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Le sud-ouest français dans l'espace européen : vers une collaboration interrrégionale en matière de relations culturelles extérieures ?

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par Thomas Perrin
Université Paris III - Sorbonne Nouvelle - DESS de Relations interculturelles 2001
  

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Introduction

"C'est Jean Monnet qui là nous ouvre le chemin : "Amener l'esprit des hommes vers le point où leurs intérêts convergent. Ce point existe toujours, il suffit de se fatiguer pour le trouver". Si l'approche géoculturelle a un sens, c'est bien dans la mesure où elle permet de discerner ce point d'horizon convergent." (Fabre, 1993, 153).

L'étude des relations culturelles extérieures du sud-ouest français relève à la fois du champ des affaires culturelles- gestion, administration et politique culturelles, mise en oeuvre de projets - et de celui des relations internationales - notamment à travers la diplomatie culturelle -, et permet d'aborder, eu égard à la situation géopolitique du sud-ouest français en France et en Europe, plusieurs questions relatives à l'évolution contemporaine de ces champs.

En effet, à ces deux champs d'étude répond une dialectique, inhérente au sujet de ce mémoire, entre le "régional" et "l'international", en partie illustrée par les interactions entre décentralisation et mondialisation.

Un des effets marquants de la mondialisation est la construction de grandes régions multinationales et de grands pôles régionaux économiques et culturels - Union européenne, Accord de libre échange nord américain (ALENA), Association des nations de l'Asie du sud-est (ASEAN), Marché commun du cône sud (MERCOSUR), etc.

En même temps que la formation de ces grands ensembles qui tendent, par le biais du libre échange, vers une homogénéisation des diverses cultures qui les composent, le développement des technologies de communication et d'information, notamment dans le domaine de l'audiovisuel satellitaire et dans celui des réseaux électroniques comme Internet, permet à la plupart des cultures d'acquérir rapidement une visibilité à l'échelle mondiale et se présente comme un moyen d'encourager les échanges et le dialogue interculturels.

Mais cette démultiplication des possibilités de rencontres et de partage des cultures est limitée par les possibilités inégales d'accès et de contrôle des réseaux de communication et d'information mondiaux. C'est ainsi que l'exploitation à outrance de ces réseaux peut permettre à certaines cultures d'inonder le monde de

"modèles de conceptions et d'actes qui ont une provenance, une langue, des techniques, et dont le rayonnement correspond à des intérêts qui ne sont pas toujours - loin s'en faut - ceux du continent européen. L'extension de l'uniformisation des attitudes et des références entraîne l'émergence d'une conception planétaire dont les conséquences sont directement sensibles dans les relations culturelles internationales contemporaines" (Raymond, 2000, 9).

Ainsi certaines cultures, par manque de moyens économiques et technologiques, sont menacées de déculturation voire d'absorption - de "digestion", pour reprendre l'expression de Hanna Arendt - par les dérives de la mondialisation.

Parallèlement à ce phénomène de "mise en réseau" globale, la décentralisation est à l'oeuvre dans de nombreux pays, par laquelle les Etats accordent de plus en plus de pouvoir aux gouvernements territoriaux, dans le but de favoriser une démocratie de proximité qui soit en phase avec les aspirations des sociétés civiles.

De cette façon des Régions - au sens restrictif du terme, c'est-à-dire une entité territoriale infra-étatique - sont amenées à conduire une politique culturelle propre à leur territoire et à développer leurs relations internationales, notamment en conduisant des coopérations décentralisées avec leurs homologues à l'étranger, dans divers domaines d'activité, dont l'activité culturelle, en vue de développer des échanges, de promouvoir des savoir-faire et de manifester des solidarités.

A l'opposé de la déculturation, les dérives que la régionalisation culturelle à outrance peut engendrer sont de l'ordre du communautarisme fragmentaire, du repli autarcique, de "l'aveugle exaltation de leur identité culturelle par des communautés et minorités repliées sur leur spécificités culturelles, le plus souvent linguistiques, religieuses ou ethniques" (id., 2000, 10).

Il s'agit alors, pour préserver la richesse culturelle et l'équilibre mondiaux, de trouver un compromis entre la sauvegarde des expressions culturelles particulières, le rassemblement géoculturel lié à une destinée commune et à des échanges établis au cours de l'histoire, et l'accroissement des potentialités d'un dialogue culturel à l'échelle planétaire.

Dans un tel contexte, alors que les Régions sont de plus en plus autonomes tout en étant impliquées dans le "dialogue global", comment, et dans quel but, peuvent-elles développer leurs relations culturelles extérieures ?

Le sud-ouest français, appréhendé comme une entité géopolitique et culturelle rassemblant des régions d'une pays membre de l'Union européenne, se présente comme un terrain d'étude pertinent des questions évoquées ci-dessus, étude dont ce mémoire s'attache à rendre compte, sans prétendre à l'exhaustivité.

La notion de "relations culturelles extérieures", entendue au sens des relations nouées par certains acteurs avec des partenaires étrangers à travers le monde, principalement sous forme d'échanges et de coopérations, renvoie en priorité dans ce mémoire aux domaines artistique et littéraire, aborde certains autres aspects relevant de l'action culturelle extérieure, tels que l'action éducative, linguistique et audiovisuelle, mais ne prend pas en compte les aspects scientifique et technique des relations culturelles internationales.

Le choix du sujet de ce mémoire et les différents thèmes abordés sont directement liés à l'expérience pré-professionnelle que j'ai pu acquérir au cours de mon Diplôme d'études supérieures spécialisées de Relations interculturelles.

Lors d'une période de vacation à la direction régionale des Affaires culturelles en Midi-Pyrénées de mai à juillet 2000, consacrée à la relance des projets de coopération culturelle entre les régions pyrénéennes françaises et la péninsule ibérique, j'ai pu constater l'importance de développer des relations culturelles entre pays voisins, dans la perspective d'une participation commune à l'Union européenne, relations favorisées par une proximité géographique et, dans une certaine mesure, culturelle. D'un point de vue pragmatique, les solidarités interrégionales à l'échelle du sud-ouest français sont apparues tout autant nécessaires à la bonne marche des projets que les solidarités internationales à l'échelle franco-hispano-portugaise. Cette mission m'a également permis de repérer les différents acteurs les plus susceptibles d'oeuvrer au développement des relations culturelles. J'ai pu ainsi me constituer une vue d'ensemble, du fond et de la forme, de l'actualité et du devenir, des relations culturelles extérieures du sud-ouest français en fonction de sa situation au sud-ouest de l'Europe.

A la suite de cela, un stage au Service de la programmation de l'Institut français de Rabat au Maroc, de septembre 2000 à février 2001, s'est révélé être une expérience in situ de l'action culturelle extérieure de la France. En me permettant d'élargir l'optique des relations culturelles à un cadre extra-européen, ce stage a été l'occasion d'illustrer, de manière pratique, la notion de coopération culturelle Nord-Sud en lien avec des politiques de co-développement. Par sa situation géopolitique à la périphérie de l'Europe du sud-ouest, le Maroc est apparu comme le lieu de convergence et d'ouverture nécessaire aux relations culturelles entre le sud-ouest français et la péninsule ibérique, comme un partenaire donnant de la cohérence, par sa proximité, aux relations culturelles extérieures du sud-ouest français, et les enrichissant, par sa différence.

Cette expérience pré-professionnelle, ainsi que l'élaboration de ce mémoire, ont donc été des exercices aux apports significatifs, qui m'ont permis de développer des compétences et d'approfondir des connaissances relatives à mon projet professionnel, et m'ont ainsi confirmé dans le souhait de me professionnaliser dans le secteurs des affaires culturelles internationales.

Du "régional" à "l'international", les relations culturelles extérieures du sud-ouest français concernent trois niveaux, que l'on peut présenter comme suit :

§ Le niveau national

Il renvoie aux compétences et au rôle des Etats. Ceux-ci voient aujourd'hui leur souveraineté remise en cause, concurrencée par les organisations multilatérales et intergouvernementales auxquelles ils prennent part - telles que l'Union européenne pour la France - , par des firmes multinationales - dans le domaine des industries culturelles par exemple - dont les décisions, favorisées par l'existence de réseaux planétaires, ignorent aisément les politiques nationales, enfin par la montée en puissance des pouvoirs régionaux, notamment en Europe.

Malgré cela les relations internationales restent principalement du ressort du pouvoir central, et ceci est particulièrement vrai pour la France, pays de l'interventionnisme étatique par excellence, aussi bien d'ailleurs en matière d'Affaires étrangères, qu'en matière de politique et d'action culturelles, à l'intérieur et à l'extérieur du territoire national.

"L'action culturelle extérieure [de la France] est une partie de la politique étrangère du pays dont la conduite relève des attributions régaliennes de l'Etat" (Raymond, 2000, 7).

§ Le niveau sub-national

On peut considérer qu'il renvoie d'une part aux collectivités décentralisées, en l'occurrence les Régions, de plus en plus aptes et décidées à mener une action dans le domaine culturel et à développer des relations internationales, s'imposant chaque jour davantage comme les maîtres d'oeuvre de leurs relations culturelles extérieures. D'autre part on peut inclure à ce niveau les organisations non-gouvernementales, émanations et porte-parole de la société civile, dont la participation est indispensable au développement des projets culturels. C'est ainsi que le terme de "coopération décentralisée", pris au sens extensif, renvoie, outre la coopération entre collectivités, à la coopération entre "toutes les organisations et personnes morales qui ne relèvent pas directement du gouvernement, qu'elles soient publiques ou privées" (Bekkouche, 2000, 56).

On retrouve donc au niveau sub-national les nouveaux acteurs et protagonistes du développement culturel, collectivités territoriales et société civile, dont l'émergence a été constaté par Maté Kovàcs dans son rapport Les politiques culturelles dans un monde en changement, réalisé dans le cadre de la décennie de la Commission mondiale de la Culture et du Développement organisée par l'UNESCO2(*).

§ Le niveau supra-national

Il renvoie aux instances et politiques de l'Union européenne, qui, avec la prise en compte de la culture comme catégorie d'intervention communautaire, s'engage, par le biais de ses programmes, à encourager la coopération culturelle, et développe en son nom des réalisations culturelles et des cadres juridiques et techniques spécifiques.

On trouve au niveau supra-national d'autres organisations internationales appelées à jouer un rôle important dans les affaires culturelles internationales, telles que l'UNESCO et le Conseil de l'Europe.

Par extension "culturelle", le niveau supra-national renvoie au caractère multiculturel des sociétés contemporaines, en particulier les sociétés occidentales, et notamment la France. Ce visage multiculturel tire son origine d'immigrations de populations extérieures - d'où sa dimension supra-nationale -, le plus souvent des pays du Sud en direction des pays du Nord, et vient renforcer la dimension interculturelle des relations extérieures du sud-ouest français.

L'articulation entre ces trois niveaux est une condition essentielle au développement des relations culturelles extérieures du sud-ouest français, tant sur le plan pratique que théorique.

C'est donc en quelque sorte le "thème conducteur" qui sous-tend les différentes parties de ce mémoire et fédère les différents sous-thèmes qui y sont développés.

Tout d'abord la présentation de la décentralisation et du partage des compétences culturelles en France donne une idée du rôle que, conjointement, l'Etat et la Région sont amenés à jouer. Il apparaît que, d'une part l'Etat conserve une importante marge de manoeuvre en matière de politique culturelle en région, notamment par le biais des directions régionales des Affaires culturelles (DRAC), et ce malgré le rôle croissant joué par les régions, d'autre part que l'exercice des affaires culturelles en région est fortement lié aux problématiques de l'aménagement du territoire.

La notion de collaboration interrégionale, présentée à travers l'action de la délégation à l'Aménagement du territoire et à l'Action régionale (DATAR), amène à considérer la place des régions françaises en Europe et dans le monde ainsi que leurs relations internationales.

Le domaine particulier des relations culturelles extérieures des Régions est présenté ensuite à travers son contexte actuel, d'une part son inscription dans la dialectique suscitée, d'autre part son cadre géopolitique - entre le régional-interrégional, la France, l'Union européenne ; entre le Nord et le Sud - et juridique - la coopération décentralisée. Ensuite sont abordés les principaux enjeux des relations culturelles extérieures pour les régions, d'un point de vue global et symbolique, économique, politique et identitaire.

Compte-tenu de leur situation dans l'espace européen, les régions du sud-ouest français, comprises au sens des trois régions pyrénéennes, ont pour partenaires privilégiés potentiels de leurs relations extérieures la péninsule ibérique et le Maroc, formant ainsi un sous-ensemble régional cohérent au sud-ouest de l'Europe, ouvert sur l'intérieur - l'isthme sud-européen - comme sur l'extérieur - la zone euro-méditerranéenne - de l'Union européenne.

Après avoir passé en revue les différents acteurs susceptibles de mettre en oeuvre et de structurer les relations culturelles au sud-ouest de l'Europe, une analyse de différents facteurs permet de souligner l'importance de développer ces relations et d'aborder plusieurs thèmes clés relatifs aux relations culturelles internationales. Tout d'abord, les liens historiques qui, depuis l'Antiquité jusqu'à l'époque contemporaine, ont mis en contact étroit les populations de cette zone. Ensuite l'importance des échanges est soulignée, depuis les opportunités offertes par la construction européenne et la francophonie, ainsi que leurs limites, jusqu'à la nécessité d'instaurer un dialogue interculturel et de privilégier la dimension sociale des relations culturelles, à l'extérieur comme à l'intérieur des sociétés concernées. A la suite de cela, une analyse géostratégique fait apparaître que le sud-ouest français a tout intérêt à se positionner dans la zone méditerranéenne, par le biais de ses relations culturelles, dans le but de participer activement au rapprochement entre l'Espagne et le Maroc. Dans le même ordre d'idée le renforcement de sa cohésion socio-culturelle peut permettre au sud-ouest de l'Europe de se démarquer par rapport au centre économique et financier de l'Europe - zone désignée sous le terme de "banane bleue" - par la mise en avant de sa richesse culturelle, source de créativité, et par là-même d'accroître sa compétitivité sur la scène européenne et par extension, mondiale. Cette conjecture suppose que le capital culturel soit considérée, au même titre que le capital économique, comme source de développement. A ce propos, la Déclaration de Barcelone, acte fondateur du partenariat euro-méditerranéen, fait de son volet culturel, social et humain, un des axes de développement du partenariat. Ainsi les relations culturelles avec le Maroc entrent dans le cadre de ce partenariat, et à ce titre amènent à considérer les interactions entre relations culturelles et co-développement, ainsi que les questions relevant des relations culturelles Nord-Sud, afin d'en définir la meilleure mise en oeuvre possible, malgré les critiques dont le projet euro-méditerranéen peut faire l'objet.

Enfin, les relations culturelles au sud-ouest de l'Europe sont mises en perspective. Après une présentation des opportunités de mise en oeuvre offertes par la collaboration interrégionale, des exemples de projets en cours ou en dessein, selon les différents acteurs, sont passés en revue. Une évaluation partielle de ces projets souligne la nécessité de structurer le développement des relations culturelles par des partenariats à la fois inter-institutionnels et entre les institutions et la société civile, à l'échelle interrégionale et internationale. Malgré les obstacles à la constitution de ces partenariats, il est possible de réfléchir à certains types de projets à promouvoir afin d'axer le développement des relations culturelles sur des thèmes particuliers, qui en garantissent le bien-fondé et la pérennité.

Ainsi, l'étude des relations culturelles extérieures du sud-ouest français permet de repenser d'une part la place du sud-ouest français dans l'espace européen, méditerranéen et par extension, mondial, selon les évolutions géostratégiques actuelles, d'autre part le rôle de la culture dans l'épanouissement des relations internationales et leur inscription dans le long terme.

"Dorénavant, de nouvelles conditions précisent le champ d'exercice des relations culturelles internationales, en même temps qu'elles l'ouvrent à des modalités inédites : la réduction des prérogatives ou du monopole des décisions et des financements des Etats, l'ambition des collectivités locales de se doter d'une politique internationale, celle des "régions culturelles" dessinées par l'histoire de valoriser leur patrimoine commun[...]" (Raymond, 2000, 25).

Qu'en est-il au sud-ouest de l'Europe ?

* 2 Cf. pp.6-8 du rapport de Maté Kovàcs Les politiques culturelles dans un monde en changement, troisième réunion (San José, Cost Rica, 22-26 février 1994) de la Commission mondiale de la Culture et du développement, Paris, UNESCO.

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