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Les stratégies politico-économiques du football professionnel dépassent-elles celles des terrains ?

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par Victor PORCHER
Université Pantheon Assas Paris II - Master 2 Commerce et Management International 2016
  

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D) l'Allemagne et la Bundesliga :

Les droits de retransmission du championnat allemand étaient d'environ 385 millions euros avant 2013. La faible concurrence des diffuseurs télévisuels des matchs dans ce championnat explique ce gain moindre par rapport aux autres championnats. Néanmoins, depuis le nouvel accord Sky Deutschland, les recettes devraient atteindre 628 millions d'euros pour la saison 2015-2016.

15 « Retransmissions sportives : la taxe Buffet élargie par les députés », Eurosport, 06/12/2013

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E) l'Italie et la Serie A :

Les recettes du championnat italien ont atteint 950 millions d'euros par saison.

Force est de constater que les recettes via les droits de retransmission TV constituent une part très importante pour les clubs. Dans ce cas de figure on pourrait se demander comment en est-on arrivé à cette nouvelle forme de dépendance économique ?

Bien que les droits TV soient indissociables du football professionnel, cette pratique est en réalité très récente.

Selon les deux économistes Andreff et Staudohar en 2000, cette récente dépendance n'est que la réponse du football moderne. En effet, en 1967, plusieurs clubs anglais avaient refusé de signer un contrat d'un million de livre sterling avec la célèbre chaîne anglaise BBC, de peur que les supporters cessent de venir au stade pour regarder le match à la télévision.

En France, les droits de retransmission TV ne représentaient que 30% des revenus des clubs de Ligue 1 en 1995 et seulement 0,8% des revenus l'année avant la création de Canal + en 1984, qui deviendra le diffuseur officiel des matchs de Ligue 1.

La stratégie commerciale de Canal + était simple : proposer une chaîne payante permettant de retransmettre des films et des matchs de football. C'est grâce aux retransmissions des matchs de football que Canal + connaît son essor, engendrant année après année de plus en plus d'abonnés. Les droits de retransmissions TV peuvent s'opérer de deux manières distinctes :

1- Les droits sont mis en vente par un intermédiaire : la Ligue Professionnelle et pour le compte des clubs (France, Italie, Angleterre, Allemagne)

2- Les droits sont mis en vente directement par les clubs. C'est le cas du championnat espagnol et portugais.

Dans le premier cas, les ligues nationales déterminent la manière dont vont être redistribué les gains. En France par exemple, 50% des profits sont reversés de façon égalitaire entre les clubs, 30% basé sur un critère sportif et 20% sur la notoriété du club.

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En Angleterre, le schéma est un peu différent : 50% des droits TV sont répartis de manière égalitaire, 25% sur le critère de notoriété, et 25% sur le critère sportif.

En Allemagne, c'est un système essentiellement fondé sur le critère sportif.

L'Italie fait figure de cas particulier. D'abord tenté par l'expérience basée sur la vente des droits de retransmission TV par les clubs, les observations faites par les économistes Baroncelli et Lago en 2006 s'avèrent négatives : les clubs italiens avaient complétement dissous les principes de solidarité, se basant exclusivement sur la notoriété de ces derniers. Conséquence : lors de la saison 2007-2008, les écarts étaient trop importants. La Juventus de Turin et le Milan AC, deux clubs emblématiques italiens, ont empochés chacun 110 millions d'euros, tandis que le club de l'Empoli, moins coté dans ce championnat, n'a perçu que 10 millions d'euros. Après avoir constaté ce fait, la délégation italienne a finalement tranchée pour un mode de fonctionnement basé sur des retransmissions collectives, comprenant la répartition suivante : 40% réparti de façon égalitaire entre les clubs, 30% selon le résultat sportif et 30% en fonction de la masse de supporters des clubs.

En définitive, il s'agit d'un pari gagnant puisque sur la saison 2012-2013, les écarts ont nettement diminué. Les clubs récemment promus en Serie A lors de cette saison, ont perçu 24,8 millions d'euros et la Juventus de Turin 103,8 millions d'euros.

Nous pouvons donc conclure de la manière suivante. En France et en Angleterre, le système de versement des droits TV est plutôt basé sur un système de solidarité. A titre d'exemple, l'étude menée par l'agence Deloitte révèle que le mythique club anglais de Manchester United aurait reçu près de 60,8 millions de livres sterling via les droits de retransmission lors de l'exercice 2012-2013 alors que les Queens Park rangers, le club qui a perçu le moins, a empoché 39,7 millions de livres. L'écart n'est donc pas si élevé quand on compare le standing de ces deux clubs.

A contrario, la conclusion est différente pour les clubs vendant eux-mêmes leurs droits. Seuls les clubs populaires détenant les plus grands joueurs et les plus chers du marché des transferts, dégagent des marges de profit conséquentes. Par exemple, lors de la saison 2008/2009 le FC Barcelone et le Real de Madrid ont capté à eux seuls près de 51% des droits de retransmission télévisuels. En d'autres termes, les clubs les plus riches s'enrichissent encore plus aux dépens des plus démunis, qui risquent chaque année d'être reléguer en division inférieure. Il est alors

facile de comprendre qu'il y a un dysfonctionnement dans le jeu de la compétitivité entre les clubs que l'on peut aisément comparer aux batailles des grandes entreprises modernes. Les multinationales qui dégagent des profits rocambolesques restent sur le marché contrairement aux autres firmes moins compétitives qui sont poussées à sortir du marché.

En définitive, le principe de retransmission des droits TV n'est que le reflet d'une concurrence imparfaite. La Ligue se charge de la vente des droits de retransmission TV qu'elle redistribue aux clubs selon des règles précises. On se retrouve donc dans une situation de monopole où il n'y a plus qu'un seul offreur sur le marché. Notre argument est d'autant plus recevable puisqu'il s'agit d'un service très peu substituable. La négociation du prix de vente des retransmissions des droits TV se fera entre l'acheteur (chaîne unique : exemple de Canal +) et le vendeur (la Ligue).

Néanmoins, le schéma s'est quelque peu modifié avec l'apparition de nouvelles chaînes qui viennent concurrencer les précédentes. Exemple : BeinSport. L'augmentation du nombre de diffuseur aboutis à une nouvelle situation.

La concurrence est d'autant plus importante depuis la multiplication des supports pour regarder les matchs. Nous rentrons dans l'ère du Smartphone, tablette et PC portable.

Pour répondre à l'émergence ces nouvelles technologies de d'information et de la communication (NTIC) les Ligues ont donc opté pour les enchères de vente des matchs ce qui signifie que les diffuseurs ont moins de pouvoir de négociation. Les meilleurs payeurs auront les meilleurs matchs. Cela explique la forte corrélation entre l'augmentation des droits de retransmission et la diversification des diffuseurs audiovisuels. Cette situation inédite est apparue il y a quelques années avec l'apparition de la chaîne Qatari, BeinSport (cf. Chapitre II partie I).

Aujourd'hui deux chaînes se font concurrence en France pour les retransmissions des droits TV : Canal + et BeinSport. Néanmoins, les deux chaînes ont fait couler récemment beaucoup d'encre dans les médias. Rivaux voire ennemis, les deux géants ne voient pas d'un si mauvais oeil un possible rapprochement. En effet, les deux leaders français dans la diffusion des évènements sportifs ont entamé des négociations pour constituer une alliance.

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Quelles sont les sources de motivation d'une telle alliance ?

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Quatre éléments de réponse sont à retenir pour comprendre ce nouvel enjeu16 :

1. Les abonnés : selon une étude réalisée par le centre de droit et d'économie du sport, relayé par le journal Le Monde « le sport représente la première motivation d'abonnement pour près de la moitié des 5,9 millions de clients de canal + en France ». Comme le confirmait Maxime Saada, Directeur Général adjoint du groupe Canal +, le sport est incontournable pour la chaine cryptée. Cela constitue la 2e source de motivation d'abonnement après les films.

2. Aspect économique pour Canal + : Depuis l'arrivée en France de BeinSport en 2012, Canal + a perdu 218 000 abonnés au cours des 6 derniers mois de 2015. Selon les statistiques, Canal + perdrait environ 10% de ses clients pour en récupérer à peu près le même nombre. En novembre dernier, la chaine perdait ses droits de retransmission des matchs anglais de Premier League pour les trois prochaines années (2016-2019), ce qui constituait jusqu'ici l'un de ses principaux atouts. Les rediffusions ont été acquises au profit de BeinSport. Ceci n'est pas sans conséquence pour Canal +. On prévoit pour l'année suivante de nombreuses résiliations d'abonnement au profit de son rival direct.

3. Intérêt économique pour BeinSport : la nouvelle chaine augmente ses parts de marchés mais l'augmentation du nombre d'abonnés augmente moins vite que les dépenses globales du groupe Qatari. Conséquence directe : le groupe devrait perdre entre 250 et 300 millions d'euros en 2016 selon la banque d'investissement Natixis.

Les raisons de son déficit sont multiples. En dépit d'une solidité financière, le Qatar est très dépendant de la chute du cours des hydrocarbures, aujourd'hui la principale source de recette pour les qataris. De surcroît, ils sont aussi largement dépendants du cours de la bourse où BeinSport a beaucoup investi. Enfin, l'association directe avec le groupe de Canal + permettrait de réduire ses pertes et de profiter des équipes commerciales de la chaîne cryptée pour trouver de nouveaux clients sur le marché. Par ce jeu d'alliance avec Canal +, la chaîne pourrait récupérer 8% du capital de cette dernière, ce qui lui permettrait d'augmenter sa puissance dans le secteur des médias sachant que Canal + est très présent en Europe et Afrique.

16 « Le possible rapprochement de Canal+ et Bein Sports en quatre questions », 20minutes, 28/01/2016

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4. La pratique d'un nouveau prix serait en défaveur du client puisque ce dernier n'aura aucun choix. Le rapprochement de Canal + et de BeinSport aura la conséquence suivante : une augmentation du prix de consommation. Le consommateur devra s'abonner d'abord à Canal + pour pouvoir regarder les matchs diffusés par BeinSport. Deux abonnements à payer, élevant le prix aux alentours de 53 euros, soit trois fois le prix que paye un consommateur aujourd'hui. Cette alliance risque donc d'alerter l'autorité de la concurrence, tant le consommateur peut se sentir lésé de la situation.

Après avoir analysé le premier type de retransmission des droits TV, il est intéressant de voir le second système de vente des droits par les clubs eux-mêmes.

Prenons le cas de l'Espagne.

Chaque club de Liga Espagnole (division 1) vent ses droits de retransmission aux chaînes de télévision. Nous sommes donc dans un cas de concurrence imparfaite puisque les biens de vente sont très hétérogènes. Un match du FC Barcelone coûte bien plus cher qu'un match d'une équipe de bas de classement. Les chaînes de télévision ont besoin d'audimat leurs permettant de gagner des parts de marchés et se voient dans l'obligation de payer davantage pour avoir les matchs les plus attractifs, susceptibles d'attirer beaucoup de téléspectateurs. Il y a donc une très forte concurrence entre les chaînes de télévision pour acquérir le droit de rediffuser un match de football.

Dans ce cas de figure, on imagine bien que les plus grosses écuries du football européen y voient un intérêt plus important à revendre leurs propres droits de retransmission. Quoi qu'il advienne, ces clubs « mythiques » attireront un large public, leurs garantissant des profits constants. Il n'est donc pas nécessaire pour ces clubs de faire appel à la Ligue. On se retrouve donc dans une démarche individuelle plutôt que collective.

A contrario, un club mal classé, qui n'attire pas un grand public va privilégier plutôt l'aide de la Ligue professionnelle pour vendre les droits de retransmission des matchs.

Pour conclure, nous venons de voir en quoi les droits de retransmission sont les nouveaux leitmotiv des grands clubs européens. Etant la principale source de revenu, chaque club cherche à sortir son épingle du jeu pour développer au mieux les finances du club. Nous

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avons pu constater que certains clubs profitent de leur notoriété pour accroitre plus encore leur part de marché en revendant eux-mêmes les droits TV, sans passer par l'intermédiaire de la Ligue. Bien entendu, les plus riches s'enrichissent aux dépens des clubs qui n'ont pas la chance d'être médiatisé en raison de leur manque d'attractivité. C'est la raison pour laquelle, ces clubs misent sur une stratégie plus ciblée sur les supporters grâce aux ventes de billets au stade. Cela nous amène donc à analyser les recettes de billetterie des clubs.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci