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La valorisation du patrimoine culinaire à  roubaix


par Eloïse Thébaud
Université Lille 2 - Master Relations Interculturelles et Coopération Internationale 2020
  

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Conclusion

Pour conclure ce mémoire de stage, je peux dire que mon expérience au service culture de la Mairie de Roubaix en tant que chargée de production sur l'événement 2020, Années des Saveurs du Monde m'a permis d'aborder des domaines très variés et très enrichissants. J'ai pu appréhender le fonctionnement d'un événement culturel à chaque étape, de l'appel à projet à l'organisation des événements. Les différentes étapes de construction des projets et de suivi des partenaires m'ont permis de découvrir les acteurs de la vie culturelle roubaisienne et les personnes impliquées par divers biais dans la vie associative. J'ai pu comprendre le fonctionnement des équipements municipaux (médiathèque, musée La Piscine, conservatoire) et leur rôle dans la valorisation du patrimoine local.

Mon stage m'a permis d'en apprendre davantage sur la situation roubaisienne et de mieux comprendre les enjeux qui existent dans le département du Nord. J'ai également eu l'opportunité de constater quels moyens d'action peuvent être mis en place, comment ils sont implémentés, quel est leur rôle. Cette base de réflexion me donne des outils réutilisables par la suite dans d'autres contextes, ce qui s'avère fort utile.

Aussi, les missions qui m'ont été confiées sont en total accord avec mon projet professionnel. Souhaitant travailler dans des associations en tant que chargée de mission à l'interculturalité et à l'organisation d'événements culturels, mon stage m'a complètement préparée au métier que je souhaite exercer. Suite à l'épidémie de COVID-19 et au confinement, les missions de production ont été réorientées vers des missions de recherche, ce qui m'a également beaucoup apporté. La réflexion nécessaire à la construction de documents synthétiques sur la thématique interculturelle et l'importance de chercher des solutions aux problématiques identifiées est un exercice de longue haleine. Mes capacités de synthétisation et de transmission ont été renforcées et me permettent d'être plus efficace et pertinente dans le travail que je réalise désormais.

Ayant pu travailler sur les questions de mobilisation des divers publics, de valorisation des pratiques culturelles ou de l'impact des migrations sur le territoire, j'ai été confortée dans l'idée qu'il est fondamental de prendre en compte la parole des citoyens et des citoyennes dans les processus de création et qu'il est de la responsabilité des structures culturelles de valoriser les pratiques contemporaines diverses et variées.

Finalement, j'ai découvert grâce à mon stage que la valorisation du patrimoine et la prise en compte des questions interculturelles restent des questions larges auxquelles aucune solution fixe et générale ne peut être apportée. La construction de mesures pertinentes selon

les territoires y apporte une réelle dimension réflexive et la diversification de ces mesures en fait une question tout à fait contemporaine et évolutive.

Mes recherches m'ont permis de mesurer à quel point la question des migrations intra-nationales et internationales devrait toujours être prise en compte dans les réflexions liées aux politiques culturelles mises en place sur un territoire. Les éléments décisifs qui mènent aux déplacements des populations sont souvent liés à des questions économiques ou politiques et donc, par conséquent, marquent les foyers de façon importante. Ces éléments sont à souligner dans la construction des mémoires locales et les identifier de façon claire permet de donner des éléments de compréhension à l'ensemble de la population. Dans le cas du Nord, j'ai pu observer que le territoire était particulièrement riche en diversité de population et que son histoire migratoire forte impactait encore aujourd'hui la réalité des villes et la vie culturelle. A Roubaix, cela s'illustre notamment par la diversité de restaurants et de cuisines proposées, ainsi que par la présence d'épiceries et supermarchés de tous les continents. Avoir une bonne connaissance des mouvements migratoires et de l'histoire et des pratiques des populations est essentiel pour s'inscrire dans une dynamique d'intégration. Les pratiques culinaires par exemple peuvent être synonymes de rejet lorsqu'elles sont méconnues, alors qu'une reconnaissance et un travail autour de ces dernières peut apporter de la richesse culturelle et financière au territoire. Il est clair que les dynamiques politiques influencent la place accordée aux groupes étrangers et peuvent générer des situations d'accueil ou de rejet. Accepter l'arrivée de nouveaux groupes avec leurs pratiques culturelles propres et leurs histoires permet de créer des territoires plus inclusifs et donc, par la suite, de favoriser une société fonctionnelle et dynamique où chacun vit en toute légitimité.

