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Production durable du cacao en Côte d'Ivoire.

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par Sika Gautier ADOMON
Université Jean Moulin Lyon 3 - DU 2014
  

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INTRODUCTION GENERALE

Plusieurs pays en développement tirent leurs ressources essentiellement des recettes d'exportation d'un petit nombre de produits agricoles de base, parfois d'un seul. Cette concentration rend ces pays très vulnérables aux aléas du marché ou aux conditions climatiques 1(*). Selon les statistiques de l'Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture (FAO), pas moins de 43 pays en développement dépendent d'un seul produit, représentant plus de 20% des recettes totales des exportations de marchandises.

La Côte d'Ivoire, pays d'Afrique subsaharienne n'échappe, malheureusement pas à cette situation. Pays essentiellement agricole, la Côte d'Ivoire produit et exporte des cultures de rente dont les principaux sont le Cacao, le Café, le palmier à huile, l'hévéa, la Banane et le Coton2(*). Depuis l'indépendance jusqu'à nos jours, l'économie nationale du pays a toujours reposé sur l'agriculture. En effet, le secteur agricole contribue à hauteur de 22% de la formation du PIB (Produit Intérieur Brut) et constitue la source de revenus de 2/3 des ménages et procure environ 75% des recettes d'exportation non pétrolières, (PND 2012-2015). Pour son développement économique, les autorités ont opté pour une politique de libéralisme avec comme secteur prioritaire le secteur agricole .Ce choix est motivé par plusieurs facteurs, notamment la situation géographique, la végétation et l'orientation politique du pays, adoptée au lendemain de l'indépendance.

Située en Afrique de l'Ouest, la Côte d'Ivoire occupe une superficie de 322 462 Km2. Elle a une frontière commune à l'Est avec le Ghana, au Nord, le Burkina Faso et le Mali, et à l'Ouest, la Guinée et le Libéria. Au sud, la Côte d'Ivoire possède une façade maritime de 550 km de côte ouverte sur l'océan Atlantique dans lequel se jettent quatre principaux fleuves qui irriguent le territoire national selon les superficies de plan d'eau suivantes: le Comoé (57.300 km² des 78.000) ; le Bandama (100% des 99.700 km²) ; le Sassandra (67.000 km² des 75.000) ; et le Cavally (16.000 km² des 30.000)3(*). Par ailleurs la Volta noire irrigue le territoire sur 12.500 km², le Niger 22.600 km². Plusieurs bassins intérieurs situés au sud du pays irriguent le territoire sur 47.600 km² de la zone côtière. Le couvert forestier estimé à 16 millions d'hectares dans les années 60, est évalué à 3,3 millions d'hectares5(*).

A son accession à l'indépendance, le 7 août 1960, la Côte d'Ivoire a fait le choix du libéralisme économique et fait de l'agriculture, le pilier fondamental de son développement. Ainsi, les autorités ont mis en place une politique de prix rémunérateurs et attractifs qui incitait à la production, et elles ont poursuit la politique de migration de main d'oeuvre de l'époque coloniale pour favoriser l'expansion des exploitations agricoles, notamment celle du binôme café cacao.

Le modèle de développement adopté par la Côte d'Ivoire était donc caractérisé par son extraversion et sa dépendance par rapport à la main d'oeuvre. Il était basé sur l'exploitation des ressources naturelles, c'est-à-dire sur le défrichement massif et ininterrompu de forêts par des exploitants migrants, ivoiriens ou non, et pratiquant une agriculture extensive6(*).

Ainsi, de 1960 à 1980, l'économie ivoirienne a enregistré une croissance moyenne de 7 % par an, en termes réels sans apparition de déséquilibres majeurs. Cette performance a été induite par un environnement extérieur favorable c'est-à-dire la forte hausse des cours mondiaux du café et du cacao et par le choix d'options fondamentales telles que l'ouverture sur l'extérieur et l'appartenance à la zone franc.7(*) Malgré un effort de diversification des spéculations agricoles, la Côte d'Ivoire reste toujours dépendante du café et du cacao qui représentent une part importante des recettes d'exportation. En 1997, le binôme café-cacao a fourni environ 17 % du Produit Intérieur Brut (PIB) et 38,6 % des recettes d'exportation (KOUADIO Jean Marie, « et alii »)

Le cacao, objet de notre étude, a largement tiré profit de ces facteurs, puisque du cinquième rang mondial au lendemain de l'indépendance, avec une production annuelle de 200 000 milles tonne par an, la Côte d'Ivoire est devenue depuis 1977, le premier producteur mondial avec plus d'un million de tonne par an8(*). De 2011 à 2012, les productions cacaoyères étaient respectivement de 1,511 million de tonne et 1,410 million tonne, soit environ 35% de la production mondiale9(*). La Côte d'Ivoire a continué de maintenir son rang de premier producteur malgré une décennie de crise socio politique et militaire (2002 à 2011).

Par ailleurs, au début des années 80, l'économie ivoirienne est secouée par une crise majeure du secteur du cacao, due essentiellement à la rareté des facteurs de production, à la prolifération des ravageurs de cultures, à l'apparition d'une nouvelle maladie du cacaoyer (le swollen shoot), à la dégradation des conditions climatiques ( baisse de la pluviométrie) et de commercialisation, aux conflits fonciers ainsi qu'à la baisse des prix aux producteurs (TANO M). Ainsi, la crise cacaoyère a affecté les fondements sociaux, environnementaux, économiques et politiques de l'économie ivoirienne.

François Ruf, dans son livre, « Booms et crises du cacao, 1995 » énonce qu' « un pays qui a profité 15 ou 20 ans plus tôt de la flambée du cours international, doit s'attaquer aux difficultés techniques (liées au vieillissement des vergers et à l'épuisement de la forêt) et sociales (vieillissement des planteurs et conflits fonciers) et aux difficultés économiques et politiques de l'effondrement des cours ».

Pour sa part M. Maxime TANO fait le constat suivant : « Les plants de cacao commencent à produire après 4 ou 5 ans, avec des rendements maximums entre 10 et 15 ans de vie, et des rendements déclinants après 15 à 20 ans. Cependant, les nouveaux hybrides de cacao ont tendance à porter des fruits plus tôt, sachant qu'ils vieillissent plus vite. Actuellement, les plantations ivoiriennes vieillissent et exigent l'apport d'engrais afin de maintenir des rendements élevés, augmentant ainsi les coûts de production. Par ailleurs, les jeunes plantations requièrent des traitements chimiques réguliers pour se protéger contre la maladie du foreur de cabosse (ou pourriture brune) et les ravageurs ».

Selon les observations empiriques et les statistiques disponibles, de l'Organisation Internationale du Café et du Cacao (ICCO), « la demande mondiale de cacao est susceptible d'augmenter de 30 % au cours des dix prochaines années, créant un déficit de production de 1 million de tonnes d'ici 2020, la Côte d'Ivoire est mal placée pour capitaliser sur cette croissance de la demande ». En effet, le Ghana, longtemps leader mondial, a entamé une chute longue de sa production à partir du milieu des années 60, malgré la bonne tenue des cours sur le marché mondial. Cette chute de la production ghanéenne est due au vieillissement des vergers, à l'épuisement de la forêt, à la maladie du swollen shoot et à la chute de sa monnaie, le cedi. Parallèlement, la Côte d'Ivoire en a profité pour lui ravir cette place, à partir de 1977.10(*)

Les mêmes causes produisant les mêmes effets (toute chose étant égal à par ailleurs), une chute de la production ivoirienne à la longue n'est pas à exclure. Car, la plupart des cacaoyers en Côte d'Ivoire sont âgés et présentent une productivité déclinante. La dernière grande vague d'investissement dans le renouvellement du stock d'arbres remonte au début des années 1980.

Face à cette situation, la Côte d'Ivoire peut-elle maintenir son niveau de production et son rang mondial dans les années à venir ?

Cette interrogation revêt d'un caractère fondamental en ce sens que la cacaoculture occupe une place prépondérante dans l'économie du pays. En effet, au niveau national, l'économie cacaoyère fournit environ 40 % de recettes d'exportation, et contribue pour 10 % à la formation du Produit Intérieur Brut (PIB). Au plan social, ce sont environ 600.000 chefs d'exploitation qui animent l'appareil de production, faisant vivre environ 6.000.000 de personnes des revenus du cacao11(*).

La combinaison de ces deux constats, guide le pays dans sa quête permanente d'une production cacaoyère durable, surtout dans le contexte d'une économie mondiale de plus en plus libéralisée et concurrentielle. D'où l'importance de notre thème de mémoire « Les défis de la production durable du cacao en Côte d'Ivoire ». Autrement dit, devant la montée en puissance des autres pays producteurs de cacao (Ghana et Indonésie) et la crainte de voir sa production chutée, à quelles conditions, (de production, redistribution de revenus aux producteurs et de commercialisation), le cacao pourra-t-il continuer à participer au rayonnement économique de la Côte d'Ivoire ?

Répondre à cette interrogation amène à mieux appréhender la notion de « défi ». Selon la définition adoptée par l'académie française en 1986, un défi est un « obstacle ou ensemble d'obstacles qu'il faut franchir pour atteindre un certain objectif ».

Cette définition permet une meilleure compréhension de la problématique ainsi posée. Car, pour que le cacao continue de participer au rayonnement économique de la Côte d'Ivoire, plusieurs défis s'imposent au secteur qu'il va falloir franchir. Notamment avoir une production de meilleure qualité, accorder un prix rémunérateur aux producteurs, garantir une stabilité sociale et politique et réduire la dépendance du pays vis-à-vis de l'extérieur. Ces défis renvoient donc à la notion de développement durable. Le Développement Durable, se définit, selon le rapport « notre avenir à tous » de Madame Harlem Brundtland, « comme étant un développement qui répond aux besoins du présent, sans pour autant compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs »12(*). Le développement durable est présenté comme une rupture, plus ou moins nette, avec d'autres modes de développement qui ont conduit, et mènent encore, à des dégâts sociaux et écologiques préoccupants, tant à l'échelle mondiale, que locale. Pour être durable, le développement doit réunir trois éléments majeurs : l'équité, la préservation de l'environnement et l'efficacité économique, auxquels s'ajoutent la culture et la bonne gouvernance. Cette notion rapportée à la production du cacao, dans le cadre de notre mémoire, signifie « avoir un cacao de meilleure qualité, qui respecte l'environnement et la biodiversité et qui accorde une grande attention aux conditions de travail et de rémunération des agriculteurs » (Maxime TANO).

Dans ce contexte de forte dépendance agricole, de diversification des cultures, d'information non parfaite et de libéralisation de la filière, le développement durable des cultures pérennes, notamment le cacao, apparaît comme un point crucial pour la survie de l'Etat et de toutes parties impliquées.

De ce point de vue, l'Etat de Côte d'Ivoire, les firmes internationales, les exportateurs et les industriels ne peuvent rester insensibles quant aux contraintes qui pourraient remettre en cause la pérennité du cacao et menacer la survie des producteurs.

A ce stade, le résultat de notre mémoire est de contribuer de façon modeste au débat sur les étapes et conditions d'un « cacao durable » en Côte d'Ivoire.

La première partie de notre travail vise à faire un état des lieux du succès de la production du cacao en Côte d'Ivoire jusqu'à son déclin dans les années 80 et sa situation actuelle. Elle aborde dans un premier chapitre : les déterminants de l'évolution de la cacaoculture et dans un second chapitre ; les facteurs qui ont conduit à la crise du cacao sans oublier la décennie de crise traversée par la Côte d'Ivoire.

La deuxième partie identifie les étapes à franchir si le pays veut atteindre une production durable du cacao. Dans le premier chapitre les étapes d'ordre environnemental et social sont évoquées et dans le deuxième chapitre, les facteurs économiques et politiques.

* 1 FAO « situation des marchés des produits agricoles, 2004 » http://www.fao.org/docrep/007/y5419f/y5419f04.htm, page consultée le 02/06/14

* 2 PND (Plan National de Développement 2012-2015, de la Côte d'Ivoire) « Diagnostic politique, économique, social et culturel, page 40 », Ministère d'état, Ministère du Plan et du Développement

* 34 INS (Institut National de la Statistique, RGPH 1998)

* 5 Rapport national sur la diversité biologique de Côte d'Ivoire, Février 1998  Ministère de l'environnement et de la forêt, 1998.

* 6 TANO (Maxime) thèse de doctorat, « crise cacaoyère et stratégies des producteurs de la S/P de Méagui, sud-ouest ivoirien »Université de Toulouse 2,30 avril 2012

* 7 KOUADIO (Jean Marie) « et alii » Rapport d'enquête, « production et offre du cacao et café en Côte d'Ivoire », Octobre 2002

* 8 RUF (François) « Booms et crises du cacao », les vertiges de l'or brun, édition KARTHALA, Paris, 1995, p 459

* 9 AGRITRADE, « les réformes du secteur du cacao en Côte d'Ivoire, 2011-2012 », Notes de synthèse, mises à jour octobre 2012 sur www.agritrade.cta.int, page consultée le 30/05/14

* 10 HANAK Ellen « et alii » « les champs du cacao : un défi de compétitivité Afrique-Asie » éditions KARTHALA, 2000, P 207

* 11 Rapport sur l'état et le devenir de la population en Côte d'Ivoire, REPCI 2006, Ministère d'état, Ministère du Plan et du Développement

* 12 Rapport de la Commission mondiale sur l'environnement et le développement des Nations Unies, publié en 1987

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