WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les stratégies politico-économiques du football professionnel dépassent-elles celles des terrains ?

( Télécharger le fichier original )
par Victor PORCHER
Université Pantheon Assas Paris II - Master 2 Commerce et Management International 2016
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Chapitre II : Les nouveaux enjeux du football mondial

Partie I - Nouvelles stratégies d'influences du Qatar où le football n'est pas roi.

Le Qatar est devenu, en l'espace de cinq années, un pôle incontournable du football mondial. Ce petit pays d'une superficie à peine plus grande que l'Ile-de-France fait couler beaucoup d'encre, tant pour sa richesse pétrolière que ses investissements soudains dans le football. De surcroît, les débats se sont largement intensifiés depuis que le pays ait été choisi pour organiser la Coupe du Monde 2022 au Qatar. Injustice, pots-de-vin ou pouvoir d'influence ? Quoi qu'il en soit, force est d'admettre que ce pays touche du doigt son nouvel objectif : devenir une nouvelle terre du football.

Pour comprendre comment opère le Qatar dans sa nouvelle stratégie, il est important d'appréhender notre étude en trois parties. Dans un premier temps, nous analyserons l'entretien réalisé par Jérôme Champagne, grand spécialiste des relations internationales dans le domaine du football. Son expérience sur le terrain et sa connaissance du sujet nous permettront d'introduire notre seconde sous-partie, qui vise à cibler les stratégies offensives du Qatar. Pour finir, nous nous attarderons sur la puissance du Qatar via son média de diffusion : Al-Jazeera.

1.1 Entretien de Jérôme Champagne sur les stratégies du Qatar.

Conseiller diplomatique et chef du comité français d'organisation de la Coupe du Monde 1998, conseiller international du président de la FIFA en 1999, secrétaire général adjoint (2002-2005) puis délégué de l'ancien président de la FIFA Sepp Blatter (2005-2007) et directeur des relations internationales (2007-2010), Jérôme Champagne quitte la haute instance de régulation du football international pour se consacrer aux enjeux géopolitiques en relation avec le football. En 2010, il est alors nommé commissaire football du festival mondial des arts nègres à Dakar pour ensuite devenir le conseiller de la Fédération

62

Palestinienne de Football (PFA), celle du Kosovo et enfin conseiller de la fédération Chypre-Turc.

L'entretien de Monsieur Jérôme Champagne intitulé « la diplomatie sportive du Qatar : instrument d'une nouvelle notoriété internationale » relayé par la revue géoéconomique « Qatar, l'offensive stratégique »54, nous donnes ses impressions quant aux investissements soudain de ce petit pays dans le sport et plus particulièrement dans le football.

L'entretien débute par un discours clair : le Qatar est « une diplomatie par le sport »55. L'ancien directeur de la FIFA affirme que cette forme de diplomatie n'est pas nouvelle et est basée sur trois types d'objectifs :

- Premièrement, « il s'agit de défendre la justesse de choix politiques et /ou de modèles sociétaux ». le sport est un moyen pour les nations de montrer leur supériorité.

- Le sport est un moyen permettant de défendre une cause. C'est également une forme de reconnaissance nationale à laquelle chacun s'identifie. L'exemple donné lors de cette interview fut celui du Front de Libération National (FLN) de 1958 à 1962 durant la guerre d'Algérie ou encore celui des USA dans l'organisation des Jeux Olympiques de 1904 en marquant le centenaire du « Louisiana Purchase », ville française et laissée aux américains par Napoléon en 1804.

- Enfin « la diplomatie par le sport » est un élément de pouvoir d'influence dans un objectif suprême d'étendre celle-ci dans le monde.

Le Qatar répond aujourd'hui à tous ces objectifs, grâce à son dynamisme dans la région du Golfe. Le sport et plus particulièrement le football, est aujourd'hui le nouvel «or noir » du Qatar, conscient des opportunités de faire de nouveaux profits.

Sa puissance financière lui permet d'être un acteur important dans le monde du sport comme par exemple le tennis, l'athlétisme, le cyclisme ou encore les courses de moto GP. En raison de sa forte renommée dans la région de la péninsule arabique, le Qatar organise fréquemment des évènements sportifs, à la seule exception du football... On ne retient que l'organisation d'une Coupe du Monde de la FIFA des moins de 20 ans en 1995, dû à l'abandon de

54 LOROT P. ET DAGUZAN J-F. Qatar, l'offensive stratégique, Géoéconomie, revue trimestrielle - été 2012 n°62. P. 69 - 80

55 LOROT P. ET DAGUZAN J-F. Qatar, l'offensive stratégique, Géoéconomie, revue trimestrielle - été 2012 n°62. P. 69

63

l'organisation de cette dernière par le Nigeria pour cause d'une épidémie d'Ebola. Aujourd'hui la tendance tend à s'inverser. Le Qatar tient sa revanche puisqu'en l'espace de cinq ans, le football occupe une place privilégiée dans sa nouvelle stratégie.

L'organisation de la Coupe du Monde en 2022, des championnats du monde de Handball en 2015, l'espoir de pouvoir organiser un jour les jeux Olympiques, le lancement de la chaîne de retransmission d'évènements sportifs Al-Jazeera Sports, démontrent les aspirations de cet Etat à devenir durablement une nation du sport.

Le Qatar mise sur une seule stratégie globale : Développer toutes les activités liées au sport pour répandre son influence à l'échelle internationale. L'achat de chaînes télévisuelles, le rachat des clubs de football professionnels, la création de l'équipementier sportif Burda ou l'élection d'un qatari au sein de l'instance FIFA (M. Mohamed bin Hammam en 2011) ne sont plus de simples rêves, ils sont devenus réalité. De plus, le Qatar peut se vanter d'un avantage en matière de décision. En effet, il est beaucoup plus simple d'entreprendre de nouvelles stratégies lorsque le pouvoir est concentré dans les mains de quelques dirigeants.

Les mots employés par Jérôme CHAMPAGNE sont à l'image des motivations réelles du Qatar. Selon lui, « la méthode globale peut apparaître comme une forme de domination. Et surtout la possibilité de repousser les contraintes de la rentabilité économique en raison de la richesse qatarie, peut de son côté fausser la concurrence avec les autres acteurs sportifs ou industriels »56

Le sport est un moyen pour le Qatar d'ouvrir ses frontières et de dynamiser l'attractivité de son territoire. Trois objectifs sont à énumérer :

- Premièrement, l'investissement massif dans le sport permet au pays d'exposer son « modèle politique et social qui combinerait la tradition et la modernité, un paternalisme généreux mais sans démocratie, une ouverture sur le monde ».

- Le second objectif est d'affirmer sa puissance dans la région du Golfe et pour cause, la région est sujette à de nombreux conflits territoriaux, tant sur le plan politique que

56 LOROT P. ET DAGUZAN J-F. Qatar, l'offensive stratégique, Géoéconomie, revue trimestrielle - été 2012 n°62. P. 73

64

religieux. Bien entendu, le sport et plus particulièrement le football est un moyen de concurrencer efficacement le rival de toujours : l'Arabie-Saoudite.

- Enfin, le dernier objectif mais non des moindres : Investir dans le football c'est investir dans l'un des sport les plus populaires au monde permettant au pays de jouer dans la cours des grands. Le football est donc un moyen de donner de la crédibilité à l'échelle internationale. Alors que l'origine du football n'était qu'un divertissement consistant à marquer des buts pour gagner un match, on n'était loin d'imaginer que le football puisse être un jour utilisé à des fins géostratégiques...

Pour autant, dans le pays où les rêves deviennent réalités, il existe quelques limites qu'il semble pertinent d'énumérer :

La première des limites est la taille du pays (1,8 millions d'habitants recensés en 2010) avec seulement 20% de nationaux et beaucoup d'expatriés. Cela constitue donc une barrière non négligeable, empêchant très certainement le Qatar d'être considéré comme une réelle nation du football. En dépit d'investissements conséquents, la « culture football » n'est pas encore ancrée dans ce pays où règne oisiveté et démesure en tout genre. Le désintérêt commun de la population qatarie pour le football engendre des stades quasiment vides et une équipe nationale peut attrayante, oscillant dans le classement FIFA entre la 80ème et la 100ème place.