Par ailleurs, j'ai pu constater que la gestion du patrimoine devait prendre en compte les questions migratoires. La complexité dans la mise en valeur du patrimoine est de réussir à valoriser des cultures différentes avec des besoins et des techniques de valorisation spécifiques. Aussi, les labels ou programmes de reconnaissance mis en place par les organismes internationaux comme l'Unesco ne correspondent pas forcément aux problématiques locales. La question du discours utilisé dans la production des mémoires est également un élément important autour duquel se questionner. Mes recherches m'ont amené à conclure que la gestion du patrimoine, pour qu'elle soit complète, doit nécessairement être mixte et pas seulement gérée par les municipalités. Les Villes devant produire un discours compatible avec les attentes de l'Etat et du pouvoir en place, elles ne peuvent pas promouvoir n'importe quel discours et doivent respecter certaines limites imposées par les élu.e.s. Les associations ou acteurs privés peuvent, à l'inverse, exprimer un discours plus tranché ou qui leur est propre sans avoir à se caler sur les discours officiels portés par l'Etat. Il ne s'agit pas

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de considérer que les municipalités apportent des discours qui soient systématiquement problématiques, mais de rappeler qu'il faut avoir conscience des biais provoqués par la valorisation officielle et de l'importance d'une diversification des opinions et des mémoires. Concernant le patrimoine culinaire, son histoire et l'usage de certaines pratiques ou certains outils est corrélé avec des faits historiques et des histoires extra-nationales. Il s'agira alors de réussir à familiariser un public avec ces pratiques en fournissant aussi un ensemble d'informations historiques et politiques sur les pays en question. Les expériences de patrimonialisation sur divers territoires ont elles-mêmes subi des évolutions, il n'est pas forcément aisé de mettre en place d'emblée les bonnes pratiques. Cela dit, il existe suffisamment d'expériences et de diversité dans les actions de valorisation pour réussir à construire des politiques ou des actions inclusives et qui soient en mesure d'informer, valoriser et promouvoir sans déposséder les groupes concernés, les exoticiser ou les folkloriser.

Enfin, il est nécessaire de souligner la volonté des individus de travailler à la question du patrimoine et notamment du patrimoine culinaire. Mes recherches sur la question m'ont démontré par de multiples actions l'importance de la thématique culinaire et la volonté de la mettre en avant. Que ce soit à travers les témoignages récoltés par les centres sociaux, les témoignages au cours d'émissions ou les enquêtes que j'ai pu réaliser, la conclusion est sans appel : la cuisine est un marqueur identitaire fort qui évoque des sentiments multiples et qui relie les individus à leur histoire familiale. Elle est une question fondamentale pas seulement sur le territoire roubaisien mais de manière globale, et elle est le reflet incontestable des histoires politiques et migratoires d'un territoire. En ces termes, elle apparaît comme une pratique centrale qu'il devient nécessaire de valoriser. Les enjeux sont toujours les mêmes, éviter les mécanismes d'appropriation culturelle, et permettre une délégation des actions pour ouvrir la parole aux habitant.e.s. Grâce aux actions menées par d'autres départements sur les questions culturelles, il apparaît que l'outil numérique peut être un bon moyen de concentrer des ressources et de les rendre accessibles au plus grand nombre. Aussi, il est important de sensibiliser les enfants aux questions culturelles et de les familiariser à la reconnaissance des pratiques culturelles pour leur donner une certaine autonomie dans la compréhension de ces pratiques et leur transmission.

Ces observations ouvrent la réflexion sur les évolutions futures du concept de patrimoine et la prise en compte du fait que le patrimoine n'est pas un concept figé mais dépend bel et bien de ce qui compte pour les groupes de populations. On pourra s'intéresser aux évolutions des concepts des institutions internationales qui évoluent avec les nouvelles

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pratiques développées localement. Le rôle des municipalités et des acteurs privés dans la construction du patrimoine apparaît primordial dans le sens où la normalisation de certaines actions peut entraîner des changements conceptuels de grande ampleur.

Il sera intéressant de réaliser des études poussées et à long terme sur les populations plus jeunes pour pouvoir observer si, lorsque des politiques inclusives concernant le patrimoine sont mises en place, elles ont un impact dans la construction mentale des enfants et leur relation à leur propre patrimoine. On pourrait enfin tenter d'élargir le champ d'étude autour des questions culinaires et observer les liens qui peuvent exister entre les enjeux de santé publique et la valorisation du patrimoine culinaire. En effet, des études menées sur les populations immigrées font état de problèmes métaboliques liés à un changement d'alimentation et de mode de vie au cours des migrations (ulcères, diabète, cancers des voies digestives, problèmes dentaires...) 83 . Pourtant, il n'y a pas de place dans l'espace public pour montrer la récurrence du phénomène, prévenir et éduquer les individus. Une meilleure connaissance des besoins alimentaires liés à une présentation plus poussée des pratiques culinaires pourrait favoriser l'amélioration de la santé globale. L'interconnexion entre ces questions reste complexe et à approfondir mais semble être un premier pas vers une meilleure compréhension des enjeux sociaux et culturels de la question culinaire.

83Rémi, GALLOU,. « Le vieillissement des immigrés en France. Le cas paroxystique des résidants des foyers », Politix , vol. 72, no. 4, 2005, pp. 57-77.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein