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Systemes d'exploitation de la cuvette nord du lac Tchad: cas du maraichage sur le site de Kimé Gana dans la commune urbaine de N'Guigmi (Niger)


par Hamissou Achahabou
Universite de Diffa - Master en Evaluation Environnementale et Developpement durable 2019
  

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CHAPITRE I: CADRE THEORIQUE ET PRESENTATION DU MILIEU

D'ETUDE

I. CADRE THEORIQUE

1.1 Revue bibliographique

La revue de la littérature permet de faire un état des connaissances sur les rôles et contributions des cultures maraîchères en vue de favoriser la réduction des vulnérabilités des populations victimes des crises alimentaires, des aléas climatiques et de la crise sécuritaire qui gangrènent et freinent le développement socio-économique de certaines localités des pays du bassin du lac Tchad.

Les autorités estiment à environ 280 000 personnes le nombre total des déplacés à la suite de la crise sécuritaire née des attaques de Boko Haram depuis 2013 (OCHA, 2016).

Cette situation a créé de nouveaux besoins dans tous les secteurs. Ainsi les activités maraîchères sont une voie pour permettre aux populations et surtout encourager chez les jeunes désoeuvrés le développement d'attitudes et de comportements socialement adéquats, vu l'insécurité, le chômage, le vol et la criminalité dont fait cas le bassin du lac Tchad aujourd'hui.

Le lac Tchad constitue une figure emblématique de la menace du changement climatique et de ses enjeux dans les pays pauvres, ce qui explique l'intérêt qu'il suscite dans le cadre de la COP 21. La superficie de ce lac est en effet très variable, du fait notamment de sa faible profondeur et de son exposition à une forte évaporation, liée à sa proximité du Sahara (CBLT, 2015a).

Au sud du lac, depuis les sècheresses des années 1970 et 1980, les terres inondées annuellement sont mises en culture au fur et à mesure du retrait des eaux sur de grandes superficies. Fertilisées par la crue on y cultive pratiquement toute la gamme des plantes vivrières du bassin tchadien (sauf le sorgho de décrue, ou berbéré). Maïs et maraîchage dominent, avec des rendements généralement élevés (Magrin et al, 2010). Les cultures maraichères hormis les revenus monétaires rapportés contribuent au frein de l'émigration saisonnière des jeunes vers les grandes villes voisines, diminuant le sous-emploi en saison sèche et retiennent les jeunes du terroir à ne pas regagner le banditisme et les mouvements armés de quelque nature soient-ils. L'autosuffisance alimentaire est donc au coeur des stratégies de développement du pays. L'irrigation est considérée comme le meilleur moyen d'augmenter la production agricole et de réduire sa vulnérabilité face à la variabilité climatique (Nazoumou et al, 2016). Pour pallier à cet obstacle qui perturbe les populations et surtout les jeunes, un certain nombre d'objectifs doivent être pris en compte à savoir :

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? Favoriser une meilleure perception des jeunes par la communauté ;

? Les responsabiliser et les conscientiser aux rôles qu'ils peuvent jouer dans la communauté ;

? Lutter contre la pauvreté par une participation communautaire active dans les activités génératrices de revenus, notamment les cultures maraichères ;

Selon Awal (2010), les revenus tirés de la vente de la production des cultures irriguées font l'objet de différents types d'utilisation dont entre autre la satisfaction des besoins alimentaire, vestimentaire, sanitaire et scolaire de la famille. Les revenus sont utilisés pour faire face aux obligations sociales telles que le mariage, l'achat d'animaux pour embouche, l'achat du matériel agricole et d'intrants agricoles. Abdourahamani (2011), montre que les principales espèces en sont le poivron (Capsicum annuum), le riz (Oriza sativa), l'oseille (Rumex acetosa), le gombo (Abelmoschus esculentus) dont l'essentiel est destiné à la vente. La production et la commercialisation des produits de l'agriculture de décrue profitent aussi à d'autres populations et les revenus générés sont susceptibles de contribuer à la sécurité alimentaire de leur ménage : c'est le cas des forgerons, des vendeurs de sacs, des produits phytosanitaires et des éleveurs.

1.2 Définition des concepts et mots clés

Pour mieux cerner et appréhender ce thème d'étude, il est important de définir les concepts clés qu'il comporte. Dans cette logique, il est nécessaire de définir ici les concepts clés qui seront abordés dans ce thème.

La culture maraîchère est une expression constituée des concepts culture et maraîchère. Pour le premier ; la Culture est l'action ou manière de cultiver la terre ou certaines plantes ; c'est la manière d'exploiter certaines productions naturelles et le second maraîchère qui est la culture de légume, de certains fruits, de certains fines herbes et des fleurs à usage alimentaire, de manière professionnelle, c'est-à-dire dans le but d'en faire un profit ou simplement d'en vivre, ce qui le distingue du jardinage (Ndjekornom, 2015).

Les cultures maraîchères sont des plantes annuelles ou pérennes, arbustives ou herbacées entretenues dans un espace agraire délimité généralement exploité de manière intensive et dont la récolte est vendue en plus ou moins grande quantité et fournit des ingrédients qui participent à la composition des sauces ou des salades (Austier, 1994).

Maraîchage : Il est appelé aussi culture maraîchère, c'est une activité qui vise à produire des légumes, des fruits, des feuilles ou herbes de manière professionnelle dans le but d'en tirer des profits et subvenir à certains besoins alimentaires.

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Refugiés: Il s'agit de personnes qui sont entrées sur le territoire d'un autre état lors d'un afflux massif de personnes fuyant leur pays d'origine, du fait d'un conflit ou d'une autre catastrophe.

Déplacé interne : On applique le terme de déplacé interne à une personne ou une population lorsque les conflits et les situations de tensions politiques ou économiques occasionnent des mouvements d'une population fuyant les persécutions ou la violence dans leur propre pays, sans franchir la frontière d'un autre pays. Dans le cadre de notre étude, il s'agit des populations riveraines victimes des violences du groupe Boko Haram dans les villages du bassin lac Tchad et celles vivant le long de la Komadougou qui ont été relocalisées vers les zones sécurisées et stables. Ici ce sont des citoyens nigériens qui étaient obligés de quitter leur village.

Population retournée : Ce sont des résidents du pays d'accueil qui vivaient hors de celui-ci et qui y reviennent du fait de l'insécurité (Hamani et al. 2017). Cette population favorise l'amélioration de certaines pratiques culturales par l'apport de nouvelles techniques culturales et participe au développement des activités tertiaires de la région.

Population hôte: Dans le cadre de cette étude le terme désigne une population qui accueille et héberge les populations victimes des violences de la secte Boko Haram, ou celles qui ont été relocalisées dans le cadre des mesures restrictives pour des raisons de sécurité dans la région de Diffa. Hormis l'hébergement, la population hôte octroie des terres cultivables suivant un mode d'acquisition bien défini. Ces activités culturales permettent aux déplacés et retournés de subvenir aux besoins de leurs familles.

Gudun hijira : Il renvoie à une notion d'« immigration », en référence à la fuite des compagnons de Mahomet de La Mecque vers Médine. Mais la notion est plus riche de sens que la « simple » immigration. Elle renvoie en même temps aussi à l'exil, la séparation, la rupture, notamment des liens familiaux et sociaux. Dans la littérature religieuse comme dans la situation de Diffa cette fuite renvoie à l'affirmation d'un modèle sociétal établi sur le modèle d'une communauté de destin. Cette communauté est incarnée par une fraternité et une solidarité envers les plus démunis, solidarité qui repose sur la foi (Hamani et al. 2017). Ces différentes populations ainsi définies sont réunies sous une seule désignation en langue Haoussa : « en gudun hijira ».

Ces populations participent aux développements des activités agricoles et économiques de la région.

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Boko Haram: La secte Boko Haram, dont le nom signifie en langue africaine Haoussa « éducation occidentale est un péché» a été créé en 2003 par un certain Mohamed Yusuf. Boko Haram est un mouvement insurrectionnel et terroriste d'idéologie salafiste djihadiste, originaire du nord-est du Nigeria et ayant pour objectif d'instaurer un califat et d'appliquer la charia. ( https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Boko_Haram, consulté le 02 décembre 2018).

1.3 PRESENTATION DU MILIEU D'ETUDE

Dans cette partie nous allons traiter des aspects physico-naturels notamment la situation

géographique de la zone d'étude, le climat, les ressources en eau le relief, le sol, la végétation, ensuite les aspects démographiques et socio-économiques.

1.3.1 Présentation de la commune urbaine de N'guigmi

Située à environ 130 km du chef-lieu de la région qu'est Diffa, la commune urbaine de N'guigmi est l'une des deux communes que compte le département de N'guigmi. Elles avaient été créées aux termes des lois suivantes : la loi 2001-023 du 10 Août 2001 portant création des circonscriptions administratives et des collectivités territoriales ; et la loi 2002014 du 11 juin 2002 portant création des communes et fixant le nom de leurs chefs-lieux.

Elle est limitée au Nord par la commune rurale de N'gourti, au sud par la commune rurale de Bosso, à l'ouest par la commune rurale de Kabléwa et à l'est par la République du Tchad. Elle couvre une superficie d'environ 39 200 km2 (figure 1).

Figure 1: Carte de la commune de N'guigmi (Réalisation : Achahabou, 2018)

La commune de N'guigmi regorge beaucoup de sites de cultures maraichères à savoir: (i) le site N'guigmi Aéroport d'une superficie de 4 Ha, (ii) le périmètre de Boleram qui a une superficie de 6 Ha ,(iii) le site de Kimé Gana d'une superficie de 11 Ha. Ce dernier est notre site d'étude, il avait accueilli les réfugiés et déplacés en provenance des villages riverains du lac Tchad suite aux exactions de Boko Haram, provoquant ainsi l'arrêt brusque des activités maraîchères à leur arrivée. Ce site était abandonné de toutes activités avant leur relocalisation vers d'autres sites plus adaptés. Kimé Gana regorge d'importants indices d'impacts suite à l'installation momentanée des réfugiés. On peut noter quelques-uns de ces impacts majeurs: le chômage et le manque d'activités qu'avaient vécu les producteurs et les contractuels (main d'oeuvre) durant cette période, les traces des feux de brousse, les canalisations d'eau saccagées, la coupe sauvage et abusive du bois, la destruction des parcelles ,l'occupation anarchique des espaces.

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1.3.2 Milieu physique

Ils se résument aux éléments suivants: le climat, le relief, la végétation, les sols et les ressources en eau. Ses formations géologiques sont tertiaires, quaternaires et alluvionnaires. Le relief est plat dans la plus grande partie de la Commune (notamment à l'Ouest et au Sud) mais abrite des cordons dunaires au nord et sud -est avec des plaines tant au nord qu'à l'ouest.

1.3.2.1 Les sols

Dans la commune on distingue trois types de sols:

Les sols argileux dans les bas-fonds notamment les mares et cuvettes. Au niveau des différents périmètres aménagés pour les cultures de maraîchères, les sols sont hydromorphes; c'est le cas du site de Kimé Gana.

Les sols sablo- argileux dans les plaines et dans la bordure du lac Tchad. Les plaines dunaires sont des zones de cultures ou les principales spéculations cultivées sont les mils, le niébé.

Et enfin les sols sablonneux dominant les parties nord, nord- est et nord- ouest.

Ainsi l'analyse de l'évolution de l'occupation des sols dans la commune de 1990 à 2016 nous montre une dégradation inquiétante des sols.

La période des années 90 était marquée par une démographie faible, les ressources naturelles ne sont pas trop soumises à des pressions humaines. Les conditions climatiques étaient encore favorables et on notait une abondance des ressources naturelles due principalement à la pluviométrie excédentaire atteignant parfois 350 à 400 mm/an. La végétation était dense et la dégradation des sols lente et insignifiante.

Lors de notre enquête sur le site maraicher de Kimé Gana, un ancien nous précisait que: «dans les 30 à 40 dernières années, ils partaient avec ses amis pour se baigner dans les eaux du lac à quelques lieues de la ville de N'guigmi. Ils y'avait beaucoup d'animaux et la chasse était très facile. Les antilopes étaient chassées la nuit. Mais aujourd'hui, tout se fait rare et beaucoup d'espèces animales et végétales ont disparu ».

Les écosystèmes naturels et humains existants vivaient en parfaite interdépendance. En dépit des sécheresses des années 1973-74 et 1996- 97, la pression conjuguée sur les ressources n'était pas majeure (PDC, 2016).

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Figure 2: Occupation des sols (PDC, 2016)

L'étude des cartes d'occupation des terres de 1990 à 2016 a permis d'observer et de mesurer l'ampleur des modifications biophysiques qu'a connues l'espace territorial de N'guigmi .

Durant ces 26 dernières années, on note une intensification de la dégradation de l'environnement .Les points d'eau tels que les mares ont disparus. Le processus de la désertification suit son cours, conjugué aux effets du changement climatique. La forte croissance démographique oblige une transformation des terres en surfaces cultivables; ce qui occasionne progressivement le front agricole dans les zones forestières. A cela s'ajoute une augmentation anarchique des espaces, laissant vides dans les villages. Certaines pratiques culturales tendent à disparaitre ; c'est le cas de la jachère qui n'est plus observée, entrainant alors un lessivage des sols. La croissance rapide de la population entraine un manque considérable de terre. Tout espace considéré réserve est défriché. Dans son rapport de synthèse de 2007, le GIEC mentionne que dans certains pays, le rendement de l'agriculture pluviale pourrait chuter de 50 % d'ici 2020.On anticipe que la production agricole et l'accès à la nourriture seront durement touches dans de nombreux pays, avec de lourdes conséquences en matière de sécurité alimentaire et de malnutrition. A cet effet, la commune rurale de N'guigmi dont le système productif est déjà médiocre et les ressources naturelles fortement dégradées, atteindra le seuil de la désertisation à l'horizon 2050 pendant que sa population connaitra une augmentation démesurée.

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1.3.2.2 La végétation

Le couvert végétal est constitué de ressources ligneuses et d'un tapis herbacé. Le tableau (i) nous donne quelques espèces qu'on rencontre dans la commune.

Tableau 1: Espèces végétales fréquemment rencontrées dans la zone

Noms scientifiques des
espèces végétales

Noms locaux

Haoussa

Kanouri

Prosopis chilensis

/

Kangar

Salvadora persica

Babul

Kayoo

Accacia Raddiana

Kandili

Kindil

Prosopis Juliflora

/

Kangar

Commiphora africana

/

Kabi

Calotropis procera

Tounfafia

Kayaw

Acacia senegal

Dakora

/

Balanites aegyptiaca

Adoua

Biitoo

Cenchrus biflorus

Kanrangia

Guiibi

Eragrotis tremula

Komayya

/

Panicum turgidum

Nobi

/

Leptedania pyrotechnica

Kalimbo

/

Phoenix dactylefera

Dabino

Dawino

Ziziphus mauritiana

Magarya

Kasulu

Hyphaene thebaica

Goruba

Karjom

Azadirachta indica

Bédi

Ganya

Les ligneux sont dominées par un peuplement de Prosopis juliflora, notamment dans la bordure du lac Tchad où cette espèce constitue une véritable forêt dense. C'est une plante qui est trop prisée à cause de son rendement économique sur la production du bois et du charbon. On rencontre également d'autres variantes comme Prosopis chilensis. Cette dernière est en voie de disparition autour de la commune ; parce qu'elle est consommée par l'homme et les animaux. Au sud de la commune on rencontre de nombreuses espèces comme Salvadora persica, Accacia Raddiana, Balanites aegyptiaca, Commiphora africana, Calotropis procera, et Acacia senegal. Le tapis herbacé principalement composé de graminées annuelles du

Cenchrus biflorus, Panicum turgidum et Eragrotis tremula clairsemés servant à
l'alimentation du bétail.

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Au nord de la commune, la végétation arborée, arbustive et herbacée est plutôt rare et se réduit à un peuplement clairsemé de Balanites, Acacia raddiana, Leptadenia pyrotechnica et Salvadora persica.

1.3.2.3 Le climat

Comme dans le reste du pays le climat de cette zone est de type sahélo-saharien, très aride. Il est marqué par trois (3) principales saisons: la saison sèche et froide allant d'octobre à mars; la saison sèche et chaude allant d'avril à juin; et la saison pluvieuse qui va de juillet à septembre.

Les températures sont variables avec un minima en décembre (6°C) et un maxima en avril (47°C). Les vents dominants sont : l'harmattan et la mousson.

Ainsi la figure 3 révèle que les mois de décembre, janvier, février, mars, juin et juillet sont les plus venteux avec vitesse supérieure à la moyenne de 2,8 m/s de la série. Par contre il vente moins dans les mois d'août, septembre, octobre et novembre avec une vitesse moyenne 1m/s.

Figure 3:Variation moyenne mensuelle des vents à N'guigmi (PDC, 2016)

L'harmattan qui souffle d'est en ouest pendant près de sept (7) mois (d'Octobre à Avril) est non seulement chaud et sec mais aussi chargé de poussières.

La mousson qui souffle d'Ouest en Est entre les mois de mai et septembre est porteuse de précipitations.

Les pluies sont rares avec une moyenne de 23 jours de pluies par an. Cette pluviosité est aussi irrégulière et mal répartie dans le temps et dans l'espace.

390 360 330 300 270 240 210 180 150 120

90

60

30

0

 

H (mm) Jours

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

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Figure 4: Courbe de l'évolution de la pluviosité de 2007 à 2016.

La pluviosité annuelle varie de moins de 400 mm au sud à moins de 50 mm au nord. La pluviométrie moyenne annuelle est de 350 à 400 mm au sud avec moins de 50 mm au nord. La figure nous donne une comparaison sur les précipitations annuelles enregistrées. Elle permet de distinguer des périodes humides et des périodes sèches. Ainsi, les périodes de 1 à 6 qui correspondent respectivement aux périodes de 2007 à 2012.Elles sont marquées par une augmentation des précipitations pour atteindre un pic en 2012, soit 354,50 mm. Cette période est considérée relativement comme une période humide. Pour les périodes de 6 à 10 se référant aux années de 2012 à 2016 sont caractérisées par une pluviométrie qui est globalement inférieure à la moyenne annuelle, à l'acception de l'année 2016 qui a enregistré 308 mm. Ce sont des périodes sèches.

1.4 Milieu humain 1.4.1 La population

La population de N'guigmi est estimée à 85 426 habitants. Les femmes représentent 41784 habitants soit 48,91% des effectifs (INS, projection 2017).

Les groupes ethniques qui cohabitent sont: les Kanouri, les Haoussa, les Arabes, les Toubou, les Boudouma, les peuls et les Zarma. Les principales activités économiques sont: l'agriculture, l'élevage et la pêche. Mais cette dernière est en panne à cause des menaces récurrentes dont est assujettie les villages et îles en bordure du lac. Les activités forestières, artisanales et commerciales sont aussi pratiquées, la population du département de N'guigmi

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est composite. Le nord du département est à vocation pastorale alors que le sud est traversé par la partie nigérienne du lac Tchad où la population tire le maximum de profit de l'élevage, de la pratique de la pêche et de l'agriculture (Kiari Fougou, 2014). Le sud est principalement peuplé par les Boudouma, mais depuis les attaques de Boko Haram, beaucoup de villages sont relocalisés vers des lieux sécurisés, ou dans les camps des réfugiés réservés à cet effet.

Ainsi lors d'un entretien avec un jeune déplacé d'ethnie Boudouma, affirme: «je n'ai jamais effectué un voyage de plus de 50 km, parce qu'il avait diverses activités que j'entreprenais au bord du lac avec les vendeurs de poissons et les commerçants des céréales qui venaient d'autres horizons, mais aujourd'hui, j'ai tout perdu ».

1.4.2 La mobilité de la population

Pendant les périodes de sècheresses récurrentes (1970-1980 et 1990-2000) que sont arrivés certains groupes ethniques, notamment des Haoussa, des Zarma et des Peuls. Ils étaient attirés par les gains qu'occasionnaient les activités agricoles, pastorales et halieutiques dans cette partie du pays, d'après les études de Kiari Fougou (2009, 2014) et Abdourahamani (2011). Les Zarma proviennent de l'ouest du Niger, notamment des régions de Dosso et de Tillabéry, car pratiquant aussi des activités connexes avec les populations de cette contrée. Quant aux Haoussa ils viennent des régions de Zinder, Maradi et Agadez. Ils font en général le commerce et la main d'oeuvre.

D'autres groupes viennent également des pays voisins (Tchad, Nigeria). Aujourd'hui le conflit qui caractérise le bassin du lac Tchad a poussé une grande partie de la population riveraine a quitté leurs terres vers d'autres horizons pour la recherche d'une stabilité sécuritaire ; d'où une reconfiguration de l'espace vitale. Ainsi N'guigmi a accueilli beaucoup de réfugiés en Mai 2015 en provenance des villages et iles en bordure du lac avant leur relocalisation vers d'autres sites plus adaptés.

Cette situation d'insécurité dans le bassin a occasionné un bouleversement des activités et une paupérisation de la communauté locale.

1.4.3 Les activités socio-économiques

Sur le plan économique l'agriculture et l'élevage constituent les deux (2) principales activités économiques de la population. Le secteur de la pêche était très productif, mais se trouve en panne à cause de la situation d'insécurité qui sévit dans le bassin du lac Tchad.

1.4.4 L'agriculture

Malgré l'aridité du climat, l'agriculture occupe une place de choix dans les activités économiques de la commune. Elle est pratiquée sur les plaines dunaires pour les cultures

pluviales, sur les sites maraîchers pour les cultures irriguées et sur la rive du lac Tchad pour les cultures de décrue.

Les cultures irriguées sont pratiquées dans de nombreux sites maraîchers aménagés et non aménagés dont disposent la commune. Les principales spéculations qui y sont exploitées sont le poivron, l'oseille, le gombo, la laitue, pomme de terre et la tomate dont l'essentiel est destiné à la vente.

Les cultures dunaires sont pratiquées en saison des pluies dans les champs dunaires (plaines, moyens plateaux et dans les dépressions inter-dunaires). Dans les zones nord les cultures dunaires sont rares à cause d'un manque de pluie. Les espèces sont le mil et le niébé dont les variétés sont très hâtives et très adaptées au milieu, notamment le Boudouma pour le mil et le Fidéouram pour le niébé. Le tableau nous la production enregistrée au niveau du département. On remarque qu'en 2012, la production est nettement supérieure aux autres années ; pour le mil, le niébé, le sorgho la production est respectivement de 6 966,1 256, 1 486 tonnes. Cela s'explique par la pluviométrie enregistrée en cette année qui était de 354,5 mm. Par contre on mentionne une augmentation de la production du mil en 2014,2015 et 2016. Cette augmentation est relative à la situation actuelle dans le bassin du lac Tchad du fait que les terres arables du lac ne sont pas accessibles aux cultures ; ce qui a favorisé du coût la culture pluviale dans ce département en particulier et dans la région de Diffa en général en vue de subvenir aux besoins alimentaires des ménages

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Tableau 2: Production céréalière en tonne, département de N'guigmi

N'guigmi

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Mil

47858

91275

52875

69271

52308

55113

Sorgho

3165

12981

11419

9116

12760

8802

Niébé

22551

19286

13770

13404

25537

11095

Arachide

1947

2418

2516

2467

6981

1789

Les cultures de décrue sont pratiquées dans la rive du lac Tchad, au fur et à mesure du retrait des eaux. Les sols sont riches et très propices à l'agriculture. Les principales spéculations sont le maïs, le sorgho, le niébé, le blé, le poivron et les légumineuses. Les produits des récoltes sont autoconsommés et le surplus est destiné à la vente. En effet, les produits des récoltes sont autoconsommés pour partie et vendus pour l'autre (Abdourahamani, 2011).

1.4.5 L'élevage

L'élevage constitue la seconde mamelle de l'économie de la Commune.

Mais ce secteur n'est pas également épargné des menaces de Boko Haram qui pèsent sur la zone du rivage du lac Tchad. Beaucoup de troupeaux d'animaux ont été décimés ou abandonnés à cause de l'insécurité ; plusieurs ont été emportés par les ravisseurs. Les éleveurs, forcés de quitter cet espace si riche en fourrage vers d'autres terres. Le cheptel très important est composé de bovins, ovins, caprins, camelins, équins et asins. Toutefois, les petits ruminants dominent nettement les effectifs du cheptel. L'élevage constitue une activité importante de la commune car il permet de vendre quelques têtes de petits ruminants pour investir dans les travaux agricoles. Ainsi dans le département de N'guigmi l'élevage représente une part importante de l'économie et affiche une progression chaque année. Ainsi pour les camelins ils passent de 309 319 à 325719 têtes de 2011 à 2015, de même que pour les bovins on note une augmentation vertigineuse de 186 085 à 234 928 têtes respectivement de 2011 à 2015. Cette augmentation est relative aux conséquences engendrées par la crise sécuritaire dans le bassin lac. Beaucoup d'agriculteurs se sont tournés vers l'élevage car les activités dominantes des riverains du lac qui étaient l'agriculture et la pêche sont en panne. L'embouche est devenue alors une activité prépondérante des couches vulnérables.

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Tableau 3:Répartition du cheptel, département de N'guigmi (Source, INS, 2016)

Années

Bovins

Ovins

Caprins

Camelins

Equins

Asins

2015

234

928

225

632

271

142

325

719

5

667

25

017

2014

221

630

218

002

260

713

322

174

5

611

24

527

2013

209

085

210

630

250

686

317

413

5

555

24

046

2012

197

251

203

507

241

044

314

595

5

501

23

575

2011

186

085

196

625

231

773

309

319

5

446

23

112

Grâce à cette activité, la commune est devenue un grand exportateur de bétail vers les pays voisins .Cependant, l'agriculture et l'élevage sont confrontés à une dégradation continue et accélérée de l'environnement qui se traduit par une insuffisance de la pluviométrie, voire des sécheresses cycliques qui entraînent une baisse de la production. Dans la commune, se fixe des grands espaces de pâturage, plus précisément dans la partie sud. Notons que la race «Kouri» appelée aussi Boudouma, Bongolé ou Barey; est emblématique de la rive du lac Tchad. Elle est réputée pour la production de la viande et du lait avec un maximum de 8 litres et un minimum d'1 litre par jour (Kiari Fougou, 2014).

Pour la diffusion du taurin kouri, la commercialisation du lait et du fromage l'état a créé en 1976 le centre de multiplication de bétail (CMB) de Sayam, situé au nord à 70,5 km du chef-lieu de la région Diffa. Par contre cette même production peut varier en fonction des saisons. Ainsi durant la saison sèche la production moyenne est de 2 litres par jour. La vache Kouri est facilement remarquable par son grand gabarit haut sur patte, sa robe blanche mais peut être tachetée de froment noir ou acajou et ses cornes hypertrophiées. Cette vache à un nombre de vêlage compris entre 6 à 7. La femelle a un poids qui varie entre 400 à 500 kg avec une durée de lactation de 280 jours et le mâle tourne autour de 500 à 600 kg.

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Photo 1: Un troupeau de la vache Kouri à Sayam CMB (Cliché : Achahabou février 2018).

1.5 Localisation du périmètre mis en valeur

En Mai 2015, lors de l'opération d'évacuation des iles du lac Tchad, les autorités nigériennes avaient rendu deux sites pour accueillir les populations déplacées de Yébi et Bosso, et le site maraîcher de Kimé Gana au nord du lac se trouvant proche de N'guigmi a été choisi. Le site se localise à environ 8 km du chef-lieu de la commune.

Le site irrigué de Kimé Gana a un périmètre de 35 Ha et est entouré par une végétation clairsemée tout autour du périmètre et est essentiellement composée de Prosopis juliflora qui est l'espèce dominante dans la zone, du Phoenix dactylefera et Hyphaene thebaica qu'on croise de l'extérieur comme de l'intérieur du site, Accacia Raddiana, du Balanites, aegyptiaca, du Calotropis procera, du Bauhinia rufescens

Figure 5: Présentation du site maraicher de Kimé Gana (Réalisation, Achahabou H, 2018)

La partie non mise en valeur couvre une superficie de 24 Ha dont la clôture grillagée est fortement endommagée voire inexistante le long du périmètre, résultat de l'action humaine

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conjugué au passage des animaux. Il présente un sol dénudé plus ou moins clairsemé et constitue la zone du pâturage surtout pendant la saison des pluies.

Quant à notre site d'étude représenté par la partie mise en valeur, il a été réalisé en 1984 avec une superficie de 9 Ha. Quelques années plus tard d'autres travaux d'extension sur le site avaient été exécutés, notamment en 1989 avec une réalisation physique de 2 Ha. En décembre 2002, le nombre d'exploitants était estimé à 168 et les spéculations cultivées étaient du blé, du maïs et les produits issus des cultures maraîchères.

Ainsi le site maraicher de Kimé Gana a pour repère technique les points suivants (Tableau 4): (i) 1 800 ml de canaux revêtus, dont le rôle est de permettre le drainage des eaux vers les parcelles afin d'éviter les pertes considérables d'eau ; (ii) 5 bassins de stockage de 50 m3 chacun, dont 4 fonctionnels qui permettent de stocker une quantité importante d'eau pouvant alimenter les parcelles éloignées et réduire le manque d'eau. ; (iii) 300 ml de conduite en tuyaux PVC de diamètre 100 et 150, qui sont des conduits additionnels pour acheminer l'eau d'un bassin vers les terres mises en valeur ; (iv) 2 395 ml de clôture grillagée ; dont une grande partie a été volée bien avant la crise sécuritaire actuelle qui secoue toute la région du lac Tchad. Avant l'interdiction des engins à deux roues, les voleurs opéraient à moto, et venaient nuitamment sectionner les grillages. Néanmoins en juillet 2017, l'ONG locale VND NOUR à contribuer à la reprise du contour grillagé défectueux ou volé par une fixation des piquets ajustés par des barbelés.

Le site est alimenté par un forage artésien fournissant une eau jaillissante pouvant avoir un débit de 35 m3 par heure.

La suivante image (Photo2) illustre bien le caractère verdoyant du site de Kimé Gana synonyme d'une bonne fertilité du sol. Ce forage vétuste réalisé en 1984 fait la fierté de toute une population. On remarque une perte majeure d'eau jaillissante, résultat d'un manque d'entretien constant de ces installations.

Tableau 4:Repères techniques du site mis en valeur (Enquête de terrain, Achahabou, 2017)

Repères techniques

Grandeur

Canaux revêtus

1800 ml

5 bassins

50 m3

Tuyaux PVC

300 ml (D: 100 et 150)

clôture

2395 ml

Forage artésien

35 m3/h

Photo 2: Forage artésien du site de Kimé Gana, (Cliché : Achahabou. novembre 2017)

Cette partie présente les résultats de notre étude conduite sur le périmètre irrigué de Kimé Gana. Les points suivants seront successivement évoqués : La répartition par tranche d'âge et par sexe, le mode d'acquisition des parcelles à Kimé Gana, la typologie des exploitations agricoles, les pratiques culturales, les acteurs intervenant dans le circuit de commercialisation des cultures irriguées et l'impact de ces cultures sur la sécurité alimentaire de populations, les revenus et leur utilisation, les impacts de l'occupation du site par les réfugiés et les déplacés.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille