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La coopération policière dans la zone CEMAC.

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par Platon Papin DONGMO TIODON
Université de Dschang- CAMEROUN - Master 2 en Droit 2013
  

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Paragraphe 2 : sur le plan juridique

Une révision des textes CEMAC sur la coopération policière doit permettre non seulement de l'opérationnaliser (A), mais aussi de la communautariser véritablement (B).

A. L'opérationnalisation de la coopération policière

Plus d'une dizaine d'années après une amorce de coopération policière dans la CEMAC, il est grand temps de mettre sur pied une coopération policière qui soit atypique et réponde aux besoins spécifiques de la CEMAC en particulier, et de l'Afrique Centrale en général312(*). Pour se faire la coopération policière CEMAC doit revêtir le caractère opérationnel. A titre de rappel, le caractère opérationnel est celui qui permet au Policier d'un Etat d'opérer au-delà de son territoire national, et non d'opérer sur celui-ci (ce territoire), grâce à des informations venues de l'extérieur et qu'il aurait obtenu par voie de coopération313(*). Déjà, l'urgence de la situation face à la criminalité transnationale galopante demande que l'on puisse s'affranchir du volontarisme, intégrer un minimum de contrainte qui puisse conduire les un et les autres à réellement coopérer. En ce sens la collaboration des populations est incontournable et d'une importance fondamentale puisque c'est elles qui paient le prix fort de l'insécurité au quotidien.

La seconde chose à faire et qui nous semble être la plus importante dans le cadre de l'opérationnalisation de la coopération policière, c'est de pouvoir instaurer dans la CEMAC des droits d'observation et de poursuite transfrontalière pour les infractions graves, notamment celles pouvant donner lieu à extradition. Prévu à l'article 40 de la Convention d'Application des Accords de Schengen (CAAS) du 19 Juin 1990, le droit d'observation transfrontalière permet aux agents d'une partie contractante qui, dans le cadre d'une enquête judiciaire observent un suspect sur leur territoire, de poursuivre cette observation sur le territoire d'une autre partie contractante lorsque celle-ci a autorisé l'observation transfrontalière sur la base d'une demande d'entraide judiciaire présentée au préalable. Ceci est l'hypothèse d'une observation normale, et l'originalité de cette mesure est qu'il est prévu que lorsque pour des raisons particulièrement urgentes, l'autorisation préalable de l'autre partie contractante ne peut être demandée, les agents observateurs sont autorisés à continuer au-delà de la frontière l'observation de la personne suspecte. Les agents poursuivants devront immédiatement informer les agents locaux de leur franchissement des frontières et transmettre le plus rapidement leur demande d'observation. L'observation en urgence sera arrêtée dès que la partie contractante sur le territoire de laquelle elle a lieu le demandera suite à l'information du franchissement de sa frontière, à la réception de la demande d'observation, ou encore cinq heures après le franchissement des frontières si l'autorisation n'a pas été obtenue. L'observation normale est possible pour toute infraction passible d'extradition, tandis que l'observation d'urgence ne doit être faite que pour des infractions limitativement énumérées au paragraphe 7 de ce même article 40314(*). La nature de l'observation est aussi définie, et ne peut consister qu'en des filatures et autres prises de vues photographiques qui vraisemblablement permettraient à la coopération policière CEMAC d'être beaucoup plus proactive que réactive315(*).

L'autre innovation majeure de la CAAS, le droit de poursuite transfrontière a été prévu à l'article 41. On peut le définir comme celui qui permet en raison de l'urgence, à des agents d'une partie contractante de poursuivre au-delà de leur frontière, et sans autorisation préalable de l'autorité de l'autre partie contractante sur le territoire de laquelle se déroule la poursuite des personnes ayant participé à la commission de certaines infractions ou ayant été prises en flagrant délit de commission d'une des infractions prévues au paragraphe 4 de cet article 41316(*). La poursuite transfrontalière est aussi prévue pour les infractions passibles d'extradition et lorsque la personne poursuivie ou se trouvant en état d'arrestation provisoire, ou purgeant une peine privative de la liberté s'est évadée. Comme dans le cadre de l'observation, au plus tard au moment du franchissement de la frontière, les agents poursuivants doivent faire appel aux autorités compétentes de la partie contractante sur le territoire de laquelle la poursuite a lieu (le procureur de la République notamment), et la poursuite cessera immédiatement à la demande de celles-ci.

Les droits d'observation et de poursuite transfrontalière sont ouverts aux policiers, aux gendarmes, et aux douaniers. Dans les deux cas les agents étrangers doivent être facilement identifiables, et pouvoir être en mesure de justifier à tout moment de leur qualité officielle. Ils peuvent même emporter leur arme de service, mais ne peuvent s'en servir qu'en cas de légitime défense.

Remarquons toutefois que même en Europe, le souci de préserver la souveraineté des Etats a creusé un fossé assez profond entre ces mesures et leur mise en pratique. Ni l'agent observateur, ni l'agent poursuivant ne peut interpeller la personne mise en cause, ce qui a poussé un auteur à poser la question de savoir « comment faire pour empêcher le fugitif de s'enfuir alors que les agents poursuivants ne peuvent l'interpeller, et les seuls à pouvoir le faire c'est-à-dire les agents nationaux, ne sont pas encore parvenus sur les lieux ? »317(*). Malgré l'esquisse de solution donnée au paragraphe 2 (b) de l'article 41 de la CAAS318(*), l'application de cette mesure demeure difficile. De plus, la poursuite ne doit s'accomplir que par voie terrestre, et non aérienne, maritime ou fluviale. En outre, compte tenu du degré de limitation de souveraineté qu'elle entraine, la possibilité a été donnée à chaque Etat de l'espace Schengen de définir à sa convenance les limites spatio-temporelles du droit de poursuite transfrontalière sur son territoire. A titre d'exemple l'Allemagne a autorisé un droit de poursuite transfrontalière sans limite avec la Belgique, la France, le Luxembourg et les Pays-Bas. La Belgique a autorisé l'Allemagne et la France à exercer un droit de poursuite sans limite, et elle a accordé à l'Allemagne un droit d'interpellation qu'elle a refusé à la France. L'Espagne a autorisé la France à effectuer un droit de poursuite dans un rayon de 10 km à partir de la frontière et ce sans droit d'interpellation319(*).

La mise en oeuvre concrète de ces mesures, qui à notre humble avis sera très difficile, nous conduit à adhérer aux propositions de la doctrine d'après lesquelles en transposant les règles pour l'opérationnalisation de la coopération policière, l'on devrait compte tenir du contexte particulier la CEMAC.

Ainsi, compte tenu de l'environnement géographique CEMAC, au delà de la voie terrestre, la poursuite transfrontalière devrait pouvoir s'y faire aussi par voie aérienne, maritime et même fluviale320(*). De même, il serait souhaitable que la poursuite transfrontalière puisse se faire sans limites sur l'ensemble du territoire communautaire sans tenir compte d'une quelconque limitation de kilomètres qui semble préjudiciable à l'efficacité de la poursuite321(*), ce d'autant plus que sous le feu de l'action l'attention des policiers n'est focalisée que sur la personne poursuivie et non sur la mesure du nombre de kilomètres qu'ils sont autorisés à parcourir. N'oublions pas cependant que la mise en oeuvre efficace de ces mesures passe aussi par une meilleure fixation et un meilleur équipement des postes de police chargés du contrôle et de la surveillance des frontières322(*), et surtout par l'insertion dans les textes de la notion de responsabilité présentée ci-dessus323(*).

Par ailleurs, il serait raisonnable à notre humble avis, d'élargir aux autres infractions transnationales ci-dessus présentées324(*), la création d'une banque de données communes telles que celle prévu à l'article 4 paragraphe 2 de la convention relative à la lutte contre le terrorisme en Afrique Centrale ; laquelle banque de données communes dans le cadre du CCPAC sert à ficher les personnes poursuivies pour terrorisme, les groupes, les mouvements et les organisations à caractère terroriste.

L'ensemble des mesures de ce processus vise à faire passer la coopération policière CEMAC du type I (information et communication) dans laquelle elle se trouve, au type III (action) qui revêt un caractère opérationnel325(*). Remarquons que même dans le type I qui est protecteur des souverainetés, la coopération n'est pas plus aisée entre les Etats de la CEMAC. Déjà les polices nationales de chaque Etat de la CEMAC ne feraient pas montre d'une grande confiance des une envers les autres326(*), mais en plus l'un des derniers nés du système de télécommunication de l'OIPC, le système I/24/7 (ou X 400)327(*)ne serait pas encore installé et généralisé dans tous les bureaux centraux nationaux d'Afrique Centrale328(*).

En outre il est aussi possible pour les Etats de la CEMAC d'accélérer en quelque sorte l'opérationnalisation de la coopération policière en renforçant entre eux les accords bilatéraux, même s'il est plus souhaitable de voir une coopération véritablement communautaire.

* 312 La référence ici concerne les deux autres membres du CCPAC non membres de la CEMAC que sont la RDC et Sao Tomé et principe.

* 313 Voir supra, 1ère Partie, chapitre I, section 2.

* 314 Les infractions citées au paragraphe 7 de l'article 40 de la CAAS sont : L'assassinat, le meurtre, le viol, l'incendie volontaire, le faux monnayage ; le vol et recel aggravés ; l'extorsion ; l'enlèvement et la prise d'otage ; le trafic d'êtres humains ; le trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes ; les infractions aux dispositions légales d'armes et d'explosifs, la destruction par explosifs et le transport illicite des déchets toxiques et nuisibles.

* 315 Pour plus de détails, voir l'article 40 de la CAAS.

* 316 Il s'agit en plus des mêmes infractions que celles citées au paragraphe 7 de l'article 40, du délit de fuite à la suite d'un accident ayant entrainé la mort ou des blessures graves.

* 317 PASSO SOMBANG (E.), op. cit., p. 272.

* 318 Si aucune demande d'interrompre la poursuite n'est formulée et que les autorités légalement compétentes ne peuvent intervenir assez rapidement, les agents poursuivants pourront interpeller la personne poursuivie, jusqu'à ce que les agents de la partie contractante sur le territoire de laquelle la poursuite a lieu qui devront être informés sans délai, puisse établir son identité ou procéder à son arrestation.

* 319 SABATIER (M.), op. cit., p. 147.

* 320 PASSO SOMBANG (E.), op. cit., p. 270.

* 321 Ibid., p. 273.

* 322 Voir MESSA TCHOUNDA (L.), L'insécurité transfrontalière comme cause potentielle de différends entre les pays : cas de la frontière entre le Cameroun et le Congo- Brazzaville, Rapport de stage en vue de l'obtention d'un DESS en sécurité, Université de Yaoundé II SOA, 2006, p. 27.

L'exemple de la mauvaise localisation des postes frontaliers qu'elle nous donne est pris dans la zone frontalière entre le Cameroun et le Congo-Brazzaville. Jusqu'en 2004 le poste frontalier camerounais était situé dans le village BANANA, à 30 kilomètres du fleuve NGOKO, qui est pourtant la frontière naturelle entre les deux pays. On avait donc un «no man's land » de 30 kilomètres en partant de la frontière.

* 323 Voir supra, ce Chapitre, Section 1.

* 324 Voir supra, 2e Partie, Chapitre I, Section 1.

* 325 Voir supra, 1ere partie, chapitre I section 1.

* 326 ZAKARI (Y.A.), La coopération policière internationale face aux nouvelles menaces, Mémoire en vue de l'obtention du diplôme de commissaire de police, ENSP Yaoundé, promotion 2001-2003, p. 44.

* 327 Le système de télécommunication X-400 ou I-24/7 permet d'assurer 24h/24 l'échange d'informations entre les différents bureaux centraux nationaux, le bureau régional et le secrétariat général de l'OIPC.

* 328 ZAKARI (Y.A.), op. cit., p. 46 ; MEMBILE DIMALE, op. cit., p. 41.

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