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Le sort des contrats et des conflits de travail en cours dans les sociétés commerciales en voie de disparition.

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par Fabrice KABAMBA KADIMA
Université de Mbuji-Mayi - Droit 2016
  

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UNIVERSITE DE MBUJIMAYI

Fondation Cardinal J.A MALULA
FACULTE DE DROIT

LE SORT DES CONTRATS ET DES CONFLITS DE
TRAVAIL EN COURS DANS LES SOCIETES
COMMERCIALES EN VOIE DE DISPARITION

KABAMBA KADIMA Fabrice

Mémoire présenté et défendu en vue de l'obtention du grade de Licencié en Droit.

Option : Droit privé et Judiciaire

Directeur : KABASELE KABASELE Nicolas

Professeur

Rapporteur : NTUMBA LUMBALA Charles

Assistant

Année académique 2015-2016

2

A la famille Jean-Edouard KADIMA MUTOMBO

3

REMERCIEMENTS

Nous tenons à particulièrement remercier monsieur le professeur Nicolas KABASELE d'avoir accepté de diriger ce travail.

Nous remercions également monsieur l'assistant Charles NTUMBA d'avoir guidé nos recherches comme rapporteur.

KABAMBA KADIMA Fabrice

4

INTRODUCTION

A l'instar d'un être humain, une société commerciale naît, vit et meurt. Au cours de sa vie, elle regroupe en son sein, à côté des associés, une masse d'individus appelés travailleurs, employés ou salariés, qui sont liés à la société, leur employeur, par un contrat de travail.

Il peut cependant arriver que la société disparaisse pour plusieurs causes ou se retrouve dans des difficultés qui l'obligent d'entamer absolument une procédure devant la mener à la disparition. La disparition de la société est entendue ici comme un processus comprenant la dissolution de la société et la liquidation de celle-ci. Il existe en outre une cause de disparition de la société qui a un régime particulier et qui nous intéresse également dans la présente étude. Il s'agit de la procédure collective de liquidation des biens de la société. Il se pose dès lors des questions sur le sort des salariés employés au sein de la société en disparition quant à leurs contrats de travail et quant à leurs créances de salaires pendant ce processus.

De toute évidence, les travailleurs, face à leur employeur en difficulté ou en voie de disparition, sont des créanciers, et dans la mesure où ils constituent une des composantes indissociables de la société et aussi à cause du caractère alimentaire du salaire, ils ne peuvent pas être traités comme les autres créanciers. D'où le privilège leur reconnu par la loi.

Pendant cette période de crise, c'est-à-dire celle de disparition de la société, le contrat de travail est menacé et la créance salariale risque de n'être pas versée au salarié. Comme on peut déjà s'en apercevoir, le sort des travailleurs apparait plus ou moins fragilisé. Notre propos est de mettre en évidence la situation particulière des travailleurs dans cette situation.

De ce fait, les Actes uniformes OHADA relatifs aux sociétés commerciales et aux procédures collectives d'apurement du passif, tout en enrichissant le droit des affaires congolais, prévoient la marche à suivre pour régler les problèmes relatifs à la disparition de la société, c'est-à-dire qu'ils réglementent minutieusement la dissolution et la liquidation des sociétés commerciales. Ils prévoient également des normes à suivre pour assurer pour assurer la sécurité des travailleurs pendant ces différentes phases. A titre exemplatif, le droit OHADA prévoit la nomination des organes chargés de veiller sur les intérêts en présence et d'assurer la bonne marche des procédures pendant la phase de disparition de la société concernée (liquidateur, syndic, juge-commissaire, contrôleurs, etc.).

Par ailleurs, la présente étude est déclenchée suite à un certain nombre de préoccupations que nous présentons de la manière suivante :

5

- Quel est le sort des contrats de travail en cours pendant la phase de dissolution de la société, pendant celle de la liquidation de celle-ci ainsi que celle de la procédure collective de liquidation des biens P

- Quel sera le sort des actions en réclamation des créances de salaires initiées contre une société en dissolution ou en liquidation ? En d'autres termes, vers qui les travailleurs iront-ils pour réclamer leurs créances de salaire devant une société déjà dissoute (mais non encore liquidée) ou déjà liquidée P

- Comment s'effectue le traitement des créances de salaires dans la procédure de liquidation des biens P

Compte tenu des préoccupations susmentionnées et de notre objet d'étude, les hypothèses ci-après orientent le raisonnement de ce travail :

? Aux termes de l'AUSCGIE (Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique), dans le processus de liquidation d'une société, seul le liquidateur représente la société pour tous les actes de cette liquidation. Il est aussi habilité à payer les créanciers. C'est pourquoi les travailleurs auront une action sur lui en ce qui concerne les conflits individuels ou la réclamation des créances de salaires. Une fois terminée la liquidation, les créanciers ne peuvent plus s'adresser à la société elle-même, celle-ci ayant cessé d'exister. Ils ont alors une action directe contre les associés.

En outre, quand une société est déjà liquidée, elle disparaît avec tout son contenu, les contrats de travail compris. On ne peut dès lors parler de « contrats en cours ».

? Dans les procédures collectives prévues par l'AUPC (Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif), les travailleurs ont un rôle important à jouer dans la procédure de liquidation des biens de la société, notamment en tant que contrôleurs. Toutefois, ils peuvent, pendant cette procédure, être sujets au licenciement pour motif économique à l'initiative du syndic. Il est vrai que l'ouverture d'une procédure collective d'apurement du passif ne justifie pas automatiquement la rupture des contrats en cours, mais c'est seul le syndic qui conserve la faculté d'exiger ou non la continuité des contrats en cours.

? Concernant le traitement des créances de salaires, l'AUPC prévoit des règles bien établies pour désintéresser les travailleurs, notamment le regroupement en masse, l'ordre de paiement des créanciers, la prévision des délais brefs de paiement ainsi que la protection du salaire par l'institution du principe du privilège des salaires.

L'intérêt de ce travail serait, en premier lieu, de montrer aux lecteurs, aux chercheurs et à tout intéressé du droit des affaires comment le droit OHADA réglemente le processus de la disparition de la société et donne les

6

directives à suivre quant au traitement des créances de salaires des travailleurs d'une société soumise à la procédure collective de liquidation des biens.

Deuxièmement, les idées contenues dans ce travail, tirées de la loi et de la doctrine en la matière, peuvent aider les travailleurs employés dans des sociétés commerciales à connaître le sort de leurs contrats de travail à l'arrivée d'un événement susceptible d'amener ces sociétés à la disparition et par conséquent, à comprendre le rôle qu'ils peuvent jouer en cette matière ainsi que les droits qu'ils peuvent exercer en cette phase de disparition.

Troisièmement enfin, il est d'une importance capitale pour les salariés et pour le public, juriste ou non, de comprendre comment se déroulent les opérations de dissolution et de liquidation d'une société, ainsi que la procédure collective de liquidation des biens.

Ce travail ne pourrait bien être réalisé sans l'aide de certaines méthodes et techniques de recherche. C'est pourquoi, s'agissant de méthode, nous avons recouru à celle exégétique. Il s'agit d'une méthode juridique qui s'élabore par référence à la loi, à la jurisprudence et à la doctrine. Elle nous a permis d'analyser les Actes uniformes et les lois nationales traitant le sujet et d'en ressortir, à l'aide de la doctrine et de la jurisprudence, les principes de leur application. Comme technique, celle documentaire a fait l'objet de notre recours. Elle nous a permis de compléter nos informations et de consulter différents ouvrages traitant des questions ayant trait à notre sujet.

En ce qui concerne la délimitation du sujet, notre champ d'investigation s'étale, sur le plan spatial, dans toute la région OHADA en ce qui est du droit des sociétés et du droit des procédures collectives. Quant aux points relatifs au droit du travail, il est réduit à notre pays, la RDC. Dans le temps, nous n'avons pas à tergiverser car nous ne partirons que de la date d'entrée en vigueur des Actes uniformes concernés, c'est-à-dire du 17 avril 1997 à nos jours pour l'AUSCGIE tel que révisé en 2014 ; et du 10 avril 1998 à nos jours pour l'AUPC.

Il sied de noter enfin que le présent travail est subdivisé, hormis l'introduction et la conclusion, en deux grands chapitres. Le premier est consacré aux généralités ; le second démontre l'impact de la disparition de la société sur l'activité contractuelle.

7

CHAPITRE PREMIER

GENERALITES

La notion de la société commerciale (Section 1) ainsi que celle du contrat et du conflit de travail (Section 2) seront analysées dans ce premier chapitre.

SECTION I NOTION DE SOCIETE COMMERCIALE

Les sociétés commerciales ont connu depuis le siècle dernier un développement considérable. Elles se rencontrent de nos jours dans tous les secteurs de la vie économique nationale et occupent toutes les phases du circuit économique (de la production à la consommation, en passant par la distribution), recouvrant ainsi des entreprises de toutes dimensions, depuis les sociétés familiales jusqu'aux grands trusts internationaux qui atteignent des tailles impressionnantes qui leur donnent un grand rayonnement aussi bien dans leurs pays d'origine que dans le monde entier. Que faut-il donc entendre par société commerciale au Congo, quelle est sa nature juridique et comment fonctionne-elle ?

Pour répondre à ces questions, il est nécessaire dans les lignes qui suivent, de définir d'abord la société commerciale en déterminant aussi sa nature juridique (§1), de la distinguer ensuite avec les groupements voisins (§2) avant d'en évoquer les formes légales (§3), et enfin, de fixer les règles pour sa constitution et son fonctionnement (§4).

§1 DEFINITION ET NATURE JURIDIQUE

A. Définition

La société se définit généralement comme un groupement de personnes et de biens constitué par contrat et doté de la personnalité juridique.1

Etymologiquement, la société évoque la pluralité de personnes. Elle résulte avant tout d'un contrat. C'est d'abord de cette manière que la définit l'Acte Uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique (AUSCGIE) à son article 4. Elle est constituée par deux ou plusieurs personnes appelées associés.

Selon l'ancienne conception du droit congolais,2 la société ne pouvait être créée que par deux ou plusieurs personnes. Mais actuellement, avec le

1 PETIT B., Droit des sociétés, 4ème édition, Litec, Paris, 2008, p. 1.

2 Article 446.1, Décret du 30 juillet 1888 portant contrats et obligations conventionnelles.

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Droit OHADA, on admet la création d'une société par une personne, l'associé unique (société unipersonnelle).3

La société commerciale, telle que conçue par l'Acte uniforme, peut donc être créée de deux manières : elle peut résulter soit d'un contrat, soit d'un acte unilatéral

En effet, l'article 4 de l'AUSCGIE dispose que « la société commerciale est créée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent, par un contrat, d'affecter à une activité des biens en numéraire ou en nature, dans le but de partager le bénéfice ou de profiter de l'économie qui pourra en résulter ». L'article 5 ajoute à cette définition la précision selon laquelle la société commerciale peut être également créée, dans les cas prévus par l'Acte uniforme, par une seule personne, dénommée « associé unique », par un acte écrit. Dans ce dernier cas, la consécration légale demeure limitée à certains types de sociétés, à savoir la Société Anonyme (SA), la Société à Responsabilité Limitée (SARL) et la Société par Actions Simplifiées (SAS).4

En outre, on remarque dans les dispositions du droit OHADA deux réalités intéressantes qui méritent d'être soulignées. D'une part, le contrat de société peut exister sans la personne : il est des sociétés non immatriculées qui restent à l'état de contrat sans acquérir la personnalité morale. Elles sont néanmoins reconnues (Sociétés de fait et Sociétés en participation). D'autre part, la personne peut à l'inverse exister sans contrat : il s'agit du cas évoqué ci-haut selon lequel certaines sociétés peuvent être aujourd'hui constituées par un seul associé et donc sans le support d'un accord de volontés entre coassociés. Ici la société, dès lors qu'elle est immatriculée, n'en constitue pas moins une personne juridiquement distincte de celle de l'associé unique. Cependant, elle n'est plus alors un groupement de personnes mais, seulement un groupement de biens.

Il est clair de ce qui précède qu'il s'agira dans la présente étude de la société commerciale et non de la société civile5, car l'Acte uniforme s'applique avant tout aux sociétés commerciales, c'est-à-dire à celles qui ont épousé une forme déclarée commerciale par ledit acte (Société en Nom Collectif « SNC », Société en Commandite Simple « SCS », Société à Responsabilité Limitée « SARL », Société Anonyme « SA », Société par Actions Simplifiées « SAS ») ou qui accomplissent à titre de profession habituelle des actes de commerce selon l'Acte uniforme portant sur le droit commercial général (article 6).

3 Article 5, AUSCGIE.

4 OHADA, Traité et actes uniformes commentés et annotés, 4ème édition, Juriscope, 2012, p. 389.

5 Les sociétés civiles sont celles dont l'objet est civil et qui n'ont pas opté pour l'une des formes légales des sociétés commerciales. (OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 387).

9

B. Nature juridique

La question, classique et quelque peu académique, est de savoir si la société revêt une nature contractuelle ou une nature institutionnelle. Les opinions varient et sont susceptibles d'évoluer sur la question de savoir quelle est la nature juridique de la société. Pour certains auteurs, la société est un contrat. L'accent est mis sur l'autonomie de la volonté des associés dans la mesure où l'organisation juridique est choisie par ces derniers. Pour d'autres, la société est une institution dont l'organisation doit être décidée par la loi.

A l'état pur, ces deux visions s'opposent absolument. Dans la conception contractuelle, la société est créée et organisée par l'accord de volontés librement négocié par les associés et consigné dans les statuts. Dans la conception institutionnelle, elle est régie par un ensemble de règles impératives inspirées d'un intérêt supérieur : l'intérêt social prévaut sur l'intérêt individuel des associés ; le statut légal l'emporte sur les statuts conventionnels6. La notion institutionnelle de la société soutient qu'une société n'est pas qu'un contrat abandonné en tant que tel à la volonté de ceux qui lui ont donné naissance, mais plutôt une institution, c'est-à-dire un corps social dépassant les volontés individuelles.

Les limites de ces deux thèses justifient le fait que les auteurs s'accordent le plus souvent pour reconnaître les caractères contractuel et institutionnel de la société, puisque la société est « instituée » par un « contrat ». Nous pensons à notre avis que la société est à la fois un contrat et une institution. Ceci se justifie en ce sens que la société naît d'abord par un contrat (ou un acte unilatéral) et se voit ensuite appliquer les règles légales instituées pour son fonctionnement. Elle évolue donc de contrat en institution (Lors de sa constitution, c'est l'aspect contractuel qui domine tandis que lors de son fonctionnement, c'est l'aspect institutionnel qui l'emporte).

Il convient de noter aussi que la nature de la société varie selon les époques (par exemple l'époque actuelle qui se différencie de celle passée par l'avènement de l'autorisation de la création des sociétés unipersonnelles), selon l'objet des règles considérées (la consécration de la Société par actions simplifiée comme cinquième forme de la société commerciale) et selon le type de société.

6 PETIT B, op.cit, p.3.

10

§2 DISTINCTION AVEC LES NOTIONS ET GROUPEMENTS

VOISINS

La société ne doit pas être confondue avec l'entreprise (A), l'association (B) et le Groupement d'Intérêt Economique (C).

A. Société et entreprise

La société doit d'emblée être distinguée de la notion d'entreprise, avec laquelle le langage courant la confond trop souvent. Les deux notions ne sont pas de même nature. L'entreprise est une notion économique qui désigne la réunion d'un ensemble de moyens financiers, matériels et humains organisés en vue de la production ou de la distribution de produits ou de services.7 La société est, quant à elle, une notion juridique impliquant en principe l'attribution de la personnalité au groupement considéré. La société a aujourd'hui pour fonction première d'assurer la personnification juridique de l'entreprise : la personne morale société constitue le support de l'identité et de l'autonomie qui font défaut à l'entreprise individuelle.

L'entreprise, considérée en elle-même, n'est donc pas une personne mais elle peut le devenir, spécialement en revêtant la forme d'une société, de sorte que celle-ci apparaît dans bien des cas comme une technique juridique mise au service de l'entreprise.

Pour autant, les deux notions sont loin d'avoir le même domaine : même dans les faits, société et entreprise ne coïncident pas. D'une part, il n'est pas rare qu'une société n'exploite aucune entreprise : certaines sociétés n'exercent pas d'activité économique propre et n'ont d'autre objet que, par exemple, de détenir la propriété d'un immeuble ou d'être titulaires de participations au sein d'autres sociétés. D'autre part, il est à l'inverse, très fréquent qu'une entreprise ne soit pas exploitée par une société. Il ne faut pas oublier en effet que les entreprises individuelles sont aujourd'hui plus nombreuses que les sociétés, même si leur poids économique est moindre : l'entreprise, qui est alors dépourvue de personnalité juridique, appartient dans ce cas à une personne physique, seule prise en considération par le droit.

L'apparition des sociétés unipersonnelles a cependant estompé la distinction opposant l'entreprise sociale (puisqu'elle emprunte la structure juridique de la société) et d'une entreprise individuelle (puisque cette structure est mise au service d'un seul individu) ; c'est une entreprise individuelle exploitée sous forme sociale.

A. Société et association

L'association est définie par la du 20 juillet 2001 comme un groupement qui ne se livre pas à des opérations industrielles ou commerciales, si ce n'est à

7 PETIT B., op.cit, p.1 ; REINHARD Y., Droit commercial, 3ème édition, Litec, Paris, 1993, p. 173.

11

titre accessoire, et qui ne cherche pas à procurer à ses membres un gain matériel.8 Ce qui sépare la société d'une association est la circonstance qu'une association ne peut, à la différence d'une société, se livrer à des opérations commerciales. Cela ne signifie pas qu'il est interdit à une association de réaliser des bénéfices, mais celle-ci ne peut pas répartir entre ses membres les bénéfices qu'elle pourrait réaliser.

C. Société et Groupement d'Intérêt Economique (GIE)

Le groupement d'intérêt économique est une institution aussi nouvelle qu'originale dans la plupart des Etats membres de l'OHADA. Il est doté de la personnalité juridique autonome. Cependant, bien qu'étant un être juridique autonome, ce n'est ni une société, ni une association. C'est un instrument de collaboration entre des entreprises préexistantes, plus simple que la société et plus efficace que l'association.9

En effet, aux termes de l'article 869 de l'AUSCGIE, « le groupement d'intérêt économique est celui qui a pour but exclusif de mettre en oeuvre pour une durée déterminée, tous les moyens propres à faciliter ou à développer l'activité économique de ses membres ».

Les membres de ce groupement y mettent en commun des moyens de production et développent leurs affaires plus efficacement et à meilleur compte que s'ils étaient demeurés isolés. L'adhésion à ce groupement permet de réaliser des économies et certaines actions communes (actions promotionnelles, études de marché, service de recherche ou d'assistance, etc.)

Le groupement d'intérêt économique présente trois caractéristiques essentielles :

- Sa vocation n'est pas de faire des bénéfices10 (ceci ne veut pas dire qu'il ne peut pas réaliser des bénéfices. Si des bénéfices ont été effectués au cours d'un exercice, ils sont répartis entre les participants selon les modalités prévues au contrat) ;

- Il peut être constitué avec ou sans capital ;

- Sa structure est légère et malléable.

Sur le plan formel, le GIE est pour l'essentiel soumis aux mêmes règles que la société ; mais la différence essentielle tient à l'objet du GIE qui, contrairement à celui de la société, se situe nécessairement dans le prolongement d'activités économiques préexistantes.

8Article 1er, Loi n° 004/2001 du 20 juillet 2001 portant dispositions générales applicables aux associations sans but lucratif et aux établissements d'utilité publique, in Journal officiel de la RDC, 42ème année, numéro spécial, 15 août 2001.

9 OHADA, Traité et actes uniformes commentés et annotés, 4ème édition, Juriscope, 2012, p. 635.

10 Article 870 AUSCGIE.

12

§3 CONSTITUTION ET FONCTIONNEMENT DE LA SOCIETE

Les formalités de constitution d'une société commerciale (A) ainsi que les règles de fonctionnement de celle-ci (B) seront résumées ici.

A. Les formalités de constitution

La constitution d'une société commerciale est soumise à des conditions de fond cumulant celles des contrats en général et du contrat de société en particulier ainsi qu'à des conditions de forme exclusivement prévues pour les sociétés commerciales.

Les formalités ou conditions de forme revêtent une importance particulière en droit des sociétés car elles remplissent de multiples fonctions :

- elles renseignent les associés sur leurs engagements et, de ce fait, les protègent ;

- elles informent les tiers et leur permettent de connaître la nature de la forme sociale empruntée, l'organisation et le fonctionnement de celle-ci, de mesurer l'importance financière de la société, et de cette façon, les protègent également ;

- elles permettent aux autorités administratives, judiciaires, fiscales et sociales de contrôler et de sanctionner l'activité de la société en cas de leur absence ou de leur inexactitude.

Selon les nouvelles règles des articles 100 et suivants de l'Acte uniforme, on distingue désormais trois phases dans la création des sociétés commerciales :

- une première phase de préparation (ou de fondation) correspondant à celle où la société n'est pas encore constituée11 ;

- une deuxième phase, centrale et décisive, correspondant à la constitution de la société matérialisée par la signature des statuts12 ;

- et la troisième phase correspondant à l'acquisition de la personnalité juridique grâce à l'immatriculation13 (articles 97 à 99 et 101 al 2 AUSCGIE).

Durant les phases 1 et 2, ce sont les fondateurs qui sont chargés de conduire les opérations, c'est-à-dire les personnes qui participent activement aux opérations conduisant à la constitution de la société. Leur rôle commence dès les premières opérations ou l'accomplissement des premiers actes de constitution. Il prend fin dès que les statuts ont été signés par tous les associés ou l'associé unique.14 A partir de la signature des statuts les dirigeants sociaux se

11 Art 100 AUSCGIE.

12 Art 101 al 1.

13 OHADA, Traités et actes, op.cit, p. 389.

14 Art 102 AUSCGIE.

13

substituent aux fondateurs. Ils agissent au nom de la société constituée et non encore immatriculée.

L'établissement ou l'adoption des statuts(1), l'immatriculation(2) et les formalités de publicité(3) sont les grandes étapes de constitution de la société qui méritent d'être évoquées dans les lignes qui suivent. Aussi est-il vrai que l'irrégularité commise dans l'accomplissement des formalités de constitution d'une société entraîne des sanctions prévues par l'Acte uniforme (4).

1. L'établissement des statuts

Les statuts constituent soit le contrat de société en cas de pluralité d'associés, soit l'acte de déclaration unilatérale de volonté d'une seule personne en cas d'associé unique.15 Il peu être rédigé en forme d'un acte notarié ou de tout acte offrant des garanties d'authenticité dans l'Etat du siège de la société, déposé avec reconnaissance d'écritures et de signatures par toutes les parties au rang des minutes d'un notaire.16

Aux termes de l'article 13 AUSCGIE, les statuts énoncent un certain nombre de mentions destinés à renseigner sur :

- la forme de société, sa dénomination, son siège, sa durée, l'identité des apporteurs en numéraire et en nature, le montant ou la valeur des apports et la valeur des titres sociaux remis en contrepartie de chaque apport ;

- l'identité des bénéficiaires des avantages particuliers et la nature de ceux-ci ;

- le montant du capital social, le nombre et la valeur des titres sociaux émis, en distinguant le cas échéant, les différentes catégories des titres créées ;

- les stipulations sur la répartition du résultat, sur la constitution des réserves sur la répartition du boni de liquidation ;

- les modalités de fonctionnement.

Il est à noter que ces mentions sont obligatoires. L'article 2 de l'AUSCGIE dispose que toutes les dispositions de l'Acte uniforme sont d'ordre public, sauf quand il est expressément stipulé le contraire.

2. L'immatriculation

Toute société doit être immatriculée au RCCM sauf la société en participation.17Ce sont les dirigeants sociaux nommés par les statuts ou

15 Art 12 AUSCGIE.

16 Art 10 AUSCGIE.

17 Art 97 AUSCGIE.

14

l'Assemblée Générale constitutive qui sont chargés de procéder à cette formalité puisqu'ils ont pris désormais la place de fondateurs.18

L'immatriculation ne peut être demandée et obtenue que si l'on produit et dépose au greffe une déclaration de régularité et de conformité. Cette déclaration est rédigée et signée par les fondateurs et les premiers membres des organes de gestion, d'administration et de direction relatant toutes les opérations en vue de constituer régulièrement la société et par laquelle ils affirment que cette constitution a été réalisée en conformité de l'Acte uniforme.19 La même disposition est applicable en cas de modification des statuts.20

En effet, l'immatriculation se fait conformément aux dispositions régissant le RCCM contenues dans l'Acte uniforme portant sur le droit commercial général (articles 29 et suivants).

Quid des effets de l'immatriculation P

- l'immatriculation confère la personnalité juridique à la société commerciale. Avant son immatriculation, l'existence de la société n'est pas opposable aux tiers ; néanmoins, ceux-ci peuvent s'en prévaloir.21

- Les rapports entre les associés sont régis par le contrat de société et par les règles générales des contrats et des obligations entre la date de la constitution et celle de l'immatriculation de la société.

Il est à remarquer de ce qui précède que l'énoncé de la règle relative à la personnalité juridique amène à se poser la question de savoir quelle est la situation juridique de la société et des associés avant l'immatriculation.