Ce désintérêt pour le jeu du ballon rond peut trouver son explication dans le fait que le climat ne prête pas à jouer, sous des chaleurs pouvant atteindre 50 degrés Celsius contrairement au handball ou au basketball par exemple, qui se joue en intérieur.

D'autre part, le manque de compétitivité à l'échelle nationale pousse le Qatar à user de stratégies à la limite de la légalité. L'argent étant l'argument le plus péremptoire, les acteurs qataris n'hésitent pas à inciter de plus en plus de jeunes joueurs talentueux d'un autre Etat, à acquérir la nationalité qatarie en contrepartie d'une rémunération. Par ce processus, ces jeunes talents intégreront l'équipe nationale afin que celle-ci réalise de meilleurs résultats, aptes à l'élever au sein de la hiérarchie du football.

De plus, la création en 2004 de l'académie sportive Aspire à Doha, recrutant les nouveaux talents qataris de demain, est sujette à de nombreux débats et contestations. En effet, l'infrastructure digne des plus grands clubs, attire des jeunes de toute la planète et plus

65

particulièrement de l'Afrique, avec la mise en place de recruteurs dépêchés sur l'ensemble du continent, pour trouver les perles rares et les attirer au Qatar. Ces agissements se font aux dépens des clubs africains qui peinent à conserver leurs jeunes talents en raison de leur manque d'investissement en infrastructures. (cf. chapitre II, partie III).

En définitive, les investissements qataris dans le football comportent bon nombre de mauvaises pratiques et de limites. A l'heure actuelle, beaucoup d'entre elles restent impunies ou de facto.

A la question : « pensez-vous que le Qatar puisse incarner l'avenir du sport international ? Ou au contraire que son activisme dans ce domaine peut contribuer à modifier l'équilibre géopolitique du sport de façon négative ? »57, La réponse de Jérôme Champagne semble sans équivoque. La durabilité des stratégies offensives du Qatar dans le sport semble instable. Bien que le pays ait été récemment choisi pour organiser de la coupe du monde 2022, de nombreuses limites nous amènent à penser que les ambitions sportives de cette « micro-monarchie » ne soient, à long terme, plus soutenables.

Comme en atteste l'interviewé, si son influence dans le monde ne fait pas l'ombre d'un doute, le Qatar fait néanmoins face à de nombreux échecs. On peut citer l'exemple des championnats du monde d'athlétisme 2017, attribués finalement à Londres ou les jeux Olympiques de 2020 où le Qatar n'a pas fait l'objet d'une retenue de candidature en présélection.

A cela s'ajoute l'échec quant à l'appel d'offres dans le rachat de l'entreprise internationale de marketing sportif : Infront.

En dépit d'une détermination sans faille, le Qatar n'est certainement pas encore devenu une nation du football. Les propos de Jérôme Champagne vont en ce sens puisque selon lui il est encore trop tôt pour tirer quelque conclusion que ce soit, même si beaucoup de signes laissent à penser qu'il est difficile d'acheter la passion du sport...

Notre première sous-partie fut réalisée grâce aux apports de l'ex-directeur des relations internationales de la FIFA, ce qui nous a permis d'appréhender une première réflexion quant

57 LOROT P. ET DAGUZAN J-F. Qatar, l'offensive stratégique, Géoéconomie, revue trimestrielle - été 2012 n°62. P. 76

66

aux nouvelles ambitions sportives d'un pays à taille minime mais à la puissance financière colossale.

L'enjeu de cette seconde sous-partie vise à mettre en lumière tous les champs d'actions des investisseurs qataris. L'objectif est de comprendre dans quelle mesure le Qatar cherche à assouvir son pouvoir de domination.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote