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Les aspects juridiques de la transformation de l'Organisation de l'unité africaine en Union africaine


par Elodie INAMAHORO et Guy-Fleury NTWARI
Université du Lac Tanganyika
Traductions: Original: fr Source:

Disponible en mode multipage

UNIVERSITE DU LAC TANGANYIKA

FACULTE DE DROIT

LES ASPECTS JURIDIQUES DE LA TRANSFORMATION DE L'ORGANISATION DE L'UNITE AFRICAINE EN UNION AFRICAINE

Sous la Direction de :

M. Egide MANIRAKIZA Professeur à l'Université du Lac Tanganyika.

Mémoire présenté et défendu publiquement en vue de l'obtention du diplôme de Licence en Droit

Par

Elodie INAMAHORO

&

Guy-Fleury NTWARI

Bujumbura, août 2006

i

DEDICACES

Je dédie ce mémoire,

A mes Chers Parents,

Qu'ils y trouvent également le fruit de la bonne éducation qu'ils nous ont toujours assurée et de leur tendre affection.

A mes petites soeurs et, à mon petit frère, A tous mes parents proches et amis,

A toi, mon Cavalier sur les mystérieux sentiers de la vie.

Elodie INAMAHORO

A mon père et à ma mère,

pour lesquels j'ai une inégalable affection et estime ;

à mes deux soeurs et à mon frère,

pour lesquels je suis fier d'être le grand frère ;

à la grande famille NICOBAHARAYE, particulièrement au patriarche NICOBAHARAYE Nicodème ;

à celle qui a donné un nouveau sens à ma vie ;

je dédie ce mémoire.

Guy-Fleury NTWARI

ii

REMERCIEMENTS

Au seuil de ce travail, nous désirons remercier les professeurs de la Faculté de Droit de l'Université du Lac Tanganyika pour la formation à la fois scientifique, morale et humaine qu'ils nous ont dispensée. Cette formation nous a été indispensable

à la réalisation de cette étude.

Nos plus vifs remerciements vont à M. Egide MANARIKIZA, qui dès la première année de notre cursus académique nous a introduits dans la science juridique

et qui au terme de ce cursus nous a encore une fois tendu la main en acceptant de

diriger et de coordonner cette étude. Monsieur Egide MANIRAKIZA nous a soutenus dans notre travail, et ses judicieuses remarques adoubées de ses pertinentes critiques nous ont aidés à préciser notre pensée.

Nos vifs remerciements s'adressent également à toutes les personnalités du milieu administratif et diplomatique qui ont bien voulu mettre à notre disposition une vaste et riche documentation intéressant notre travail.

Enfin, que nos familles respectives trouvent nos sincères remerciements et notre modeste reconnaissance pour tous les efforts et pour toute l'affection qu'ils ont consentis pour nous.

iii

SIGLES ET ABREVIATIONS

1.

AFDI

: Annuaire Français de Droit International

2.

Art.

: article

3.

CEE

: Communautés économiques européennes

4.

Dec.

: Décision

5.

Décl.

: Déclaration

6.

éd.

: éditions

7.

EDICEF

: Editions Classiques d'Expression Française

8.

EU

: Etats-Unis

9.

Ibid.

: Ibidem, même auteur, même ouvrage et même page

10. Idem : même auteur et même ouvrage

11. L.G.D.J : Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence

12. n° : numéro

13. ONG : Organisation non gouvernementale

14. ONU : Organisation des Nations Unies

15. op. cit. : Opere citato

16. OTAN : Organisation du Traité de l'Atlantique-Nord

17. OUA : Organisation de l'Unité Africaine

18. p. : page

19. pp : pages

20. PUB : Presse Universitaire de Bruxelles

21. PUF : Presses Universitaires de France

22. RASD : République Arabe Sahraoui Démocratique

23. Res. : Résolution

24. ss. : suivants

25. UA : Union Africaine

26. UE : Union Européenne

27. UB : Université du Burundi

28. URSS : Union des Républiques Socialistes Soviétiques

29. Vol. : Volume

1

INTRODUCTION GENERALE

Une sagesse universelle affirme opportunément que l'Union fait la force.

Toutes les régions du globe y compris l'Afrique, se sont insérées dans cette logique.

En effet, après la deuxième guerre mondiale, l'Europe voit se créer et se développer successivement le Conseil de l'Europe (5 mai 1949), la Communauté européenne (25 mars 1957) et l'Union européenne (07 février 1992).1

En Amérique, dès 1948, il est créé une organisation des Etats américains (OEA). L'Asie, elle, connaît deux regroupements importants : la ligue des Etats arabes et l'ASEAN (Association des Nations du Sud Est asiatique).

Aussitôt libérée du joug colonial, l'Afrique s'est inscrite dans cette perspective. Durant le 7ème congrès panafricain à Accra (GHANA) en 1958, les leaders africains sous la houlette du Ghanéen NKRUMAH sont intimement convaincus que le continent africain doit devenir un acteur sur la scène mondiale ; et pour ce faire, une seule phrase était à l'ordre : l'Afrique doit s'unir. 2

C'est dans ce contexte que l'Afrique et les africains ont assisté à la création, le 25 mai

1963 à Addis-Abeba, de l'Organisation de l'unité africaine (OUA).

Trente-neuf ans plus tard, les dirigeants des Etats africains se sont réunis de nouveau à Durban en 2002. A cette occasion, ils ont décidé de transformer leur traditionnelle institution et de lancer officiellement une nouvelle organisation dénommée Union africaine (UA).

Cette transition de l'OUA vers l'UA a suscité d'abondantes et vives interrogations. Pour une grande majorité de l'opinion publique africaine et panafricaine, la préoccupation majeure était de savoir si l'Afrique était prête à s'engager sans faux-fuyants sur les chemins de l'unité.

1 Cf. DE SCHUTTER (O.) et al., Code de droit international des droits de l'homme, Bruxelles, Bruylant, 2ème

éd., 2003, pp. 341-562

2 « Nkrumah, alors président du Ghana indépendant et quelques autres illustres, affirmeront à contre-courant, un panafricanisme fort, que traduit bien le titre de son ouvrage, Africa must unite »dans sa version anglaise.Voir

ADJOVI (R.), L'Organisation de l'Unité Africaine et la gestion des conflits internes, Paris, mémoire Paris X Nanterre, 1996, p. 4

2

Dans les milieux scientifiques, ce changement institutionnel continental n'a pas manqué d'éveiller aussi des réflexions.

Pour le politologue, le passage de l'OUA vers l'UA inaugurait un nouveau chapitre dans la problématique « d'une Afrique face au défi de l'Etat multinational » tandis que pour le sociologue, il fallait « analyser la nouvelle dynamique sociale du panafricanisme ».

Pour le juriste, la transformation de l'OUA vers l'UA était avant tout la succession d'une organisation internationale à une autre.

En ce qui nous concerne, le changement institutionnel de l'OUA vers l'UA nous a amenés à nous poser la question de savoir si sur le plan strictement normatif, les dispositions organiques de l'UA permettent un renouveau face aux multiples défis de l'OUA ?

C'est cette interrogation qui nous a poussé à intituler notre travail :

« Les aspects juridiques de la transformation de l'Organisation de l'Unité africaine

en Union africaine. »

A ce stade, le lecteur pourrait être amené à s'interroger sur les motivations de ce choix. A l'origine du choix de ce sujet des sentiments ont prévalu, ceux d'une prise de conscience de notre « africanité » et surtout de notre volonté farouche de l'exprimer en contribuant, à notre modeste manière qui est la réflexion, à améliorer l'état de l'Afrique.

Ce choix trouve également une deuxième explication dans la problématique

dont le sujet est vecteur : pourquoi et comment s'est opéré la transformation de l'OUA

vers l'UA, sur le plan juridique?

En effet, nous partons du postulat que les organisations internationales sont des organismes « vivants » appelés à évoluer et à se modifier, car ils doivent s'adapter à une succession de situations pouvant être très différentes les unes des autres. Ainsi, des circonstances politiques et juridiques conduisent autant à leur naissance qu'à leur mutation.

En outre, la succession d'une organisation internationale à une autre révèle des problèmes généraux qui se posent avec plus ou moins d'acuité telle que l'attribution des fonctions assumées par l'organisation appelée à être succédée. Enfin, la question

de succession interfère avec les notions de temps, d'identité et de continuité.1

1 BARDONNE (D.), La succession d'Etat à Madagascar, Paris, LGDJ, 1960, p. 3

3

Dans cette optique, l'étude de la transformation de l'OUA en UA doit être menée à la lumière d'une démarche chronologiquement progressive. Celle-ci doit avoir comme point de départ de la création de l'OUA et comme destination la disparition de cette organisation, suivie simultanément de la création de l'UA.

Notre travail sera subdivisé en trois chapitres.

Dans le premier chapitre, nous avons jugé bon que pour éclairer le lecteur sur la terminologie qui sera utilisée tout au long des développements de notre travail, il s'impose de mettre en lumière les généralités sur les organisations internationales.

Le deuxième chapitre quant à lui traitera des aspects propres à l'OUA ; sa genèse, sa structure, son fonctionnement ainsi que les difficultés auxquelles elle a été confrontée.

Enfin, les innovations dont l'Acte constitutif de l'Union africaine a été porteur feront l'objet du troisième et dernier chapitre de notre travail.

4

CHAPITRE Ier : GENERALITES

Section 1ère : Historique des organisations internationales

§1 Bref aperçu de l'évolution des organisations internationales

« L'idée d'organiser politiquement la société internationale est née en réaction à l'anarchie qui résulte des conflits internationaux et à l'insuffisance de la doctrine de l'équilibre ».1

Ainsi, les premières organisations qu'on peut apparenter à des organisations internationales sont les alliances entre cités grecques durant l'antiquité.

Les organisations internationales au sens moderne du terme, n'apparaîtront qu'au XIXème siècle.

Au départ, elles n'ont pas de permanence : ce sont des réunions d'Etats lors desquelles sont prises des décisions communes, ces décisions sont scellées dans un acte qui perdure mais la réunion, elle, prend fin2.

L'exemple le plus illustrant est la conférence de Berlin de 1884 sur le partage de l'Afrique.

A la fin du XIXème siècle et au début XXème siècle se créent les premières organisations internationales à caractère permanent.

A cette époque, elles ne s'occupent encore que du domaine technique et non politique. Parallèlement, le domaine des communications connaît un grand essor, ce qui permet ainsi la création de l'Union Postale Universelle (UPU) en 1872 ou encore l'Union Internationale des Télécommunications (UIT) en 1932.

De plus, on constate qu'à cette époque le triomphe de l'interétatisme semblait aux hommes d'Etat incompatible avec tout sacrifice de la souveraineté.

Ainsi, tous les appels en faveur d'une organisation structurée des relations internationales sont longtemps restés du domaine de la doctrine ou de la propagande3 .

1 NGUYEN (Q.D.) et al, Droit international public, Paris, LGDJ, 1999, p.69

2 DAVID (E.), Cours de droit des organisations internationales,, PUB, 7ème éd. , Vol.1, 1991-1995, p. 31

3 NGUYEN (Q.D.) et al., op. cit. , p. 69

5

Cependant, le choc de la première guerre mondiale permet d'envisager une véritable révolution : la création de la Société des Nations (SdN), lors de la conférence

de paix à Versailles le 28/04/1919, qui est sans commune mesure avec les expériences précédentes.

En effet, la SdN est le premier essai de fédéralisme administratif. Elle avait pour but

de maintenir durant la période de paix, la solidarité des peuples démocratiques et d'empêcher la nouvelle guerre civile internationale1.

L'histoire nous montrera qu'elle n'y réussira que très imparfaitement.

Après le second conflit mondial, l'expérience de la SdN, bien que fort décourageante, avait introduit l'idée de la nécessité historique d'une grande organisation internationale qui tendrait à « réaliser l'unification de la société internationale en faisant pénétrer en son sein tous les Etats qui la composent »2. C'est dans ce contexte qu'est créée l'Organisation des Nations Unies (ONU) en 1945.

Selon Eric DAVID, une évolution encore plus importante marque l'apparition des organisations à caractère régional qui vont, très vite se multiplier.3

De 1943 à 1985, le nombre d'organisations internationales est passé d'une dizaine

à 307, dans les proportions de 82 à vocation mondiale contre 225 à caractère régional4 .

Ce foisonnement d'organisations internationales s'explique par le fait que le monde contemporain connaît beaucoup de questions auxquelles les Etats sont incapables d'apporter des solutions séparément.

En définitive, l'intensification des relations internationales et la prise en compte des interdépendances croissantes ont, non seulement favorisé le progrès quantitatif du droit international mais aussi le développement des organisations internationales5 . Cependant, les deux phénomènes sont liés, car le fonctionnement de ces organisations

a donné naissance à une branche spécifique supplémentaire du droit international public : le droit des organisations internationales.

1 ZORGIBE (C.), Les organisations internationales, Paris, PUF, Que sais-je, 1986, p.5

2 VIRALLY (M.), L'organisation mondiale, Paris, Armand Colin, 1972, p.28

3 DAVID(E.), op. cit., p.16

4 ZORGIBE (C.), op. cit., p. 18

5 NGUYEN (Q. D.) et al., op. cit., p. 570

6

§2. Existe-t-il un droit des organisations internationales ?

La question de l'existence d'un droit des organisations internationales a longtemps alimenté des discussions au niveau de la doctrine, et pour notre part, notre attention sera retenue par la position de certains auteurs qui soutiennent qu'il faut distinguer le droit applicable aux organisations de celui secrété par les organisations internationales. Seul le premier relèverait du droit international alors que le second, souvent dénommé droit interne des organisations internationales, constituerait un droit

distinct et différent des caractéristiques du droit international pour s'y incorporer.1

Nous ferons nôtre cette approche, en nous interrogeant sur ce droit applicable aux organisations internationales.

La question n'est pas dénouée d'intérêt car compte tenu de la multiplicité et de

la diversité des organisations internationales, on peut se demander vraiment s'il y a

un droit des organisations internationales.

Chaque organisation est autonome et possède ses propres règles qui forment son propre ordre juridique. On pourrait donc croire qu'il y a autant de droits des organisations internationales qu'il y a d'organisations internationales.

Néanmoins, cela doit être nuancé : certes chaque organisation internationale a ses

propres règles mais elle obéit aussi à des règles communes à toutes les organisations internationales.

En fait, comme le soulignent Serge SUR et Jean COMBACAU, il existe des règles

communes qui s'appliquent transversalement à toutes les organisations internationales

et des tendances communes qui s'observent dans les traités constitutifs comme dans la pratique.2 A partir de ces règles, ces auteurs affirment l'existence du droit des organisations internationales.

Daniel Dormoy précise, en outre, que ce droit commun a un caractère supplétif car

« il ne vaut que sous réserve des dispositions particulières de tel ou tel acte constitutif

ou de la pratique de telle ou telle. »3

1 NGUYEN (Q. D.) et al., op. cit., p. 570

2 THIERRY (H.) et al., Droit international public, Paris, éd. Montchrestien, 1984, p. 714

3 DORMOY (D.), Droit des organisations internationales, Paris, éd. Dalloz, 1995, p. 4

7

Enonçons enfin qu'au cours de ce chapitre, notre étude se limitera, dans un souci de plus grande unité, à l'analyse du droit constitutionnel des organisations internationales.

Cette investigation constitutionnelle des organisations consistera à démontrer leurs rouages et à examiner leur anatomie.1

Ainsi, une deuxième section déterminera le régime juridique des organisations internationales avant d'analyser leur structure et l'aspect particulier de la succession des organisations internationales, qui feront respectivement le corps de la troisième et

de la quatrième section.

1 ZORGIBE (C.), op. cit., p. 10

8

Section 2ème : Le régime juridique des organisations internationales

Au-delà des différences, les points communs entre organisations internationales sont nombreux.

Ainsi, il est possible de dégager des principes généralement applicables et dont l'ensemble constitue le régime juridique des organisations internationales.

Ce sont ces principes que l'on s'attachera à évoquer ici.

§1 Notion d'organisation internationale

A. Définition

1. Les organisations internationales au sens large

Lato sensu, le terme « organisation internationale » peut englober trois réalités

différentes :

Les Organisations non gouvernementales sont des associations de personnes privées dont la vocation internationale résulte de l'origine et de la variété multinationale de leurs adhérents et lieux d'implantation.1

Les établissements publics internationaux, également appelés entreprise internationale commune, ils sont créés par des Etats ou des organisations internationales par un accord multilatéral (ce qui les oppose aux ONG).

Ils sont dotés souvent d'une personnalité juridique propre bien qu'ils soient inaptes à créer des normes de droit international public (ce qui les différencie des organisations intergouvernementales).2

Leur objet est principalement de fournir des services à la collectivité ; on trouve quelques exemples comme le Tunnel sous le mont blanc, les grandes sociétés pétrolières ...

1 BROULLARD (P.) et DJALILI (M-R), Les relations internationales, Paris, PUF, Que sais-je ?, 1988, p. 47

2 DAVID (E.), op. cit., p. 19

9

Les organisations intergouvernementales sont les seules organisations internationales selon l'approche juridique.1

Notre champ d'étude se limitera à cette seule catégorie d'organisation internationale.

Ce faisant, il nous faut donc recourir à une définition plus restrictive et plus opérationnelle.

2. L'organisation internationale au sens strict ou les organisations

intergouvernementales

Au sens strict, seules les organisations intergouvernementales sont des

organisations internationales.

Il n'en demeure pas moins qu'un problème subsiste : celui de définir les organisations internationales comme un concept unique alors que tout atteste de leur diversité.

En effet, il est vrai qu'une définition compréhensible ne peut être que doctrinale

et non positive.2 Aussi n'existe-t-il pas, à proprement parler, de définition précise et consacrée par un texte sur la notion de l'organisation internationale.

Toutefois, plusieurs auteurs soutiennent que la doctrine, dans son ensemble, est favorable à une définition proposée par la Commission de Droit International (CDI) au cours des travaux de codification du droit des traités.

Selon cette définition, est une organisation internationale : « une association d'Etats constituée par traité, dotée d'une constitution et d'organes communs ; et possédant une personnalité juridique distincte de celle des Etats membres ».3

Cette définition doctrinale, convient-t-il de le souligner, n'a pas été retenue par la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités et les autres conventions de codifications.4

1 VIRALLY (M.), « Définition et classification des organisations internationales : approche juridique », in ABI- SAAB (G.) (dir.), Le concept d'organisation internationale, Paris, UNESCO, 1980, p. 51

2 THIERRY (H.) et al., op. cit., p. 713

3 Fitz (M.),A /CN.4/101,art.3, Annuaire de la CDI. 1956-II., p.106 cité par NGUYEN (Q. D.) et al, op. cit., p.

572

4Cependant on relèvera que la Convention de Vienne de 1969 précise en son art.2 §1 i) que l'expression « organisation internationale s'entend d'une organisation intergouvernementale » ; mais il apparaît

qu'il s'agit plus d'une précision que d'une véritable définition.

10

En définitive, la définition des organisations internationales reste assez large pour englober des institutions très diverses. Pour introduire plus de clarté dans l'analyse, il s'avère indispensable de les étudier par grandes catégories sur base d'une classification.

B. Classification des organisations internationales

La Charte des Nations Unies nous propose une classification des organisations

internationales selon leur composition tandis que la doctrine nous livre plusieurs classifications qui combinent plusieurs critères que nous allons évoquer ici.

1. Classification suivant leur composition

La Charte des Nations Unies isole deux types d'organisation internationale.

Dans le Chapitre VIII sur les accords régionaux (art.52 à 54), la Charte nous livre une distinction entre les organisations à vocation universelle et les organisations à caractère régional.

A la première catégorie appartiennent toutes celles de la famille des « Nations unies » et elles seules ; à la seconde toutes les autres.

En analysant le caractère large et fluide de cette distinction, certains auteurs en viennent à conclure que le régionalisme « repose plus sur les affinités politiques ou idéologiques que sur le voisinage spatial »1 .

2. Classification suivant leur compétence

Cette classification proposée par la doctrine repose sur l'idée que les

organisations ont une sphère d'action plus ou moins étendue.

1 COMBACAU (J.) et SUR (S.), Droit international public, Paris, éd. Montchrestien, 5ème éd. , 2001, p.707

11

Ainsi, on relèvera à côté des organisations omni fonctionnelles (telle que l'ONU qui s'intéresse à plusieurs domaines : politique, économie, culture, etc.), d'autres organisations qui sont unifonctionnelles (telles que les institutions spécialisées) ou d'autres encore que l'on pourrait qualifier de multifonctionnelles qui sont à mi-chemin entre les deux précédentes.1

3. Classification suivant leur autonomie structurelle

Les organisations se détachent plus ou moins des Etats membres grâce à

l'existence d'organes dont le nombre et l'autonomie varient.

Ainsi on trouve des organisations fortement structurées et caractérisées par l'existence d'organes bien affirmés face aux Etats membres ( telle que l'Union Européenne) par opposition à des organisations faiblement institutionnalisées (telle que l'OTAN)2.

4. Classification suivant leur autorité

Dans cette optique, on envisage schématiquement les organisations de

coopération et les organisations d'intégration.

Les premières se caractérisent par l'absence ou le faible développement du pouvoir de décision et par le fonctionnement des organes suivant le procédé de l'unanimité3 .

Loin de mettre en cause l'existence et le rôle des Etats, ces organisations de coopération permettent à ces derniers de mieux s'acquitter de leurs fonctions sociales dans les domaines où la dimension des problèmes dépasse leur capacité d'action individuelle4.

Au contraire, les organisations d'intégration, également qualifiées d'interétatiques, ont un pouvoir de décision face à leurs membres et disposent parfois d'une autorité directe et immédiate dans l'ordre interne des Etats membres.

Elles ont pour mission de rapprocher les Etats qui les composent jusqu'à les fondre en une unité englobante dans le secteur où se développent leurs activités.

1 COMBACAU (J.) et SUR (S.), op. cit., p.707

2 THIERRY (H.) et al., op. cit., p. 715

3 Ibid.

4 ZORGIBE (C.), op. cit., p. 13

12

En définitive, la souplesse du droit des organisations internationales se prête en pratique à une certaine plasticité quant aux formes des organisations internationales, qui sont rarement enfermées dans un cadre rigide préalablement défini.

A la lumière de la définition proposée par la Commission de droit international, notre attention sera retenue, dans la matière qui va suivre, par trois aspects fondamentaux d'une organisation à savoir son fondement conventionnel, les composantes ainsi que la nature juridique institutionnelle des organisations internationales.

§2 Création et composition

Comme nous l'avons vu, l'organisation internationale est un groupement composé d'Etats et constitué sur base d'une convention multilatérale.

Ainsi, selon certains auteurs, « l'organisation internationale est une créature, faite par des Etats pour remplir une certaine fonction »1.

Il sera donc intéressant de s'interroger sur le cadre légal de sa création avant d'examiner sa composition.

A. Acte constitutif

1. Fondement

Toutes les organisations internationales reposent sur une base volontariste :

seuls en font partie les Etats qui ont exprimé la volonté d'y entrer et, donc, y demeurent ceux qui n'ont pas manifesté la volonté de s'en retirer2 .

D'un point de vue juridique, ce caractère se traduit par le fait que toute organisation internationale repose sur un traité de base généralement dénommé acte constitutif.3

Les vocables « acte constitutif » mettent l'accent sur sa double nature.

C'est un traité, mais son objet est original puisqu'il est la constitution de l'organisation4 .

1 THIERRY (H.) et al, op. cit., p.741

2 KOUASSI (K.), Les organisations internationales africaines, Paris, Berger-Levrault, 1987, p. 19

3 Cependant, il convient de souligner que plusieurs dénominations ont cours dans la pratique mais qu'il s'intitule convention, pacte, charte, statuts, constitution,etc., le traité multilatéral est la forme la plus courante de l'acte constitutif des organisations internationales ( voir à ce propos NGUYEN (Q. D.) et al., op. cit., p. 573)

4 THIERRY (H.) et al., op. cit., p. 741

13

En tant que traité, l'acte constitutif est régi par le droit applicable aux traités (la

Convention de Vienne de 1969).1

De plus, il doit être le fruit d'un accord entre les Etats parties signataires.

Le professeur NGUYEN Quoc Dinh explique la raison de cette exigence en affirmant que « les Etats veulent avoir l'occasion d'exprimer leur consentement à l'apparition d'une personne juridique dont le fonctionnement aura toujours, même si c'est à des degrés variables, des incidences sur le contenu ou l'exercice de leurs propres compétences ».2

Enfin, l'acte constitutif peut être, soit un traité inédit, soit un traité qui révise un autre

antérieur.

Dans le premier cas, il sera fait application de la procédure d'élaboration et d'adoption prévue pour les traités multilatéraux à l'occasion d'une conférence (art. 9 de la Convention de 1969).

Dans le second cas, la procédure suivie est celle de révision prévue par le traité

préexistant sinon par la Convention de Vienne (art. 39).

L'aspect constitutionnel de l'acte constitutif est pour le moins très intéressant;

notre attention lui sera consacrée dans le second point suivant.

2. Nature constitutionnelle de l'acte constitutif

La dénomination de « constitution » est parfois attribuée officiellement à des

actes constitutifs de certaines organisations internationales telles que l'OIT ou encore l'OMS. Cependant, même si la tentation est grande, on ne saurait être amené à faire une assimilation simpliste entre l'acte constitutif des organisations et les constitutions des Etats.

En effet, selon Quoc Dinh NGUYEN, Patrick DAILLIER et Alain PELLET,

« il n'est pas légitime [...] de confondre le droit constitutionnel propre à une tradition nationale et autonome vis-à-vis des ordres juridiques, et le droit des organisations internationales, en partie subordonné au droit des traités »3 .

1 A ce propos, l'article 5 de la Convention de Vienne de 1969 déclare s'appliquer « à tout traité qui est l'acte constitutif d'une organisation internationale ».

2 NGUYEN (Q. D.) et al., op. cit., p. 573

3 Idem., p. 575

14

Cela étant, la nature constitutionnelle de l'acte constitutif de l'organisation internationale affirme sa spécificité par rapport aux traités multilatéraux.

C'est à ce titre qu'il comporte des dispositions mal concevables dans une convention ordinaire parce qu'il institue des organes, en établissant les règles de leur fonctionnement et de leurs compétences1.

A ce niveau, il nous semble opportun de souligner que le caractère constitutionnel de l'acte constitutif entraîne des conséquences importantes.

Tout d'abord, l'acte constitutif détermine souvent sa primauté à l'égard des autres traités conclus soit par les membres, soit par l'organisation elle-même2.

Ensuite, l'acte constitutif doit être accepté intégralement, étant entendu bien sûr que la technique des réserves est inacceptable. La raison en est qu'il est inconcevable d'assurer un fonctionnement régulier de l'organisation si tous les Etats membres ne respectent pas les mêmes règles.

Enfin, l'acte constitutif doit comprendre un minimum de dispositions relatives aux buts, aux structures et aux compétences de l'organisation, en vertu desquelles pourra être appréciée la licéité des actions et des décisions de ses organes3.

En fin de compte, nous retiendrons que les organisations internationales sécrètent un ordre juridique dont le sommet4 est assuré par leur traité constitutif, qui se trouve également être la norme de référence5 en dernier ressort pour apprécier la régularité des actes de chaque organisation.

1 DUPUY (P. M.), Droit international public, Paris, Dalloz, 5ème éd., 2000, p. 143

2 L'exemple illustrant est fourni par la Charte des Nations Unies en son article 103 qui énonce qu' « en cas de conflit entre les obligations des membres des Nations Unies en vertu de la présente Charte et leurs obligations en

vertu de tout autre accord international, les premières prévaudront ».

3 NGUYEN (Q. D.) et al., op. cit., p. 576

4 Souligné par nous.

5 Souligné par nous.

15

B. Composition des organisations internationales

Comme nous l'avons déjà signalé, la Convention de Vienne sur le droit des traités se

contente de qualifier les organisations internationales « d'intergouvernementales »1.

Ce faisant, elle consacre l'approche traditionnelle, selon laquelle les organisations internationales sont composées uniquement d'Etats. Cependant, il convient de faire remarquer qu'ils ne sont plus les participants exclusifs : parfois des collectivités non étatiques y sont associées.

1. La participation des Etats

a) Admission/accès au sein des organisations internationales

Plusieurs auteurs estiment que la pratique juridique en la matière est

caractérisée par une triple liberté :

- Liberté des fondateurs de l'organisation qui choisissent d'en ouvrir ou d'enfermer l'accès ;

- Liberté de l'organisation, elle-même, qui applique les règles du traité mais qui peut souvent les adapter ;

- Liberté des participants éventuels, enfin, pour qui la participation a toujours un caractère volontaire2.

Ainsi, force est de constater que l'admission dans l'organisation internationale

est doublement volontaire, de la part de l'Etat comme de la part de l'organisation elle-même.

Subséquemment, cela nous permet de dégager deux catégories d'Etats membres en vertu de leurs modalités d'admission.

1 Le choix de cet adjectif est fort discuté au niveau de la doctrine car certains auteurs estiment que ce sont les Etats, et non les gouvernements, qui créent les organisations internationales et y participent. Donc, il faudrait parler « d'interétatique » ( voir à ce propos NGUYEN (Q. D.) et al., op. cit., p. 578

2 THIERRY (H.) et al., op. cit., p. 716

16

1° Les membres originaires

En règle générale, pour cette catégorie d'Etats, le problème d'admission ne se

pose pas. En effet, ces Etats se cooptent mutuellement à l'occasion des invitations initiales à la conférence, puis, c'est de leur consentement que dépendra l'existence de l'organisation1 .

Les Etats originaires sont donc ceux qui, initialement, négocient et concluent l'acte constitutif ; de ce fait, ils ne sont soumis à aucune procédure d'admission puisqu'ils sont responsables de la création de l'organisation considérée.

2° Les membres admis

Contrairement aux Etats originaires, ces Etats voient leur participation dans les

organisations internationales subordonnée à une procédure d'admission plus ou moins rigoureuse.

Cependant, comme nous venons de le constater dans les principes évoqués ci-

haut, du fait de sa souveraineté, aucun Etat ne peut être contraint à participer dans une organisation (sa candidature est toujours discrétionnaire) .

En revanche, les Etats originaires tirent, eux aussi, de leur souveraineté le droit d'en

contrôler l'accès.

Pour ce qui concerne la procédure d'admission, il faut préciser de prime abord que la question d'admission ne se pose que pour les organisations qui entendent opérer une sélection des Etats candidats. Ainsi, elle sera dénouée de toute pertinence pour une organisation à caractère universel.2

Au contraire, le reste des organisations internationales conditionne l'admission par une procédure avec des critères bien déterminés. Ils sont, le plus souvent, déterminés par l'acte constitutif et se regroupent selon le cas autour des exigences portant, soit sur une certaine proximité géographique des Etats membres, soit sur l'uniformité de leur régime économique et social, soit encore sur l'idéologie dont ils se

réclament.3

1 DUPUY (P. M.), op. cit., p. 152

2 Ainsi, les conditions de fond exigées aux Etats candidats à l'admission au sein des Nations Unies et prévues par l'art.4 de la Charte des Nations Unies sont théoriquement faciles à remplir (Cf. art.4 Charte des Nations Unies)

3 NGUYEN (Q. D.) et al., op. cit., p. 581

17

Bref, l'Etat (originaire ou admis) reste l'élément incontournable en matière d'admission au sein des organisations internationales.

Cependant, comment est organisée la participation de l'Etat (originaire ou admis) au sein de l'organisation internationale ?

b) Modalités de la participation des Etats au sein d'une organisation

internationale

Ici, on s'intéressera à la nature de la participation des Etats et aux modalités de

leur représentation au sein de l'organisation.

Premièrement, en ce qui concerne la nature de leur participation, les Etats sont,

le plus fréquemment, des membres pléniers.

Cependant, une forme plus restreinte a été développée par certaines organisations internationales : le statut d'observateur.

Ainsi aux Nations Unies, cette pratique a fonctionnée au bénéfice d'Etats largement

reconnus par les membres mais non encore admis.1

Deuxièmement, la représentation de l'Etat est généralement assurée par le gouvernement qui désigne les délégués participants aux divers organes ; ces délégués n'agissent que sur instruction de leur gouvernement.

Exceptionnellement, deux formules de représentation tranchent avec cette dernière,

plus classique.

Selon SUR et COMBACAU, « la [formule] plus originale est le tripartisme institué à l'OIT où la délégation de l'Etat membre comporte deux délégués gouvernementaux et deux délégués représentant respectivement les syndicats patronaux et les syndicats de salariés et la plus spectaculaire consiste à organiser une représentation parlementaire.»2

Au demeurant, s'il est clair que c'est toujours la base volontariste qui guide la participation des Etats dans les organisations internationales, quid du retrait d'un Etat

au sein de l'organisation ?

1 THIERRY (H.) et al., op. cit., p. 716

2 Idem., p. 717

18

c) La perte du statut de membre de l'organisation

D'entrée de jeu, il faut préciser que les Etats ne renoncent pas à leur

souveraineté en devenant membres d'une organisation, aussi longtemps que celle-ci ne peut être qualifiée de super Etat.1

Ainsi, tout Etat demeure libre de quitter une organisation internationale sous réserve des règles du droit des traités applicables à l'acte constitutif.2

La perte du statut de membre peut être collective lorsqu'elle résulte de la fin du traité constitutif (ou de la dissolution de l'organisation).

Sur le plan individuel, elle peut résulter soit du retrait soit de l'exclusion.

Le retrait volontaire d'un Etat équivaut à la dénonciation de l'acte constitutif de l'organisation.

Si le traité constitutif est muet à ce sujet, ce retrait est subordonné au respect des règles

applicables à la dénonciation d'un traité codifiées par les articles 54 et 56 de la

Convention de Vienne de 1969.

L'éviction ou l'expulsion doit également respecter les règles du droit des traités.

La Convention de Vienne aborde cette question d'une manière implicite au chapitre des nullités de traités ou d'incidents dans leur application.

En général, les traités constitutifs des organisations internationales évoquent la question expressément et lui apportent une solution en terme de sanctions des violations de la Charte.

Notons qu'à côté de la participation des Etats en tant que composantes principales des organisations internationales, d'autres collectivités peuvent également être associées

au sein de l'organisation.

1 NGUYEN (Q. D.) et al., op. cit., p. 583

2 Voir à ce propos les articles 42 et suivants de la Convention de Vienne de 1969.

19

2. La participation des collectivités non étatiques

La participation des collectivités non étatiques est rarement prévue par les actes

constitutifs.

Toutefois, la doctrine relève deux hypothèses de participation des collectivités non étatiques : les organisations internationales elles-mêmes et les mouvements de libération nationale.

En effet, les organisations s'interpénètrent de façon plus ou moins complexe, surtout lorsque les membres de l'une sont également membres de l'autre1.

Aussi, certains mouvements se sont-ils vus reconnaître, notamment par les Nations

Unies, la qualité d'observateur.

Soulignons enfin, que la participation des ces collectivités non étatiques n'est pas plénière. Elle se limite au droit d'assister aux débats qui les concernent et d'avoir accès à certains documents.2

Au bénéfice des remarques précédentes, on s'attachera, dans le paragraphe qui suit, à déterminer le cadre légal de l'existence d'une organisation internationale et de ses activités.

§3 La personnalité juridique des organisations internationales

Pour examiner la personnalité juridique des organisations internationales, d'emblée, il faut se poser la question de savoir d'où vient qu'un groupement d'Etats - n'ayant ni territoire ni population - soit considéré par les Etats ou par d'autres sujets internationaux, comme un sujet de droit, et qu'ils aient des relations avec elle, et ce indépendamment des Etats qui la composent ?

La définition proposée par la CDI (Cf. infra. p. 5) répond entièrement à cette question : l'organisation internationale est dotée dès sa naissance de la personnalité juridique et c'est une personne morale distincte des membres qui la composent3 .

1 THIERRY (H.) et al., op. cit., p. 178

2 Ibid.

3 CHARPENTIER (J.), Institutions internationales, Paris, Dalloz, 15ème éd., p. 50

20

Ceci dit, la seconde étape de notre analyse consistera à dégager le fondement de cette personnalité avant d'opérer une distinction entre la personnalité juridique interne

et la personnalité juridique internationale.

A. Le fondement de la personnalité juridique des organisations internationales

La personnalité juridique est parfois reconnue expressément à travers l'acte

constitutif de l'organisation internationale. Cependant, même si l'acte constitutif est muet, le doute au sujet de la personnalité juridique n'est pas permis.

En effet, selon la doctrine, « la personnalité juridique de l'organisation résulte implicitement mais nécessairement des besoins exprimés par les Etats fondateurs à l'établissement de l'organisation internationale. »1

Ainsi, on comprendra que point n'est besoin d'une disposition l'attribuant expressément mais qu'elle trouve son fondement dans la convention constitutive dans son ensemble.

Toutefois, d'autres auteurs estiment que ce n'est pas le traité constitutif qui attribue la personnalité juridique à l'organisation mais le fait que les organes de celles-

ci soient aptes à exercer les fonctions leur confiées.2

Enfin de compte, à travers le fondement de la personnalité juridique, on est amené à constater que la mission confiée à l'organisation en fait un acteur de la vie internationale mais aussi qu'elle oblige à établir des rapports juridiques tant avec d'autres sujets de droit international qu'avec les ressortissants des Etats.

1 NGUYEN (Q. D.) et al, op. cit., p. 585

2 REUTER (P.), Droit international public, Paris, Thémis, PUF, 1958, p. 222

21

B. La distinction entre la personnalité juridique interne et la personnalité

juridique internationale

La personnalité juridique des organisations internationales peut être envisagée

dans le cadre à la fois du droit interne des Etats et celui du droit international.

1. La personnalité juridique interne

Déterminer la personnalité interne d'une personne morale, c'est rechercher si, et

dans quelle mesure, à l'intérieur de l'Etat, elle a le droit de contracter, d'acquérir et de vendre des biens mobiliers et immobiliers et enfin d'ester en justice.1

La question semble bien adéquate pour les organisations internationales qui, ne disposant pas de leur propre territoire, sont réduits à exercer leurs missions, soit sur le territoire de l'Etat dit du « siège », soit sur celui de l'Etat auquel l'organisation apporte une assistance quelconque.

D'une manière générale, on constate que la capacité d'agir dans l'ordre interne des Etats est souvent conférée par l'acte constitutif de l'organisation.

Cependant, s'il est muet ou trop général, il sera suppléé par des conventions sur les

privilèges et immunités.2

La personnalité interne de l'organisation telle qu'elle est prévue, est opposable aux Etats membres mais pas aux tiers sous réserve du cas où l'acte constitutif est valable erga omnes.3

En outre, en ce qui concerne l'exercice par l'organisation de sa capacité interne, notamment les contrats qu'elle peut passer avec des personnes privées et les règlements de différends éventuellement y relatifs, il faut souligner que le droit applicable peut être, soit celui des Etats hôtes, soit celui déterminé par l'instance chargée de régler les différends éventuels.4

Généralement, le mode de règlement de différends sera l'arbitrage international.

1 NGUYEN (Q. D.) et al., op. cit., p. 587

2 En effet, en l'absence d'une disposition claire dans la Charte de l'OUA, c'est la Convention sur les privilèges et immunités de l'OUA du 25 octobre 1963 qui affirme dans son art. 1er que « l'OUA possède la personnalité

juridique »

3 DORMOY (D.), op. cit., p. 36

4 DUPUY (P. M.), op. cit., p. 16

22

Toutefois, il faut nuancer cette solution pour le cas des contrats dont l'objet se rapporte directement à celui de l'organisation tel que le recrutement des agents; ces contrats seront soumis au droit international.1

En fin de compte, nous venons de constater qu'il n'est pas rare que les Etats acceptent d'accorder la personnalité juridique interne sur une base explicite ;

Quid de la personnalité juridique internationale ?

2. La personnalité juridique internationale

La personnalité juridique internationale repose, en général, sur une base

subjective. En effet, l'existence légale de l'organisation, aux yeux des Etats, dépend avant tout de sa reconnaissance2 .

a. La reconnaissance d'une organisation internationale

A ce niveau, nous ferons remarquer que le problème ne devrait pas se poser

pour les Etats membres de l'organisation.

En effet, cette reconnaissance résulte de leur participation à l'acte constitutif.

Toutefois, le problème est réellement posé, en ce qui concerne les Etats tiers (c'est-

à-dire non membres). Ils peuvent procéder à la reconnaissance expresse, mais le plus souvent, cette reconnaissance résulte de comportements qui manifestent l'acceptation implicite de cette personnalité.

Ce problème de la subjectivité de la personnalité juridique internationale, a été partiellement résolu par la solution apportée par la CIJ, dans l'avis consultatif rendu en

1949 sur la demande de l'Assemblée générale des Nations Unies.

Cette dernière désirait savoir si l'ONU justifiait de la capacité de présenter une réclamation internationale contre un Etat pour le compte de ses agents, en particulier le Comte Bernadotte, médiateur des Nations unies en Palestine, assassiné dans l'exercice

de ses fonctions3.

1 NGUYEN (Q. D.) et al., op .cit., p. 588

2 THIERRY (H.) et al, op. cit., p. 739

3 DORMOY (D.), op. cit., p. 34-35

23

Dans son avis, la CIJ a souligné fortement la personnalité juridique internationale de l'ONU allant même jusqu'à la rendre opposable à tous les Etats, y compris les Etats non membres, et indépendamment de toute reconnaissance de leur part.1

Toutefois, il faut souligner que le raisonnement par analogie ne sera valable que pour les organisations à vocation universelle, à l'instar de l'ONU.

Cette opposabilité erga omnes ne saurait être étendue au reste des organisations,

à caractère régional par exemple, qui restent soumis à la technique de la reconnaissance, pour rendre opposable leur personnalité juridique aux Etats tiers.

Bref, nous sommes amenés à constater que la problématique de la personnalité juridique internationale est sous tendue par le fait que les organisations, dès leur création, viennent concurrencer la qualité de sujet de droit international, dont les Etats avaient exclusivement le monopole.

Ainsi, faut-il examiner cette qualité de sujet de droit.

b. L'organisation internationale est un sujet de droit international

Quelle que soit sa forme, la reconnaissance de la personnalité juridique

internationale aux organisations internationales a des conséquences importantes.

En effet, consacrer la qualité de sujet de droit international à l'organisation signifie

qu'elle peut être titulaire de droit et être soumis à des obligations dans l'ordre juridique international.2

Ainsi, les organisations internationales se voient attribuer des compétences internationales et jouissent au même titre que les Etats des prérogatives de sujets de droit international.

1 « La cour est d'avis que 50 Etats, représentant une très large majorité des membres de la communauté internationale [Et c'était vrai à l'époque], avaient le pouvoir, conformément au droit international, de créer une

entité possédant une personnalité internationale objective et non pas seulement une personnalité reconnue par eux seuls. » Recueil CIJ, 1949, p. 185 cité par NGUYEN (Q. D.) et al., op. cit., p. 589

2 DORMOY (D.), op. cit., p. 37

24

Il s'agit notamment :

- du pouvoir d'entretenir des relations diplomatiques par la représentation des

Etats ou d'autres entités auprès de l'organisation ;

- du pouvoir de conclure des traités : les organisations concluent des traités et contribuent à la conclusion de traités ;

- de la capacité de présenter une réclamation internationale.1

Il convient, en outre, de souligner que l'appréciation de l'étendue de la personnalité internationale n'est pas la même pour toutes les organisations. Elle dépend des buts et des fonctions qui lui sont attribués.

Ainsi, chaque organisation agit sur le plan international dans le domaine qui lui est

assigné par son acte constitutif.

En somme, nous retiendrons que l'organisation internationale doit avoir une personnalité juridique, ce qui d'ailleurs constitue un élément important de sa définition ; et de ce fait, elle est un sujet de droit, mais un sujet de droit bien particulier comme nous allons le voir dans ce dernier point du présent paragraphe.

C. Les caractéristiques de l'organisation internationale en tant que sujet de droit

L'organisation internationale diffère de l'Etat en tant qu'elle est un sujet de

droit dérivé et fonctionnel.

a) L'organisation internationale est un sujet dérivé

En droit international, l'Etat est le sujet de droit originaire ou initial tandis que

l'organisation internationale est un sujet de droit dérivé.

Le caractère dérivé de ce sujet de droit résulte du fait que l'organisation est un être institué reposant sur la volonté de ses créateurs, les Etats.

1 DREYFUS (S.), Droit des relations internationales, Paris, Cujas, 1978, p. 91

25

Et ces derniers déterminent, à travers l'acte constitutif, « ses compétences - c'est-à- dire la sphère d'action ouverte à chaque organisation - et ses pouvoirs - c'est-à-dire les moyens qu'elle peut déployer à l'intérieur ».1

En définitive, en attribuant des compétences et des pouvoirs à une organisation,

les Etats acceptent de perdre leur exclusivité sur la scène internationale. Aussi peuvent-ils se voir imposer, le cas échéant, des obligations et des charges par les organisations internationales.

b) L'organisation internationale est un sujet fonctionnel

Ce caractère est lié de près avec le premier. Le caractère fonctionnel des

organisations est sous-tendu par le principe de spécialité auquel obéit toute organisation internationale.

De ce fait, toute organisation ne peut exercer ses compétences et pouvoirs que dans le

domaine de la mission qui lui a été déterminé par l'acte constitutif.

Cependant, on considère que ce caractère fonctionnel peut jouer sur le plan de l'interprétation des dispositions de l'acte constitutif soit dans le sens de la restriction, soit dans celui de l'extension.

Ce caractère joue en faveur de la restriction lorsque l'interprète ne reconnaît que

les compétences et pouvoirs inscrits dans l'acte constitutif et directement nécessaires à

la mission confiée à l'organisation.

Tandis qu'il évolue dans le sens de l'extension en cas de silence de l'acte constitutif, certaines compétences et pouvoirs sont réputés lui être dévolus pour l'accomplissement de la mission de l'organisation : c'est la théorie des pouvoirs implicites2.

En conclusion, on ne saurait terminer cette section, sans rappeler l'importance

de son contenu sur les développements ultérieurs.

Signalons enfin, un autre point qui s'annonce avec la même pertinence : il s'agit de la structure des organisations internationales.

1 THIERRY (H.) et al., op. cit., p. 745

2 COMBACAU (J.) et SERGE (S.), op. cit., p. 720

26

Section 3ème : La structure des organisations internationales

La structure et le fonctionnement de chaque organisation reposent sur l'acte constitutif, traité solennel qui détermine les limitations de compétences auxquelles les Etats membres ont consentis.

Aussi, appartient-il en premier lieu au traité constitutif de chaque organisation d'en

fixer la structure organique. Dans certains cas, ce n'est pas seulement l'acte constitutif,

lui-même, qui précise cette structure mais aussi des instruments collatéraux.1

Ceci dit, la structure des organisations internationales est plus ou moins complexe et perfectionnée selon les cas.

En général, on constate que le schéma institutionnel des organisations internationales comporte non seulement plusieurs organes, mais aussi, plusieurs types d'organes, qu'il faudra classer (§1).

Au delà de leurs caractéristiques générales, ces organes suscitent des questions

générales quant à leur fonctionnement que nous n'allons pas manquer d'aborder (§2).

§1 La classification des organes d'une organisation internationale

1. Classification suivant leur origine

Cette classification trouve ses racines au niveau de la terminologie employée

aux Nations Unies qui distingue les organes principaux des organes subsidiaires.

On appelle organes principaux tous ceux qui ont été voulus par les membres originaires au moment où ils ont constitué l'organisation, et qui ont été mis en place par l'acte constitutif.

Quant aux organes subsidiaires, ce sont ceux que créent ultérieurement les organes

principaux en tant que de besoin, par un acte unilatéral.2

1 CHARPENTIER (J.), op. cit., p. 54

2 Voir art. 7 de la Charte des Nations Unies ainsi libellé « Il est créé comme organes principaux de l'Organisation des Nations Unies ; une Assemblée générale, un Conseil économique et social, un Conseil de tutelle, une Cour internationale de Justice et un Secrétariat.

Les organes subsidiaires qui se révèleraient nécessaires pourront être créés conformément à la présente Charte. »

27

Les épithètes « principaux et subsidiaires » peuvent être trompeuses si l'on vient à considérer que la distinction de ces deux organes repose sur le critère de leur importance dans la vie de l'organisation.

Aussi, certains auteurs suggèrent-ils de les qualifier d'organes initiaux et organes dérivés.1

En fin de compte, nous retiendrons que cette classification présente l'intérêt de mettre en évidence le dynamisme institutionnel qui caractérise les organisations internationales, et surtout qui permet dans une certaine mesure de compenser la rigidité des actes constitutifs.2

2. Classification suivant leurs fonctions

Bien qu'il y ait d'apparentes ressemblances, il nous faut éviter toute analogie

avec la structure de l'Etat.

Si l'Etat est organisé autour d'un principe de légitimité, qui domine sa structure et la hiérarchie des pouvoirs, force est de constater que la structure de l'organisation internationale répond, elle, aux besoins liés à la réalisation des objectifs lui assignés3.

La doctrine retient généralement une classification fonctionnelle très classique des organes d'une organisation internationale. Celle-ci distingue les organes politiques, les organes administratifs et les organes juridictionnels.

1°) Les organes politiques ou délibérants : Ces organes sont ceux qui, quel que soit leur pouvoir de décision, ont en charge la définition des orientations de l'organisation dans le domaine de sa compétence. Ainsi, leurs activités, comportant principalement l'initiative et la délibération, sont tournées vers les Etats comme vers l'organisation elle-même, par le biais des directives adressées à d'autres organes4 .

2°) Les organes administratifs : Ces organes ont pour mission essentielle d'assurer la préparation des décisions - fourniture de renseignements, rapports, préparation de délibération - et à leur exécution.5

1 REUTER (P.) et COMBACAU (J.), Institutions et relations internationales, Paris, PUF, 1980, p. 313

2 THIERRY (H.) et al., op. cit., p. 724

3 Idem., p. 723

4 DORMOY (D.), op. cit., p. 67-68

5 NGUYEN (Q. D.) et al., op. cit., p. 622

28

Placés généralement sous l'autorité des organes politiques, leur marge d'initiative est souvent limitée.

3°) Les organes juridictionnels : Les organes juridictionnels sont rarement prévus dans les organisations internationales.

Et dans le cas où ils sont prévus, ils n'assurent qu'une fonction juridictionnelle embryonnaire1 .

La doctrine estime que l'activité juridictionnelle s'exerce dans deux sens :

D'une part, un sens visant la régulation juridique2 de l'action des organes (ce qui est le cas de la CIJ qui donne des avis sur toute question juridique aux organes de l'ONU).

D'autre part, un autre sens visant à régler, sur base de leur consentement3 , les

différends juridiques entre Etats par des arrêts obligatoires.4

3. Classification suivant leur composition

Cette classification peut être considérée comme la plus importante et la plus

significative, dans la mesure où, elle permet de traverser d'autres critères

(même ceux que l'on vient d'évoquer), pour une analyse plus large des organes de l'organisation internationale.

Ceci dit, ici, nous distinguerons principalement deux types d'organes : les organes intergouvernementaux et les organes intégrés avant d'ajouter à ce couple classique une nouvelle tendance d'organes ; les organes composés de représentants de forces politique, économique et sociale.

1 THIERRY (H.) et al., op. cit., p. 728

2 Souligné par nous.

3 Souligné par nous

4 THIERRY (H.) et al., op. cit., p.728

29

1. Les organes composés de représentants gouvernementaux ou

organes dits intergouvernementaux

Ces organes sont constitués par les représentants des Etats membres qui

expriment juridiquement la volonté de l'organisation, mais politiquement les positions collectives des membres. 1

En effet, les représentants agissent individuellement au nom de leur Etat mais l'organe auquel ils participent agit collectivement au nom de l'organisation.

Cela étant, il existe deux types d'organes où sont représentés les Etats membres : les organes pléniers et les organes restreints.

Les organes pléniers comprennent des représentants de tous les Etats membres de l'organisation (Exemple de l'Assemblée générale des Nations Unies).

La composition de ces organes repose sur le principe de l'égalité souveraine des Etats.

Ce principe implique que tous les Etats membres de l'organisation soient représentés dans tous les organes et donc qu'il n'existe que des organes pléniers comme organes interétatiques.2

Cependant, des raisons politiques (compétence ou intérêt de certains Etats) et techniques conduisent à prévoir des organes restreints.3

Les organes restreints ne comprennent qu'une partie des membres de l'organisation. Les modalités de leur désignation reposent généralement sur un double critère : l'intérêt ou la compétence de certains Etats et une répartition géographique équitable4 .

Le Conseil de sécurité au sein des Nations Unies en est l'exemple le plus illustratif.

1 REUTER (P.) et COMBACAU ( J.), op. cit., p.310

2 DORMOY (D.), op. cit., p.63

3 COMBACAU (J.) et SERGE (S.), op. cit., p. 734

4 Idem., p. 735

30

2. Les organes composés d'agents internationaux ou organes dits

intégrés

Les organes intégrés sont composés d'agents internationaux qui dépendent,

dans l'exercice de leurs fonctions, exclusivement de l'organisation pour le compte de laquelle ils agissent.

Les agents internationaux sont ainsi indépendants des Etats membres, bien que parfois

ils soient désignés par les organes intergouvernementaux.

Cependant, cette indépendance des agents internationaux est tellement essentielle qu'elle est pratiquement mise en évidence dans les actes constitutifs.

De plus, l'unanimité qui entoure cette indépendance a fait passer ce principe au rang

de coutume internationale1 .

Au sein des organes intégrés, on peut relever d'autres sous catégories selon leurs fonctions.

Tout d'abord, chaque organisation, comme on a eu à le voir précédemment, dispose d'une administration que le actes constitutifs dénomment souvent

« secrétariat » (charte des Nations unies) ou encore « bureau » (constitution de l'OIT). L'existence même de cet organe est considérée par certains auteurs comme une condition sine qua none pour une organisation internationale de prétendre à la personnalité juridique2 .

Au demeurant, le secrétariat, dont les fonctions varient d'une organisation à une autre,

est généralement sous la direction du chef du secrétariat (également dénommé secrétaire général ou directeur général) en tant que le plus haut fonctionnaire de l'organisation.

Ensuite, on relève les organes juridictionnels que nous avons déjà évoqués.

Enfin, les organes intégrés peuvent être aussi des organes consultatifs.

En effet, la pratique montre que les organisations internationales ont, de temps en temps, besoin « d'une expertise extérieure fournie en toute indépendance des gouvernements et de l'organisation elle-même.»3

1 NGUYEN (Q. D.) et al., op. cit., p. 624

2 CHARPENTIER (J.), op. cit., p. 50

3 NGUYEN (Q. D.) et a.l, op. cit., p. 628

31

Bien que leur rôle soit juridiquement marginal du fait qu'ils n'ont ni le pouvoir de déterminer ni celui de limiter le domaine de leurs travaux, les organes consultatifs peuvent néanmoins exercer une influence considérable sur le contenu des décisions.

Notons aussi, pour terminer, qu'une évolution récente dans le milieu international révèle une autre catégorie d'organes, composés de représentants autres que ceux des gouvernements.

3. Organes composés de représentants de forces politiques,

économiques et sociales.

La raison d'être des ces organes est essentiellement motivée par la pratique quasi

consacrée d'ouvrir la consultation politique à des groupes d'intérêt socioprofessionnel, ainsi que les véhémentes critiques adressées à la diplomatie secrète.1

Cette pratique se généralise progressivement à tel enseigne que ces organes sont, dans

la plupart des organisations, prévues par les actes constitutifs (à titre d'exemple, nous citerons l'Union européenne et l'Union africaine).

Au bénéfice des remarques précédentes, nous nous proposons d'élargir notre étude de la structure de l'organisation internationale sur les modalités de fonctionnement des organes.

§2 Fonctionnement des organes des organisations internationales

Autant nous avons souligné la complexité de la structure des organisations internationales, autant nous sommes amenés à constater que le fonctionnement des organes d'une organisation présente le même caractère.

Néanmoins, nous sommes en mesure de présenter quelques observations générales qui n'auront nullement la prétention de tout dire mais qui serviront de charpente au contenu des subdivisions suivantes de notre étude.

1 NGUYEN (Q. D.) et a.l, op. cit., p. 628

32

Ainsi du fonctionnement des organes, nous retiendrons 3 aspects : quelles sont

les relations entre les organes ? (A) ; et quels sont les modes de votation en leur sein ?

(B) et enfin de quels modes d'actions, l'organisation en général, dispose-t-elle pour remplir sa mission ?(C)

A. Les relations entre organes

Les relations entre organes sont, le plus souvent, régies par l'acte constitutif et

surtout sont variées selon la complexité de chaque organisation.

La doctrine considère que les organes intergouvernementaux sont en principe dominants1 ; mais une organisation peut en compter plusieurs.

De ce fait, on estime que les relations entre organes dépendront de considérations plus fonctionnelles que hiérarchiques.

En effet, les organes créés par un autre organe comme organe subsidiaire ne lui sont

pas nécessairement dépendants, autant que les organes dont les membres sont désignés par un autre organe ne lui sont pas nécessairement subordonnés.

Ainsi, à titre illustratif, nous prendrons comme exemple l'ONU où le Conseil de sécurité est subordonné2 au budget voté par l'Assemblée générale, alors que les deux organes sont associés3 pour l'admission des membres, et enfin bien que le Conseil de sécurité soit indépendant4 en matière d'action pour le maintien de la paix5.

B. Modes de votation

Les modes de votation sont généralement prévus dans les actes constitutifs et

n'intéressent que les organes délibérants.

Au sein de ces organes, la prise de décisions a lieu à la suite d'un vote qui, successivement sur l'échelle du temps, est passé du principe de l'unanimité à celui de

la majorité ; bien qu'une nouvelle tendance consacre le principe du consensus en l'absence de tout vote.

1 DORMOY (D.), op. cit., p. 63

2 Souligné par nous.

3 Souligné par nous.

4 Souligné par nous.

5THIERRY (H.) et al., op. cit., p. 729

33

En effet, tout d'abord, sur base du principe de l'égalité souveraine des Etats, c'est le principe de l'unanimité qui s'est imposé jusqu'en 1945.

Ainsi, l'unanimité était la règle à la SdN.

Pour certains auteurs, ce principe a pu constituer un élément de faiblesse pour l'organisation, toujours suspendue à un vote aléatoire.1

Ensuite, dès 1945, on a assisté à une large expansion du principe majoritaire dans les actes constitutifs bien que le principe de l'unanimité ait été retenu dans certains organes. Le principe de la majorité s'accompagne de plusieurs modalités, les unes attenantes au décompte des voix (membres votants, ou membres composant l'organe), les autres relatives à la majorité exigée (simple, absolue ou encore

qualifiée).2

Ainsi la majorité simple calculée sur le nombre soit des membres soit des votants signifie la majorité des suffrages exprimés plus une voix.

Le calcul de la majorité qualifiée est plus complexe et elle varie suivant les types des conditions requises. Celles-ci peuvent être d'ordre numérique (2/3, 3/4 ou en pourcentage), personnel (droit de veto), structurel (composition précise du groupe des Etats adoptant une décision).3

En fait, selon David RUZIE, le principe majoritaire ne repose que sur « la nécessité de

concilier une exigence technique pratique, face aux inconvénients de la règle de l'unanimité, et une exigence politique dans la nécessité d'obtenir la participation de la minorité à l'exécution d'une décision majoritaire».4

Enfin, le souci d'efficacité - justement dans l'exécution des décisions -

a consacré le développement de la pratique du consensus.

Le consensus, excluant le vote, reflète la volonté d'arriver à un accord en l'absence de toute opposition.

Effectivement, à défaut d'atteindre l'unanimité et face à l'inefficacité de la majorité,

on se résigne au consensus qui, contrairement à l'unanimité qui exige que tout le monde soit d'accord, exige tout simplement que personne ne soit contre5.

1 THIERRY (H.) et al., op. cit., p. 729

2 DORMOY (D.), op. cit., p. 76

3 RANJEVA (R.) et CADOUX (C.), Droit international public, Paris, EDICEF, 1992, p. 114

4 RUZIE (D.), Droit international public, Paris, Dalloz, 16ème éd., 2002, p. 179

5 DORMOY(D.), op. cit., p. 76

34

C. Modes d'action

Les organisations internationales s'acquittent de leur mission par des voies

multiples, et cela dans des proportions variables d'une organisation à une autre. Cependant, la doctrine et la pratique dégagent trois modes d'actions principaux qui, en réalité, rendent compte des compétences de l'organisation.

De la sorte, nous présenterons successivement les compétences normatives, opérationnelles et de contrôle.

1. La compétence normative

Toutes les organisations internationales disposent d'une fonction normative ne

serait ce que pour atteindre leurs objectifs ou à tout le moins pour pouvoir fonctionner. Cette fonction normative s'exerce soit par le biais d'actes conventionnels soit par celui d'actes unilatéraux.

a. Les actes conventionnels

Tout d'abord, le droit international est fortement marqué par l'apport normatif

des organisations internationales car il n'est pas un domaine de relations sociales pour lequel on ne rencontre pas une organisation chargée de proposer des règles de comportement, de rapprocher les législations nationales , bref de favoriser la conclusion de traités internationaux.1

Ensuite, ces traités seront généralement conclus dans le cadre ou sous les auspices de l'organisation internationale, qui aura joué un rôle important à travers ses organes dans les travaux préliminaires à l'adoption du traité.

Notons enfin, que les organisations internationales ont aussi la capacité de participer et de conclure des traités selon les dispositions de la Convention de Vienne

de 1986 sur les traités conclus entre Etats et organisations internationales et sous réserve du strict respect du principe de spécialité2 .

1 NGUYEN (Q. D.) et al., op. cit., p. 601

2 DORMOY (D.), op. cit., p. 84

35

b. Les actes unilatéraux

D'emblée, il faut noter la grande diversité qui les caractérise. Cette diversité

s'observe, tout d'abord sur le plan de la terminologie où ils sont, selon le cas : voeux, avis, recommandations, directives, standard, pratiques, annexes, décisions, résolutions, normes, règlements, arrêts, jugements, etc.

De plus, il n'est pas rare qu'un même terme soit employé pour désigner des actes de portée juridique différente et inversement qu'un même acte soit qualifié au moyen de deux termes différents1 .

A ce stade, nous sommes amenés à comprendre que ces actes semblent échapper à toute systématisation. Ils sont mis à la disposition de l'Etat à titre purement indicatif.

Cependant, nous emprunterons une classification faite par Daniel DORMOY afin de mieux cerner ces actes.

En effet, il distingue parmi ces actes, les résolutions internes et les résolutions dont les

Etats membres sont destinataires.

Les premières, à caractère institutionnel, constitueraient la catégorie des résolutions ayant un caractère obligatoire (par exemple les résolutions relatives à l'adoption du budget ou du règlement intérieur des organes ou encore à l'admission d'un Etat) à l'opposé des secondes qui ne seraient pas en principe obligatoires pour leurs destinataires, les Etats2 .

En fin de compte, et pour terminer sur ce point, les compétences normatives

dont toute organisation est investie à des degrés divers, autoriseraient cette dernière à adopter des règles juridiques ou financières de portée générale ou individuelle, mais quid de la mise en oeuvre de ces règles ?

2. Compétences de contrôle

Selon Serge SUR et Jean COMBACAU, la participation des Etats dans les

organisations internationales les astreint au respect de deux obligations : « celles leur incombant dès l'origine en vertu de l'acte constitutif et celles dérivées, qui résultent des normes édictées par les organes de l'organisation »3

1 DORMOY (D.), op. cit., p. 85

2 Ibid.

3 COMBACAU (J.) et SUR (S.), op. cit., p. 739

36

Ainsi, le contrôle international exercé par les organisations internationales vise à vérifier l'exécution par les Etats de leurs obligations internationales.

Cependant, il convient de souligner que ce contrôle consiste plus à rappeler aux

Etats leurs obligations que de les contraindre à les respecter1 .

En effet, dans la pratique, la mise en oeuvre des sanctions s'observe rarement. Toutefois, l'évolution des organisations internationales, à l'instar des communautés européennes montre une tendance de celles-ci à instituer des organes judiciaires capables de statuer sur des jugements revêtus de l'autorité de la chose jugée.2

3. Compétences opérationnelles

Cette catégorie de compétence constitue les compétences de gestion

(ou de simple conseil) dans le domaine administratif, économique, technique ou financière, dont dispose l'organisation internationale.

Les activités opérationnelles de l'organisation consisteront en une action immédiate sur le terrain.

En effet, à l'opposé des compétences normatives où l'organisation invite à agir ,

en vertu des compétences opérationnelles, l'organisation agit concrètement elle-même

ou par le biais d'organismes opérationnels.3

Enfin, et pour conclure, nous remarquerons que les activités opérationnelles sont aussi diverses que variées du fait des objectifs propres de chaque organisation.

Elles pourront consister, selon le cas, à des procédures de règlements de différends,

sanction coercitive, apport d'assistance économique, administrative ou militaire aux Etats, représentation diplomatique, contrôle de la régularité d'opérations électorales, etc.

1 DORMOY (D.), op. cit., p. 88

2 DUPUY (P. M.), op. cit., p. 186

3 DORMOY (D.), op. cit., p. 88

37

Section 4ème : La succession des organisations internationale

Le problème de succession se pose pour les organisations internationales, comme pour les Etats.

Cependant, on remarque que l'attention portée par la doctrine sur la succession d'Etats

et ses conséquences juridiques, contraste considérablement avec la discrétion manifestée à l'égard de l'étude de la succession des organisations internationales. Toutefois, la raison ne saurait être due à la rareté du phénomène car plusieurs cas de succession d'organisations internationales se sont déjà présentés : à titre d'exemple mentionnons la succession de la SdN - ONU ; de l'Office international de l'Hygiène - OMS et enfin de la Commission de coopération technique en Afrique (CCTA) - OUA.

Au demeurant, en pratique, le problème du régime juridique de la succession se pose avec beaucoup d'acuité ; d'ailleurs il est flagrant que les actes constitutifs éludent généralement la définition exacte du régime applicable en cas de succession.

Suzanne BASTID estime que l'étude de la succession d'organisations internationales,

un aspect particulier du droit des organisations internationales, révèle deux difficultés essentielles : « la connaissance précise des conditions dans lesquelles se déroule cette transformation de structure que constitue une succession d'organisation internationale mais aussi la détermination des constantes que l'on peut discerner dans ces situations, comme aussi des oppositions qu'elles révèlent ». 1

Autrement dit, il est difficile - voire impossible - de dégager une théorie générale de la succession des organisations internationales.

De la sorte, une étude complète de la succession d'organisations internationales doit

être monographique plutôt qu'une construction théorique.

Toutefois, à ce stade, nous nous proposons de jeter les bases de cette étude monographique en analysant, d'une manière très sommaire, les conditions dans lesquelles se pose le problème de la succession des organisations internationales.

Cette analyse embrayera directement sur les modalités de la succession avant de parler

des effets de la succession.

1 RANJEVA (R.), La succession d'organisations internationales en Afrique, Paris, Pedone, 1978, p. IX (Voir

Préface de BASTID (S.))

38

§1 Les conditions de la succession des organisations internationales

La succession d'organisation internationale se réalise toujours dans un contexte qu'il faut déterminer et qualifier ; et, convient-il de le remarquer, les Etats fondateurs d'organisations les dotent d'objectifs différents, et partant d'organes différents d'une organisation à une autre.

Tout d'abord, à plus d'une illustration, des circonstances politiques et historiques ont amené les Etats à remplacer les organisations existantes par de nouvelles organisations.

Sur le continent africain, la conséquence première de la décolonisation fut l'apparition d'Etats africains sur la scène internationale en même temps que des organisations exclusivement africaines1 .

Ensuite, en ce qui concerne les relations entre les objectifs des organisations prédécesseur et successeur, nous partons du postulat que la succession est le résultat d'une volonté politique qui tend à mettre en place un nouveau système d'action concertée de plusieurs Etats à la place du cadre antérieur2.

On peut se demander si cet aspect est vraiment pertinent lors de l'étude de la succession des organisations internationales.

Il faut souligner que les objectifs sont l'expression de la prise de conscience des besoins collectivement ressentis par plusieurs Etats qui désirent les satisfaire grâce à une action concertée.3

En outre, la disparition de l'organisation prédécesseur ne fait pas disparaître ses besoins. La succession représente la technique juridique qui permet la continuité de l'action menée.

Ainsi apparaît-il nécessaire d'examiner successivement les objectifs propres de

l'organisation successeur, en relation avec ceux du prédécesseur.

Enfin, et pour terminer avec ce paragraphe, l'examen des objectifs des organisations internationales doit être nécessairement complété par celui des organes.

Les organes, faut-il le rappeler, constituent des éléments essentiels dans la définition

des organisations internationales.

1 RANJEVA (R.), op. cit., p. 15

2 Idem., p. 35

3 DREYFUS (S.), op. cit., p. 88

39

Et sur le plan de la succession des organisations internationales, il apparaît plus qu'indispensable de procéder par une étude de la structure de chaque organisation tant prédécesseur que successeur.

En effet, c'est dans la nouvelle structure que seront réalisés les objectifs et les fonctions transmis par le prédécesseur.

Aussi, apparaît-il utile de procéder à une description des structures des deux organisations internationales : prédécesseur et successeur.

§2 Les modalités de succession d'organisations internationales

L'analyse des modalités de succession des organisations internationales renseigne sur les techniques qui sont utilisées pour la succession des organisations internationales.

Cependant, on doit souligner que toute idée de théorie générale est à bannir car « à

chaque organisation correspond une modalité particulière de l'établissement du lien successoral ».1

L'expérience des organisations internationales africaines témoigne de cette originalité.

Au demeurant, la pratique et la doctrine consacrent deux techniques distinctes

de tendance courante. Nous ferons nôtre cette approche en distinguant la substitution

(A) et l'intégration (B).

A. La substitution

La substitution est une technique par laquelle il y a disparition d'une

organisation puis création d'une organisation nouvelle : le successeur, appelé à remplacer l'organisation antérieure : le prédécesseur.

1 RANJEVA(R.), op. cit., p. 84

40

Deux éléments, plutôt deux événements, conditionnent cette technique :

la disparition de l'organisation prédécesseur et la création de l'organisation successeur. L'étude de la succession des organisations internationales dans la perspective de la substitution doit être menée à la lumière de ces deux événements.

En effet, la substitution correspond à une attitude politique particulière des Etats qui

veulent éliminer du prédécesseur ses insuffisances ou ses tares en procédant à sa dissolution et à l'institution d'une organisation successeur mieux adaptée aux circonstances politiques nouvelles.1

En fin de compte la substitution constitue le mode le plus courant de succession lorsqu'il s'agit de bouleverser l'organisation prédécesseur.

B. L'intégration ou l'absorption

L'intégration est la seconde technique de succession. Cette technique permet à

une organisation prédécesseur de disparaître puis de se confondre avec le successeur qui reprend ses activités et ses fonctions.

La terminologie de l' « intégration » est cependant combattue par plusieurs auteurs qui estiment que l'intégration n'envisage le problème de succession que sous l'aspect patrimonial.2 Ainsi, convient-il d'employer le terme « absorption ».

En définitive, l'absorption n'implique pas la création d'une organisation internationale pour remplacer le prédécesseur, à l'opposé de la substitution.

Au terme de ce paragraphe, bien que les deux techniques de succession des

organisations internationales aient été dégagées et exposées sommairement, il apparaît opportun et important de les compléter par un bref aperçu sur les effets de la succession des organisations internationales.

1 RANJEVA(R.), op. cit., p. 84

2 Idem., p. 144

41

§3 Effets de la succession de l'organisation internationale

Loin de prétendre relayer une quelconque théorie générale en la matière, nous nous proposons - comme précédemment - de tracer les contours des effets « possibles

et déjà recensés »1 .

Ceci dit, la succession des organisations internationales engendre des effets qui affectent principalement la structure de l'organisation prédécesseur, et dans une moindre mesure celle de l'organisation successeur.

Dans cette perspective, il sera très intéressant d'analyser ces effets dans le cadre d'une étude descriptive.

Ainsi, nous nous interrogerons sur le sort des traités conclus sous l'empire de

l'organisation prédécesseur, le sort des agents de l'organisation prédécesseur.

A. Le sort des traités conclus sous l'empire de l'organisation prédécesseur

La succession des organisations internationales pose toujours le problème du

sort des traités qui avaient été conclus dans le cadre ou au sein de l'organisation qui disparaît.

En effet, l'étude de la succession des organisations internationales ne saurait laisser de côté le sort de ces actes dont le cadre de conception vient de disparaître.

La pratique africaine montre que les actes ne conservent pas toujours les mêmes effets juridiques après la succession. Ainsi, ce sont deux solutions bien différentes qui sont retenues.

La première a consisté dans la continuité de la validité des conventions

(c'est notamment la solution qui fut retenue pour la succession de l'Union Africaine Malgache (UAM)/Organisation Commune Africaine et mauricienne (OCAM) ; et la seconde solution était l'abrogation pure et simple de ces actes conclus sous les auspices de l'organisation disparue (c'est singulièrement le cas de la succession de l' East Africa Common Services Organisation (EACSO)/ East Africa Community

(EAC)).2

1 En effet, en l'absence d'une documentation suffisante, l'unique ouvrage de référence est celui de RANJEVA. Précisons également que cette contrainte ne nous concerne pas exclusivement, certains auteurs l'ont également exprimée (voir THIERRY (H.) et al., op. cit., p. 735)

2 Voir à ce propos RANJEVA (R.), op. cit., p. 204 et ss.

42

En ce qui concerne les actes unilatéraux, la solution est double selon les destinataires. En effet, les actes unilatéraux à caractère interne (tels les protocoles aménageant le fonctionnement des organes du prédécesseur) seront bien entendu caduques à la disparition de l'organisation tandis que les actes unilatéraux dont les Etats sont les destinataires pourront survivre à l'organisation qui disparaît, à la seule condition « d'être régis par une nouvelle norme juridique édictée soit directement par

les Etats, soit par le successeur avec le consentement de ces derniers ».1

B. Le sort des agents de l'organisation prédécesseur

La disparition de l'organisation prédécesseur et l'apparition du successeur

remettent en cause le rattachement des agents à celle qui les a recrutés.

La question qui se pose est celle de savoir si le successeur a l'obligation juridique de reprendre le personnel du prédécesseur. La pratique montre que les organisations internationales africaines y répondent de plusieurs manières.2

Les solutions adoptées apparaissent fondées sur les liens qui existent entre l'organisation, ses emplois et ses agents.

En effet, l'organisation successeur doit opérer une adéquation théorique des emplois par rapport à ses objectifs ; et ceci comporte des conséquences. En premier lieu, la transformation de l'organigramme peut revêtir un double aspect portant d'une part sur une simple modification de la définition d'un emploi, d'autre part sur l'existence d'un emploi par voie de création.3 En second lieu, lorsque la cause de l'organisation prédécesseur disparaît, ses emplois n'ont plus de raison d'être et cessent avec elle.

Ainsi, pour le Pr. Raymond RANJEVA, en cas de succession, « on doit admettre la disparition des emplois prédécesseurs et en conséquence l'absence d'une obligation de reprendre son personnel ».4

De plus, même si l'organisation successeur reprend à son compte une partie des activités du prédécesseur, et partant de son personnel, ceci relève plus de considérations pratiques d'efficacité qui ne sauraient être le fondement d'une obligation juridique pour l'organisation successeur.

1 RANJEVA (R.), op. cit., p. 257

2 Pour plus de détails sur ces solutions relatives au sort du personnel de l'organisation prédécesseur, Cf. RANJEVA (R.), op. cit., p. 307 et ss.

3 Idem., p. 576

4 Idem., p. 327

43

Au bénéfice de ces remarques sur la théorie générale des organisations internationales,

il convient de replacer notre réflexion dans sa véritable perspective la transformation

de l'OUA en UA en abordant dans le chapitre suivant la présentation générale de l'OUA.

44

CHAPITRE II : PRESENTATION GENERALE DE L'OUA

L'OUA n'est pas tombée du ciel, l'idéologie panafricaine est à la base de sa création. Le panafricanisme est une idéologie qui « vise à réaliser l'unité ou l'unification de tout le continent africain afin de rendre à l'homme noir dignité, considération et respect ».115

Cependant, suivant les époques et les auteurs, le panafricanisme est apparu tour à tour comme un mouvement racial, un mouvement culturel et un mouvement politique ; ici c'est dans cette dernière perspective que nous allons exploiter le panafricanisme116.

Ainsi, au lendemain des indépendances, deux mots d'ordres résonnent avec une particulière insistance : « l'Afrique aux africains » et « Une Afrique unie ».117

Nécessité faisant loi : il fallait trouver des formes permettant de se regrouper et de réaliser l'unité africaine.

Si l'unité africaine est une exigence largement soutenue par les Etats africains nouvellement indépendants, elle suscite, toutefois, parmi les Africains des divergences

de vue quant aux mécanismes et moyens pour la réaliser.

unité.

En effet, deux grands courants d'idée s'affrontent dans la représentation de cette

Le premier courant est celui du groupe des pays dits « progressistes » ou groupe de

Casablanca dont le chef de file était le Ghanéen N'KRUMAH.

Ce dernier incarne un courant radical tendant à réaliser l'unité immédiate et totale sur tous les plans, ainsi que la suppression des frontières africaines héritées de la colonisation, jugées artificielles, pour un cadre fédéral voire une organisation supra nationale.118

Le deuxième courant est celui des pays dits « modérés » ou groupe de Monrovia représenté par Houphouët BOIGNY. Il juge la première tendance irréaliste et excessive,

la critiquant de ne pas être précise quant à ses buts et moyens. En outre, ce deuxième courant, se voulant plus modeste, affirme que l'unité africaine doit se réaliser par le biais de la solidarité ainsi que l'appréhension des intérêts communs.119

115 KOUASSI (K.), Les organisations internationales africaines, Paris, Berger-Levrault, 1987, p.72

116 En effet, l'analyse complète de l'abondante littérature consacrée au panafricanisme déborderait le cadre de cette étude. Cependant pour plus de détails, voir DECRAENE (P.), Le panafricanisme, Paris, PUF, Que sais-je, 126p.

117 WODIE (F.), Les institutions régionales en Afrique occidentale et centrale, Paris, LGDJ, 1970, p.1

118 BA (A.) et al. , L'organisation de l'unité africaine : De la Charte d'Addis-Abéba à la Convention des droits de

l'Homme et des peuples, Paris, Silex, 1984, p. 11

119Une troisième tendance favorable à la création de groupes sous régionaux et locaux et défendue par Léopold S. SENGHOR, a vite disparu et s'est fondue dans celle du groupe des modérés. Cf. BA (A.) et al., op. cit. , p. 12

45

Si ces deux conceptions vont s'affronter durant la période 1958 - 1961, un rapprochement va cependant être amorcé en 1963.

Ainsi, le mois de mai 1963 voit la tenue du premier sommet panafricain durant lequel

on assiste à la naissance de l'OUA.

Néanmoins, les trente-neufs ans d'existence de l'OUA et l'évolution des relations interafricaines seront marqués par l'influence de ces deux courants opposés.

Le présent chapitre, le deuxième, a pour ambition de faire une présentation générale de l'OUA mais dans une perspective de son évolution et de sa disparition.

Ce faisant, une présentation de l'OUA - fut-elle générale - doit à tout le moins s'attarder sur sa structure et son fonctionnement.

Ceci fait, il convient, dans la mesure de son évolution, de jeter un regard sur sa contribution avant d'indiquer les difficultés auxquelles elle a été confrontée avant de disparaître.

46

Section 1ère : La structure et le fonctionnement de l'OUA

La structure et le fonctionnement d'une organisation internationale - comme on a

eu à le voir dans le premier chapitre - varie d'une organisation à une autre selon sa composition, ses buts et principes ainsi que ses organes.

Distinctement, l'analyse de la Charte d'Addis-Abeba est-elle en mesure, d'une part de nous renseigner sur les contours de la participation des Etats au sein de l'OUA

(§1), d'autre part de nous aider à déterminer ce que Boutros Boutros GHALI qualifie

« d'idéologie de la Charte » (§2). Enfin, nous terminerons par une description des organes de l'OUA (§3).

§1 La participation des Etats membres au sein de l'OUA

D'emblée, il faut souligner que la Charte d'Addis-Abeba en son article 1er paragraphe 2 délimite le cadre géographique de l'OUA, en précisant que « cette organisation comprend les Etats africains continentaux, Madagascar et les autres îles entourant le continent. »

Cela étant, il nous faut ensuite analyser les conditions d'admission à l'OUA, bien qu'il nous soit également nécessaire de préciser que ces conditions n'ont concerné que

les Etats apparus ou devenus indépendants postérieurement à l'adoption de la Charte, c'est-à-dire le 25 mai 1963.120

A. L'admission à l'OUA

Dans un premier temps, c'est l'article 4 de la Charte qui statue sur la qualité de

membre de l'OUA avant d'être complété par l'article 28 qui pose véritablement les conditions et la procédure d'admission à l'OUA.121

120A ce moment l'OUA comprenait 32 membres originaires qui sont : L'Algérie, le Bénin, le Burundi,

le Cameroun, le Congo, la Cote d'Ivoire, l'Egypte, l'Ethiopie, le Gabon, le Ghana, la Haute Volta (actuel Burkina Faso), la Jamahiriya Arabe Libyenne, le Libéria, le Madagascar, le Mali, le Maroc, la Mauritanie, le Niger, le Nigeria, l'Ouganda, la République Centrafricaine, le Rwanda, le Sénégal, la Sierra Léone, la Somalie, le Soudan,

la Tanzanie, le Tchad, le Togo, la Tunisie, le Zaïre (actuelle République Démocratique du Congo.

121 L'article 28 stipule que «1. Tout Etat africain indépendant et souverain, peut en tout temps, notifier au secrétaire général son intention d'adhérer à la présente charte.

47

Il découle de cet article, cinq critères pour l'admission dans l'organisation que nous nous proposons d'analyser un à un.

Ainsi pour être membre, il faut :

a) être un Etat : L'OUA est une organisation interétatique, ce qui implique juridiquement qu'elle ne peut être ouverte qu'à des Etats. Ainsi, les territoires non indépendants, les gouvernements en exil, les mouvements de libération ne pouvaient pas faire partie de l'OUA ; même s'ils pouvaient y déléguer des observateurs.122

b) être un Etat africain : Cette deuxième condition vient renforcer l'idée de vocation

continentale de l'OUA déjà évoquée par l'article 1er précité.

En posant cette deuxième condition, les Etats membres de l'OUA visent à exclure les Etats européens qui exercent des compétences juridiques de domination sur les territoires situés dans le ressort géographique de l'OUA.

Ainsi, l'Afrique du Sud et la Rhodésie du Sud (malgré sa déclaration unilatérale

d'indépendance du 11 novembre 1965)123 ne pouvaient être membres de l'OUA.

c) être un Etat indépendant et souverain : Cette condition confirme la première.

Non seulement les territoires africains n'ayant pas encore accédé à l'indépendance ne pouvaient pas être admis à l'OUA mais aussi les Etats membres d'un Etat fédéral n'auraient pu être admis à l'OUA.

Dans ces mêmes conditions, l'OUA exclut également les organisations régionales, les

Etats africains étant invités à participer au sein de l'OUA à titre individuel.

d) faire acte de candidature : Tout Etat africain désireux d'adhérer à la Charte de l'OUA doit en notifier au Secrétaire général son intention. Celui-ci communique copie de cette demande d'admission à tous les Etats membres.

e) que cette candidature soit acceptée par la majorité des Etats membres : L'admission à

l'OUA requiert la majorité simple des Etats membres.

Au-delà, il résulte de l'analyse de cette procédure que la décision en matière d'admission relève des Etats qui se prononcent chacun en ce qui le concerne ; l'organisation est reléguée à un rôle de relais et d'enregistrement124 .

2. Le secrétaire général saisi de cette notification en communique copie à tous les membres. L'admission est

décidée à la majorité simple des Etats. (...) »

122GHALI (B.B.), L'Organisation de l'Unité Africaine, Paris, Librairie Armand Colin, 1969, p. 98

123 COLLIARD (C. A.) et MANIN (A.), Droit International et Histoire Diplomatique, Paris, éd. Montchrestien,

1971, p. 659

124 BENNOUNA (M.), L'admission d'un nouveau membre à l'Organisation de l'Unité Africaine, AFDI, 1980, p.193-198.

48

Cette admission emporte une conséquence juridique directe et importante : elle confère

la qualité de membre de l'organisation.

Pour terminer, si on distingue deux catégories de membres de l'OUA, les membres originaires et les membres admis, il convient de signaler que cette distinction n'est que de pure forme et qu'elle n'implique aucune inégalité juridique.

§2 L'idéologie de l'OUA

Quels sont les buts et les principes de l'OUA ? Répondre à cette interrogation, c'est dégager en quelque sorte l'idéologie de la Charte d'Addis-Abeba et la politique de l'OUA.

Précisément, sur le plan juridique, c'est poser les bases d'une compréhension du champ

et des limites de compétences de l'OUA.

Ce faisant, il est essentiel de dégager en premier lieu les objectifs de l'OUA avant de présenter les principes de cette organisation.

A. Les objectifs de l'OUA

La Charte de l'OUA (précisément en son article 2) indique l'orientation générale des

activités de l'organisation ainsi que les objectifs communs à ses membres.

En vérité, l'analyse du contenu de l'article 2 de la Charte d'Addis-Abeba permet de distinguer les objectifs politiques et des objectifs économiques, sociaux et culturels.

1. Les objectifs politiques

Comme l'indique sa dénomination, l'OUA vise essentiellement le renforcement

de l'unité africaine.

Dans le cadre de l'OUA, bien que cette notion ne soit pas définie par sa Charte constitutive, l'unité s'entend de la coopération entre Etats africains en dehors de toute idée du fédéralisme. Cela se traduit par l'accent qui est mis par les Etats membres de l'OUA sur certains aspects politiques.

49

En effet, la sauvegarde de l'indépendance ainsi que l'élimination du colonialisme sous toutes ses formes sont considérées comme des conditions essentielles à la réalisation de l'unité africaine.

Ainsi sur base de cette conception, les Etats africains se conviennent de défendre leur souveraineté, leur intégrité territoriale et leur indépendance125 fraîchement conquises.

Ces objectifs devaient assurer la protection des Etats africains contre les puissances coloniales et néo-coloniales.

2. Les objectifs économiques, socioculturels

Bien que le caractère politique apparaisse dominant, les objectifs visés par la

Charte de l'OUA concernaient également l'aspect économique, social et culturel.

Cet aspect économique et social et culturel fait l'objet de l'article 2, §2 qui énumère les domaines dont les Etats membres sont tenus d'assurer la coordination et l'harmonisation de leurs politiques générales dans les domaines comme : l'économie,

les transports, les communications, l'éducation, la culture, la santé, l'hygiène, la

nutrition ainsi que la science et les techniques. 126

Précisons également que l'OUA envisageait au niveau du préambule de sa Charte, la coopération entre Etats africains pour offrir de meilleures conditions d'existence aux peuples d'Afrique.

L'OUA prévoyait, enfin ; de favoriser la coopération internationale afin d'éviter l'isolement du continent par rapport au reste du monde.

Pour conclure sur les objectifs de l'OUA, il ne serait pas fâcheux de noter qu'en

ce qui concerne les objectifs économiques, sociaux et culturels, ceux-ci revêtent d'une part un caractère très général et présentent des difficultés quant à leur définition. D'autre part, au niveau des principes de l'OUA, la Charte ne prévoit pas de moyens stratégiques pour atteindre ces objectifs.

Après avoir dégagé les objectifs de l'OUA, il convient, ensuite de décrire d'une manière sommaire les principes que la Charte énonce pour réaliser ces objectifs.

125 Art. 2, 1° c) de la Charte de l'OUA

126 Art. 2, §2 de la Charte de l'OUA

50

B.Les principes de l'OUA

A la lecture de l'art. 3 de la Charte, on est amené à distinguer les principes

régissant les relations interafricaines et ceux régissant les relations entre l'Afrique et le monde extérieur.

1. Les principes régissant les relations interafricaines

Il s'agit des les principes qui devaient régir les relations interafricaines dans le

cadre de l'OUA et hors du cadre de l'OUA.

En fait ces principes visaient avant tout à assurer la paix et la sécurité au sein de

la communauté des Etats africains.

En effet, l'égalité absolue des Etats africains, la non-subversion entre Etats africains, l'intangibilité des frontières africaines, le règlement pacifique des différends ainsi que le pluralisme régional africain étaient considérés comme des principes fondamentaux destinés à consolider la solidarité continentale des Etats africains face au monde extérieur.127

2. Les principes régissant les relations entre l'Afrique et le monde

extérieur

Ces principes devaient gouverner les relations entre, d'une part les Etats africains

et, d'autre part les Etats non africains ( anciennes métropoles, Etats-Unis d'Amérique, l'URSS,...) et les organismes internationaux non africains ( ONU et ses institutions spécialisées,...).

Les principes généraux prévus pour réguler ces relations étaient au nombre de cinq : Coopération dans le cadre des Nations Unies, lutte contre le colonialisme, lutte contre le néocolonialisme, non-alignement et assistance économique sans conditions.

127 GHALI (B.B.), op. cit. , p. 68

51

Enfin ces principes se caractérisent par la place importante accordée au « fait colonial et ses séquelles ».128

En définitive, ce bref exposé, sur les objectifs et principes de l'OUA, renseigne sur l'idéologie qui fut celle de l'OUA.

§3 Les organes de l'OUA

L'article 7 de la Charte énumère les organes de l'OUA, qui sont au nombre de 4 :

- La Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement ;

- Le Conseil des ministres ;

- Le Secrétariat général ;

- La Commission de médiation, de conciliation et d'arbitrage.

La Charte, dans son article 20, prévoit la création des Commissions spécialisées. La mise en place de ces organes par l'OUA nous amène à distinguer les organes principaux des organes subsidiaires car il est vrai que des organes subsidiaires ont existé au sein de l'OUA tels que le Comité de coordination pour la libération de l'Afrique et d'autres Institutions spécialisées.

Cela étant, dans le présent paragraphe, nous nous proposons de les décrire successivement et brièvement en mettant l'accent sur deux dimensions : les compétences d'une part et le processus de décision d'autre part (du moins pour les seuls organes délibérants).

A. Les organes principaux

1. La Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement

Comme son nom l'indique, cet organe comprend aussi bien les Chefs d'Etat que

les Chefs de gouvernement. L'art. 9 de la Charte s'empresse, néanmoins d'assouplir cette rigidité puisque « la Conférence est composée de Chefs d'Etat et de gouvernement

ou de leurs représentants dûment accrédités ».

128 GHALI (B.B.), op. cit. , p. 65

52

De plus, le même article précise que si l'un des Etats membres le demande et sous réserve de l'accord des deux tiers des membres de l'organisation, la Conférence peut se réunir en session extraordinaire alors que la session ordinaire est annuelle.

Enfin conformément à l'art. 6 du Règlement intérieur de la Conférence, « lors d'une session ordinaire la Conférence décide à la majorité simple du lieu où se tiendra

la session suivante ». Ceci consacre le principe des conférences itinérantes à travers les différentes capitales africaines.

Mais quelles sont les compétences de la Conférence ?

a. Les compétences de la Conférence des Chefs d'Etat et de

gouvernement.

L'art. 8 de la Charte consacre la Conférence comme organe suprême de l'OUA.

Il découle de cette qualité que cet organe a diverses fonctions.

Tout d'abord, l'art. 3 du Règlement intérieur de la Conférence stipule que cette dernière peut discuter de n'importe quel sujet présentant un intérêt commun à tous les pays d'Afrique.

D'après Boutros Boutros GHALI, le fait que le pouvoir de discussion ait été mis au

premier plan dans l'énumération des fonctions de l'organe suprême de l'OUA dénote

« la volonté du législateur africain de faire de la Conférence la conscience du continent,

le forum où serait débattu toutes les questions importantes qui intéressent l'Afrique. »129

Ensuite, la Conférence est un organe de coordination et d'harmonisation de la politique générale de l'OUA (art. 3, 2°).

Troisièmement, la Conférence dispose des compétences non seulement pour réviser la structure et les attributions de tous les organes, mais aussi pour créer toutes les institutions spécialisées qu'elle jugera nécessaire. 130

129 GHALI (B.B.), op. cit. , p. 110

130 Article 3, 3°&4° du Règlement intérieur de la Conférence

53

Enfin, la Conférence assume une fonction administrative car c'est elle qui élit le Secrétaire général131 et les Secrétaires généraux adjoints132 , sans oublier qu'elle peut mettre fin à leur mandat « quand le bon fonctionnement de l'organisation le justifie »133 . Quid du mode de votation au sein de la Conférence ?

b. Mode de votation au sein de la Conférence

Les règles de vote au sein de la Conférence sont sous la lumière du principe de

l'égalité des Etats.

En effet, l'art. 10 de la Charte indique que chaque Etat dispose d'une voix alors que toutes les décisions de la Conférence sont prises à la majorité des deux tiers des Etats membres de l'Organisation.

Exceptionnellement, les questions de procédure sont tranchées à la majorité simple ainsi que le vote qui décide s'il s'agit ou non de question de procédure.134

Enfin, aux termes de l'art. 24 du Règlement intérieur de la Conférence, le quorum est constitué par les deux tiers des Etats membres.

2. Le Conseil des ministres

Le Conseil des ministres est le second organe délibérant prévu par la Charte de

l'OUA.

Il est composé de ministres des Affaires étrangères ou de tous autres ministres désignés par leurs gouvernements.135

En vertu de l'art. 12, 2°, le Conseil des ministres se réunit deux fois par an en session ordinaire. Cependant, à la demande d'un Etat et sous réserve de l'accord des deux tiers des membres, le Conseil peut se réunir en session extraordinaire.

Ces sessions se tiennent au siège de l'organisation ou tout autre lieu que le Conseil

choisira à la majorité simple.136

131 Article 32 du Règlement intérieur de la Conférence

132 Article 34 du Règlement intérieur de la Conférence

133 Article 36 du Règlement intérieur de la Conférence

134 Article 26 du Règlement intérieur de la Conférence

135 Article 1 du Règlement intérieur du Conseil

136 Article 8 du Règlement intérieur du Conseil

54

Analysons, ensuite, particulièrement les compétences et les modalités de vote au sein du

Conseil.

a. Les compétences du Conseil

Les compétences du Conseil des ministres sont déterminées par l'art. 3 de son

Règlement intérieur :

1° Il est chargé de la préparation de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement

2° Il est compétent pour réglementer toute question que la Conférence lui renvoie

3° Il est chargé de promouvoir la coopération entre les pays africains dans les domaines énoncés à l'art. 2, 2° de la Charte.

4° Il examine et approuve le budget de l'organisation préparé par le Secrétariat général

5° Enfin il approuve le Règlement intérieur des Commissions spécialisées conformément à l'art. 22 de la Charte.

Il ressort de cet article que le Conseil des ministres n'a pas de pouvoir propre de décision. Il n'a de pouvoir que sur les affaires qui lui sont expressément déléguées par

la Conférence. A ce propos, Boutros Boutros GHALI inventorie deux catégories de résolutions du Conseil des ministres :

D'une part, il s'agit des voeux et des recommandations que le Conseil soumet à la

Conférence et, d'autre part des résolutions qui sont des actes d'application des directives données par la Conférence ».137Toutefois, le Conseil des ministres garde une place de choix dans l'approbation du budget et du Règlement intérieur des Commissions spécialisées .

b. Le mode de votation

Au sein du Conseil des ministres, chaque Etat dispose d'une voix. Cependant, à

la différence de la Conférence, toutes les décisions sont prises à la majorité simple138 ;

ceci sans aucune distinction entre questions de procédure et questions de fond.

Enfin, le quorum au sein du Conseil est constitué par les deux tiers des Etats membres139.

137 GHALI (B.B.), op. cit. , p. 114

Cet auteur note, néanmoins que le Conseil peut adopter parfois des résolutions exécutoires de sa propre initiative. Ce qui arrive surtout lorsque le Conseil est réuni en session extraordinaire.

138 Article 29 du Règlement intérieur du Conseil

139 Article 18 du Règlement intérieur du Conseil

55

3. Le Secrétariat général

L'art. 16 de la Charte prévoit un Secrétariat général dirigé par le Secrétaire

général.

En réalité, le Secrétariat repose sur un pilier politique et sur un pilier bureaucratique.140

Le pilier politique comprend six personnalités : le Secrétaire général et cinq

Secrétaires généraux adjoints.141

Le Secrétaire général « dirige les activités du Secrétariat général dont il est le représentant juridique »142

Quant au pilier bureaucratique, il comprend, à proprement parler, le reste du personnel du Secrétariat.

Enfin, il faut préciser que les membres du Secrétariat général sont recrutés à titre

de fonctionnaires internationaux.

a. Les compétences du Secrétariat général

Les fonctions du Secrétariat général sont énumérées par l'art. 2 de son

Règlement intérieur. Ainsi, le Secrétariat général :

- assure la conservation des documents et archives des réunions des différents organismes de l'OUA ;

- assure le secrétariat de la Conférence, du Conseil des ministres et met à la disposition des Commissions spécialisées, les services administratifs nécessaires ;

- reçoit les communications des instruments de ratification des accords passés entre

Etats membres de l'OUA ou des traités constitutifs des organisations régionales africaines, les adhésions nouvelles à l'OUA ainsi que les demandes de retrait ;

- prépare le budget qu'il soumet au Conseil des ministres ;

- rédige les rapports sur toutes les activités de l'organisation ;

140 SINIYUNGURUZA( S.), Le système de l'OUA et la participation du Burundi, Bujumbura, Mémoire UB, décembre 1979, p. 42

141 Ces derniers sont chargés de diriger les départements suivants : Administration et Conférences ; Finances ;

Affaires politiques ; Développement économique et Coopération et enfin Education, Sciences, Culture et Affaires sociales. Cf. article 15 du Règlement intérieur du Secrétariat général.

142 Article 6 du Règlement intérieur du Secrétariat général

56

- veille à la mise en oeuvre des décisions du Conseil des ministres concernant tous les échanges économiques, sociaux, juridiques et culturels des Etats membres.

En outre, il faut souligner que le Secrétaire général est directement responsable devant le Conseil des ministres, de la bonne exécution de toutes les fonctions qui lui sont assignées (art. 7 du Règlement intérieur du Secrétariat général).

Ces fonctions sont notamment celles de :

présenter les rapports demandés par la Conférence, le Conseil des ministres et les Commissions spécialisées (art. 10 du Règlement intérieur du Secrétariat général) ;

communiquer aux Etats membres le budget et le programme de travail, un mois

au moins avant la convocation des sessions de la Conférence, du Conseil des ministres, des Commissions spécialisées et des autres organismes de l'organisation ( art. 11, 2° du Règlement intérieur du Secrétariat général) ;

créer des fonds fiduciaires, des fonds de réserve et des fonds spéciaux sous

réserve de l'approbation du Conseil des ministres (art. 23 du Règlement intérieur du Secrétariat général) ;

accepter au nom de l'organisation tous dons, legs et autres libéralités faits à

l'organisation (art. 24 du Règlement intérieur du Secrétariat général).

4. La Commission de médiation, conciliation et d'arbitrage

C'est l'organe qui occupe la dernière place dans l'énumération faite à l'art. 7 de

la Charte de l'OUA.

Selon l'art. 2 du Protocole de la Commission de médiation, de conciliation et d'arbitrage143, la Commission se compose de 21 Etats membres élus par la Conférence

des Chefs d'Etat et de gouvernement.

En outre, tout Etat membre élu doit nommer à la Commission que des personnes aux qualifications professionnelles reconnues (art. 2, 2° du Protocole).

Enfin, les membres de la Commission sont élus pour une durée de 5ans et sont rééligibles.

143 Ce Protocole fait partie intégrante de la Charte tel que prévu par la résolution CM/977 (XXXIII) Annexe IV

57

a. Les compétences de la Commission

En premier lieu, la compétence de la Commission se limite uniquement aux

litiges entre Etats (art. 12 du Protocole). Ainsi, sont formellement exclus :

1° les conflits pouvant surgir entre un Etat membre et l'OUA;

2° les conflits pouvant surgir entre un Etat membre ou un individu ou une personne morale ; et

3° les conflits surgissant entre un Etat membre et un Etat non membre de l'OUA.144

En second lieu, la compétence de la Commission est facultative.

En effet, le consentement de l'Etat membre partie au différend peut se manifester « soit par soumission du litige à la Commission par l'autre Etat soit par l'acceptation de la juridiction relative à un litige déféré à la Commission par un autre Etat ».145

De plus, même si la Commission peut également être saisie par le Conseil des ministres ou la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement, l'accord des deux parties au différend demeure nécessaire.

Enfin, le bureau de la Commission intervient pour examiner avec les parties la manière la plus appropriée de régler le conflit soumis à la Commission (art. 7 du Protocole).

Cependant, les Etats demeurent libres du choix des moyens de règlement pacifique de

leurs conflits. Ainsi, conformément à l'art. 19 du protocole, « les parties peuvent se mettre d'accord pour recourir à l'une de ces procédures de règlement : médiation, conciliation ou encore arbitrage ».

144 Article 19 du Protocole de la Commission de médiation, conciliation et arbitrage.

145 Article 14 du Protocole de la Commission de médiation, conciliation et arbitrage.

58

B. Les organes subsidiaires

1. Le Comité de coordination pour la libération de l'Afrique

La résolution sur la décolonisation adoptée par la Conférence au sommet à

Addis-Abeba en 1963 institue en son point 11 « un Comité de coordination pour la libération de l'Afrique »146

Initialement, le Comité de libération regroupait les représentants de neuf (9) pays membres.147

Cependant, cette composition sera revue à la hausse, car la 3ème Conférence au sommet

d'Accra (octobre, 1965) a porté le nombre de membres à onze avant que le sommet de

Rabat (juin, 1972) ne les fasse passer au nombre de 17. Enfin, il ne faudrait pas perdre

de vue que depuis 1966, tout Etat membre de l'OUA peut assister à ses travaux en tant qu'observateur.148

En vue d'atteindre son objectif - c'est-à-dire libérer tous les territoires africains sous domination coloniale - le Comité de coordination tient deux sessions ordinaires par an à son siège, Dar-Es-Salam ( art. 2 du Règlement intérieur du Comité) mais il peut aussi se réunir en sessions extraordinaire.

Les compétences du Comité de libération

Le Comité de libération coordonne l'assistance aux luttes armées, fournie par les

pays membres de l'OUA ou par d'autres pays, organisations ou encore par les individus.

C'est à ce titre qu'il gère le « Fonds spécial » alimenté par les contributions annuelles

volontaires des Etats.

En outre, le Comité de libération encourage les mouvements de libération à coordonner leurs efforts et à créer des fronts unis. Egalement, il s'emploie à régler les litiges nés entre ces mouvements.

146 Résolution CIAS/Plein.2/Rev.2 de mai 1963, à Addis-Abeba sur la décolonisation.

147 Il s'agissait de l'Ethiopie, Algérie, Ouganda, Egypte, Tanzanie, Zaïre, Guinée, Sénégal et Nigeria.

148 JOUVE (E.), L'Organisation de l'Unité Africaine, Paris, PUF, 1984, p. 86

59

Enfin, il leur fournit aide et assistance. Il faut préciser que le Comité dispose de trois commissions permanentes formées de représentants des pays membres en matière

de politique générale et d'information, de défense, de finances,et d'administration.

Ces instances tiennent deux réunions plénières par an qui sont normalement placées avant celles du Comité afin de préparer ses sessions (art. 35 du Règlement intérieur du Comité).

Le Comité soumet au Conseil des ministres ses programmes politiques, militaires, administratifs et financiers.

Il est responsable devant lui et devant la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement.

2. Les Commissions spécialisées et les Institutions spécialisées de

l'OUA

La Charte de l'OUA prévoyait des Commissions spécialisées.

Tout au long de son évolution, l'OUA a créé un certain nombre d'Institutions spécialisées.

Nous nous proposons de les dénombrer sans pour autant prétendre décrire leur fonctionnement, d'une quelconque manière.149

a. Les Commissions spécialisées

L'art. 20 de la Charte d'Addis-Abeba crée, outre les Commissions spécialisées

que la Conférence peut juger nécessaires :

- une Commission économique et sociale ;

- une Commission de l'éducation et de la culture ;

- une Commission de la santé de l'hygiène et de la nutrition ;

- une Commission de la défense ;

- une Commission scientifique, technique et de la recherche.

149 Ici, la rareté des documents nous contraint à une énumération pure et simple.

60

La pratique a révélé que ces Commissions n'ont pu se réunir faute de quorum des deux tiers. C'est à ce titre qu'un Comité d'experts composé de dix Etats a été chargé de

la réforme des Commissions spécialisées de l'OUA, qui jusqu'en 1964 ne se réunissaient pas.150

Le Comité a proposé la réduction du nombre de ces Commissions en les regroupant.

Cette proposition a été adoptée par le sommet africain d'Addis-Abeba en 1966 et le nombre de Commissions a été réduit à trois ; puis finalement porté à quatre en 1976.151

Ainsi, il ne va rester que :

- la Commission pour les questions économiques, sociales, des transports et des communications ;

- la Commission du travail ;

- la Commission de défense ; et

- la Commission de l'éducation, de la science, de la culture et de la santé.

Enfin, l'art. 21 de la Charte précise que chacune de ces Commissions spécialisées

est composée des ministres compétents ou de tous autres ministres ou plénipotentiaires désignés à cet effet par leur gouvernement.

150 JOUVE (E.), op. cit., p. 80

151 Ibid.

61

b. Les Institutions spécialisées

Plusieurs Institutions spécialisées ont été créées par l'OUA, il s'agit entre autres152 :

Nom de l'agence

Date d'adoption

Session

L'accord avec l'OUA signé le

1. Commission Panafricaine de l'Aviation Civile

25 juillet 1975

25ème session du Conseil

des Ministres CM/Rés.439 (XXV) KAMPALA

11 mai 1978

2 .Union Panafricaine des chemins de Fer

3 juillet 1976

27ème Session ordinaire

du Conseil des Ministres

CM/Rés.507 (XXVII)

20 février 1977

3. Union Panafricaine des Postes

28 juin 1980

35ème session du Conseil

des Ministres

CM/Rés.810 (XXXV)

_

4. Conseil Supérieur des Sports en Afrique

3 juillet 1977

29ème session du Conseil

des Ministres

CM/Rés.578 (XXIX)

14 février 1980

Addis-Abeba

5. Union

Panafricaine des

Télécommunications

21février 1975

24ème session du Conseil

des Ministres

CM/Rés.404 (XXIV)

14 juillet 1977

Monrovia

6. Agence Panafricaine d'Informations

25 mai 1963

CIAS/Plen.3 (B)

_

152 Ce tableau est une reproduction exacte du tableau établi par BA (A.) et al., op. cit., p. 112

62

Section 2ème : La contribution de l'OUA

Durant ses trente-neuf ans d'existence, l'OUA a contribué à la résolution de nombreux problèmes africains. En vérité et au regard de ce qui précède, la Charte de l'OUA prévoyait plusieurs domaines d'activités qui ont constitué son champ de compétence.

Ici nous nous proposons de relever la contribution de l'OUA sur un plan purement juridique car aller au-delà de cette limite serait déborder largement le cadre restreint de cette étude.

Ainsi, le cadre auquel nous nous limitons, nous permet de traverser plusieurs aspects de

la contribution de l'OUA bien que nous ne saurions faire un relevé exhaustif de ses réalisations.

Ce faisant, sur un plan purement juridique, nous nous proposons de relever la

contribution de l'OUA au développement du droit international africain avant de terminer par son apport quant à la question particulière du règlement pacifique des conflits interafricains.

§1 La contribution au développement du droit international africain

L'examen de la contribution de l'OUA au développement du droit international africain soulève au préalable la question de savoir s'il existe un droit international africain. Ce n'est qu'après une réponse affirmative qu'il faut relever l'apport de l'OUA

au développement de ce droit.

A. L'existence du droit international africain

Si au lendemain des indépendances, certains auteurs estimaient que le droit

international africain était un droit encore en formation, quatre décennies après le

« soleil des indépendances », il serait vain de contester sa réalité.

63

En effet, avant les indépendances, l'Afrique n'a connu le droit international traditionnel que dans une projection coloniale (capitulation, protectorat, concession, etc.) que les Africains considéraient dans la suite, comme un droit conçu en particulier pour légitimer les acquisitions et privilèges européens.

Ainsi, la substitution des structures de type colonial par une configuration de l'Afrique indépendante a eu pour conséquence la remise en question de ces principes élaborés par

les Européens et l'édification d'un réseau de normes de droit régional spécifiquement africain.153

En définitive, il apparaît que le droit international africain est constitué de l'ensemble des normes régissant les rapports entre Etats africains en quête de solutions propres à leurs problèmes.154 Particulièrement, l'OUA a offert un cadre prestigieux à l'élaboration et à la confection d'un corps de normes de droit international africain.

B. L'apport de l'OUA au droit international africain

A l'instar des autres organisations internationales, l'OUA dispose de pouvoirs

normatifs, lesquels s'exercent de deux façons : tantôt sous forme de conventions, tantôt sous forme de résolutions ou décisions.

1. Les conventions de l'OUA

Depuis sa création en 1963, l'OUA a offert aux Etats membres un cadre juridique

pour l'élaboration et l'adoption de multiples conventions.

En effet, l'organisation à travers ses organes de décisions a adopté 21 traités parmi lesquels treize sont entrés en vigueur, les autres étant à différents stades de signatures

ou de ratification.

153 GHALI (B. B.), op. cit., p. 5

154 GHALI (B.B.), Le système régional africain in Colloque SFDI,Universalisme et régionalisme dans le droit international contemporain , Paris , A. Pedone, 1977, p. 61

64

En 2001, le Secrétariat général de l'OUA était dépositaire des traités et conventions suivants155 :

I. Convention générale sur les privilèges et immunités de l'OUA

II. Protocole additionnel à la convention sur les privilèges et immunités de l'OUA.

III. Convention phytosanitaire pour l'Afrique.

Cette convention a été approuvée par la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement le 13 septembre 1967 à Kinshasa (République Démocratique du Congo)

IV. La Convention africaine sur la conservation de la nature et des ressources

naturelles.

Adoptée et signée par les Chefs d'Etat et de gouvernement à Alger le 15 septembre

1968, elle est entrée en vigueur le 16juin 1969.

V. Constitution de la Commission africaine de l'aviation civile

Signée à Addis-Abeba le 17janvier 1969, elle est entrée en vigueur le 15 mars 1972.

VI. Convention régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique

Adoptée et signée par la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement à Addis- Abeba (Ethiopie)le 10 septembre 1969, elle est entrée en vigueur en 1975.

VII. Constitution de l'Association des Organisations africaines de Promotion du

Commerce

Adoptée à Addis-Abeba le 18 janvier 1974, elle était considérée comme étant provisoirement en vigueur bien qu'elle n'avait pas encore réuni la ratification requise

de douze Etats signataires (article XV alinéa 3 de la même convention).

VIII. La Convention inter africaine portant établissement d'un programme de

coopération.

Cette convention n'est pas encore entrée en vigueur.

155 Le rapport du Secrétaire général sur l'état des signatures et ratifications /adhésion des traités de l'OUA, adopté

par le Conseil des ministres de l'OUA en sa 73ème session ordinaire du 22 au 26 février 2001 à Tripoli (Libye), Document OUA, CM/ 2196, ( LXXIII), p. 2

65

IX. La Convention de l'OUA pour l'élimination du mercenariat en Afrique

Elle est entrée en vigueur le 22 avril 1985 alors qu'elle avait été Adoptée et signée le 3

juillet 1977 à Libreville (Gabon)

X. Charte culturelle de l'Afrique

Adoptée à l'Ile Maurice le 5 juillet 1976, elle est entrée en vigueur le 19 septembre

1990.

XI. Charte africaine des droits de l'homme et des peuples.

Adoptée par la 18ème Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement de juin 1981 à Nairobi (Kenya), cette Convention a été ratifiée par tous les Etats membres et entrée en vigueur le 21 octobre 1986.

XII. Convention portant création du Centre africain pour le développement des

engrais.

Cette Convention n'est pas encore entrée en vigueur.

XIII. L'Accord portant création de l'institut panafricain de réadaptation

Cet institut a été créé en application de la résolution du CM /Rés.834(XXXVI) adoptée

par le Conseil des ministres entérinée par la 18èmeConférence des Chefs d'Etat et de gouvernement à Nairobi(Kenya) en juin 1981.

L'Accord y afférent est entré en vigueur le 2 décembre 1981.

XIV. Traité instituant la Communauté Economique Africaine

Adopté et signé à Abuja (Nigeria) le 3 juin 1991, ce Traité est entré en vigueur le 12

mars 1994

XV. Convention de Bamako sur l'interdiction d'importer en Afrique des déchets

dangereux et sur le contrôle des mouvements transfrontières et la gestion des déchets

dangereux produits en Afrique.

Adoptée lors d'une conférence du Conseil des ministres de l'environnement à Bamako

(Mali) en janvier 1991, elle est entrée en vigueur le 22 avril 1998.

XVI. Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant

Adoptée par la 26ème session de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement d'Addis-Abeba (Ethiopie) en juillet 1990, elle est entrée en vigueur le 29 novembre

1999.

XVII. Traité faisant de l'Afrique une zone exempte d'armes nucléaires.

Bien qu'adopté le 11 avril 1996 au Caire en Egypte, ce traité n'est pas encore entré en vigueur.

66

XVIII. La Charte africaine des transports maritimes.

Cette charte n'est pas encore entrée en vigueur.

XIX. Protocole à la charte africaine des droits de l'homme et des peuples relatif à la

création d'une Cour africaine des Droits de l'homme et des peuples.

Ce Protocole a pour objectif de renforcer le régime des droits de l'homme en Afrique. Il

a été adopté par la 34èmesession de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement

de l'OUA à Ouagadougou (Burkina Faso), le 10 juin 1998.

XX. Convention sur la prévention et la lutte contre le terrorisme.

Adoptée à Alger par la 35ème session de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement.

2. Les décisions et résolutions de l'OUA

Pour compléter les traités, les différents organes de l'OUA ont pris des décisions

et résolutions importantes en vue de résoudre les problèmes propres aux peuples africains.

François BORELLA affirme que « l'influence des Etats africains sur le droit international est indéniable. Cette influence est d'autant plus considérable dans la mesure où elle aboutit à de nouvelles orientations dans l'interprétation des principes et des objectifs de l'ONU ». 156

Il souligne également l'inquiétude exprimée par les autres sujets de droit sur les divergences dans la façon d'appréhender certaines questions de droit international. En effet, dans le domaine de la décolonisation, les Etats membres de l'OUA interprètent d'une façon particulière le principe des compétences nationales réservées, arguant que

le problème colonial constitue une ingérence dans les affaires intérieures de l'Afrique,

ce qui leur permet de déduire de la nécessité de soutenir les mouvements anticolonialistes. Cette nécessité est érigée au rang de devoir qui s'impose à tout Etat membre de l'OUA et un droit de résistance à l'agression tel que reconnu par le droit international.157

156 BORELLA (F.), « Le régionalisme africain en 1964 », in AFDI, 1965, p. 621

157 Idem., p. 623

67

A partir de ce principe, l'OUA est parvenue à obtenir l'adoption, par l'ONU, de

la résolution 2131(XX) du 21 décembre 1965 qui appelait tous les Etats à contribuer à l'élimination totale de la discrimination raciale et du colonialisme sous toutes ses formes.

Notons également que des résolutions ont été adoptées par les organes de l'OUA,

notamment le Conseil des ministres sur la question de discrimination raciale.

Il s'agit entre autres de :

- la résolution sur l'apartheid et la discrimination raciale158 ;

- la résolution sur l'interdiction de relations aériennes entre Etats indépendants de l'Afrique et l'Afrique du Sud159 ;

- la résolution sur l'application des régimes minoritaires de l'Afrique Australe.160

Signalons enfin, l'existence des autres résolutions de l'OUA destinées à édicter des règles générales dont l'importance et le contenu ont varié selon les axes prioritaires tracées par l'organisation au cours de son évolution.

Sans être exhaustif nous citerons, les résolutions sur la lutte contre la sécheresse et les

calamités naturelles (CM/Rés.924 (XXXVIII)); sur l'intangibilité des frontières

(AGH/Rés.16 (I)); sur les problèmes des pays africains les moins avancés (ECM/ECD

9(XIV) Rev.2); sur le développement industriel en Afrique (CM/Rés.886 (XXXVII));

sur les personnes handicapées en Afrique (CM/Rés.920 (XXXVII)) ; sur la promotion

de la culture africaine (CM/Rés.757 (XXXIII)); sur le droit de la mer (CM/Rés.745

(XXIII)).161

Cela étant, bien que sous l'égide l'OUA il y ait eu confection d'un nombre important d'instruments et/ou textes visant la recherche de solutions propres aux Africains, toujours est-il qu'il demeurait beaucoup à faire dans la ratification et leur mise en oeuvre. Cependant, à travers toutes ces mesures édictées spécialement dans un intérêt commun de l'Afrique, l'OUA a ainsi contribué au développement du droit international africain.

158 CM/Rés. 102 (IX) septembre 1967 à Kinshasa

159 CM/Rés. 473 ( XXVII) juillet 1976 à Port-Louis

160 CM/Rés.734(XXXIII)Rev.2 juillet1979 à Moronvia

161 Pour le contenu de toutes ces résolutions, Cf. BA (A.) et al., op. cit..712 p.

68

§2 La contribution de l'OUA dans le règlement des différends interafricains

D'emblée il n'est pas superflu de préciser que notre propos n'est pas de présenter une étude complète des conflits africains162 plutôt de dégager de quelle manière l'OUA

a contribué à la gestion des conflits interafricains.

A cette fin, nous nous proposons en premier lieu de relever la doctrine développée par l'OUA pour faire face aux conflits interafricains avant de terminer sur la pratique suivie par l'OUA en matière de règlement pacifique des différends.

1. La doctrine de l'OUA

En vertu du droit international et de la Charte elle-même, les Etats membres de

l'OUA sont tenus de régler pacifiquement leurs conflits.

Les conflits dont il est question sont les conflits entre Etats africains à l'exclusion d'autres conflits.163

Suivant cette limitation, l'OUA a défini une doctrine qui s'articule sur deux principes :

le principe de la non-intervention dans les affaires intérieures d'un autre Etat et le principe de l'intangibilité des frontières.

Tout d'abord, en ce qui concerne le principe de la non-intervention, l'OUA en tant qu'organisation de l'unité africaine se devait d'assurer un cadre « de bon voisinage qui inspire largement l'affermissement de la coopération régionale , participant ainsi au

maintien de la paix et de la sécurité internationale »164. Ce principe du fait de son

importance a trouvé un relais nécessaire dans la résolution AHG/Rés.27. sur la condamnation de la subversion.

En fait, la non-ingérence dans les affaires intérieures ainsi que la condamnation de la subversion impliquent l'interdiction d'entretenir sur le territoire d'un autre Etat membre, un gouvernement provisoire tendant à renverser le régime d'un autre Etat africain indépendant.

162 Pour une vue plus détaillée du sujet, Voir GHALI (B.B), Les conflits de frontières en Afrique, Paris, éd. Techniques et économiques, 1972, 158 p.

163 Cf. article 12 du Protocole de Caire (Protocole relatif à la Commission de médiation, conciliation et arbitrage)

164 SANGO (O.), Le système juridique de l'OUA dans l'application du principe de non intervention dans les

affaires intérieures d'un autre Etat, Bujumbura, Mémoire UB, juillet 1983, p. 17

69

Cette condamnation vaut également à l'égard de l'établissement dans un Etat membre des foyers de subversion dirigés contre d'autres Etats en vue de fomenter des troubles politiques, raciaux, religieux ou linguistiques.165

Ce principe et son corollaire permettaient, dans la pratique, de créer un climat en permanence propice à la coopération ainsi qu'au maintien des relations pacifiques et amicales entre les Etats africains dans le respect mutuel de la souveraineté de chacun.166 . Bien que cela ne fût pas toujours le cas, les bases juridiques et théoriques étaient jetées.

Le second principe, celui de l'intangibilité des frontières, implique, quant à lui, d'une part l'interdiction de porter atteinte unilatéralement aux frontières ou aux territoires des autres Etats, et d'autre part, c'est un principe qui interdit aux pays issus

de la colonisation de remettre en cause les frontières existant au moment de l'indépendance167 , introduisant ainsi une autre notion : l'«uti possidetis juris ».

Cette notion est l'application de la maxime romaine : « uti possidetis, uti possideatis » dont la traduction est : « Comme tu possèdes, continue à posséder » et qui signifie « le maintien du statu quo provisoire dans la possession d'un bien contesté entre deux parties avant que le juge ne se prononce définitivement sur la reconnaissance du titulaire de la propriété ».168

En réalité, le choix de ces deux principes par l'OUA avait un double but.

D'une part, elle permettait d'éviter, comme en Amérique latine, que ne surviennent des conflits frontaliers tous azimuts ; elle empêchait également la rupture de la fragile unité

du continent noir.169

D'autre part, ce principe permettait, comme le note Andémicael BERHAMYKUN, « de donner du poids à l'action de l'OUA pour la paix ».170

165 YAKEMTCHOUK (R.), L'Afrique en droit international, Paris, LGDJ, 1971, p. 276

166 SANGO (O.), op. cit., p.18

167 NYAMOYA (F.), Application du principe de l'intangibilité des frontières dans les organisations

internationales : exemple de l'OUA, Bujumbura, Université du Burundi, Mémoire, septembre 1982, p.12

168 EL OUALI (A.), « L'uti possidetis ou le non sens du principe de base de l'OUA pour le règlement des différends territoriaux », in Le Mois en Afrique, décembre1984-janvier1985, 227-228, p. 10

169 YAKEMTCHOUK (R.), op. cit. , p. 65

170 BERHAMYKUN (A.), cité par NYAMOYA (F. ), op. cit., p. 16

70

En définitive, la doctrine définie par l'OUA en matière de règlement pacifique des conflits est d'une importance et comporte des éléments constructifs : « le triomphe

de la règle de droit dans ses dimensions spatio-temporelles, une garantie pour la sécurité juridique des relations internationales et une source créatrice des rapports interétatiques ».171

A. La pratique de l'OUA dans le règlement des différends interafricains

L'étude de la pratique de l'OUA dans le règlement des conflits interafricains

mérite, de prime abord, quelques observations d'ordre théorique.

D'abord, il est important de souligner que le droit international consacre la liberté de choix du mode de règlement pacifique tel que prévu dans la Déclaration de Manille sur le règlement pacifique des différends, approuvée par l'Assemblée générale des Nations Unies en 1982.172

Ensuite, il y a lieu de distinguer deux types de règlement pacifique des différends :

- les procédés politiques qui ne font pas appel à un organe judiciaire ;

- les procédés juridiques qui recourent à l'arbitrage ou à des juridictions permanentes.173

Précisément, l'analyse de la pratique de l'OUA nous amène à dégager tout d'abord le cadre organique de règlement des conflits prévu par sa Charte, avant de relever d'autres procédés qui ont fait leurs preuves dans le cadre de l'OUA.

171 YAKEMTCHOUK (R.), op. cit., p. 65

172 AGNIEL (G.), Droit International Public, Paris, Hachette, Coll. «Les Fondamentaux », n°103, 1998, p.118

173 Idem., p. 119

71

1. Le rôle de la Commission de médiation, de conciliation et d'arbitrage.

D'emblée, le rôle de la Commission de médiation, conciliation et d'arbitrage a été très faible, voire inexistant pour reprendre l'analyse de François NYAMOYA.174

En effet, comme il le fait remarquer, deux ans après la mise en place de cet organe, la

Commission n'avait pas encore eu l'occasion de fonctionner.

Bien que son Protocole ait été approuvé par la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement de l'OUA, en juillet 1964, la mise en place de cette Commission n'est intervenue qu'en octobre 1965.

De plus, la Commission n'a jamais été saisie d'aucun litige.

Pourtant, ce n'est pas la matière qui a manqué. C'est à ce titre que François BORELLA constate, en 1974 - soit dix ans après l'institution de la Commission de médiation, de conciliation et d'arbitrage - que l'OUA refuse toujours à rendre fonctionnel la Commission de médiation alors que les litiges frontaliers foisonnent.175

L'analyse de l'inadaptation du Protocole du 21 juillet 1964 à la réalité politique

africaine a été savamment menée par Jean-Marie BIPOUM-WOUM176.

Ici, nous nous bornerons à constater seulement la paralysie dans laquelle est plongée la Commission depuis sa création tout en soulignant la méfiance des Etats africains à l'égard du règlement pacifique des conflits par la voie juridictionnelle, et de surcroît à l'égard d'organes qu'ils ont eux-mêmes juridiquement institués.

Précisément, la Commission de médiation, de conciliation et d'arbitrage n'ayant pas eu

le succès escompté en matière de règlements des différends, les Chefs d'Etat et de gouvernement ont convenu de créer une nouvelle structure en juin 1993, appelée Mécanisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits.177

« Ce mécanisme qui a pour principale tâche la prévention et le règlement des conflits prévoit d'agir en parfaite symbiose avec les Nations Unies, étant donné la responsabilité

174 NYAMOYA (F.), op. cit. ,p.40

175 BORELLA (F.), Evolution récente de l'OUA, AFDI 1974, p. 221

176BIPOUM- WOUM (J-M.), Le droit international africain, Paris, LGDJ, 1970, 327 p.

177 Voir Rapport du Secrétaire général sur la création d'un Mécanisme pour la gestion et le règlement des conflits,

58ème session ordinaire du Conseil des ministres, 21-26 juin 1993, Document OUA, CM/1767 (LVIII), p. 1

72

principale du Conseil de sécurité en matière de maintien de la paix ».178 Mais aussitôt mis en place, ce nouvel organe devait aussi faire face à des difficultés matérielles, financières et logistiques, rendant ainsi son action limitée.179

Du reste, il est aussi intéressant de constater que certains conflits interafricains ont reçu une solution pacifique en marge de ces cadres organiques mis en place par l'OUA , ce qui signifie donc qu'il existait en dehors du cadre organique prévu par la Charte d'autres procédures de règlement de conflits.

2. Les autres procédures de règlement pacifique des différends.

Malgré la paralysie de la Commission de médiation de conciliation et d'arbitrage,

les Etats africains ont déployé dans le cadre de l'OUA, d'autres procédures à la fois politiques et diplomatiques pour résoudre leurs conflits.

A ce niveau, il faut souligner, d'une part, le rôle des commissions ad hoc de l'OUA, qui le plus souvent étaient composées de ministres des Affaires étrangères en tant qu'agents collectifs d'exécution de la Conférence au sommet à laquelle ils rendent compte.

Ces commissions ad hoc ont offert à maintes reprises leurs bons offices pour favoriser le rapprochement entre les belligérants, en procédant par une étude objective dans une procédure d'enquête des faits, de la cause du litige.

D'autre part, nous ne saurions faire abstraction de l'intervention personnelle des Chefs

d'Etat - que Jean-Marie BIPOUM-WOUM n'hésite pas à qualifier de « souverains ».180

En fait, la personnalisation du règlement des conflits africains au niveau le plus élevé c'est-à-dire les Chefs d'Etat « relève souvent soit de la technique des bons offices, soit

de la médiation décidée par les organes de l'OUA avec l'accord des parties en cause et confiée à quelques Chefs d'Etat dont le prestige et l'autorité sont grands ».181

C'est à ce titre d'ailleurs que beaucoup de ces « Pèlerins de la paix » tels que Hailé

SELASSIE, HOUPHOUËT-BOIGNY, Kenneth KAOUNDA, Julius NYERERE ou

178 GUEUYOU (M. L.), Les rapports entre l'Organisation des Nations Unies et l'Organisation de l'Unité Africaine

au regard du Chapitre VIII de la Charte de l'ONU, Paris, Université Paris X Nanterre, Thèse Droit Public, 2002, p.193

179 Idem., p. 210

180 BIPOUM- WOUM (J.M.), op. cit., p. 253

181 Ibid.

73

EYADEMA s'étaient acquis une réputation de conciliateur et de sages d'Afrique. C'est aussi le cas de l'accord de cessation des hostilités et de l'accord de paix conclus entre l'Erythrée et l'Ethiopie sous la direction du Président algérien Abdelaziz BOUTEFLIKA en juin 2000.182

Enfin, il convient de remarquer que si ces procédés tant diplomatiques que politiques sont moins institutionnalisés, simples et souples, il n'en demeure pas moins qu'ils n'épuisent pas souvent le fonds du différend.

Du fait qu'ils ne sont fondés sur aucune règle de droit, leur rôle apparaît plutôt comme

celui d'apaiser les tensions, autant que faire se peut.

En réalité, le rôle joué par l'OUA dans le règlement pacifique des conflits interafricains est indéniable.

Au-delà, et pour terminer, il nous faut faire deux observations.

D'une part, à travers la doctrine élaborée par le règlement pacifique des conflits et la pratique suivie dans ce même sens, il apparaît que les Etats africains ont affirmé leur volonté de régler leurs conflits dans un cadre strictement africain.

D'autre part, si la tendance générale est d'évaluer la contribution de l'OUA en établissant le rapport entre les conflits effectivement nés et ceux effectivement résolus, nous soulignerons qu'une appréciation juste de cette contribution doit aussi tenir compte des conflits - très nombreux - qui ont pu être évités grâce à l'action de l'OUA.

Au demeurant, la contribution de l'OUA sur le plan juridique est aussi indéniable. L'étude rapide et brève sur cette contribution nous aura renseigné sur la valeur de l'OUA tout en nous laissant entrevoir ses limites.

C'est là un aspect qui nous retiendra plus longuement dans le cadre des difficultés

rencontrées par l'OUA, objet de la section suivante.

182 Rapport du Secrétaire général sur le processus de paix entre l'Erythrée et l'Ethiopie, CM/2213 ( LXXIV), p. 1

74

Section 3ème : Les difficultés de l'OUA

Le bilan de l'OUA tel qu'il se présentait lors du trente-huitième sommet des Chefs d'Etat et de gouvernement, peut-il paraître modeste à la lumière des ambitions affichées à l'origine.

Au regard de ce qui précède, certes beaucoup de réalisations ont été enregistrées mais force est de constater que beaucoup d'objectifs demeuraient encore à concrétiser.

Nombreux sont les auteurs, hommes politiques ou simples observateurs qui ont affublé l'OUA de critiques acerbes. Pour certains, il fallait en conclure avec cette organisation qui n'avait que trop duré avec son inefficacité ; pour d'autres des réformes institutionnelles étaient à envisager afin d'assurer l'efficacité de l'OUA pour l'avenir.183

Cependant pour ce qui nous concerne, avant d'en arriver là, nous pensons que dresser

un bilan honnête à l'OUA est tout d'abord d'exposer ses objectifs - ce qui a été déjà fait

-, ensuite de relever sa réelle contribution - nous venons de le faire - et enfin de terminer, au regard de ces deux précédents points, sur les faiblesses et difficultés auxquelles l'OUA a dû faire face durant ses trente-neuf ans d'existence.

Pour ce faire, nous nous proposons, à travers cette section, de répondre à la question de savoir : quelles ont été les entraves à la capacité d'action de l'OUA ?

C'est à ce titre que nous consacrerons un premier paragraphe à mettre en lumière le contexte général dans lequel l'OUA a évolué avant de dégager les insuffisances juridiques qui ont caractérisé l'OUA.

183 Axel KABOU va même plus loin en proposant « dix bonnes raisons pour ne pas sauver l'OUA ! » Voir KABOU (A.), Et si l'Afrique refusait le développement ?, Paris, L'Harmattan 1991, p. 91

75

§1 Le contexte général de l'existence de l'OUA

A. Les contraintes internes

Les contraintes internes ont eu pour principales causes les faiblesses liées aux

moyens humains ainsi que les insuffisances financières.

1. Les faiblesses liées aux moyens humains

Il est certain que les moyens humains dont dispose une organisation rendent

compte de son fonctionnement.

Au-delà, l'analyse de la condition de ces moyens humains nous permet de rester en alerte avec le but de ce paragraphe ; nous renseigner sur les entraves à la capacité d'action de l'OUA ?

Selon un adage courant, une institution vaut ce que valent les hommes qui la font vivre !

Pour ce qui concerne, l'OUA, nous prenons, d'emblée, le soin de distinguer deux catégories de personnages qui assurent le fonctionnement de l'OUA :

les hommes politiques ( ou représentants de gouvernements) et le personnel administratif ( ou agents et fonctionnaires de l'organisation)

a. Les hommes politiques

De prime à bord, il nous faut rappeler qu'au sein de l'OUA les hommes

politiques composent les deux principaux organes délibérants.

Toutefois, force est de constater que la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement

est l'organe suprême de l'organisation et que le Conseil des ministres est totalement dépendant de la Conférence des Chefs d'Etat.

Ce faisant, notre propos entend se limiter aux Chefs d'Etat et de gouvernement. La

position prééminente des chefs d'Etat s'est inévitablement répercutée sur la capacité d'action de l'OUA.

Tout d'abord, en ce qui concerne le règlement des conflits, le rôle accru des

Chefs d'Etat a éclipsé totalement celui de la Commission de médiation.

76

A ce propos, Jean-Marie BIPOUM-WOUM n'hésite pas à soutenir qu' « en fait, l'action en vue de l'apaisement des litiges a surtout été l'oeuvre personnelle des Chefs d'Etat, agissant individuellement ou collectivement. »184

Ensuite, l'apparition de l'institution de « Président en exercice » non prévue par

la Charte mais consacrée par la pratique n'a fait que renforcer la position clé des Chefs d'Etat au sein de l'OUA.

L'instauration de cette fonction a eu pour effet de générer des velléités d'indépendance

de la part du Secrétaire général, lesquelles pouvaient aboutir à des oppositions ou à des conflits préjudiciables au bon fonctionnement de l'organisation.

A titre d'exemple, les initiatives prises par Edem KODJO, à propos de l'admission de la

RASD eurent pour effet de susciter la critique du Président en exercice du moment, le

Kenyan Arap MOI.185

Enfin et surtout, le rôle déterminant des Chefs d'Etat peut motiver, en partie, pourquoi en général les résolutions adoptées par la Conférence sont souvent considérées comme des textes de compromis.

Pour le Pr. Pierre François GONIDEC, il est évident que chaque chef d'Etat, qui décide

en dernier ressort de la politique qu'il juge la meilleure à la fois pour l'Etat dont il a la charge et pour l'unité de l'Afrique telle qu'il la conçoit, cherche à faire triompher son point de vue dans le cadre de l'organisation.186

La conséquence est-elle aussi évidente : les résolutions de l'OUA sont généralement des textes de compromis qui laissent apparaître des ambiguïtés, des silences et des non-dits. Nous y reviendrons longuement plus loin.

Pour clore sur ce point, notons que même si les Chefs d'Etat dominent de leur stature l'OUA, il faut aussi souligner que la marche quotidienne de l'organisation repose sur les épaules du personnel administratif.

184 BIPOUM-WOUM (J- M.), op. cit.,p. 256

185 GONIDEC (P. F.), L'OUA, trente ans après, Paris, Karthala, 1993, p. 36

186 Idem., p. 37

77

b. Le personnel administratif

Ici, nous évoquerons les agents et fonctionnaires de l'organisation qui composent

le Secrétariat général et particulièrement de son chef, le Secrétaire général.

Il s'agit en fait de rechercher si la qualité du personnel mis à la disposition de l'OUA est

de nature à renforcer la capacité de l'organisation.

En premier lieu, en ce qui concerne la désignation du Secrétaire général de l'OUA, le Règlement intérieur du Secrétariat recommande de prendre « avant tout en considération la compétence et les mérites du candidat ».187

Cependant, la pratique montre plutôt que des considérations politiques interviennent dans la procédure de désignation à la fois du Secrétaire général et des Secrétaires généraux adjoints.

En fait, leur désignation est parfois due à l'influence de tel ou tel Chef d'Etat.

C'est ainsi que Edem KODJO fut élu « grâce à l'intervention personnelle du Chef d'Etat togolais, le Général Gnassingbe EYADEMA ».188 Ou encore le Guinéen Diallo TELLI qui « fut élu avec l'appui de Kwame Nkrumah et de ses amis progressistes ».189

En marge de considérations politiques qui guident le choix du Secrétaire général, le rôle

du Secrétaire général est aussi handicapé par le fait que sa prétention à outrepasser son rôle administratif a, à maintes reprises, provoqué des réactions hostiles de la part des hommes politiques.

Selon KODJO (ancien Secrétaire général de l'OUA), « si un Secrétaire général veut

durer, il ne peut qu'être le reflet fidèle de la volonté contradictoire de ses innombrables patrons, les chefs d'Etats et de gouvernement ».190

En second lieu, pour ce qui concerne le reste des fonctionnaires et agents de l'organisation, ils sont, rappelons-le, placés sous les ordres du Secrétaire général.

Le droit de l'OUA contient des principes qui garantissent à l'organisation de disposer

d'un personnel hautement qualifié et indépendant par rapport aux gouvernements de leurs Etats d'origine.191

187 Article 8 du Règlement intérieur de Secrétariat général de l'OUA, voir BA (A.) et al.., op. cit. , p. 43

188 KOUASSI (K.), op. cit. , p. 151

189 GONIDEC (P. F.), op. cit., p. 33

190 KODJO (E.), préface in JOUVE (E.), op. cit., p. 12

191 Voir à ce propos l'art. 18 de la Charte de l'OUA et les art. 15 et suivants du Statut du personnel de l'OUA ;

doc. CM/896 (XXXI) Rev. 4 Annexe I

78

Toutefois, bien que jouissant d'un Statut international reconnu192 , les fonctionnaires de l'OUA ne bénéficient pas des mêmes conditions de confort et d'aisance matérielle que les autres fonctionnaires internationaux, comme ceux des Nations Unies, par exemple.

C'est ainsi qu'au cours de ses enquêtes, J.F CLARK remarque qu' « il y avait parmi les observateurs à Addis-Abeba un accord général sur le fait que le Secrétariat de l'OUA était de qualité inférieure et que, ses faiblesses étaient dues en partie au bas niveau des salaires ».193

Enfin, les mêmes observateurs dénotent une certaine réticence, voire une répugnance, des Etats membres, à mettre à la disposition de l'OUA leurs meilleurs éléments.194

Dans notre étude, apparaît-il essentiel de ne pas faire abstraction des insuffisances des moyens financiers de l'OUA. Nous y consacrerons le point suivant.

2. Les insuffisances liées aux moyens financiers

Il est évident que l'insuffisance des moyens financiers impose des limitations aux

possibilités d'action d'une organisation internationale.

Ainsi, point n'est besoin de préciser que l'OUA, à l'instar de toutes les organisations internationales et même des Etats, doit disposer des ressources financières suffisantes pour fonctionner et ainsi faire face aux tâches qu'elle déciderait d'entreprendre.195

En effet, l'OUA était dotée d'un budget dont la procédure d'adoption, d'exécution et de contrôle est définie par la Charte et par le Règlement financier.

Notre propos, loin de vouloir décrire ici le droit budgétaire de l'OUA, vise plutôt à démontrer dans quelle mesure l'OUA disposait de ressources insuffisantes pour atteindre ses objectifs.

Le Règlement financier de l'OUA adopté à Nairobi le 4 mars 1979 énumère l'origine de

ses recettes. En effet, l'article 23 stipule que les recettes du budget de l'organisation comprennent :

- les contributions obligatoires des Etats membres ;

- les subventions, dons et legs ;

- les avances faites à l'organisation ;

- le remboursement des prêts et avances ;

192 Article 18, 2° de la Charte de l'OUA

193 CLARK (J.F), The politics of Africa,, Africana Publishing, 1979 cité par GONIDEC (P. F.), op. cit., p. 37

194 Ibid.

195 GONIDEC (P. F.), op. cit., p. 24

79

- les rémunérations des services rendus éventuellement par l'organisation ;

- les prélèvements sur le fond de réserve ou de roulement.

Nous nous proposons d'analyser les deux premières catégories de sources des recettes car pour le cas des autres, elles restent très hypothétiques et peu fréquentes.

a. Les contributions obligatoires

Ce sont les contributions financières versées par les Etats membres de l'OUA,

elles constituent la première source des recettes du budget de l'OUA.

A ce propos, l'article 23 de la Charte précise que la part de chaque Etat est fixée au barème en usage aux Nations Unies. Ainsi, « la part d'un Etat ne peut dépasser 20% du budget ordinaire annuel de l'organisation »196 ; ceci pour éviter qu'un Etat plus puissant que les autres ne dispose d'une plus grande influence.

De plus, la contribution financière de chaque Etat est évaluée en fonction de son Produit

National Brut (PNB) et de sa population.197

A partir de ces remarques et à la lumière de la pratique, nous ferons deux observations intéressantes.

La première est que compte tenu des capacités réduites de la plupart des Etats

africains, il apparaît évident que le budget de l'OUA est fort modeste.

Ainsi, « en 1998, c'est un budget de quelque 30 millions provenant des cotisations des

Etats membres dont 28 sont les plus pauvres du monde ».198

La seconde et dernière observation est qu'aussi modique que peut apparaître la contribution financière des Etats au budget de l'OUA, cette dernière devait encore faire face à l'irrégularité des contributions de ses Etats membres.

A titre d'exemple, KOUASSI note que pour l'année fiscale 1983-1984, cinq Etats seulement avaient payé la totalité de leur contribution et 35 n'avaient encore rien payé alors que même certains n'avaient rien versé depuis 1970. 199

196 Article 23 de la Charte de l'OUA

197 KAMARIZA (E.), 35 ans d'existence de l'OUA : ses forces et ses faiblesses, Bujumbura, Mémoire UB, juillet

1999, p. 20

198 KAMARIZA(E.), op. cit., p. 21

Cependant, nous tenons à préciser qu'elle n'indique pas la source de ces chiffres ou de cette affirmation.

199 KOUASSI (K.), op. cit. , p. 242

80

En outre, GONIDEC indique à son tour qu'en 1986, les arriérés s'élevaient à 40,5

millions de US dollars soit plus d'une fois et demie le budget de l'exercice fiscal 1986-

1987 qui était de 25 millions de US. 200

Enfin, le budget approuvé pour l'exercice financier 1999/2000 était de 33.400.000 dollars EU, tandis que les arriérés au bilan du 31 mai 2000 s'élevaient à 47.547.870,13 dollars EU.201

De ces observations, nous pouvons conclure - en faisant nôtre, la pensée du professeur GONIDEC - que l'OUA « est prise dans un cercle vicieux, elle est parfois incapable d'agir parce qu'elle ne bénéficie pas d'un soutien financier suffisant des Etats

et ceux-ci ne peuvent pas augmenter leurs contributions financières [ou en assurer la régularité] parce que l'OUA ne les aide pas suffisamment à résoudre les problèmes de sous développement ».202

Et faute de pouvoir compter sur des contributions régulières et suffisantes des Etats membres, l'OUA peut recevoir dons, legs et subventions.

b. Dons, legs et subventions

La pratique révèle qu'à maintes occasions, l'OUA a dû faire appel à l'aide

extérieure. Le Règlement financier de l'OUA prévoit que l'organisation peut recevoir dons, legs et autres libéralités, à condition qu'elles soient acceptées par le Conseil des ministres qui en examine la compatibilité avec les objectifs de l'organisation.203

A la lumière de ce Règlement, nous pouvons envisager deux situations aux conséquences portant préjudice à l'autonomie de l'OUA.

Soit ces dons, legs et subventions proviennent des Etats africains riches, et dans ces cas

l'organisation connaît, en son sein, un accroissement d'influence de certains Etats. Soit, elles ont une origine extérieure (par rapport aux Etats membres), et alors l'autonomie

de l'organisation est sérieusement entamée.

200 GONIDEC (P. F.), op. cit., p. 26

201 Rapport financier de l'OUA pour l'exercice financier 1999/2000, Doc. CM/2182 (LXXIII), p. 9

202 GONIDEC (P. F.), op. cit., p. 25

203 Voir art. 23 et ss. du Règlement financier de l'OUA, documents C.M./896 (XXXI), Rev.5, Annexe III

81

Généralement, ces contributions volontaires alimentent des Fonds spéciaux créés pour une action spécifique.204

A titre d'exemple, nous citerons, en premier lieu, le cas du Fonds spécial créé en 1963

et géré par le Comité de coordination pour la libération de l'Afrique.

Ce fonds devait être financé principalement par les contributions des Etats membres et d'une manière secondaire par des contributions (sous forme de dons) des institutions privées telles que les ONGs.205

On notera, cependant, qu'en 1978, l'aide fournie par l'ONG SIDA ( Swedish

International Developpement Agency) à ce Fonds spécial atteignit le double de celui versé par l'OUA.206

En outre, un Fonds pour la paix fut créé en juin 1993. Ce Fonds a reçu dans les trois années qui ont suivi sa création, 12,101 millions de dollars EU, dont la moitié provenait des contributions volontaires des pays étrangers ( la plus importante provenant des Etats-Unis d'Amérique).207

Ainsi, il apparaît que ces ressources d'origine externe constituent une part relativement importante de financement des activités de l'organisation.

Cependant, le fait que ces sommes ne soient affectées que dans des secteurs considérés comme prioritaires par le donateur, compromet la liberté d'action de l'organisation.

En fin de compte, il convient de remarquer que l'OUA ne dispose pas de ressources suffisantes et propres pour faire face à ses objectifs.

C'est probablement le signe le plus net du dysfonctionnement de l'organisation

Ceci a eu pour conséquence inévitable de l'obliger à une dépendance vis-à-vis du monde extérieur, et partant de l'exposer aux aléas de l'environnement international.

204 COMBACAU (J.) et SUR (S.), op. cit., p. 747

205 BA (A.) et al., op. cit., p. 315

206 Idem., p. 334

207 KAIDI (H.) et al, « OUA : qui finance le fonds pour la paix ? », in Jeune Afrique, n°1854 du 17 au 23 juillet

1996, p. 26

82

B. Les contraintes externes

Il est certain que l'Afrique constitue une région du point de vue des relations

internationales. De ce fait, ce continent - et partant l'OUA - est enchaîné à des influences diverses qu'exercent les autres acteurs internationaux dans les relations internationales.

Notre propos - nous tenons à le préciser - ne s'inscrit pas dans une logique de décrire les relations entretenues par l'Afrique avec le reste du monde.

Plutôt, nous essayerons de dégager d'une manière très sommaire, les répercussions de l'environnement international sur la capacité d'action de l'OUA.

Tout d'abord, jusqu'à la fin du XXème siècle, l'environnement mondial a été caractérisé par une bipolarisation due à la supériorité écrasante de deux superpuissances : l'URSS et les Etats-Unis d'Amérique. Le reste des autres pays se sont rangés autour de l'une ou l'autre puissance pour former deux blocs antagonistes : communistes et capitalistes.

La question qui nous intéresse ici est de savoir dans quelle mesure ces deux superpuissances ont influencé la capacité d'action de l'OUA ?

D'une part, un premier élément de réponse peut être apporté par K. MATHEWS qui note que la pénétration de l'Afrique par les superpuissances est elle-même une des causes les plus sérieuses de la division parmi les pays africains.208

En effet, il est clair que, dans une organisation fondamentalement interétatique telle que l'OUA, l'adoption par les différents Etats membres de structures sociales, économiques

et politiques calquées sur celles des deux dominantes et antagonistes ne pouvait que déboucher sur un élément de division au sein de l'OUA.

D'autre part, les ingérences des deux superpuissances dans les affaires africaines ont naturellement empiété sur les prérogatives de l'OUA ou à tout le moins, réduit sa capacité d'action. Point n'étant besoin de rappeler que la Charte de l'OUA condamne clairement tout atteinte à la souveraineté et à l'indépendance de ses Etats membres, nous soulignerons que le Conseil des ministres de l'OUA rappelait à son tour que

« l'unité de l'Afrique exige que le règlement de tous les conflits qui peuvent survenir

entre Etats membres sont à rechercher dans le cadre de l'OUA ».209

208 MATHEWS (K.), «The OAU», cité par MAZZEO (D.), African regional organizations, Cambridge University

Press 1984, pp. 49-84

209 Document OUA CM/Res. 79 ( VII) .Voir BA (A.) et al., op. cit. , p. 152

83

Les événements, que l'OUA a dû traverser, ont montré que la pratique n'avait pas suivi

la théorie. A titre d'exemple, nous pouvons mentionner la guerre d'Angola, pays qui fut

le théâtre d'affrontement des deux superpuissances par pays et mouvements de libération interposés pendant près de 25 ans.210

Même si vers la fin du XXème en siècle, on assiste à l'écroulement du bloc communiste,

on constate que les conflits africains restent à la croisée d'intérêts à la fois politiques et économiques qui sont extérieurs au continent211 .

Ensuite, les pays africains ont été dans l'incapacité de se débarrasser de l'influence de leurs anciennes métropoles.

A ce titre, Augustin Kontchou KOUOMEGNI notait que : « tous les pays de l'ancienne

Afrique noire française - en dehors de la Guinée et du Mali - sont restés membres de la Zone franc dont le fonctionnement est basé sur quelques principes essentiels et la prédominance économique et politique de la France ».212

Il ajoute qu' « en outre, les Etats anglophones d'Afrique font tous partie du Commonwealth, par laquelle la Grande Bretagne maintient une certaine influence... ».213

Cette situation a abouti à la constitution de groupes qui pouvaient paralyser le fonctionnement de l'organisation.

Ainsi, en 1982, l'admission de la RASD à l'OUA bloqua complètement le fonctionnement de l'organisation pendant plusieurs mois, et la dix-neuvième session ordinaire de la Conférence fut reportée deux fois faute de quorum, avant d'être annulée définitivement.214

Notons enfin que l'environnement international n'a pas constitué qu'une contrainte à la capacité d'action de l'OUA. A certains égards, elle a renforcé cette capacité en contraignant les Etats africains à faire front commun face à certains acteurs internationaux..

210ADJOVI (R.), L'Organisation de l'Unité Africaine et la gestion des conflits internes, Paris, mémoire Paris X Nanterre, 1996, p. 4

211 A ce propos pour plus de détails voir BRAECKMAN (C.), Les nouveaux prédateurs, Paris, Fayard, 2003, 312

p.

212 KOUOMEGNI (A. K.), Le système diplomatique africain, Paris, Pedone, 1977, p. 73

213 Idem., p. 74

214 BARBIER (M.), « Le problème du Sahara occidental et la crise de l'OUA », in Le mois en Afrique, avril-mai

1983, 207-208, n°18, p. 40

84

A titre d'exemple, nous citerons le cas des deux groupements qui se sont formés pour donner plus de poids aux intérêts africains sur la scène internationale :

Le groupement Afrique Caraïbe Pacifique (ACP) constitué pour donner du poids aux positions africaines dans les négociations, qui ont abouti à la convention ACP/CEE de Lomé ; et

Le Groupe africain au sein des Nations Unies.215

Pour conclure sur ce point, nous tenons à souligner que les contraintes externes ont affecté dans une large mesure la capacité d'action de l'OUA.

Ceci nous parait d'autant plus fondamental que les jugements portés sur l'OUA n'ont que très rarement pris en considération la dimension internationale.

Au-delà, c'est tout le contexte général dans lequel l'OUA a évolué qui nous aura permis

de comprendre les difficultés de l'OUA, du moins en partie, car sur un plan purement juridique, il s'avère indispensable de relever également les faiblesses du système juridique au titre des insuffisances juridiques de l'OUA.

§2 Les faiblesses du système juridique de l'OUA

Selon François BORELLA, pour conclure à l'existence d'un système juridique d'une organisation internationale, il faut au préalable identifier trois types de phénomènes cohérents.

D'abord, il faut la présence d'un ensemble d'organes et de procédures de décision, ensuite il faut l'existence d'un corps de règles édictées et de décisions prises ; et enfin il faut un ensemble de procédures de sanctions.216

Pour analyser la faiblesse du système juridique de l'OUA, nous entendons cheminer dans le sillage tracé par François BORELLA.

Ainsi, dans un premier temps, apparaît-il utile de relever d'une manière générale les travers contenus dans la Charte.

Cela fait, nous allons, toujours dans la logique de François BORELLA, mais en y incorporant quelques éléments du raisonnement de Michel VIRALLY, nous pencher sur

les faiblesses des moyens juridiques dont disposaient l'OUA.

215 GONIDEC (P. F.), op. cit., p. 59

216 BORELLA (F.), Le système juridique de l'OUA in AFDI 1971, p. 234

85

A. Les lacunes contenues dans la Charte

La Charte de l'OUA - comme nous avons eu à l'analyser précédemment - fait

apparaître des objectifs et des principes ainsi que l'existence d'organes et de procédures

de décisions.

Notre souci n'est pas de les décrire de nouveau. Plutôt, nous entendons repérer certaines incohérences et contradictions qu'ils recèlent.

Pour ce faire, nous subdiviserons d'une part les lacunes liées aux objectifs et principes

et d'autre part celles liées à la structure de l'OUA.

1. Les incohérences liées aux objectifs et principes de l'OUA

Comme on a eu à le souligner précédemment, l'OUA vise comme objectifs, entre

autres, la défense de la souveraineté, l'intégrité territoriale et l'indépendance de chacun des Etats membres (art. 2 de la Charte de l'OUA).217

Sur sa lancée, le même article précise que pour atteindre ces objectifs « les Etats membres coordonneront et harmoniseront218 leur politique générale [...] »

Le choix de ces deux verbes a suscité chez la plupart des experts de l'OUA, une certaine perplexité.

Pour Jean MFOULOU, il n'est donc pas question de rechercher l'unité des Etats africains, de travailler à leur unification mais uniquement de coordonner et d'harmoniser leurs différentes politiques219 .

D'autres encore en tirent la conclusion que l'OUA n'est qu'une simple organisation de coopération, et encore pas dans tous les domaines ; la coopération est limitée à des secteurs bien déterminés220 .

En outre, la Charte en son art. 3 énonce les principes qui guideront les Etats membres pour atteindre leurs objectifs.

Ces principes sont clairs en eux-mêmes mais nous ferons notre commentaire sur trois des principes qui intéressent notre argumentation.

217 Ici, nous nous limitons aux objectifs qui intéressent notre argumentation.

218 C'est nous qui soulignons

219 MFOULOU (J.), L'OUA, triomphe de l'unité ou des nationalités, Paris, L'Harmattan, 1986, p.42

220 GAM (P.), « L'OUA », in Revue juridique et politique, avril- juin 1966, Vol. 20, n° 2, p. 321

86

Pour le premier principe, il convient de constater que l'OUA est une organisation internationale qui repose sur le principe juridique et réellement appliqué de l'égalité souveraine des Etats. A cet égard, elle occupe une place singulière au sein de la famille des organisations internationales.221

Cependant, si l'égalité souveraine des Etats constitue la pierre angulaire du droit

international, la réalité politique est tout autre : c'est l'inégalité des nations, de par la population, les ressources géographiques et les nombreux autres facteurs qui influent sur la puissance militaire et économique.222

Ainsi, au sein de l'OUA, l'inégalité objective de puissance fondée sur la taille, la population, le potentiel économique et militaire qui distingue l'Egypte de la Gambie , le Congo Kinshasa de la Mauritanie et la Fédération Nigériane du Gabon, perdait sa résonance qualitative.223

De plus, pour les défenseurs des droits de l'homme, le principe de l'égalité souveraine des Etats africains est un principe qui a été détourné et confisqué par les détenteurs de la puissance publique.224

Ainsi, pour Hocine AIT-AHMED, ce principe s'applique indissociablement aux peuples, aux minorités et aux individus qui en sont exclusivement « les véritables destinataires et les seuls titulaires légitimes ».225

Il en résulte que l'appropriation de ce principe par les Etats africains n'avait qu'un but : transférer à ces derniers un pouvoir leur permettant de se soustraire au contrôle international sur le sort des peuples dans les réalités politiques, juridiques et institutionnelles de ces mêmes Etats.226

Une autre remarque s'impose sur le principe de non ingérence dans les affaires intérieures des Etats. Ce principe garantit à chaque Etat une autonomie et une liberté totales en matière de politique intérieure, en le mettant à l'abri de l'intervention ou même de critiques de la part non seulement d'un autre Etat mais aussi de l'organisation.

221 MANIGAT (M.), « L'organisation de l'unité africaine », in Revue Française de science politique, avril 1971,

p. 85

222 FRIEDMAN (W.), De l'efficacité des institutions internationales, Paris, A. Colin, 1970, p.58

223 KOUASSI (K.), op. cit. , p. 102

224 AIT-AHMED (H.), L'Afro fascisme : les droits de l'homme dans la Charte et la pratique de l'OUA, Paris, L'Harmattan, 1980, p. 205

225 Idem., p. 201

226 Ibid.

87

C'est ainsi qu'à plusieurs occasions - si pas toutes, l'OUA est restée muette, condamnée à croiser les bras et à l'impuissance devant certaines atrocités dont le continent a été le théâtre227 car faut-il le souligner, les conflits africains, les plus meurtriers et les plus tenaces ont été, pour la plupart, des conflits internes.

Or, les principes de droit international qui concernent directement la guerre civile sont très sommaires et de surcroît, se trouvent limités par le principe de non intervention.228

De plus Wolfang FRIEDMAN note que si « la non intervention généralisée en cas de guerre civile est théoriquement la solution la plus souhaitable, en pratique, elle échoue invariablement lorsque des puissances étrangères ont véritablement intérêt à ce que l'un

ou l'autre camp remporte la victoire ».229

Par ailleurs, le principe du respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale

de chaque Etat et de son droit inaliénable à une indépendance, est-il aussi ambigu ?

En effet, en sacralisant le droit inaliénable à une existence indépendante, la Charte rend pratiquement impossible tout regroupement politique d'Etats africains.

En fait, toute unification politique d'Etats africains violerait les principes de l'OUA et

se retrouverait donc condamnée d'avance par cette même organisation230 ; ce qui est paradoxal pour une « Organisation de l'unité africaine »

En définitive, d'ores et déjà au niveau des objectifs et des principes, la lecture de

la Charte de l'OUA nous fait entrevoir certaines lacunes de taille qui malheureusement ont pesé sur son bilan.

Pourtant, l'examen de ces lacunes ne saurait s'arrêter là, il faut ajouter les insuffisances qui ont caractérisé sa structure.

227 MFOULOU (J.), op. cit., p. 45

228 FRIEDMAN (W.), op.cit., p. 67

229 Ibid.

230 MFOULOU (J.), op. cit., p. 46

88

2. Les lacunes structurelles

D'emblée, il faut souligner la prépondérance absolue des Etats membres de

l'OUA au sein des organes de l'OUA. Aussi, les imperfections de la structure trouvent- elles justement leur origine dans ce constat préalable. En réalité, elles se manifestent par

le fait que la structure de l'OUA est non seulement égalitaire mais aussi elle est hiérarchisée.

a. Une structure égalitaire

D'entrée de jeu, il faut rappeler que tous les Etats membres sont représentés au

sein de la Conférence des Chefs d'Etat, du Conseil des ministres et des Commissions spécialisées ; et que chacun y dispose d'un pouvoir égal de vote.

Ainsi, il apparaît que l'égalité absolue domine la composition des organes de l'OUA.

En effet, tout d'abord, les principaux organes de décision et de direction de l'OUA sont pléniers. Et si le Comité de libération était un organe restreint à l'origine, son évolution - comme nous l'avons vu - a confirmé le principe égalitaire.

Ensuite, le souci des Etats membres de l'OUA de veiller au respect du principe égalitaire se traduit par les atténuations qu'apporte la Charte en ce qui concerne les inégalités résultant de l'existence d'organes restreints.

Ces atténuations consistent premièrement, dans la désignation par l'organe plénier des

membres des organes restreints. D'où, la Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement élit le Secrétaire général, les Secrétaires généraux adjoints ainsi que les vingt et un membres de la Commission de médiation.

Deuxièmement, ces atténuations se manifestent dans la stricte limitation des

compétences de l'organe restreint.

A l'origine, la Charte de l'OUA conférait au Secrétaire général un rôle « purement »

administratif. Cependant, il convient de préciser que dans l'évolution de l'organisation

les compétences du Secrétaire général ont été étendues par la réforme de la Charte de

1979 ; bien qu' Edem KODJO, ancien Secrétaire général de l'OUA, qualifie cette réforme de « réformette ».231

231 KODJO (E.), préface chez JOUVE (E.), op. cit., p. 11

89

Pareillement, la compétence de la Commission de médiation s'étend «uniquement » aux litiges entre Etats.

Enfin, nous sommes amenés à constater que l'OUA ignore complètement le système des responsabilités spéciales de tel Etat, et celui de l'inégalité fonctionnelle statutaire, consacrées dans les structures des autres organisations telle que l'ONU.232

La conséquence de cette situation apparaît évidente : l'OUA traduit une certaine ambiguïté en tant que centre autonome de décisions.

On observe également qu'il a été souvent difficile - parfois impossible - d'imposer une discipline de groupe minimale qui pouvait assurer la cohérence et la solidité de l'organisation.233

C'est ainsi que des pays membres de l'organisation ont fait cavalier seul dans des affaires où l'OUA avait pourtant défini une position claire et bien arrêtée234 .

En définitive, il est clair que cette structure égalitaire de l'OUA a renforcé la souveraineté des Etats au détriment de l'organisation qui, en tant que sujet de droit international, a vu sa capacité d'action fortement réduite.

b. une structure hiérarchisée

La Charte de l'OUA débute par la formule « Nous, Chefs d'Etat et de

gouvernement »235 tandis que dans son article 8, elle dispose que la Conférence des

Chefs d'Etat et de gouvernement est l'organe suprême de l'organisation.

Ainsi, le sommet de la hiérarchie des organes de l'OUA est coiffé par la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement qui prend les décisions de l'organisation en dernier ressort. Le Conseil des ministres est responsable devant la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement tandis que le Secrétaire général est directement responsable devant le Conseil des ministres.

232 BORELLA (F.), op. cit. ,p.235

233 JOUVE (E.), op. cit., p. 89

234 C'est notamment le cas de la Côte d'Ivoire qui a violé l'embargo décrété par l'OUA à l'égard de l'Afrique du

Sud de l'apartheid. Cf. BA (A.) et al., op. cit., p. 445

235 Ceci contraste sensiblement avec le « Nous, peuples des Nations Unies. » de la Charte des Nations Unies

90

De la sorte, il apparaît que la structure de l'OUA est non seulement caractérisée par une hiérarchie de type pyramidal mais aussi qu'elle repose entièrement sur la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement.

En fait, comme le remarque Maurice GLELE, « la Conférence est l'organisation elle- même »236 Il en résulte que le bon fonctionnement de l'OUA dépendait en dernière instance des Chefs d'Etat et de gouvernement.

A ce niveau, point n'est besoin de reprendre autant l'exposé sur les pouvoirs de

la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement, que celui des principales manifestations de la prééminence des Chefs d'Etat et de gouvernement. Plutôt, nous allons dégager les conséquences de cette primauté sur la capacité d'action de l'OUA.

En réalité, la première conséquence est que la Conférence éclipse totalement le reste des organes et devient omniprésente dans le fonctionnement de l'OUA.

Ainsi, le Conseil des ministres est réduit à un organe de préparation et d'exécution des décisions prises par la Conférence des chefs d'Etat.

Quant au Secrétariat général, le Secrétaire général voit son rôle occulté par l'apparition

du Président en exercice.

De plus, la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement est tentée de se subdiviser pour faire face aux tâches qui incombent à l'OUA. Chaque année ou à peu près, les Chefs d'Etat désignent certains d'entre eux pour constituer un comité chargé de résoudre telle ou telle autre question délicate.

La deuxième conséquence est que Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement est un organe lourd et solennel qui est surchargé de travail. Naturellement préoccupés par les grandes questions politiques du continent, les Chefs d'Etat et de gouvernement ont négligé les objectifs propres de l'Organisation dans les domaines économiques, culturels et techniques.

En outre, la vitalité de l'OUA pouvait se mesurer par le nombre de chefs d'Etat présents

à la réunion de la Conférence des Chefs d'Etat.

236 GLELE (M.), « Pour une OUA opérationnelle », in Revue juridique et politique, juillet-décembre 1985, Vol.

39, n° 3-4, p.830

91

Aussi, les Chefs d'Etat surchargés de tâches ne peuvent pas toujours consacrer un temps suffisant à l'étude et la discussion des dossiers dans le cadre d'une conférence annuelle ; sans compter qu'à cet échelon ces dossiers sont vite politisés même ceux qui ont un aspect technique.

Or, la pratique a révélé une certaine négligence des Etats africains à l'égard des différentes Commissions prévues par la Charte.

Enfin de compte, les lacunes contenues dans la Charte nous auront permis de déceler les décalages entre la Charte et ses ambitions d'une part, et les réalités politiques d'autre part.

B. La faiblesse des moyens juridiques

Comme bien d'autres organisations, l'OUA possédait des moyens juridiques

qu'elle pouvait déployer à l'intérieur afin de faire face à la sphère d'actions qui lui était assignées.237

En réalité, les moyens juridiques mettent en évidence l'étendue des pouvoirs de l'OUA

par rapport aux Etats membres.

Cela étant, nous tenons à préciser qu'il ne s'agit pas de les décrire mais de dégager les faiblesses qui ont caractérisé l'OUA dans la mise en action de ces moyens juridiques - ou pouvoirs.

Précisément, en faisant nôtre la classification de Michel VIRALLY, nous essayerons de

dégager de quelle manière l'OUA avait-elle le pouvoir de décider (1) et celui de sanctionner (2).

237 Ici nous faisons référence aux notions de pouvoir et de compétence déjà définies dans le premier chapitre

92

1. Pouvoir de décider

Le fond du pouvoir de décider correspond au contenu même de la compétence

normative de toute organisation internationale.238

Ainsi, le pouvoir de décider peut revêtir deux formes : celle de l'acte unilatéral et celle

de l'acte conventionnel. Notre propos sera consacré aux actes unilatéraux.

La Charte de l'OUA, en son art. 10, précise que la Conférence des Chefs d'Etat

et de gouvernement prend ses décisions239 à la majorité des 2/3 ; mais en réalité - comme précédemment - il faut distinguer deux types de résolutions : les résolutions à usage interne et les résolutions à usage externe.

En effet, les premières ont réellement le caractère de décision du fait qu'elles sont obligatoires.

En revanche, les secondes qui ont la prétention de dicter aux Etats membres leur conduite, tant sur le plan interne qu'international, sont dénouées de toute force obligatoire.

Précisément, pour reprendre l'expression de Pierre François GONIDEC, l'OUA « peut

parler le langage de l'espoir et non celui du commandement ».240

En ce qui concerne les résolutions de l'OUA à usage externe, deux traits ou plutôt deux lacunes les caractérisent.

D'une part, c'est l'absence de rigueur dans l'expression241 qui résulte du fait qu'elles

sont rédigées de sorte à ne heurter la susceptibilité d'aucun Etat membre.

Mais il est clair - et ce n'est qu'un rappel - que si l'OUA est le résultat d'un compromis elle ne saurait dans ses activités rompre les précaires termes d'équilibre sur lesquels elle repose, en adoptant des positions rigides.242

D'autre part, la répétition des mêmes textes243 a indéniablement constitué un signe de

faiblesse de l'OUA.

238 KISS (A.C.), « Principes généraux et droit commun » in Organisations régionales internationales, Recueil de

Cours, Fascicule II, Faculté internationale pour l'enseignement du droit comparé, éd. Montchrestien, Paris, 1971,

p. 632

239 C'est nous qui soulignons

240 GONIDEC (P. F.), op. cit., p. 18

241 C'est nous qui soulignons

242 KOUASSI (K.), op. cit. , p. 198

243 C'est nous qui soulignons

93

En effet, l'OUA s'est retrouvée, à maintes reprises, dans l'incapacité de définir une position claire et ferme et surtout d'imposer une ligne de conduite précise et efficace à ses Etats membres.

A titre d'exemple, les résolutions rappelant aux Etats membres de s'acquitter de leurs obligations financières démontrent de cette faiblesse.244

Subséquemment, la terminologie employée dans les résolutions dénote plus encore de cette faiblesse. Dans les résolutions de l'OUA, les formules comme « l'OUA invite, exhorte, recommande, prie ; ou encore réaffirme, réitère et rappelle »245 sont fréquentes.

Enfin, ceci nous amène à terminer ce point par cette réflexion de Kwam KOUASSI qui estime qu'en parcourant les résolutions de l'OUA, « on a non seulement l'impression mais aussi la conviction que cette dernière parle de fumée sans allumer le feu [et qu'] elle cherche l'ombre sans jamais planter d'arbre, l'ivoire sans tuer l'éléphant ».246

2. Le pouvoir de sanctionner

Le pouvoir de sanctionner est le corollaire logique du pouvoir de décider mais,

en fait, il ne peut exister que dans la mesure où un texte est juridiquement doté d'une force obligatoire.247 Ainsi, ici comme précédemment, il nous faut distinguer les résolutions à usage interne et celles à usage externe.

Cela étant, nous tenons à préciser que notre propos se limitera à relever dans quelle mesure l'OUA a usé de son pouvoir de sanctionner à l'égard des Etats membres.

Tout d'abord en ce qui concerne les résolutions à usage interne, du fait de leur caractère obligatoire, elles doivent être contrôlées quant à leur exécution.

Cependant, la pratique au sein de l'OUA nous révèle qu'à plusieurs occasions les violations de la Charte n'ont pas été automatiquement assorties de sanctions.248

De plus, aucune mesure d'exclusion n'est prévue par la Charte.

244 On recensait, en 1988, pas moins de 14 résolutions allant dans ce sens. Ce sont notamment les résolutions

AHG/Rés. 17 (I), AHG/ Rés. 39 (III), AHG/Rés. 41 (II).

245 GONIDEC (P. F.), op. cit., p. 19

246 KOUASSI (K.), op. cit. , p. 199

247 GONIDEC (P. F.), op. cit., p. 20

248 L'exemple fréquemment cité est celui des résolutions rappelant aux Etats membres de s'acquitter de leurs contributions obligatoires. L'art. 23 de la Charte de l'OUA précise que les « Etats s'engagent à payer

régulièrement leurs contributions respectives ».

94

Ensuite, à propos des résolutions à usage externe, du fait de leur caractère non obligatoire, elles sont évidement difficile à faire respecter.

Ainsi, le refus d'appliquer telle ou telle résolution par un Etat membre, ne pouvait entraîner que la réprobation ou la condamnation purement morale de la part de l'organisation.249 Qui plus est, l'organisation pouvait hésiter à pointer du doigt les Etats

qui dédaignaient d'appliquer les résolutions qu'elle avait adoptées. Conclusion

Au terme de ce Chapitre sur la présentation générale de l'OUA, nous pouvons en

dégager une synthèse qui s'articule sur 3 éléments généraux.

Tout d'abord, le bilan de la contribution de l'OUA a ses « rayons et ses ombres ».

Mais faut-il le reconnaître, sa contribution a permis la résolution de certains problèmes

de l'Afrique.

Sur le plan juridique, la contribution de l'OUA met en évidence l'existence d'un système juridique, même si on est vite amené à constater sa faiblesse.

Ensuite, les problèmes à traiter par l'OUA ont changé de nature au fil du temps. Au début s'il s'agissait essentiellement d'achever la libération du continent de la tutelle coloniale ; à la fin du XXèmesiècle, cet objectif qui était de nature à faire unanimité, est

complètement atteint.

Mais depuis les années 1990, l'Afrique se trouve confrontée à des conflits intenses aussi nombreux que complexes ainsi qu'à une marginalisation sur la scène internationale du fait de son retard sur le plan économique.

Enfin, le dernier élément - mais non des moindres - est que l'OUA s'est montrée démunie, car elle s'est révélée inadaptée dans ses structures et ses règles de fonctionnement.

Au total, tous ces éléments montrent que la Charte de l'OUA nécessitait d'être révisée et précisée pour adapter ses structures et améliorer son fonctionnement.

Ainsi, l'OUA se trouvait conduite à repenser, à la veille du XXIèmesiècle, sa structure et

son fonctionnement afin de mieux répondre aux besoins du moment de l'Afrique.

C'est pourquoi la réforme de l'organisation panafricaine et la révision de sa Charte sont devenus une exigence incontournable.

249 GONIDEC (P. F.), op. cit., p. 20

95

CHAPITRE III : DE LA CHARTE DE L'OUA A L'ACTE CONSTITUTIF DE L'UNION AFRICAINE : LES INNOVATIONS MAJEURES

Si en mai 1963, trente-deux dirigeants s'étaient réunis en vue de fonder l'OUA, c'est quarante-trois dirigeants africains qui se sont réunis à Durban (Afrique du Sud) en juillet 2002 pour proclamer et officialiser non seulement la disparition de l'OUA, mais aussi la création de l'Union africaine.

La Charte de l'OUA devait être remplacée par l'Acte constitutif de l'Union africaine. Ici, nous nous attacherons à dégager les innovations majeures qu'apporte l'Acte constitutif au regard de la Charte que nous avons étudiée dans les développements antérieurs.

C'est dans ce dessein que nous jetterons un regard sur le dispositif institutionnel prévu par l'Acte constitutif. Dans la suite, nous alimenterons notre étude par les réformes majeures contenues dans l'Acte constitutif ; avant de la terminer finalement par les défis majeurs auxquels l'Union africaine est appelée à faire face.

Cependant, la disparition de l'OUA ayant été suivie de la constitution de l'Union africaine, convient-il d'abord de revenir sur le processus de transformation de l'OUA en Union africaine.

96

Section 1ère : De l'OUA vers l'UA

La transformation de l'OUA en UA ne s'est pas réalisée en un jour. Elle s'est déroulée en plusieurs étapes, bref elle fut un processus.

C'est dans cet esprit que nous nous proposons de relever les modalités de cette transformation (§1) avant de pouvoir en dégager les effets (§2).

§1. Les modalités de la transformation de l'OUA en UA

Conformément à la décision de la trente-cinquième session de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement, tenue à Alger du 10 au 12 juillet 1999, les dirigeants africains s'étaient engagés à se retrouver à Syrte en Libye à l'occasion de la 4ème session extraordinaire de leur Conférence. Le but de cette rencontre était de discuter des voies

et moyens de renforcer leur organisation afin de la rendre plus efficace et de lui permettre de s'adapter aux changements sociaux, politiques et économiques qui se produisent à l'intérieur et à l'extérieur de leur continent.250

Par la suite, quatre sommets se sont tenus et ont abouti au lancement officiel de l'Union africaine.

A. Les sommets initiateurs de l'Union africaine

Dès 1999, cinq sommets de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement

ont balisé la route conduisant à la création de l'Union.

1. La quatrième session extraordinaire des Chefs d'Etat et de gouvernement

(Syrte, 1999)

La marche vers l'Union africaine commence avec la quatrième session

extraordinaire de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement, tenue à Syrte

(Libye) en 1999.

En effet, la seule question inscrite à l'ordre du jour était la suivante :

250 Décision sur la convocation d'une session extraordinaire de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement

de l'OUA, AHG /Dec. 140 (XXXV), p. 1.

97

« Comment renforcer la capacité de l'Afrique à faire face aux défis du nouveau millénaire? »251

C'est pour répondre à cette question que, dans la déclaration de Syrte sanctionnant leurs travaux, les Chefs d'Etat et de gouvernement « décident la création

de l'Union africaine et mandate le Conseil des ministres de prendre des mesures

nécessaires à l'élaboration de l'Acte constitutif de l'Union en lui exigeant de présenter

un rapport à la 36ème session ordinaire du sommet de Lomé (Togo).

2. La trente-sixième session ordinaire de la Conférence des Chefs d'Etat et de

gouvernement (Lomé, 2000)

La Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement, réunie du 10 au 12 juillet

2000 dans la capitale togolaise, en ayant pris note du rapport et des recommandations de

la 72ème session ordinaire du Conseil des ministres, a approuvé et adopté le projet d'Acte constitutif de l'Union africaine. 252

De plus, la Conférence a décidé de soumettre l'Acte constitutif à la signature et à la ratification des 53 Etats membres de l'OUA, en les exhortant « à prendre les mesures nécessaires pour le signer et le ratifier aussitôt que possible afin d'assurer sa mise en oeuvre rapide ».253

A l'issue du sommet, les Chefs d'Etat et de gouvernement ont sorti une déclaration dite « de Lomé » qui renvoyait la décision solennelle de création de l'Union africaine à Syrte, au mois de mars 2001 lors de la 5ème session extraordinaire de

la Conférence. 254

3. La cinquième session extraordinaire de la Conférence des Chefs d'Etat et

de gouvernement de l'OUA (Syrte, 2001)

Sur invitation du Guide de la Révolution de la Jamahiriya Libyenne, le Colonel

Mouammar Kadhafi, les Chefs d'Etat et de gouvernement se sont retrouvés encore une fois à Syrte en Libye, du 1er au 2 mars 2001, dans une session extraordinaire.

251 GHARBI (S.), « Etats-Unis d'Afrique : Faut-il y croire ? », in Jeune Afrique, n°2035, du 21 au 27 septembre

1999, p. 91

252 Décision sur la création de l'UA et du Parlement panafricain, AHG/Déc. 143 (XXXVI), p. 1

253 Décision sur la création de l'UA et du Parlement panafricain, AHG/Déc. 143 (XXXVI), p. 1

254 Déclaration de Lomé, AHG/Décl. 2 (XXVI), p. 8

98

A l'issue de leurs travaux, les Chefs d'Etat et de gouvernement ont décidé :

« 1. de déclarer solennellement la création de l'Union africaine par la volonté unanime des Etats membres ;

2. que les conditions juridiques de l'Union seront remplies lorsque le 36ème instrument

de ratification de l'Acte constitutif sera déposé;

3. que l'Acte constitutif de l'Union entre en vigueur 30 jours après le dépôt des instruments de ratification par les deux tiers des Etats membres de l'OUA, tel qu'il est stipulé à l'article 28 de l'Acte constitutif ». 255

Enfin, la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement a estimé qu'elle prendrait « les décisions nécessaires pour la transformation de l'OUA en Union africaine et pour l'élaboration des protocoles appropriés relatifs aux organes et institutions de l'Union» 256 au cours de la 37ème session ordinaire de la Conférence.

4. La trente-septième session de la Conférence des Chefs d'Etat et de

gouvernement (Lusaka, 2001)

Les Chefs d'Etat et de gouvernement réunis au 37ème sommet de l'OUA qui s'est

tenu du 9 au 11 juillet à Lusaka en Zambie ont établi le programme visant la mise en place de l'Union africaine.

Cependant, entre le sommet de Syrte et celui de Lusaka, précisément le 26 avril 2001, le

36ème instrument de ratification avait été déposé au Secrétariat général257 ; remplissant ainsi les conditions juridiques nécessaires à la création de l'Union.

Forte de cette avancée significative et à l'issue de l'examen du rapport du Secrétaire général sur la mise en oeuvre de la décision de Syrte, la Conférence a pris des mesures visant la mise en place de l'Union africaine notamment en ce qui concerne le lancement des organes de l'Union ainsi que la vulgarisation de l'Union africaine.258

255 Décision EAHG/déc. 1(V), in Rapport du Secrétaire général sur la mise en oeuvre de la décision de Syrte sur l'Union africaine, Doc. OUA CM2210 (LXXVI), pp.1-2

256 Décision EAHG/déc. 1(V), in Rapport du Secrétaire général sur la mise en oeuvre de la décision de Syrte sur l'Union africaine, Doc. OUA CM2210 (LXXVI), pp.1-2

257 Il faut aussi signaler que les 53 Etats membres de l'OUA avaient déjà signé l'Acte constitutif de l'Union

africaine. Cf. Rapport du Secrétaire général sur la mise en oeuvre de la décision de Syrte sur l'Union africaine, Doc. OUA CM/2210 (LXXVI), p. 1

258 Décision sur la mise en oeuvre du sommet de Syrte sur l'UA, AHG/Déc. 160(XXXVII), p. 1

99

En outre, des directives ont été ainsi adressées au Secrétaire général notamment sur la réorientation des ressources budgétaires de l'OUA et sur la conception de l'emblème ou des symboles de l'Union africaine.259

Enfin, la Conférence a exhorté tous les Etats membres qui n'avaient pas encore ratifié l'Acte constitutif à le faire avant la session inaugurale de l'Union africaine prévue lors du sommet des Chefs d'Etat et de gouvernement qui a eu lieu à Durban en Afrique du Sud.

5. La première session de l'Union africaine (Durban, 2002)

La session inaugurale de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement de

l'Union s'est tenue à Durban du 9 au 10 juillet2002.

A Durban, la Conférence a tout d'abord adopté son Règlement intérieur et les Statuts de

la Commission.

En ce qui concerne la Commission de l'Union, la Conférence a aussi décidé

« d'instituer à compter du 9 juillet 2002, une période intérimaire d'une durée d'un an à l'issue de laquelle se tiendrait la 2ème session de la Conférence de l'Union pour désigner le Président et le Vice-président, ainsi que les Commissaires par l'intermédiaire du Conseil exécutif ». 260

Précisément, le Conseil exécutif avait tenu, en marge de la session inaugurale de

la Conférence, sa première session ordinaire (le 10 juillet à Durban) au cours de laquelle, elle avait également adopté son Règlement intérieur et celui du Comité des représentants permanents.261

259 Décision sur la mise en oeuvre du sommet de Syrte sur l'UA, AHG/Déc. 160 (XXXVII), pp. 5-6

Par ailleurs, compte tenu des tâches à exécuter, la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement avait décidé

« que la période transitoire sera d'une durée d'un an», à compter de l'adoption de cette décision

260 Décision sur la période intérimaire, Assembly /AU/Déc. 1(I), p.1

261 Décision sur les projets de Règlement intérieur, Ex. CL./AU/Déc. 1(I), p. 1

100

Enfin, à l'issue de leurs travaux, les Chefs d'Etat et de gouvernement ont, dans leur déclaration finale, rendu hommage à l'OUA pour ses réalisations au cours de ses trente-neuf ans d'existence avant de prendre le ferme engagement « de mettre d'urgence

en place les structures institutionnelles pour faire avancer l'agenda de l'UA [...] ».262

« L'OUA n'est plus, vive l'Union africaine ! »

Au-delà de cette clameur entendue à Durban, dans cette étude nous nous proposons d'analyser les effets de la transformation de l'OUA en Union africaine.

§2. Les effets de la transformation de l'OUA en Union africaine

« La succession constitue l'institution du droit international qui assure la continuité des services antérieurs en préconisant un type particulier de relations entre les deux organisations, et de leur adaptation malgré la disparition du prédécesseur ». 263

En réalité, les rapports entre le successeur et le prédécesseur de même que le sort réservé aux organes et aux fonctions de l'ancienne organisation sont généralement stipulés dans le Traité constitutif de la nouvelle organisation.

En ce qui concerne la transformation de l'OUA en UA, l'Acte constitutif en son article 33 n'y fait allusion que d'une manière lapidaire.

Aussi, est-il que le recours aux recommandations du Secrétaire général et aux différentes décisions de la Conférence s'avère judicieux pour l'examen des effets de cette transformation.

Successivement, il sera question du sort du patrimoine, du personnel, des traités et des

organes de l'OUA.

262 Déclaration de Durban en Hommage à l'OUA à l'occasion du lancement de l'Union africaine, Assembly/AU/Decl.2 (I), p. 3

263 BASTID (S)., préface.Cf. RANJEVA (R.), op.cit., p. XI

101

A. Le sort du patrimoine de l'OUA

Le sort du patrimoine de l'OUA a été réglé, dans un premier temps, par la

décision AHG/Déc. 160 (XXXVI) prise à Lusaka, sur la mise en oeuvre de la décision

du sommet de Syrte sur l'UA.

Dans son point 12, la décision de la Conférence a autorisé le Secrétaire général de prendre des mesures nécessaires pour le transfert de l'Actif et du Passif de l'OUA.264

Par la suite, c'est le Conseil exécutif de l'Union africaine réuni en sa 4ème session ordinaire à Addis-Abeba en 2004 qui a définitivement réglé cette question.

En effet, le Conseil exécutif, ayant pris note du bilan de la Commission de l'Union africaine au 31 décembre 2002, avait décidé que « la somme de 90.129.639,00 Dollars des EU (Actif) et la somme de 90.129.639,00 Dollars EU (passif, réserve et solde de Fonds) sont les montants de l'Actif et du Passif que l'OUA transfert à l'UA ».265

A travers cette décision, le Conseil exécutif demande également à la Commission

« d'intégrer ces deux montants dans les livres comptables à partir du 1er janvier

2004».266

Enfin, il convient aussi de souligner que, par la même décision, la Conférence a autorisé le Secrétaire général à continuer à utiliser le logo et l'hymne de l'OUA jusqu'à

la conception de l'emblème ou des symboles de l'Union africaine.267

B. Le sort du personnel de l'OUA

Autant le processus de transformation de l'OUA en Union africaine fut un

processus long, autant le sort du personnel de l'OUA a été réglé par voie de plusieurs décisions.

Pourtant, il faut préciser d'emblée que le personnel de l'OUA a été entièrement repris par l'Union africaine tout en notant qu'il a dû être redéployé.

264 Décision sur la mise en oeuvre de la décision du sommet de Syrte sur l'Union africaine, AHG/Déc. 160

(XXXVII), p. 6

265 Décision sur le bilan de l'UA, Ex. CL/Déc. 75 (IV), p. 1

266 Décision sur le bilan de l'UA, Ex. CL/Déc. 75 (IV), p. 1

267 Décision sur la mise en oeuvre de la décision du sommet de Syrte sur l'Union africaine, AHG/Déc. 160

(XXXVII), p. 6

102

En effet, le Secrétaire général dans son rapport sur la mise en oeuvre de la restructuration du Secrétariat général de l'OUA notait qu' « une liste des fonctionnaires

à redéployer a été établie [...]. Sur base de cette liste, une lettre a été adressée individuellement à chaque fonctionnaire, le 9 août 2000, pour l'informer de son poste,

de son grade et de son échelon dans la nouvelle structure ».268

En outre, ce rapport estimait qu'après le déploiement du personnel, quatre-vingts postes de la catégorie professionnelle et de la catégorie des services généraux étaient vacants, et donc qu'ils étaient à pourvoir au cours de l'exercice financier 2000-2001.269

De ce qui précède, il ressort que la nouvelle structure de l'UA a non seulement absorbé le personnel de l'OUA, mais aussi qu'il restait encore quelques postes vacants,

à combler.

C. Le sort des traités de l'OUA

Comme nous l'avons déjà indiqué au cours de notre exposé sur la contribution de

l'OUA au développement du droit international africain, l'OUA a offert un cadre à l'élaboration et l'adoption de 21 traités dont un bon nombre n'avaient pas encore acquis

les ratifications nécessaires à leur entrée en vigueur conformément au rapport du

Secrétaire général sur l'état des traités de l'OUA.270

Pour analyser le sort des traités de l'OUA, nous ferons recours à une étude sur la révision des traités de l'OUA/UA effectuée en 2001. 271

En réalité, l'étude sur la révision des traités a été consécutive à la décision prise par le

Conseil des ministres de l'OUA,272 au cours de sa 71ème session ordinaire qui s'est tenue

à Addis-Abeba (mars 2000).

268 Rapport sur la mise en oeuvre de la restructuration du Secrétariat général de l'OUA, Doc. OUA CM/2190(LXXIII), p. 1

269 Rapport sur la mise en oeuvre de la restructuration du Secrétariat général de l'OUA, Doc. OUA CM/2190(LXXIII), p.1

270 Rapport du Secrétaire général sur l'état des traités de l'OUA, CM/2143 (LXXI)

271 Etude sur la révision des traités de l'OUA/UA, BC/OLC/23.17/32/Vol.1

272 CM/Déc. 551(LXX)

103

Sur base du rapport du Secrétaire général sur l'état des traités de l'OUA, le Conseil avait reconnu, la nécessité, d'examiner systématiquement tous les traités de l'OUA en vue d'établir leur pertinence et d'identifier ceux qui devraient être mis à jour ou annulés, tout en identifiant les domaines dans lesquels il faudrait la conclusion de nouveaux traités.

En réalité, la révision des traités de l'OUA a fait l'objet d'une procédure de consultation, depuis le Bureau du Conseiller juridique, les directeurs des départements

et services de l'OUA ainsi que les Etats membres dans cet exercice de la révision.273

Enfin, de façon concrète et sur base de cette étude sur la révision des traités conclus sous l'égide l'OUA, le sort de ces derniers nous amène à distinguer trois catégories :

- ceux qui devaient être gardés dans leur état ;

- ceux qui nécessitaient une révision ;

- ceux qui n'ont pas été repris.

a. Les Traités qui devaient être gardés dans leur état

Convention de l'OUA sur l'élimination du mercenariat en Afrique ;

Convention de l'OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés

en Afrique ;

Charte culturelle de l'Afrique ;

Accord portant création de l'institut africain de réadaptation ;

Charte africaine des droits de l'homme et des peuples ;

Protocole à la charte des droits de l'homme et des peuples relatif à la création d'une Cour africaine des droits de l'homme et des peuples ;

 

Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant ;

 
 

Traité faisant de l'Afrique une zone exempte d'armes nucléaires ;

 
 

Convention de Bamako sur l'interdiction d'importer en Afrique des

déchets

dangereux et sur le contrôle des mouvements transfrontaliers et la gestion des

déchets dangereux produits en Afrique ;

Traité instituant la Communauté Economique Africaine ;

273 La représentation de tous les Etats membres à travers les Experts gouvernementaux dans l'exercice de la

révision devait permettre à sauvegarder le caractère conventionnel de la convention.

104

Protocole au Traité instituant la Communauté Economique Africaine, relatif au

Parlement Panafricain ;

Convention de l'OUA pour la prévention et la lutte contre le terrorisme ;

Convention de la Commission africaine de l'énergie.

b. Les traités qui ont été repris mais qui nécessitaient une révision

Convention générale sur les privilèges et immunités de l'OUA ;

Convention phytosanitaire pour l'Afrique ;

Charte africaine sur les transports maritimes. c. Les traités qui n'ont pas été repris par l'UA

Protocole additionnel à la Convention générale sur les privilèges et immunités de l'OUA ;

Convention interafricaine portant établissement d'un programme de coopération technique ;

Constitution de l'Association des organisations africaines de promotion du

Commerce ;

Convention portant création du centre africain de développement des engrais.

D. Le sort des organes de l'OUA

Le sort des organes de l'OUA peut être analysé à travers un examen des

dispositions de l'Acte constitutif et des différentes décisions et rapports sur la transformation de l'OUA en UA.

Ainsi, l'art. 5 de l'Acte constitutif énonce les organes de l'Union qui sont au nombre de

neuf.

A la lecture des dispositions qui suivent l'art. 5, il apparaît que la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement de l'OUA devient la Conférence de l'Union, le Conseil des ministres est remplacé par le Conseil exécutif et le Secrétariat général de l'OUA devient la Commission de l'Union.

De plus, les Commissions spécialisées sont reprises par l'Acte constitutif, sous le nom

de Comités techniques spécialisés.

105

A ce niveau, il apparaît nécessaire de signaler que certains organes de l'OUA

n'ont pas été prévus spécifiquement dans l'Acte constitutif.

Il s'agit du Mécanisme de l'OUA pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits, du Comité de libération, ainsi que des Institutions spécialisées de l'OUA. Cependant, le Secrétariat général de l'OUA avait identifié les lacunes institutionnelles qui pourraient être dues à l'absence de certaines structures de l'OUA dans l'Acte constitutif.

Précisément, dans son rapport, le Secrétaire général notait qu' « il est évident en dépit

de l'absence d'une disposition de l'Acte constitutif concernant le Mécanisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits, que les objectifs du Mécanisme [...] sont un aspect important des objectifs de l'OUA ».274

Pour répondre à cette préoccupation du Secrétaire général, la Conférence avait décidé d'incorporer le Mécanisme dans les organes de l'UA275 , avant que cet organe ne soit finalement remplacé par le Conseil de Paix et de Sécurité (CPS) après l'entrée en vigueur de son Protocole.276

En ce qui concerne les Institutions spécialisées, leur sort a été réglé par la décision

AHG/Déc. 160(XXXVII) de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement réunis

à Lusaka en 2001.

Par cette décision, la Conférence chargeait le Secrétaire général de « procéder à l'évaluation des Institutions spécialisées de l'OUA existantes en vue de leur incorporation en tant qu'Institutions spécialisées de l'UA ». 277

Enfin aucune décision, aucun rapport n'a fait mention du sort du Comité de libération.278

274 Cf. Rapport du Secrétaire général sur la mise en oeuvre de la décision de Syrte sur la création de Union africaine, Doc. OUA CM/2210 (LXXIV).

275 En effet, la décision AHG/Déc. 160 (XXXVII) de la Conférence avait décidé d' « incorporer l'Organe Central

du Mécanisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits, en tant qu'organe de l'Union » tout en demandant au Secrétaire général « de revoir les structures, les procédures et les méthodes de travail de ce Mécanisme ». Cf. Décision sur la mise en oeuvre de la décision du sommet de Syrte sur l'Union africaine,

AHG/Déc. 160 (XXXVII), p. 3

276 Cf. Protocole relatif à la création du CPS de l'Union africaine, article 22, 1°.

277 Décision sur la mise en oeuvre de la décision du sommet de Syrte sur l'Union africaine, AHG/Déc. 160

(XXXVII), p. 4

278 Ici, il convient de signaler la rareté des documents qui concernent les réalisations de cet organe. De plus, nous n'avons eu accès à aucune source de documentation renseignant sur son effectivité à l'occasion de la

transformation de l'OUA en UA.

106

Au bénéfice des remarques précédentes, il ressort que la mise en place de l'UA a

été un processus à la fois ponctuée par les différentes décisions au cours de plusieurs sessions de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement de l'OUA et du Conseil des ministres et qui s'est étalé sur une période de trois ans (1999-2002).

De plus, les effets de cette succession révèlent le souci de sauvegarder les acquis de

l'OUA tant sur le plan fonctionnel qu'opérationnel dans le cadre de la « Nouvelle Union africaine ».

Dans le droit fil des développements antérieurs, il ne nous semble pas superflu de nous

attarder sur les organes de la nouvelle organisation panafricaine.

107

Section 2ème : Les organes de l'Union africaine

Les organes de l'Union africaine, énumérés dans l'Acte constitutif en son article

5, sont au nombre de neuf.

Il s'agit ici de décrire ces organes à partir d'un commentaire du texte de l'Acte constitutif et des différents Règlements intérieurs et protocoles ; en insistant, particulièrement, sur trois aspects à savoir la composition, la compétence et le mode de votation.

Précisons également que pour mieux aborder la description de ces organes, il convient d'opérer en leur sein une classification selon leurs fonctions.

C'est dans cette optique que, tour à tour, nous examinerons les organes politiques

et délibérants, l'organe administratif, l'organe juridictionnel et les organes à caractère économique et financier.

§1. Les organes politiques

A. La Conférence de l'Union

La Conférence de l'UA est composée des Chefs d'Etat et de gouvernement ainsi

que de leurs représentants dûment accrédités.

L'Acte constitutif précise aussi que c'est l'organe suprême de l'Union (art.6, 2°).

Sur sa lancée, le même article indique que la Conférence se réunit au moins une fois par

an en session ordinaire (art. 6, 3°), bien qu'elle puisse également se réunir en session extraordinaire à la demande de tout Etat membre (après approbation de la majorité des deux tiers des Etats membres) mais aussi sur l'initiative du Président de la Conférence

(art. 6, 4°).

A ce propos, la Conférence élit son Président parmi les Chefs d'Etat et de gouvernement, au début de chaque session ordinaire et de manière rotative pour une période d'un an renouvelable (art. 6, 5°).

Quid des compétences de la Conférence ?

108

1. Les compétences de la Conférence de l'UA

Le Règlement intérieur de la Conférence de l'Union détermine les pouvoirs et

attributions de l'organe suprême. Il s'agit notamment de :

- définir les politiques communes de l'Union, fixer les priorités et adopter son programme annuel ;

- accélérer l'intégration politique et socio-économique du continent ;

- donner des directives au Conseil exécutif, au Conseil de paix et de sécurité ou à la Commission sur la gestion des conflits, des situations de guerres, des actes de terrorisme et d'autres situations d'urgence et de la restauration de la paix ;

- décider de l'intervention dans un Etat membre dans des circonstances graves, à

savoir les circonstances de guerre, de génocide et de crimes contre l'humanité;

- déterminer les sanctions à imposer à l'encontre de tout Etat membre en cas de non-paiement des contributions statutaires, de violation des principes consacrés dans l'Acte constitutif, en cas de non-respect des décisions de l'Union et de changements anticonstitutionnels de gouvernement.279

2. Le mode de votation

La Conférence prend ses décisions « par consensus ou à défaut, à la majorité des

deux tiers des Etats membres de l'Union ».280

Toutefois, pour ce qui est des questions de procédure, elles sont tranchées à la majorité simple (art. 8).

B. Le Conseil Exécutif

Composé des ministres des Affaires étrangères ou de tous autres ministres ou

autorités désignées par leurs gouvernements respectifs, le Conseil exécutif est le second organe prévu par l'Acte.

279 Article 4 du Règlement intérieur de la Conférence

280 Article 8 de l'Acte constitutif

109

Le Règlement intérieur, en son article 8, précise quant à lui que le Conseil se réunit deux fois par an (en février et juillet).

Les sessions extraordinaires, sont aussi prévues par l'article 12 du Règlement intérieur. Dans ce cas, « le Conseil se réunit à la demande du Président, de tout Etat membre ou

du Président de la Commission en consultation avec le Président de la Conférence ».281

Quid des compétences du Conseil ?

1. Les compétences du Conseil exécutif

L'article 5 du Règlement intérieur du Conseil détermine les pouvoirs et

attributions du Conseil exécutif. Il s'agit notamment de :

- préparer les sessions de la Conférence ;

- coordonner et harmoniser les politiques, les activités et les initiatives de l'Union dans les domaines d'intérêt commun pour les Etats membres ;

- recevoir et examiner les rapports des autres organes de l'Union qui ne font pas directement rapport à la Conférence, et faire des recommandations sur ces rapports ;

- déterminer les conditions de services, y compris les salaires, les indemnités et la pension du personnel de l'Union.

Enfin, l'art 13 de l'Acte constitutif stipule également que « le Conseil exécutif

est responsable devant la Conférence, il se réunit pour examiner les questions dont il est saisi et pour contrôler la mise en oeuvre des politiques arrêtées par la Conférence.

2. Le mode de votation

En vertu de l'article 19 du Règlement intérieur du Conseil exécutif, cet organe

prend ses décisions par consensus ou, à défaut, à la majorité des deux tiers des Etats membres jouissant du droit de vote.

Le quorum pour toute session du Conseil est constitué des deux tiers des Etats membres.

281 Article 12 du Règlement du Conseil exécutif

110

C. Le Comité des représentants permanents (COREP)

Aux termes de l'art. 21 de l'Acte constitutif : « il est créé auprès de l'Union, un

Comité des représentants permanents composé de représentants permanents et autres plénipotentiaires des Etats membres ».

C'est le Règlement intérieur de cet organe, adopté par la première session ordinaire de

la Conférence de l'Union tenue à Durban, qui prend le relais pour déterminer sa compétence.

1. Les compétences du COREP

L'article 4 du Règlement intérieur du COREP détermine les pouvoirs et

attributions de cet organe. Ainsi, le COREP :

fait fonction d'organe consultatif du Conseil exécutif;

prépare les sessions du Conseil exécutif, y compris l'ordre du jour et les projets

de décisions ;

facilite la communication entre la Commission et les capitales des Etats membres ;

examine les rapports financiers de la Commission et fait des recommandations

au Conseil exécutif ;

entreprend toutes autres activités que pourrait lui confier le Conseil exécutif.

Enfin, le statut du COREP dans la structure de l'UA est établi par l'article 2 de son Règlement intérieur qui dispose que : « le COREP est responsable devant le Conseil exécutif ».

2. Le mode de votation

A l'instar des deux organes précédents, le COREP prend ses décisions par

consensus ou à défaut à la majorité des deux tiers des Etats membres282.

Cependant, il convient de souligner que l'article 26 de son Règlement intérieur vient préciser que « les décisions du COREP sont des recommandations jusqu'à leur adoption par le Conseil exécutif ».

282 Article 13 du Règlement intérieur du Comité des représentants permanents

111

D. Le Parlement panafricain

L'Acte constitutif, précisément en son article 17 énonce qu' « en vue d'assurer la

pleine participation des peuples africains au développement et l'intégration du continent, il est créé un Parlement panafricain ».

La composition et la compétence de cet organe sont déterminées par un Protocole y relatif.

En ce qui concerne la composition du Parlement panafricain, l'article 4 prévoit

une période transitoire durant laquelle « les Etats membres sont représentés au

Parlement panafricain par un nombre égal de parlementaires».283

De plus, chaque Etat membre est représenté au Parlement par cinq membres dont au moins une femme.284

En outre, la représentation de chaque Etat membre doit « refléter la diversité des opinions politiques de ce Parlement ».285

L'article 5 du Règlement intérieur stipule, quant à lui, que les parlementaires sont élus

ou désignés par leurs parlements nationaux respectifs ou tout autre organe législatif des

Etats membres parmi leurs membres».

En ce qui concerne les mandats des parlementaires, le même article indique que «la durée du mandat de tout parlementaire panafricain est liée à celle de son mandat de membre de son parlement ou tout organe législatif national ».

Quid des pouvoirs et attributions du Parlement panafricain?

1. Les compétences du Parlement panafricain

Les compétences du Parlement panafricain sont spécifiées à l'article 11 de son

Protocole. En effet, cet article stipule que « le Parlement panafricain est investi de pouvoirs législatifs tels que définis par la Conférence ».

Cependant, le même article s'empresse de notifier qu'au cours du premier mandat

de son existence, le Parlement panafricain n'exerce que des pouvoirs consultatifs ».

283 Article 4 ,1° du Protocole relatif au Parlement panafricain

284 Art. 4, 2° du Protocole relatif au Parlement panafricain

285 Article 4, 3° du Protocole relatif au Parlement panafricain

112

C'est à cet égard que le Parlement peut, entre autres :

«- examiner, débattre ou exprimer un avis ou sur toutes questions de sa propre

initiative ou à la demande de la Conférence ou des autres organes de décision, et faire les recommandations qu'il juge nécessaires ;

- oeuvrer à l'harmonisation ou à la coordination des lois des Etats membres ».286

2. Le mode de votation

Le Parlement panafricain se réunit deux fois au moins en session ordinaire et,

chaque session ordinaire peut durer jusqu'à un mois.287

Pourtant, si les deux tiers des parlementaires panafricains, la Conférence ou le Conseil exécutif en exprime le souhait par une requête écrite et motivée, le Président du Parlement convoque une session extraordinaire au cours de laquelle on ne pourra discuter que des questions indiquées dans la requête.288

Enfin, pour ce qui concerne le vote, l'article 6 du Protocole stipule que « les parlementaires panafricains votent à titre personnel et de manière indépendante ».

E. Le Conseil de Paix et de Sécurité (CPS)

D'entrée de jeu, il faut préciser que cet organe n'est pas énuméré dans l'Acte

constitutif.

Cependant, un Protocole sur les amendements à l'Acte constitutif de l'UA prévoit en son article 5 l'insertion de cet organe dans l'énumération opérée par l'article 5 de l'Acte constitutif.

Cela étant, c'est le Protocole qui détermine sa composition, sa compétence et son

mode de votation.

Le CPS est composé, en vertu de l'art. 5 de son Protocole, de 15 membres ayant des droits égaux et élus de la manière suivante :

- dix membres élus pour un mandat de deux ans ;

- Cinq membres élus pour un mandat de trois ans ;

Ce système permet et assure la continuité dans les attributions et pouvoirs du CPS. Quid de ses attributions et pouvoirs?

286 Article 5 du Protocole relatif au Parlement panafricain

287 Article 14 du Protocole relatif à la création du Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine

288 Article 14 du Protocole relatif à la création du Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine

113

1. Les compétences du Conseil de Paix et de Sécurité

Le Conseil de Paix et de Sécurité assume les fonctions dans les domaines

suivants :

« - Promotion de la paix, de la sécurité et de la stabilité en Afrique ;

- Alerte rapide et diplomatie préventive;

- Rétablissement de la paix, y compris les bons offices;

- Opérations d'appui à la paix et intervention, conformément à l'art. 4 (h) et (j) de l'Acte constitutif;

- Consolidation de la paix et reconstruction post-conflit;

- Action humanitaire et gestion des catastrophes;

- Toute autre action qui pourrait être décidée par la Conférence ».289

Enfin, les pouvoirs du CPS sont exercés conjointement avec le Président de la

Commission, en ce qui concerne notamment :

- Entreprendre des activités de rétablissement et de consolidation de la paix lorsque les conflits éclatent, pour faciliter leur règlement;

- Autoriser l'organisation et le déploiement des missions d'appui à la paix;

- Recommander à la Conférence, l'intervention, au nom de l'Union dans un Etat membre dans certaines circonstances graves;

- Approuver les modalités d'intervention de l'Union dans un Etat membre, suite à une

décision de la Conférence;

- Coordonner et contrôler la mise en oeuvre des décisions des organes de l'Union, en étroite collaboration avec le COREP ; et

- Imposer, conformément à la déclaration de Lomé, des sanctions chaque fois qu'un

changement anticonstitutionnel de gouvernement se produit dans un Etat membre.290

289 Article 6 du Protocole relatif à la création du Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine.

290 Article 7 du Protocole relatif à la création du Conseil de Paix et de Sécurité de l'Union africaine.

114

2. Le mode de votation

Le CPS est organisé de manière à pouvoir exercer ses fonctions en permanence.

Ainsi, en vertu de l'article 8 du Protocole, « Chaque membre du Conseil de paix et

de sécurité doit avoir, en tout temps, un représentant au siège de l'Union ».

De plus, le point 2 de l'article 8 indique que le CPS se réunit au niveau des représentants permanents, des ministres ou des Chefs d'Etat et de gouvernement.

Enfin, chaque Etat membre du CPS dispose d'une voix (art.8, 12).

D'une manière générale, les décisions du CPS sont guidées par le principe du consensus. A défaut de consensus, le CPS adopte ses décisions sur les questions de procédure à la majorité simple, tandis que les décisions sur toutes les autres questions sont prises à la majorité des deux tiers de ses membres votants ». 291

Après les organes politiques de l'Union, nous nous proposons d'élargir la description des organes de l'UA à l'organe administratif prévu par l'Acte constitutif.

§2. L'organe administratif

A. La Commission de l'Union

L'article 20 de l'Acte constitutif énonce qu' « il est créé une Commission qui est le

secrétariat de l'Union ». Ce sont les Statuts de la Commission qui déterminent la composition ainsi que les pouvoirs et attributions de cet organe.

1. La composition

La Commission est composée des membres suivants :

a) un Président

b) un Vice-président c) huit commissaires

291 Article 8, 13° du Protocole relatif à la création du Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine

115

En son paragraphe 3, l'article 3 ajoute aussi que « les membres de la Commission sont assistés par le personnel nécessaire pour le fonctionnement harmonieux de la Commission ».

En ce qui concerne les Commissaires, ils occupent conformément à l'article 12 du

Règlement intérieur de la Commission, les portefeuilles suivants :

a) Paix et sécurité

b) Affaires politiques

c) Infrastructure et énergie d) Affaires sociales

e) Ressources humaines, sciences et technologie

f) Commerce et industrie

g) Economie rurale et agriculture h) Affaires économiques

Enfin, il faut préciser qu'en vertu de l'article 10 des Statuts, « le mandat des membres de la Commission est de quatre ans, renouvelable une seule fois ».

2. Les Compétences de la Commission

En vertu de l'article 3 des Statuts de la Commission, outre les fonctions spécifiées

dans les décisions des organes délibérants, la Commission a notamment comme attributions de :

- représenter l'Union et défendre ses intérêts, sous l'autorité et sur mandat de la

Conférence et du Conseil exécutif ;

- élaborer les propositions à soumettre à l'examen des autres organes ;

- coordonner et contrôler la mise en oeuvre des décisions des autres organes de l'Union, en étroite collaboration avec le COREP ;

- mobiliser des ressources et élaborer des stratégies appropriées d'autofinancement, des activités génératrices de revenus et des investissements pour l'Union.

116

Enfin, il convient de mentionner aussi que le Président de la Commission occupe une place importante au sein de cet organe.

Ainsi, conformément à l'article 7 des Statuts « il est le chef de l'exécutif de la

Commission, le représentant légal de l'Union et l'Ordonnateur de la Commission ».

Il est chargé de :

- présider toutes les réunions et diriger tous les travaux de la Commission;

- participer aux délibérations de la Conférence, du Conseil exécutif, du COREP, des Comités et de tout autre organe de l'Union, le cas échéant, et enregistrer leur délibération;

- assurer les fonctions de dépositaires des instruments de ratification, d'accession

ou d'adhésion à tous les accords internationaux conclus sous les auspices de l'Union,

- nommer le personnel de la Commission,

- effectuer les démarches diplomatiques sur le compte de l'Union.

§3. L'organe juridictionnel

L'Acte constitutif, en son article18, institue une Cour de justice de l'Union.

La même disposition indique que la composition et les pouvoirs de la Cour sont définis dans un Protocole y afférant.

Ce Protocole, bien qu'adopté par la Conférence de l'Union à Maputo en juillet 2003292 ,

est en cours de ratification et par conséquent n'est pas entré en vigueur.

En effet, ce Protocole entrera en vigueur au 30ème jour après le dépôt du 15ème

instrument de ratification, alors qu'actuellement (août 2006) seuls 11 Etats membres -

sur les 53 membres de l'UA - l'ont déjà ratifié. 293

Pourtant, il faut relever que la Conférence de l'Union, réunie à Addis-Abeba en juillet 2004, avait décidé de la fusion de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples et la Cour africaine de justice.294

292 Décision sur le projet de Protocole de la Cour africaine de justice de l'UA, Assembly/AU/Déc. 25 (II), p. 1

293 Cf. site de l'Union africaine, www.africa-union.org

294 Décision sur les sièges de l'Union africaine, Assembly/AU/Dec.45 (III), p. 1

117

De plus, la Conférence avait décidé qu'un projet d'instrument juridique relatif à la mise

en place de la Cour qui résulterait de la fusion de la Cour des droits de l'homme et des peuples et de la Cour de justice soit élaboré et soumis aux sessions ordinaires suivantes

du Conseil exécutif295 , cet instrument n'est pas encore adopté par la même Conférence à

ce stade (août 2006).

§4. Les organes à caractère social, économique et financier

A la lumière des dispositions de l'Acte constitutif ; nous distinguons les Comités techniques spécialisés ; le Conseil économique, social et culturel et enfin les institutions financières.

A. Les Comités techniques spécialisés (CTS)

Ce sont les articles 14 et 15 de l'Acte constitutif qui déterminent la composition et

les attributions des Comités techniques spécialisés.

En effet, l'article 14, 3° stipule que « les Comités techniques spécialisés sont composés des ministres ou hauts fonctionnaires chargés des secteurs relevant de leurs domaines respectifs de compétence ».

Distinctement, l'Acte constitutif subdivise les CTS en 7 domaines :

- le Comité chargé des questions d'économie rurale et agricoles ;

- le Comité chargé des affaires monétaires et financières ;

- le Comité chargé des questions commerciales, douanières et d'immigration ;

- le Comité chargé de l'industrie, de la science et de la technologie, de l'énergie, des ressources naturelles et de l'environnement.

- le Comité chargé des transports, des communications et du tourisme ;

- le Comité chargé de la santé, du travail et des affaires sociales ;

- le Comité chargé de l'éducation, de la culture et des ressources humaines.

295 Décision sur la fusion de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples et la Cour africaine de justice, Assembly/AU/Dec.83 (V), p.1

118

1. Les compétences des CTS

Conformément à l'article 15, chacun des Comités dans le cadre de sa compétence

a pour mandat de :

- préparer des projets et programmes de l'Union et les soumettre au Conseil exécutif ;

- assurer le suivi et l'évaluation de la mise en oeuvre des décisions prises par les organes de l'Union ;

- assurer la coordination et l'harmonisation des projets et programmes de l'Union;

- présenter des rapports et des recommandations au Conseil exécutif, soit de sa propre initiative, soit à la demande du Conseil exécutif, sur l'exécution des dispositions de l'Acte ; et

- s'acquitter de toute tâche qui pourrait lui être confiée, en application des

dispositions de l'Acte.

Enfin, il faut préciser que ces CTS sont responsables devant le Conseil exécutif.

B. Le Conseil économique, social et culturel (ECOSOC)

Le Conseil économique, social et culturel est défini par l'article 22 de l'Acte

constitutif qui dispose qu'il « est un organe consultatif composé de représentants des différentes couches socio-professionnelles des Etats membres de l'Union ».

Toutefois, le même article ajoute que « les attributions, les pouvoirs, la composition et l'organisation du Conseil économique, social et culturel sont déterminés par la Conférence ».

A ce propos, il faut noter que la Conférence de l'Union n'a pas encore déterminé le

statut de ce Conseil.296

296 Cf. site de l'Union africaine, www.africa-union.org

Sur ce site, il est mentionné « que les statuts définissant les fonctions, les attributions, la composition et l'organisation de l'ECOSOCC ont été élaborés » et qu'ils devaient être soumis au sommet de Maputo. Cependant, il faut noter que les Chefs d'Etat et de gouvernement n'ont pris aucune décision dans ce sens.

119

C. Les Institutions financières

L'Acte constitutif, précisément en son article 19 dote l'Union africaine des

Institutions financières suivantes:

« - la Banque centrale africaine

- le Fonds monétaire africain

- la Banque africaine d'investissement ».

Bien que l'article 19 précise que le statut de ces Institutions est défini dans les Protocoles y afférents, il nous faut mentionner que ces Protocoles sont inexistants jusqu'à présent (août 2006).

Au terme de cette description du dispositif institutionnel prévu par l'Acte constitutif de l'Union africaine, il s'avère judicieux de relever en filigrane les réformes majeures qu'apporte l'Acte constitutif.

120

Section 3ème: Les réformes majeures

L'évolution institutionnelle qui a caractérisée la transformation de l'OUA en UA a amené plus d'un à s'interroger sur les innovations réelles dont elle était porteuse.

Au-delà du changement de sigle qu'apporte réellement l'UA par rapport à l'OUA?

Pour répondre à cette question, il nous est un devoir de circonscrire au préalable, l'angle dans lequel nous nous proposons d'aborder la question.

Ici, nous nous limiterons aux réformes majeures contenus dans l'Acte constitutif sous l'angle organique.

Précisément, nous nous attacherons à indiquer la nouvelle idéologie panafricaniste avant de terminer par les innovations de l'architecture institutionnelle prévue par l'Acte constitutif.

§1. Une idéologie panafricaniste rénovée

Les dispositions de l'Acte constitutif laissent clairement apparaître d'importants changements opérés au niveau de l'idéologie, et cela par rapport à l'ancienne OUA.

Ces changements transparaissent tant du point de vue des objectifs assignés à la

nouvelle organisation que celui des principes qui vont la guider.

En premier lieu, l'UA se voit assigner des objectifs qui vont bien au-delà de ceux qui étaient prévus par l'OUA.

Ainsi sont mentionnés de nouveaux domaines de compétence. Ces derniers constituent, pour certains d'entre eux une véritable révolution.297

Les objectifs énoncés par l'Acte constitutif de l'UA, ne concernent plus exclusivement

les domaines politiques traditionnels dont l'OUA avait déjà à connaître, comme le renforcement de la paix et de la sécurité du continent ou encore la défense des positions africaines communes sur les questions d'intérêt pour le continent et les peuples d'Afrique.

297 BOURGI ( A.), « L'union africaine, entre texte et réalité », www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/BOURGI.pdf,

p. 332

121

Il apparaît plutôt que l'Union africaine recouvre désormais des sujets plus sensibles comme « l'intégration politique et socio-économique du continent »298 , ou plus concrets

et plus proches des peuples africains, telles la protection des droits de l'homme et des peuples, la promotion des principes et institutions démocratiques et la participation populaire, la lutte contre les pandémies ou encore la libre circulation des personnes. 299

En second lieu, en dehors des grands principes largement consacrés par le droit international sur lesquels étaient déjà fondés l'OUA et que l'Acte constitutif rappelle solennellement (égalité, souveraineté, et interdépendance des Etats membres, non- ingérence d'un Etat membre ...), il faut souligner que des innovations ont été introduites.

Ces nouvelles évolutions s'orientent dans deux domaines clés.

D'une part, dans les domaines économiques et sociaux où « la promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes, la participation des peuples africains aux activités de l'Union ainsi que l'autodépendance collective dans le cadre de l'Union » 300 sont désormais érigés au rang de principes.

D'autre part, dans le domaine politique au nombre des principes censés désormais guider l'Union figurent, entre autres le droit de l'Union « d'intervenir dans un Etat membre sur décision de la Conférence, dans certaines circonstances graves à savoir : les crimes de guerre, le génocide et les crimes contre l'humanité » et «le droit des Etats membres de solliciter l'intervention de l'Union pour restaurer la paix et la sécurité ».301

En définitive, l'idéologie de l'Union africaine atteste du changement de cap de l'organisation et sa volonté de prendre en compte des préoccupations qui jusque là avaient toujours été ignorées par la défunte OUA.

Pour répondre à ses nouvelles ambitions, l'UA a dû innover aussi au niveau de ses

organes.

298 Article. 3 ( c ) , de l'Acte constitutif

299 Cf. Article 3 ( h, g, n, i ) de l'Acte constitutif

300 Article 4 ( l, c, k ) de l'Acte constitutif.

301 Article 4 ( j ) de l'Acte constitutif.

122

§2. Une architecture institutionnelle rénovée

Créée dans l'espoir de remédier aux insuffisances affichées par l'OUA, l'Union africaine était attendue comme porteuse de changement sur le plan institutionnel.

C'est effectivement sur ce plan que des changements sont palpables aussi bien à travers

le nombre d'organes prévus par l'Acte constitutif que par la diversité et l'étendue des prérogatives de ces nouveaux organes.

En effet, parmi les neuf organes prévus aux termes de l'article 5, 3° de l'Acte, trois (la Conférence, le Conseil exécutif, et les Commissions techniques spécialisées) s'inscrivent dans une logique de « continuité dans le changement», alors que le reste des organes sont annonciateurs de futurs chantiers pour l'Union.

A. Les organes s'inscrivant dans la continuité

D'une manière générale, la Conférence de l'Union et le Conseil exécutif

s'inscrivent dans la continuité de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement et

du Conseil des ministres de l'OUA.

En effet, à l'instar de son homologue de l'OUA, la Conférence de l'Union est la pièce maîtresse de l'Union de par ses pouvoirs et attributions. C'est à elle que revient la charge de tout le volet politique de l'Union qu'il s'agisse du contrôle du fonctionnement

de la Commission, ou de la nomination de ses principaux dirigeants ou bien encore de la

définition des politiques.302

En outre, à l'image du Conseil des ministres de l'OUA auquel il a succédé, le Conseil exécutif est le deuxième organe important de l'UA. Par la fréquence de ses réunions et l'étendue de ses attributions, elle se trouve dans une position charnière entre la Conférence et la Commission.303

Enfin, les Comités techniques spécialisés remplacent les Commissions spécialisées

et se subdivisent en sept spécialités apportant aussi une nouveauté réelle. Selon

AMAIZO, le rôle des Comités techniques spécialisés est valorisé par les articles 14,

15 et 16 de l'Acte fondateur.304

302 BOURGI (A.), op. cit. , p. 333

303 SAMSON (D.), « Union africaine la continuité dans le changement », www.rfi.fr, article publié le 14 juillet

2003

304 AMAIZO (Y.E.), « De l'OUA à l'UA : les échecs de l'interdépendance », in Afrique contemporaine,

1er trimestre 2001, n°197, p. 102

123

B. Les nouveaux organes

L'Acte constitutif introduit de nouveaux organes par rapport au schéma

institutionnel qui fut celui de l'OUA.

En effet, en premier lieu, la Commission fait figure de symbole des nouvelles orientations de l'Union et de la volonté de rompre avec les modes d'organisation et de fonctionnement du Secrétariat général de l'OUA.

Albert BOURGI note en outre, que « la présélection très rigoureuse des candidatures

aux postes de Commissaires, sous la forme d'un classement établi à partir des seuls critères de compétence a permis d'éviter le piège de la politisation dans lequel s'est trop longtemps enfermé l'OUA ».305

Deuxièmement, deux nouveaux organes semblent répondre à une volonté de la plupart des fondateurs de l'Union africaine, d'impliquer directement les opinions publiques africaines dans le chantier de l'intégration politique et économique du continent.

Il s'agit d'une part, de l'institution du Parlement panafricain, composé par des représentants désignés par les parlements nationaux.

Ce nouvel organe, à plus long terme, devrait s'inspirer du Parlement européen et

« comprendre des députés africains élus au suffrage universel direct dans chaque Etat membre ».306

D'autre part, c'est le Conseil économique, social et culturel appelé lui aussi à être une tribune de la Société civile africaine de l'Union africaine.

En troisième lieu, une autre innovation institutionnelle de l'UA réside dans la création d'une Cour de justice. Bien qu'actuellement (juillet 2006), la Cour africaine de justice ne soit pas encore fonctionnelle, elle marque un courant décisif pour l'Union africaine qui s'est dotée, contrairement à l'OUA, d'un organe proprement judiciaire

305 BOURGI (A.), op. cit., p. 335

306 Ibid.

124

chargé entre autres de l'interprétation et de l'application de l'Acte constitutif ou de toute autre question relative au droit international.307

Quatrièmement, il est aussi important de relever au nombre des innovations institutionnelles, la création du CPS. L'originalité de ce nouveau dispositif de l'Union africaine réside dans la création de nouveaux instruments permettant au Conseil de paix

et de sécurité d'assurer ses responsabilités, en matière de prévention des conflits (via le

système continental d'alerte rapide), d'intervention (via la force africaine pré positionnée) et de commandement des opérations (Comité d'Etat major).308

Cinquièmement et en dernier lieu, il convient également de mentionner un nouvel organe politique : le Comité des représentants permanents.

Cet organe est chargé d'assurer au quotidien le lien entre le Conseil exécutif, dont il est

en quelque sorte le mandataire, et la Commission.

A la croisée entre ces deux organes importants, cet organe est appelé à jouer un rôle important dans la structure de l'UA.

BOURGI rapporte d'ailleurs que « l'activisme du COREP n'a d'ailleurs pas échappé à

la Libye qui y voit un obstacle à ses ambitions hégémoniques et, de ce fait, a tenté sans

y parvenir, d'obtenir la suppression (...), lors du sommet extraordinaire réuni en février

2003 pour discuter des propositions portant amendements de l'Acte constitutif ».309

En définitive, au terme de cette étude sur les réformes majeures, il n'est pas à douter que, de par son Acte constitutif, l'UA apparaisse comme un véritable espoir pour

le continent africain. Non seulement, elle se fixe des objectifs ambitieux, à la mesure des problèmes que connaît l'Afrique mais encore son architecture institutionnelle fait preuve

de grandes innovations.

Toutefois, il n'est pas sans intérêt de relever les défis auxquels la nouvelle institution panafricaine doit faire face pour que l'espoir qu'elle suscite se concrétise.

307 CARBONE (M.), « De l'OUA à l'UA : Une page de l'Afrique est tournée », in Le Courrier ACP-UE, septembre-octobre, n° 194, p. 30

308 Initiative du réseau francophone de recherche sur les opérations de paix, « L'Union africaine, en bref », www.operationspaix.net/operations-en-cours

309 BOURGI (A.), op. cit. , p. 339

125

Section 4 : Les défis de l'Union africaine

Quatre ans après son lancement officiel et après avoir franchi l'étape de la ratification du traité fondateur, l'UA est déjà engagée dans la course d'obstacles afin d'atteindre ses ambitieux objectifs car il est vrai que les défis sont multiples et divers.

Un relevé exhaustif de ces défis ne serait pas adéquat pour une étude aux dimensions modestes comme celui-ci.

Toutefois, nous nous proposons de dégager les grands axes qui transcendent ces multiples défis.

De plus, nous n'hésiterons pas à émettre des recommandations à l'UA allant dans le

sens de lui permettre de faire face à ses deux grands chantiers : l'opérationnalisation et

le renforcement de sa structure ainsi que l'intégration politique du continent.

§1. L'opérationnalisation et le renforcement de la structure de l'UA.

Bien que le schéma institutionnel tracé par l'Acte constitutif soit innovant, point n'est besoin de rappeler que certains organes sont encore non opérationnels et qu'il convient donc, de les rendre fonctionnels. (A)

En outre, ceux qui le sont déjà présentent la nécessité d'être renforcée pour mieux accomplir leurs tâches notamment en ce qui concerne leur règle de fonctionnement (B).

Enfin, il va sans dire que l'opérationnalisation et le renforcement de la structure nécessitent conséquemment des ressources financières adéquates qu'il faudra mobiliser

(C).

126

A. Achever la construction de la structure de l'UA

A terme, il est clair que l'UA ne pourra réaliser ses objectifs que si elle achève

entièrement la mise en place de sa structure.

Ainsi de tous les organes non fonctionnels précédemment cités, la Cour africaine de justice et le Conseil économique, social et culturel doivent être en priorité opérationnalisés.

A l'instar de la Cour de Justice des Communautés européennes( qui est un organe commun de l'Union européenne et de l'EURATOM), un organe judiciaire est une nécessité incontournable. Ainsi, il ne serait pas des plus fâcheux si l'UA pouvait se doter d'un organe judiciaire adéquat, qu'elle pourrait consulter sur toutes les questions juridiques délicates et qui contribuerait de la sorte utilement à l'adaptation permanente

de l'organisation aux affaires du continent.

A propos de l'instrument unique relatif à la fusion de la Cour africaine de justice et de

la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples évoqué précédemment, la Conférence de l'Union, réunie à Banjul (Gambie) en juillet 2006 a demandé « à la Commission de convoquer une réunion des ministres de la justice pour examiner le projet de Protocole relatif aux Statuts de la Cour africaine de Justice et des droits de l'homme, y compris les questions en suspens, et formuler des recommandations

appropriées au Conseil en janvier 2007 ».310

Enfin, en ce qui concerne les institutions financières, la mise en place éventuelle d'une Banque Centrale africaine, d'un Fonds monétaire et d'une Banque africaine d'investissement serait une avancée significative vers l'union économique du continent, bien qu'il soit indispensable de nuancer sur la mise en place de ces institutions dans l'environnement actuel.

310 Décision sur le projet d'instrument unique relatif à la fusion de la cour africaine des droits de l'homme et des

peuples et la cour de justice de l'union africaine, Assembly/AU/Dec.118 (VII) Rev.1

127

Comme pour relayer notre pensée, Amara ESSY, ancien Secrétaire général de l'OUA et Président intérimaire de la Commission de l'UA pendant la période de transition, estime que « pour ces initiatives aussi importantes, il faut des préalables économiques, un vigoureux assainissement des économies africaines et une convergence monétaire ».311

Ainsi à ce stade, il faudrait donc se contenter de maintenir et de consolider d'autres

institutions financières existantes, telle que la BAD qui pourrait jouer éventuellement le rôle de Banque africaine d'investissement.

B. Renforcement des organes clés

De même que la stratégie d'innovation institutionnelle a inspiré l'Acte constitutif,

celle de renforcement de certains organes de l'UA est aussi une condition sine qua none pour donner à l'Organisation les moyens d'agir.

Précisément, ici, nous ciblerons d'une part, les trois principaux organes délibérants à

savoir la Conférence, le Conseil exécutif et le COREP et d'autre part, la

Commission de l'Union en mettant l'accent sur leurs règles de fonctionnement.

Tout d'abord, nous ferons remarquer que le mode de prise de décision des organes délibérants est dominé par la règle du consensus, « à défaut la majorité des deux tiers ». Pourtant, il est regrettable que les pères fondateurs n'aient pas préféré remettre en cause cette règle des deux tiers qui avait régulièrement paralysé l'organisation prédécesseur, soit dans l'inaction, soit dans des décisions stériles.312

De plus, cette règle risque-t-elle de bloquer les possibilités offertes par l'article 32 de

l'Acte, d'amender et de réviser l'Acte constitutif.

Or, pour replacer l'Acte constitutif dans une perspective dynamique et revaloriser l'interdépendance, il faudrait passer de la règle des deux tiers à celle d'une majorité qualifiée qui resterait à déterminer (55% par exemple).

311 Propos rapportés par KPATINDE (F.), « Une si longue et difficile transition », in Jeune Afrique/l'Intelligent,

2215 du 22 au 28 juin 2003, p.78

312 AMAIZO (Y. E.), op . cit. , p. 104

128

Ensuite, à propos de la Commission, si l'Acte constitutif se contente de la qualifier de « Secrétariat de l'Union »313, les Statuts de la Commission indiquent que les responsabilités confiées au Président de la Commission sont considérables et par conséquent, la Commission doit être un organe opérationnel et non pas le simple secrétariat prévu par l'Acte constitutif.

Dans cet esprit, elle doit être conçue comme l'embryon de l'exécutif du continent.

De la sorte, les Commissaires africains doivent être de vrais ministres, tandis que le Président de la Commission exerce les fonctions de chef de gouvernement, avec autorité sur les Comités techniques spécialisés qui feraient office de directions générales ministérielles.314

Enfin, dans le but d'assurer à l'UA une efficacité et partant de renforcer l'organisation en tant que centre autonome de décision, la Commission doit développer une logique de développement des indicateurs de performance.

Pour ce faire, d'une part, la Commission autant que les autres organes, doit s'obliger à avoir des résultats annoncés dans les échéances prévus. Car, si les objectifs énoncés à l'art. 3 de l'Acte sont nobles, il faut souligner que si les organes chargés de les réaliser

ne se réfèrent à aucune date butoir, lesdits objectifs ne constituent qu'une catégorie d'intentions.315

D'autre part, la Commission doit aussi mettre en place un mécanisme d'évaluation de l'application des décisions et du respect des principes de l'UA par les Etats membres.

Un modèle type de ce mécanisme est déjà prévu au niveau du NEPAD, il s'agit

du mécanisme africain d'évaluation par les pairs (MAEP) qui prévoit des audits par pays sur les questions de gouvernance économique et politique (corruption, droits de l'homme, éthique des entreprises, valeurs démocratiques). 316

313 Cf. Article 20 de l'Acte constitutif

314 TSHIYEMBE (M.), « Des institutions à conforter », in Le monde diplomatique, juillet 2002, p. 23

315 AMAIZO (Y. E.), op. cit. , p. 103

316 JORDANE (B.), Deuxième sommet de l'UA au Mozambique, in Le Courrier ACP-UE, n°199, juillet -août

2003, p. 5

129

C. Mobiliser les ressources financières

Nombreux sont les analystes qui, au lendemain du lancement officiel de l'UA

estimaient que le budget de l'UA était appelé à doubler, à tripler, voire à quadrupler au

vu de ses ambitions et à la mesure de son évolution.317

Sur la même lancée, le Président de la Commission déclarait, lors de la réunion des experts tenue à Dakar (janvier 2004) sur le financement de l'UA, que :

« Ce ne sont pas les 35 ou 40 millions de dollars plus ou moins payées annuellement par

les Etats membres au titre de leur contribution au budget qui permettront à l'UA

d'affronter les défis de l'avenir ».318

Ainsi, le budget programme de l'OUA prévu pour l'année 2004 qui était de 43.000.000

de dollars319, devait passer pour l'exercice financier 2006 à 126.000.000 de dollars

EU.320

En outre, il convient de préciser que si l'OUA s'est transformée en UA, «Les mauvaises habitudes des Etats non-payeurs, elles, n'ont pas changé du tout ».321

Or, aujourd'hui comme hier pour l'OUA, la majeure partie des ressources financières de l'UA provient des contributions obligatoires des Etats membres.

La solution à ce problème est de trouver d'autres sources de financement. Deux

propositions ont été offertes à l'UA à ce propos :

La première provient du Président de la Commission qui propose de « revoir la vieille méthode des contributions [héritée de l'OUA] en adoptant un système de contribution de chaque pays à hauteur de 0,5% de son budget national.322

317 GHARBI (S.), « Bisbilles financières », in Jeune Afrique/l'intelligent, n° 2215 du 22 au 28 Juin 2003, p. 79

318 Propos rapportés par l'Observateur Paalga, « L'Union africaine », www.lobservateur.bf/Oarticlearchive.php3?id_article=208 , article publié janvier 2004

319 Décision sur le budget programme pour l'année 2004, Assembly/AU/Dec.8 (II), p. 1

320 Décision sur la huitième session ordinaire du Conseil exécutif sur le budget 2006, Ext/Ex.CL/Dec.1 (VIII), p.1

321 OUAZANI (C.), « Vers une Afrique de la défense ? », in Jeune Afrique/l'intelligent, n° 2250 du 22 au 28

février 2004, p. 50

322 L'Observateur Paalga, « L'Union africaine », www.lobservateur.bf/Oarticlearchive.php3?id_article=208 , article publié janvier 2004

130

La deuxième proposition est celle émanant de l'Organisation de la Société Civile

Africaine [OSCA].

Cette organisation propose à l'UA d'instaurer dans ses Etats membres, un droit d'entrée dans la zone de la Communauté économique africaine. Ce droit d'entrée concernerait

les non Africains visitant l'Afrique aussi bien que les citoyens africains qui rentrent en

Afrique.

Sa valeur serait de 10$ par personne et par entrée payable comme une taxe sur chaque billet d'avion à destination de l'Afrique.323

L'OSCA estime le revenu de ce droit d'entrée, appelé également ressource panafricaine

de solidarité « à 200 millions de dollars par an ».324

Cette ressource panafricaine de solidarité qui représente une source non négligeable pour l'UA, pourrait faciliter la mise en oeuvre du Parlement panafricain, de la Cour africaine de justice, et du Conseil économique, social et culturel de l'Union.325

En définitive, l'opérationnalisation et le renforcement de la structure de l'UA

constituent un chantier pour lequel l'UA devra relever maints défis.

Il n'en sera pas autrement en ce qui concerne l'intégration politique et économique du continent africain.

§2. Réaliser l'intégration politique et économique du continent

L'un des objectifs de l'Union, énoncés à l'article 3 de l'Acte constitutif est

d' « accélérer l'intégration politique et socio- économique du continent ».

Outre que cet objectif, à l'instar des autres, n'échappe pas à l'absence d'une quelconque date butoir, sa réalisation fait émerger de nombreux et complexes défis auxquels l'Union

ne peut se soustraire.

Ici, très brièvement, nous relèverons deux défis que nous jugeons comme les plus importants.

Il s'agit, en premier lieu de l'intégration des Communautés économiques régionales au sein de l'UA, ainsi que d'assurer une meilleure participation populaire africaine.

323 L'organisation de la Société Civile Africaine, Deux propositions pour l'autofinancement et l'intégration

politique de l'UA, Yaoundé, mai 2002, p. 6

324 Ibid.

325 Idem., p. 7

131

A. L'intégration des Communautés Economiques Régionales (CER) au

sein de l'UA

En 2006, il n'existe pas moins de 14 groupements régionaux dans toute l'Afrique.

En effet, deux groupements ou plus dirigent actuellement le processus d'intégration dans pratiquement toutes les sous-régions.

De plus, beaucoup de pays appartiennent à plusieurs groupements régionaux :

« Sur les 53 pays africains, 27 sont membres de 2 CER, 18 autres sont membres de 3

CER, 1 pays (la RDC) est membre de 4 CER et enfin seuls 7 pays n'appartiennent qu'à une CER »326

Cependant, il convient de remarquer que les résultats de ces CER sont plutôt minimes. Pour le Dr Kwam KOUASSI, « (...) non seulement elles connaissent une prolifération incessante, mais aussi surtout elles poursuivent des objectifs quasi- similaires qui s'apparentent de plus en plus à des duplications de mandat et de programmes d'activités qui annihilent tous les efforts entrepris en matière d'intégration

économique de notre continent »327

Pour faire face à ce problème de cacophonie institutionnelle, des rencontres à plusieurs niveaux des gouvernements des Etats membres ont été organisées dans le cadre

de l'Union africaine.

En résumé, une première conférence des ministres africains de l'intégration, tenue les 30

et 31 mars 2006 à Ouagadougou (Burkina Faso) sur la rationalisation des CER avait émis des recommandations à l'intention de la Conférence de l'Union.

Cette dernière réunie à Banjul (Gambie), du 1er au 2 juillet 2006 a décidé de suspendre

jusqu'à nouvel ordre la reconnaissance de nouvelles CER à l'exception des huit

ci-après:

« 1. Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO);

2. Marché commun de l'Afrique de l'Est et de l'Afrique Australe (COMESA) ;

3. Communauté économique des Etats de l'Afrique centrale (CEEAC) ;

4. Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) ;

326 World energy council, « Potentiel de développement intégré de l'énergie au plan régional en Afrique », www.worldenergy.org/wec-geis/publications/reports/afrique

327 Dr KOUASSI (R.), « Remarques d'ouverture de la réunion d'experts de gouvernementaux sur la rationalisation des CER », www.africa-union.org

132

5. Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) ;

6. Union du Maghreb arabe (UMA) ;

7. Communauté des Etats Sahélo-Sahariens (CEN-SAD) ;

8. Communauté de l'Afrique de l'Est (CAE) ».328

Ainsi, cette décision apporte une réponse au problème du foisonnement des CER. Toutefois, il ne serait pas inutile que la Conférence de l'Union adopte et soumette à la procédure de ratification le protocole sur les relations entre l'UA et les CER.329

Ce protocole pourrait permettre d'établir une connexion organique entre l'Union africaine, en particulier la Commission, et les différentes CER.

B. Renforcer la participation de la population africaine

La volonté affichée des Etats membres de l'Union africaine, d' « accélérer

l'intégration politique du continent constitue une grande originalité. Toutefois, l'OSCA

se fait l'écho d'un constat de vide fondamental d'intégration politique dans le processus

de mise sur pied de l'UA et surtout qu'on ne peut pas accélérer un processus qui n'existe pas.

En vérité pour combler ce vide, il faut partir du postulat que l'intégration doit avoir une base élargie et populaire : c'est-à-dire une union des peuples.330

En effet, jusqu'à une époque récente la politique d'intégration a été conçue et réalisée principalement par les gouvernements et les administrations nationales à l'exclusion d'autres acteurs. Actuellement, il apparaît opportun et légitime d'envisager d'associer l'ensemble du peuple africain.331

A cet effet, nous soulevons deux propositions pour relever ce défi de renforcement de la participation populaire, comme ciment de l'intégration politique du continent.

328 Décision relative au moratoire sur la reconnaissance des Communautés économiques régionales (CER), Assembly/AU/Dec.112 (VII), p. 1

329 Décision sur le Protocole relatif aux relations entre l'UA et les CER, EX. CL/Dec. 227 (VII), p. 1

330 GESTIN (J. D.), « Intégration, mode d'emploi », in Jeune Afrique /l'intelligent, n°2267 du 20 au 26 Juin 2004,

p. 60

331 Commission de l'Union africaine, Plan stratégique de la Commission de l'Union africaine, mai 2004, Document OUA, p. 76

133

D'une part, la participation populaire doit se matérialiser par une plus grande importance accordée au Parlement. A l'instar du Parlement européen, le Parlement panafricain devrait non seulement récupérer le droit de voter le budget de l'Union attribué actuellement à la Conférence de l'Union, mais également partager avec elle l'initiative des lois africaines.332

D'autre part, l'OSCA propose l'organisation du « premier référendum panafricain »333 .Ce référendum serait une voix démocratique par laquelle les Etats membres de l'UA sont invités à renoncer à leur droit de démissionner de l'Union, énoncé

à l'art. 31 de l'Acte constitutif.

Ce référendum proposé, si jamais il devait être accepté par les Etats membres permettrait

à l'UA d'être une association indissoluble d'Etats africains, avec une mission d'intégration politique qui, en définitive, crée l'intégration territoriale du continent.334

En même temps, il serait créé « les conditions socio-psychologiques nécessaires pour hâter l'avènement des Etats -Unis d'Afrique ».335

332 TSHIYEMBE (M.), «Difficile gestation de l'Union africaine », in le Monde diplomatique, juillet 2002, p.28

333 L'organisation de la Société Civile Africaine, op. cit., p.14

334 Ibid.

335 Idem., p. 13

134

CONCLUSION GENERALE

Au terme de ce travail, il sied de regrouper les idées essentielles développées et

de formuler dans la suite quelques recommandations.

En entreprenant cette réflexion, notre objectif était de faire ressortir les aspects juridiques qui ont entouré la transformation de l'Organisation de l'unité africaine

(OUA) en Union africaine (UA).

A cette fin, dans un premier chapitre consacré aux généralités, nous nous sommes attelés à dégager quelques notions sur la théorie générale des organisations internationales. Il n'avait d'autres buts que celui d'éclairer le lecteur sur des concepts utiles dans les développements ultérieurs.

Deux enseignements se dégagent de cette première articulation.

D'un côté, les organisations internationales sont multiples et diverses en raison de leurs objectifs, structures et fonctionnement, bien qu'elles dégagent certaines tendances générales qui constituent le droit des organisations internationales.

D'un autre côté, une organisation internationale est, par essence, destinée à durer. Aussi existe-t-il rarement dans les actes constitutifs une disposition particulière qui fixe le terme de la durée de chaque organisation. Cette conception optimiste de la part des rédacteurs des actes constitutifs les amène à éluder la définition exacte du régime applicable lors de la succession d'une organisation internationale, d'où l'absence d'une quelconque théorie générale de la succession des organisations internationales.

Acquis à ces deux enseignements, nous avons abordé le deuxième chapitre afin

de replacer notre réflexion dans sa véritable perspective.

Ainsi, en procédant à la présentation générale de l'OUA, avons-nous voulu nous pencher sur les raisons majeures de la disparition de l'OUA. Une telle approche nous a permis de dégager trois idées essentielles.

D'abord, il ressort de cette analyse que l'OUA s'est révélée démunie face au

large éventail d'objectifs qui lui étaient assignés.

Les insuffisances liées aux moyens humains et financiers, l'environnement international qui ne lui était pas favorable - quand il ne lui était pas complètement hostile - et la faiblesse de son système juridique, sont autant de difficultés auxquelles l'OUA a dû faire face.

135

En réalité, les causes profondes dont l'existence a permis d'envisager la transformation

de l'OUA sont nées en même temps qu'elle.

En effet, elles résultent de sa Charte même et elles lui sont, pour ainsi dire, congénitales. Cependant, elles sont restées sans efficacité durant toute son existence tant que l'idéal commun (l'unité africaine et la libération de l'Afrique) était le seul moteur qui animait l'institution.

A l'aube du XXIème siècle, les causes congénitales susvisées ont trouvé là l'occasion

d'acquérir de la vitalité et par conséquent, ont pu contribuer à provoquer la disparition

de l'OUA par sa transformation.

Ensuite, tout effort d'appréciation de l'action de l'OUA doit à la vérité tenir compte des moyens, aussi bien juridiques que matériels, mis à sa disposition.

Ainsi, force est d'admettre que l'OUA a manifesté une certaine vitalité dont témoigne

sa participation à la réflexion sur des questions engageant l'avenir du continent, et à bien des égards à l'élaboration d'un droit international africain.

Enfin, si l'OUA, dans ses structures comme dans son fonctionnement, a demeuré bien éloignée de l'idéal panafricain, elle est toujours apparue comme le vecteur de l'unité africaine. Cette charge symbolique est-elle aussi la raison qui est à la base de la création de l'Union africaine.

Le troisième et dernier chapitre nous a permis, précisément de relever « le comment » de la transformation de l'OUA en UA avant d'embrayer sur les innovations majeures contenues dans l'Acte constitutif de l'UA.

A cet égard, deux constats peuvent être dégagés :

Le premier constat est que la transformation de l'OUA en UA a été menée dans un processus qui s'est étalée sur trois ans avec comme arrière fond le souci constant non seulement de bâtir sur les forces et les acquis de l'OUA, mais aussi de mettre fin à l'existence de l'OUA dans des conditions d'opposabilités juridiques parfaites.

Le deuxième constat est qu'on peut inscrire à l'actif de l'Acte constitutif de l'Union africaine des innovations dont la pertinence est sujette à controverse.

En effet, au regard des grands chantiers qui interpellent l'UA, l'interrogation qui perdure est celle de la viabilité de ces innovations.

136

Si par viabilité on entend la capacité d'adaptation aux situations et de les gérer de manière à y apporter des solutions adéquates et efficaces, nous dirions avec force que ces innovations sont opportunes, en ce qu'elles répondent aux mutations des contextes internes (à l'Afrique) et internationaux.

Pourtant, il nous est aussi un devoir de souligner que sa viabilité demeure fortement tributaire de l'évacuation de certaines hypothèques à son essor. En effet, la rupture tant annoncée avec les égarements de l'OUA se heurte une nouvelle fois aux réalités d'une Afrique toujours repliée sur le dogme de la souveraineté étatique et confrontée à des difficultés financières et économiques qui risquent de renvoyer à un avenir plus lointain

les vastes chantiers de l'UA.

Quels que soient les regrets que l'on ait de cette situation, on ne peut avoir la prétention d'y apporter remède ici.

Outre les recommandations et propositions exprimées précédemment, il nous parait

indispensable de formuler deux recommandations ponctuelles qui permettront à l'Union africaine de fonctionner efficacement en attendant de plus amples réformes.

D'une part, il faudrait tenir désormais les réunions du Conseil exécutif et celles de la Conférence de l'Union au siège de l'UA, à Addis-Abeba et non plus dans la capitale d'un pays choisi chaque année par rotation. Cette formule serait à la fois moins coûteuse que les sommets actuels qui nécessitent une préparation onéreuse pour des raisons de prestige, et plus efficace pour des réunions qui disposeraient sur place des services de la Commission de l'union.

D'autre part, en ce qui concerne le maintien de la paix et de la sécurité sur le continent africain, l'Union africaine doit, à travers le Conseil de paix et de sécurité, élaborer une stratégie de localiser par sous-région des forces de paix.

Chaque armée nationale dans chacune des sous-régions mettrait à la disposition du CPS,

un contingent de soldats formés et équipés pour des opérations de maintien et de rétablissement de la paix.

Pareille étude a été menée non sans quelques difficultés.

Ainsi, nous n'avons pas pu trouver d'ouvrages d'ensemble traitant de la succession des organisations internationales en général et ceux de la transformation de l'OUA en UA

en particulier. Si des sources officielles existent, certaines nous étaient inaccessibles.

137

A toutes fins utiles, nous tenons à rappeler que pour les questions que nous pensions ne pas avoir épuisées ou exploitées à suffisance, nous avons fait oeuvre - autant que faire

se peut - d'orientation bibliographique.

A beaucoup d'égards, ce travail pourrait présenter des imperfections en raison des multiples questions qu'il soulève notamment sur l'Union africaine. C'est la raison pour laquelle nous implorons la clémence du lecteur pour les imperfections scientifiques qui seraient contenus dans notre travail.

Nous espérons toutefois avoir non seulement servi de pont entre une génération de chercheurs qui ont consacré leurs travaux à l'OUA et ceux qui s'intéressent ou s'intéresseront à l'UA, mais aussi d'avoir ouvert des pistes de recherches pour contribuer à ce que.... vive l'Union africaine.

138

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20. MANIGAT (M.), « L'organisation de l'unité africaine », in Revue Française de

science politique, avril 1971, pp. 382-401

21. OUAZANI (C.), « Vers une Afrique de la défense ? », in Jeune

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24. World energy council, « Potentiel de développement intégré de l'énergie au plan régional en Afrique », www.worldenergy.org/weceis/publications/reports/afrique

IV. Sites Consultés

1. Site de l'Agence panafricaine de l'information, www.panapress.com

2. Site de la Radio France internationale, www.rfi.fr

3. Site de la revue L'Observateur Paalga, www.lobservateur.bf

4. Site de l'Union africaine, www.africa-union.org

5. Site de World energy council, www.worldenergy.org

V. Instruments, documents officiels et autres

1. L'Acte constitutif de l'UA

2. La Charte de l'OUA

3. La Charte des Nations unies

4. DE SCHUTTER (O.) et al., Code de droit international des droits de l'homme, Bruxelles, Bruylant, 2ème éd., 2003, 767 p.

5. La Commission de l'Union africaine, Plan stratégique de la Commission de

l'Union africaine, mai 2004, Document OUA, 61 p.

6. Les différentes décisions et déclarations de la Conférence de l'Union et du

Conseil exécutif téléchargeables sur le site www.africa-union.org

7. L'Organisation de la Société Civile Africaine, Deux propositions pour

l'autofinancement et l'intégration politique de l'UA, Yaoundé, mai 2002, 22 p.

8. Rapport du Secrétaire général sur l'état des signatures et ratifications /adhésion des traités de l'OUA, adopté par le Conseil des ministres de l'OUA en sa 73ème

143

session ordinaire du 22 au 26 février 2001 à Tripoli (Libye), Document OUA, CM/ 2196 ( LXXIII)

9. Rapport du Secrétaire général sur le processus de paix entre l'Erythrée et l'Ethiopie, CM/2213 (LXXIV)

10. Rapport financier de l'OUA pour l'exercice financier 1999/2000, Doc. CM/2182

(LXXIII)

11. Rapport du Secrétaire général sur la mise en oeuvre de la décision de Syrte sur l'Union africaine, Doc. OUA CM/2210 (LXXVI),

12. Rapport sur la mise en oeuvre de la restructuration du Secrétariat général de l'OUA, Doc. OUA CM/2190(LXXIII)

13. Etude sur la révision des traités de l'OUA/UA, BC/OLC/23.17/32/Vol.1

144

TABLE DES MATIERES

DEDICACES .................................................................................... i REMERCIEMENTS ........................................................................ ii SIGLES ET ABREVIATIONS ....................................................... iii INTRODUCTION GENERALE..................................................... 1

CHAPITRE Ier : GENERALITES .................................................. 4

Section 1ère : Historique des organisations internationales....................4

§1 Bref aperçu de l'évolution des organisations internationales ................... 4

§2. Existe-t-il un droit des organisations internationales ? ............................ 6

Section 2ème : Le régime juridique des organisations internationales ..8

§1 Notion d'organisation internationale........................................................... 8

A. Définition................................................................................................. 8

1. Les organisations internationales au sens large ............................... 8

2. L'organisation internationale au sens strict ou les organisations

Intergouvernementales ................................................................... 9

B. Classification des organisations internationales ..................................... 10

1. Classification suivant leur composition.................................... 10

2. Classification suivant leur compétence ................................... 10

3. Classification suivant leur autonomie structurelle.................... 11

4. Classification suivant leur autorité ........................................... 11

§2 Création et composition ................................................................................ 12

A. Acte constitutif........................................................................................ 12

1. Fondement .................................................................................. 12

2. Nature constitutionnelle de l'acte constitutif ............................. 13

B. Composition des organisations internationales ....................................... 15

1. La participation des Etats.......................................................... 15

2. La participation des collectivités non étatiques ......................... 19

145

§3 La personnalité juridique des organisations internationales .................... 19

A. Le fondement de la personnalité juridique des

organisations internationales ............................................................... 20

B. La distinction entre la personnalité juridique interne et

la personnalité juridique internationale ................................................ 21

1. La personnalité juridique interne ........................................... 21

2. La personnalité juridique internationale ................................ 22

C. Les caractéristiques de l'organisation internationale

en tant que sujet de droit ...................................................................... 24

Section 3ème : La structure des organisations internationales................................. 26

§1 La classification des organes d'une organisation internationale .............. 26

A. Classification suivant leur origine ....................................................... 26

B. Classification suivant leurs fonctions ................................................. 27

C. Classification suivant leur composition ............................................... 28

1. Les organes composés de représentants gouvernementaux ou organes dits intergouvernementaux ............................................. 29

2. Les organes composés d'agents internationaux ou

organes dits intégrés ............................................................. 30

3. Les organes composés de représentants de forces politiques, économiques et sociales. ...................................................... 31

§2 Fonctionnement des organes des organisations internationales ........... 31

A. Relations entre organes ........................................................................ 32

B. Modes de votation................................................................................ 32

C. Modes d'action..................................................................................... 34

1. La compétence normative ............................................................. 34

2. Compétences de contrôle .............................................................. 35

3. Compétences opérationnelles ....................................................... 36

Section 4ème : La succession des organisations internationale .............................. 37

§1 Les conditions de la succession des organisations internationales............ 38

§2 Les modalités de succession d'organisations internationales .................... 39

A. La substitution ........................................................................................ 39

B. L'intégration ou l'absorption................................................................... 39

146

§3 Effets de la succession de l'organisation internationale............................. 41

A. Le sort des traités conclus sous l'empire de l'organisation

prédécesseur .......................................................................................... 41

B. Le sort des agents de l'organisation prédécesseur.................................. 42

CHAPITRE II : PRESENTATION GENERALE DE L'OUA .... 44

Section 1ere : La structure et le fonctionnement de l'OUA ....................46

§1 La participation des Etats membres au sein de l'OUA............................. 46

A. L'admission à l'OUA .............................................................................. 46

§2 L'idéologie de l'OUA.................................................................................... 48

A. Les objectifs de l'OUA.............................................................................. 48

1. Les objectifs politiques................................................................... 48

2. Les objectifs économiques, socioculturels ..................................... 49

B. Les principes de l'OUA............................................................................. 50

1. Les principes régissant les relations interafricaines ....................... 50

2. Les principes régissant les relations entre l'Afrique

et le monde extérieur...................................................................... 50

§3 Les organes de l'OUA ................................................................................... 51

A. Les organes principaux ........................................................................... 51

1. La Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement .................... 51

2. Le Conseil des ministres................................................................. 53

3. Le Secrétariat général ..................................................................... 55

4. La Commission de médiation, conciliation et d'arbitrage ............. 56

B. Les organes subsidiaires ......................................................................... 58

1. Le Comité de coordination pour la libération de l'Afrique............ 58

2. Les Commissions spécialisées et les Institutions

spécialisées de l'OUA .................................................................... 59

147

Section 2ème : La contribution de l'OUA .................................................62

§1 La contribution au développement du droit international africain ......... 62

A. L'existence du droit international africain.............................................. 62

B. L'apport de l'OUA au droit international africain .................................. 63

1. Les conventions de l'OUA .............................................................. 63

2. Les décisions et résolutions de l'OUA ............................................ 66

§2 La contribution de l'OUA dans le règlement des différends

interafricains ............................................................................................... 68

A. La doctrine de l'OUA ............................................................................. 68

B. La pratique de l'OUA dans le règlement des différends interafricains .. 70

1. Le rôle de la Commission de médiation,

de conciliation et d'arbitrage. ........................................................ 70

2. Les autres procédures de règlement pacifique des différends........ 72

Section 3ème : Les difficultés de l'OUA ....................................................74

§1 Le contexte général de l'existence de l'OUA............................................... 75

A. Les contraintes internes ........................................................................... 75

1. Les faiblesses liées aux moyens humains ........................................ 75

2. Les insuffisances liées aux moyens financiers ................................ 78

B. Les contraintes externes .......................................................................... 82

§2 Les faiblesses du système juridique de l'OUA ............................................ 84

A. Les lacunes contenues dans la Charte ..................................................... 85

1. Les incohérences liées aux objectifs et principes de l'OUA .......... 85

2. Les lacunes structurelles................................................................. 88

B. Les faiblesses des moyens juridiques ...................................................... 91

1. Le pouvoir de décider..................................................................... 92

2. Le pouvoir de sanctionner .............................................................. 93

C. Conclusion ............................................................................................... 94

148

CHAPITRE III : DE LA CHARTE DE L'OUA A L'ACTE CONSTITUTIF DE L'UNION AFRICAINE : LES INNOVATIONS MAJEURES ................... 95

Section 1ère : De l'OUA vers l'UA............................................................96

§1. Les modalités de la transformation de l'OUA en UA ............................... 96

A. Les sommets initiateurs de l'Union africaine ......................................... 96

1. La quatrième session extraordinaire des Chefs d'Etat et de

gouvernement (Syrte, 1999) .................................................................. 96

2. La trente-sixième session ordinaire de la Conférence des Chefs d'Etat

et de gouvernement (Lomé, 2000)......................................................... 97

3. La cinquième session extraordinaire de la Conférence des Chefs d'Etat et

de gouvernement de l'OUA (Syrte, 2001) ............................................. 97

4. La trente-septième session de la Conférence des Chefs d'Etat

et de gouvernement (Lusaka, 2001) ...................................................... 98

5. La première session de l'Union africaine (Durban, 2002) .................... 99

§2. Les effets de la transformation de l'OUA en Union africaine ................. 100

A. Le sort du patrimoine de l'OUA........................................................................101

B. Le sort du personnel de l'OUA .............................................................. 101

C. Le sort des traités de l'OUA ................................................................... 101

D. Le sort des organes de l'OUA ................................................................. 104

Section 2 : Les organes de l'Union africaine ....................................................... 107

§1. Les organes politiques .................................................................................. 107

A. La Conférence de l'Union ...................................................................... 107

1. Les compétences de la Conférence de l'UA....................................... 108

2. Le mode de votation .......................................................................... 108

B. Le Conseil Exécutif ................................................................................. 108

1. Les compétences du Conseil exécutif ............................................... 109

2. Le mode de votation ......................................................................... 109

C. Le Comité des représentants permanents (COREP)................................ 110

1. Les compétences du COREP ............................................................ 110

149

2. Le mode de votation .......................................................................... 110

D. Le Parlement panafricain ....................................................................... 111

1. Les compétences du Parlement panafricain .................................. 111

2. Le mode de votation ...................................................................... 112

E. Le Conseil de Paix et de Sécurité (CPS) ................................................. 112

1. Les compétences du Conseil de Paix et de Sécurité ...................... 113

3. Le mode de votation ....................................................................... 114

§2. L'organe administratif .............................................................................. 114

A. La Commission de l'Union .................................................................... 114

1. La composition ................................................................................ 114

2. Compétence de la Commission........................................................ 115

§3. L'organe juridictionnel ................................................................................ 116

§4. Les organes à caractère social, économique et financier .......................... 117

A. Les Comités techniques spécialisés (CTS).............................................. 117

1. Les compétences des CTS ............................................................... 118

B. Le Conseil économique, social et culturel (ECOSOC) ........................... 118

C. Les Institutions financières ...................................................................... 119

Section 3ème: Les réformes majeures.........................................120

§1. Une idéologie panafricaniste rénovée ........................................................... 120

§2. Une architecture institutionnelle rénovée ..................................................... 122

A. Les organes s'inscrivant dans la continuité............................................. 122

B. Les nouveaux organes ............................................................................. 123

Section 4ème : Les défis de l'Union africaine ......................................................123

§1. L'opérationnalisation et le renforcement de la structure de l'UA...... 125

A. Achever la construction de la structure de l'UA ................................... 126

B. Renforcement des organes clés .............................................................. 127

C. Mobiliser les ressources financières ........................................................ 129

150

§2. Réaliser l'intégration politique et économique du continent.................... 130

A. L'intégration des Communautés Economiques Régionales (CER)

au sein de l'UA........................................................................................ 131

B. Renforcer la participation de la population africaine .............................. 132

CONCLUSION GENERALE.......................................................... 134

BIBLIOGRAPHIE .....................................................................................................138

TABLE DES MATIERES .....................................................................................144




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