Néanmoins, l'on sait qu'il peut exister des engagements que la société a pris avant l'immatriculation, voire même avant sa constitution. Il y a dès lors moyen de se situer, si les engagements ont été pris soit avant la constitution de la société, soit avant l'immatriculation de la société.

? Engagements pris avant la constitution de la société

Ces engagements ont été pris par les fondateurs. Ils doivent être portés à la connaissance des associés avant la signature des statuts ou lors de l'assemblée constitutive.22 Ils doivent être décrits dans un état intitulé « état des actes et engagements accomplis pour le compte de la société en formation » avec indication, pour chacun d'eux, de la nature et de la portée des obligations qu'ils comportent. Dans les sociétés sans assemblée constitutives, cet état est annexé

18 Art 104 AUSCGIE.

19 Art 73 AUSCGIE.

20 Art 76 AUSCGIE.

21 Art 101 AUSCGIE.

22 Art 106 AUSCGIE.

15

aux statuts ; la signature des statuts et de cet état emporte reprise par la société de ces engagements.23

Les actes et engagements repris par la société régulièrement constituée et immatriculée sont réputés avoir été contractés dès l'origine.24

? Engagements pris avant l'immatriculation

Les associés peuvent, dans les statuts ou par acte séparé, donner mandat à un ou plusieurs dirigeants sociaux de prendre des engagements pour le compte de la société constituée mais non encore immatriculée. L'immatriculation emporte reprise par la société de ces engagements.25 Au cas où ils ne seraient pas repris, ces engagements sont inopposables à la société et les personnes qui les ont souscrits sont tenues solidairement et indéfiniment des obligations qu'ils comportent.

3. Formalités de publicité

Les formalités de publicité sont effectuées à la diligence et sous la responsabilité des représentants légaux des sociétés.26

Après l'immatriculation, la société doit passer par les formalités de publicité. Pour ce faire, dans un délai de quinze jours suivant l'immatriculation, un avis est inséré dans un journal habilité à recevoir les annonces légales pour publication.27

L'avis est signé par le notaire qui a reçu le contrat de société ou par les fondateurs. Il contient les énonciations suivantes :

- La raison ou la dénomination sociale de la société, suivie, le cas échéant,

de son sigle ;

- la forme de la société ;

- le montant du capital social ;

- l'adresse du siège social ;

- l'objet social indiqué sommairement ;

- le montant des apports en numéraire ;

- la description sommaire et l'évaluation des apports en nature ;

- les noms, prénoms usuels et domicile des associés tenus indéfiniment

des dettes sociales ;

- les noms, prénoms usuels et domiciles des premiers dirigeants et des

premiers commissaires aux comptes ;

- les références du dépôt au greffe des pièces de constitution ;

- les références de l'immatriculation au RCCM ;

23 Art 107 AUSCGIE.

24 Art 110 AUSCGIE.

25 Art 111 AUSCGIE.

26 Art. 259 al. 1er .

27 Art 261 et 262 AUSCGIE.

16

- le cas échéant, la date effective ou prévue du commencement d'activité.

4. Sanctions d'irrégularité

Non seulement les formalités de constitution d'une société commerciale sont nombreuses mais encore elles sont complexes. Il n'est donc pas rare que les fondateurs ou les premiers dirigeants omettent une formalité ou commettent une irrégularité dans l'accomplissement de l'une d'elles.

L'irrégularité commise dans l'accomplissement des formalités sus évoquées entraîne des sanctions, notamment la nullité de la société et la responsabilité des auteurs de l'irrégularité.28

a) La nullité de la société

Le régime de la nullité des sociétés déroge sur de nombreux points à celui du droit commun. On s'en rendra aisément compte sur trois éléments qui sont : les causes de nullité, l'action en régularisation et les effets de la nullité.

? Les causes de nullité

L'article 242 AUSCGIE pose le principe selon lequel la nullité de la société ou de tous actes, décisions ou délibérations modifiants les statuts ne peut résulter que :

- d'une disposition expresse de l'Acte uniforme ;

- des textes régissant la nullité des contrats en général et du contrat de société en particulier (ex : vices du consentement, incapacité, objet illicite, défaut d'apports, etc.)

Par ailleurs, certains vices de fond ou de forme ne peuvent pas entrainer la nullité. Il s'agit de(s) :

- L'énonciation incomplète des mentions devant figurer dans les statuts ;

- Vices du consentement ou l'incapacité qui ne peuvent menacer de nullité que la société en participation, la SNC et la SCS. Dans les SA et les SARL, ils ne peuvent constituer des causes de nullité que si l'incapacité atteint tous les associés fondateurs.29

- Formalités de publicité, sauf dans les SNC et SCS où elles sont requises à peine de nullité.30

Il faut noter que le tribunal a la faculté de ne pas prononcer la nullité si aucune fraude n'est constatée. Il peut donc prononcer la régularisation.

28 Voir les articles 242 à 256 AUSCGIE.

29 Art. 243 AUSCGIE.

30 Art. 245 AUSCGIE

17

? L'action en régularisation

Afin d'éviter la nullité dans les cas où elle est encourue, l'acte uniforme prévoit et organise la régularisation de plusieurs vices.

Il ressort de la lecture de l'article 247 AUSCGIE que le tribunal saisi d'une action en nullité peut, même d'office, fixer un délai pour permettre de couvrir la nullité. Il ne peut pas prononcer la nullité moins de mois après la date de l'exploit introductif d'instance. Si une assemblée est nécessaire pour régulariser le vice, le tribunal accorde, par un jugement, le délai indispensable pour que les associés puissent prendre une décision. Si, à l'expiration du délai accordé, aucune décision n'est prise, le tribunal statue à la demande de la partie la plus diligente.

? Les effets de la nullité

Lorsque la nullité de la société est prononcée, elle met fin, sans rétroactivité, à l'exécution du contrat de société. Il est donc procédé à la dissolution de la société et, pour ce qui est des sociétés pluripersonnelles, à leur liquidation.31Concernant les sociétés unipersonnelles, il n'est pas procédé à leur liquidation puisque ce n'est pas nécessaire. En effet, la question de la répartition d'un boni entre associés ne se pose pas. Quant aux créanciers, ils ne craignent rien dans la mesure où l'on passe d'un patrimoine d'affectation au patrimoine général et universel de l'associé

b) La responsabilité des fondateurs ou dirigeants auteurs de l'irrégularité

L'Acte uniforme prévoit et organise la responsabilité civile et pénale des fondateurs et des dirigeants qui auront été les auteurs d'omissions ou d'erreurs dans l'accomplissement des formalités de constitution des sociétés.

? La responsabilité civile

La responsabilité éclate ici en deux hypothèses, selon qu'il y a eu nullité ou non.

- Si la nullité a été prononcée, les associés et les dirigeants auxquels la nullité est imputable peuvent être déclarés solidairement responsables du dommage résultant pour les tiers de l'annulation de la société.32La disparition de la cause de nullité ne fait pas obstacle à l'exercice de l'action en responsabilité tendant à la réparation du préjudice causé par le vice dont la société était entachée. Cette action se prescrit toutefois par 3 ans à compter du jour où la nullité a été découverte.

- En dehors de toute nullité, les articles 75 à 80 AUSCGIE organisent la responsabilité des fondateurs et des premiers organes de gestion. Ceux-ci

31 Art. 253 AUSCGIE.

32 Art. 256 AUSCGIE. Voy. également les articles 316 pour la SARL, 413 et 738 pour la SA.

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sont solidairement responsables du préjudice causé soit par le défaut d'une mention obligatoire dans les statuts, soit par l'omission ou l'accomplissement irrégulier d'une formalité prescrite pour la constitution d'une société. En cas de modification des statuts, les membres des organes de gestion, d'administration et de direction alors en fonction encourent la même responsabilité. L'action en responsabilité se prescrit par 5 ans à compter du jour de l'immatriculation ou de la publicité de l'acte modifiant les statuts.

? La responsabilité pénale

L'AUSCGIE contient des dispositions pénales définissant les éléments constitutifs des infractions et non les sanctions. Ces infractions sont réparties selon qu'elles sont commises relativement à telle ou telle phase de la vie de la société (constitution, gérance, administration et direction, assemblées générales, modifications du capital, contrôle des sociétés, dissolution, liquidation, appel public à l'épargne, etc.)33

Les infractions concernant la constitution de la société sont décrites par les articles 886 à 888 de l'AUSCGIE. Il s'agit entre autres des faits suivants :

- Le fait pour les fondateurs ou les dirigeants d'émettre des actions lorsque l'immatriculation est obtenue en fraude ou que la société est irrégulièrement constituée ;

- Le fait d'affirmer sincères et véritables, par l'établissement de la déclaration notariée de souscription et de versement ou du certificat du dépositaire, des souscriptions que l'on sait fictives ou de déclarer qu'ont été définitivement versés des fonds non mis à la disposition de la société ;

- Le fait de provoquer des suscriptions ou des versements en publiant les noms des personnes désignées contrairement à la vérité comme étant ou devant être attachées à la société à un titre quelconque ;

- Le fait d'attribuer à un apport en nature une évaluation supérieure à sa valeur réelle ;

- Le fait de négocier des actions d'apport avant l'expiration du délai pendant lequel elles ne sont pas négociables, etc.

B. Le fonctionnement de la société

Comme l'être humain, l'être moral société est doté d'organes qui sont nécessaires à sa vie. Ces organes sont appelés « organes sociaux ». En d'autres termes, ce sont les organes sociaux qui font fonctionner les sociétés commerciales. Ces organes sont les associés, les dirigeants et les commissaires aux comptes. Il faut ajouter également à cette liste les salariés, ces derniers étant

33 Art. 886 à 905 AUSCGIE.

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des cocontractants et des créanciers de la personne morale société, qui en constituent une composante non négligeable.

1. Les associés

Le terme associé est pris ici dans son sens le plus large. Il inclut par conséquent tous les titulaires de droits sociaux (parts ou actions) attribués en contrepartie d'un apport et détenus soit par l'apporteur initial, soit par un ayant cause de celui-ci.

Si les associés figurent parmi les éléments moteurs des organes sociaux, c'est principalement en raison des décisions collectives qu'ils peuvent prendre pour la marche de la société.34 Les associés peuvent nommer des dirigeants ou des gérants dans la société, tout comme ils peuvent exercer eux-mêmes ces fonctions.

En effet, les associés doivent pouvoir donner leur opinion sur l'orientation générale de la société, exercer leurs droits d'associés, notamment celui de contrôler et de critiquer la gestion des dirigeants.35 Les associés doivent, pour l'expression de leurs droits, se regrouper au sein des assemblées. L'assemblée des associés est ainsi considérée comme l'instance suprême de la société. Tout associé a droit de participer aux décisions collectives.36

2. Les dirigeants sociaux

Il s'agit de toutes les personnes physiques ou morales investies, individuellement ou collégialement selon les cas, de l'un ou au moins des trois pouvoirs suivants : le pouvoir de représentation externe qui fait du dirigeant le porte parole de la société dans ses rapports avec les tiers37, le pouvoir de direction interne qui le place au sommet de la hiérarchie sociale ; enfin, le pouvoir de contrôle qui l'érige en censeur des actes accomplis par d'autres organes. Ils détiennent souvent la majorité du capital du groupement et n'agissent qu'en qualité de mandataire au nom et pour le compte de la personne morale. Cette dernière, elle seule, exerce la fonction de propriétaire, d'employeur et de contractant.38

La mission du dirigeant consiste donc, exception faite du cas des sociétés unipersonnelles, à représenter la collectivité des associés qui exprime la volonté du groupement.

En effet, les pouvoirs accordés à ces dirigeants ne sont pas absolus. Des clauses statutaires peuvent les limiter, notamment interdire de passer certains actes d'une gravité exceptionnelle, ou imposer l'autorisation préalable des

34 PETIT B., op.cit, p. 49.

35 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 425.

36 Art 125 à 136 AUSCGIE.

37 Art. 121 et 122 AUSCGIE.

38 REINHARD Y., Droit commercial, 3ème édition, Litec, Paris, 1993, p. 181.

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associés ou d'un organe de contrôle. Aussi, ils ne jouissent pas de la pérennité de leurs fonctions : la révocation de son mandat peut être prononcée par la collectivité des associés ou par décision judiciaire.

Les actes accomplis de façon inopportune ou malhonnête par le dirigeant social ne sont pas sanctionnés par la nullité mais par sa responsabilité personnelle. La société peut mettre en cause la responsabilité (civile ou pénale) de ce dirigeant dans les conditions des articles 889 et suivants de l'Acte uniforme.

Selon les réglementations particulières à chaque type de société, les associés peuvent nommer des gérants comme organes de gestion de la société.39 Ces gérants peuvent être associés ou non, personnes physiques ou morales40. Ils ont le pouvoir de représenter la société et d'accomplir tous les actes entrant dans l'objet social. Leur rémunération est fixée par les associés.

3. Les commissaires aux comptes

Les commissaires aux comptes sont des organes de contrôle dont peut se doter une société pour assurer son fonctionnement, surtout en ce qui concerne ses ressources financières et sa comptabilité.

En effet, les commissionnaires aux comptes sont des professionnels chargés aux termes de la loi du contrôle des sociétés commerciales. Ils sont seuls habilités à exercer la mission de contrôle légal des comptes.41

La mission du commissaire aux comptes consiste en l'examen des états financiers de la société en vue de donner une opinion motivée sur leur régularité, leur sincérité et leur concordance. Le commissaire aux comptes a pour rôle permanent de vérifier les valeurs et les documents comptables et d'en contrôler la conformité aux règles en vigueur. En d'autres termes, il s'agit d'un examen qui a pour finalité de vérifier que les règles et les principes qui président à l'élaboration des états financiers sont respectés et que ceux-ci présentent une image fidèle du patrimoine et du résultat de la société. Ce contrôle est aussi effectué dans un souci de protection du patrimoine de la société même si l'objectif principal n'est pas de déterminer les fraudes. Cependant, ces vérifications doivent exclure toute immixtion dans la gestion. Leur finalité se limite à la certification des comptes.

Aux termes de l'article 710 AUSCGIE, « le commissaire aux comptes certifie que les comptes annuels sont réguliers et sincères et donne une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice écoulé ainsi que de la situation financière et du patrimoine de la société à la fin de cet exercice (...) »

39 Art. 276 à 282 pour la SNC, Art. 323 à 332 pour la SARL (AUSCGIE).

40 Dans la SARL, la gérance ne peut pas être confiée à une personne morale (Art. 323 AUSCGIE).

41 ALISSOUTIN O.K., Principe, objectifs et pratique du commissariat aux comptes : cas du « Carder Atlantique Littoral », CESAG, 2004, p. 7.

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La nomination d'un commissaire aux comptes est obligatoire dans les sociétés anonymes42contrairement aux SARL où leur nomination est subordonnée à certaines conditions. Pour les SARL ne remplissant pas les conditions de l'article 376 AUSCGIE, la nomination d'un commissaire aux comptes est facultative. En ce qui concerne les autres formes de société, le droit OHADA n'a pas prévu l'intervention du commissaire aux comptes. Toutefois, celui-ci peut intervenir dans un cadre autre que légal pour une mission bien déterminée.43

Il sied de noter que les dirigeants des sociétés dans lesquelles il est exigé un commissaire aux comptes et qui de mauvaise foi auront omis d'en désigner concourent une sanction pénale selon l'article 897 AUSCGIE. De son coté, l'article 697 cite les incompatibilités liées à la profession de commissionnaire aux comptes dans les sociétés anonymes.

3. Les salariés

Les salariés constituent une composante essentielle de l'entreprise considérée en tant que collectivité humaine. Ce sont des cocontractants et des créanciers de la personne morale société.

La société doit être un cadre de la protection de l'emploi, tout comme celui de l'expression de l'intérêt des salariés et de la mise en place des instances représentatives du personnel. La relation de travail entre la société et ses salariés est régie par les conventions individuelles et collectives ainsi que par les usages d'entreprises.

Le salarié est donc lié à la société (son employeur) par un contrat de travail. Ce dernier détermine la tâche lui confiée et sa rémunération. L'activité salariée est exercée sous la dépendance de l'entrepreneur et le lien de subordination qui en résulte permet de distinguer le salariat des fonctions accomplies par un professionnel indépendant (agent commercial, commissionnaire ou courtier). Il est à remarquer que l'absence du travailleur au sein d'une société est inconcevable car étant un frein ou un obstacle à la réalisation du but de la société.

En effet, comme dit ci-haut, le salarié, dans l'analyse traditionnelle, est essentiellement un créancier de la société (vue sous l'angle de l'entreprise). Mais on ne saurait faire abstraction du fait que ce n'est qu'en cas de disparition de la société, ou de difficultés financières importantes, qu'une situation particulière est faite aux salariés et que la créance de salaire fait l'objet d'un traitement privilégié Cette évolution s'insère dans un courant de pensée traditionnel, qui ne considère le salarié que comme un créancier. A en croire Yves REINHARD, cette analyse est manifestement insuffisante. C'est pourquoi le droit des procédures collectives associe aujourd'hui étroitement les salariés au

42 Art. 694 AUSCGIE.

43 ALISSOUTIN O.K., op.cit., p. 12.

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déroulement de la procédure : cette nouvelle solution annonce un changement de cap.44

De ce qui précède, il est évident que, du fait que le personnel salarié est partie intégrante de l'entreprise dans laquelle il travaille, il devient un partenaire de cette entreprise. L'article 80 du Code du travail précise en effet que « lorsqu'il y a substitution d'employeur, notamment par cession, succession, fusion, transformation de fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la substitution subsistent entre le nouvel employeur et le personnel ». Cette disposition justifie l'occupation d'une place de choix dans cette matière : le principe civiliste de l'effet relatif des contrats se trouve écarté et affirmée l'appartenance du salarié à l'entreprise.

Les groupements de salariés peuvent conclure des accords collectifs de travail, et les syndicats de salariés sont, par l'intermédiaire des accords et convention collectifs, à l'origine de la création du droit du travail.45Les organisations syndicales de salariés représentatives au plan national ou local sont habilitées à conclure ces accords et ces conventions qui peuvent avoir pour champ d'application une branche d'activité et traiter de l'ensemble des conditions d'emploi, de travail et de garanties sociales.

La présence des salariés au sein de la société se trouve prolongée de deux façons : par l'existence d'institutions collectives et par la reconnaissance de droits individuels. Pour ce qui est des institutions collectives, il faut noter que la participation des salariés à la vie de la société est une exigence de la gestion moderne : elle permet aux salariés de s'organiser et de faire mieux entendre leurs revendications ; elle donne à l'entreprise les moyens d'utiliser au mieux les compétences et les avis de ses employés.

Par les institutions collectives, nous voyons la représentation du personnel et la représentation syndicale.

a) La représentation du personnel

L'élection d'une délégation du personnel est obligatoire dans toutes les sociétés.46 Les délégués, élus par les salariés, sont chargés de présenter à l'employeur toutes les réclamations individuelles ou collectives portant sur l'application du droit social dans l'entreprise et de saisir éventuellement l'inspection du travail. Ils doivent être consultés par l'employeur sur les horaires de travail, sur les critères généraux en matière d'embauchage, de licenciement et de transfert des travailleurs, sur les systèmes de rémunération et de prime, etc.47

44 REINHARD Y., op.cit, p. 184.

45 Idem.

46 Art. 255, Code du travail.

47 Art. 259, Code du travail.

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b) La représentation syndicale

L'article 237 du code du travail définit par renvoi à l'article230 du même code un syndicat comme étant toute organisation professionnelle constituée en vue de la défense et le développement des intérêts professionnels des travailleurs ainsi que le progrès social, économique et moral de leurs membres.

Les sections syndicales sont donc créées à l'initiative des syndicats représentatifs et ont pour mission de représenter leurs adhérents. Elles ne sont pas mandatées par la collectivité des salariés mais par les seuls adhérents du syndicat dont elles sont l'émanation.

§4 CLASSIFICATION DES SOCIETES

La classification des sociétés paraît plus complexe. Pour raison de simplicité, nous avons retenu une classification fondée d'une part sur le régime juridique applicable aux différentes sociétés (A), et d'autre part sur les formes légales des sociétés commerciales.

A. Classification fondée sur le régime juridique 1. Sociétés civiles et sociétés commerciales

La mise en oeuvre de la distinction à ce niveau repose sur deux critères, à savoir la forme (c'est-à-dire la structure juridique du groupement) et l'objet (c'est-à-dire l'activité exercée par le groupement).

En fait, on pourrait estimer qu'une société est civile lorsque son objet est civil, et elle est commerciale lorsque son objet est un acte de commerce.

Cependant, aux termes de l'article 6 AUSCGIE, le caractère commercial d'une société est déterminé par sa forme ou par son objet. La commercialité d'une société par l'objet suppose que la société accomplit, conformément aux articles 2 et 3 (définition du commerçant et énumération des actes de commerce) de l'Acte uniforme portant sur le droit commercial général, des actes de commerce et en fait sa profession habituelle. La commercialité par la forme est acquise lorsque la société, quelque soit son objet, adopte l'une des formes légales prévues par l'Acte uniforme.48

Une société est civile lorsque non seulement elle n'a pas opté pour l'une des formes légales, mais aussi lorsque son objet est civil.49

48 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 391.

49 Idem, p. 387.

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2. Sociétés de personnes et sociétés de capitaux

Les sociétés de personnes, dont l'exemple type est la SNC, reposent sur la confiance qu'inspire la personne de chaque associé et présente par la suite quatre caractéristiques principales : la société trouve sa source dans un contrat marqué d'un fort intuitu personae (c'est-à-dire que les associés forment ce type de société en considération de leurs personnes, parce qu'ils se connaissent et se font mutuellement confiance) ; elle est en principe dissoute par le décès ou l'incapacité d'un associé ; chaque associé est titulaire de parts d'intérêt qu'il ne peut céder à un tiers qu'avec l'accord de ses coassociés ; chaque associé répond des dettes de la société sur l'ensemble de son patrimoine personnel (responsabilité illimitée). Aussi, tous les associés ont ici la qualité de commerçant.

Les sociétés de capitaux, par contre, dont l'exemple type est la SA, reposent sur l'argent que chacun accepte de mettre dans l'affaire. Les qualités de la personne s'effacent derrière sa contribution financière, de sorte que non seulement l'intuitu personae disparait, mais aussi la société survit au décès ou à l'incapacité de l'un de ses membres. L'associé (appelé actionnaire) est titulaire non de parts, mais d'actions librement négociables. Il ne répond pas, au-delà de son apport, des dettes pesant sur la société (responsabilité limitée).

En outre, dans les sociétés de capitaux, les actionnaires sont souvent inconnus du public et s'ignorent de fois eux-mêmes du fait que leur personnalité ne compte pas.

3. Sociétés personnifiées et sociétés non personnifiées

La distinction entre sociétés personnifiées et sociétés non personnifiées permet d'opposer celles que leur immatriculation au Registre du commerce et du crédit mobilier (RCCM) rend aptes à agir par elles-mêmes sur la scène juridique à celles qui, faute d'immatriculation, ne constituent qu'une organisation conventionnelle des rapports entre associés.

L'Acte uniforme soumet aujourd'hui à un régime identique deux types de sociétés dépourvues de personnalité : les sociétés en participation et les sociétés de fait (ou créées de fait). Les deux situations, pourtant, méritent d'être distinguées. La société en participation est une société qui a été créée sciemment par des associés qui ont eu et exprimé l'intention de la faire fonctionner dans l'avenir ; simplement, les associés sont convenus que cette société ne serait pas immatriculée et serait en conséquence dépourvue de personnalité juridique.50

La société créée de fait est, en revanche, une société dont on découvre après coup, pour les besoins de la solution d'un litige ou de règlement de certains intérêts, qu'elle a fonctionné dans le passé, sur le fondement d'une

50 Art 854 AUSCGIE

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volonté qui n'a pas été formellement exprimée et dont on peut même douter qu'elle ait jamais existé : la société est dans ce cas subie plus que voulue et le contrat de société est supposé plus qu'il n'est établi.51

? La Société en participation

L'Acte uniforme réglemente cette forme de société. Il s'agit d'une société occulte par nature : chaque associé contracte en son nom personnel et est seul engagé à l'égard des tiers. Mais si un associé en participation révèle l'existence de la société, celle-ci devient ostensible et les tiers peuvent s'en prévaloir.52 C'est une société transparente régie essentiellement par la volonté des parties. Ainsi les associés conviennent librement de sa durée, de son objet, des conditions de son fonctionnement, des droits des associés et de la fin de la société.53

Cependant, quelques particularités méritent de retenir l'attention en ce qui concerne le fonctionnement de la société. Il s'agit surtout des rapports entre associés, entre ceux-ci et les tiers, la sécurité des uns et des autres devant être assurée.

Pratiquement, la Société en participation peut, par la souplesse et la discrétion qu'elle autorise, se prêter aux utilisations les plus diverses. Cela peut être des banquiers ou des coproducteurs qui se groupent pour financer une entreprise ou une réalisation industrielle ou artistique ; cela peut être aussi des entreprises qui unissent leurs efforts pour concevoir et réaliser un ouvrage ou se livrer à un investissement d'utilité commune, etc.

- Constitution :

Sur le fond, la constitution de la société en participation obéit au droit commun du contrat de société, auquel renvoie l'article 446.1 du code des contrats et des obligations. D'une part, la société doit compter au moins deux associés et d'autre part, les participants doivent faire des apports qui, cependant, se présentent ici de manière particulière. Il n'est pas question en effet de transférer la propriété des biens à la société qui n'a ni personnalité, ni capital, ni patrimoine. Les associés restent seuls propriétaires de ces biens qui sont seulement mis à la disposition de la participation, à moins qu'ils ne conviennent d'en faire l'objet d'une indivision ou que l'un des associés soit, à l'égard des tiers, propriétaire de tout ou partie des biens qu'il acquiert en vue de la réalisation de l'objet social.54 Sur la forme, aucune condition n'est exigée, mais un acte écrit est ordinairement établi. Il n'est pas, en revanche, nécessaire à la preuve, la société pouvant être prouvée par tous moyens.55

51 PETIT B., op.cit, p. 99.

52 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 630.

53 Art 855 AUSCGIE

54 Art 858 AUSCGIE.

55 Art 854 al 2 AUSCGIE.

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- Fonctionnement :

Les rapports entre associés sont en principe abandonnés à la liberté contractuelle, à défaut d'organisation conventionnelle, ils sont régis par les dispositions applicables aux SNC.56 Les rapports avec les tiers passent en principe par l'intermédiaire de l'un des associés ou du gérant désigné par eux. Celui-ci, cependant, n'est investi d'aucun pouvoir de représentation : il contracte en son nom personnel et est seul engagé à l'égard des tiers.57 Ce n'est donc que de manière indirecte et par l'effet du contrat qui les lie que les autres participants subissent les conséquences des actes accomplis.

Par exception, un lien direct d'obligation peut se nouer dans trois hypothèses. Il en est ainsi tout d'abord en cas de révélation de la participation, c'est-à-dire lorsque les participants ont agi en qualité d'associés au vu et au su des tiers : chacun de ceux ayant personnellement agi est alors tenu des actes accomplis par les autres, solidairement. La même obligation se retrouve ensuite à la charge de l'associé qui, par son immixtion dans la gestion, a laissé croire au cocontractant qu'il s'engageait personnellement à son égard et dont il est prouvé que l'engagement a tourné à son profit .58 Il sied de noter enfin que les éléments d'identification de cette société sont inutiles puisque à l'égard des tiers, la société est censée ne pas avoir d'existence juridique et n'a pas de patrimoine propre.59

? La société de fait60

L'Acte uniforme définit les hypothèses de société de fait de la manière suivante :

- Lorsque deux ou plusieurs personnes physiques ou morales se comportent comme des associés sans avoir constitué entre elles l'une des sociétés reconnues par l'Acte uniforme61 ;

- Lorsqu'une société reconnue par l'Acte uniforme est constituée au mépris des formalités légales62;

- Lorsqu'une société constituée n'est pas reconnue par l'Acte uniforme (une société qui n'épouse aucune des formes sociales consacrées par l'Acte uniforme) ;

- Lorsqu'une société est constituée sans acte écrit et ne peut par conséquent être immatriculée.63

56 Art 856 AUSCGIE.

57 Art 861 AUSCGIE.

58 Art 856 al 4 AUSCGIE

59 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 631.

60 Par « Société de fait », il faut entendre « société créée de fait », même si l'expression « société de fait » est stricto sensu employée pour désigner une société annulée, sans rétroactivité, pour cause d'irrégularité (OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 634 et 420 ; PETIT B., op.cit, p. 102).

61 Art 864 AUSCGIE.

62 Art 865 AUSCGIE.

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Cette diversité de situations montre bien que le problème majeur des sociétés créées de fait est celui de leur existence. Malgré les difficultés de preuve, une telle société peut toujours être prouvée, comme celle en participation, par tout moyen64, même dans les rapports entre associés. Cette règle facilite considérablement la tâche des intéressés. La jurisprudence, en outre, accepte d'aller au delà de cette facilité de preuve en autorisant les tiers à se prévaloir de la simple apparence d'une société créée de fait, appréciée globalement et sans qu'il soit nécessaire de démontrer l'existence effective de différents éléments constitutifs du contrat de société.65 Il faut donc établir que les personnes en cause se sont comportées comme des associés de fait au vu et au su des tiers.66

Ainsi établie, la société créée de fait se voit appliquer les règles de la SNC.67 En réalité, il n'est pas question dans ces sociétés des règles de fonctionnement car le plus souvent, les associés ignorent même qu'ils sont en société. Tantôt, la mise à jour de la société créée de fait permet de sauvegarder les intérêts des associés eux-mêmes ou plutôt de l'un d'entre eux, en l'autorisant à réclamer sa part du profit issu de l'oeuvre commune ; tantôt les intérêts des tiers qui pourront, sous certaines conditions, réclamer leur paiement aux différents membres de la société afin d'engager leur responsabilité le plus largement possible (le fournisseur pourra ainsi s'adresser non seulement à l'entrepreneur avec lequel il a traité, mais aussi à celui qui s'est comporté, en fait, comme l'associé de ce dernier).68

B. Classification fondée sur les formes légales des sociétés commerciales

L'Acte uniforme prévoit cinq formes de sociétés commerciales, à savoir la société en nom collectif, la société en commandite simple, la société à responsabilité limitée, la société anonyme et la société par actions simplifiée.

1. La Société en Nom Collectif (SNC)

La Société en Nom Collectif et une société commerciale par la forme regroupant des associés qui ont tous la qualité de commerçant et qui répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales.69

Traditionnellement, la SNC a pour vertu principale de permettre à des commerçants personnes physiques d'unir leurs efforts au sein d'une structure

63 Art 115 AUSCGIE.

64 Art 861 AUSCGIE.

65 En tout état de cause, la preuve de la société de fait exige la réunion des éléments indispensables que sont : les apports réciproques de biens ou d'activités, une intention nette des parties de s'associer en vue d'une opération commerciale, et enfin l'intention de participer également aux bénéfices et aux pertes. (Cour Suprême du Cameroun, Arrêt n° 85/CC du 7 juin 1973, in Revue camerounaise de Droit n° 9, p. 62.)

66 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 634.

67 Art 868 AUSCGIE.

68 PETIT B., op.cit, p. 103.

69 Art 270 AUSCGIE.

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souple et fermée. Elle constitue la société de personne par excellence, qui est librement organisée par ses membres et scellée par une confiance génératrice d'un intuitu personae qui interdit en principe aux tiers d'y prendre pied.70 Elle est la plus commerciale des sociétés commerciales et la mieux adaptée aux petites et moyennes entreprises.71

La constitution de la SNC ne présente que très peu d'originalité par rapport au régime du droit commun des sociétés, et spécialement des sociétés de personnes. La principale spécificité tient à la capacité : tous les associés doivent nécessairement remplir les conditions nécessaires à l'acquisition de la qualité de commerçant, ce qui exclut notamment, outre les mineurs et les majeurs incapables, les personnes frappées d'interdiction ou d'incompatibilité, voire, dans une certaine mesure, les étrangers.

Il existe des règles spécifiques à cette forme de société : la société doit compter au moins deux associés, ceux-ci peuvent effectuer des apports en industrie, aucun capital minimal n'est exigé, la présence d'un commissaire au compte est facultative.

2. La Société en Commandite Simple (SCS)

La société en commandite simple, peu utilisée en pratique, est une société commerciale par la forme qui présente une double spécificité juridique. Elle est tout d'abord une société hybride qui n'entre que partiellement dans la catégorie des sociétés à risque illimité. Elle regroupe en effet deux catégories d'associés : d'une pat les commandités qui ont le statut d'associés en nom, qui sont personnellement commerçants et qui sont obligés indéfiniment et solidairement aux dettes sociales ; et d'autre part les commanditaires, bailleurs de fonds, pour qui le risque est limité au montant de leurs apports.72

Seuls les commandités gèrent la société.73 La considération de la personne des commanditaires est moins importante que celle des commandités. Raison pour laquelle la cessibilité de leurs parts sociales est plus facile et la société peut en principe continuer malgré leur décès.

Pour la constitution de la SCS, les associés doivent être au moins deux : un commandité et un commanditaire, les commanditaires devant remplir les conditions nécessaires à l'acquisition de la qualité de commerçant. En revanche, la situation de commanditaire est ouverte même aux incapables dûment représentés.74

En ce qui concerne le capital, aucun minimum n'est exigé. Il faut noter enfin que la principale différence entre associés commandités et associés

70 PETIT B., op.cit, p. 110.

71 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 468.

72 Art 293 AUSCGIE.

73 Art 298 AUSCGIE.

74 PETIT B., op.cit, p. 116.

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commanditaires est relative à l'obligation aux dettes sociales, qui pèse sur les premiers et épargne les seconds.

3. La Société à Responsabilité Limitée (SARL)

La SARL est une société commerciale par la forme constituée par un ou plusieurs associés qui ne sont responsables des dettes sociales qu'à concurrence de leurs apports.75

La SARL a l'avantage de permettre à ses associés de se livrer à une exploitation commerciale sans prendre personnellement la qualité de commerçant. Cette société peut être constituée par une personne physique ou morale. Elle peut donc être soit pluripersonnelle, soit unipersonnelle.

L'étude des règles de constitution, d'organisation, de fonctionnement et de dissolution de la SARL laisse apparaître que celle-ci emprunte comme par la passé ses caractéristiques à la fois aux sociétés de personnes et aux sociétés de capitaux. Par assimilation aux premières, la société est fondée sur l'intuitu personae et dès lors, la personne de l'associé est prépondérante. En outre, le capital de la société est divisé en parts sociales en principe cessibles dans des conditions strictement énumérées par la loi. Enfin, la gestion de la société est confiée à un gérant.76

Par assimilation aux sociétés des capitaux, la SARL se rapproche à ces dernières sur plusieurs points : les associés n'ont pas la qualité de commerçant ; ils ne sont responsables du passif social qu'à concurrence de leurs apports ; la survenance d'un événement atteignant personnellement un associé tel que le décès, la faillite ou l'incapacité est, en principe, sans effet sur la société.77

Tel qu'on peut le remarquer, point n'est besoin de rappeler que la SARL paraît être une société hybride par nature, du point de vue fonctionnement en général, car on y trouve des aspects des sociétés des personnes et ceux des sociétés des capitaux. Aussi faudra-t-il noter la fixation par la loi d'un capital social minimum (Un million de francs CFA).78

4. La Société Anonyme (SA)

L'article 385 AUSCGIE définit la SA comme une « société dans laquelle les actionnaires ne sont responsables des dettes sociales qu'à concurrence de leurs apports et dont les droits des actionnaires sont représentés par des actions ».

Cet article ajoute une précision selon laquelle la société anonyme peut ne comprendre qu'un seul actionnaire.

75 Art 309 AUSCGIE.

76 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 481.

77 Idem.

78 Art 311 AUSCGIE.

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A en croire Bruno PETIT, il s'agit en fait d'une société de capitaux et d'une société par actions qui se sépare de la SARL sur deux point : d'une part, elle est composée d'actionnaires dont la personnalité importe peu ; d'autre part, les titres émis en représentation de son capital sont en principe librement négociables.79

D'une manière générale, la SA présente un certain nombre de traits caractéristiques :

- c'est une société à risque limité : les actionnaires ne supportent les pertes sociales qu'à concurrence de leurs apports ;

- c'est une société de capitaux : le capital apporté compte plus que la personne qui l'apporte, et en ce sens, l'actionnaire s'efface derrière l'action ;

- c'est une société par actions : elle émet des valeurs mobilières qui comprennent des titres nécessaires au financement de leurs activités (actions et obligations)80 ;

- cette société peut être constituée par un seul associé (appelé actionnaire) ;

- un capital social minimum est fixé.81

5. La Société par Actions Simplifiée (SAS)

Aux termes de l'article 853-1 AUSCGIE, « la société par actions simplifiée est une société instituée par un ou plusieurs associés et dont les statuts prévoient librement l'organisation et le fonctionnement de la société sous réserve des règles impératives du présent livre. Les associes de la société par actions simplifiée ne sont responsables des dettes sociales qu'à concurrence de leurs apports et leurs droits sont représentés par des actions ».

La SAS présente trois caractéristiques essentielles :

- elle est une société par actions distincte de la SA, mais dont le régime est a priori défini par renvoi aux règles applicables à celle-ci. Elle est soumise à des règles de fonctionnement très souples ;

- de très importantes dérogations sont ou peuvent être apportées à ces règles puisque l'organisation de la SAS est pour l'essentiel abandonnée à la liberté contractuelle et donc à l'imagination des rédacteurs des statuts. Elle offre donc aux associés une grande liberté d'organisation ;

- c'est une société pouvant être instituée par une seule personne ;

- les associés ont une responsabilité limitée.

79 PETIT B., op.cit, p. 154.

80 Les actions sont émises à l'occasion d'un apport fait à la société et confèrent à leur titulaire un droit d'associé, tandis que les obligations sont émises à l'occasion d'un prêt consenti à la société et confèrent à leur titulaire un simple droit de créance à l'encontre de celle-ci.

81 Art 387 AUSCGIE.

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De toute évidence, la grande souplesse d'organisation et de fonctionnement de la SAS constitue son principal avantage, puisqu'elle peut facilement s'adapter aux souhaits des associés fondateurs. Il faut noter que la plupart des règles concernant les sociétés anonymes sont applicables à la SAS, à l'exception des articles énumérés par l'article 853-3 AUSCGIE ; et ceci dans la mesure où ces règles sont compatibles avec les dispositions particulières à la SAS prévues par le livre 4-2 de l'AUSCGIE.82

En outre, à la différence de la SA, la SAS reste privée de la faculté de faire publiquement appel à l'épargne.83

L'addition en janvier 2014 des caractéristiques de la SAS à l'Acte uniforme fait de cette dernière une société à part, qui a tout pour séduire les milieux économiques et dont l'existence est en elle-même porteuse de subversion : qu'on s'en réjouisse ou qu'on le déplore, elle apparaît comme le moyen légal d'éluder bon nombre des règles applicables aux autres formes sociales et spécialement à la SA.

SECTION II NOTION DE CONTRAT ET DE CONFLIT DE

TRAVAIL

Au cours de cette section nous allons d'abord définir le contrat de travail, fixer les éléments qui le caractérisent, évoquer les parties qui y interviennent et le distinguer d'autres types des contrats qui lui sont voisins (§1), avant d'expliciter la notion de conflit de travail (§2). Il est en outre très important de préciser la compréhension du terme « contrat en cours » (§3).

§ 1 CONTRAT DE TRAVAIL

A. Définition

A en croire Micheline JAMOULLE, le contrat de travail est un contrat par lequel le travailleur s'engage contre rémunération à fournir un travail dans un état de subordination vis-à-vis de l'employeur.84

CAMERLYNCK et LYON CAEN définissent de leur part le contrat de travail en ces termes : « Le contrat de travail s'analyse comme la convention par laquelle une personne s'engage à mettre son activité à la disposition d'une autre, sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant une rémunération.85

82 Art 853-3 AUSCGIE

83 Art 853-4 AUSCGIE.

84 JAMOULLE M., Le contrat de travail, Tome 1, FDESSL, Liège, 1982, p. 137.

85 CAMERLYNCK G.H et LYON-CAEN G., Droit du travail, Dalloz, Paris, 1976, p. 76.

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Quant à la loi congolaise en matière du travail, notamment la loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant code du Travail, le contrat de travail est toute convention, écrite ou verbale, par laquelle une personne, le travailleur, s'engage à fournir à une autre personne, l'employeur, un travail manuel ou autre sous la direction et l'autorité directe ou indirecte de celui-ci et moyennant rémunération (Article 7 point c).

B. Eléments caractéristiques

Des définitions évoquées supra découlent trois éléments caractéristiques d'un contrat de travail qui méritent d'être brièvement analysés. Il s'agit du lien de subordination, de la prestation de travail et de la rémunération.

1. Le lien de subordination

Le contrat de travail constitue un mécanisme débouchant sur une situation d'inégalité, sur une position de subordination. A la différence du travailleur indépendant, le salarié accepte de se placer sous l'autorité de son employeur.86 La subordination implique un pouvoir de direction accordé à l'employeur. Corrélativement, elle suppose que le travailleur soit tenu d'obéir aux ordres qui émanent directement ou indirectement de son contractant.87

Il sied donc de noter que la subordination est l'élément essentiel du contrat de travail, qui différencie les salariés des travailleurs indépendants. Cependant, cette subordination ne porte pas atteinte à l'indépendance du travailleur sur le plan technique ou professionnel.

2. La prestation de travail

Il s'agit de l'activité qu'un salarié s'engage à fournir. La tâche que s'engage à fournir le salarié peut revêtir les formes les plus diverses, être physique, intellectuelle ou même artistique ; elle peut émaner d'un manoeuvre, d'un comptable ou d'un ingénieur, etc.

L'engagement essentiel du salarié réside dans une obligation de faire, dans l'exigence d'un comportement. La prestation doit être personnelle et librement consentie, c'est-à-dire qu'elle doit être exécutée par le travailleur lui-même.

Il faut donc noter ici que n'importe quelle activité, quelle que soit sa nature, peut donner lieu à un contrat de travail, pourvu qu'il s'agisse d'un comportement licite.88

86 CAMERLYNCK G.H et LYON-CAEN G., op.cit, p. 77.

87 JAMOULLE M., op.cit, p. 147.

88 Idem, p. 140.

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3. La rémunération

Dans les rapports entre les deux parties, l'obligation essentielle de l'employeur réside dans le paiement d'une rémunération ou d'un salaire, déclarée constituer la contrepartie de la prestation de travail. Le contrat de travail est un contrat à titre onéreux. Le salaire constitue donc le prix du travail.

C. Les parties au contrat de travail

Il s'agit de l'employeur d'une part, et du travailleur d'autre part.

1. L'employeur

L'employeur est toute personne physique ou morale, de droit public ou privé, qui utilise les services d'un ou de plusieurs travailleurs en vertu d'un contrat de travail (Article 7 point b, Code du travail).

Le mot employeur revêt d'un sens plural ou plutôt large. Il peut désigner à la fois le chef d'entreprise, les dirigeants, l'employeur initial ou l'employeur substitué. Si le travailleur est tenu d'exécuter personnellement son travail, l'employeur peut se substituer par d'autres personnes. C'est pour cette raison que la substitution d'un employeur ne met pas fin aux contrats de travail

en cours.89

2. Le travailleur

L'article 7 point a du code du travail définit le travailleur comme toute personne physique, en âge de contracter, quels que soient son sexe, son état civil et sa nationalité, qui s'est engagée à mettre son activité professionnelle, moyennant rémunération, sous la direction et l'autorité d'une personne physique ou morale, publique ou privée, dans les liens d'un contrat de travail.

Le mot travailleur a plusieurs synonymes : salarié, ouvrier ou employé.

D. Distinction entre contrat de travail et contrats voisins

Après avoir cerné la notion du contrat de travail, il est possible de déterminer la situation qu'il occupe dans l'ensemble du champ contractuel et d'établir les relations de distinction, d'incompatibilité ou de cumul qu'il peut entretenir avec les autres contrats.

1. Contrat de travail et contrat d'entreprise

Seule l'absence d'une subordination personnelle et constante distingue le contrat d'entreprise de celui du travail. Il en résulte que l'objet du contrat d'entreprise doit être directement recherché dans le travail déterminé que l'entrepreneur s'engage à exécuter librement et non pas dans une force de travail dirigée par le contractant.

89 Article 80, Code du travail.

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Le contrat d'entreprise, tout en ignorant le pouvoir d'organisation globale que possède l'employeur vis-à-vis du salarié, s'accommode de directives générales données par le maître de l'ouvrage ainsi que d'instructions quant à la nature et à l'étendue des travaux contractuels.90

Il sied de noter que contrairement au contrat de travail, l'entrepreneur reste indépendant dans l'exécution de son travail. Il n'est pas en lien de subordination.

2. Contrat de travail et contrat de société

Le contrat de société se caractérise par deux éléments : la mise en commun d'apports réalisée par deux ou plusieurs personnes dans un esprit de lucre et la participation de ces personnes aux pertes. A ces éléments s'ajoute traditionnellement l'affectio societatis, qui est l'intention de collaborer de manière active, égalitaire et intéressée. En principe, comme de tels éléments ne sont pas présents dans le contrat de travail, la distinction s'opère aisément.

3. Contrat de travail et contrat de mandat

Des liens ont toujours existé entre contrat de travail et contrat de mandat. Selon la doctrine traditionnelle, le mandat doit se distinguer du contrat de travail par l'objet contractuel : le mandat concerne de façon essentielle, l'accomplissement d'actes juridiques, alors que le contrat de travail ne permet qu'une activité matérielle, qu'elle soit de caractère intellectuel ou manuel91

Si le mandataire est indépendant dans l'exécution de son mandat, le travailleur, lui, est sous le lien de subordination. De plus, le mandant peut retirer à tout moment le mandat confié, mais l'employeur ne peut pas licencier le travailleur à tout moment et sans motif.

4. Contrat de travail et professions libérales

On ne le dira jamais assez, dans le contrat de travail, il y a lien de subordination, tandis que dans les professions libérales, le professionnel est indépendant.

5. Contrat de travail et contrats d'apprentissage, de stage et de formation
professionnelle

L'apprenti, tout comme le stagiaire, est dans un lien de subordination avec son maître. Mais, d'une manière générale, le but des formateurs est de faciliter l'insertion professionnelle des apprentis et d'assurer la formation pratique du stagiaire. Aussi, la rémunération, élément caractéristique du contrat

90 JAMOULLE M., op.cit, p. 194.

91 CLESSE J., Congé et contrat de travail, Collection scientifique de la faculté de Droit de Liège, Liège, 1992, p. 69.

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de travail, peut faire défaut ici. C'est pourquoi, le contrat de stage n'est pas un contrat de travail.

§2 CONFLITS DE TRAVAIL

Les conflits existent toujours dans les entreprises. Ils sont inévitables entre les patrons et les salariés pour autant que d'une part l'appétit de chacun des deux camps est plus ou moins insatiable, alors que les moyens de les satisfaire sont nécessairement limités et d'autre part, il est fatal que certains commandent et d'autres obéissent. Cette loi de la vie sociale soulève par elle-même dans l'organisation complexe de toute société industrielle, des oppositions d'intérêt que l'on peut rendre tolérables, mais qu'il n'est jamais possible d'éliminer totalement.92 Ces conflits peuvent être collectifs ou individuels.

A. Litiges individuels de travail

1. Notions

Si l'on en croit MUKADI BONYI, l'exécution d'un contrat de travail conclu entre l'employeur et le travailleur peut se dérouler sans heurt depuis la date de la conclusion jusqu'au moment où le travailleur prend sa retraite. Mais il n'est pas rare que cette exécution soit émaillée d'incidents qui affectent la carrière du travailleur. On assiste dans ce cas à la naissance des litiges individuels de travail.93

Le litige individuel est un conflit survenant entre un travailleur et son employeur à l'occasion de l'application de la réglementation du travail. Au sens large, le litige individuel oppose un ou plusieurs travailleurs à l'employeur au sujet du respect pour ce dernier d'une disposition légale ou conventionnelle dont la violation est sanctionnée par les tribunaux spécialisés en matière du travail.

Il sied de noter que le fait générateur d'un litige individuel n'est rien d'autre que la divergence des points de vue entre l'employeur et le travailleur concernant les conditions du travail.

2. Règlement

L'article 298 du code du travail prescrit que les litiges individuels ne sont pas recevables devant le Tribunal du Travail s'ils n'ont été préalablement soumis à la procédure de conciliation, à l'initiative de l'une des parties, devant l'Inspecteur du Travail du ressort.

92 MUKADI BONYI, Droit du travail, CRDS, Bruxelles, 2OO8, p. 603.

93 Idem, p. 633.

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Cette disposition montre que le règlement des litiges individuels suppose tout d'abord le respect préalable d'une phase administrative et ensuite, en cas d'échec de la première phase, l'initiation d'une phase judiciaire.

a) La phase administrative ou la conciliation préalable

Cette phase se déroule devant l'inspecteur du travail suivant un certain nombre des modalités. Elle revêt deux caractères : obligatoire et préalable.

Avant de saisir le Tribunal compétent, la partie qui prend l'initiative doit saisir d'abord l'inspecteur du travail en lui adressant une plainte conformément à la loi. L'inspecteur du travail convoque la partie adverse pour procéder à l'échange de vue sur l'objet du litige et pour vérifier si les parties sont disposées à se concilier.94 Cette phase est sanctionnée par un procès verbal (PV) de conciliation ou de non-conciliation.

Lorsque les parties se mettent d'accord, il sera dressé un PV de conciliation. Par contre, si elles ne se mettent pas d'accord, l'inspecteur dresse un PV de non conciliation. Si l'une des parties n'a pas répondu à la convocation de l'inspecteur du travail, il est dressé un PV de carence valant PV de non conciliation. C'est ce PV de non conciliation qui ouvre la voie à la phase judiciaire.

b) La phase judiciaire

En cas d'échec de la phase administrative, le litige peut être soumis au Tribunal du Travail.95 Le Tribunal ne peut être saisi que si la procédure de conciliation a été sanctionnée par un PV de non conciliation et le cas échéant, par un PV de carence.

B. Conflit collectif de travail

1. Notions

Est réputé conflit collectif du travail, tout conflit survenu entre un ou plusieurs employeurs d'une part, et un certain nombre de membres de leur personnel d'autre part, portant sur les conditions de travail, lorsqu'il est de nature à compromettre la bonne marche de l'entreprise ou la paix sociale.96

Le moins que l'on puisse dire est que les conflits collectifs touchent aux intérêts d'un groupe des travailleurs au sujet des conditions du travail, et que ce conflit est susceptible de provoquer de l'imbroglio au sein de l'entreprise.

94 Article 300, Code du Travail.

95 Article 302, Code du Travail.

96 Article 303, Code du Travail.

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2. Règlement

Le conflit collectif du travail peut être réglé soit par négociation entre parties, soit par l'intervention d'un tiers ou d`une décision de justice. La loi prévoit deux procédures de règlement de ce conflit, à savoir la procédure conventionnelle et la procédure légale.

a) La procédure conventionnelle97

Elle comporte deux étapes : la conciliation et l'arbitrage. ? La conciliation

A ce niveau les travailleurs représentés et l'employeur se mettent autour d'une table pour tenter de trouver un terrain d'entente. Cette procédure est menée par les parties elles-mêmes sans le concours de l'inspecteur du travail.

A l'issue de la conciliation, soit un compromis a été trouvé, soit un désaccord a eu lieu. Dans tous les deux cas, un PV doit être dressé. S'il s'agit d'un accord, la conciliation est réglée. Mais s'il s'agit d'un désaccord, le conflit sera soumis à l'arbitrage, avec le PV de non conciliation.

? L'arbitrage

L'arbitre est choisi par accord entre parties ou selon les modalités prévues dans la convention collective.98 L'arbitre désigné ne statue que sur ce qui est prévu dans le PV de non conciliation. La sentence arbitrale doit être motivée et s'impose aux parties. En cas d'échec à cette étape, les parties sont obligées de recourir à la procédure légale.

b) La procédure légale99

Cette procédure comporte également deux étapes : la conciliation devant l'inspecteur du travail ainsi que la médiation.

? La conciliation devant l'inspecteur du travail

Cette conciliation est menée à ce niveau par l'inspecteur du travail, saisi par la partie diligente ou d'office dès qu'il a connaissance de ces conflits. Comme toute conciliation, il y a deux issues possibles : accord ou désaccord. En cas de non conciliation, totale ou partielle, le conflit est obligatoirement soumis à la procédure de médiation. A cet effet, l'inspecteur du travail doit soumettre le dossier à qui de droit.

97 Articles 304 à 306, Code du Travail

98 La convention collective est un accord écrit relatif aux conditions et aux relations de travail conclu entre un ou plusieurs employeurs ou syndicats d'employeurs et un ou plusieurs syndicats des travailleurs (Articles 272 à 296, Code du Travail).

99 Articles 307 à 315, Code du Travail.

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? La médiation

L'inspecteur du travail transmet dès lors le dossier dans les 48 heures au Gouverneur de province lorsqu'un ou plusieurs établissements situés dans une seule province sont concernés, ou au Ministre du travail lorsque plusieurs établissements d'une même entreprise ou plusieurs entreprises situées dans plusieurs provinces sont concernés.

L'autorité saisie constitue une commission spéciale de médiation, dont la composition doit être bipartite et présidée par le président du Tribunal de paix du ressort ou son délégué. Le président est assisté par un assesseur employeur et un assesseur travailleur, désignés par leurs organisations professionnelles, lesquels doivent être étrangers à l'établissement concerné.

A l'issue de la médiation, un PV est établi et signé par les membres de la commission et les parties représentées, et cela en cas d'accord. S'il s'agit de désaccord, la commission formule des recommandations motivées, lesquelles sont immédiatement communiquées aux parties. A leur tour les parties ont sept jours francs pour réagir à ces recommandations.

Si le désaccord persiste, les conflits seront portés devant les tribunaux du travail.

Ce qui précède était une procédure pacifique de règlement des conflits collectifs de travail. Il arrive souvent que les conflits ne soient pas réglés à l'amiable, et on recourt généralement à des solutions non pacifiques, telles que la grève (cessation collective et concertée du travail par le personnel de l'entreprise)100 et le lock-out (mesure de fermeture temporaire de l'entreprise décidée par l'employeur à l'occasion d'un conflit collectif de travail)101.

§3 CONTRAT EN COURS

La notion de contrat en cours, même si elle implique une certaine référence aux effets du contrat, n'a pas fait l'objet d'une définition explicite de la part du législateur. Même dans les matières où il y est expressément fait référence, elle n'est pas définie. Par exemple, l'article 80 du Code du Travail se contente de faire uniquement référence au « contrat de travail en cours » sans en donner ni les conditions, ni une signification détaillée.

On sait, malgré tout, conformément au droit commun et comme le révèle à juste titre un auteur102, que la condition qu'un contrat soit en cours exige la réunion de deux critères cumulatifs. Le contrat doit, d'abord, être en cours d'existence (A), puis, en cours d'exécution (B).

100 Article 315, Code du travail.

101 CAMERLYNCK G.H et LYON-CAEN G., op.cit, p. 684.

102 JOUFFIN V.E., Le sort des contrats en cours dans les entreprises soumises à une procédure collective, LGDJ, Paris, 1998, p. 137.

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A. Un contrat en cours d'existence

La question de la détermination de ce qu'est un contrat en cours d'existence est d'une importance capitale au regard de la place et du rôle du contrat dans le processus de la disparition d'une société. Pour être en cours d'existence, le rapport contractuel doit réunir deux caractéristiques. Il doit d'abord exister et ce, antérieurement à l'opération de disparition concernée (Dissolution, liquidation ou procédure collective de liquidation des biens). Le contrat doit, en outre, n'avoir pas pris fin à la date de la réalisation définitive de l'opération.

Le contrat en cours d'existence, c'est donc le contrat en vigueur au jour de l'opération menant à la disparition de la société (l'employeur), dès lors qu'il réunit tous les critères nécessaires à sa validité. Lorsqu'un contrat est frappé d'une résiliation, résolution ou annulation, et ce, avant que la société n'entre dans la procédure tendant à sa disparition, il est évident qu'il n'est plus en cours. Il en est de même dans l'hypothèse où un contrat à durée indéterminée fait l'objet d'une dénonciation régulière.

B. Un contrat en cours d'exécution

De façon générale, on peut entendre par contrat en cours d'exécution, le contrat dont l'exécution n'est pas achevée103à la date de la décision soit de dissolution, soit liquidation, soit encore de la procédure collective de liquidation des biens.

Il se pose dès lors la question de savoir si un contrat en suspension104 au jour de l'ouverture de l'opération menant à la disparition de la société peut être considéré comme étant en cours d'exécution.

Il faut dire, en effet, qu'on confond souvent, en pratique, le contrat suspendu et le contrat éteint. Le contrat est éteint lorsqu'il a définitivement cessé de produire ses effets. C'est un contrat qui n'existe plus. Or, il n'en est rien de tout ceci lorsqu'il s'agit du contrat suspendu. Ce dernier constitue un rapport de droit non encore dissout. Un tel événement est, en général, la résultante d'une impossibilité d'exécution provisoire, c'est-à-dire en quelque sorte d'une perturbation momentanée affectant la relation contractuelle.105

De toute évidence, un contrat suspendu, étant différent d'un contrat éteint, doit être considéré comme en cours d'exécution. Il faut établir que

103 ALBORTCHIRE A., Le sort des contrats dans les opérations de fusion et de scission de sociétés commerciales, Thèse, Université d'Auvergne - Clermont-Ferrand I, 2005, p. 111.

104 Un contrat suspendu est celui dont l'exécution des prestations est provisoirement mise en veille. Le lexique des termes juridiques définit la suspension comme une interruption momentanée des effets du contrat sans qu'il y ait rupture. Par exemple la grève, la maladie, la maternité et les congés suspendent le contrat de travail (Lexique des termes juridiques, 13ème éd., Dalloz, 2001, p. 531).

105 ALBORTCHIRE A., op.cit, p. 114.

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lorsque disparaitront les causes de sa suspension, ses effets réapparaitront. Ce qui impliquera réapparition des obligations des parties.

Il sied de noter en définitive que tout contrat de travail, dès lors qu'il comporte encore quelques obligations, doit être appréhendé comme étant en cours. L'essentiel est que son objet ne soit pas totalement réalisé ou que son terme ne soit pas arrivé. Le fait qu'une seule des parties (employeur ou travailleur) demeure tenue de certaines obligations suffit à considérer que ledit contrat reste en cours d'exécution.

CHAPITRE DEUXIEME

IMPACT DE LA DISPARITION DE LA SOCIETE SUR
L'ACTIVITE CONTRACTUELLE

La vie d'une société sous-entend toujours des personnes employées pour faciliter la marche et l'accomplissement des objectifs de cette société. Ces personnes sont employées sous un contrat de travail. Aussi, il est plus ou moins fréquent que l'on assiste à des conflits naissant de ce contrat, suite à des oppositions d'intérêts et des points de vue rencontrées dans la vie sociale ou professionnelle, ainsi qu'à l'inégalité observée dans les relations entre les deux parties au contrat (travailleur et employeur).

Les causes de ces conflits peuvent être par exemple la réclamation des arriérés de salaire, la réclamation du décompte final en cas de résiliation, de cessation ou d'expiration du contrat de travail, les contestations naissant du licenciement, la démission du travailleur, la réclamation des indemnités de fin de contrat avant l'échéance convenue, etc.

En effet, l'activité contractuelle peut être menacée ou plutôt confrontée à certains problèmes parmi lesquels la disparition de la société qui nous préoccupe ici. Cette disparition ne survient pas d'un coup mais c'est tout un processus. Les étapes de cette disparition peuvent être la dissolution, la liquidation ou encore la procédure collective de liquidation des biens si elle a été prononcée. Le souci majeur de ce chapitre est de déterminer le sort du contrat de travail lorsque la société débute le processus de sa disparition. Aussi sera-t-il question de savoir comment les conflits de travail, tournant surtout sur la réclamation des créances des salaires, seront résolus.

C'est pourquoi les lignes qui suivent s'efforceront de situer le sort des travailleurs ainsi que celui de l'activité contractuelle en général, d'abord dans la phase de dissolution de la société (section 1), ensuite dans la phase de liquidation de celle-ci (section 2) et enfin dans la procédure collective de

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liquidation des biens, si ce cas particulier a été prononcé comme cause de disparition de la société (section3).

SECTION 1 LA DISSOLUTION DE LA SOCIETE

Pour qu'une société disparaisse, il faut tout à la fois que l'acte juridique créateur du groupement cesse de produire ses effets et que le groupement lui-même cesse d'exister sur la scène juridique : à la résiliation du contrat vient s'ajouter la dissolution de la personne morale société.106 Cependant, aux termes de l'article 201 de l'AUSCGIE, la personnalité morale de la société subsiste lors de la dissolution pour les besoins de la liquidation et jusqu'à la clôture de celle-ci.

Pour mieux comprendre l'impact que peut avoir la dissolution de la société sur les contrats et les conflits de travail en cours, il est nécessaire de saisir au préalable la notion même de dissolution y compris ses causes (§1) avant de parler des effets de cette dernière sur la société elle-même ainsi que sur les travailleurs (§2).

§1 NOTION DE DISSOLUTION

A. Définition

L'acte uniforme ne définit pas expressément la dissolution, mais limite à en donner les causes. C'est pourquoi le recours à la doctrine s'avère très nécessaire pour permettre une claire compréhension.

D'après Alioune DIEYE, la dissolution est l'acte qui constate ou prononce la disparition de l'être social et qui entraîne la liquidation du patrimoine de la société.107

Quant à Joseph ISSA-SAYEGH, la dissolution est le dénouement du lien juridique qui unissait les associés.108

D'une manière générale, toute la doctrine en la matière s'accorde à donner à la dissolution le sens d'une décision des associés ou de la justice qui prononce ou constate la fin de la société et ordonne la liquidation de celle-ci.

Lorsque les associés conviennent de mettre fin à l'activité de la société de leur plein gré, on parle de la dissolution volontaire. Mais lorsque la décision de dissolution est prononcée par le juge, soit à la demande d'un associé, de tout autre intéressé ; soit d'office, on parle de la dissolution judiciaire.

106 PETIT B., op.cit, p. 39.

107 DIEYE A., Le régime juridique des sociétés commerciales et du GTE dans l'espace OHADA, 4ème édition, Cabinet AZIZ DIEYE, 2014, p. 108.

108ISSA-SAYEGH J., « Présentation des dispositions sur la dissolution et la liquidation des sociétés commerciales », Ohada.com, Ohadata D-06-15, p. 2.

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Plusieurs raisons peuvent justifier la dissolution entraînant en principe la disparition de la personne morale de la société.

B. Causes

Il existe des causes de dissolution communes à toutes les sociétés ainsi que celles particulières à chaque forme de société.

I. Causes communes

L'article 200 AUSCGIE énumère sept causes générales de dissolution applicables à toutes les sociétés. Il s'agit de :

- L'expiration de la durée ;

- La réalisation ou l'extinction de l'objet ;

- L'annulation du contrat de société ;

- La décision des associés aux conditions prévues pour modifier les

statuts ;

- La dissolution anticipée prononcée par la juridiction compétente, à la

demande d'un associé pour justes motifs, notamment en cas

d'inexécution de ses obligations par un associé ou de mésentente entre

associés empêchant le fonctionnement normal de la société ;

- L'effet d'un jugement prononçant la liquidation des biens de la société ;

- Toute autre cause prévue par les statuts.

Il faut noter que certaines de ces causes sont de plein droit (1°et 2°) ; d'autres sont volontaires (4°et 7°) ; et d'autres encore sont forcées ou accidentelles (3°,5° et 6°).

1°) L'expiration de la durée

La société a toujours été constituée pour une durée, et en droit OHADA, la durée maximale est de 99 ans.109 Il va donc de soi que lorsque la société est constituée pour une durée moindre (5 ans par exemple), elle puisse prendre fin à l'expiration de ce délai.

Aux termes de l'article 200-1° de l'AUSCGIE, la société prend fin « par l'expiration du temps pour lequel elle a été constituée », c'est-à-dire lorsqu'elle arrive au terme de sa durée statutaire. L'arrivée du terme constitue donc une cause de plein droit de la société ; c'est ce qui ressort de l'article 30 de l'AUSCGIE. Il s'agit, à en croire Bruno PETIT, d'une dissolution automatique et irrémédiable qui peut se révéler des plus inopportunes.110 C'est pourquoi il est possible, sinon de revenir en arrière, du moins de prévenir l'événement en décidant à l'avance d'une augmentation de la durée de la société. Cette

109 Art. 28 AUSCGIE. 110PETIT B., op.cit., p. 40.

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augmentation ne peut résulter que d'une décision expresse (et en principe unanime) des associés, appelée « prorogation ».

En effet, un an au moins avant la date d'expiration de la société, les associés doivent être consultés à l'effet de décider si la société doit être prorogée.111 Cette consultation est faite à l'initiative des dirigeants qui encourent une responsabilité s'ils omettent de le faire et causent ainsi un préjudice.112 A défaut de consultation par les dirigeants, tout associé peut obtenir en justice la désignation d'un mandataire chargé de provoquer cette consultation.113

Si les associés n'ont pas augmenté la durée de vie de la société, au moins un an avant l'arrivée du terme, par une décision prise à l'unanimité, celle-ci sera dissoute de plein droit.114Cependant, si la société continue quand même de fonctionner alors qu'elle devrait être fermée, elle sera considérée comme une « société de fait » et ne sera plus dotée de la personnalité juridique. Seuls les statuts continueront à s'appliquer entre les associés, comme un contrat ordinaire.

Le caractère irréversible de la dissolution conséquente à l'expiration de la durée peut avoir de graves conséquences, juridiques et fiscales, et il est donc important de prendre suffisamment tôt les dispositions nécessaires lorsqu'il y a lieu de poursuivre l'existence de la société au-delà de son terme prévu, en décidant sa prorogation.

Cette prorogation ne peut intervenir qu'avant que la dissolution ne soit consommée, c'est-à-dire au plus tard, la veille du jour de l'expiration de la durée.115Au-delà, il serait nécessaire de procéder à la création d'une nouvelle société appelée à poursuivre les activités de la précédente.

L'article 32 AUSCGIE dispose que la société peut être prorogée une ou plusieurs fois. Cela signifie en d'autres termes qu'il est possible que la durée d'une société soit successivement augmentée (par périodes maximum de 99 ans), sans limitation particulière. En principe, une décision de prorogation peut intervenir à tout moment, alors même que la durée en cours serait éloignée de son terme.116Toutefois, et bien que l'Acte uniforme ne le précise pas explicitement, la décision de prorogation ne devrait intervenir qu'à l'approche de la date prévue pour l'expiration de la durée de la société. On n' aperçoit pas, a priori, l'intérêt qu'il y aurait à prendre une telle décision prématurément.

La prorogation implique donc, aux termes de l'article 33 AUSCGIE, une modification ou un complément à apporte à l'article des statuts relatif à la durée. En conséquence, cette décision requiert le respect des conditions

111 Art. 35 AUSCGIE.

112 OHADA, Traité et actes, op.cit., p. 399.

113 Art. 36 AUSCGIE.

114 Art. 30 AUSCGIE.

115 OHADA, Doit des sociétés commerciales et du GIE, commentaires, Edicef, Paris, 1998, p. 10.

116 Idem, p. 11.

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prévues pour les décisions extraordinaires, et la décision spécifique à la modification des statuts requiert la forme authentique (acte notarié ou acte sous-seing privé déposé au rang des minutes d'un notaire117).

En pratique, l'article des statuts relatifs à la durée devrait, après modification, laisser subsister l'indication de la durée initiale et comporter celle de la date et de la durée de la prorogation, de façon à bien la distinguer d'une simple modification de la durée.

2°) La réalisation ou l'extinction de l'objet social

Ces deux hypothèses ne sont pas identiques. Il y a réalisation de l'objet social lorsque la ou les opérations pour lesquelles la société s'est constituée sont définitivement achevées.118 La réalisation de l'objet est un événement heureux, puisque la société a atteint l'objectif qui lui avait été fixé : le chantier est achevé, l'immeuble est construit, le marché est exécuté, etc. La réalisation de l'objet est donc la situation dans laquelle les statuts ont été rédigés de façon à ce que l'activité pour laquelle a été constituée la société puisse être terminée : c'est ce qu'on appelle une société de mission.

Il sied de noter que cette réalisation ne joue qu'exceptionnellement car elle suppose que les associés n'ont entendu se lier que pour la réalisation d'un programme précis et limité dans le temps.

Quant à l'extinction de l'objet, c'est au contraire un événement malheureux puisque la société est empêchée de poursuivre son activité.119Cette dernière est devenue impossible matériellement ou juridiquement. L'objet est éteint lorsqu'il ne peut plus être atteint pour des raisons extérieures à la volonté des associés. En d'autres termes, l'extinction de l'objet social est le cas où la raison d'être de la société prend fin. Par exemple, l'annulation du brevet pour lequel la société était constituée, le retrait d'une autorisation administrative d'exploiter une mine, l'activité est frappée d'interdiction, une société constituée pour gérer un immeuble qui disparaît dans un sinistre, l'objet d'une société devient illicite, etc.

La situation est par conséquent différente en cas de simple cessation d'activité non motivée par la disparition de l'objet : la société n'est pas ipso facto dissoute ; elle devient une société en sommeil ou « société coquille » prête à reprendre du service en cas de nécessité. En d'autres termes, une cessation temporaire d'activité suppose une reprise possible si les circonstances changent ; elle s'accompagne habituellement d'une décision collective de « mise en sommeil ».120La pratique révèle de nombreuses sociétés qui sont des coquilles vides n'ayant aucune activité mais prêtes à reprendre une activité nouvelle, et

117 Idem.

118 ISSA-SAYEGH J., dissolution et liquidation, op.cit., p. 1.

119 PETIT B, op.cit., p. 40.

120 OHADA, Droit des sociétés, op.cit., p. 61.

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dans certains pays, notamment les paradis fiscaux, il y a un véritable marché de coquilles vides.121

De ce qui précède, il faut noter que les deux hypothèses susmentionnées sont cependant très proches. Dans les deux cas, la poursuite de l'objet statutaire devient impossible et la société n'a donc plus de raison d'exister. Une telle situation, en fait, suppose que l'objet de la société ait été précisément et étroitement défini dans ses statuts, ce qui est très inhabituel. Dans les deux cas également, il s'agit d'une dissolution automatique et irrémédiable qui peut se révéler aussi inopportune. Il est néanmoins possible, comme dans l'hypothèse de la durée, de prévenir la dissolution en procédant à la modification appropriée des statuts.

Objectivement enfin, la société qui n'a plus d'objet devrait pouvoir être dissoute de plein droit mais encore faudrait-il que la cessation d'activité revête un caractère définitif. Il est cependant vrai que le fait que l'objet social soit souvent bien défini de manière très large fait qu'il est rare de voir dans la pratique des sociétés dont l'objet social aurait complètement disparu. En d'autres termes, les statuts définissent généralement l'objet social de façon suffisamment étendue pour que la société ait toujours une possibilité d'activité.

3°) L'annulation du contrat de société

De toute évidence, l'efficacité d'une législation est assurée par les sanctions. Il arrive de fois dans l'AUSCGIE que le législateur précise que la violation d'une disposition est sanctionnée par la nullité. En général, les nullités des sociétés sont envisagées sous deux angles : celles consécutives aux irrégularités de constitution et celles relatives aux délibérations des sociétés. La nullité de la société ainsi que celle des actes sociaux sont soumises à un même régime juridique.

Les cas de nullité sont très limités. Les principes sont clairement posés par les articles 242 al. 1, 244 et 245 AUSCGIE. En effet, la nullité d'une société ou de tous actes, décisions ou délibérations modifiant les statuts ne peut résulter que d'une disposition expresse de l'Acte uniforme. La nullité de la société (SARL et SA) pour vice de consentement ou incapacité d'un associé ne peut être prononcée à moins que cette cause de nullité atteigne tous les associés fondateurs.122 La nullité de tous actes, décisions ou délibérations ne modifiant pas les statuts de la société ne peut résulter que d'une disposition impérative de l'Acte uniforme.123La nullité peut toutefois résulter aussi bien des dispositions régissant les contrats en général que celles qui intéressent le contrat de société en particulier.

121DIEYE A, op.cit, p. 108. 122Art. 243 AUSCGIE. 123Art. 244 AUSCGIE.

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En effet, l'article 253 AUSCGIE dispose que « lorsque la nullité de la société est prononcée, elle met fin, sans rétroactivité, à l'exécution du contrat. Il est procédé à sa dissolution et, pour ce qui concerne les sociétés pluripersonnelles, à leur liquidation ».

L'application de cette mesure suppose que la société ait été constituée en vue de commettre les faits incriminés ou qu'elle ait été détournée de son objet à cette fin.124Le contrat de société peut être annulé pour non respect des conditions de fond ou de formation d'un contrat (sauf l'hypothèse de l'article 243), pour l'émission des titres sociaux négociables par des sociétés autres qu'une SA125, pour une fusion, scission ou apport partiel d'actif constitué sans déclaration de conformité126, pour le non respect des formalités de publicité dans les SCS et les SNC127 , etc.

La non rétroactivité de l'annulation de la société est fondée de la théorie de la société de fait. Celle-ci est une exception remarquable au droit commun des nullités. Pour le passé, la société a fonctionné comme une société de fait et les actes qu'elle a conclus ne sauraient être remis en cause. Dès lors, la nullité ne vaut que pour l'avenir ; elle ne produit que les effets d'une dissolution.128

Les tiers qui ont cru à l'apparence de la société peuvent demander l'exécution des engagements pris par les dirigeants, et il est clairement précisé que « ni la société, ni les associés ne peuvent se prévaloir d'une nullité à l'égard des tiers de bonne foi ».129Les tiers de bonne foi sont ceux qui ont cru à l'apparence de la régularité de la société.130Il faut noter en outre que les associés dont le comportement est à l'origine de l'annulation engagent leur responsabilité civile.131

Il n'en reste pas moins vrai que quand la nullité est encourue, l'Acte uniforme met à l'action un certain nombre d'obstacle : la prescription de l'action très courte (3 ans conformément à l'article 251), et surtout la préférence pour la régularisation (l'article 60 en cas de réunion des parts en une seule main, les articles 246 et suivants qui traitent de l'obstacle à la régularisation en général).

Enfin, les conséquences de la nullité sont très atténuées, la théorie de la société de fait étant consacrée par la loi.

124 PETIT B., op.cit, p. 41.

125 Art. 58 AUSCGIE.

126 Art. 198 AUSCGIE.

127 Art. 245 AUSCGIE.

128 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 462. 129Art. 255 AUSCGIE.

130 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 462.

131 Art. 256 AUSCGIE.

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4°) La décision des associés aux conditions prévues pour modifier les statuts

A tout moment de la vie de la société, les associés peuvent décider à l'amiable de mettre un terme à la société en votant en Assemblée Générale, sa dissolution anticipée. Cette dissolution conventionnelle est prise à la majorité qualifiée et dans les conditions prévues pour la modification des statuts. Cette décision des de modification est prise pour quelque cause que ce soit, même si elle n'est prévue ni par la loi, ni par les statuts. Elle est aussi prise quel que soit le moment, même avant le terme s'il s'agit d'une société à durée déterminée.'32

Il y a lieu de noter que pour une SNC, il faut l'unanimité, pour une SARL les associés représentant 3/4 du capital social, et pour une SA les actionnaires représentant 2/3 du capital social.'33

En outre, il va sans dire que la décision de dissolution peut être prise à titre principal ou à titre incident (acceptation d'une fusion ou d'une scission, transformation de la société en une forme telle que la personnalité morale ne peut être maintenue, etc.).

5°) La dissolution judiciaire pour justes motifs

L'article 200, 5° autorise tout associé à demander en justice la dissolution « pour justes motifs, notamment en cas d'inexécution de ses obligations par un associé ou de mésentente entre les associés empêchant le fonctionnement normal de la société ». Cette dissolution repose en effet la double constatation de la disparition de l'affectio societatis et de l'inaptitude de la société à remplir sa fonction économique d'organisation d'entreprise.

En d'autres termes, la dissolution judiciaire d'une société nécessite la réunion de deux conditions cumulatives : une mésentente grave entre les associés et une paralysie du fonctionnement de la société.'34

Les justes motifs mentionnés par le texte sont présentés comme des exemples et la liste n'est donc pas limitative. Le texte peut également renvoyer à d'autres circonstances déduites de l'emploi du terme « notamment ». Il reviendra alors au juge d'apprécier la demande de l'associé en fonction de l'intérêt social pour en déduire le juste motif. Cependant en pratique, la demande est le plus souvent fondée sur la mésentente entre associés. Celle-ci doit, pour conduire à la dissolution, être suffisamment grave pour rendre

132 ISSA-SAYEGH J., Dissolution et liquidation, op.cit, p. 2.

133 DIEYE A., op.cit, p. 109.

134 « (...) Attendu que pour prononcer la dissolution anticipée de la société, l'arrêt relève qu'il existe entre M. Nicolas Y. et Mme X une très grave mésintelligence ; qu'il relève encore que le comportement fautif de la gérante, qui a agi dans son intérêt propre et dans celui de son époux en profitant de la majorité des voix que représentaient leurs parts respectives, ne permet pas de poursuivre l'exploitation sociale ; attendu qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la paralysie du fonctionnement de la société, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. »( Cass. Comm, 19 mars 2013, Pourvoi n° 12-15.283 ; OHADA, Code bleu, 3ème édition, Juriafrica, 2014, p.199).

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impossible la poursuite de la collaboration. Elle doit surtout, comme dit ci-haut, entraîner la paralysie du fonctionnement de la société.'35

Sans nul doute, l'action en dissolution est attribuée par le texte aux seuls associés. Cette qualité est donc nécessaire et suffisante : elle doit, en principe, être refusée notamment aux créanciers et aux salariés de la société. La jurisprudence considère qu'il s'agit d'une action d'ordre public à laquelle les associés ne sauraient renoncer par avance, par une clause des statuts notamment.'36

La demande de l'associé doit être de bonne foi ; et un associé ou actionnaire ne peut se prévaloir de la cause de dissolution qu'il a lui-même créée. Dans certains cas les tribunaux n'hésitent pas à condamner le demandeur de mauvaise foi et en sus à lui demander de payer les dommages-intérêts.'37

L'inexécution par un associé de ses obligations peut s'illustrer à titre exemplatif par le défaut pour un associé de réaliser l'apport promis si celui-ci est important pour la vie de la société.

En effet, l'associé mécontent qui souhaite obtenir la dissolution d'une société commerciale doit rapporter la preuve de la mésentente entre associés empêchant le fonctionnement normal de ladite société.'38Aussi, celui qui entend solliciter la dissolution anticipée de la société ne doit pas avoir provoqué la mésentente sur laquelle il s'appuie pour la demander.'39

Il se pose dès lors une question, vu ce qui précède : est-il possible d'exclure l'associé à l'origine de la mésentente P

Il y a, à en croire Alioune DIEYE, une profonde controverse sur l'existence d'un fondement légal à l'exclusion d'un associé contestataire. L'associé a en principe un droit intangible de faire partie de la société. Pourtant le courant majoritaire estime aujourd'hui que lorsque les fondateurs ont prévu une clause prévoyant l'exclusion, l'associé pourra être exclu, mais si et seulement si les causes d'exclusion sont retenues.'40

C'est ainsi que, dans le cas d'espèce, un associé, monsieur BOKOUM a, suite aux nombreuses difficultés rencontrées avec son associé principal,

135 DIEYE A., op.cit, p. 109; OHADA, Droit des sociétés, op.cit, p. 61.

136 PETIT B., op.cit, p. 41.

137 DIEYE A., op.cit, p. 110.

138 (...) L'associé mécontent ne rapporte pas la preuve d'une mésentente entre associés empêchant le fonctionnement normal de la société ; qu'il s'ensuit qu'en faisant droit à la demande de dissolution, sans déterminer en quoi les allégations du requérant sont fondées, la Cour d'appel de Kayes a insuffisamment motivé sa décision et privé celle-ci de base légale. » (CCJA, Arrêt n° 039/2008 du 17 juillet 2008, Aff. Abdoulaye BALDE et autres c/ Boubacar Alphodio BAH, Juridata n° J039-07/2008 ; OHADA, Code bleu, op.cit, p. 198).

139 Cour d'appel d'Abidjan, Arrêt n° 1048 du 20 juillet 2001 ; Société S.I Flor Tropiques c/ M. Jean Luc DELAURNEY, Ohada.com/Ohadata J-04-103.

140 DIEYE A., op.cit, p. 110.

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informé ses coactionnaires de son intention ferme et définitive de mettre fin à la société anonyme qu'ils ont créée. Il intente alors une action en dissolution et en liquidation des biens de ladite société, en saisissant le TGI de Bobo-Dioulasso (Burkina Faso) le 23 février 2007, et la décision prononçant la dissolution et la liquidation a été rendue en sa faveur le 06 juin 2007. Les autres actionnaires en Assemblée Générale convoquée le 19 mars 2007, ont déchu monsieur BOKOUM de sa qualité d'associé, l'accusant d'être à l'origine de la mésentente, surtout que ce dernier n'avait pas été associé à ladite assemblée, et ont décidé de lui restituer la valeur nominale de ses actions sans son consentement.

Ses coactionnaires défendeurs avaient également soulevé les exceptions de nullité de l'acte d'assignation et la fin de non recevoir tirée, selon eux, du défaut de qualité de monsieur BOKOUM avant la décision, lesquelles exceptions on été rejetées par le tribunal.

Contre ce jugement, les défendeurs interjetaient appel. La cour d'appel de Bobo-Dioulasso a confirmé le jugement du premier degré en motivant qu'à la date du 23 février 2007, monsieur BOKOUM était toujours associé et que l'AGE141, fut-elle régulièrement convoquée le 19 mars 2007, ne peut pas rétroactivement le déchoir de sa qualité d'associé.142

6°) Dissolution par l'effet d'un jugement ordonnant la liquidation des biens

La liquidation des biens prévue par l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif (AUPC) constitue une cause de dissolution de la société commerciale.

En effet, les procédures collectives sont des procédures judiciaires ouvertes lorsque le commerçant personne physique ou personne morale de droit privé est en état de cessation des paiements ou connaît des sérieuses difficultés financières, dans la but d'assurer le paiement des créanciers et, dans la mesure du possible, le sauvetage de l'entreprise ou la société et, par voie de conséquence, de l'activité et des emplois.143

Ces procédures sont au nombre de trois, notamment le règlement préventif, le redressement judiciaire et la liquidation des biens. Les deux premières ne visent pas la dissolution de la société mais constituent plutôt, d'une part, à éviter ou prévenir la cessation des paiements (règlement préventif) et d'autre part, à sauvegarder la société dans la mesure du possible malgré la cessation des paiements, tout en assurant un traitement par sauvetage (redressement judiciaire). C'est pourquoi seule la liquidation des biens est retenue ici comme cause de dissolution car entraînant la disparition pure et simple de la société.

141 Assemblée Générale extraordinaire.

142 Cour d'appel de Bobo-Dioulasso, Chambre commerciale, Arrêt n° 10/09 du 10 juin 2009 ; UTB, SAWADOGO KOMYABA et autres c/ BOKOUM SAMBA Amadou ; Ohada.com/Ohadata J-10-117.

143 SAWADOGO F.M, Commentaires de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, Juriscope, 2012, p. 1127.

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Dès qu'une société est en cessation des paiements, il n'est plus à démontrer que l'affectio societatis de certains associés fait défaut pour faire prononcer la dissolution.'44

Etant donné l'importance de la procédure collective de liquidation des biens dans la présente étude, nous avons prévu d'analyser en long et en large cette matière dans la troisième section de ce chapitre.

7°) Toute autre cause prévue par les statuts

Les associés peuvent prévoir dans les statuts d'autres causes de dissolution. Ceci leur permet d'envisager contractuellement des cause de dissolution non prévues par la loi ou de rendre plus sévères celles qui existent. Par exemple la possibilité de demander la dissolution au bout d'un délai inférieur à celui de la durée de la société, le décès d'un associé, la modification de la situation juridique d'un associé, trois exercices consécutifs déficitaires ou la baisse continue du résultat, le changement de nationalité, etc.

De tout ce qui précède, il sied de noter que cette liste des causes n'est pas exhaustive.'45 Certaines autres causes peuvent être retenues : accumulation des pertes sans espoir de retour à meilleur fortune, impossibilité de trouver de nouveaux dirigeants, variation des capitaux propres, etc. Il a même été jugé que l'abandon par le gérant d'une SARL de ses fonctions statutaires constitue un manquement à ses obligations d'associé, lequel justifie la dissolution de la société.'46

Les causes communes de dissolution des sociétés sont relativement classiques. Il faut également noter que la réunion de toutes les parts ou actions en une seule main n'est plus une cause de dissolution de plein droit de la société. La société d'un seul associé ayant été consacrée dans certaines hypothèses,'47cette cause n'est plus valable que pour les SNC et les SCS qui deviendraient a posteriori unipersonnelles. Il faudrait alors dans ce cas parler de réunion de toutes les parts en une seule main. Dans ce cas, la dissolution ne peut intervenir que par décision de justice lorsque la situation n'a pas été régularisée dans le délai d'un an, ou 18 mois si le tribunal a accordé un délai supplémentaire pour la régularisation.'48

144 Tribunal de première instance de Niamey, Jugement civil n° 027 du 20 janvier 1999 ; MOUTARI MACAM SOULEY c/ SEEF Niger ; Ohada.com/ Ohadata J-04-74.

145 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 450.

146 TPI Abidjan, Jugement n° 80 du 12 avril 2001, NIAYE AIME DESSEROUIN FERNANDE c/ Nicole GOMES épouse Lemaître ; Ecodroit, n° 10, avril 2002, p. 79 (Ohada.com/ Ohadata J-02- 96.)

147 Art. 309 AUSCGIE pour la SARL, Art. 385 AUSCGIE pour la SA.

148 Art. 60 AUSCGIE.

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II. Causes particulières

Les dispositions générales consacrant les causes de dissolution de la société doivent être complétées par les dispositions particulières propres à chaque type de société.

1°) Fin de la Société en Nom Collectif

Dans la SNC, l'intuitu personae est tel que l'existence même de la société est nécessairement remise en cause par la disparition de la confiance entre associés. Aussi, le décès d'un associé entraîne de plein droit la dissolution de la société sauf à faire figurer dans les statuts une clause de continuation faisant échec à la dissolution.149

La SNC est également dissoute lorsque l'un de ses associés est, en raison de son insolvabilité, de son incompétence, de sa malhonnêteté ou de son incapacité, frappé d'une inaptitude constatée ou prononcée par décision de justice.150

En effet, la SNC subit l'influence des événements qui atteignent personnellement ses associés. Ceci est une des manifestations de l'intuitu personae de ce type de société. En ce sens tout changement dans la condition juridique de l'associé doit être considéré : le décès, un jugement de liquidation des biens ou de faillite frappant un associé, l'incapacité ou l'interdiction qui l'atteindrait. Il faut y ajouter la révocation du gérant statutaire associé.151

Pour éviter de telles causes de dissolution dues à un seul associé, deux solutions sont envisageables : soit les autres associés décident dès la survenance de l'événement de continuer la société, soit ils insèrent dans les statuts une clause appropriée à cet effet.152

Lorsque la société se poursuit notamment avec les héritiers du défunt associé, un problème particulier se pose dans le cas où un ou plusieurs héritiers seraient mineurs non émancipés et incapables d'exercer le commerce. L'article 290 al. 2 et 3 préconise une solution satisfaisante dans la mesure où elle aboutit

149Art. 290 AUSCGIE : « La SNC prend fin par le décès d'un associé. Toutefois, les statuts peuvent prévoir que la société continuera soit entre les associés survivants, soit entre les associés survivants et les héritiers ou successeurs de l'associé décédé avec ou sans l'agrément des associés.

S'il est prévu que la société continuera avec les seuls associés survivants, ou si ces derniers n'agréent que certains d'entre eux, les associés survivants doivent racheter aux héritiers ou successeurs de l'associé décédé ou à ceux qui n'ont pas été agréés, leurs parts sociales.

En cas de continuation et si l'un ou plusieurs des héritiers ou successeurs de l'associé décédé sont mineurs non émancipés, ceux-ci ne répondent des dettes sociales qu'à concurrence des parts de la succession de leur auteur.

En outre, la société doit être transformée dans le délai d'un an, à compter du décès, en société en commandite dont le mineur devient commanditaire. A défaut, elle est dissoute ».

150 Art. 291 AUSCGIE.

151 Art. 279 AUSCGIE

152 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 475.

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à la limitation de la responsabilité de ce dernier. Celui-ci ne répond alors des dettes sociales qu'à concurrence des parts de la succession de son auteur.

2°) Fin de la Société en Commandite Simple

Aux termes de l'article 308 AUSCGIE, la société continue malgré le décès d'un associé commanditaire. S'il est stipulé que malgré le décès de l'un des associés commandités, la société continue avec ses héritiers, ceux-ci deviennent associés commanditaires lorsqu'ils sont mineurs non émancipés.

Si l'associé décédé était seul associé commandité et si ses héritiers sont alors mineurs non émancipés, il doit être procédé à son remplacement par un nouvel associé commandité ou à la transformation de la société dans un délai d'un an à compter du décès.

Il se pose cependant une question sur la nouvelle forme de société à choisir en cas de transformation. Il n'en reste pas moins vrai que la forme de la SNC doit être déjà et catégoriquement exclue car l'héritier, qui est ici mineur non émancipé ne peut être commerçant. Il ne pourra par conséquent pas faire partie d'une telle société. Mais le choix des autres formes de société reste envisageable (SARL ou SA)153

3°) Fin de la Société à Responsabilité Limitée La SARL prend fin :

- En cas de réduction du capital en dessous du minimum légal154;

- Sur décision des actionnaires, en cas de perte de la moitié du capital social.155

Dès que cette situation se présente, l'article 371 fait obligation au gérant ou au commissaire aux comptes de consulter, dans les quatre mois qui suivent l'approbation des comptes ayant fait apparaître cette perte, les associés sur l'opportunité de prononcer la dissolution anticipée de la société.

Il est à noter que lorsque les capitaux propres dépassent le montant du capital social, c'est un signe de prospérité ; l'excédent provient alors de la mise en réserve des bénéfices antérieurs. Par contre, si la société se retrouve entrain de « manger » son capital, il y a manifestement des difficultés financières.156

La solution consiste à consulter les associés sur l'opportunité de dissoudre la société ou de la continuer. Dans ce dernier cas, il y a obligation de reconstituer les capitaux propres ou de réduire le capital social.157Les dirigeants

153 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 480.

154 Art. 368 et 369 AUSCGIE.

155 Art. 371 AUSCGIE.

156 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 504

157 Art. 372 AUSCGIE.

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sociaux qui omettent de convoquer l'AGE pour ladite consultation encourent des sanctions pénales.158

Il sied de noter que l'interdiction d'un associé, sa faillite ou son incapacité, et même le décès d'un associé, ne peuvent causer la dissolution de la SARL.159Donc malgré `intuitu personae de la société, les événements qui atteignent personnellement les associés n'entrainent pas, en principe, la fin de la société.

40) Fin de la Société Anonyme

La SA prend fin sur décision des actionnaires en cas de perte de la moitié du capital. Dans ce cas, les administrateurs sont tenus de convoquer une AGE statuant sur la dissolution éventuelle de la société dans les quatre mois suivant le moment où la perte a été ou aurait dû être constatée.160

Si cette mesure n'est pas prise, tout intéressé peut demander en justice la dissolution de la société.161Aux termes de l'article 668 AUSCGIE, la juridiction compétente saisie d'une demande de dissolution peut accorder à la société un délai maximale de six mois pour régulariser la situation. Elle ne peut prononcer la dissolution si, au jour où elle statue sur le fond, cette régularisation a eu lieu.

50) Fin de la Société par Actions Simplifiée

L'Acte uniforme n'a pas expressément énoncé les causes particulières à la dissolution de la SAS. Ceci se justifie en ce sens que le fonctionnement de la SAS est pour l'essentiel abandonné à l'imagination des rédacteurs des statuts (fondateurs) suite à une large liberté d'organisation laissée à ces derniers par le législateur.

Néanmoins, sur base de l'article 853-3 AUSCGIE, les règles concernant les sociétés anonymes (à l'exception de certains articles spécifiques) sont applicables à la SAS, dans la mesure où elles sont compatibles avec les dispositions particulières prévues dans le livre de l'AUSCGIE relatif à la SAS (Livre 4-2).

D'où, nous déduisons que la SAS devra en principe prendre fin pour la même cause particulière que la SA, sauf disposition statutaire contraire.

158 Art. 901 AUSCGIE.

159 Art. 384 AUSCGIE.

160 Art. 664 AUSCGIE.

161 Art. 667 AUSCGIE.

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§2 EFFETS DE LA DISSOLUTION

Ces effets sont à dénicher sur la société elle-même (A), sur les tiers (B), ainsi que sur les travailleurs (C).

A. Sur la société

- La dissolution met fin à l'activité officielle de la société, mais maintient sa personnalité morale pour les besoins de la liquidation ;

- La décision de dissolution de la société doit faire l'objet de différentes formalités de publicité afin qu'elle puisse être opposable aux tiers. En effet, l'article 202 AUSCGIE dispose que la dissolution est publiée par un avis dans un journal habilité à recevoir les annonces légales du lieu du siège social, par dépôt au greffe des actes ou procès verbaux décidant ou constatant la dissolution et par la modification de l'inscription au RCCM.

- La dissolution de la société pluripersonnelle entraîne de plein droit sa mise en liquidation.'62La société conserve ainsi sa dénomination sociale mais cette dernière doit être suivie de la mention « Société en liquidation ». Tous les actes et documents émanant de la société et destinés aux tiers doivent faire figurer cette mention ainsi que le nom du liquidateur.'63

- La société conserve un patrimoine propre qui demeure réservé aux créanciers sociaux. Elle peut conclure certains contrats (par exemple le renouvellement d'un bail). La dissolution de la société n'entraîne pas automatiquement la résiliation des baux des immeubles utilisés pour son activité sociale, y compris les locaux d'habitation dépendant de ces immeubles.'64

- La dissolution de la société ne met pas fin aux fonctions du commissaire aux comptes.'65

- Concernant la société unipersonnelle, la dissolution entraîne la transmission universelle du patrimoine de la société à l'associé unique, sans qu'il y ait lieu à la liquidation.'66

- Quant aux associés, ils perdent la qualité de représentants de la société dès le prononcé de la dissolution. Ils ne peuvent pas, même à l'unanimité, décider de ne pas procéder à la liquidation et au partage de la société. Faute d'avoir nommé un liquidateur, les associés sont sans qualité pour agir en recouvrement d'une créance de la société sur un tiers.'67

162 Art. 201 al. 2 AUSCGIE.

163 Art. 204 al. 2 AUSCGIE.

164 DIEYE A., op.cit, p. 113.

165 Art. 225 AUSCGIE.

166 Art. 201 al. 4 AUSCGIE.

167 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 452.

55

B. Sur les tiers

- Aux termes de l'alinéa premier de l'article 201 AUSCGIE, la dissolution n'a d'effet à l'égard des tiers qu'à compter de sa publication au RCCM.

- En cas de la dissolution d'une société unipersonnelle, les créanciers peuvent faire opposition à cette dissolution devant la juridiction compétente, dans le délai de trente jours à compter de la publication de celle-ci. Le tribunal rejette l'opposition ou ordonne soit le remboursement des créances, soit la constitution des garanties si la société en offre et si elles sont jugées suffisantes. La transmission du patrimoine n'est réalisée et il n'y a disparition de la société qu'à l'issue du délai d'opposition ou, le cas échéant, lorsque l'opposition a été rejetée ou que le remboursement des créances a été effectué ou les garanties constituées.168

C. Sur les travailleurs

Lors de l'avènement de la dissolution, il y a en principe cessation du contrat de travail par voie de conséquence. Cette cessation est faite à l'initiative de l'employeur. C'est ce qu'on appelle licenciement.

En effet, sur base de l'alinéa 1er de l'article 62 du Code du travail, cette mesure ne peut être prise par l'employeur que pour un motif valable. Ce motif peut être fondé sur les nécessités du fonctionnement de l'entreprise ou sur les raisons économiques. Il est donc clair que le cas de dissolution dont il est question ici est un motif de valable fondé sur les raisons économiques, au cas où aucune opération conséquente de restructuration n'est envisagée (fusion, scission, etc.).

De ce fait, soit l'employeur peut procéder au licenciement des travailleurs en cas de dissolution naturelle ou volontaire ou bien laisser cette tâche au liquidateur choisi pour ce faire, soit le juge peut nommer un liquidateur en cas de dissolution judiciaire.

Dès l'instant où la dissolution a été prononcée, la liquidation s'impose. Désormais, seul le liquidateur est habilité à représenter la société.169Il est également chargé de payer les créanciers. Les travailleurs, en tant que créanciers privilégiés de la société, pourront donc avoir une action sur le liquidateur pour être désintéressés et pour la résolution des conflits éventuels (réclamations).

Il sied de noter de ce qui précède qu'après la dissolution de la société, le contrat de travail devra en principe s'arrêter à cause de la quasi inexistence de la société. Cependant, certains contrats peuvent continuer sous la reconduction du liquidateur ou la proposition de l'employeur s'il est estimé nécessaire d'achever les activités de la liquidation. Cependant, la situation sera toute autre si la dissolution a été faite pour une restructuration conséquente de la société

168 Art. 201 al. 4 AUSCGIE.

169 Art. 230 AUSCGIE.

56

(fusion ou scission). Dans ce cas le contrat de travail continuera suivant la règle de la substitution d'employeur prévue par l'article 80 du code du travail.

SECTION II LA LIQUIDATION DE LA SOCIETE

On ne le dira jamais assez, la dissolution de la société pluripersonnelle entraîne de plein droit sa mise en liquidation. En d'autres termes, la liquidation de la société s'impose dès l'instant où la dissolution a été prononcée.

Il est vrai que qu'une société a normalement une grande durée de vie. Elle survit généralement aux personnes physiques qui l'ont créée. Mais la dissolution, comme vu précédemment, est le terme de l'existence sociale. Les liens qui unissent les associés (tout comme ceux qui unissent l'employeur et le travailleur) se dénouent et la personnalité morale disparaît. Par conséquent, le patrimoine social n'a plus de titulaire ; il faut alors le liquider, payer les créanciers et partager le solde entre les associés. Aussi, face à cet avènement, les salariés se posent des questions sur le sort de leurs contrats de travail en cours.

Longtemps gouvernée en grande partie par des principes jurisprudentiels en RDC, la liquidation fait désormais l'objet d'une réglementation détaillée, applicable à toutes les sociétés commerciales, laquelle réglementation est prévue par le droit OHADA.

C'est pourquoi, dans les lignes qui suivent, nous allons saisir la notion même de liquidation (§1), fixer le rôle du liquidateur dans cette étape (§2), et enfin démontrer les effets de la liquidation à l'égard de la société ainsi qu'à l'égard des travailleurs (§3).

§1 NOTION DE LIQUIDATION

La liquidation s'entend de l'ensemble des opérations, postérieures à la dissolution, dont l'objet est de procéder au règlement du passif social et à la réalisation de l'actif social, en vue de déterminer la part revenant aux associés dans le reliquat éventuel.170 Elle est la suite logique et inéluctable de la dissolution, qui doit être distinguée de la liquidation faisant suite à la cessation des paiements de la société.171

Liquider une société consiste donc à la conduire de sa dissolution à sa fin absolue, en réalisant l'actif social, c'est-à-dire en transformant en fonds liquides tout ce qui peut être réalisé parmi les valeurs actives, en réglant le passif et en répartissant entre les associés l'excédent éventuel.

En effet, l'accomplissement des opérations de liquidation, qui peuvent être longues et complexes, implique la participation de la société dissoute, dont

170 PETIT B, op.cit, p. 43.

171 Art. 203 al. 3 AUSCGIE.

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la survivance est, par conséquent, nécessaire. C'est pourquoi l'Acte uniforme pose le principe selon lequel « la personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation et jusqu'à la publication de la clôture de celle-ci »172

La règle sus évoquée se présente cependant sous un double aspect. D'une part, la personnalité morale subsiste : le patrimoine social reste distinct de celui des associés ; la société continue à agir par l'intermédiaire d'un représentant, qui est désormais le liquidateur. D'autre part, la personnalité ne subsiste que pour les besoins de la liquidation : il s'agit par conséquent, à en croire Bruno PETIT, d'une personnalité atténuée ou, plus exactement, d'une capacité de jouissance réduite, ce qui se traduit concrètement (mais de manière un peu floue) par l'interdiction d'entreprendre des opérations nouvelles.173 Ceci veut dire que la société ne peut conclure des nouveaux contrats. Force est de constater qu'il s'agit on ne peut plus d'une fiction juridique : la société est artificiellement maintenue en vie pour régler ses dernières affaires.

De toute évidence, malgré le caractère complexe de la procédure de la liquidation, celle-ci est réglementée avec beaucoup de minutie par le législateur. Lorsque la liquidation est réglée par les statuts ou décidée par les associés en nommant eux-mêmes un liquidateur, on parle de la liquidation à l'amiable ou statutaire. Par contre, lorsque le liquidateur est désigné par décision de justice, on parle de la liquidation judiciaire.

§2 INTERVENTION DU LIQUIDATEUR

Comme dit supra, l'intervention du liquidateur peut se dérouler dans deux cas selon qu'il s'agit de la liquidation à l'amiable ou de la liquidation judiciaire. En pratique, la liquidation est souvent réglée par les statuts sous réserve des dispositions d'ordre public contenues dans l'Acte uniforme.

A. Nomination

Lorsque la liquidation est décidée par les associés, un ou plusieurs liquidateurs sont nommés174 :

- Dans les SNC, à l'unanimité des associés ;

- Dans les SCS, à l'unanimité des commandités et à la majorité en capital des commanditaires ;

- Dans les SARL, à la majorité en capital des associés ;

- Dans les SA, aux conditions de quorum et de majorité prévues pour les assemblées générales extraordinaires.

En effet, le liquidateur peut être choisi parmi les associés ou les tiers. Il peut aussi être une personne morale. Sauf disposition contraire à l'acte de nomination, si plusieurs liquidateurs ont été nommés, ils peuvent exercer leurs

172 Art. 205 AUSCGIE.

173 PETIT B., op.cit, p.43.

174 Art. 206 AUSCGIE.

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fonctions séparément. Toutefois, ils établissent et présentent un rapport commun. Si les associés n'ont pu nommer un liquidateur, celui-ci est désigné par décision de justice à la demande de tout intéressé.175

Aux termes de l'article 211 AUSCGIE, le liquidateur peut être révoqué et remplacé selon les mêmes que celles prévues pour sa nomination. Toutefois, tout associé peut demander en justice la révocation du liquidateur si cette est fondée sur des motifs légitimes.

En ce qui concerne la durée du mandat du liquidateur, celle-ci ne peut excéder trois ans, renouvelables par décision de justice.176Quant à sa rémunération, elle est fixée par la décision des associés ou du tribunal qui le

nomme.177

Il ressort de la lecture de l'article 212 AUSCGIE que la nomination et la révocation du liquidateur ne sont opposables aux tiers qu'à compter de la publication de l'acte de nomination de celui-ci. Ni la société, ni les tiers ne peuvent se prévaloir d'une irrégularité dans la nomination ou dans la révocation du liquidateur, dès lors que celle-ci a été régulièrement publiée.

Par ailleurs, tout liquidateur qui ne respecte pas ses obligations telles qu'énoncées par l'Acte uniforme encourt des sanctions pénales prévues aux articles 902 et suivants de l'AUSCGIE.

B. Déroulement des opérations de liquidation

L'AUSCGIE en son article 230 dispose que le liquidateur représente la société qu'il engage pour tous les actes de la liquidation. Il est investi des pouvoirs les plus étendus pour réaliser l'actif, même à l'amiable. Les restrictions à ces pouvoirs, résultant des statuts ou de l'acte de nomination, ne sont pas opposables aux tiers. Cependant, il faut noter que ces pouvoirs ne sont pas pour autant illimités.

C'est pourquoi, les articles 213 et suivants de l'AUSCGIE posent quelques limites notamment en ce qui concerne les cessions d'actifs, qui ne peuvent pas être faites à certaines personnes sous réserve de sanctions pénales.178

Les opérations de liquidation incombent à titre principal au liquidateur mais les associés peuvent faire valoir un certain nombre des droits. L'article 233 AUSCGIE l'oblige de convoquer, selon les modalités prévues par les statuts, au moins une fois par an et dans les six mois de la clôture de l'exercice, l'assemblée des associés qui statue sur les états financiers de synthèse annuels, donne les autorisations nécessaires et, le cas échéant, renouvelle le mandat du commissaires aux comptes.

175 Art. 207 à 209 AUSCGIE.

176 Art. 227 AUSCGIE.

177 Art. 210 AUSCGIE.

178 Art. 904 al. 2 AUSCGIE.

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De toute évidence, l'article précité vise à maintenir, au profit des associés et pendant toute la période de liquidation, le même exercice du droit d'information et de contrôle sur les opérations et les comptes et les comptes de la société que celui qu'ils avaient avant la dissolution de la société, par le moyen de l'Assemblée Générale Ordinaire (AGO) annuelle. Donc les associés se réunissent en assemblée chaque année, dans les mêmes conditions qu'ils l'étaient avant la liquidation : même délai pour les AGO, même compétence.179

Pendant le déroulement des opérations de liquidations, le liquidateur est tenu d'un certain nombre d'obligations :

1°) Elaboration d'un rapport sur la situation financière et d'un plan de

liquidation

Dans les six mois de sa nomination, le liquidateur convoque l'assemblée des associés à laquelle il fait rapport sur la situation active et passive de la société, sur la poursuite des opérations de liquidation, le délai nécessaire pour les terminer et demande, le cas échéant, toutes autorisations qui pourraient être nécessaires.180

Le délai dans lequel le liquidateur fait son rapport peut être porté à douze mois, sur sa demande, par décision de justice.181

2°) Etablissement de l'inventaire des biens sociaux

Le liquidateur, dans les trois mois de la clôture de chaque exercice, établit les états financiers de synthèse annuels au vu de l'inventaire qu'il a dressé des divers éléments de l'actif et du passif existant à cette date et un rapport écrit par lequel il rend compte des opérations de la liquidation au cours de l'exercice écoulé.182

3°) Etablissement, en cours de liquidation, des comptes de chaque exercice et
convocation de l'assemblée générale annuelle

Sauf dispense accordée par le président de la juridiction compétente statuant à bref délai, le liquidateur convoque, selon les modalités prévues par les statuts, au moins une fois par an et dans les six mois de la clôture de l'exercice, l'assemblée des associés qui statue sur les états financiers de synthèse annuels, donne les autorisations nécessaires et le cas échéant, renouvelle le mandat du commissaire aux comptes.183

179 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 70.

180 Art. 228 al. 1 AUSCGIE.

181 Art. 228 al. 3 AUSCGIE.

182 Art. 232 AUSCGIE.

183 Art. 233 AUSCGIE.

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4°) Désintéressement des créanciers

Il ressort de la lecture de l'article 231 que le liquidateur est habilité à payer les créanciers et à repartir entre les associés le solde disponible.

Toute décision de répartition des fonds est publiée dans le journal officiel. La décision est notifiée individuellement aux titulaires des titres nominatifs.184Les sommes affectées aux répartitions sont déposées, dans le délai de 15 jours à compter de la décision de répartition, sur un compte en banque.185

5°) Réalisation de l'actif et répartition du boni de liquidation

Aux termes de l'article 230 AUSCGIE, le liquidateur est investi des pouvoirs les plus étendus pour réaliser l'actif de la société, sous réserve des limites posées par les articles 213 et suivants. En effet, certaines opérations entrent dans la compétence exclusive des assemblées, notamment pour la cession globale de l'actif de la société dissoute ou l'apport de celui-ci à une autre société par voie de fusion. Le liquidateur devra y être autorisé par une décision de l'Assemblée Générale (AG). Cette AG délibère selon les conditions nécessaires pour la modification des statuts.186

En outre, il est interdit au liquidateur de céder des actifs sociaux à lui-même, à des proches ou à toute personne à laquelle il est intéressé (ses employés, leurs conjoints, ascendants ou descendants).187

Le liquidateur procède aussi à la distribution du reliquat ou boni de liquidation aux associés après avoir préservé les droits des créanciers de la société. S'il y a des biens mobiliers appartenant aux associés, bien que l'Acte uniforme ne le précise pas, le liquidateur doit les restituer à leurs propriétaires, qui les ont apportés en jouissance.188

Selon la disposition de l'article 237 AUSCGIE, le partage des capitaux propres subsistant après remboursement du nominal des actions ou des parts sociales est effectué entre les associés dans les mêmes proportions que leur participation au capital social.

En droit français, les éléments d'actif subsistant après liquidation sont, du fait de la disparition de la personne morale, considérés comme la copropriété indivise des anciens associés. Les règles de l'indivision peuvent donc être applicables en la matière : le partage, le maintien dans l'indivision ou même l'attribution préférentielle de certains biens peuvent être sollicités par les associés. Le partage peut aussi se faire par reprise des apports (qui s'effectuent en valeur, y compris sur les apports en nature). Les associés peuvent cependant

184 Art. 238 AUSCGIE.

185 Art. 239 AUSCGIE.

186 Art. 215 AUSCGIE.

187 Art. 214 AUSCGIE.

188 ISSA-SAYEGH J., Dissolution et liquidation, op.cit, p. 11.

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décider que certains biens soient attribués à certains associés. A défaut d'une telle stipulation et si le bien apporté se retrouve en nature dans la masse à partager, l'apporteur peut demander que ce bien lui soit attribué, à charge de soulte s'il y a lieu.189

C. Clôture de la liquidation

La clôture de la liquidation doit intervenir dans un délai de 3 ans à compter de la dissolution de la société. A défaut, le Ministère public ou tout intéressé peut saisir la juridiction compétente du ressort afin qu'il soit procédé à la liquidation de la société ou, si celle-ci a commencé, à son achèvement.190

Les associés sont convoqués dès lors pour statuer sur les comptes définitifs, sur le quitus de la gestion du liquidateur et la décharge de son mandat et pour constater la clôture de la liquidation.

Les comptes définitifs établis par le liquidateur sont déposés au greffe du tribunal de commerce en annexe au RCCM. Il y est joint, soit la décision de l'assemblée des associés statuant sur les comptes de la liquidation, le quitus de la gestion du liquidateur et la décharge de son mandat, soit, à défaut, la décision de justice.191

Enfin, pour justifier l'accomplissement des formalités prévues pour la clôture de la liquidation, le liquidateur demande la radiation de la société au RCCM dans le délai d'un mois à compter de la publication de la clôture de la liquidation.192

§3 EFFETS DE LA LIQUIDATION

La liquidation produit effectivement des effets à l'égard de la société désormais disparue (A) ainsi qu'à l'égard des créanciers de la société y compris les travailleurs qui étaient autrefois employés dans cette société sous un contrat de travail.

A. A l' égard de la société

A la clôture de la liquidation (radiation au RCCM), la personnalité de la société s'éteint définitivement et irréversiblement. Lorsqu'il n'y a pas de liquidation en raison de la transmission universelle du patrimoine social à un associé unique, la disparition de la société unipersonnelle n'intervient qu'après que les tiers aient été en mesure de faire valoir leurs droits ou de faire régler

189 PETIT B., op.cit, pp. 44-45.

190 Art. 216 AUSCGIE.

191 Art. 217 à 219 AUSCGIE.

192 Art. 220 AUSCGIE.

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leurs créances, et ce dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article 201.193

B. A l' égard des créanciers

Une fois terminée la liquidation, les créanciers (y compris les travailleurs) ne peuvent plus s'adresser à la société elle-même, celle-ci ayant cessé d'exister. Ils ont alors une action directe contre les associés et subissent le concours des créanciers personnels des associés.194L'Acte uniforme n'a pas précisé si les poursuites se feront sur base de la responsabilité limitée ou non des associés.

Il est clair que le contrat de travail ne peut naturellement plus exister car la société, qui lui a donné vie, ne vit plus elle-même. On ne peut donc pas concevoir la notion de « contrat de travail en cours » pour une société déjà liquidée. En d'autres termes, après la clôture de la liquidation, il n'y a pas de « contrat en cours », car tout est censé être déjà réglé. En plus, la société est même déjà radiée au RCCM.

SECTION III LA PROCEDURE COLLECTIVE DE LIQUIDATION

DES BIENS

Nous recourons à l'étude de cette procédure pour quatre raisons principales :

- Premièrement, parce que la liquidation des biens d'une société ordonnée par le tribunal est une cause de disparition ou de dissolution commune à toutes les sociétés commerciales ;

- Deuxièmement, parce que cette cause de dissolution a une réglementation particulière et appropriée, à savoir l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif (AUPC) ;

- Troisièmement ; parce qu'il est nécessaire de démontrer à ce niveau particulier, tout comme aux autres phases déjà vues, le sort des contrats et des conflits de travail en cours ;

- Quatrièmement enfin, parce que la compréhension du déroulement de cette procédure, du rôle que peuvent jouer les travailleurs à cette étape ainsi que de leurs droits nous aidera à enrichir et à approfondir la présente étude.

D'une manière générale, la liquidation des biens fait partie des procédures collectives d'apurement du passif prévues par le droit OHADA. En effet, il s'agit des procédures judiciaires ouvertes lorsque le commerçant

193 OHADA, Droit des sociétés commerciales, op.cit, p. 62.

194 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 451.

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personne physique ou personne morale de droit privé est en état de cessation des paiements'95 ou connait des sérieuses difficultés financières, dans le but d'assurer le paiement des créanciers et, dans la mesure du possible, le sauvetage de l'entreprise, de son activité et des emplois.

Classiquement, ces procédures collectives poursuivent trois objectifs. D'abord, elles visent à protéger les créanciers impayés et à assurer leur désintéressement dans les meilleures conditions possibles, d'où le rôle relativement important des créanciers dans le dénouement de la procédure et la discipline collective qui s'applique à tous les créanciers. Ensuite, elles visent à punir et éliminer le commerçant qui n'honore pas ses engagements. Cet aspect n'est pas à négliger lorsque l'on considère le caractère dissuasif de la punition ainsi que sa contribution à la moralisation du milieu des affaires et au paiement des créanciers (cas de la faillite personnelle et de la banqueroute). Enfin, les procédures collectives doivent permettre la sauvegarde des entreprises redressables, même au prix d'une certaine entorse au droit des créanciers.'96

Quant aux caractéristiques de ces procédures collectives, il sied d'en retenir principalement trois :

- L'aspect collectif : les créanciers sont regroupés et soumis à un ensemble de règles destinés à les discipliner afin que leur paiement se fasse dans l'égalité et la justice.

- L'aspect conflictuel : un conflit d'intérêt existe, d'une part entre les créanciers et le débiteur ou la société, d'autre part, à l'intérieur du groupe des créanciers entre les créanciers chirographaires, les créanciers munis de sûretés et les créanciers pouvant se prévaloir de préférence, en l'occurrence le droit de propriété.

- L'intervention judiciaire : cette intervention est essentielle dans le domaine des procédures collectives. Elle est destinée à protéger les intérêts en présence et à assurer l'efficacité et la moralité des procédures.

L'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif (AUPC) prévoit trois procédures :

- Le règlement préventif avant la cessation des paiements qui constitue l'une des pièces maîtresses de la prévention destinée à éviter la cessation des paiements au moyen d'un concordat préventif'97 ;

- Le redressement judiciaire après la cessation des paiements, qui est destinée à la sauvegarde de la société en visant à la fois son sauvetage et l'apurement de son passif au moyen d'un concordat de redressement'98 ;

195 La cessation des paiements est la situation où le débiteur ne peut faire face à son passif exigible avec son actif disponible (Art. 25 AUPC)

196 SAWADOGO F.M, « Commentaires sur l'AUPC », in OHADA, Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2012, pp. 1121-1302.

197 Art. 2- 1 AUPC.

198 Art. 2- 2 AUPC.

199 Art. 2- 3 AUPC.

200 Art. 3 AUPC.

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- La liquidation des biens, après la cessation des paiements, qui a pour objet la réalisation de l'actif et qui implique la liquidation de la société au profit des créanciers.199

C'est cette dernière procédure qui nous intéressera ici pour les besoins de la présente étude, étant donné que c'est elle seule qui implique la disparition de la société. C'est pourquoi, dans les lignes qui suivent, il sera question de déterminer les conditions d'ouverture de la liquidation des biens et d'établir les modalités de son exécution (§1), de saisir le rôle des travailleurs dans la mise en oeuvre de cette procédure (§2). En outre, la présence des travailleurs au sein de la société à cette phase délicate pousse à réfléchir sur la place de l'activité contractuelle dans cette procédure ainsi que sur les modalités prévues pour le traitement des créances de salaires (§ 3).

§1 CONDITIONS D'OUVERTURE ET MODALITES
D'EXECUTION

En vertu de l'article 33 AUPC, la liquidation des biens peut être ouverte soit immédiatement lorsque la société n'a pas d'espoir de se redresser, le débiteur n'ayant pas proposé un concordat sérieux ou qu'elle a cessé toute activité, soit à l'issue d'une période d'observation.

Nous verrons que dès le prononcé du jugement d'ouverture de la liquidation des biens, le tribunal nomme des organes de la procédure, qui sont des mandataires chargés de conduire et d'acheminer cette procédure.

A. Conditions d'ouverture

Il faut savoir avant tout qu'à côté des conditions de forme que nous allons évoquer ci-dessous pour l'ouverture de la liquidation des biens, il existe aussi des conditions de fonds, notamment la cessation des paiements et la juridiction compétente. En effet, les personnes physiques ou morales visées dans cette procédure ne peuvent être déclarées en liquidation des biens que si elles sont en état de cessation des paiements. Aussi, la juridiction compétente en cette matière n'est autre que celle compétente en matière commerciale, en l'occurrence le tribunal de commerce.200

Quant aux conditions de forme, il faut parler de la saisine du tribunal, de la décision même provenant de ce tribunal ainsi que des effets du jugement de liquidation des biens.

65

1°) La saisine du tribunal

Elle peut se faire soit par le débiteur, soit par un créancier, ou même d'office par le juge.

a) Saisine par le débiteur

Le débiteur en état de cessation des paiements doit en faire la déclaration au tribunal dans les 30 jours de cette cessation, aux fins d'obtenir l'ouverture de la procédure de liquidation des biens, le cas échéant.201

En effet, l'article 25 AUPC donne une définition légale de la cessation des paiements et apporte des précisions relatives à la saisine de la juridiction compétente par le débiteur. La cessation des paiements découle de la comparaison entre l'actif disponible et le passif exigible. L'actif disponible est la trésorerie de la société. Il comprend les sommes dont la société peut disposer immédiatement soit parce qu'elles sont liquides, soit parce que leur conversion en liquide est possible à tout moment et sans délai. Le passif exigible est reflété par les éléments de la cessation des paiements ouverte (non paiement d'une dette certaine, liquide et exigible) ou de la cessation des paiements déguisée (maintien du service de caisse par des expédients).202

Aux termes de l'article 26 AUPC, la déclaration ci-haut mentionnée doit être accompagnée des pièces et documents exigés pour ce faire. Il s'agit entre autres des éléments suivants :

- Un extrait d'immatriculation au RCCM ;

- Les états financiers de synthèse comprenant notamment le bilan, le compte de résultat, un tableau financier des ressources et des emplois ; - Un état de la trésorerie ;

- L'état chiffré des créances et des dettes avec indication du nom et du domicile des créanciers et des débiteurs ;

- Le nombre des travailleurs et le montant des salaires et des charges salariales impayés ;

- Les noms et adresses des représentants du personnel ;

- La liste des membres solidairement responsables des dettes de la société avec indication de leurs noms et domiciles ainsi que les noms et adresses de ses dirigeants.

La pertinence de ces documents ne paraît pas discutable dans la perspective de l'apurement du passif de la société. Cependant, il semble difficile de les réunir toutes, et cela pourrait retarder la déclaration, ce qui serait dommageable. C'est pourquoi l'Acte uniforme a prévu au dernier alinéa de l'article 26 une hypothèse, conçue comme une exception et qui pourrait se révéler très fréquente. Cet alinéa prévoit en effet que, dans le cas où l'un des

201 Art. 25 AUPC.

202 SAWADOGO FM, op.cit, p. 1172.

66

documents cités supra ne peut être fourni ou ne peut l'être qu'incomplètement, la déclaration reste possible mais doit indiquer les motifs de cet empêchement.

b) Saisine par un créancier

Tout créancier, quelle que soit la nature et l'importance de sa créance, peut demander l'ouverture d'une procédure collective contre son débiteur, pourvu que cette créance soit certaine, liquide et exigible. Pour ce faire, l'assignation du créancier doit préciser la nature et le montant de sa créance et viser le titre sur lequel elle se fonde.203

Les caractères certain, liquide et exigible de la créance signifient que l'ouverture d'une procédure collective ne peut être fondée sur des créances contestables et que les créances elles-mêmes doivent attestées par des pièces justificatives.

En l'espèce, sur appel interjeté contre un jugement du tribunal régional de Dakar du 14 février 2007 ayant refusé d'ouvrir une procédure collective de liquidation des biens contre la société A4 CENTER, sur assignation d'un de ses créanciers pour non paiement de sa créance, la Cour d'appel de Dakar confirme le jugement entrepris pour les motifs selon lesquels « l'appelant n'a pas produit de titres exécutoires, les créances alléguées résultent de documents unilatéraux ne comportant pas la signature du débiteur et non certifiés par une autorité légalement habile ; et il s'y ajoute que les chèques ne sont également pas émis par la société A4 CENTER ; elles ne sont donc pas certaines. »204

L'une des causes de demande par le créancier de la procédure collective de liquidation des biens contre son débiteur est le fait que toutes les poursuites en paiement du créancier sont demeurées vaines. En l'espèce, le jugement du TPI de Libreville du 12 mars 2001 a ouvert une procédure de liquidation des biens contre la société OGAR à la demande d'un des ses créanciers du fait que la société a cessé toute activité depuis plus d'un an et ses dirigeants ont quitté le Gabon ; ce qui a fait que toutes les poursuites en paiement soit demeurées vaines.205

Il faut noter en outre que l'alinéa 3 de l'article 28 AUPC laisse au débiteur assigné la possibilité de faire la déclaration et la proposition de concordat dans le délai d'un mois de l'assignation.

c) Saisine d'office

Aux termes de l'article 29 AUPC, la juridiction compétente peut se saisir d'office, notamment sur base des informations fournies par le

203 Art. 28 AUPC.

204 Cour d'appel de Dakar, Chambre civile et commerciale, Arrêt n° 192 du 18 février 2010, Mr X c/ Société A4 CENTER, OHADA, Actes uniformes commentés et annotés, Juriscope, p. 1177.

205 TPI de Libreville, Jugement n° 11/2000-2001 du 12 mars 2001, Mr X c/ Société OGAR ; OHADA, Traité et actes uniformes commentés et annotés, p. 1176.

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représentant du Ministère public, les commissaires aux comptes, les associés ou les institutions représentatives du personnel qui lui indiquent les faits de nature à motiver cette saisine.

Le président du tribunal fait convoquer le débiteur, par les soins du greffier, par acte extrajudiciaire, à comparaître devant la juridiction compétente siégeant en audience non publique.

Si le débiteur comparaît, le président l'informe des faits de nature à motiver la saisine d'office et reçoit ses observations. Si le débiteur reconnaît être en cessation des paiements ou en difficulté ou si le président acquiert l'intime conviction qu'il est dans une telle situation, ce dernier lui accorde un délai de 30 jours pour faire la déclaration et la proposition de concordat. Passé ce délai, le tribunal statue en audience publique.

Si le débiteur ne comparaît pas, il en est pris acte et la juridiction compétente statue à la première audience publique utile.

De ce qui précède, l'on note que les cas de saisine d'office sont en pratique très rares. Les enquêtes pouvant être faites par des organes ou des individus chargés d'informer le tribunal paraissent inadéquates. Il serait mieux pour les tribunaux de commerce de la RDC d'organiser, à l'instar des tribunaux de commerce belges, un service d'enquêtes commerciales dont l'utilité est évidente pour la saisine d'office.206

B. Modalités d'exécution 1°) La décision du tribunal

Il ressort de la lecture de l'article 32 AUPC qu'avant de prononcer l'ouverture d'une liquidation des biens, le tribunal peut désigner un juge du siège ou toute personne qu'il estime qualifiée pour recueillir tous renseignements sur la situation du débiteur, ses agissements et ses propositions concordataires et en faire rapport.

A cet égard, on remarque que quel que soit le mode de saisine, le tribunal ne peut rendre de décision avant 30 jours à compter de sa saisine. Si le tribunal constate la cessation des paiements dans le chef du débiteur, il doit prononcer la liquidation des biens après avoir constaté que le débiteur ne peut pas ou ne peut plus proposer un concordat sérieux de redressement judiciaire.207Il peut aussi prononcer cette liquidation à tout moment au cours de la procédure de redressement judiciaire si le débiteur ne respecte pas ses propositions contenues dans le concordat.

206 DUPLAT J.L, « Les services des enquêtes commerciales des tribunaux de commerce » ; in L'entreprise en difficulté, Editions Jeune Barreau, 1981, pp. 45-76.

207 Art. 33 AUPC.

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Le concordat sérieux, à en croire le professeur Filiga Michel SAWADOGO, est celui qui, tout en préservant et en favorisant l'assainissement de l'entreprise, assure le paiement des créanciers dans des conditions acceptables. Il doit donc comporter d'une part des mesures de redressement de la société et un plan de paiement des créanciers théoriquement satisfaisants, et d'autre part des garanties d'exécution des engagements que contient la proposition de concordat.208

Le tribunal, dans la décision d'ouverture de la liquidation des biens, nomme certaines personnes devant agir comme organes de la liquidation, à savoir le juge commissaire, un à trois syndics, et le cas échéant, des contrôleurs.

a) Le juge commissaire

Il est nommé parmi les juges de la juridiction, à l'exclusion de son président sauf en cas de juge unique. Il veille au déroulement rapide de la procédure et aux intérêts en présence. C'est lui qui nomme les contrôleurs, lesquels sont choisis parmi les créanciers, sans que leur nombre puisse excéder trois.209Ces derniers assistent le juge-commissaire dans sa mission de surveillance du déroulement de la procédure.

b) Le syndic

Il paraît comme l'acteur central dans la procédure de liquidation des biens. C'est lui seul qui exécute les opérations de liquidation pendant que les autres sont là pour assurer le contrôle. Il est généralement choisi sur une liste des spécialistes arrêtée par la Cour d'appel.210

Sa mission est essentielle quant au déroulement diligent et au bon aboutissement de la procédure collective. Il a l'obligation de rendre compte de sa mission au juge-commissaire selon une périodicité définie par ce dernier.211 Le syndic peut représenter la masse des créanciers, le tribunal en tant que mandataire de justice et, le cas échéant, le débiteur. L'on remarque que dans ces conditions, un conflit de fonctions peut se produire.

En effet, les alinéas 2 et 3 de l'article 53 AUPC énoncent que le jugement qui prononce la liquidation des biens entraine corrélativement le dessaisissement des pouvoirs du débiteur au profit du syndic qui sera chargé de représenter les droits et actions concernant le patrimoine du débiteur dessaisi pendant toute la durée de la procédure collective. Lorsque le débiteur est une personne physique, l'application ne pose pas de difficulté dans la mesure où le débiteur est simplement remplacé par le syndic.

208 SAWADOGO FM, op.cit, p. 1183.

209 Art. 48 AUPC.

210 SAWADOGO F.M, op.cit, p. 1193.

211 Art. 43 al. 4 AUPC.

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En revanche, le débiteur conserve ses droits propres, tels que les droits de recours contre les décisions, qu'il pourra exercer lui-même. Mais lorsque le débiteur est une personne morale, le problème est tout autre. La société débitrice dissoute est donc dessaisie et à travers elle, les dirigeants sociaux et le conseil d'administration.

Cependant, en vertu du principe posé selon lequel la personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation, la société dispose encore des droits encore des droits propres, notamment le droit de faire appel du jugement ouvrant ou prononçant la liquidation des biens, ou faire appel des décisions du juge commissaire.

Toute la problématique est alors celle de savoir qui est habilité à représenter la société dans ses diverses actions. En d'autres termes, comment pallier ce vide législatif occasionné par la cessation des pouvoirs des dirigeants sociaux dès le prononcé du jugement de liquidation des biens contre la société P

Maître Bérenger Yves MEUKE, un auteur, a tenté d'apporter une solution à ce problème (laquelle solution nous paraît logique), en soutenant qu' « il est indispensable de remplacer les organes sociaux dessaisis et de nommer aux côtés du syndic un représentant de la société qui sera chargé de représenter les intérêts propres de la société débitrice (un liquidateur sociétaire), car, d'une part le syndic est incompétent pour exercer les droits propres de la débitrice et par conséquent il ne doit pas représenter celle-ci dans les actions en justice à engager dans cette procédure.

Etant chargé de représenter les créanciers, on pourrait se retrouver face à un conflit d'intérêts entre les droits des créanciers et ceux propres à la débitrice. D'autre part, les organes sociaux sont eux aussi incompétents pour représenter la débitrice puisqu'ils ont perdu tous pouvoirs dès le prononcé du jugement confirmant la liquidation des biens ».212

Il est à noter en outre qu'un jugement prononçant la liquidation des biens est toujours susceptible d'appel.213Ce jugement doit être mentionné au RCCM et publié dans un journal d'annonces légales.214Ceci traduit la nécessité pour le jugement d'ouverture de faire l'objet d'une publicité afin d'informer les créanciers et les personnes qui ont traité ou qui voudraient traiter avec le débiteur. La publicité est habituelle et est considérée comme justifiée dès lors que la société est en état de cessation des paiements.

212 MEUKE B.Y., « Qui représente la société en liquidation des biens dans l'espace OHADA ? », Ohada.com/ Ohadata D-08-16, pp. 1-6.

213 Art. 33 al. 5 AUPC.

214 Art. 36 AUPC.

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2°) Effets du jugement de liquidation des biens

a) A l' égard du débiteur

· Dessaisissement : Désormais, le débiteur est dessaisi de la gestion, de l'administration et de la disposition de son patrimoine. L'accomplissement de ces actes est confié au syndic. La liquidation des biens d'une société d'une société entraine de plein droit sa dissolution.

b) A l'égard des créanciers

· Regroupement en une masse : Ne peuvent participer à la procédure collective que les créanciers réunis en une masse représentée par le syndic qui est seul à pouvoir agir en son nom et l'engager.215Ne font partie de la masse que les créanciers dont la créance est née antérieurement à la date du jugement d'ouverture de la procédure.

En plus du regroupement en une masse, le jugement de liquidation des biens produit les effets suivants, communs à tous les créanciers :

- Il arrête le cours des inscriptions de toutes les sûretés216;

- Il emporte, au profit de la masse, une hypothèque forcée217;

- Il suspend ou interdit toutes les poursuites individuelles218, sauf les actions en nullité en et en résolution, ou encore les actions tendant uniquement à la reconnaissance d'un droit de créance ou de propriété si ce droit leur est contesté par le syndic après production ;

- Il rend exigibles les dettes à termes à l'égard du débiteur219 ;

- Il arrête, à l'égard de la masse, le cours des intérêts des dettes à termes220. Le fondement psychologique de cette règle de l'arrêt du cours des intérêts est qu'il n'est pas raisonnable de réclamer les intérêts là où le recouvrement du capital est compromis. Au plan technique, cette règle permet de fixer définitivement le montant de passif.221

- Il oblige tous les créanciers de produire, sous peine de forclusion, leurs titres de créance auprès du syndic et se soumettre à la procédure de vérification222. Cette procédure de vérification aboutit à l'établissement d'un état qui est déposé au greffe, notifié à chaque créancier et publié dans un journal d'annonces légales. La décision du syndic est soit l'acceptation (partielle ou totale) de la créance, soit le rejet de celle-ci. Cette décision peut être soit confirmée ou infirmée par le juge-commissaire, soit contestée par le créancier devant le tribunal.

215 Art. 72 AUPC.

216 Art. 73 AUPC.

217 Art. 74 AUPC.

218 Art. 75 AUPC. 219Art. 76 AUPC.

220 Art. 77 AUPC.

221 SAWADOGO F.M, op.cit, p. 1220.

222 Art. 78 à 90 AUPC

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Au bout du compte, il faut noter que tant que la procédure de liquidation des biens n'est pas close, l'activité de la société peut continuer. Cette poursuite d'activité peut présenter quelques avantages : elle procure des revenus et conserve la valeur du fonds. Mais elle présente le danger, si elle est déficitaire, d'aggraver le passif au détriment des créanciers. Le législateur la soumet donc à un régime particulier.

En effet, la continuation de l'exploitation doit être autorisée par le tribunal, pour les seuls besoins de la liquidation, pour une durée de 3 mois, si l'intérêt public ou celui des créanciers n'est pas mis en péril. Au bout de 3 mois, l'exploitation cesse ; elle peut être reconduite une ou plusieurs fois sans pouvoir dépasser un an sauf décision spécialement motivée du tribunal pour des motifs exceptionnels ; et de ce fait, le syndic doit, tous les trois mois, communiquer le résultat de l'exploitation.223

3°) Solution de la liquidation des biens

Dès que la liquidation des biens est prononcée, les créanciers sont en état d'union.224L'union est l'état des créanciers groupés pour faire valoir leurs droits. Le syndic, après avoir accompli les mesures de la période préparatoire (vérification du passif, inventaire de l'actif, etc.), remet le rapport au juge-commissaire qui l'autorise à procéder à la réalisation de l'actif et à l'apurement du passif.

a) La réalisation de l'actif225

La réalisation de l'actif constitue la question la plus importante que pose la liquidation des biens.

? Biens meubles : Le syndic poursuit seul la vente des biens meubles de la société, le recouvrement des créances et le règlement des dettes. Les créances à long terme peuvent faire l'objet de cessions afin de ne pas retarder les opérations de liquidation dans les conditions prévues pour les compromis et les transactions. Les deniers provenant de ces opérations sont versés sur un compte spécial sur lequel aucune opposition n'est recevable.

? Biens immeubles : En principe, les ventes d'immeubles ont lieu suivant les formes prescrites en matière de saisie immobilière. C'est le juge-commissaire qui détermine les conditions essentielles et les modalités de la vente (vente sur saisie immobilière, vente par adjudication amiable ou vente de gré à gré). Si, dans le délai de trois mois suivant le jugement de liquidation des biens, le syndic n'a entrepris aucune procédure de

223 Art. 112 à 117 AUPC.

224 Art. 146 AUPC.

225 Art. 147 à 163 AUPC.

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réalisation d'immeuble, les créanciers hypothécaires et les créanciers munis d'un privilège général peuvent exercer ou reprendre leur droit de poursuite individuelle à charge d'en rendre compte au syndic.

b) L'apurement du passif226

Il s'agit du paiement des créanciers. Pour ce faire, le juge-commissaire ordonne la répartition des deniers entre les créanciers et le syndic adresse à chaque créancier un chèque correspondant à son dividende, lequel chèque est tiré sur le compte ouvert spécialement à cet effet dans un établissement bancaire ou postal ou au Trésor public.

Le montant de l'actif est repartie entre tous les créanciers dont la créance est vérifiée et admise, déduction faite des frais et dépens de la procédure et des éventuels secours accordés au débiteur et à sa famille.

Les deniers provenant de la réalisation des immeubles et des meubles sont repartis entre les créanciers sur base d'un classement établi par la loi (Articles 166 et 167 AUPC). C'est ce même classement qui est prévu par les articles 225 et 226 de l'Acte uniforme sur les sûretés (AUS). Concernant l'application de ces dispositions, il faut savoir que les créanciers d'un rang supérieur doivent être intégralement payés avant les créanciers du rang suivant et ainsi de suite.

c) La clôture de la liquidation des biens

Lorsque les opérations de liquidation des biens sont terminées, le syndic en rend compte au juge-commissaire, qui dresse un procès-verbal (PV) constatant la fin des opérations.227Le PV est ensuite communiqué au Tribunal qui prononce la clôture de la liquidation des biens et tranche, par la même occasion, les contestations éventuelles.

L'union est donc dissoute de plein droit et les créanciers recouvrent l'exercice individuel de leurs actions. La décision de clôture est publiée au Journal officiel ainsi qu'au RCCM, par les soins du greffier, après en avoir adressé un extrait au représentant du Ministère public.228

Si les fonds manquent pour entreprendre ou terminer les opérations de la liquidation des biens, le tribunal peut, sur le rapport du juge-commissaire, à quelque époque que ce soit, prononcer, à la demande de tout intéressé ou même d'office, la clôture des opérations pour insuffisance d'actif.229

La clôture des opérations pour insuffisance d'actif est, à en croire le professeur SAWADOGO, le mode de clôture le plus fréquent, statistiquement

226 Art. 164 à 169 AUPC.

227 Art. 170 AUPC.

228 Art. 172 AUPC.

229 Art. 173 AUPC.

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parlant.230Il y a insuffisance d'actif lorsqu'il n'y a pas d'actif du tout231 ou lorsque les frais de réalisation de l'actif excèdent les recettes attendues. Un tel mode de clôture s'explique aisément : la procédure tend à un paiement, ne serait-ce que partiel. S'il n'y a aucune perspective, il est logique l'on y mette fin, d'autant plus que la poursuite de la procédure dans ce cas ne peut que gonfler inutilement le passif. De ce point de vue, la clôture pour insuffisance d'actif apparaît comme un raccourci ou un diminutif de l'union.

§2 ROLE DES TRAVAILLEURS DANS LA MISE EN OEUVRE DE
LA PROCEDURE DE LIQUIDATION DES BIENS

On ne le dira jamais assez ; les travailleurs, face à leur employeur en difficulté, sont des créanciers et devraient être traités, a priori, comme les autres créanciers de la société. Mais il ne peut en être ainsi pour deux raisons :

- En premier lieu, ils font partie de l'entreprise et constituent une de ses composantes indissociables : l'élément humain, à côté de l'élément économique qui est l'activité.232

- En outre, le salaire est une ressource dont la nature alimentaire est absolument incontestable.

Ces raisons font que le traitement des travailleurs ne peut être absolument identique à celui des autres créanciers, fournisseurs de biens, de services ou de crédits qui ont accordé leur confiance à la société en difficulté ou en voie de disparition. La participation de l'élément humain à la constitution et à la vie de la société vue dans la dimension économique de l'entreprise implique l'information des employés, voire leur consultation sur les questions vitales. La sécurité de l'emploi et la garantie des revenus salariaux doivent être également prises en compte.233Ce sont là les idées fortes qui devraient imprégner le traitement des travailleurs dans les sociétés en difficulté ou en voie de disparition.

Le sort des travailleurs apparaît, à ce niveau, plus ou moins fragilisé selon les chances de redresser ou non la société. Aussi, il se pose, en pratique, un problème pour l'employeur ou le syndic concernant le choix à faire entre

230 SAWADOGO F.M, op.cit, p. 1271.

231 Tribunal de Commerce de Bamako, Jugement n° 179 du 26 avril 2006, Société AIR-MALI S.A., OHADA, Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2012, p. 1272. On y relève ce qui suit : « Attendu qu'aux termes du rapport du juge-commissaire daté de mars 2006, la poursuite des opérations de liquidation des biens de la société AIR-MALI SA est rendue impossible en raison de l'insuffisance d'actif ; que se fondant sur le rapport du liquidateur désigné en la personne de TIECORO DIAKITE, le juge-commissaire a relevé que les opérations de réalisation sont terminées et qu'il n'existe plus aucun actif disponible ; qu'il échet en conséquence de procéder à la clôture pour insuffisance d'actif de la présente affaire en application de l'article 173 de l'AUPC ».

232 CATALA N., L'entreprise, Dalloz, Paris, 1980, p. 19.

233 ISSA-SAYEGH J., « Le sort des travailleurs dans les entreprises en difficulté », Ohada.com/ Ohadata D-09-41, p. 1.

234 Art. 169 AUPC.

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l'obligation de licenciement et l'obligation de reclassement à l'endroit de tel ou tel autre salarié.

Le code du travail congolais reste silencieux sur le point de savoir quel rôle les travailleurs peuvent jouer dans cette phase. Néanmoins, à en croire le professeur ISSA-SAYEGH, les codes de la plupart des Etats parties de l'OHADA relèvent que les travailleurs ont, dans la liste de leurs prérogatives, pour mission de communiquer à l'employeur toute suggestion utile tendant à l'amélioration de l'organisation et du rendement de l'entreprise ; ce qui est loin de la possibilité de se joindre à lui pour diagnostiquer les maux de la gestion de l'entreprise, de sa solvabilité, de sa politique commerciale passée ou à venir, etc.

A. Rôle des travailleurs dans le déclenchement de la procédure

En principe, cette procédure est déclenchée, soit par le débiteur au moyen d'une déclaration au tribunal compétent, soit par assignation des créanciers non payés, soit d'office par le tribunal.

Il est clair de ce qui précède qu'en cas d'absence de toute initiative de leur employeur auprès du tribunal, on peut parfaitement concevoir et admettre que les salaires impayés des travailleurs de la société justifient une assignation en cessation des paiements ou constituent une information suffisamment inquiétante sur la santé de la société pour être portée à la connaissance du parquet ou du tribunal compétent pour une saisine d'office de la juridiction, à condition, bien entendu, qu'il s'agisse de créances certaines, liquides et exigibles.

B. Rôle des travailleurs dans le déroulement de la procédure

Les travailleurs peuvent jouer un rôle actif et efficace dans le déroulement de cette procédure en tant que contrôleurs. Certes, la désignation des contrôleurs est facultative pour le juge-commissaire mais elle est obligatoire si la demande en est faite par des créanciers représentant au moins la moitié des créances, ce qui peut être le cas, assez souvent, de la seule masse salariale impayée. Dans ce cas, trois contrôleurs doivent être nommés, choisis respectivement parmi les créanciers munis des sûretés réelles spéciales mobilières ou immobilières, les représentants du personnel et les créanciers chirographaires.

La représentation des travailleurs dans le contrôle de la procédure de liquidation des biens n'est pas négligeable sur le bon déroulement de la procédure et la protection des intérêts des créanciers. Tout cela implique les éléments ci-après :

- Ils sont informés, chaque semestre, sur l'état de la procédure et sur la répartition des deniers entre les créanciers234 ;

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- Ils peuvent saisir le tribunal d'une demande de résolution du concordat ; - Ils participent à la vérification des créances par le syndic235 ;

- Ils sont avisés du non respect du délai de production par les créanciers236 ;

- Ils sont informés des licenciements pour motif économique237 ;

- Ils peuvent émettre leur avis sur la continuation de l'activité de la société238 ;

- Ils peuvent faire des réclamations contre le syndic auprès du juge-commissaire et saisir ce dernier de toutes contestations ;

- Ils peuvent contraindre le syndic, par décision du juge-commissaire, d'accomplir les actes nécessaires à la gestion de la société ou d'exercer les actions en justice nécessaires au recouvrement des créances de la société239 ;

- Ils participent à la vérification des créances ainsi que de la réalisation des biens ;

- Ils ont le droit de vérifier la comptabilité et l'état de la situation présenté par le débiteur, de demander compte au syndic des actes accomplis par lui, des recettes et des débours.

§3 L'ACTIVITE CONTRACTUELLE FACE A LA PROCEDURE DE
LIQUIDATION DES BIENS

La question qui se pose ici est celle de savoir si après l'ouverture de la procédure de liquidation des biens les contrats de travail en cours s'arrêtent automatiquement ou non (A). En outre, le point culminant de cette procédure est le désintéressement des créanciers, et en particulier le traitement des créances de salaires. Les principes directeurs de ce désintéressement (B) valent la peine d'être démontrés.

A. L'exécution des contrats en cours

La poursuite de l'activité de la société peut être autorisée par le tribunal dans la procédure de liquidation des biens.240 Pour ce qui est des contrats en cours au moment de l'ouverture des procédures de liquidation des biens, leur exécution peut toujours se poursuivre, quel que soit le mode de continuation de l'exploitation de la société, si les besoins de cette poursuite se font sentir.

En effet, la procédure de liquidation des biens n'entraîne pas en soi la cessation automatique des contrats de travail aussi longtemps que cette

235 Art. 84 et 85 AUPC.

236 Art. 36 et 37 AUPC.

237 Art. 62 al. 1er et 78 al. 2-4 Code du Travail.

238 Art. 112 et 113 AUPC.

239 Art. 40, 43 et 53 AUPC.

240 Art. 113 AUPC.

241 Cour de Cassation française, Chambre sociale, 24 mai 2000, n° 98-42.343 ; JURISDATA n° 2000002235.

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procédure n'est pas encore clôturée241. Elle est loin d'être un cas de force majeure. La société doit donc poursuivre l'exécution des contrats de travail en cours au moment de l'ouverture des procédures collectives, que ces contrats soient à durée déterminée ou indéterminée.

La poursuite automatique des contrats de travail dispense même les travailleurs d'interroger l'employeur sur son intention de poursuivre ou non les contrats de travail d'autant plus que cette poursuite est liée à l'activité de la société.

Cependant, il peut arriver que la procédure de liquidation des biens implique des licenciements pour motif économique. Il sera donc logique que les salariés soient licenciés ; et ceci par l'initiative expresse du syndic. Ces licenciements seront effectués selon les règles du Code du Travail.

Le licenciement pour motif économique est inévitable puisque la société est appelée à disparaître. C'est pourquoi la procédure telle que prévue par l'Acte uniforme s'avère plus souple et plus rapide qu'en droit commun. En fait, nous lisons aux articles 110 et 111 AUPC ce qui suit :

? Article 110 : « Lorsque des licenciements pour motif économique présentent caractère urgent et indispensable, le syndic peut être autorisé à y procéder par le juge-commissaire (...) Avant la saisine du juge commissaire, le syndic établit l'ordre des licenciements conformément aux dispositions du droit du travail applicable. Sont proposés en premier lieu, les licenciements des travailleurs présentant les moindres aptitudes professionnelles pour les emplois maintenus et, en cas d'égalité d'aptitudes professionnelles, les travailleurs les moins anciens dans l'entreprise, l'ancienneté étant calculée selon les dispositions du droit du travail applicable. En vue de recueillir leur avis et leurs suggestions, le syndic informe, par écrit, les délégués du personnel des mesures qu'il a l'intention de prendre en leur fournissant la liste des travailleurs dont il envisage le licenciement et en précisant les critères qu'il a retenus (...) ».

? Article 111 : « L'ordre des licenciements établi par le syndic, l'avis des délégués du personnel s'il a été donné et la lettre de communication à l'inspection du travail sont remis au juge commissaire.

Le juge commissaire autorise les licenciements envisagés ou certains d'entre eux s'ils s'avèrent nécessaires au redressement de l'entreprise, par décision signifiée aux travailleurs dont le licenciement est autorisé et au contrôleur représentant les travailleurs s'il en est nommé.

La décision autorisant ou refusant les licenciements est susceptible d'opposition dans les quinze jours de sa signification devant la juridiction

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ayant ouvert la procédure, laquelle doit rendre sa décision sous quinzaine.

La décision de la juridiction compétente est sans appel. »

L'on remarque de ce qui précède que les dispositions de l'article 110 susmentionné reprennent les mêmes éléments que ceux prévus à l'article 78 du Code du Travail congolais. Aucune contradiction n'est donc à relever.

Il sied de noter en définitive que la poursuite des contrats de travail en cours ne se conçoit aisément que si l'exploitation de la société est continuée. Comme dit ci-haut, aussi longtemps que l'employeur représenté par le syndic ne prend pas l'initiative de les rompre, ces contrats se poursuivent ; mais ce qui est sûr est qu'ils vivent leurs derniers instants parce que, une fois que la société disparait, ils disparaitront aussi. En d'autres termes, quand une société est en voie de disparition, les contrats de travail en cours le sont aussi.

B. Le traitement des créances de salaire

D'une façon générale, les créanciers d'une procédure collective d'apurement du passif sont classés en trois catégories pour le traitement ou le paiement de leurs créances : créanciers dans la masse, créanciers contre la masse et créanciers hors de la masse.

? Créanciers dans la masse

Les créanciers dans la masse sont ceux dont la créance est née avant le jugement d'ouverture de la procédure collective d'apurement du passif. C'est à ces créanciers que le débiteur demande, dans ses propositions concordataires, de consentir des remises et des délais pour lui permettre de redresser son entreprise. Ce sont eux qui recevront les dividendes concordataires et la distribution des deniers provenant de la réalisation des biens meubles et immeubles. Ils les recevront dans l'ordre établi par les articles 166 et 167 AUPC.

- Article 166 : « Les deniers provenant de la réalisation des immeubles sont distribués ainsi :

1° aux créanciers des frais de justice engagés pour parvenir â la réalisation du bien vendu et â la distribution elle-même du prix ;

2° aux créanciers de salaires super privilégiés en proportion de la valeur de l'immeuble par rapport à l'ensemble de l'actif ;

3° aux créanciers hypothécaires et séparatistes inscrits dans le délai légal, chacun selon le rang de son inscription au livre foncier ;

4° aux créanciers de la masse tels que définis par l'article 117 ;

5° aux créanciers munis d'un privilège général selon l'ordre établi par l'Acte uniforme portant organisation des sûretés ;

6° aux créanciers chirographaires.

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- Article 167 : « Les deniers provenant de la réalisation des meubles sont distribués ainsi :

1° aux créanciers des frais de justice engagés pour parvenir à la réalisation du bien vendu et à la distribution elle-même du prix ;

2° aux créanciers de frais engagés pour la conservation du bien du débiteur dans l'intérêt du créancier dont les titres sont antérieurs en date ;

3° aux créanciers de salaire super privilégiés en proportion de la valeur du meuble par rapport à l'ensemble de l'actif ;

4° aux créanciers garantis par un gage selon la date de constitution du gage ;

5° aux créanciers garantis par un nantissement ou par un privilège soumis à publicité, chacun suivant le rang de son inscription au registre du commerce et du crédit mobilier ;

6° aux créanciers munis d'un privilège mobilier spécial, chacun sur le meuble supportant le privilège ;

7° aux créanciers de la masse tels que définis par l'article 117 ;

8° aux créanciers munis d'un privilège général selon l'ordre établi par l'Acte uniforme portant organisation des sûretés ;

9° aux créanciers chirographaires.

? Créanciers contre la masse

Ce sont les créanciers dont la créance est née postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective. Ces créanciers, compte tenu du risque qu'ils courent en faisant crédit à une société déjà déclarée en cessation des paiements, bénéficient de l'avantage de passer avant les créanciers munis d'un privilège général et les créanciers chirographaires.

? Créanciers hors de la masse

Il s'agit de ceux dont la créance est née d'une activité irrégulière du débiteur soit avant le jugement, soit après le jugement. Avant le jugement déclaratif, le débiteur peut avoir accompli des actes anormaux ou suspects qui sont susceptibles d'être déclarés inopposables à la masse des créanciers.242En outre, les actes d'exploitation accomplis postérieurement au jugement déclaratif par le débiteur seul, c'est-à-dire sans l'assistance ou la représentation du syndic ou dans le cadre d'une activité continuée sans autorisation, sont déclarés inopposables à la masse des créanciers.243

Tandis que les créanciers hors de la masse ne peuvent absolument pas prendre part à la procédure collective dont ils sont exclus jusqu'à sa clôture, les deux autres catégories de créanciers demeurent dans la procédure collective

242 Art. 67 et suivants AUPC.

243 Art 11, 52 et 53 AUPC.

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mais sont traités différemment selon qu'ils sont considérés comme étant dans ou contre la masse. Il en est de même des travailleurs dont nous allons rendre compte du sort de créances dans les lignes qui suivent.

En effet, les travailleurs, tout comme les autres créanciers d'une procédure collective, pourront être exposés à des risques importants lors du paiement des salaires. Mais du fait que les procédures collectives proviennent d'une organisation légale et sont exécutées sous un contrôle judiciaire, celles-ci offrent un cadre protecteur dans le désintéressement de ces créanciers.

Par ailleurs, l'article 95 AUPC consacre ou plutôt confirme le privilège des salariés en ces termes : « Les créances résultant du contrat de travail ou du contrat d'apprentissage sont garanties, en cas de redressement judiciaire ou de liquidation des biens par le privilège des salaires établi pour les causes et le montant définis par la législation du Travail et les dispositions relatives aux sûretés. » Ce texte renvoie au droit du Travail pour la définition des créances de salaires protégées par le privilège et au droit des sûretés pour le rang de ce droit de préférence.

Il nous parait plus rationnel d'exposer brièvement les principes retenus par le droit positif pour établir le privilège des salaires en droit commun avant d'examiner ce qu'il est dans le cadre des procédures collectives d'apurement du passif.

1°) Principe du privilège général des salaires

Le concept « salaire» est largement entendu dans le droit du travail et l'article 180-3° de l'Acte uniforme portant organisation des sûretés (AUS) ne le dément pas, dès lors qu'il retient comme privilégiées « toutes les sommes dues aux travailleurs et apprentis pour exécution et résiliation de leur contrat durant la dernière année ayant précédé le décès du débiteur, la saisie des biens ou la décision judiciaire d'ouverture d'une procédure collective. »

Le privilège des créances de salaire est un privilège général, c'est-à-dire qu'il porte sur les biens meubles et immeubles du débiteur244et il est opposable aux autres créanciers sans qu'il soit besoin de le publier au RCCM.

Dans le Code du travail congolais, sont considérées comme des créances de salaire privilégiées, toutes les sommes dues aux travailleurs, qu'il s'agisse du salaire ou de ses accessoires (primes, indemnités, allocations, dommages-intérêts, etc.).

En effet, le Code du travail congolais, comme ceux de tous les Etats membres de l'OHADA, a prévu de protéger la créance de salaire contre les

244 Art. 110 al. 2 Code du Travail.

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saisies de créance (autrefois appelées saisies-arrêts) en fonction de l'importance du salaire du travailleur et de son caractère alimentaire.245

Certains Etats, dans leurs codes du travail, ont mis une quotité incessible et insaisissable à l'abri de la concurrence des créanciers en cas de distribution des deniers du débiteur en en faisant un « super privilège », c'est-à-dire en le plaçant à un rang plus avantageux que le privilège des salaires proprement dit. C'est ce super privilège que le droit OHADA a voulu préserver dans les textes concernés246 sans pour autant le définir.

La RDC, contrairement à certains Etats parties de l'OHADA, n'a pas prévu dans sa législation le concept de « super privilège » et n'a pas fait une distinction entre une quotité de salaire devant être la plus privilégiée par rapport à l'autre. Elle conçoit le salaire dans son entièreté, y compris tous ses accessoires, comme étant privilégié.

Le fait que certains Etats reconnaissent le super privilège et d'autres non donne l'impression d'une anomalie dans l'application de ces textes. C'est pourquoi le point de vue du professeur ISSA-SAYEGH (que nous épousons aussi) tend à la proposition d'un remède envisageant soit la révision des textes concernés, soit le comblement par un avis de la CCJA247de cette lacune. Ainsi l'article 180 AUS pourra définir le privilège comme concernant tous les salaires et le super privilège comme concernant la seule quotité incessible ou insaisissable des salaires.248

2°) L'application du principe du privilège des salaires dans la procédure

collective.

La préservation des quotités incessibles et insaisissables des salaires apparaît comme la plus urgente tâche à accomplir avant d'effectuer le paiement des créances des salaires dans la masse et contre la masse.

a) Le paiement d'urgence des créances de salaires super privilégiés

Cette règle est ainsi exprimée par l'article 96 AUPC : « Au plus tard dans les dix jours qui suivent la décision d'ouverture et sur simple décision du juge- commissaire, le syndic paie toutes les créances super privilégiées des travailleurs sous déduction des acomptes déjà perçus ».

Si, au moment où le syndic entre en fonction, il trouve des salaires impayés contenant le super privilège, il doit payer ces créances, sous déduction des acomptes déjà perçus sur la période concernée avant toutes autres sur les fonds disponibles ou sur les premières rentrées de fonds. Si c'et le syndic ou toute autre personne qui en fait l'avance, le payeur est subrogé dans les droits

245 ISSA-SAYEGH J., Le sort des travailleurs, op.cit, p. 12.

246 Art. 225 et 226 AUS, Art. 166 et 167 AUPC.

247 Cour Commune de Justice et d'Arbitrage.

248 ISSA-SAYEGH J., Le sort des travailleurs, op.cit, p. 12.

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des travailleurs et doit être remboursé dès la rentrée des fonds nécessaires sans qu'aucune autre créance puisse y faire obstacle.

Il faut comprendre que ce paiement est destiné à préserver le caractère alimentaire des salaires et la quotité incessible et insaisissable qui lui correspond et qui peut cruellement faire défaut aux travailleurs.

b) Le paiement des créances de salaire dans la masse et contre la masse

Les créances de salaire « dans la masse » sont des créances échues et exigibles avant le jugement déclaratif de la cessation des paiements. Les travailleurs titulaires de telles créances font partie de la masse et doivent, en principe, concourir avec les créanciers placés dans la même situation. Toutefois, du fait du caractère privilégié, ils bénéficient d'une préférence dans l'ordre de distribution des deniers établi par les articles 166 et 167 AUPC selon que ces deniers à partager entre les créanciers proviennent de la réalisation d'un bien immeuble ou meuble du débiteur.

Les titulaires des créances de salaire contre la masse sont aussi dits créanciers de la masse249et font partie de la masse. Mais l'appellation « créanciers contre la masse » est plus conforme à l'article 117 AUPC qui définit les créances contre la masse comme « toutes les dettes nées régulièrement, après la décision d'ouverture, de la continuation de l'activité et de toute activité régulière du débiteur ou du syndic.

Il s'agit donc de toutes les créances nées après le jugement déclaratif de cessation des paiements du débiteur et durant la période allant jusqu'à la clôture de la liquidation des biens, date à laquelle le débiteur et les créanciers reprennent leur liberté.

En outre, il ne faut pas perdre de vue que certains créanciers, dont les travailleurs, peuvent figurer dans la procédure collective à deux titres : d'une part créanciers dans la masse pour les salaires exigibles antérieurs au jugement d'ouverture et d'autre part, créanciers contre la masse pour les salaires nés après cette décision.

Après toutes les procédures ci-haut détaillées, la liquidation des biens prend fin. Les créanciers vont être totalement désintéressés s'il n'y a pas insuffisance d'actif. Par la même occasion, le syndic, en présence du débiteur, rend ses comptes au juge-commissaire qui, par procès verbal, constate la fin des opérations. Le procès verbal est communiqué au tribunal qui prononce la clôture de la liquidation des biens et tranche, par la même occasion, les contestations éventuelles. L'union est donc dissoute de plein droit et les créanciers recouvrent l'exercice individuel de leurs actions ; et par-dessus tout, la société disparaît absolument.

249 Art. 166-4° et 167-7° AUPC.

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CONCLUSION

La disparition de la société commerciale est une réalité certaine et parfois inévitable. Sans nul doute, cet avènement a toujours un effet, positif ou négatif, sur les travailleurs de la société et sur leurs contrats de travail.

Pendant cette période généralement de crise pour les travailleurs, ces derniers s'interrogent souvent sur le sort de leurs contrats de travail et sur leurs créances de salaire, parce qu'ils ne sont pas toujours certain de pouvoir faire valoir leurs droits, étant donné par ailleurs que les licenciements s'avèrent indispensables. Cependant, il est évident qu'ils sont reconnus comme créanciers privilégiés de la société, et bénéficient par conséquent d'une protection légale spéciale.

Au cours de nos développements, nous avons démontré que l'AUSCGIE et l'AUPC réglementent le problème de disparition des sociétés et tout ce qu'elle implique, tout en prévoyant les règles à suivre selon qu'il s'agit de la dissolution, de la liquidation ou de la procédure collective de liquidation des biens. Aussi, ils donnent des solutions considérables quant au traitement des créances de salaire.

S'agissant de la dissolution, bien qu'elle entraîne la mise en liquidation de la société, elle maintient cependant sa personnalité morale pour les besoins de la liquidation. Les travailleurs peuvent être licenciés pour motif économique si besoin est ; les associés de leur côté perdent le droit de représenter la société, au profit du liquidateur, nommé par eux-mêmes ou par le tribunal. C'est le liquidateur qui est de payer les créanciers ; raison pour laquelle les travailleurs pourront avoir une action sur lui pour le paiement de leur créance de salaire.

Quant à la liquidation, cette dernière éteint définitivement la personnalité morale de la société. Le liquidateur reste l'acteur principal dans cette étape et est chargé d'un bon nombre de devoirs parmi lesquels la réalisation de l'actif de la société et le désintéressement des créanciers. Une fois la liquidation clôturée, et s'il existe encore des réclamations, les travailleurs ne peuvent plus s'adresser à la société car celle-ci n'existe plus. Ils auront dès lors une action directe contre les associés. En outre, on ne peut parler de contrat de travail en cours à cette étape.

Dans la procédure collective de liquidation des biens, laquelle est conditionnée par une cessation des paiements avérée et insurmontable, le jugement ordonnant cette liquidation prévoit des normes à suivre pour mieux désintéresser les créanciers. Pour ce faire, il groupe les créanciers en état d'union et nomme des organes pouvant mener à bien cette procédure, les associés ayant perdu le droit d'engager la société la société. Ces organes sont le syndic, le juge-commissaire et éventuellement les contrôleurs. Le syndic est

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chargé de réaliser l'actif, d'apurer le passif et de désintéresser les créanciers suivant l'ordre des paiements établi par la loi. Les travailleurs ont, dans cette procédure, un grand rôle à jouer, notamment en tant que contrôleurs. Ils bénéficient aussi du privilège général des salaires, mais n'échappent pas au licenciement pour motif économique initié par le syndic.

Les règles légales données semblent parfaites pour trouver des solutions aux problèmes survenant dans cette matière. Cependant, dans la pratique, l'insatisfaction de l'une ou de l'autre partie est toujours au rendezvous. Il en résulte que la cause demeure le non-respect des prescriptions légales. D'où l'augmentation des litiges en la matière devant les cours et tribunaux.

Qu'à cela ne tienne, le moins que l'on puisse dire est que les travailleurs nécessitent une protection particulière lorsque la société est en voie de disparition, étant donné qu'ils constituent la partie économiquement faible. C'est pourquoi, en vue d'une amélioration future de la marche des procédures menant à la disparition de la société sus évoquées et d'une protection efficace des intérêts des travailleurs ainsi que ceux de la société en disparition, nous faisons des suggestions et des recommandations suivantes :

1. Pour la protection des droits des travailleurs congolais, la législation congolaise en matière du travail devra prévoir un système de garantie de salaire en cas des procédures collectives par des organismes efficaces à l'instar de l'AGS en France.250

2. Etant donnée la difficulté trouvée dans la conciliation de la notion de super privilège251 avec le droit congolais qui, non seulement ne la distingue pas du privilège, mais aussi ne la prévoit même pas ; il est d'une importance capitale pour le législateur OHADA d'une part d'envisager une interprétation en la matière, et pour le législateur congolais d'autre part d'envisager une adaptation en vue d'une application aisée.

3. Dans la procédure de liquidation des biens, le droit OHADA devrait prévoir la représentation de la société en liquidation par un autre organe à côté du syndic en vue d'éviter un conflit de fonctions dans le chef du syndic. En effet, c'est seul le syndic qui est chargé de représenter en même temps la masse des créanciers, le débiteur (la société), et le tribunal. On ne voit pas comment les

250 La loi française n°73-1194 du 27 décembre 1973 instaure un système de règlement des créances résultant du contrat de travail en cas de procédure collective de l'employeur. Ce régime « d'assurance » est géré par l'association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés, appelée « AGS » (Assurance Garantie des salaires). Cet organisme prend en charge certaines créances que l'employeur n'est pas en mesure de régler sur les premiers fonds disponibles de l'entreprise, après ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, de liquidation des biens ou sous certaines conditions d'une procédure de sauvegarde. C'est un organisme patronal fondé sur la solidarité interprofessionnelle des employeurs et financé par leurs cotisations. Elle garantit le paiement des sommes dues aux salariés dans les meilleurs délais, conformément aux conditions fixées par le code du travail français.

251 Le droit OHADA lui-même n'a ni défini cette notion ni prévue les modalités de sa mise en pratique.

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droits propres de la société en disparition pourraient être mis en oeuvre et comment ses intérêts pourraient être protégés (par exemple une action en recours contre la décision du syndic ou du juge-commissaire). Il est donc inconcevable que le syndic soutienne lui-même deux actions contradictoires ou deux intérêts opposés.

4. Le droit du Travail congolais doit être revu, enrichi et adapté à la vision du droit OHADA, notamment dans les matières ayant trait aux procédures collectives d'apurement du passif, car ces matières impliquent le sort et le rôle des travailleurs face à leur débiteur en difficulté ou face à une société menacée de disparition et ne sont presque pas abordées par le législateur congolais en matière du travail.

Il nous est impérieux de signaler enfin que nous n'avons pas la prétention d'affirmer que notre étude est complète et exhaustive. Nous osons croire qu'elle a certainement ouvert d'autres champs de recherche qui nous compléterons.

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BIBLIOGRAPHIE

I. TEXTES LEGAUX

1. Acte uniforme relatif au Droit des sociétés commerciales et du GIE, in Journal officiel OHADA, n° spécial du 04 février 2014.

2. Acte uniforme du 15 décembre 2010 portant organisation des sûretés, in Journal officiel OHADA, n°22 du 15 février 2011.

3. Acte uniforme du 10 avril 1998 portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, in Journal officiel OHADA, n° 07 du 1er juillet 1998, p. 1 et s.

4. Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail, in Journal officiel de la RDC, 43ème année, n° spécial du 25 octobre 2002.

II. JURISPRUDENCE

1. Cour d'appel de Dakar, chambre civile et commerciale, Arrêt n° 192 du 18 février 2010 ; Mr X c/ société A4 CENTER, in OHADA, Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2012, p. 1117.

2. Cour d'appel de Bobo-Dioulasso, chambre commerciale, Arrêt n° 10/09 du 10 juin 2009 ; UTB, SAWADOGO KOMYABA et autres c/ BOKOUM SAMBA Amadou ; Ohada.com/Ohadata J-10-117.

3. CCJA, Arrêt n° 039/2008 du 17 juillet 2008 ; Abdoulaye BALDE et autres c/ Boubacar Alphodio BAH, in OHADA, Code bleu, p. 198.

4. Tribunal de Commerce de Bamako, Jugement n° 179 du 26 avril 2006 ; société AIR-MALI S.A, in OHADA, Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2012, p. 1272.

5. Cour d'appel d'Abidjan, Arrêt n° 1048 du 20 juillet 2001 ; Société S.I Flor Tropiques c/ M. Jean DELAURNEY ; Ohada.com/Ohadata J-04-103.

6. Tribunal de 1ère Instance d'Abidjan, Jugement n° 80 du 12 avril 2001 ; NIAYE Aimé DESSEROUIN FERNANDE c/ Nicole GOMES épouse Lemaître ; in Ecodroit n° 10, avril 2002, p. 79 ( Ohada.com/Ohadata J-02-96).

7. Tribunal de 1ère Instance de Libreville, Jugement n°11/2000-2001 du 12 mars 2001 ; Mr X c/ Société OGAR, in OHADA, Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope, p. 1176.

8. Tribunal de 1ère Instance de Niamey, Jugement civil n° 027 du 20 janvier 1999 ; MOUTARI MACAM SOULEY c/ SEEF Niger ; Ohada.com/Ohadata J-0474.

9. Cour suprême du Cameroun, Arrêt n° 85 du 07 juin 1973, in Revue camerounaise de Droit, n° 09, p. 62.

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III. DOCTRINE

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2. ALISSOUTIN O.K., Principe, objectifs et pratique du commissariat aux comptes : cas du « Carder Atlantique Littoral », CESAG, 2004, 77pages.

3. CAMERLYNCK G.H et LYON CAEN G., Droit du travail, 8ème édition, Dalloz, Paris, 1976, 553 pages.

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5. DIEYE A., Le régime juridique des sociétés commerciales et du GIE dans l'espace OHADA, 4ème édition, Cabinet Aziz DIEYE, Dakar, 2014, 388 pages.

6. DUPLAT J.L, « Les services des enquêtes commerciales des tribunaux de commerce », in L'Entreprise en difficulté, Editions Jeune barreau, 1981, pp. 45-76.

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8. ISSA-SAYEGH J., « Le sort des travailleurs dans les entreprises en difficulté », in Penant, n°870, pp. 46-68 ( Ohada.com/Ohadata D-09-41).

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11. MEUKE B.Y, « Qui représente la société en liquidation dans l'espace OHADA ? » ; Ohada.com/Ohadata D-08-16, pp. 1-6.

12. MUKADI BONYI, Droit du travail, CRDS, Bruxelles, 2008, 741 pages.

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18. SAWADOGO F.M, « Commentaires sur l'AUPC », in OHADA, Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2012, pp. 1121-1302.

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TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION Erreur ! Signet non défini.

CHAPITRE 1er GENERALITES Erreur ! Signet non défini.

SECTION I NOTION DE SOCIETE COMMERCIALE Erreur ! Signet non

défini.

§1 DEFINITION ET NATURE JURIDIQUE Erreur ! Signet non défini.

A. Définition Erreur ! Signet non défini.

B. Nature juridique Erreur ! Signet non défini.

§2 DISTINCTION AVEC LES NOTIONS ET GROUPEMENTS VOISINS Erreur ! Signet non défini.

A. Société et entreprise Erreur ! Signet non défini.

B. Société et association Erreur ! Signet non défini.

C. Société et Groupement d'Intérêt Economique (GIE) Erreur ! Signet non défini.

§3 CONSTITUTION ET FONCTIONNEMENT DE LA SOCIETE .. Erreur ! Signet non défini.

A. Les formalités de constitution Erreur ! Signet non défini.

1. L'établissement des statuts Erreur ! Signet non défini.

2. L'immatriculation Erreur ! Signet non défini.

3. Formalités de publicité Erreur ! Signet non défini.

4. Sanctions d'irrégularité Erreur ! Signet non défini.

B. Le fonctionnement de la société Erreur ! Signet non défini.

1. Les associés Erreur ! Signet non défini.

2. Les dirigeants sociaux Erreur ! Signet non défini.

3. Les commissaires aux comptes Erreur ! Signet non défini.

3. Les salariés Erreur ! Signet non défini.

§4 CLASSIFICATION DES SOCIETES Erreur ! Signet non défini.

A. Classification fondée sur le régime juridique Erreur ! Signet non défini.

1. Sociétés civiles et sociétés commerciales Erreur ! Signet non défini.

2. Sociétés de personnes et sociétés de capitaux Erreur ! Signet non défini.

3. Sociétés personnifiées et sociétés non personnifiées Erreur ! Signet non défini.

B. Classification fondée sur les formes légales des sociétés commerciales .... Erreur ! Signet non défini.

1. La Société en Nom Collectif (SNC) Erreur ! Signet non défini.

2.

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La Société en Commandite Simple (SCS) Erreur ! Signet non défini.

3. La Société à Responsabilité Limitée (SARL) Erreur ! Signet non défini.

4. La Société Anonyme (SA) Erreur ! Signet non défini.

5. La Société par Actions Simplifiée (SAS) Erreur ! Signet non défini.
SECTION II NOTION DE CONTRAT ET DE CONFLIT DE TRAVAIL .. Erreur !

Signet non défini.

§ 1 CONTRAT DE TRAVAIL Erreur ! Signet non défini.

A. Définition Erreur ! Signet non défini.

B. Eléments caractéristiques Erreur ! Signet non défini.

C. Les parties au contrat de travail Erreur ! Signet non défini.

D. Distinction entre contrat de travail et contrats voisins Erreur ! Signet non défini.

§2 CONFLITS DE TRAVAIL Erreur ! Signet non défini.

A. Litiges individuels de travail Erreur ! Signet non défini.

B. Conflit collectif de travail Erreur ! Signet non défini.

§3 CONTRAT EN COURS Erreur ! Signet non défini.

A. Un contrat en cours d'existence Erreur ! Signet non défini.

B. Un contrat en cours d'exécution Erreur ! Signet non défini.
CHAPITRE 2ème IMPACT DE LA DISPARITION DE LA SOCIETE SUR

L'ACTIVITE CONTRACTUELLE Erreur ! Signet non défini.

SECTION 1 LA DISSOLUTION DE LA SOCIETE Erreur ! Signet non défini.

§1 NOTION DE DISSOLUTION Erreur ! Signet non défini.

A. Définition Erreur ! Signet non défini.

B. Causes Erreur ! Signet non défini.

I. Causes communes Erreur ! Signet non défini.

II. Causes particulières Erreur ! Signet non défini.

§2 EFFETS DE LA DISSOLUTION Erreur ! Signet non défini.

A. Sur la société Erreur ! Signet non défini.

B. Sur les tiers Erreur ! Signet non défini.

C. Sur les travailleurs Erreur ! Signet non défini.

SECTION II LA LIQUIDATION DE LA SOCIETE Erreur ! Signet non défini.

§1 NOTION DE LIQUIDATION Erreur ! Signet non défini.

§2 INTERVENTION DU LIQUIDATEUR Erreur ! Signet non défini.

A. Nomination Erreur ! Signet non défini.

B.

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Déroulement des opérations de liquidation Erreur ! Signet non défini.

C. Clôture de la liquidation Erreur ! Signet non défini.

§3 EFFETS DE LA LIQUIDATION Erreur ! Signet non défini.

A. A l' égard de la société Erreur ! Signet non défini.

B. A l' égard des créanciers Erreur ! Signet non défini.

SECTION III LA PROCEDURE COLLECTIVE DE LIQUIDATION DES BIENS

Erreur ! Signet non défini.

§1 CONDITIONS D'OUVERTURE ET MODALITES D'EXECUTION ... Erreur ! Signet non défini.

A. Conditions d'ouverture Erreur ! Signet non défini.

B. Modalités d'exécution Erreur ! Signet non défini.

1°) La décision du tribunal Erreur ! Signet non défini.

2°) Effets du jugement de liquidation des biens Erreur ! Signet non défini.

3°) Solution de la liquidation des biens Erreur ! Signet non défini.

§2 ROLE DES TRAVAILLEURS DANS LA MISE EN OEUVRE DE LA

PROCEDURE DE LIQUIDATION DES BIENS Erreur ! Signet non défini.

A. Rôle des travailleurs dans le déclenchement de la procédure .. Erreur ! Signet non défini.

B. Rôle des travailleurs dans le déroulement de la procédure Erreur ! Signet non
défini.

§3 L'ACTIVITE CONTRACTUELLE FACE A LA PROCEDURE DE

LIQUIDATION DES BIENS Erreur ! Signet non défini.

A. L'exécution des contrats en cours Erreur ! Signet non défini.

B. Le traitement des créances de salaire Erreur ! Signet non défini.

1°) Principe du privilège général des salaires Erreur ! Signet non défini.

2°) L'application du principe du privilège des salaires dans la procédure collective.

Erreur ! Signet non défini.

CONCLUSION Erreur ! Signet non défini.

BIBLIOGRAPHIE Erreur ! Signet non défini.






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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld