateliers...Enfin le premier atelier c'est toujours un choix de notre part qu'il y ait 5-6 patients pas plus. Parce que c'est vraiment ...euh...déjà la découverte et il faut vraiment un temps de parole...euh...c'est le premier...le fait d'accorder un temps de parole c'est vraiment important à chacun.

    5'22

    Malika

    Et pour les autres ateliers ?

    5'24

    Marie

    Et ben...le deuxième atelier et le troisième...enfin l'atelier diététique jusqu'à 8 personnes et le kiné on peut aller à 10. Parce que les kinés on a deux. Il y a des moments où on se sépare en deux groupes...voilà. Donc, le nombre euh...c'est un p'tit peu ...c'est aléatoire. Par contre des fois les gens ils n'viennent pas...euh voilà.

    5'45

    Malika

    Procédez-vous de l'éducation en individuel ?

    5'47

    Marie

    Alors...euh...je propose toujours les éducations à l'auto injection en individuel. Après...euh...les ateliers sont collectifs. Oui des fois ça nous arrive de faire un...En fait, moi je participe aux trois ateliers depuis maintenant 3 ans. C'est vrai que je commence un p'tit peu à maîtriser le sujet. Et par exemple au fait, on est arrivé à condenser les trois pour une dame qui est en fait assistante maternelle et qui ne pouvait pas du tout se libérer. Et l'atelier a duré à peu près deux heures. On s'est vu que toute les deux voilà. Elle avait le diagnostic éducatif, mais elle ne pouvait pas venir aux ateliers...

    134

    6'32

     

    Malika

    Avez-vous un jour programmé pour les ateliers ?

    6'34

    Marie

    Oui, c'est tous les jeudis. Voilà, et cette dame ne pouvait pas venir en semaine. Aussi, pour les jeunes qui ont des polyarthrites et qui travaillent. Ce n'est pas du tout pris en charge sur leur temps de travail. C'est sur leur temps personnel...Et pareil les bons de transport ne sont pas pris en charge. Donc...notamment pour ces gens qui ont des polyarthrites, c'est difficile pour eux par fois de pouvoir venir par leurs propres moyens. Et ça crée malheureusement des difficultés à les suivre et les patients ne viennent pas...

    7'11

    Malika

    Comment vous gérez dans ces conditions ?

    7'13

    Marie

    Et ben...on ne fait rien, on propose d'autres dates et on attend...En fait c'est pour ça qu'on pense...euh...qu'à l'avenir de sortir carrément de l'hôpital et d'aller vers les gens. Par exemple, il y a des gens qui habitent à plusieurs kilomètres, ils ne peuvent pas se déplacer... Nous, on aimerait trouver un lieu...euh...au hasard...un lieu, un local, une pièce, où on pourrait prendre en charge les patients.

    7'42

    Malika

    Et c'est réalisable ?

    7'43

    Marie

    Non pour l'instant ce n'est pas réalisable... non c'est juste un souhait... ou un projet on va dire. Il n'y a pas le budget pour.

    7'47

    Malika

    Comment vous vous organisez pendant l'atelier ?

    7'50

    Marie

    En fait, maintenant... Je disais que l'éducation thérapeutique c'est le jeudi. Normalement c'est tous les jeudis. Ce qui n'est pas forcément réalisable. Notamment au niveau des vacances, des disponibilités du médecin...euh...kiné...et tout ça. On s'organise...en fait les ateliers sont toujours les jeudis matin de 9h30 à 12h30, ou l'après-midi de 14h à 16h30.

    8'18

    Malika

    Pratiquez-vous la même organisation pour les autres ateliers ?

    8'21

    Marie

    Oui, les trois ateliers c'est les programmes. On fait un atelier en 4h enfin 3h et demi... C'est vrai que ça déborde parfois. On fait l'atelier de traitement. Le deuxième atelier, c'est de deux mois plus tard et le troisième aussi.

    8'33

    Malika

    C'est votre propre organisation ?

    8'35

    Marie

    Oui, oui ....à Tours par exemple il fonctionne différemment. Ils font tout sur la matinée. Par contre le moment est restreint. Nous...on a choisi de prendre 3h pour chaque thème...euh...voilà. Alors, il y a certains endroits qui font tout sur la journée. Les gens mangent sur place...euh...voilà. Nous...on a choisi ça parce qu'on a trouvé...déjà qu'une dense comme même car c'est beaucoup d'informations, en plus ce n'est pas tout le monde qui peut payer le manger sur place.

    9'02

    Malika

    Assez dense par rapport à quoi ?

    9'04

    Marie

    C'est trop d'information pour les patients voilà. Trop d'info tue l'info. C'est un moment ...aussi un temps sur beaucoup d'émotions, beaucoup d'échanges...voilà.

    9'17

    Malika

    Sollicitez-vous des outils spécifiques pour réaliser un atelier ?

    9'20

    Marie

    Le premier atelier c'est sur les maladies et les traitements. On fait on utilise des cartes symptomatiques comme cela. Par exemple cette carte représente assez bien...euh...donc, c'est mes santés, vie affective, santé physique, vie sociale, vie sexuelle, équilibre psychologique. Ça c'est un p'tit peu pour la définition.

    9'46

    Malika

    Et comment se déroule un atelier éducatif ?

    9'48

    Marie

    En fait le premier atelier...euh...comment ça se déroule ? En fait moi, j'ai rencontré les patients lors d'un diagnostic éducatif. On fixe des dates. Je fais un planning sur l'année avec des dates pour les ateliers. Ça fait 10 à 12 ateliers à peu près dans l'année.

    10'09

    Malika

    Vous arrivez à réaliser un atelier par mois ?

    10'11

    Marie

    A peu près. On essaie de rester dans les normes à 1 par mois. Dès fois on fait deux ateliers par mois. Et puis après...euh...il n'y n'en a pas, voilà.

    10'20

    Malika

    Cette programmation est-elle liée à des contraintes ?

    10'22

    Marie

    En fait, la réalisation d'un atelier, c'est en fonction des disponibilités de chacun. Il y a des pharmaciens, des médecins, des rhumatologues, des kinés. Il faut que tout le monde soit disponible...euh... voilà.

    135

    10'33

     

    Malika

    Que tout le monde soit disponible c'est ça ?

    10'35

    Marie

    Oui, par exemple les kinés eux ils n'ont pas de temps ....eux c'est sur leur temps.

    10'40

    Malika

    De quel temps s'agit-il ?

    10'42

    Marie

    En fait les kinés n'ont pas de temps dédié à l'éducation. Autant moi, j'ai le jeudi à 20% dédié à l'éducation. Eux, ce n'est pas le cas. C'est sur leur temps de travail. C'est vrai qu'on fonctionne selon l'emploi du temps de chacun voilà.

    10'56

    Malika

    Pouvez-vous me décrire une journée d'atelier ?

    10'58

    Marie

    Ben...on bloque les dates, on convoque les patients. Généralement moi, la semaine d'avant je les rappelle pour les dates qu'on a pris deux mois avant. On se donne rendez-vous à 9h30 dans le hall de l'hôpital. Donc, moi avant....j'ai réservé la salle....on prépare un p'tit café, un p'tit peu d'accueil...euh....pour que ce soit plus convivial.

    11'22

    Malika

    Vous faites l'accueil en tenue de travail ?

    11'24

    Marie

    Justement là on est en civile. Nos badges avec nos noms c'est tout.

    11'27

    Malika

    C'est un choix ou une obligation ?

    11'29

    Marie

    Oui, oui c'est un choix. Ça me semble logique. C'est important...

    11'32

    Malika

    Qu'est ce qui est important ?

    11'34

    Marie

    Ben, oui c'est important pour le patient, on n'est pas dans un cours...dans un ...euh... En fait la blouse met la barrière. Oui, oui, exactement ça crée tout de suite une différence ...euh...le soignant...le soigné. Et on n'est pas trop dans le mode soignant soigné. On est plutôt éducateur et pas soignant.

    11'51

    Malika

    Et les autres professionnels sont-ils de même avis que vous ?

    11'53

    Marie

    A oui. Le médecin déjà vient sans. Le kiné...euh...tout le monde. Aucun souci. Au contraire tout le monde est content et tout le monde est bien conscient...euh...de ce que ça représente pour le patient. Et tout le monde et bien content de l'ôter. On en a discuté d'ailleurs et tout le monde est d'accord.

    12'14

    Malika

    Et après l'accueil vous faites quoi ?

    12'16

    Marie

    Euh...j'ouvre la salle, je fais des photocopies, je prépare la paperasse. Ensuite je vais chercher les patients dans le hall de l'hôpital... on se retrouve...on discute 5 mn dans le hall en attendant les autres. Ensuite on va s'installer dans la salle. On fait une présentation...de...en fait je...on est le fil rouge, on fait tous les ateliers avec les patients d'a à z, voilà. En fait les autres sont là en épisode. En fait c'est vrai qu'on est les référentes. Donc, c'est nous qui sommes un peu...le...comment dire? ...les régulateurs...voilà. Après les présentations, on instaure un peu les règles pour qu'on s'écoute et que ça ne déborde pas. Après ...c'est vrai qu'en groupe...voilà.

    12'54

    Malika

    Vous utilisez les mêmes outils pour les trois ateliers ?

    12'57

    Marie

    Pour le premier atelier avec les rhumatologues et moi-même, on dispose les cartes sur la table.

    12'60

    Malika

    Qui choisit les thèmes?

    13'02

    Marie

    A oui, oui, on leur demande de choisir deux cartes : soit parce que ça les interpelle, soit parce qu'ils connaissent et ils veulent en parler. Soit par ce qu'ils ne connaissent pas du tout, et ils aimeraient s'avoir. Voilà...par exemple le thème de la douleur, tout le monde est intéressé...euh... et tout le monde peut intervenir pas que la personne qui a choisi cette carte.

    13'27

    Malika

    Et ensuite?

    13'28

    Marie

    Ensuite, une fois chaque patient a choisi deux cartes, on essaye d'aborder ces thèmes un p'tit peu dans la logique comme même. On essaie de commencer par les définitions, qu'est-ce que l'inflammation, tout de suite on va partir sur la douleur, tout de suite on va partir sur la fatigue, tout de suite on va partir sur ce qui est d'ordre psychologique...voilà.

    13'52

    Malika

    Vous préparez les thèmes avant la séance ?

    13'54

    Marie

    Ça suit naturellement en fait. Nous on essaie de suivre un acheminement. Quand on connaît bien le sujet, en fait...je ne dis pas que la première fois c'était aussi bien présenté...mais...là quand on connaît le sujet...en fait naturellement les patients nous guident. Nous...on est comment dire...on est régulateurs de

    136

     
     

    l'atelier...le fond de l'atelier c'est les patients qui parlent 90% du temps.

    14'18

    Malika

    Vous intervenez comment?

    14'20

    Marie

    Donc la personne qui a choisi une carte. Nous, on lui demande pourquoi ce choix. De nous parler un peu plus du choix. Donc pour la douleur le patient dit...moi ça se passe comme si...comme ça...euh...et voilà. Très bien...et ensuite on demande...et qu'est-ce que vous faites pour la douleur, des trucs, des techniques...euh...Et pour vous madame untel... ça se passe comment. En fait on fait un tour de table pour chaque carte. Ça se passe comme ça.

    14'46

    Malika

    D'accord?

    14'47

    Marie

    On arrive en dernier...euh...alors avec le médecin, soit le médecin qui intervient, soit moi ça dépend...donc le syndrome sexe, c'est moi qui anime et le médecin qui note. Et ...la douleur ça peut être...euh...voilà. On a des rôles interchangeables. Donc, pendant que les patients parlent, on note les mots clés. Bien sûr on arrive un p'tit peu en fin de parcours sur ce thème. Et on va dire...euh...ben...par exemple madame untel nous a dit...ceci cela...qu'est-ce que vous en pensez. Et si quelque chose n'a pas été dit en rajoute.

    15'18

    Malika

    Et vous passez toutes les cartes ?

    15'20

    Marie

    On a fait le deuil au début. C'est vrai qu'il y a certaines cartes importantes pour les patients que d'autres et qu'il faut passer ce jour. Et on laisse les autres cartes et on fait le deuil. Parce qu'il faut prendre plus de temps pour certaines et ben et les autres...

    15'34

    Malika

    Le deuil par rapport à quoi ?

    15'36

    Marie

    Le deuil de ne pas faire ce qu'on a envie de faire. On a toujours envie de faire le maximum. Quand on sait qu'on a des objectifs à atteindre. Et euh...parfois...en atelier on a pas le temps de parler de tout, mais on a compris rapidement ...ben parfois on ne peut pas et il faut s'adapter. Il faut s'adapter aux patients qu'on a en face de nous. Ils n'ont pas tous les mêmes besoins et souvent on va plus accès sur la douleur. Un autre jour ça va être autre chose et puis on va moins parler de certaines choses. Ce n'est pas grave, par contre on n'a quand même un temps donné, on ne peut pas passer 6h ...voilà. On essaie de répondre au besoin du groupe, du patient qu'on a en face de nous, de s'adapter. Et ben...c'est tout n'est pas dit...tout n'est pas dit. Au moins ce qui est important ce jour là pour les patients est dit.

    16'32

    Malika

    Comment procédez-vous pour finir l'atelier ?

    16'34

    Marie

    Euh...on finit par un quiz...donc, c'est des p'tites questions vrai ou faux... en fin bref...vite...voilà. Et ensuite un quiz, un questionnaire de satisfaction...la séance...l'ambiance...voilà. Aussi s'ils ont des remarques.

    16'49

    Malika

    Les patients vous proposent des améliorations ?

    16'51

    Marie

    Oui...oui...oui, les patients proposent des idées, notamment...d'autres sujets...ou parfois des idées. Pour l'atelier diététique on a souvent. Oh...ça serait bien qu'on mange ensemble, qu'on fasse un repas ensemble, notamment... dans ce genre voilà. Ensuite on fait une pose...euh...pose café...pose toilette pour ce qui ont besoin. Ça permet aussi...euh...là c'est des patients qui ont des rhumatismes inflammatoires et la position statique aurait prolongé leur déficit...ça permet aux gens de...de bouger un p'tit peu voilà. Donc on prend un p'tit café, on se pose quoi...

    17'22

    Malika

    L'après-midi se passe comment ?

    17'24

    Marie

    En fait c'est là que le pharmacien arrive. Donc, l'après-midi le pharmacien arrive avec une grande valise pleine de médicaments. On met tous les médicaments au milieu et on leur demande de choisir pareil deux des médicaments. Alors un des thèmes important de cette deuxième partie c'est de faire la différence entre le traitement de fond et le traitement de symptomatique. On leur demande déjà s'ils savent prendre un traitement de fond. Ce qu'ils considèrent par traitement de fond et un traitement symptomatique et puis on parle là-dessus. On fait pareil...on fait un tour de table, donc il y a des traitements qui sont commun.

    17'57

    Malika

    Quel est votre rôle en ce moment ?

    17'59

    Marie

    Ben...là quand je suis avec le pharmacien, c'est plus son rôle d'intervenir, moi je note le script, les connaissances...euh...bien sûr des fois j'interviens mais...et...à force de connaître le sujet, quand je vois qu'il y a quelque chose qui ressort pas ou qui est oublié...up... je... j'interviens.

    18'15

    Malika

    Vous éduquez aux traitements?

    137

    18'17

     

    Marie

    Tout à fait c'est mon rôle aussi d'éduquer aux traitements, mais par exemple tout ce qui est injection notamment des traitements c'est moi qui...plus...enfin... le pharmacien apporte sa partie, moi j'apporte ma partie plus pratico pratique...euh...il y a certains médicaments...euh...et puis voilà c'est aussi le rôle qu'on s'est donné. En fait on est complémentaire. Par exemple moi je dis à un patient : Quand vous prenez le traitement et euh...est ce que vous connaissez les effets secondaires, qu'est-ce que vous faites. Pourquoi vous regardez votre prise de sang, est ce que vous regardez... là je dis ça comme ça. Ça paraît euh...des questions...mais en fait les patients ils parlent seuls. On s'adapte aussi au type de patient. Il y en a qui ne parle pas forcément beaucoup. Ils sont là, ils écoutent, il faut s'adapter à ça. On n'est pas non plus ...euh...on n'est pas là pour forcer les gens...euh...voilà, c'est une participation volontaire. Là on est dans l'éducation, je n'impose pas le soin, ni la méthode.

    19'15

    Malika

    Ils maîtrisent tous la gestion de leur traitement ?

    19'18

    Marie

    Pas du tout. La majorité des patients ne maîtrise pas leurs traitements. Heureusement qu'il y a ces ateliers. Il y a des gens qui apprennent des choses...énormément...Et donc après, on finit par un quiz aussi et un questionnaire de satisfaction. Et généralement sont tous ravis parce que c'est aussi un temps pour eux, ils parlent de leurs difficultés, ils parlent beaucoup des aidons, parfois les conjoints, les familles... voilà. Il y en a qui pleure. Ce n'est pas très souvent mais ça arrive. Il y a des moments où on se lâche.

    19'44

    Malika

    Les familles assistent aux ateliers ?

    19'46

    Marie

    Oui. Il y a des accompagnons des patients. Ces derniers temps ça arrive de plus en plus d'ailleurs. C'est souvent les maris ou les femmes. Euh...et c'est intéressant. Notamment je pense à un atelier qu'on a fait il n'y a pas très longtemps ou il y avait un monsieur qui avait accompagné sa femme qui a une polyarthrite et une dame qui a accompagné son mari. Donc c'était vraiment super intéressant, ils intervenaient beaucoup. Voilà...et...l'atelier se termine en leur proposant de participer à d'autres ateliers avec la diététicienne et avec le kiné et l'ergo.

    20'15

    Malika

    Tous les patients acceptent de revenir ?

    20'17

    Marie

    Il y en a qui ont déjà un suivi diététique donc qui ne souhaitent pas participer. Enfin, dès qu'ils font le premier atelier ils adhèrent. C'est très rare que quelqu'un fasse un atelier et qui ne fasse pas le deuxième. C'est un vrai moment de partage, d'échange, sans jugement...sans...voilà. Ils rencontrent d'autres patients qui ont les mêmes problèmes. Mais, tout ça sans aide. Moi, une dame m'a dit je n'ai pas envie de pleurer sur mon sort entre guillemets. Et on n'est pas là pour ça pas du tout. Le but n'est pas du tout...ah...c'est dur...ben...oui c'est dur. On essaie d'être à leur place pour les comprendre. Et les patients se rendent compte rapidement que ce n'est pas ça du tout. On ne fait pas du tout de choix dans nos patients.

    20'59

    Malika

    Comment vous vous voyez dans ce rôle ?

    21'01

    Marie

    Je me considère plus comment dire dans...dans l'aide, dans l'accompagnement que dans le soin. C'est plutôt un accompagnement là. On soutient, on

    propose, on a un rôle d'écoute. Je dirai qu'on passe énormément de temps à écouter...écouter... reformuler. Et souvent on se rend compte que les
    solutions viennent des patients eux-mêmes.

    21'21

    Malika

    Comment vous vous définissez pendant le moment éducatif ?

    21'24

    Marie

    A partir du moment où les patients participent aux ateliers...même au diagnostic éducatif...moi...je change de casquette...je passe vraiment plutôt à un autre style, au rôle d'éducateur ...euh... d'éducatrice voilà.

    21'36

    Malika

    Comment vous différenciez l'éducation au soin de l'éducation thérapeutique ?

    21'39

    Marie

    Quand on fait les éducations pour les auto injections, on reste plus dans le soin...Déjà on n'a pas de technique. Quand on fait l'éducation à l'auto injection. Je vais parler du...de...la technique d'injection, du matériel voilà. Et quand on fait une éducation dans l'atelier on se regarde dans les yeux. Ben...dans le soin...je suis plus concentré sur l'acte. c'est hyper prônant même au niveau fatigue et tout. Moi quand je fais un atelier je sens bien que c'est...vraiment...on est à cent pour cent quoi. Et quand on fait une éducation thérapeutique dans l'atelier c'est des séances qui demandent des techniques, des préparations...En ETP, l'approche du patient n'est pas la même, on se regarde dans les yeux. Ben...dans le soin...je suis plus concentré sur l'acte. Quand je fais le diagnostic éducatif c'est un choix, on a un support informatique. Le choix ce n'est pas de prendre l'ordinateur et de taper en même temps. Non...je me mets face à la personne, j'écoute, je reformule...si j'ai besoin je prends des notes... En soin, je fais par exemple la prise de sang, je ne discute

    138

     
     

    pas avec le patient sur sa vie, je le réassure, je fais mon soin, il y a d'autres tâches qui m'attendent...

    22'26

    Malika

    Dans quelle posture vous êtes au moment de l'ETP ?

    22'29

    Marie

    Au niveau de l'écoute, au niveau de ...voilà...on est vraiment dans une posture ouverte au moment de l'éduc. On est...c'est différent...beaucoup d'attention, il faut vraiment être-là quoi. Il ne faut pas passer à côté de quelque chose. Du fait d'avoir le diagnostic éducatif, d'avoir rencontré le patient à deux. Souvent les gens se confient, on se retrouve avec des histoires de famille jusqu'au grand père parfois. Et c'est hyper intense...

    22'54

    Malika

    Quelle distinction faites-vous entre l'information, la persuasion et l'éducation ?

    22'56

    Marie

    On se rend compte que les gens...en fin...on parle de la pathologie et ça ouvre des portes énormes. Donc on a aussi...ben...le débat reste ouvert. C'est la base pour qu'on parle de tout ça. Il ne faut pas oublier qu'on est quand même là pour ça. Parfois au moment des ateliers. On est obligé de recentrer un p'tit peu voilà. Il ne faut pas non plus trop s'écarter du sujet. On n'est pas là...non plus...pour faire une thérapie de groupe...et ce n'est pas juste des infos qu'on donne. Alors que l'information, c'est sur la maladie, ou des réponses à des questions précises, par rapport aux traitements, prises en charges...voilà. Je dirai que l'éduc commence par l'information d'abord à mon. Par contre la persuasion, pour moi ce n'est plus d'actualité, je ne pense pas que ça marche pour la maladie chronique, c'est dure pour le patient d'obéir à la lettre en plus il a le droit de refuser le soin... Je peux lui proposer le soin ou l'éduc mais s'il n'est pas convaincu ça ne sert à rien de le forcer. Il vaut mieux de lui expliquer, discuter, connaître ses appréhensions pour trouver la bonne méthode et ça ça peut se faire avec l'éducation.

    23'27

    Malika

    Comment percevez-vous la relation soignant/soigné par rapport aux deux activités ?

    23'30

    Marie

    Et ben...déjà au niveau du dialogue, au niveau du temps ça change. Un patient qui vient faire une injection notamment ici en traitement IV. C'est sûr. Comment ça va. Je prends la température, je prends la tension. Au niveau douleur, est ce que ça va...machin. Enfin ça reste très...euh...pratico pratique quoi...Je dirais je veux savoir s'il a eu une infection ou pas. Pour pouvoir lui faire son traitement, s'il a eu des problèmes...par exemple il ne va pas me confier ...ben...tiens, l'autre jour je suis allé à Auchan, j'ai pas pu...et puis on voit que je suis une personne handicapée, on me dit...euh...et ben dit donc...vous marchez bien. On ne va pas loin. On ne va pas jusqu'au là. On n'a pas le temps. Le lieu n'est pas propice. Il y a d'autres patients qui attendent...voilà...c'est complètement différent.

    24'15

    Malika

    Qu'est ce qui est différent ?

    24'17

    Marie

    C'est là la différence...euh...en hospitalisation je n'vais pas dire qu'ils subissent. Ce n'est pas le bon terme je pense. Ils ne sont pas du tout acteurs. C'est moi qui perfuse, c'est moi qui leur prend la tension, je leur pose des questions...c'est vraiment...on essaie que ce ne soit pas un interrogatoire...voilà...ils nous donnent des renseignements que nous transmettons aux médecins et tout ça. Mais la participation on va dire c'est de notre côté.

    24'44

    Malika

    Et pendant l'atelier?

    24'45

    Marie

    Et pendant l'atelier on va dire même un diagnostic éducatif c'est un échange. Ce n'est pas la même chose. Le patient est acteur. Nous on a le second rôle. Moi je trouve qu'on a un rôle d'accompagnement, de guide un p'tit peu. Même je dis souvent c'est passer un cours...voilà. En essaie de guider pour qu'ils trouvent des solutions...des solutions eux-mêmes.

    25'03

    Malika

    Avez-vous suivi une formation d'ETP ?

    25'05

    Marie

    Oui, de 40 heures, proposée par l'Hôpital.

    25'07

    Malika

    Recommanderiez-vous cette formation à vos pairs ?

    25'10

    Marie

    Oui, il y a quand même des clés qui nous sont données, qui sont vraiment important. Des compétences comme la posture...la posture éducative n'est pas du tout la même que ...par exemple ben...déjà l'écoute, la reformulation, la valorisation. Savoir que des fois ce n'est pas évident dans notre profession. On va dire...infirmière classique...ben...des fois il y a des temps de pose, des temps de silence à respecter aussi voilà...c'est nous quand même on fait de la chimiothérapie, on fait déjà l'accueil, il y a des clés qui sont déjà là. Mais quand on fait la formation, on fait beaucoup de jeux de rôle et c'est hyper intéressant moi je trouve.

    25'48

    Malika

    Comment percevez-vous votre activité avant et après la formation d'ETP ?

    139

    25'51

     

    Marie

    Quand on fait la formation, on se rend vite compte qu'il y a quand même...que tout le monde ne peut pas faire de l'éducation et j'ai insisté là-dessus. J'ai présenté il n'y a pas longtemps...j'ai présenté un peu ce que je fais à l'IFSI. Et à la fin j'ai posé comme question : est-ce vous...vous voyez comme éducateur. Est-ce que s'est donné à tout le monde. Je ne suis pas convaincu, et d'ailleurs quand j'ai posé la question c'était des 2ème années...et voilà...j'ai dit : est-ce que ça vous intéresse, est ce que vous vous voyez faire ce genre de chose. Et plus d'un quart qui a répondu...ben...pas du tout. Et je...euh...ça ne m'étonne pas. Il faut quand même un côté relationnel, une approche...je pense que ceux qui travaillent en psychiatrie ont déjà ça encore plus naturellement.

    26'36

    Malika

    Pour vous le soignant peut-il choisir de faire ou pas l'ETP ?

    26'39

    Marie

    Ben...on est tous différent moi je pense. J'ai travaillé dans d'autres services avec plusieurs collègues, on a tous comme même des capacités différentes...des...je ne dirai pas de don...mais si...un p'tit peu quand même. On a des choses sur lesquelles on accède plus que d'autres. Par exemple, il y a des patients qui ont une capacité d'écoute plus que d'autres. Donc, certains soignants peuvent être en difficultés par rapport à ça...et...ça...ça veut pour les médecins, ça veut pour...en tant que personne...euh...c'est personnel...après c'est mal se connaître...je serai étonné que des personnes s'orientent à faire la formation si déjà d'emblée n'ont pas ces capacités d'écoute.

    27'16

    Malika

    Pour vous. La pratique d'ETP relève d'un choix ?

    27'18

    Marie

    On choisi ce métier au début. Les études puis on plonge dedans les premières années. Après on prend du recule. Je serai étonné si on s'oriente à faire de l'éducation et on s'aperçoit qu'on n'a pas cette capacité d'écoute...euh...mais après c'est personnel la vision des choses. Je ne sais pas si j'ai raison d'ailleurs. Après, moi ce que j'ai pu observé c'est...c'est une impression. Moi je vois bien qu'il y a des collègues qui ne seraient pas à l'aise de faire l'éducation thérapeutique. Et je trouve que c'est dommage de les mettre en difficultés et de ne pas apporter au patient l'écoute. Donc...ben...quand on fait le soin, parfois on est dans l'action...c'est vrai...euh...on est vraiment dans l'action. Et je trouve quand on est dans l'éducation...et ben...des fois ce n'est pas facile en fait. C'est un peu exagérer mais c'est vraiment laisser parler le patient...voila...se mettre un peu en arrière quoi...prendre le second rôle...vraiment. Le rôle soignant c'est autre chose, on travail avec les collègues, on prend pas les decisions seul, vis-à-vis du patient on est dans une position de soigneur, d'acteur voila.

    28'03

    Malika

    Et quand avez-vous perçu ce second rôle ?

    28'05

    Marie

    C'est vrai que le fait de faire la formation, je pratiquais déjà...euh...j'ai observé...mais on voit bien que ce n'est pas du tout la même chose. On voit bien qu'on n'est pas du tout dans la même posture. On voit bien que c'est complètement différent de faire de l'éducation au soin et l'éducation thérapeutique. Ce n'est pas du tout pareil.

    28'23

    Malika

    Qu'est ce qui est différent pour vous ?

    28'25

    Marie

    On fait parfois je discute avec d'autres collègues qui font de l'ETP, je vois bien qu'ils ne sont pas au second rôle...enfin je ne peux pas leur dire...ce n'est pas mon rôle à moi...mais...euh...il y a des gens qui font tout en 4 h. ce qu'on fait nous en 3 matinées...eux en 4 h. faire de l'éducation avec 10 patients en 4 h moi j'ai du mal. Je n'arrive pas. Déjà nous...par exemple on est obligé de couper de ceci et que des fois on pourrait y passer la journée quoi. Donc...euh...

    28'55

    Malika

    Par rapport à quoi cette différence ?

    28'57

    Marie

    Il y a une notion de temps qui est importante quand on fait de l'éducation...en fait quand on est dans le soin... on est toujours pressé. Des temps de passage des traitements, des temps de faire ceci cela. On n'a pas...il faut finir à telle heure et on commence à telle heure. Alors...dans l'éducation, cette notion du temps n'est pas gérée pareil.... Il faut prendre du temps, ...il faut laisser le temps aux patients, le temps de parler, ...on n'est pas pressé, il n'y a pas d'autres taches, on fait que ça sur la journée...sinon ce n'est pas de l'éducation... En soins, le temps est partagé entre les patients et les autres taches, déjà, il faut consacrer du temps à chaque patient, il y en a qui te prennent une demi-heure, d'autres un quart d'heure, d'autre voir une heure et si ce n'est pas prévu, ça déborde et on sera obligé de rester plus dans le service, ce qui peut engendrer le stress et tout ça...

    29'32

    Malika

    Comment définissez-vous le moment de l'ETP ?

    140

    29'34

     

    Marie

    Les trois quarts du temps c'est les patients qui...qui interviennent et c'est ça l'éducation. On intervient après...pour rajouter des choses importantes voilà. En fait c'est les patients qui parlent à leur niveau bien sûr...euh...ils en ressortent des problèmes, ils en ressortent des solutions. Et c'est là...aussi que l'effet groupe est important. C'est à dire c'est souvent quand un patient est en train d'exposer un problème et un autre intervient... : Et ben...tient vous devriez faire si...vous devriez faire ça. Bien sûr nous on l'avait vu...on l'avait pensé évidement. Mais ce n'est même pas venu de nous quoi. C'est aussi important que ça vienne d'un autre patient. C'est vraiment un moment d'échange au sommet...quoi...

    30'08

    Malika

    Et avant c'était comment pour vous ?

    30'10

    Marie

    Euh...ben...je pensais comme certains soignants qui pensent faire de l'éducation thérapeutique. Et... en faite ils font de l'information...ils font tout...euh...très bien...euh...je n'ai pas aucun jugement là-dessus. Mais je me demande toujours si le temps de parole accordé au patient est suffisant.

    30'27

    Malika

    Comment vous gériez votre activité avant ?

    30'29

    Marie

    Ah...oui oui. Je donnais des documents et écrire au tableau et dire il faut faire si...faire ça. Je réalise que ce n'est pas ça de l'éducation. De toute façon quand on a fait la formation ce n'est pas ça qu'il faut faire.

    30'42

    Malika

    Et qu'est ce qu'on vous a appris à la formation ?

    30'44

    Marie

    Ben...déjà l'écoute. Et entre guillemets l'état des lieux, c'est-à-dire déjà avant de mettre le moindre truc, il faut faire un état des lieux. Qu'est ce qu'on va faire avec ce patient, où sont les besoins. C'est pour ça qu'on fait le diagnostic éducatif. Situer les besoins, les objectifs. C'est des patients différents qui ont des objectifs différents. C'est déjà à partir de là, si déjà on ne sait pas de quoi le patient a besoin, on ne peut pas apporter des choses. Si on prend un groupe de 10 et on dit ben voilà on va parler nanana et ben on sort tout ce qu'on veut dire. Il y a des gens qui savent déjà, ou bien, ils ne savent même pas ce qu'on veut dire. Il faut qu'ils y trouvent un intérêt pour qu'ils adhèrent.

    31'24

    Malika

    Et après l'atelier vous faites quoi ?

    31'26

    Marie

    Après l'atelier ETP, je...je viens ici, je dépose mon matériel, je classe mes documents et après je retourne me changer. Et c'est vrai que...à ce moment-là...c'est vrai...c'est complètement différent.

    31'37

    Malika

    Qu'est ce qui est différent ?

    31'39

    Marie

    Par ce que là...euh...allez up...j'enfile ma blouse et je change de casquette. Malgré que le jeudi après-midi je reste encore dans l'éducation thérapeutique...je vais faire de l'éducation des auto injections.

    31'52

    Malika

    Vous restez dans la continuité ?

    31'54

    Marie

    Oui oui je reste quand même dans la continuité. C'est sur la journée de l'éducation thérapeutique. Après je téléphone...je fait du recrutement...les dossiers...les rendez vous ...tout ça.

    32'06

    Malika

    Vous n'avez pas de secrétaire ?

    32'08

    Marie

    Non non on n'a pas de secrétaire, on fait nous même la partie administrative. Ce n'est pas la partie la plus désirée, ça nous prend beaucoup de temps, mais voilà il faut passer par là. Ce n'est pas non plus...mais...passer des coups de fil, faire de l'administratif... Voilà il faut le faire tout simplement ça...ça permet aussi une vue globale de la chose.

    32'25

    Malika

    Et le suivi c'est comment ?

    32'27

    Marie

    Alors justement. Déjà il y a le questionnaire de satisfaction. Et euh...en fait cette année ce qu'on veut initier...on s'est inspirer en fait de... j'ai rencontré...j'ai fait un échange avec une patiente ressource qui fait des ateliers sur Paris. Cette dame charmante en journée d'échange...moi j'adore les journées d'échanges avec les autres hôpitaux parce qu'en fait...je...je vais à la pèche aux idées...aux. Moi ça m'apporte à chaque fois et notamment...elle utilise en fait une fiche...elle rappelle les patients à distance. Elle pose quelques questions et voilà...elle fait de l'évaluation. Donc elle m'a gentiment donné sa fiche et je vais la retravailler puis la mettre en pratique.

    32'59

    Malika

    Elle fait son propre suivi ?

    33'00

    Marie

    En fait pour le suivi...euh...normalement on devrait refaire un diagnostic. Au niveau timing c'est un peu difficile. Ça prend du temps...euh...moi je passerai

    141

     
     

    trois quarts d'heure sur...mine de rien...et j'essaie de ne pas dépasser une heure avec chaque patient. Et après on a les retranscriptions. Je ne veux pas utiliser l'informatique devant les patients. Donc ça prend 1/4 d'heure 20mn. C'est vrai que...faire revenir les gens pour discuter ce n'est pas évident. Les gens ne sont pas forcément disponibles c'est vrai. Il y a des gens qui viennent de loin. Donc j'ai trouvé que c'est assez pratique le suivi au téléphone pour tout le monde en fait.

    33'42

    Malika

    Avez-vous un modèle de diagnostic éducatif ?

    33'44

    Marie

    Une base de diagnostic pour tous les programmes ETP sur l'hôpital et le reste chaque service à fait son programme d'éducation.

    33'49

    Malika

    Comment abordez-vous les patients en dehors de l'éducation ?

    33'51

    Marie

    En fait en dehors de l'éduc, la relation diffère, le patient reçoit les soins, on n'a pas vraiment d'échange. Je n'ai pas le temps pour les patients, oui surtout quand je suis en chimio et quand on vient me poser une question. Je me rappelle un mercredi je faisais des dépistages et tout...et un patient m'a interpellé. C'est vrai qu'on n'a pas la même casquette à ce moment là. Et le changement tout de suite machin...ce n'est pas toujours évident...c'est difficile, il faut bien être au claire.

    34'08

    Malika

    Par rapport à qui?

    34'09

    Marie

    Et ben par rapport à moi déjà puis aux patients.

    34'11

    Malika

    Vous dites quoi à ce moment ?

    34'13

    Marie

    Je dis au patient, ce n'est pas le moment de répondre et qu'ils m'appellent le jeudi je suis là pour ça et c'est plus facile pour moi.

    34'18

    Malika

    Dès que les patients vous voient ils s'adressent à vous ?

    34'20

    Marie

    A oui oui bien sûr dès qu'ils me voient en dehors de l'éduc, ils ne se disent pas là...elle est en soin. Et ils ne savent pas forcément...euh...quand ils me croisent dans le couloir, ils ne savent pas forcément que je suis en train de passer une chimio juste à côté. Si je ne suis pas disponible. Je leur dis voilà. Donc...euh...il y a des fois où il faut se rendre disponible aussi c'est selon la demande. Si c'est quelque chose quand même on ne va pas laisser les gens. Je renvois vers mes collègues...vers le médecin.

    34'47

    Malika

    Vous êtes la seule référente dans le service ?

    34'50

    Marie

    Oui parmi les 7 infirmières à l'HDJ, je suis la référente principale et maintenant j'ai une collègue...elle a commencé quand...oui...depuis décembre on va dire qu'elle m'a rejoint.

    35'00

    Malika

    Vous avez géré toute seule les années d'avant ?

    35'02

    Marie

    Oui oui avant, j'ai géré toute seule. C'est aussi c'est pour ça qu'on a choisi d'être à deux à cause des vacances. L'année dernière...ah...oui...j'ai dû me faire opéré...voilà...un truc pas grave et tout...mais ben...en fait quand j'étais en arrêt...voila...euh...c'est un peu le feu artistique quoi. C'est rare mais ça arrive.

    35'19

    Malika

    Comment vous vous organisez si tous les soignants de votre service sont formés à l'éducation ?

    35'24

    Marie

    Je suis lucide que ce n'est pas possible. C'est surtout un budget...euh...au jour d'aujourd'hui...euh...on est à l'hôpital quand même. Je suis quand même assez lucide que ce n'est pas possible. Il y en a aussi ceux qui ne vont pas aimer. Après il y a des collègues qui n'aiment pas faire ça. Puis on ne peut pas être trop à faire ça déjà. Si on était 5 ou 6 à faire ça...ce n'est pas possible on perd le fil. Pas au niveau des patients parce que la posture une fois qu'on l'a on l'a. Mais au niveau de la gestion administrative ... paperasse...voilà.

    35'55

    Malika

    C'est le changement d'activité qui fait peur ?

    35'57

    Marie

    Oui il faut remettre à jour son...ses connaissances aussi...et...c'est que les jeudis. Quand même ce n'est pas rien il faut suivre quand même.

    36'07

    Malika

    Un temps de 20% d'ETP est-il suffisant pour la gestion de l'ETP ?

    36'10

    Marie

    Ça dépend des périodes il y a des moments où il faudrait plus d'une journée d'ETP par semaine. C'est un peu juste et puis il y a d'autre moment...voilà.

    36'15

    Malika

    Pourriez-vous me parler de votre activité de soignante ?

    36'17

    Marie

    A l'hôpital du jour...euh... la matinée cancérologie...en fait...il y a des gens qui viennent pour la chimio...les gens qui ont des scléroses en plaques pour un traitement en IV, des gens qui souffrent de polyarthrites, des maladies de crohn, et certains examens qui doivent se faire dans la journée...voilà. Ensuite on

    142

     
     

    fait la chimiothérapie des cancers gastro, ORL, hématologie qui viennent faire leur chimio...en fin le suivi de tout ça. on fait le suivi de tout ça. On prend les constantes, donne les traitements sous perfusion, on surveille si complication, on appelle le médecin, on répond au téléphone, on gère le dossier du patient, on fait les transmissions écrites...

    36'41

    Malika

    Si on vous propose d'être à 100% en éducation ?

    36'43

    Marie

    Là...je ne sais pas si je voudrai faire que de l'ETP. Parce que j'aime aussi ce que je fais en...en cancérologie. En fait se sont deux activités différentes que j'aime ...euh...mais si je devais faire un choix entre les deux. Je serais bien embêtée.

    36'58

    Malika

    C'est comment par rapport à votre identité ?

    37'00

    Marie

    Une identité de soignante ...avant tout...avant tout oui, de base oui, c'est sur. Bien sûr. Après j'ai développé des qualités d'éducatrice qui étaient déjà présentes le fait d'être soignante. Ça c'est sûr. Et il y a une partie dans ma pratique qui s'est améliorée...euh...l'écoute, l'organisation...C'est vrai que c'est deux choses différentes. J'aime les deux. L'éducation...c'est peu être un complément.

    37'23

    Malika

    Au niveau identitaire que représente les deux activités pour vous ?

    37'26

    Marie

    L'éducation pour moi c'est valorisant en tant que soignante. Parce que soignante on va dire dans un service classique euh...on n'a pas toujours le retour. Quand on fait de l'éducation moi je trouve qu'on a beaucoup de retour. De part la part administrative, on demande aux patients s'ils sont contents. Si je fais une chimio à un patient, au moment ou il part... je lui demande pas...alors ça vous a plu cette journée avec moi, est ce que vous êtes satisfait,...je ne parle pas de l'ambiance, est ce que ça vous a plu machin. Je vois bien que la journée c'est bien passée. Moi je suis contente parce que le patient n'a pas souffert, je me suis bien organisé, il ne part pas tard, c'est très bien. C'est valorisant...c'est hyper valorisant...on n'a pas forcément le même retour c'est dommage...moi je trouve.

    38'04

    Malika

    Le patient perçoit-il le changement dans votre rôle ?

    38'07

    Marie

    En fait, le patient voit en moi l'éducatrice, pas la soignante, et du coup je le sens plus proche. Parce qu'il y a le lien qui s'est crée de part sa participation aux ateliers. De part le diagnostic éducatif aussi. C'est intense. Donc il y a une complicité, le patient se sent plus proche de moi et c'est réceptive du fait...ben...il m'a vu dans cette posture d'écoute...de...voilà. C'est peu être à tord par rapport à d'autres collègues parce que c'est dommage. C'est vrai je le sens des fois, ils viennent me solliciter plus par rapport à mes collègues. Mais je comprends aussi. C'est aussi mon rôle...je suis bien référente en éducation thérapeutique. Ça les concerne et ça fait partie de mon rôle. Ils le savent aussi et quand je me présente je me présente comme ça.

    38'43

    Malika

    Je reviens à votre identité actuelle ?

    38'45

    Marie

    J'ai...j'ai acquis des choses de part cette formation d'éducatrice, de part aussi de mettre en pratique. C'est bien jolie qu'on a cette formation c'est chouette. Mais il faut pouvoir mettre tout ça en pratique...voila. Moi j'ai de la chance de pouvoir mettre tout ça en pratique. C'est souvent...c'est sûr que ça modifie certains domaines dans ma pratique. Je dirais de l'influence...ça questionne quand même mon identité. Quand on fait cette formation et quand on la met en pratique on développe vraiment cette capacité d'écoute.

    39'13

    Malika

    Il y a eu un changement dans vos pratiques ?

    39'16

    Marie

    Un p'tit peu oui... forcément, il y a eu un changement dans ma pratique en tant qu'infirmière. Après...euh...il y a quelque chose que je mets en pratique tout le temps même dans ma vie personnelle.

    39'25

    Malika

    Ce changement par rapport à quoi vis à vis du patient ?

    39'28

    Marie

    J'essaie de le rendre plus actif. Il participe plus. Il communique plus. Il parle de sa maladie. Moi je mets plus d'écoute. En fait c'est un peu compliqué parce que moi tout s'est fait en même temps. Je suis arrivé en cancérologie après j'ai commencé l'éducation. Tout s'est un peu imbriquer mais ce qu'on fait à l'hôpital de jour c'est des maladies chroniques. Avant de faire des chimio on prévient des effets secondaires. On donne des conseils à suivre...En fait c'est une forme d'éducation...c'est une éducation au soin. On évalue, on éduque à la cure. C'est ce qu'on fait maintenant en faite c'est les mêmes pratiques...en gros.

    39'58

    Malika

    Et au niveau de l'organisation c'est comment ?

    143

    40'00

     

    Marie

    On est toute seule en ETP. Autonome. Responsable quoi...On se débrouille comme on peut...Aussi au moment du soin...mettre à plat les prescriptions ça fait partie aussi de mon travail. Je suis infirmière...ce n'est pas frustrant...après c'est agréable d'être autonome aussi et ne pas avoir de pression. Après je suis contente de faire toute seule mon travail comme à l'ETP mais je connais mes limites.

    40'22

    Malika

    Qu'est ce qui a changé pour vous ?

    40'25

    Marie

    C'est différent maintenant à l'hôpital de jour on est assez autonome avec les patients du début à la fin. Le rôle propre est bien développé moi je trouve. On prend des initiatives...la réflexion...l'organisation surtout. C'est pareil... dans ma vie privée je suis devenu plus qu'avant...euh...on passe notre temps à organiser, à savoir ce qu'on doit faire en premier, en second...donc c'est surtout ça...ça...ça.

    40'45

    Malika

    Vous voulez dire ça se développe ?

    40'47

    Marie

    A oui oui ça se développe. C'est des capacités qui se développent... qui évoluent.

    40'51

    Malika

    Comment voyez-vous votre approche actuelle pour le soin, pour le patient après la pratique d'ETP ?

    40'55

    Marie

    Les éducations pour les auto- injections forcément sont influencées par ma posture d'éducatrice. Après je ne peux pas faire que ça. C'est quand même un planning et forcément...comment dire...je m'inspire...je m'inspire sur ce que je fais en éducation... c'est de la formation quand même. On n'est pas au même niveau. Je dirais qu'on s'inspire. On n'a pas la même posture quand même.

    41'18

    Malika

    Pouvez-vous me retracer un peu votre organisation à l'HDJ ?

    41'21

    Marie

    Depuis qu'on pratique l'éducation on a changé d'organisation, maintenant, sur la journée on est échelonné. On est 5 à 6 infirmières dont une infirmière en programmation qui gère que la paperasse...euh...les coups de fil...reprogramme les patients des collègues, prépare les dossiers pour le lendemain voilà...Ce n'est pas évident...euh...on est au top de l'organisation ici.

    41'38

    Malika

    Qu'entendez-vous par au top de l'organisation ?

    41'41

    Marie

    Ça tourne...et puis après dans la journée on arrive à des heures un peu différentes. Il y en a qui arrivent à....à 9h. Une à 9h et demie. Une à 10h et une à 10h et demie. Et puis on prend en charge nos patients du début jusqu'à la fin. On fait toutes les pathologies. Tous les jours il y a quelqu'un qui reste jusqu'à 19 h.... et...Mais en éducation on est seul. Là par exemple ce matin je suis arrivé à 9h...il n'y a pas de relève... je travaille toute seule du début à la fin.

    42'03

    Malika

    Et avant?

    42'04

    Marie

    Avant...quand ont été à l'étage il y avait un coté médecine un coté cancéreux. Et on a toujours fait les deux. Mais il y ceux qui faisaient que coté médecine voilà...elles sont moins à l'aise avec les prises en charge hors médecine parce qu'elles ne connaissent pas. On ne travaille pas en équipe forcément...mais si on travaille quand même en équipe. On se relaye pour des patients. On est là les unes pour les autres en cas de besoin. Mais ce n'était pas aussi organisé.

    42'31

    Malika

    Et c'est comment l'organisation avec votre collègue ?

    42'34

    Marie

    Euh...ben...il y a des moments on se laisse des p'tits mots. On s'appelle. Moi j'ai un agenda... on essaie de faire un agenda un peu plus général pour écrire des choses.

    42'45

    Malika

    Que représentent pour vous les mesures éducatives ?

    42'47

    Marie

    Euh...déjà c'est les programmes d'éducation...euh...aussi la technique qu'on apprend en formation de 40h comme l'écoute la reformulation, laisser le patient parler, découverte des compétences, aussi rendre le patient acteur. Avant le patient il subissait le soin on va dire maintenant, il a son mot à dire, en fait ce n'est pas la même prise en charge...euh...avant on l'éduqué aux médicaments, au soin sans plus. On lui ne demande pas son avis, s'il a des questions on répond, mais sans un vrai échange...aussi là on fait le diagnostic éducatif, il y avait pas ça pour les maladies chroniques...c'est tout un parcours éducatif de l'accueil jusqu'au suivi et stabilisation on va dire.

    43'22

    Malika

    Comment procédez-vous à l'évaluation de l'activité éducative ?

    43'25

    Marie

    En fait, on n'a pas d'outil d'évaluation de l'activité je pense...euh...l'évaluation de l'atelier je le fait avec le questionnaire, mais notre travail, je ne sais pas on n'a jamais évalué.

    43'44

    Malika

    Vous avez des choses à rajouter ?

    144

    43'46

     

    Marie

    C'est une activité dans laquelle je m'épanouie. ...Je me considère plus ...dans l'aide, dans l'accompagnement que dans le soin. C'est plutôt un accompagnement là. On soutient, on propose, on a un rôle d'écoute. Je dirai qu'on passe énormément de temps à écouter...écouter... reformuler. Et souvent on se rend compte que les solutions viennent des patients eux-mêmes. Aussi, le fait de changer un peu de casquette...euh...parce que le fait d'être soignante notamment je dis c'est quand même assez puissant. La maladie chronique ce n'est pas quelque chose de simple n'en plus. Mais voilà c'est quelque chose qui me plait. Je trouve que c'est assez...assez...formateur. Faire un atelier c'est un rôle formateur.... C'est un bon moment rien que de voir les patients partir avec le sourire...je suis ravie. ...c'est un retour. En soin on a les deux rôles, le prescrit et le propre...euh...en éducation, c'est le rôle propre, on est autonome. Finalement c'est bien de mettre en pratique ce qu'on connaît par rapport à l'autre activité...En fait elles se complètent assez bien. Faire un atelier c'est vraiment un moment que j'adore quoi. C'est un bon moment rien que de voir les patients partir avec le sourire...je suis ravie. C'est super égoïste...oh lala...ce que je dis. Mais c'est un retour. On est quand même dans une profession ou on donne beaucoup de nous et on n'a pas toujours...euh...ce retour un p'tit peu...un peu de considération voilà. On sent quand même...que voilà...une valorisation et c'est vrai que dans l'éducation thérapeutique on a beaucoup ça plus qu'en soins. C'est complètement différent la relation.

    45'52

    Malika

    Merci pour cet entretien et bonne continuation.

    145

    Script de l'entretien avec Infirmière en unité de Diabétologie
    Hôpital de Blois

    Entretien réalisé le 08/06/2015

    Nous allons faire un entretien d'une quarantaine de minutes, si vous êtes d'accord, cet entretien concerne votre activité d'éducatrice. Je vais donc vous poser quelques questions pour orienter le discours. Notre objectif n'est pas de juger votre façon de travailler. La majorité des questions sont ouvertes volontairement pour vous laisser répondre le plus spontanément possible, sans vous influencer.

    0'00

    Malika

    C'est quand vous voulez!

    0'01

    Laura

    D'accord...j'ai 36 ans, je suis infirmière. Ça fait 12 ans que je suis déjà en diabéto...et référente en éducation depuis 2011.

    0'05

    Malika

    Avez-vous travaillé dans d'autres services ?

    0'07

    Laura

    Oui, en médecine interne. En fait, cette unité relève du service de médecine et on prenait en charge les patients diabétiques, il n'y avait pas cette unité de diabète avant. Tous étaient ensemble. Donc, j'ai fait trois ans en service de médecine ensuite au moment où on s'est dit : on passe à l'aide médicale, il y a douze ans, j'ai voulu être dans cette unité de diabétologie.

    0'22

    Malika

    Le travail D'ETP représente-t-il un choix pour vous ?

    0'24

    Laura

    Oui. En fait, on n'avait pas vraiment le choix. Au départ, on était l'aide médicale. Donc c'est déjà ça et puis on a changé, on a parlé de l'éducation thérapeutique dans tout l'hôpital en 2011, et, on a changé de contenu. Et on a établi des programmes d'éducation et on a crée l'unité de diabétologie, avant les patients diabétiques c'était pour la médecine.

    0'33

    Malika

    La pratique d'ETP relève-elle d'une prescription médicale dans votre service ?

    0'35

    Laura

    Oui, forcément, c'est le médecin qui voit le patient d'abord, ensuite il le dirige vers nous pour commencer l'éducation...euh, mais nous on peut proposer l'éduc, si on voit que le médecin n'a pas encore eu le patient. En diabéto, le patient vient pour un séjour. Donc, nous on commence l'éduc même si le médecin ne l'a pas prescrit, il est au courant bien sûr.

    0'48

    Malika

    Par quoi est représenté ce changement de l'aide médicale à l'éducation thérapeutique ?

    0'51

    Laura

    En fait, avant on faisait le questionnaire. Je sais faire. Je ne sais pas faire. Donc après, on a changé un peu la méthode. Tout ça...ça a évalué. Au fil des années, on s'est plus adapté aux besoins du patient... on a changé un peu de méthode tout ça...ça..., on s'est plus adapté aux besoins du patient qu'on lui impose à faire. Avant, c'est vraiment : faites 3 glycémies..., faites 6 glycémies par jour...Maintenant, on a dit : qu'est-ce que vous êtes en mesure de faire... On a changé de formulation des questions. Ce n'est pas des questions fermées : oui, non, machin... Ce sont plutôt des questions ouvertes. Enfin, mais ça...on l'a travaillé avec la formation en éducation qui a pris plus de place à l'hôpital et dans...dans partout, je n'pense pas qu'à l'hôpital.

    1'26

    Malika

    Comment définissez-vous l'information de l'éducation et de la persuasion ?

    1'29

    Laura

    C'est vrai qu'il a un apport d'information dans le but ensuite de pouvoir réfléchir à quelque chose et pouvoir prendre conscience de ce qu'on fait...euh...pourquoi on le fait et qu'est ce qu'on peut en tirer. Parce que pouvoir faire des glycémies ce n'est pas facile...et si on ne fait rien derrière...ça ne sert pas à grand-chose. Le conseil, on peut le faire sans éducation, à moins qu'il réponde à un besoin éducatif, oui, donner...donner...ce n'est pas faire de l'éducation. Donc automatiquement l'éducation vient après l'information. C'est beaucoup de l'apprentissage à réfléchir. Si tu donnes toutes les informations au DG...oui je veux dire le Diabète Gestationnel. Et elles font ce qu'elles veulent...après c'est à elles aussi...l'éducation ça se commence dans un deuxième temps. Elle ne se fait pas comme ça. Mais la persuasion, je ne pense pas que ça marche si un patient refuse de s'injecter, quoi qu'on fasse on ne peut pas le convaincre, il vaut mieux discuter ensemble et trouver une méthode d'aide qui le conviendra le plus à mon avis.

    2'25

    Malika

    Que représente pour vous l'éducation thérapeutique ?

    2'27

    Laura

    Pour moi c'est la seule méthode qui aide le patient à prendre en charge sa maladie et vivre avec on va dire. En éducation on passe vraiment par cette phase de conseil. Parce que nous en tant qu'infirmière déjà, pouvoir éduquer et pouvoir réfléchir sur ce qu'on fait ou sur ce qu'on va obtenir comme résultat, il y a

    146

     
     

    quand même des incontournables en éducation thérapeutique. C'est-à-dire que s'il y a un traitement sous insuline, il faut bien apprendre à se le faire. Si c'est une glycémie...de toute façon il faut savoir lire la glycémie ou en tout cas...devant un lecteur, ils vont comprendre le chiffre.

    2'56

    Malika

    Avez-vous suivi une formation pour la pratique ETP ?

    2'59

    Laura

    Oui, oui une formation de 40h. c'est programmé par l'hôpital. En fait dans cette unité de diabéto, on est que 6 infirmières formées en éducation parmi 24 infirmières entre médecine et diabéto. Donc on est les seules référentes.

    3'08

    Malika

    Avez-vous des journées spécifiques à la pratique ETP ?

    3'10

    Laura

    Le groupe c'est le mercredi matin, il y a le psychologue qui est là. Le jeudi matin, il y a l'atelier diète. On redonne les bonnes bases. C'est pareil ça dépend du public. C'est des généralités sur les aliments, sur les associations. Sachant que ces gens on les voit d'abord individuellement pour personnaliser. Tout le monde ne mange pas trois fois par jour. Il y des gens qui travaillent en équipe...voila. Ensuite on les voit en groupe. Ensuite jeudi...il y a l'atelier pieds. Le médecin note les patients qui ont besoins...enfin qui semblent. Après il va y avoir une demande pour le psychologue...il y a le groupe...il y a l'individuel. Aussi là...c'est le psy qui voit en fonction du passé...un p'tit peu de ce qui est noté dans le dossier médical. Le kiné est demandé ponctuellement pour des gens qui ont des problèmes de la réadaptation...à...à la marche... quelque chose comme ça. Pour l'activité physique pure, il n'y a pas de kiné. Parce que malheureusement dans certains jours on n'est pas prioritaire. Nous...on leur propose les plaquettes...on peut prendre contact pour eux. Libre à eux après de s'y rendre ou pas voilà. On leur donne des informations...ils n'ont pas de prise en charge au niveau du transport...donc ce qui fait que...voilà.

    4'29

    Malika

    Comment procédez-vous à la réalisation de l'ETP ?

    4'31

     

    Moi je suis là en consultation. On a le temps de recevoir les patients. On ne fait pas d'autres soins effectivement qui nous rappellent en timing on va dire. Mais après...ça commence dans les chambres...le but c'est quand même c'est que ce soit en continu dans la chambre ou débuter en chambre. C'est vraiment un lien avec le diabétologue ...avec le psychologue...ça peu etre le kiné. L'éducation thérapeutique sur l'activité physique par exemple. Le fait qu'il est dans la chambre, ma collègue ne va pas lui dire enfin...qu'il est bien au lit en fait...euh...c'est vraiment un travail de groupe...c'est dans la continuité. On ira les voir dans les chambres, on parle du diabète, de leur vie de tout les jours, de leur entourage, de leur famille, s'ils connaissent le diabète ou pas. Ensuite une fois le patient mieux, on commence le l'entretien éducatif. Danc moi j'interviens là, je commence le diagnostic, donc mon rôle en second plan, on ne va pas lui proposer l'éduc le premier jour.

    5'12

    Malika

    Comment gériez-vous avant d'introduire de l'ETP dans le service ?

    5'15

    Laura

    En fait, avant on n'était pas à l'éducation thérapeutique. Le médecin voyait le patient en consulte. Nous, nous, on le voyait une demi-heure avant. On faisait une glycémie, on lui demande de faire pipi dans un...dans un p'tit pot pour l'albuminurie, une prise de sang... En fait, tout ce qui est lié potentiellement avec les complications du diabète. On faisait l'électrocardiogramme...En fait, c'était un peu speed. C'est le bazar, on va dire. Dans la consulte, il fallait...ben...on dépatouillait, la consultation médecin en gros...on va dire ça. Ensuite, il y a eu une amélioration sur les lecteurs de glycémie. Avant, on faisait les moyennes tout seul, on faisait les tests...voilà. Tout ça, on n'avait pas besoin de le faire. Maintenant c'est la machine, et, même le patient peut le faire, c'est pour ça que l'on fait recours à l'éducation pour que le patient devienne autonome et tout ça.

    5'57

    Malika

    Comment se passe l'organisation de l'ETP dans le service ?

    5'59

    Laura

    En fait, on ne travaille pas en même temps. C'est un planning. Par exemple moi là je fais l'éducation pendant 2 mois consécutifs, après c'est le tour d'une autre collègue et moi je ferai que les soins. En fait en gros je suis éducatrice que deux mois dans l'année on va dire.

    6'11

    Malika

    Et vous arrivez facilement à basculer entre les deux activités ?

    6'13

    Laura

    Ben, non au début c'est dur après on s'habitue forcément.

    6'15

    Malika

    C'est dur par rapport à quoi ?

    6'16

    Laura

    Par rapport aux taches. Les soins et l'éducation ce n'est pas pareil déjà. En soins je commence à 6h30, les trans, les médoc, les pansements, la tournée avec les médecins, le stress, la gestion du temps, des fois ça déborde sur des heures sup voila. Euh...mais en éduc, déjà j'arrive à 9h et je fini à 17h. je ne suis pas lié au timing. Si un peu mais pas de stress comme en soin.

    147

    6'35

     

    Malika

    Comment se déroule une activité ETP ?

    6'37

    Laura

    En fait c'est les patients qui parlent la majorité du temps. C'est le patient qui emmène les informations et nous on répond sans ce coté pouvoir ou savoir. Logiquement sur l'éducation, nous, on amorce. Mais c'est quand même lui qui nous donne les éléments. Après on réajuste en fonction de ce qu'il nous dit et de ce qu'il a envie. Est ce qu'il n'a pas envie, est ce qu'il a besoin. On ne va pas lui emmener. Enfin moi, en éduc, on n'a même pas toutes les informations. Je veux dire que des fois par barrière de compréhension ou de langue, on ne rentre pas dans les mêmes détails que certaines personnes. Il y a des patients qui ne veulent pas savoir comment marche le pancréas par exemple. Il y en a qui me disent non...D'accord, moi je leur dis pourquoi je suis là... pourquoi je les prends...et je leur demande de ce qu'ils attendent de moi...de ce qu'ils connaissent. Je ne veux pas leur donner...D'ailleurs, il y a qui ont du diabète depuis 40 ans, je ne vais pas leur demander s'ils savent faire une glycémie. Je me doute a priori qu'ils font des glycémies. Donc je ne vais pas leur réapprendre s'ils le font bien. Mais...ça, on se rend compte au fur et à mesure au cours de l'entretien. Je me dis : tiens s'il procède comme ça, c'est normal que ça ne donne pas les bons résultats. Mais je ne vais pas lui expliquer la surveillance glycémie. Il y en a qui ont du diabète avant que je sois née d'accord. Toutes ces compétences là je ne les revois pas, je les mets sur le diagnostic éducatif. Mais je vais travailler d'autres compétences. Je sais qu'il a un appareil et qu'il sait faire et tout ça.

    7'48

    Malika

    Comment définissez-vous votre rôle éducatif ?

    7'50

    Laura

    ...On l'oriente, on répand à ses soucis, on l'accompagne dans sa maladie, pour qu'il retrouve on va dire sa nouvelle vie. ...pour lui ça ne va être comme avant, forcement. Et toutes ces infos qu'on donne doivent être adaptées à la personne diabétique. Les conseils sur les apports en général qu'il faut... Pour lui c'est nouveau, c'est de l'apprentissage. Et c'est de notre rôle de lui apprendre à gérer sa maladie. C'est lui l'acteur. C'est un rôle éducatif. Nous on est au second rôle. L'activité infirmière c'est différent. C'est curatif, c'est un rôle prescrit, nous on est acteur, on décortique les prescriptions en gros...c'est du concret.... Euh... il n'y a pas d'échange, pas d'apprentissage pour le patient...euh... le rôle éducatif, c'est une activité ou on a plus d'autonomie sans pression, ...ça complète l'activité soignante, c'est valorisant, ça rend pédagogue, il faut aimer...en fait c'est un tout, ça apporte beaucoup pour notre activité, ça guide notre façon de voir le patient, on n'est plus dans le jugement s'il ne s'est pas faire, ça nous rend plus compréhensif...voila.

    8'16

    Malika

    Tous les patients atteints de diabète gestationnel participent au groupe ETP ?

    8'19

    Laura

    En groupe les patients participent d'emblé...euh ...on a des groupes ou très mal ou très bien ou un peu...du coup on adapte.

    8'24

    Malika

    Quelle est la durée des séances éducatives ?

    8'25

    Laura

    Les séances individuelles c'est lundi, mardi et vendredi ça dure...euh... de 45mn à 1h. En groupe...on a deux programmes, le DG et les autres...les ateliers durent à peu près trois heures et demi. Les DG c'est 2h 30... Euh...il y en a...je ne prends pas de p'tit déjeuner, il y en a ...que des boissons sucrées. On a une dame qui mange en continu...en continu...elle va au supermarché, elle ne pouvait même pas ramener ses courses jusqu'à la maison, elle fait que manger. En fait... quand on a ce genre de situation...on n'va pas détaillé... l'acide pas essentiel...voila. On s'adapte. En fait l'éducation thérapeutique c'est aussi avoir la capacité de s'adapter...voila.

    8'57

    Malika

    A quel moment vous intervenez pendant l'activité ETP ?

    8'60

    Laura

    En individuel, ...je lui apporte les connaissances, je l'accompagne dans son apprentissage...c'est moi qui gère... moi je travaille sur pourquoi le diabète est perturbé. Après, il m'explique qu'il fait son insuline toujours au même endroit et quand il se souvient de la faire. Là, moi je peux rebondir sur ça et je travaille là-dessus. Mais spontanément, je ne vais pas prendre le catalogue dès le début. C'est quand même quelqu'un qui connaît sa maladie. Qui sait à peu près faire ses dextros...son insuline...voilà. Il vit ça au quotidien. En groupe, si avec la diète, elle apporte sa partie, moi je note si besoin, j'interviens si ça à un lien avec la physiologie...si avec le médecin, pareil...après moi je rajoute des explications si besoins...c'est vrai que je n'interviens pas beaucoup, mais chacun son rôle. On peut apporter des conseils ou des réponses supplémentaires si a besoin à un moment donné. Parce que s'il est là c'est qu'il a quelque chose qui cloche. Au niveau de la prise des trois mois ou en est-il. Il va vous dire que ça a augmenté. Donc, on essaie de creuser pourquoi...voilà. Ça peut être lier à je ne sais pas moi. On peut partir sur plein de pistes. Ça peut être le stress...euh...à ce moment on essaie de savoir qu'est ce qui se passe...voilà. Des fois, il en a mare...euh...il en peut plus en ce moment, il a un peu lâcher prise sur l'alimentation...sur l'activité sportive. On s'aperçoit qu'il n'y a pas

    148

     
     

    de contrôle. Qu'est ce qui fait qu'il n'y a plus de contrôle..,voilà. C'est souvent quand même un contexte général.

    9'58

    Malika

    Pouvez-vous me décrire votre activité pendant une journée d'ETP ?

    10'01

    Malika

    J'écoute les transmissions pour voir un peu..,je ne peux pas commencer sans savoir..,souvent on se parle un p'tit peu..,et puis ma collègue me dit..,il faudra le voir parce qu'il connaît rien..,ni à la physiopathologie ni au diabète..,ça ça va être des infos. Ensuite on va apporter un peu les outils pour savoir un peu ce qui se passe. Ensuite on fera de l'éducation..,voilà.

    10'22

    Malika

    De quels outils s'agit-il ?

    10'23

    Laura

    Sur une découverte je le vois en chambre..,les représentations qu'il a..,est ce qu'il a un grand père qui a un diabète. Je dessine sur le tableau. J'explique c'est quoi le rôle du pancréas..,comment se fait l'absorption du sucre en gros..,tout ça. Et après seulement on fait de l'éducation parce qu'il faut d'abord faire le point..,puis après..,forcément..,ce que je dis c'est un peu speed. Il va retourner dans sa chambre, il va encore avoir des infos..,c'est une façon de dire mais c'est quand même c'est des choses qui vont être répétés. La glycémie..,les mots déjà..,parce que rien que les mots..,glycémie..,glycémie capillaire..,je ne sais pas moi..,l'hémoglobine..,et il va entendre des choses comme ça. Il n'va pas tout retenir d'emblé. Ça va être répété..,répété. Et puis tout ce qu'on fait..,on transmet sur le dossier patient.

    11'05

    Malika

    Comment procédez-vous au choix des thèmes en ETP ?

    11'08

    Laura

    Le choix des thèmes en séance individuelle, ça diffère d'un patient à un autre. Par exemple hier, j'avais un patient qui est arrivé..,je lui dit..,c'est bon alors la surveillance glycémie..,mais alors ce patient sans insuline retard rien du tout..,il mange des repas complètement farfelus, l'activité physique néant. Enfin rien..,il ne bouge pas..,donc lui d'emblé..,il va rien faire. Donc..,lui..,on se dit : est ce qu'on peut en tirer un peu de positif. Qu'est ce que vous seriez près à faire en négociation un peu voilà. Là où il peut nous aider. Nous..,on peut faire le traitement. Mais après..,lui à domicile..,il faut que les choses se poursuivent. Il a dit par exemple..,moi l'activité physique c'est hors de question voilà. Donc ce n'est pas la peine de proposer d'emblé..,euh..,lui.., il l'a dit c'est ça..,donc ce n'est pas ça qu'on va travailler..,s'il n'est pas près..,il n'est pas près voilà. Quand même on peut entendre ça. Il y a des gens qui ont des activités..,ce n'est pas évident même s'il faudrait faire 3 injections d'insulines. Pour l'instant à défaut de tout lâcher ou de ne rien faire c'est mieux. Si on l'oblige ça va le faire un mois deux mois et après on voit que ça décroche. Par contre le DG..,là c'est vrai que c'est un peu urgent. Je vois que le DG..,elle..,elle réalise qu'il y a un bébé..,ils sont deux..,

    12'08

    Malika

    Proposez-vous l'ETP à tous les patients atteints du diabète ?

    12'11

    Laura

    Sur la chronicité..,on a le temps de travailler l'ETP. Je veux dire qu'on n'est pas à 15 jours. Ce n'est pas en 15 jours qu'il va mettre sa vie en péril. Il y en a qui n'font jamais tout seul. Ça va être une infirmière à domicile. Ce n'est pas grave c'est à nous de s'adapter en fonction d'eux..,Il y en a qui ont des troubles..,à nous de s'adapter à..,à ceux qui ont des troubles cognitifs..,ou une incapacité de faire une injection tout seul..,ou parce qu'ils ne veulent pas..,ou parce qu'ils ont peur. Moi..,je vois..,il y a un monsieur qui a été hospitalisé plusieurs fois. Je lui ai expliqué.., ré expliquer en plus de l'éducation..,mais rien à faire..,là..,il faut juste mieux trouver quelque chose pour que le diabète reste équilibré..,qu'il soit bien traité. C'est l'horreur..,qu'il dit. Là..,c'est plutôt que l'information..,c'est ce qu'on peut faire pour lui. Il y a une dame qui dit qu'elle a peur de l'aiguille..,donc on lui montre..,on lui explique..,on lui montre sur un autre patient..,on essaie de trouver autre chose. C'est-à-dire dans la chambre..,c'est elle qui le fait. On reste à côté et une fois que ça se passe bien..,voilà. C'est difficile pour les gens d'emblé comme ça d'adhérer à tout. Et puis des fois ça marche deux à trois semaines et puis à la maison..,ben..,c'est différent..,euh. En fait c'est il y a tellement de choses qui rentrent en jeu qu'il ne faut pas passer à côté.

    13'22

    Malika

    Que représentent ces choses?

    13'23

    Laura

    Et ben. En ETP, ça peu être émotionnel, le coté familier, le coté de rythme de vie, il y a tout plein de choses. Il y aussi le coté financier pour l'alimentation. Nous on est bien attentif à tout ça, on travaille sur ça en ETP. En soin on n'a pas le temps d'aborder ses choses, on est plutôt centré sur l'acte médical, pas sur le patient. Le temps n'est pas géré pareil, je dirai on est plus relaxe en éducation. On va essayer de trouver avec le patient quelque technique qui nous aide pour que ça évolue favorablement. Il faut qu'on ait une alimentation standardisée, une hygiène de vie, un peu d'exercice physique ça peu être la marche par exemple pas forcement en club. Voila. Et tout ça pour avoir un diabète un peu équilibré on va dire parce que sur la chronicité ce n'est pas évident de

    149

     
     

    rester sage on va dire. Et tout ça pour nous ce n'est pas juste des orientations simples. Ce sont des orientations qui pèsent dans la balance. Ce qui apporte finalement un impact réel sur et sur l'équilibre glycémique et sur...pour la personne.

    13'58

    Malika

    Comment vous recrutez ces patients ?

    13'60

    Laura

    Le patient quand il vient ici il est adressé par le médecin diabéto encore souvent par un médecin traitant...ou des urgences. Et puis nous, on démarre l'entretien, on leur dit qu'est ce que vous attendez de l'hospitalisation. Qu'est ce que j'attends : là déjà ils ne sont pas encore acteur. On lui dit de venir, il obéit, puis, ils finissent par le dire...ben oui je m'étais quand même aperçu que ce n'était pas terrible les résultats ou voilà. On a la barrière le patient ne veut entendre que le médecin. Mais il faut qu'on règle tout. Comment on va retourner...Finalement le patient il se met comme même dans le mouvement. C'est-à-dire on se dit quand même qu'il va pouvoir être acteur de ce qui se passe quand même. Et puis, il y en a qui disent d'emblé, moi je ne suis pas médecin, moi je veux régler le problème. Il faut mettre les choses à plat et tout voilà. Mais ça c'est tout au début. Ça dépend du début s'il passe en urgence et, de l'urgence il vient, ou c'est la nuit qu'il arrive, ou par l'intermédiaire d'une consultation programmé, pas programmé, envoyé par...enfin...ça c'est à nous justement dévaluer au tout début de l'entretien. A nous de savoir, qu'est ce qui fait qu'il soit arrivé ici. Est-ce que c'est vous qui aviez tiré la sonnette d'alarme. Est-ce que c'est votre femme, votre médecin. Il faut savoir, qu'est ce qu'il sait faire. Souvent on donne un carnet de suivi...c'est quoi un carnet voilà.

    14'12

    Malika

    Quelle est la durée d'un entretien thérapeutique ?

    14'14

    Laura

    C'est aléatoire...le diagnostic et les séances individuelles durent une heure si on fait vraiment un projet avec des...des objectifs bien précises. Avec une éducation initiale, un suivi et tout ça.

    14'24

    Malika

    Quelles compétences sollicitez-vous pendant l'activité d'ETP ?

    14'27

    Laura

    En formation il nous donne une situation. Un...fait le patient... l'autre fait le soignant. On laisse faire le sketch entre guillemets. Après, selon l'analyse et le niveau de chacun...on se rend compte qu'il ne fallait pas faire comme ça...ou...on est peu être passé par une autre voie. L'attitude aussi...euh...il ne faut pas se tenir comme ça par exemple de face...alors qu'on devait se mettre sur le côté. C'est ces petites choses simples juste sur l'attitude. Déjà le patient quand il se sent écouté...ça change le contact. Le premier contact est primordial.

    14'54

    Malika

    Faut-il passer par la formation pour avoir ces compétences ?

    14'57

    Laura

    On va dire que la formation nous aide à prendre conscience de ces compétences. Euh...pour moi un soignant qui va exercer par exemple dans un service où il va rencontrer des gens d'une manière ponctuelle, je dis pour des pathologies aiguës dans un service de chir...par exemple, il ne va pas avoir développé au cours de son expérience une expertise en éducation thérapeutique. Par contre, un soignant qui travaille dans un service où il rencontre des pathologies chroniques depuis une vingtaine d'années, intuitivement, même sans avoir conscience, elle va pouvoir développer des compétences qui la dirigent vers les compétences nécessaires à l'éducation comme l'écoute, la reformulation, l'attitude et tout ça...

    15'32

    Malika

    Même sans formation?

    15'33

    Laura

    Même sans formation. Après, ça sera des compétences comment dirais-je, plus personnel...euh...intuitives. Et ça ne veut pas dire que la formation n'est pas...euh...ne rajoutera pas une plu value bien évidement. Mais je pense que naturellement, quand on travaille dans certains services, en pneumologie ou en...euh...en diabétologie, et puis quand on a aussi...une grande expérience dans ces services, je pense que ça dépend aussi du caractère du soignant et de sa personnalité. C'est un ensemble on va dire. Et ça joue beaucoup sur le comportement du soignant.

    16'06

    Malika

    Pour vous les soignants qui travaillent en chir ne peuvent pas éduquer ?

    16'09

    Laura

    En fait, ils peuvent éduquer à l'auto sondage par exemple. Mais ça passe au second plan. Dans les services où il y a une pathologie chronique, on se rend compte en fait qu'on n'est pas dans l'urgence. On est dans la qualité et dans une prise en charge à longue durée et du coup l'éducation thérapeutique est mieux adaptée. Mais en chir c'est de l'aigu, on développe beaucoup plus des compétences de soins d'urgences on va dire, le relationnel et l'écoute du patient sont un peu négligés. On ne peut pas il y a beaucoup de soins à faire dans ces services. Donc, je ne sais pas si ces soignants veulent vraiment intégrer l'ETP ou pas, en plus c'est une question de personne, de caractère, et...et... de savoir faire et être avec le patient et ce n'est pas tout le monde qui l'a même

    150

     
     

    en étant soignant...voila.

    16'44

    Malika

    Percevez-vous une différence entre l'éducation au soin de l'éducation thérapeutique ?

    16'48

    Laura

    Mais c'est un soin qu'on va mettre au même niveau qu'un autre. Oui oui pour moi c'est évident. Moi je suis sensibilisé déjà, vu que je fais ça depuis 12 ans, on va dire. Ensuite, j'ai fait une formation de 40 h. Donc pour moi l'éducation ça aller de soi. Pour moi c'est comme ça que je vois mon métier. Je ne le vois pas sans. Sinon c'est un métier qui est dénué de sens. Donc, pour moi c'est inclus dans la prise en charge et après le fait de faire la formation ça a renforcé. Je ne peux pas travailler sans éducation, les deux se complètent. Ça me donne des outils, ça ouvre les yeux sur certaines choses. Ça améliore les prises en charges. Ça renforce les convictions personnelles. Je ne peux pas choisir entre les deux. L'éducation au soin, est différente de l'ETP, déjà l'organisation, le temps, la posture, sont pas pareil. On fait l'acte médical, on informe le patient, mais sans plus. Je ne vais dire au patient qu'est ce que tu penses du soin je sais que c'est désagréable...voila. En plus je suis concentrée sur le soi, pas sur la personne...voila. En plus je suis concentrée sur le soin, pas sur la personne, il n'y a pas ce face à face qu'on a en séance éducative...on ne regarde pas le patient, on observe pas ses réactions, on se centre sur le pansement, sur la perf si elle passe, mais pas sur le patient...

    17'21

    Malika

    Procédez-vous à une organisation spécifique pour la réalisation d'ETP ?

    17'24

    Laura

    Des soignants qui se sentent moins à l'aise à faire de l'ETP, il y en a quand même qui sont un peu durs. C'est vrai que c'est comme une classe. Si tout le monde pointe à 14h et c'est bien le bazar, et, qu'il n'y a pas l'accueil de programmer. Déjà le service complètement désorganisé avec des chariots par tout. C'est sûr que ça n'donne pas une image très positive pour la prise en charge. C'est déjà même si la chambre n'est pas prête et que voilà on arrive à leur dire... euh...bonjour on vous attend. Déjà on vous attend...ça change tout...même si ce n'est pas prêt...c'est important de leur expliquer qu'on les attendait et que la chambre va bientôt être prête. C'est important de les laisser attendre sur un siège tout seul. Il se dit il n'y a personne qui vient me voir...il voit que les soignants passent tous devant sans savoir qui est qui. C'est important d'expliquer. On ne se dit pas par exemple il n'a pas besoin de savoir si on est près ou pas. Non...on lui explique qu'il y a eu du retard et qu'on ne l'a pas oublié. Moi...je trouve que c'est rassurant pour le patient de savoir. Sinon le patient risque de renter chez lui le fait que personne ne s'occupe de lui. Et comme il est stressé, et qu'il ne souffre pas, il n'a pas mal, rien ne le retient, il rentre chez lui, ceci dit il risque de revenir par le biais des urgences mais pour l'instant il ne réalise pas il n'a pas la conscience de la maladie. Donc, pour moi l'accueil c'est très important et surtout l'attitude qu'on a avec ces patients.

    18'36

    Malika

    Adoptez-vous les mêmes attitudes avec les patients en ETP qu'au soin ?

    18'39

    Laura

    Moi je dis l'accueil dans l'éducation même pour notre métier en général c'est très important, même des fois certains soignants semblent dépassés par l'urgence et passe sans voir le patient qui attend dans le couloir. Moi, avec du recul je trouve qu'il faut revoir nos habitudes de travail. Prendre du temps, je ne sais pas s'organiser autrement peut-être et ça...ça se discute. Enfin je reviens sur l'attitude c'est important déjà. L'autre jour je me suis retrouver avec un patient qui a une prescription médicale pour un diagnostic éducatif, il arrive, il est déjà venu, ce n'est pas mal pour un chauffeur routier, alors il est tout le temps assis dans son camion et pour l'alimentation, alors il n'a rien mais rien mais rien à faire mais alors la qui n'a rien à faire de l'alimentation. C'est...et quand il m'a vu, je l'observe, il doit se dire : mais qu'est- ce qu'elle va me dire cella. Moi j'arrive, bonjour je suis la référente éducatrice, il me regarde, il essaye de faire demi-tour. Mais si je n'ai pas un peu d'expérience on va dire et je l'aborde pas avec une attitude d'humour. Alors là c'est mort. Donc le contact c'est un peu compliquer ce n'est pas comme le soin. Au soin on s'impose, mais en ETP on s'adapte voilà c'est un peu ça.

    19'45

    Malika

    Faites-vous l'ETP en blouse ?

    19'47

    Laura

    J'aimerai mais ce n'est pas possible. Ben non. Ici dans le service on est tous en tenu de travail. C'est le règlement, ça reste un service de soins on va dire.

    19'55

    Malika

    Que représente pour vous l'apport de la blouse en ETP ?

    19'57

    Laura

    Et ben...pour moi c'est l'image de la verticalité de la relation ça représente la notion du savoir détenir le savoir c'est moi qui sais. Et on veut partir dans l'idéal je pense que pour l'éducation c'est quand même important d'oter la blouse du moment que c'est le patient qui emmène les informations, c'est lui l'acteur je veux dire. Et nous normalement on doit se positionner au second plan, second rôle. Et ça...ça ce n'est pas évident, si on est pas préparé et conscient de ça.

    151

    20'21

     

    Malika

    Et vous, êtes-vous au second rôle en ETP ?

    20'23

    Laura

    Ah, oui. J'en ai pris conscience, ça ne sert à rien de se braquer, et n'aboutir à rien en fin de compte du moment qu'il s'agit d'un accompagnement pour le patient et que c'est lui qui nous apporte l'info, déjà ce qu'il connaît pour pouvoir l'aider et lui apporter ce qui est nécessaire, s'il est là c'est qu'il y a un déséquilibre quelque part. Et nous on a le rôle de la béquille pour que ce patient revoit ses habitudes de vie et détecte l'événement déclencheur qui fait que ce patient soit là. Pour moi c'est ça l'éducation. Déjà dès l'éducation initiale c'est lui qui parle.

    20'58

    Malika

    Avez-vous des patients qui rechutent malgré l'éducation ?

    21'00

    Laura

    A oui souvent. Soit parce que le traitement ne marche pas tout simplement et les résultats ne sont pas bons. Et finalement, ils disent : ça sert à rien de se soigner. Et finalement, je fais bien mais ça ne marche pas. Donc l'éducation...on leur explique que le traitement ce n'est pas la cause. Et là le rôle de l'éducation c'est de les aider à se rebooster...les coachés voilà. On ne veut pas que ce soit top au niveau des résultats, mais sur la chronicité on essaie de rester sur les normes. C'est ça l'éducation.

    21'29

    Malika

    C'est quoi une éducation initiale ?

    21'31

    Laura

    En fait, on commence par l'éducation initiale, c'est le diagnostic éducatif qu'on fait sur l'ordi en gros. Puis on détermine les objectifs avec le patient, on fixe des rendez-vous pour le suivi. Par exemple ce matin, il y a des personnes qui sont revenues deux mois après l'hôspi. Ils avaient des objectifs à atteindre et là on va voir ensemble comment ils ont géré tout ça.

    21'50

    Malika

    Faites-vous l'initial pour tous les patients ?

    21'52

    Laura

    Nous on fait l'initial pour tous les patients hospitalisés pour un diabète. On commence l'éduc dans les chambres, ou dans le bureau, c'est personnalisé, bien sûr. Et puis on propose le suivi et le renforcement et les ateliers.

    22'03

    Malika

    C'est quoi le renforcement?

    22'04

    Laura

    En fait, le renforcement ce n'est pas pour tous les patients. C'est que pour les patients qui ont du mal à gérer, ou qui ont besoin de plus de séance éducative, donc nous, on donne des rendez-vous pour des entretiens de renforcement.

    22'16

    Malika

    Le suivi se passe comment ?

    22'18

    Laura

    On organise le suivi, en gros, pour les objectifs qui ont été fixé, les gens reviennent, pour voir s'ils ont atteint leur objectif ou pas encore. Et le suivi peut se faire aussi au niveau du réseau, donc ils ont le choix.

    22'30

    Malika

    Tous les patients doivent passer par ces stades éducatifs ?

    22'33

    Laura

    Alors...euh...en fait, ce n'est pas tous les patients qui passent par ces stades éducatifs, c'est là, la question. Nous on démarre un diagnostic éducatif, il y en a qui passe par les trois stade et d'autre non, il y en a qu'on ne voit qu'une fois, et qui ne reviennent plus, d'autre font que deux stades, et d'autre viennent régulièrement. Voila.

    22'48

    Malika

    Vous les rappelez ces patients ?

    22'50

    Laura

    Ben, c'est la question, nous on fixe des rendez vous, le jour même si la personne n'est pas venue, nous on appelle, on laisse un message, et puis voila.

    22'58

    Malika

    Faites-vous le suivi téléphonique ?

    22'60

    Laura

    Ah, non, non, on ne fait pas le suivi téléphonique, on n'a pas le temps. En plus on n'a pas discuté de cette organisation, je sais que ça existe, peut être que c'est mieux pour les patients, le fait que le déplacement n'est pas prix en charge et tout ça...mais, il faut tout une organisation.

    23'16

    Malika

    Ça perturbe votre organisation?

    23'18

    Laura

    Je ne dis pas que ça perturbe. Mais si. Du moment où je commence à donner des coups de fil, on va dire si j'en donne 3. On va dire 20 minutes pour chaque patient. Alors que je suis en consulte, j'ai des patients dans les chambres à voir, sans oublier les nouvelles consultes. Sans oublier ceux qui se présentent sans rendez-vous qu'on prend aussi parce qu'ils viennent c'est que ça ne va pas. Donc, il faut toute une organisation à mon avis.

    23'45

    Malika

    Avez-vous perçu un changement dans vos habitudes de travail ?

    23'48

    Laura

    Le changement c'est dans la conscience de l'écoute peut être. Peut être que je faisais naturellement. Mais, je n'en avais pas forcement conscience...la

    152

     
     

    conscience de l'écoute et d'autres outils...

    23'59

    Malika

    De quels outils s'agit-il ?

    24'01

    Laura

    Il y a quelques outils par exemple utilisés en entretien motivationnel, donc réemployés, que je ne faisais pas...euh...pas couramment. L'importance du diagnostic éducatif. Euh...le...le...ça je le faisais déjà. Ça m'a renforcé, le fait de ne pas multiplier les objectifs thérapeutiques et les rendre vraiment adapter au besoin du patient. Et puis bien explorer tous les domaines du patient. En fait ne pas chercher une solution qui euh...qui pour lui ne correspond pas à un problème. Nous ça correspond à un problème, quand on voit la situation. Mais si pour lui ce n'est pas un problème, ça ne sert à rien de chercher des solutions. En fait c'est vraiment se coller à sa vie en fait. C'est un accompagnement. Donc, ces mesures nous orientent, ... nous cadrent à prendre en charge le patient dans sa globalité, on ne se centre pas que sur le soin comme avant les traitements, l'insuline, le régime...on imposait des choses, là ce n'est pas pareil, on a un programme à suivre, on fait le diagnostic éducatif, les séances et tout ça.

    24'42

    Malika

    Pourriez-vous me parler de vos outils éducatifs ?

    24'44

    Laura

    Les instruments éducatifs...Il faut bien débuter par un diagnostic éducatif. Utiliser justement des techniques de communication, prévoir, planifier un programme...évaluer, suivi... Et puis, il y a nous, les patients, ce qui accompagne, les ateliers, l'ordinateur, le diagnostic, ... c'est les moyens, et puis il y a les outils... visuels comme les cartes, les schémas. C'est la méthode et puis il y a les outils...euh...et bien il peut en exister autant qu'il n'existe de personne...euh...je pense. Je ne pense pas qu'il y a un outil...euh...qui...soit valable pour tous le monde voilà.

    25'21

    Malika

    A quoi est liée cette diversification d'outil ?

    25'23

    Laura

    Etant donné que la population...euh...la majorité de la population diabétique par exemple pour le DG, c'est des femmes que j'ai vu jusqu'à présent sont d'origine Centre Africaine ou Nord Africaine, il y eu des origines...euh...Indou...enfin. Et bien je voudrai...en fait je viens d'en discuter avec l'externe la dernière fois et j'ai appelé l'Hôpital de Bobigny, j'ai appelé à...je voudrai trouver des outils justement qui me... qui me permettent de mieux m'adapter à cette population. Donc, là je ne veux pas forcément créer d'outil. Mais, je souhaite reprendre des outils qui ont été déjà utilisés dans...dans certaines régions quoi. Donc, là pour l'instant je suis en recherche...euh...on ne m'a pas donné de suite, j'attends. Sinon je vais essayer de le créer moi-même, ce n'est pas grave.

    26'10

    Malika

    Et vos outils actuels?

    26'11

    Laura

    Là pour l'instant...euh... les outils qu'on a, ils ne sont pas suffisamment adaptés, oui.

    26'14

    Malika

    Par exemple?

    26'15

    Laura

    Par exemple pour l'alimentation, il y a tout le monde comment dirais-je. L'identité alimentaire est vraiment différente en fonction de...des origines et du coup...elle...euh...toutes les préconisations, tous les outils sont adaptés...euh...à...euh...à des plats traditionnels...français et euh...je souhaiterai que se soit aussi adapter à des plats traditionnels euh...d'Afrique Centrale, d'Afrique du Nord. Donc, je pense que c'est tout à fait faisable. Le tout c'est que je sois suffisamment documentée. Et puis...et puis je m'appuie sur d'autres expériences quoi. Il faut savoir que la majorité de la population diabétique on va dire est étrangère je pense. Donc il faut s'adapter. Au niveau de la maternité ça représente plus de la moitié de la population, donc à ne pas négliger je pense.

    26'57

    Malika

    Quel rapport avec la maternité ?

    26'59

    Laura

    En fait la difficulté avec le DG...euh...étant donné qu'il y en a beaucoup en mater...donc, la mater nous envoie ces patients et nous, on fait des consultations individuelles après le premier entretien. Et là, on doit procéder en groupe pour une première approche. En fait c'est en maternité qui qu'ils nous inscrivent les femmes qui ont une glycémie à jeun perturbée. Et après, on a un groupe d'emblé. Ça commence par 2h d'information pour être le plus personnalisé possible alors qu'on est en groupe. En donnant un maximum d'info au groupe, il faut s'adapter, je dirai voila. En rentre plus au moins dans les détails selon l'intérêt de chacun et puis selon les priorités définies pour chacun.

    27'42

    Malika

    Puisque le premier entretien se fait en groupe. Comment procédez-vous à la personnalisation ?

    27'46

    Laura

    En fait c'est ça la difficulté par ce que c'est ça toute la difficulté. Et bien c'est que c'est qu'on les fait parler comme même.

    27'52

    Malika

    Et tous les patients participent ?

    153

    27'54

     

    Laura

    En groupe, les patients finissent par participer. Au debout c'est difficile. Mais ils participent d'emblée. Ils nous expliquent leur situation. Donc, ce qu'elles ont...donc le diabète gestationnel, si elles ont déjà vécu ça etc. Ensuite, on fait le lien avec l'insuline, on explique un peu la physiologie, le pancréas. Ensuite, on reprend chaque situation sachant que le fait d'entendre l'autre par exemple on effectue presque des entretiens alimentaires pour chacune. On pose des questions comme : que prenez-vous au p'tit déjeuner mesdames, et vous madame... Alors voilà, et tout le monde discute sur le p'tit déjeuner. Ensuite...qu'est-ce que vous prenez comme boisson. En fait on essaie de faire quelque chose de très personnalisé en étant en groupe. Moi je prends note pour chacune d'entre-elles. Aussi en même temps, on est en groupe, du coup elles se lâchent un p'tit plus que si elles étaient toutes seules. Et donc, du coup on est plus proche de la réalité. Finalement, même si on a moins de temps c'est plus dur pour nous euh...ce n'est pas plus mal. Si vraiment je me rends compte que nous avons abordé que quelques petites choses, et que nous n'avons pas beaucoup de temps, et que le chemin va être long. Contrairement aux autres pathologies le DG...le temps est bien déterminé. Donc, alors je vais les revoir la semaine suivante, alors que normalement je ne les revoie pas, c'est le médecin qui revoit chaque patient avec son carnet. Et bien moi, si je vois que c'est l'anarchie...et que ça nécessite d'approfondir je les revoie bien sûr en individuel.

    29'16

    Malika

    Avez-vous choisi cette méthode d'entretien en groupe avant l'individuel ?

    29'19

    Laura

    Non...Pour le GD, on n'a pas choisi de méthode, mais on est obligé de procéder ainsi, si en maternité, ils détectent 4 ou 5 patientes qui ont besoins d'être éduquer. Nous on ne peut pas procédez en individuel, on n'a pas le temps. Le mieux c'est le groupe et puis on personnalise si besoin. Mais si les patients comprennent, et si nous, on a compris leur représentation et on les écoute un petit peu. Ils adhèrent à cette méthode d'ETP au début puis ils lâchent forcément après l'accouchement. C'est comme dans tout. D'autant plus que ce n'est pas évident de respecter un régime alimentaire français et qu'on a d'autres habitudes alimentaires je pense.

    29'55

    Malika

    L'introduction de l'activité d'éducation dans le service a-t-il transformé vos habitudes de travail ?

    29'59

    Laura

    Si forcement obligatoirement dans le sens où on n'impose pas. On ne va pas dire : on va vous mettre sous insuline. On en discute, c'est-à-dire...euh...ça prend plus de temps. Il faut discuter. Il faut négocier et parfois on revient en arrière. Et puis les gens négocient aussi sur les maladies chroniques, c'est comme ça. Pourquoi c'est obligatoirement l'insuline et pas les médicaments.

    30'22

    Malika

    Avant?

    30'23

    Laura

    Avant ça marché avec ce qu'on savait je trouve. On ne savait pas faire autrement j'ai envie de dire. Donc c'est un peu comme tout les outils qu'on nous met. Vous voyez maintenant il y a des outils qui vont nous aider à pouvoir évaluer l'apprentissage de quelqu'un. Avant on n'était pas ici, il n'y avait pas l'éducation thérapeutique on était en médecine...tout ça ça n'existait pas. Vous voyez ce n'est que des outils ça ne s'adapte pas à tout le monde.

    30'42

    Malika

    Avez-vous perçu un changement par rapport à votre comportement ?

    30'45

    Laura

    Oui forcément, on change de comportement personnel, même dans la vie quotidienne on change, on est plus attentif, on change de méthode on est plus dans la dictée on va dire faites ceci faites cela. On écoute, on essaie de comprendre les habitudes de chaque patient, on analyse, on discute avec lui comment il compte s'organiser, est ce qu'il est prêt de modifier un peu ses habitudes ou pas. Comme pour l'alimentation. Avant on leur disait de ne pas manger de féculant...ne manger pas de ceci de cela...le même régime pour tout le monde, tous pareil. Maintenant on adapte. Tout le monde n'a pas le même travail. Il y a douze ans de cela. Mais on voit encore des patients qui nous disent qui pensent encore qu'il ne faut pas du tout manger de sucre...ça arrive de moins en moins mais ça arrive encore. Ils ont des représentations du diabète un peu sévère, donc le diabète ça fait peur, ça représente beaucoup d'interdit...et on ne change pas comme ça des représentations d'emblé.

    31'42

    Malika

    Comment percevez-vous la relation soignant/soigné en ETP ?

    31'45

    Laura

    En fait, ce n'est pas du tout pareil qu'en soin. Alors...heu..., en ETP, on est au second rôle comme je l'ai déjà dit. Déjà ça change tout. Donc, c'est le patient qui est acteur de sa situation. Nous on a plus le rôle d'accompagnement et de réajustement on va dire. Donc le patient est plus alaise, il raconte son vécu, il apporte beaucoup de choses. Nous on est en position d'écoute, plus d'écoute pour pouvoir interpréter ce qu'il dit. Ce n'est pas juste une discussion et voila. Non il faut beaucoup d'attention, de reformulation, s'il n'arrive pas à voir les choses et tout ça. Donc la relation c'est une sorte d'entretien, de

    154

     
     

    dialogue, c'est plein d'émotion aussi.

    32'23

    Malika

    Et la relation en soin ?

    32'24

    Laura

    Ben...en soin, c'est nous qui sommes acteurs déjà. Lui il consent le soin on dire sans trop de questions. On plus on n'a pas le temps de discuter sur tout, sur tout pas sur son vécu. Mais le patient quand il voit que le soignant est centré sur le soin, il ne dérange pas trop on va dire comme si qu'il connaît son rôle à ce moment. Ça parait bizarre mais c'est comme ça.

    32'47

    Malika

    Dans vos pratiques par rapport aux soins avez-vous perçu un changement par rapport à la relation soigné/soigné ?

    32'53

    Laura

    Moi, oui forcement, je fais attention, je regarde le patient quand je fais le soin, je prête plus d'attention, plus d'écoute. Et tout ça en lien avec mon statut d'éducatrice je trouve.

    33'03

    Malika

    Et c'est comment par rapport à votre identité professionnelle ?

    33'06

    Laura

    Ça perturbe forcément mon identité de soignante à chaque fois qu'il y a quelque chose de nouveau. Je pense que l'adaptation, elle est aussi pour nous. Ce n'est pas si facile de faire l'entretien éducatif...je veux dire. Ça nécessite des compétences...euh...plein de choses voilà. Déjà les gens attendent plus de réponses derrière. C'est quand même l'expérience qui fait parfois les choses. Si on n'a pas le regard incarné et on n'a pas l'expérience sur l'insuline, sur les délais, sur l'alimentation, sur les petites choses. Je pense que parfois que c'est l'expérience oui l'expérience de toute situation vécue, on disant on s'était mal pris...euh...et on revoit nos façons de travailler c'est important.

    33'50

    Malika

    Et par rapport à la nouvelle organisation ?

    33'52

    Laura

    La nouvelle organisation s'est faite au fur et à mesure. Après, il y a le côté personnel...euh...et ce qu'on a envie et ce qu'on n'a pas envie. C'est difficile...euh...il y a des jours ou c'est difficile d'être à l'entretien. De se dire comment on va amorcer avec certains patients. Ou parce qu'on ne peut être aussi découragé parce qu'on voit ce qu'on fait. On n'a jamais évalué l'éducation thérapeutique, dès fois, on a quand même l'impression de s'y prendre mal parce que ça suit pas. Aussi parce que l'équipe ne suis pas, c'est ce que je dis...euh...le problème c'est qu'on fait l'éduc...mais qui regarde derrière ce qu'on fait. Qui analyse les pratiques qu'on fait. Moi, ça fait deux moi que je fais l'éducation, peut etre je m'y prend à l'envers, peut etre c'est pas du tout ça ce que je fais. Mais qui nous dit ça...personne.

    34'44

    Malika

    Il n'y a pas de suivi ?

    34'45

    Laura

    Il y a le suivi des patients mais c'est nous qui le faisons. C'est le questionnaire de satisfaction pour le groupe et le pour le suivi, je revoie le diagnostic ...pour le suivi ils ont le choix. Soit ici soit au réseau Pour le suivi ils ont le choix. Soit ici soit au réseau. Et c'est là que le réseau a son intérêt. Par exemple pour l'activité sportive, il n'y pas des séances de kiné. Ils ont tous un programme d'éducation...il y a des activités diverses...ça peut être la marche...voilà.

    35'03

    Malika

    Et le suivi professionnel?

    35'04

    Laura

    Il n'y a pas le suivi d'un professionnel. Qui nous dirait si c'est ça ce qu'on fait. L'analyse des pratiques qu'est ce qui la fait. C'est ce qu'on disait à la réunion du service...l'analyse de l'activité...il faut justifier de nos formations d'éducation thérapeutique. Il faut justifier de tout ça. Mais qui vient nous évaluer sur le terrain pour nous dire que finalement on ne fait pas juste ce qu'on fait...on prend pas juste un thé avec le patient...et ben personne...on remplit des dossiers sur l'ordi...qui regarde et remarque ce que je marque en compte rendu...qui...pas du tout.

    35'39

    Malika

    Et qui regarde ce que vous faites ?

    35'41

    Laura

    Personne, il n'y a personne qui regarde ce qu'on fait... je pense.

    35'44

    Malika

    Et la continuité du suivi ?

    35'45

    Laura

    Il n'y a pas de continuité pour le suivi, rien pour l'instant.

    35'46

    Malika

    Où se situe le problème à votre avis ?

    35'48

    Laura

    En fait, le problème c'est l'outil de recueil de données qui n'est pas assez polyvalent pour que chacun puisse allez chercher l'information qu'il a besoin.

    35'55

    Malika

    S'agit-t-il de la compatibilité de l'outil ?

    35'57

    Laura

    Non...non je ne suis pas sûr. Mais au-delà de dire que l'outil n'est pas adapté moi je ne suis pas forcement d'accord. Quand je vois pour les transversaux en

    155

     
     

    tout cas et puis même pour les autres services le fait que le compte rendu apparaisse dans les trans. Elles lisent toujours les trans derrière.

    36'16

    Malika

    A quel niveau se situe le problème à votre avis ?

    36'18

    Laura

    En fait nous on n'est pas dans le dossier patient. Le dossier éducation thérapeutique est un dossier dissocié du dossier patient. Il faut ouvrir une autre

    session pour que moi, je remets au point, je lui demande s'il est marié, s'il a des enfants, sinon ça ne me valide pas mon dossier.

    36'34

    Malika

    Vos patients ont combien de dossiers ?

    36'36

    Laura

    C'est que chaque patient a 2 dossiers, oui mais il faut inclure le diagnostic éducation au dossier patient. C'est là où je dis cela veut dire que les filles en hôspi n'ouvrent jamais quasiment le dossier éducatif. Ce dossier...donc on peut partir sur deux pistes différentes. C'est là où je me questionne quand le patient nous dit : C'est hors de question, je ne me piquerai pas. Et qu'on s'aperçoit qu'au moment de son retour à domicile et qu'on me dit...euh...et ben...il ne s'est pas s'éduquer...il n'est pas éduqué. Il ne s'est pas se piquer...euh...Et ben...non. Le patient ne veut pas se piquer. Il faut lui mettre une infirmière à domicile...c'est ce que j'avais mis sur son dossier éducatif. C'est là où je me dis il y a quand même un problème. Ça fait trois jours que je le vois...euh...je le mentionne sur son dossier informatisé...mais personne n'a accès aux infos sur l'ordi c'est la galère de communication entre collègues.

    37'22

    Malika

    Une galère de communication?

    37'24

    Laura

    Oui, forcement. Il y a deux outils différents.

    37'26

    Malika

    Et vous le transmettez verbalement aussi ?

    37'28

    Laura

    Ben...euh...normalement si on l'écrit on n'est pas censé faire des transmissions à la longueur de la journée alors. On le fait parce qu'on sait que ce n'est pas lu. Mais c'est difficile à être derrière tout ça. Là...là...c'est plus facile parce que c'est nous et...euh...sur deux moi. Et avant on changeait tous les deux trois jours. C'était la galère pour l'info.

    37'48

    Malika

    La galère comment?

    37'49

    Laura

    Et ben à chaque fois on fait entrer les données de nouveau, parce que notre dossier d'éducation thérapeutique n'est pas relié au dossier de l'hôspi c'est tout...voilà.

    37'54

    Malika

    D'accord. Et vous faites comment ?

    37'56

    Laura

    En fait, il y a toute une partie administrative qu'il faut valider à chaque fois. En plus on ne peut jamais rajouter sur une trans ou revoir ce qui est fait avant. Donc si on n'a pas une bonne mémoire on repose les mêmes questions à chaque fois, style s'il est marié ou pas, si ceci si cela. Et tout ça c'est une perte de temps en plus c'est gênant vis-à-vis du patient.

    38'17

    Malika

    Et comment vous gérez alors ?

    38'19

    Laura

    Et ben...quand le patient revient en entretien...hier par exemple j'ai eu la chance de prendre monsieur dès l'entrée, donc j'ai marqué tout et tout. Mais ma collègue pour faire son entrée administrative elle a du reposer les mêmes questions que j'avais déjà posé donc...c'est...c'est...enfin...ça.

    38'36

    Malika

    C'est comment pour le patient ?

    38'38

    Laura

    C'est hyper désagréable. Et quand il revient pour une autre éducation et répond à chaque fois aux mêmes questions...lui...tu vois...tu vois...l faut à chaque fois redire...redire...enfin...tu vois pour lui ce n'est pas pris au sérieux.

    38'49

    Malika

    Et c'est quoi votre ressenti ?

    38'51

    Laura

    On perd du temps...on perd du temps alors. Maintenant pour moi comme je connais bien ce logiciel et les trucs intérieurs...c'est facile d'aborder l'entretien.

    38'59

    Malika

    Et pour vos collègues?

    39'01

    Laura

    Et ben...chacun fait comme il peut, on va dire ça comme ça.

    39'04

    Malika

    Discutez-vous entre collègues sur ces problèmes de gestion ?

    39'07

    Laura

    Euh...ben...non. En on parle comme ça sans plus. Mais il n'y a pas eu de réunion disant on va parler des problèmes de la gestion de l'éducation. Pour l'outil chacun fait comme il sait on va dire et galère sûrement. Mais pas de suivi comme j'ai déjà dit. Après en travaille avec les moyens qu'on a. mais dommage par ce qu'on perd énormément de temps à transcrire et retranscrire, alors qu'on pouvait avoir un seul dossier et tout le monde peut le consulter au lieu de

    156

     
     

    séparer les deux dossiers alors qu'il s'agit du même patient. C'est dingue, mais voila...

    39'39

    Malika

    Pensez-vous que l'ETP doit être pratiquez par toutes les infirmières ?

    39'42

    Laura

    Ici, en diabéto je dirai oui, c'est très important du moment qu'on traite une pathologie chronique, aussi tout le monde sera sur le même fil pour la continuité, pour l'organisation, c'est important, en plus si tout le monde pratique l'éduc, on aura les mêmes visions, regard, euh. Les mêmes compétences, le même langage quoi. Peut être là moi je procède autrement, j'ai plus d'écoute, enfin ce n'est pas la même prise en charge pour le même patient...oui ça serai bien si tout le monde est formé...Mais, il parait que c'est une question de budget.

    40'22

    Malika

    Travaillez-vous en équipe pluridisciplinaire en ETP ?

    40'25

    Laura

    Oui, les ateliers de groupe c'est avec la diète, le médecin s'il est disponible, il y a aussi le psychologue mais c'est lui qui décide s'il voit les patients en groupe ou en individuel...euh...l'atelier pied c'est avec une aide soignante formée et moi-même. En fait, c'est un peu dur de travailler vraiment en équipe pluri...euh, dès fois, les gens n'sont pas disponible, ou ils ont des réunions, ou ils sont pris ailleurs...euh...donc c'est vraiment dure de se connecter ensemble on va dire.

    40'59

    Malika

    Pourriez-vous me décrire votre activité de soignante ?

    41'02

    Laura

    Oui oui, pendant dix mois consécutifs je travaille avec mes collègues comme infirmière simple médecine et en diabéto on va dire...donc, je commence à 6h30 jusqu'à 14h30...dès fois ça déborde..., le matin dès l'arrivée, je fais les trans, je prépare mon tour du matin, donc mon chariot de soins, les traitements en perf ou en peros, je fais les toilettes avec l'aide soignante si besoin, les réfections des lits et tout ça voila. On donne les petits déj, on vérifie les glycémies, on éduc à l'auto-injection, je fais les pansements si besoin...euh...le tour avec le médecin, je réponds aux communications, je fais les entrées des urges, les sortie...voila. Ensuite je distribue les médocs du midi, je fais ou je vérifie les dextros...euh...je vérifie si les patients ont mangé ou pas, donc, j'oriente, je conseil...Et en fin de matinée, je fais mes trans écrites sur le dossier patient et sur l'ordi...euh...on fait les trans orales avec l'équipe d'après-midi ...voila...euh... Et si je suis du soir, c'est de 14h15 à 91h15. En gros c'est pareil, sauf qu'on fait en plus les sorties et les entrées des patients et on ne propose pas les toilettes, sinon on fait énormément de paperasse, on prépare les dossiers des entrées programmées, des staffs, on fait aussi les réunions...

    43'35

    Malika

    Avez-vous des choses à rajouter ?

     

    Laura

    L'éducation ça nécessite d'être plus compétent et avoir plus de connaissance je trouve. Ils veulent des réponses plus précises plus adaptées. Le fait de généralisé les choses par rapport au groupe, moi je trouve que c'est bien aussi. On n'est pas obligé d'être pointilleux dans tous les domaines. Alors vraiment si on veut personnaliser la chose il faut être pointilleux et faire des diplômes dans tout. Ce n'est pas le but. Les patients, si nous on arrive à expliquer bien les choses et s'ils connaissent et s'ils imaginent. Le moment privilégié avec le patient va être transmit aux collègues. Et du coup ces collègues doivent être dans la même démarche. Si la personne se sente écouté, se sente respecté et autonome dans ses choix et ses prises de décisions. Ça ne se déroulera pas forcement mieux si on l'oblige ça ne va le faire. Du coup ça nous oblige à nous comporter un peu différemment malgré tout. Mais pour arriver à faire tout ça il faut qu'il y ait plus de communication entre nous et que le logiciel ne beugue pas. Et tout ça il faut du temps, et le temps c'est le problème de tout le monde je trouve. Voila.

    45'23

    Malika

    Merci pour cet entretien et bonne continuation.

    157

    Script de l'entretien avec Infirmière en service de Cardiologie
    Hôpital de Blois

    Entretien réalisé le 18/06/2015

    Nous allons faire un entretien d'une quarantaine de minutes, si vous êtes d'accord, cet entretien concerne votre activité d'éducatrice. Je vais donc vous poser quelques questions pour orienter le discours. Notre objectif n'est pas de juger votre façon de travailler. La majorité des questions sont ouvertes volontairement pour vous laisser répondre le plus spontanément possible, sans vous influencer.

    0'00

    Malika

    Vous pouvez commencé.

    0'01

    Sophie

    J'ai la trentaine infirmière à l'hôpital depuis 13 ans.

    0'03

    Malika

    Depuis quand dans ce service ?

    0'05

    Sophie

    Depuis 9 ans.

    0'06

    Malika

    Vous étiez dans quel service avant ?

    0'08

    Sophie

    Avant j'ai commencé en médecine polyvalente. J'ai fait 3 ou 4 mois. Donc j'allais dans les services. En fait on est titulaire dans l'hôpital mais pas dans le service. Ensuite j'ai fait une structure d'EPAD une structure de gériatrie pendant 6 mois. A l'époque on faisait 2 mois de nuit. Ensuite j'ai intégré le service des urgences, je suis resté 2 ans et demi enfin presque 3. Et après j'ai intégré la cardiologie en remplacement et puis j'ai postulé et j'y suis resté.

    0'32

    Malika

    Le travail d'ETP représente-t-il un choix pour vous ?

    0'34

    Sophie

    On m'a proposé le poste d'éducatrice. Et j'ai accepté. En fait on avait les deux programmes qui étaient en cours en 2011. Le cadre qui est parti m'a proposé le poste. On avait 50% dédié à l'urgence cardiologique, on faisait le déchocage lundi mardi mercredi de la semaine, et le jeudi vendredi de l'autre semaine... on recevait tous les patients qui venaient pour un motif cardiologique. L'idée c'était de désengorger un p'tit peu les urgences et puis prendre ce qui était spécifique à la cardiologie.

    0'55

    Malika

    Dans quel cadre l'ETP a été instauré dans votre service ?

    0'59

    Sophie

    En fait il y a eu le changement et on fait de l'ETP depuis 2011 parce que l'effectif médical s'est retrouvé réduit. Les internes sont passés de 4 internes à 1. Donc si vous voulez...au niveau des urgences de 9h30 à 17h30 il fallait qu'il y ait toujours quelqu'un et le médecin ne pouvait pas faire les visites le matin pour se détacher aux urges l'après midi. Depuis 4 ans on n'en a qu'un interne par semestre. Donc depuis, le cadre a dispatché 20% sur l'ETP et 30% sur les consultes externes. Ensuite on a augmenté l'ETP à 50% et là...euh...on est depuis cette année à 20% ce qui correspond à une journée parce que la file active n'est pas suffisante il n'y a pas assez de patients.

    1'34

    Malika

    Vous êtes la seule éducatrice dans le service ?

    1'36

    Sophie

    Dans le service sur 15 infirmières, il y avait une collègue qui a fait le DU en éducation, qui est parti et là il y a moi. Et là...je vais changer de poste et il va y avoir une qui me remplacera j'espère.

    1'47

    Malika

    Avez-vous suivi une formation pour la pratique d'ETP ?

    1'50

    Sophie

    Moi j'ai suivi la formation continue de 40 h d'ETP. Le jeudi on fait de l'ETP et les autres journées on est dans le service. Je suis sur les deux programmes.

    1'58

    Malika

    Avez-vous un temps dédié à l'ETP ?

    1'60

    Sophie

    Oui j'ai 20% de mon temps sur mon planning du mois. Donc tous les jeudis. Ce jour là... je suis de journée de 9h à 17h. Je suis sur les deux programmes en fait.

    2'11

    Malika

    De quels programmes s'agit-il ?

    2'13

    Sophie

    Le programme pour les patients souffrant d'insuffisance cardiaque...et...euh...le programme pour les patients atteints de troubles du rythme ou de thromboemboliques.

    2'24

    Malika

    Là, je viens d'assister pendant 40 mn à un entretien entre vous et une patiente. S'agit-il d'un entretien éducatif?

    158

    2'29

     

    Sophie

    On fait non...là...la dame est venue en consulte externe non programmée. Le médecin a diagnostiqué une arythmie, il l'a mis sous traitement anticoagulant, il m'a demandé de la voir. Donc elle est là... sans vraiment comprendre. C'est...que sur l'information.

    2'41

    Malika

    Comment vous définissez l'information de l'éducation et de la persuasion ?

    2'44

    Sophie

    L'information on donne des infos...des indices...je dirais des explications sur la maladie. On répond aux questions...voilà. Mais l'éducation on parle sur la qualité de vie. La dame je lui pose pleines de questions, j'ai l'impression que je suis un extra terrestre...elle me dit vous avez peur que je me blesse. Et ben...euh...avec la vie de tous les jours visiblement...il n'y a pas eu de changement au niveau des habitudes de vie chez cette dame... alors qu'elle souffre d'une insuffisance cardiaque. Ce n'est pas rien quoi. Vous faites toujours votre jardin. Lorsqu'on a une insuffisance cardiaque chronique la personne ne peut pas faire tout ça...Voilà. L'éducation c'est sur les maladies chroniques. Par contre, si cette dame n'est pas convaincue et ne réalise pas, moi je ne peux pas être persuasif. En éducation ce n'est pas le but, déjà on ne peut pas imposer une éducation, en plus, si le patient n'est pas d'accord pour un suivi thérapeutique ça ne va pas se faire, on ne peut pas le convaincre, il faut discuter et trouver une solution. Donc nous on l'aide, on l'accompagne dans sa maladie à trouver des issues pour se rétablir. Elle... ça reste de l'aiguë et ce n'est pas encore chronique. Elle parlait d'elle-même, mais elle ne détaillait pas trop. J'ai un peu l'impression qu'elle est un peu surprise de ce qui lui arrive. Elle a déjà fait un infarctus il y a 6 ans... mais après...euh...l'arythmie c'est quelque chose qui arrive après. Pour eux c'est passé, la crise est passée. Il y a eu un traitement, il n'y a pas d'incidence pour la suite. Après elle fait de l'hypertension depuis l'âge de 33 ans. Après l'alcool...ce qu'elle a pu prendre...on pourrait le prendre en famille. Effectivement pour certaines personnes ça peut se développer. Il y en a qui vont sentir le palpitant. Mais après il y a une différence entre le coeur qui va palpiter d'une façon régulière et l'arythmie.

    4'06

    Malika

    Vous définissez comment cet entretien ?

    4'08

    Sophie

    Là pour elle la fonction est déstructurée. C'est beaucoup plus éducatif mais moins thérapeutique. Ma dame si je la verrai, on aurait fait le point sur le comment elle vie, comment elle prend le traitement, est ce qu'il y a une incidence par rapport à sa vie de tout les jours. Et je lui propose un diagnostic éducatif. Là elle est venue en consulte, le médecin lui annonce une arythmie et me demande si je peux la voir. Moi je ne peux pas lui proposer d'emblé l'éducation, elle ne comprend pas ce qui lui arrive.

    4'32

    Malika

    Pourriez-vous me décrire le déroulement d'une séance éducative ?

    4'35

    Sophie

    Après les transmissions, je vais voir en individuel les patients dans les chambres, c'est le jeudi...la personne je lui explique un peu la pathologie, je lui présente un peu les planches pour voir si elle a compris comment fonctionne son coeur. ...pour détecter ces compétences... la personne va faire le lien. ...le jeudi en séance sur rendez-vous, je lui pose des questions sur les facteurs déclencheurs...je rebondis pour plus de détail...Elle sais que l'alcool peut déclencher certaines choses, je ne vais pas travailler sur ça. Elle a compris que c'est un des facteurs. Euh...l'hypertension je demande comment elle gère...voilà. Après je lui demande si elle voit quelque chose qui va rester dans le temps. L'arythmie c'est à vie. Et les traitements...je ne sais pas si elle sait le rôle de chaque traitement...donc je lui demande. Ce qu'elle a...c'est des crises qui peuvent revenir. Je lui demande si elle se pose des questions, elle m'a dit...qu'elle veut faire son jardin comme avant, je sais qu'elle n'aura plus les mêmes capacités, donc on va travailler sur ce sujet, sur le risque de se couper, si c'est le cas comment elle va réagir, qu'est ce qu'elle en pense de tout ça voilà...euh ...à chaque séance, on revoit les compétences et on réajuste...ensuite je trans sur l'ordi...

    5'36

    Malika

    A qui proposez-vous le programme d'ETP ?

    5'38

    Sophie

    Le programme c'est le médecin et puis l'équipe car ils sont éduqués sur le temps d'hospitalisation. Si on voit bien que la personne a des ressources et peut développer des compétences, on lui propose le programme. Ce n'est pas proposé d'une manière directe, on ne fait pas remplir un consentement. Ce n'est pas présenté par le médecin disant...vous aurez une infirmière qui va vous faire de l'éducation.

    5'58

    Malika

    Ça se passe comment?

    5'60

    Sophie

    L'infirmière qui a le patient en charge sur son secteur. C'est elle qui lui donne le traitement et évalue un peu ses compétences. Elle l'éduque au traitement, la conduite à tenir. Pour les patients qui sont sous anti-coagulant...l'infirmière va prendre un temps donné dans sa journée et va prendre le patient un p'tit temps pour lui expliquer qu'est ce que c'est le traitement et voir un peu les compétences à développer s'il peut les acquérir.

    159

    6'28

     

    Malika

    Pensez-vous que l'ETP doit être pratiqué par toutes les infirmières ?

    6'31

    Sophie

    Je pense que oui mais je ne sais pas si elles veulent pratiquer l'ETP et changer d'habitude de travail...euh...déjà, ...elles ne sont pas formés pour, je ne sais pas si elles peuvent, car c'est l'hôpital qui forme...euh...j'ai entendu que c'est une question de moyens. Mais elles ont à leur disposition l'outil informatique farma pour expliquer les médocs et pourquoi on les donne. Donc, elles proposent l'ETP, sauf après, qu'elles ne gèrent pas. Mais pour faire de l'éducation il faut plus de temps pour chaque patient, après au moment des soins on ne peut pas faire l'éduc, je ne sais pas, il faudrait une autre organisation peut être.

    6'44

    Malika

    C'est qui forma?

    6'45

    Sophie

    Elles sont formées à farma, c'est un logiciel...un support qui présente les traitements qu'ils ont en cours. En fait l'infirmière éduque à la conduite à tenir en fait c'est pratico-pratique.

    6'54

    Malika

    Et vous quel est votre rôle dans cette organisation ?

    6'57

    Sophie

    Moi...à ceux qui on propose un diagnostic éducation. Je retourne la conversation. Est-ce que vous connaissez ce traitement ? IL va me dire ah ...j'ai un parent...un copain...un voisin...un collègue par exemple qui le prend. A ce moment je commence à lui poser des questions ouvertes sur comment son voisin vie...qu'est-ce qu'il fait comme travail etc. Et là si ça l'intéresse je lui propose un rendez-vous pour revenir et faire le diagnostic éducatif à tête reposée.

    7'32

    Malika

    La pratique d'ETP relève-t-elle d'une prescription médicale ?

    7'35

    Sophie

    En fait, le patient va rentrer dans un lit de cardiologie. Le médecin va prescrire a traitement. Moi, si je vois que c'est un traitement anticoagulant. En fait, on a deux programmes à proposer dès la prescription du médicament sur pharma. Donc, le médecin laisse un mémo sur l'ordi comme quoi le patient doit être éduqué. Des fois on propose l'éducation sans prescription du médecin. Mais on voit la posture du patient. Si c'est un épisode d'une première arythmie le pauvre c'est compliqué. Donc on attend 3 ou 4 jours pour commencer le parcours éducatif. Je fais le diagnostic éducatif avec le patient sur l'ordi, je le recrute pour le parcours éducatif et faire le suivi. Et là le suivi c'est que les jeudis en individuel.

    8'12

    Malika

    C'est quoi le parcours éducatif ?

    8'14

    Sophie

    En fait le parcours éducatif...euh...pour rentrer le patient dans le programme rarement on le fait avec le médecin. Il y a un diagnostic éducatif initial qui doit être fait pour l'inclure dedans. Nous... on propose d'emblée dès l'instauration du traitement. Donc le programme est sur le temps d'hospitalisation. En général on l'étale sur 3 jours à peu près. Le diagnostic éducatif dure on va dire une heure. Les séances éducatives aussi. Ensuite, je propose une date pour ça...pour revoir les compétences. Par contre les 3/4 du temps les patients sont hospitalisés. Donc...quand ils font leur séjour dans le service... on les éduque pendant 3 jours. Puis... on leur propose un rendez-vous de consultation. Une convocation à peu près 1 mois après leur sortie de l'hospitalisation. Pour revoir les competences.

    9'28

    Malika

    Vous avez un jour précis pour recevoir ces patients en externe ?

    9'31

    Sophie

    Oui c'est ce qu'on appelle la journée ETP et c'est tous les jeudis. En fait l'éducation thérapeutique commence dans les chambres avec mes collègues et moi je fais le suivi programmé les jeudis en externe.

    9'42

    Malika

    Comment procédez-vous pendant cette journée d'ETP ?

    9'44

    Sophie

    Je reçois les patients en externe chaque jeudi qui est consacré à l'éducation. Ils ont mis sur le marché depuis 2 ans d'autres médicaments qui sont plus confortables. Les patients n'ont pas besoin de faire des prises de sang pour voir si le traitement est efficace et puis on leur demande plus d'avoir un régime alimentaire particulier. Donc, j'explique c'est quoi le coeur en présentant des cartes représentatives avec des schémas, on parle des conséquences des efforts physiques, ce qu'on peut faire ou pas, si problèmes je lui demande comment il va réagir, ce qu'il en pense et tout ça, il faut que le patient parle et moi je le guide, et je l'oriente, j'explique si besoin...Donc, on a réactualisé le temps d'ETP.

    10'14

    Malika

    Comment avez-vous réactualisé ce temps d'ETP, et en faveur de qui ?

    10'17

    Sophie

    En fait la séance pour le cognitif... il y a deux temps éducatif... Chaque séance éducative dure environ 3heures...avant il y a avait 3 temps éducatifs pour les anciens traitements. Parce que la compétence pratique de la prise de sang...appeler le médecin.... Appeler l'infirmière pour expliquer les résultats du sang...savoir lire un bilan sang. Ça on leur demande plus de les acquérir parce que ça n'existe plus à partir du moment où ils prennent leurs traitements. On

    160

     
     

    sait que c'est efficace. Donc pour nous c'est un temps d'éducation en moins.

    10'53

    Malika

    Quel genre de séance éducative pratiquez-vous ?

    10'55

    Sophie

    Les séances c'est individuel, on ne fait pas de séances collectives. On a fait l'année dernière une séance collective. Ce n'était pas sur le temps d'hospi. Ça demande du temps à mes collègues. Ça je ne peux pas faire toute seule des séances de groupe. Les ateliers cognitifs c'est impossible à faire sur le temps d'hospi parce qu'il faut faire toutes les activités éducatives. On mise beaucoup de temps et souvent le temps qui va être imparti. C'est souvent l'après midi et on a des entrées et des sorties et des retours de bloc...etc. On ne peut même pas dégager une heure pour ce genre de chose. Si on avait du temps dédié pour faire du collective...oui.

    11'42

    Malika

    Comment c'était la séance de groupe que vous avez réalisé ?

    11'45

    Sophie

    Ben...on l'a fait l'année dernière. Donc ce n'est pas les collègues qui...euh...donc je l'ai faite. Souvent les patients ne viennent pas. Sur les 8 patients convoqués, il y a que 4 qui sont venus. Bon...ça été fait avec un jeu de rôle si vous voulez et des discutions entre les patients. Ça partait un p'tit peu dans tous les sens mais on recentrait un p'tit peu. Il y a des attentes. Après le collectif il faut bien organiser. Il faut être sûr que tout le monde vienne au bon moment et avoir une salle qui soit bien adaptée. Là ici dans ce bureau si on est deux ça va à peu près...euh...cette table je ne peux pas la retirer.

    12'32

    Malika

    Où se passe l'accueil des patients en groupe ?

    12'34

    Sophie

    En fait on n'a pas de salle. Avant ce bureau c'était un bureau médical si vous voulez. Il y en a eu des départs. Ce bureau...si toutefois il y a un nouveau médecin qui l'occupe. Déjà cette table... n'est pas déjà très confortable. On a d'autres salles à l'hôpital qu'on peut réserver. Mais souvent le jeudi...peut être vous avez déjà vu une de mes collègues à l'hôpital de jour que souvent le jeudi matin prend cette salle. En fin je ne connais pas trop son programme d'ETP. Il faut essayer de trouver une salle libre disponible en sachant qu'il y a plusieurs intervenants à travailler ce jour-là. Donc ce n'est pas évident. Avant c'était une autre salle. C'était la salle des internes sur notre zone. Maintenant on met tout le matériel médical du service dedans. Si toutefois il y un autre médecin qui est recruté, il va demander un bureau et je pense qu'il aura ce bureau. Je ne sais pas si le médecin m'autorise à prendre son bureau pour l'activité ETP...ah...ça c'est une de mes questions de cette après midi en réunion de service sachant que la cadre va partir en septembre à l'école des cadres et le nouveau médecin arrive en novembre. Moi je ne serai pas là mais je m'inquiète pour mes collègues.

    14'02

    Malika

    Comment vous concevez votre rôle par rapport aux deux activités ?

    14'05

    Sophie

    Quand on est dans l'éducation on n'est pas dans nos attentes. On est plus sur les attentes des patients. Quand on est dans le service on a des attentes médicales. On a les choses prescrites. On a de la surveillance et effectivement on est sur notre activité de travail...on est dans les deux rôles. Le rôle propre et le rôle prescrit. L'ETP est intégrée au rôle propre elle complète le soin. bien sûr.

    14'38

    Malika

    Comment vous percevez votre comportement avec le patient avant et après la pratique d'ETP ?

    14'42

    Sophie

    Quand on fait la formation de 40 h...on vous parle de votre positionnement en tant que soignante. Et vous vous rendez compte que même au niveau de la vie de tous les jours pas que sur la vie professionnelle. On est souvent dans...on va faire beaucoup de reproches auprès des patients. On fait juste comme il faut...on va leur reprocher d'apprendre leurs médicaments correctement, on ne supporte plus de leur expliquer des choses. Et puis...on pense qu'ils ne comprennent rien...euh...Donc souvent le soignant va se retrouver en train de dire...mais je perds du temps...On les juge en fait...euh...oui oui on les juge sans le vouloir en fait. Peut être parce qu'on a essayé de faire en sorte à tout bien faire. Moi j'ai eu l'information qu'on materne les patients. On les dirige au lieu de vouloir savoir qu'est ce qu'ils attendaient de nous. On les laisse dans une position passive plutôt qu'attractive. Eux aussi ils se laissent conditionner.

    16'03

    Malika

    Comment vous vous positionnez actuellement par rapport au patient ?

    16'07

    Sophie

    Depuis la formation on fait ça été une évidence. Ils nous disent...il faut se mettre à la place du patient. Là on ne voit que de l'extérieur. Mais on n'a pas été voir ce qu'ils ont à l'intérieur. Et si on ne pose pas beaucoup de questions ouvertes et on ne donne pas le temps aux patients de s'exprimer et ben c'est que des questions par oui ou non. Ils vont répondre par oui ou non. Il faut demander comment ils voient le retour à domicile et tout ça. Il faut les valoriser et mettre ce qui est bien en avant.

    16'40

    Malika

    Comment définissez-vous votre posture actuelle ?

    161

    16'43

     

    Sophie

    Ça arrive une période où je me suis posé beaucoup de questions. Mais aussi dans ma vie personnelle avec mes enfants. La formation a répondu un p'tit peu à des questions comme l'autonomie. Je m'aperçois que ma façon d'aborder mes enfants et là même qu'avec mes patients. Je ne les rendais pas autonome. Alors je ne fais pas pareil par rapport aux patients. Mais au niveau de l'autonomie, j'ai réalisé que ma posture elle était la même à la maison qu'au travail. Cette prise de conscience...voilà...je me suis posé plein de questions. La formation m'a apportée une lumière, elle est tombée au bon moment.

    17'33

    Malika

    Ce changement de comportement vous le constatez où ?

    17'36

    Sophie

    En fait j'ai perçu un changement par rapport à mes collègues. Je suis plus dans l'écoute que dans l'attente. Ce n'est pas pour toi que le patient doit faire ça...c'est plutôt pour lui. Il n'est pas là pour vous faire plaisir et prendre son médicament. Mais s'il ne veut pas le prendre c'est qu'il a une crainte. A chaque fois que vous rentrez dans la chambre vous voulez le convaincre. Moi je ne suis plus dans cette posture de convaincre... Je ne suis plus dans qu'est ce qui vous empêche... Mais j'essaie de comprendre. Nous...on sait certaines choses sur le traitement...lui non...Nous on est convaincu...lui non.

    18'12

    Malika

    Ce changement. C'est que par rapport à l'écoute ?

    18'15

    Sophie

    Le changement par rapport à l'écoute...la reformulation des questions...toujours la reformulation. L'écoute quand on est fatigué du boulot on ne l'a pas forcément. Avant on ne le faisait pas. On cherchait à convaincre le patient. Ça j'étais forte. C'est une prise de conscience. Je me suis rendu compte que... ce que je faisais ce n'est pas du tout ça. Je dis que la formation est arrivée au bon moment. Il faut aussi retirer certaines barrières.

    18'41

    Malika

    De quelles barrières s'agit-il ?

    18'43

    Sophie

    Comme la blouse, là je porte une blouse...ça peut être une barrière. Ici c'est compliquer de retirer la blouse au moment de l'ETP...parce qu'on est dans le même service. Je veux dire en service de soins.

    18'56

    Malika

    Etes-vous informé de l'introduction de la pratique d'ETP aux programmes de formation des infirmières depuis 2009 ?

    19'02

    Sophie

    Par rapport à l'ETP les étudiants nous en parlent. Ils ne sont pas trop en pratique quand ils sont en stage. Le programme de 2009...je ne le connais pas assez. Justement je sais que l'ETP ça fait partie des compétences qu'on doit valider. Après...ce qui est dispensé à l'école ne rend pas compte. Les 40h par rapport au DE c'est la mise en pratique qu'on fait.

    19'21

    Malika

    Comment vous percevez le rôle du patient en ETP ?

    19'24

    Sophie

    Le rôle du patient je veux dire c'est moi qui change. Les changements, c'est dans mon organisation. Je ne suis plus dans le rôle curatif...mes actions curatives. Le patient c'est moi qui lui dit, qui lui laisse la parole ou pas pendant le soin. En éducation il est acteur c'est lui qui parle.

    19'40

    Malika

    Comment vous vous organisez dans le service par rapport aux deux activités ?

    19'44

    Sophie

    Ce n'est pas facile de basculer du soin curatif au soin éducatif. Il faut se poser. Les soins curatifs...on est dans l'action, il faut toujours faire les choses vite...vite. Toujours très vite. On a un timing et si on déborde et bien on sait qu'on va déborder sur notre fin de journée. Donc on va finir plus tard. Si on ne finit pas le soin ça engendre le stress. Quand je ne fais pas l'ETP les autres jours j'arrive dans le service à 6h30 et je finis à 14h30. Il y a des moments de transmissions. Le temps passé dans les chambres, les traitements, les prises de sang, faire les pansements, faire le tour avec le médecin...enfin c'est de l'aigu...donc forcément ils n'sont pas bien. Il est déjà midi et il faut donner de nouveau les traitements, il faut expliquer. L'après midi, je travaille de 14h15 à 21h15, généralement c'est la même chose au niveau des traitements, des soins, sauf qu'on fait en plus les retours de bloc, les surveillances...les préparations des dossiers.... Les imprévus, les entrées, les sorties, les staffs, les réunions du service, les trans écrites... L'éducation passe au second plan. Ce n'est pas une priorité. Le curatif est prioritaire dans le service.

    20'34

    Malika

    Et pendant l'activité ETP?

    20'36

    Sophie

    En éducation je suis hors maîtrise du temps. Un temps de 3/4 h est accordé à chaque patient. Je gère le temps. Ça n'engendre pas le stress...Mais psychologiquement il faut être très dans l'écoute et c'est très fatiguant moralement. Il faut retenir ce que dit le patient pour pouvoir reformuler. On essaie de comprendre tout ce qu'il dit. Il faut être beaucoup dans l'échange.

    20'59

    Malika

    Avez-vous aperçu des changements par rapport à votre identité professionnelle ?

    21'03

    Sophie

    L'éducation a renforcé...oui ça a changé mon identité. Ça bouscule dans mes habitudes. Mais c'est bien. On a tous des choses cachées. Certaines ne veulent

    162

     
     

    pas être éducatrices. Moi j'ai pris le risque. Je ressens une transformation identitaire. Elle s'est faite déjà sur le plan personnel on va dire. Elle continue sur l'axe professionnel. Je sais ça me permet de grandir...grandir dans mon comportement, dans ma façon d'être avec l'autre, de mon regard envers l'autre. Je change de regard...euh...je maîtrise mieux. Maintenant je me questionne plus sur mon comportement. Pourquoi je dis ça. Pourquoi je fais ça. Je ne suis plus dans la même posture qu'avant. Je suis vraiment dans une posture d'écoute. Ça fait 9 ans que je suis dans le service. On ne remet pas forcément en question ses pratiques. Mais maintenant je remets en question mes pratiques. Je ne me positionne plus de la même façon. Il faut se remettre en question par rapport à la relation soignant soigné. J'aimerai dire à mes collègues maintenant je comprends pourquoi le patient ne se sent pas écouter par ce qu'on est centré sur le soin inconsciemment sinon on ne fait pas ce métier.

    24'38

    Malika

    Vous communiquez entre vous les soignants par rapport à vos comportements ?

    24'42

    Sophie

    Non non on ne discute pas de façon intime sur nos habitudes de travail. Sur la prise de conscience, sur l'écoute. Par exemple je vois ma collègue, il lui parle, elle fait autre chose en même temps. Elle répond à côté...euh...c'est normal, elle est centrée sur le soin. Elle n'a pas du tout la posture d'écoute à ce moment. Après il y en a qui vont se remettre en question peu être plus tard...euh...forcément. Bon...moi j'observe ça reste moi. Mais je ne peux pas dire...euh...que c'est comme ça qu'on doit faire...euh...c'est un peu...moi...j'ai fait la formation en plus, j'ai plus de connaissance ça reste là. Ce n'est pas évident de pouvoir écouter l'autre.

    24'31

    Malika

    Travaillez-vous en équipe pluridisciplinaire pendant l'activité ETP ?

    24'34

    Sophie

    Non, je suis toute seule pendant la séance éducative, autonome, responsable j'organise et je réalise la séance... j'accompagne le patient dans son apprentissage...La diète intervient dans le service pour les patients diabétiques, pour les régimes en sel. Elle participe aux programmes d'ETP. Normalement on travaille ensemble le diagnostic éducatif mais faute d'aménagement du temps en commun on ne peut faire ensemble. Ben...chacun fait de son côté quoi. Les kinés doivent intervenir à un moment mais ils n'étaient pas près à collaborer avec nous. Par contre on travaille avec une association santé, on envoie les patients.

    25'04

    Malika

    D'après vous. Il y a -t-il une relation entre les deux activités ?

    25'07

    Sophie

    Se sont deux activités complètement différentes. Je dis...euh...une purement technique et l'autre beaucoup plus relationnelle. La pédagogie ça me plaisait. L'éducation a renforcé mon côté éducatif. J'aime les deux...j'aime bien le curatif mais l'éducation c'est un autre moment. Mais je commence à me lasser du curatif parce que c'est superficiel. « ...Il n'y a pas de communication véritable en soin mise à part le geste technique...en éducation on est formateur, le patient apprend pleins de choses c'est lui qui apporte l'information, moi je réajuste... » On n'va pas connaître les patients, on est satisfait de bien faire le soin, on n'a pas de retour du patient. La communication ne va pas s'approfondir. On essaie de connaître la maladie mais pour le malade s'il n'y a pas d'éducation derrière...pas d'échange. En 'éducation, il y a l'échange, il apporte l'information, il apprend.... Les deux se complètent...J'ai l'impression qu'on apporte peu normalement on doit pratiquer les deux.

    25'14

    Malika

    Comment voyez-vous la bascule entre vos activités ?

    25'16

    Sophie

    Euh...en termes de casquette...ça tourne. Je fais les soins intensifs. Je fais les soins de médecine. Je fais l'ETP et les consultations externes aussi. Et quand il y les étudiants, il faut les encadrer. Ça fait beaucoup de casquettes je veux dire...vous êtes obligé de vous y adapter. Il y a des jours où on n'est pas dedans, dans la casquette qu'il faut. Il faut alors...moi je me pose pour faire le point et revoir les attentes de chaque activité. C'est une charge de travail énorme. Mais après c'est bien de ne pas faire la routine. Quand on est dans la routine on ne se remet pas en question. On ne prend pas du recul sur ce qu'on fait. Je pense qu'il y a des gens qui ont peur du changement. Même moi je pense que j'ai peur. C'est une charge de travail en plus. E plus on n'a pas beaucoup de moyens pour bien réaliser l'ETP. C'est la formation qui m'a aidé à changer...

    26'18

    Malika

    Que représente pour vous l'activité ETP ?

    26'20

    Sophie

    L'éducation pour moi, c'est un moment d'échange, où le patient puisse exprimer ce qu'il ressent, comment il gère sa maladie. Il parle de son entourage, comment il se voit avec cette maladie...euh...C'est aussi, un moment d'écoute de notre part, d'attention, d'orientation, de...de reformulation aussi. Euh...je dirai c'est à ce moment quand connaît mieux notre patient, du coup, c'est un autre regard envers le patient, c'est aussi une autre prise en charge de la maladie

    163

     
     

    dans sa globalité. C'est la meilleure façon d'aborder le patient, c'est une chance pour lui de s'exprimer, de réaliser, d'en prendre conscience, surtout quand il entend les autres qui vivent les mêmes choses que lui. Du coup il ne se sent pas seul, donc, ...euh... c'est un temps de partage pour moi. Euh ...Ce n'est pas un moment de compassion, ...euh...mais d'apprentissage, beaucoup d'apprentissage, que ce soit pour nous ou pour les patients, voilà.

    28'01

    Malika

    Sollicitez-vous d'autres professionnels pour la réalisation de la séance ETP ?

    28'04

    Sophie

    Non, moi je fais seule l'éducation le jeudi. Dès fois j'assiste à l'entretien avec le médecin. Mais on ne fait pas les séances de groupe, donc on ne travaille pas ensemble. Par contre je peux contacter la diète pour un patient, lui prendre un rendez-vous. Mais pour le kiné ou le psy, on peut orienter les patients vers eux si le médecin voit que le patient en a besoin. Aussi, on peut contacter le réseau pour recommander des patients.

    28'41

    Malika

    Quelle distinction faites-vous entre le temps du soin et le temps ETP ?

    28'44

    Sophie

    La gestion du temps ce n'est pas du tout la même chose, au moment du soin, on est pris par le temps, notre temps est partagé entre le soin curatif et les autres taches. Il faut tout faire et finir à temps, c'est super stressant, il faut être très concentré dans le soin à faire et dans ce qui reste à faire, et ça c'est très fatigant physiquement et moralement, on court tout le temps après le temps...ah oui oui c'est ça. On n'a pas le temps pour le patient...le soin prime le relationnel. En ETP, on a moins cette notion du temps. On laisse le temps aux patients, bien sûr nous on gère.

    29'21

    Malika

    Pourriez-vous me parler de vos outils en ETP.

    29'23

    Sophie

    D'abord, c'est l'informatique pour le diagnostic éducatif, les entretiens du parcourt éducatif. Aussi pharma pour l'éducation sur les médocs. On utilise la communication sur les représentations qu'il a par rapport à la maladie, s'il connaît. Euh...On explique c'est quoi le rôle du coeur, on utilise des cartes des schémas, des prospectus ...tout ça. Donc, c'est le patient qui parle la majorité des temps, nous on est dans l'écoute, la reformulation si besoin...voila. Le choix des thèmes c'est avec le patient...ça diffère d'un patient à un autre. Donc, on prévoit, on planifie un programme éducatif...on évalue on transmet... et tout ça. C'est la méthode et puis donc les outils...on n'a pas vraiment le choix à part les cartes...pour les moyens aussi on n'a pas vraiment les moyens, mes collègues sont pas disponibles, moi je ne peux pas toute seuls, pas de salle voile, en plus l'éduc n'est pas prioritaire dans le service et c'est dommage.

    30'32

    Malika

    Que pensez-vous des mesures éducatives ?

    30'34

    Sophie

    C'est vrai qu'avec ces mesures éducatives tout est claire, on gère mieux l'éducation, les patients sont mieux pris en charge...euh...il y a les deux programmes déjà...avec un support éducatif comme le dossier éducatif du patient sur l'ordi. Euh...avant on n'avait pas le dossier éducatif c'était que le dossier de soin. Euh...on ne faisait pas l'éducation, si mais pas thérapeutique, c'est vraiment que sur les traitements, mais actuellement c'est le patient qui devient acteur de sa maladie. Euh...nous on détecte ses compétences d'apprentissage après on l'accompagne dans l'acquisition de cet apprentissage, soit la connaissance de la maladie, comment la gérer, qu'est- ce qu'il en pense, s'il a des connaissances et là on intervient. Euh...donc, il y a les séances éducatives pour ça, c'est vraiment un moment de partage avec le patient sur son vécu, sa pathologie son entourage, son travail sur comment il gère, avant il n'y avait pas ça. On n'était pas formé pour ce genre de prise en charge. En plus il y a le réseau de santé s'il ne veut pas revenir à l'hôpital, donc c'est un accompagnement dans sa globalité pédagogique et curatif avant c'était que le curatif.

    32'02

    Malika

    Comment procédez-vous à l'évaluation de l'ETP ?

    32'04

    Sophie

    Alors, l'évaluation de l'éducation pour les patients c'est au moment de revoir les objectifs avec le patient...euh...on voit s'il a acquis les objectifs visés, si ça nécessite un renforcement ou bien il faut tout revoir, pour quoi ça ne marche pas qu'est ce qui fait que le patient rechute, on discute avec le médecin et tout ça. Euh...sinon évaluer l'activité thérapeutique en tant que tel, je dirai qu'on n'a pas d'outil pour ça, pas de suivi pas de réunion pour exprimer nos difficultés ou parler des problèmes de son application pour l'instant rien, en fait j'ai l'impression que l'éducation ne passe pas en priorité c'est l'urgence qui prime, en plus c'est tout nouveau l'ETP à l'hôpital, ce n'est pas encore dans la culture des soignants. Euh...et moi la seule référente je ne sais pas comment je vais parler de l'éducation en réunion de service alors que personne ne la pratique à part moi et ma collègue donc, voilà.

    33'36

    Malika

    Je reviens à votre attitude. Adoptez-vous la même attitude par rapport au deux activités ?

    33'40

    Sophie

    Non, non, peut-être avant oui, mais après la formation, j'ai compris qu'il s'agit de deux activités différentes. En soin j'ai une attitude de soignante on va dire...euh concentré sur le soin, les questions son strict pour avoir l'info que je veux voilà. Mais en ETP, j'ai une attitude d'écoute, plus d'écoute pour

    164

     
     

    pouvoir reformuler. Euh...et pour mettre le patient en position d'échange...euh... En soin je ne suis pas dans l'écoute je suis dans l'action, dans le geste...euh, même le patient il me laisse faire...euh... donc il m'aide à être dans une attitude de... je dirai... c'est moi qui commande peut-être j'exagère...mais c'est ça en gros... Alors qu'on éducation mon attitude change, ...euh...je ne suis pas dans c'est moi qui fait, qui sais...voilà. Mais je suis dans le partage, dans la communication...euh...quoi que mon attitude à changer un peu j'essaie d'être à l'écoute même en soin, je ne fais plus à la place du patient pour ce qu'il peut faire et tout ça...euh...ça... ça s'apprend, forcément.

    35'02

    Malika

    Sollicitez-vous des qualités spécifiques pour être dans cette attitude éducative ?

    35'05

    Sophie

    Oui, forcément...euh...des qualités comme l'écoute, savoir se mettre face au patient, lui donner le temps de s'exprimer. ...Je dirai le savoir d'échange et de communication ce n'est pas tout le monde qui l'a...euh...aussi se mettre au second rôle...euh...ne pas être dans le jugement par rapport au patient.... Avoir de la patience...euh...c'est difficile tout ça quand on est pris dans le tourbillon des soins...euh...dès fois on est dépassé et on remarque pas ou on ne fait pas attention au propos du patient. ...euh...et si on n'a pas ces qualités on ne peut pas pratiquer l'éducation et ça même si on l'a un peu dans notre métier on l'apprend plus et on le renforce en formation.

    35'56

    Malika

    Pensez-vous que l'ETP doit être pratiqué par toutes les infirmières ?

    35'59

    Sophie

    Pour les prises en charges des chroniques je dirai que oui, la formation est nécessaire à tous les soignants... euh...ça donne beaucoup d'outil de travail, le comportement avec le patient...notre façon de faire, l'attitude et tout ça. Euh...au mois tout le monde aura le même regard, les mêmes habitudes de travail.... Les mêmes compétences. Aussi si on discute sur un patient ça sera le même discours.... Mais je crois que l'éducation dans notre service n'est pas assez prioritaire, on est toujours centré sur le curatif, il y a beaucoup d'urgence, c'est la pathologie du coeur et ça fait peur, c'est aussi une question d'organisation je trouve... Mais si les soignants ne sont pas formés à l'ETP ils n'seront jamais de ses pratiques et ne pourront pas l'intégrée à leurs pratiques quotidiennes. Euh...en fait c'est une question de formation pour les gens, mais comme je l'ai mentionné c'est aussi une question de budget et de priorité je pense...voilà.

    37'28

    Malika

    Avez-vous des choses à rajouter ?

     

    Sophie

    C'est-à-dire que les patients qu'on a...la majorité c'est des personnes âgées. Ils ne reviennent pas forcément pour l'éducation. Venir à l'hôpital ce n'est pas toujours agréable, en plus le transport n'est pas pris en charge par la sécu. Je pense qu'on doit être une équipe mobile qui va chez les gens...euh...pas forcément... peut-être il faut juste un local à l'extérieur de l'hôpital. Une salle de la mairie par exemple. On pourrait accueillir des patients qui soient à proximité de leur domicile. Vous imaginez la représentation. Ce n'est pas la même. Si ça revient à nous, la consultation est gratuite. Donc ils ne payent pas le transport ou le taxi. En plus l'hôpital est loin des habitants. Mais c'est une idée. J'aimerai bien mais ce n'est pas réalisable aujourd'hui...non. Déjà ce temps d'éducation est accordé, aménagé. Mais...si l'équipe médicale était en nombre, ce temps serait forcément octroyé aux urgences comme avant. Je trouve qu'on en fait de moins en moins l'éducation à cause des priorités. En plus ce n'est pas rentable. Ça ne rapporte pas de sou à l'hôpital...ils veulent des lits. C'est l'hôpital quoi.

    39'25

    Malika

    Merci pour ce temps d'échange.

    165






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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille