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Tourisme et développement durable: quelles conjugaisons? cas du Maroc

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par Seloua GOURIJA
Université du Littoral Côte d'Opale - Docteur Es Sciences Economiques 2007
  

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Tourisme intra-régional dans le monde

Arrivées touristiques internationales (millions)

Tourisme Intra-Régional

Tourisme Lointain

1995

464,1

101,3

2010

790,9

215,5

2020

1183,3

377,9

Source : O.M.T., Tendances des Marchés Touristiques, 2001.

Au total, le tourisme est devenu un phénomène économique doté de caractéristiques propres. Il occupe une place importante au sein de l'économie internationale et des économies nationales, notamment celle des pays en développement. Un phénomène économique rentable qui nécessite d'être encouragé, le tourisme doit également être maîtrisé.

Le tourisme n'est pas sociologiquement et culturellement neutre. Il implique une rencontre entre des peuples ou des sociétés différents qui peut constituer un facteur de socialisation et d'échanges mais également de troubles et de conflits. Ce que nous allons analyser dans le deuxième paragraphe.

II.1.2. Le tourisme et le développement social

Le tourisme peut engendrer de profondes mutations sociales et culturelles dans les pays d'accueil. Le développement économique constitue par lui-même un important facteur de changement de la société, mais de plus, le rôle du tourisme à cet égard a tout particulièrement retenu l'attention en raison des échanges économiques, sociaux et culturels qui ont lieu directement entre les touristes et les collectivités d'accueil. Le tourisme peut favoriser le développement social de par sa contribution à la création d'emplois, à la redistribution des revenus et à la lutte contre la pauvreté.

Par ailleurs, les progrès de l'infrastructure matérielle et sociale qui accompagnent habituellement le développement du tourisme ont souvent des retombées dans les autres domaines de l'économie et font « tâche d'huile », s'étendent par exemple à la santé et à la protection sociale.

Cependant, le développement du tourisme peut avoir des effets sociaux et culturels nocifs lorsque les progrès économiques ou les exemples incitent les habitants à imiter les visiteurs étrangers dans leurs habitudes alimentaires, vestimentaires et autres.

Ainsi, le travail posté peut désorganiser la vie familiale et religieuse. D'autres coûts sociaux, comme ceux qui découlent de la toxicomanie, du travail des enfants et de la prostitution29(*), touchent la population et peuvent aussi ternir l'image du lieu en tant que destination touristique. Il mérite cependant de relever que bon nombre de méfaits sociaux souvent imputés au tourisme tiennent peut-être tout autant à la modernisation, et en particulier au perfectionnement et à la diffusion des moyens d'informations et de communication.

Les incidences des activités touristiques sont ainsi souvent les plus visibles au niveau local : les collectivités d'accueil sont confrontées à la surpopulation, aux pressions sur les ressources et à la remise en cause de la culture établie : bouleversement des pratiques religieuses, des modes d'habillement, des normes de comportement et des traditions sous l'effet des échanges avec les autres cultures.

G. CAZES 30(*) précise les processus par lesquels le développement touristique influait sur l'identité des sociétés :

- Un processus d'acculturation qui peut conduire à des comportements d'adaptation, d'imitation, mais aussi, dans des formes plus poussées, à des situations d'agression, voire d'annexion, culturelle ;

- Un processus de perversion des moeurs et des modes de vie, mais aussi de la production qui s'adaptent à la demande des touristes ;

- Des manifestations de subversion : émergence de valeurs différentes, modifications des équilibres sociaux et politiques, rattachement à des réseaux culturels extérieurs.

Toutefois une activité touristique trop forte, comme toute concentration de population sur un espace restreint, a des conséquences souvent très lourdes sur l'environnement. Ainsi, par exemple, l'usage insouciant des douches, bains, piscines et l'arrosage des pelouses des hôtels ponctionnent souvent lourdement les réserves d'eau locales, alors que les habitants en manquent pour leur usage personnel ou pour l'irrigation. Une étude réalisée par le Fonds Mondial pour la Nature (WWF) en Espagne, où le problème du partage de l'eau se pose avec acuité, révèle que la consommation d'eau d'un touriste étranger s'élève à 880 litres par jour, contre 250 litres en moyenne pour les Espagnols31(*). On imagine aisément ce que peut être l'écart dans des pays comme la Jordanie ou Madagascar.

Par ailleurs, l'implantation irréfléchie d'équipements touristiques trop lourds modifie également l'équilibre du milieu naturel. L'érosion du littoral pose désormais problème dans de nombreux pays. Selon le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE), les trois quarts des dunes de sable du bassin méditerranéen ont disparu en raison de l'urbanisation touristique. Le tourisme provoque aussi des comportements individuels destructeurs : des milliers de touristes qui emportent en souvenir une plante ou un fragment de corail finissent par détériorer massivement les écosystèmes.

Les incidences sociales du tourisme sont variables selon le type de tourisme, son rythme de croissance, selon le site32(*) visité. Car, en déparquant sur un site, les touristes obligent les habitants à se remettre en question, puisqu'ils doivent s'adapter aux attentes et rester innovants.

Ainsi, sur un plan autrement qu'économique, les touristes apportent quelque chose aux habitants : « du sang neuf », des idées nouvelles et innovantes et la culture des habitants mise à la portée des touristes. Donc il y a un mélange de cultures qui amène à une synergie culturelle. La cohabitation de différentes cultures en crée une autre. C'est à dire qu'il y a une relation à double sens entre les habitants et les touristes.

Comme nous avons pu le constater, le tourisme ne prend aucune considération de l'espace local33(*) : la population, les traditions, les croyances, etc. Des valeurs négatives lui sont de plus en plus associées telles que l'inactivité culturelle et les contacts superficiels avec les milieux d'accueil qui conduit à la perte des cultures et d'identité.

L'essor des activités touristiques peut sans le vouloir inciter à la surcommercialisation, laquelle peut entraîner la dévalorisation et dans certains cas, la disparition pure et simple des coutumes et traditions locales. Par exemple, lorsqu'on cherche à adapter les oeuvres d'art et d'artisanat et les pratiques culturelles aux goûts des étrangers, le résultat peut en être des produits de qualité médiocre, des pratiques commerciales répréhensibles, la production de fausses antiquités et la dénaturation des danses, des musiques et des fêtes traditionnelles. Le site est en situation de folklore dirait la théorie des sites.

Les dégâts causés au patrimoine culturel peuvent être encore plus graves dans le cas des sites et édifices historiques non protégés et lorsque les bâtiments traditionnels sont remplacés ou disparaissent quasiment.

Néanmoins, le développement du tourisme peut aider les pays d'accueil à mettre en valeur leur patrimoine culturel en incitant financièrement à investir dans les coutumes et cultures locales, à les promouvoir et à les préserver. A condition d'être bien gérées et encadrées, les cultures locales peuvent connaître un regain de vitalité grâce à la renaissance des métiers traditionnels et des fêtes locales. On peut ainsi donner un élan aux activités artisanales et à la création d'emplois. L'industrie touristique se caractérise par le fait qu'elle emploie une forte proportion de femmes et de jeunes.

Ces derniers sont dans des cas fortement défavorisés, victimes de discrimination ou exploités sur le lieu de travail. Le tourisme sexuel34(*), la prostitution (qui aggrave les risques de contamination par le sida) et le travail des enfants (notamment l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales) sont tout particulièrement préoccupants à cet égard.

La prostitution enfantine et des adultes (fléau du tourisme de masse) : les touristes occidentaux et spécialement d'Europe du Nord, sont à l'origine de ce fléau qui ravage des pays comme la Thaïlande, le Vietnam, le Brésil35(*)... Les enfants sont victimes d'enlèvements ou sont achetés à leurs familles, pour être vendus aux touristes occidentaux. C'est l'aspect le plus scandaleux de l'impact du tourisme sur les pays du Sud et quoique le combat contre l'exploitation sexuelle des enfants ait été très médiatisé, cela reste une réalité pour des centaines de milliers d'enfants à travers le monde. Ce phénomène touche aussi les femmes et les hommes qui se prostituent dans des conditions très dures auprès des touristes occidentaux dans l'espoir d'améliorer leur revenu ou simplement de survivre.

En effet, les effets sociaux et culturels du tourisme sont particulièrement sensibles dans les pays en développement. F. VELLAS affirme : «  L'arrivée de touristes étrangers venant des pays développés constituent souvent un choc entre deux types de culture et de modes de vie, avec un risque important de dégradation culturelle pour le pays d'accueil, puis une réaction de rejet. Ce choc est aggravé lorsque le flux touristique a beaucoup d'intensité dans le temps (saison touristique) et dans l'espace (zones ou régions à forte concentration touristique) mais il peut aussi se manifester de façon plus diffuse par des moyens très divers ».36(*)

De même, « dans certaines régions, notamment de l'Europe méditerranéenne, la très forte concentration touristique, qui est le résultat d'un développement souvent anarchique, contribue à détruire l'équilibre économique et social et le patrimoine culturel des populations locales »37(*).

Donc, le tourisme se traduit dans les pays en développement par un choc culturel et sociologique. Faisant irruption brutalement, grâce à l'avion, le tourisme a souvent un effet déstructurant sur les sociétés d'accueil. Rares sont les cas de véritable syncrétisme : on assiste plutôt à la juxtaposition de deux sociétés, avec des contacts entre touristes et autochtones limités et superficiels.

Le relâchement des valeurs sociales, religieuses et morales, les phénomènes d'acculturation, la dénaturation du folklore sont des réalités, le comble étant atteint par les cérémonies initiatiques et rituelles sur commande, aux Antilles ou en Afrique. Les touristes n'évitant pas toujours les provocations vestimentaires, linguistiques, alimentaires, la rencontre peut même tourner à l'affrontement socioculturel. La dégradation et le pillage de certains sites archéologiques ont aussi accompagné le début de l'ouverture de ces contrées au tourisme international.

Le bouleversement des traditions et des moeurs n'a pourtant pas que des effets négatifs. L'ouverture au monde contribue à faire évoluer des sociétés bloquées, accélère la promotion des femmes, fait éclater le carcan, notamment à la compagne, de sociétés rigides, lève des obstacles au développement économiques et au progrès social, oblige les pouvoirs locaux à réaliser un minimum d'infrastructures.

Le tourisme permet aussi le maintien de certaines activités traditionnelles, comme la fabrication des tapis au Maghreb, la sculpture sur bois dans certains villages africains. Il contribue enfin à l'entretien de certains sites archéologiques, à la découverte, voire à la renaissance de l'héritage culturel.

Dans tous les cas, le dualisme social est mis en évidence. Le luxe côtoie la misère, en raison de la création d'enclaves occidentales. Les complexes touristiques occupent les meilleurs sites et disposent de bons équipements, alors que les quartiers populaires et les bidonvilles se regroupent sur les secteurs les moins accessibles ou les moins prestigieux, parfois près des zones industrielles. C'est le cas à Rio de Janeiro, à Acapulco et Cancan. Les effets pervers abondent : prostitution, y compris des enfants comme aux philippines et en Thaïlande, délinquance, drogue.

Conclusion

Le développement du tourisme engendre des effets multiformes touchant les sociétés et les systèmes économiques. Ils ne sont pas toujours quantifiables, apparaissent contradictoires, de sorte qu'un bilan global est difficile à établir. Les pays d'accueil n'en profitent pas nécessairement, et peuvent même voir leur dépendance accrue. Le tourisme crée directement des emplois, mais une part élevée relève du travail saisonnier, voire clandestin. Indirectement, il contribue au fonctionnement de nombreuses autres branches économiques.

Les populations d'accueil profitent de débouchés accrus ou de l'apparition de métiers nouveaux. Mais, le tourisme peut tout aussi bien accélérer la disparition des activités avec lesquelles il entre en concurrence pour l'espace ou la main-d'oeuvre. C'est l'emploi qui explique que les espaces touristiques sont souvent dynamiques sur le plan démographique.

Les sociétés d'accueil ne sortent jamais indemnes de la rencontre touristique suivant les lieux. Mais, aussi, selon, ses formes, son volume, le tourisme peut être tantôt un agent de subversion des sociétés traditionnelles, tantôt l'occasion d'une redécouverte du patrimoine et des spécificités culturelles.

Dès lors, il est nécessaire de contrôler les effets du tourisme afin d'accroître ses avantages, à prévenir, à réduire et à canaliser ses inconvénients.

II.2. Le tourisme et l'environnement

Cette section se propose d'examiner la relation entre le tourisme et l'environnement. Comme, nous l'avons déjà analysé dans le premier paragraphe de cette section, les impacts du développement du tourisme sur le développement socio-économique ainsi que le développement régional sont contradictoires.

Ces impacts, qu'ils soient positifs ou négatifs s'effectuent au détriment de l'environnement. La contradiction entre l'économie du tourisme et l'écologie des lieux touristiques, constitue une contrainte pour le développement du tourisme. Surtout une difficulté pour trouver l'équilibre entre les trois dimensions : économie, société et environnement. C'est l'objectif essentiel de tout développement durable.

En effet, la relation tourisme/environnement est une relation à double sens. C'est-à-dire qu'il y a une action du tourisme sur l'environnement, mais que le milieu a aussi une réaction sur le touriste. Ceux sont donc ces interactions du tourisme et de l'environnement dont il sera question dans ce paragraphe.

II.2.1. L'environnement : un moteur touristique

De la même façon que toute industrie a besoin de matière première, ou qu'elle se base sur des ressources naturelles, on peut dire que la matière touristique réside dans l'ensemble des lieux et événements qui sont objet de tourisme.

Cette matière touristique se répartit en deux matières38(*) : l'une naturelle et l'autre artificielle (hébergements, restaurants, fêtes, festival, culture..). De ce point de vue, nous nous intéressons à la matière touristique naturelle. Cette dernière consiste en éléments résultant de processus naturels plus ou moins modifiés par l'action humaine dans leur émergence, leur déroulement, leur agencement, leur incorporation dans le système touristique. On peut les considérer comme des facteurs d'attraction naturelle. Ces éléments constituant le milieu naturel et les paysages naturels sont parmi les moteurs les plus puissants du tourisme.

Les paysages considérés comme les plus attractifs sont à la fois des paysages qui évoquent une certaine violence des éléments (les aiguilles découpées ou les glaciers crevassés en montagne, les cops, les rades et les falaises sur le littoral) et ceux qui expriment, au contraire, la sérénité (les baies ou les plages de grande étendue, les vastes champs de neige, les lacs, les collines de Toscane, etc.). Ces sites offrent les paysages les plus appréciés et la subjectivité des jugements y tient une grande place. Il y a aussi ceux qui favorisent la pratique des activités associées (la voile, la baignade, le ski, l'alpinisme, la randonnée). Ils sont les plus attractifs.

Les littoraux constituent la première destination touristique, au point d'être associés spontanément à l'idée de vacances. Le choix de ces paysages en général est fait sur des critères climatiques, en fonction du type de séjour désiré. Les rivages océaniques les plus ensoleillés, les côtes méditerranéennes ou tropicales sont retenus avant tout pour leurs aptitudes balnéaires, car l'héliotropisme est devenu le facteur primordial.

Les montagnes constituent aussi un élément clé du tourisme. Le choix d'une destination montagnarde dépend, beaucoup plus que dans le cas des littoraux, des caractéristiques topographiques propres du massif. Toutefois, le milieu climatique intervient lui-même tributaire de la latitude et de la position de la montagne dans l'espace continental. On trouve aussi, les moyennes montagnes des latitudes tempérées, aux dénivellations trop faibles, sont plus favorables au tourisme vert d'été, au thermalisme et au ski de fond. Particulièrement nombreux sont en Europe les massifs, généralement d'origine hercynienne, situés aux portes de grandes villes et qui accueillent les citadins en week-end ou en vacances : massif gallois et Pennines, Ardennes, massifs allemands et bohémiens, Vosges et Jura.

Aussi, les hautes montagnes tempérées offrent une gamme plus étendue de possibilités. Celles qui sont situées dans des zones urbanisées et à haut niveau de vie, comme les Alpes, les Pyrénées, les Rocheuses... sont les plus favorisées : accès aisé grâce aux grandes vallées élargies au quaternaire par les glaciers, possibilité de pratiquer la randonnée et l'alpinisme en été, les diverses formes de ski en hiver. Et, enfin, les hautes montagnes tropicales, comme l'Himalaya et les Andes, ne sont l'objet que d'une fréquentation ponctuelle et limitée : stations climatiques d'altitude, comme Simla ou Srinagar en Inde, stations de ski, comme Portillo au Chili.

Les lacs sont souvent des secteurs très touristiques. Leur origine et leur forme sont variées : petits lacs circulaires logés dans des cratères volcaniques, lacs glaciaires allongés ou digités, comme ceux de la périphérie alpine ou ceux, innombrables, qui parsèment la surface des socles fennoscandien et nord-américain... Les lacs situés à proximité des grands centres, comme les lacs bavarois, les lacs Italo-suisses ou le lac Balaton, sont fréquentés une grande partie de l'année et apparaissent de plus en plus comme des espaces périurbains convoités. En arrière des cordons littoraux, les lacs allongés et les étangs, comme ceux du Languedoc, d'Aquitaine ou de Floride, sont convertis massivement en espaces de loisirs et de résidence, parce qu'ils offrent des conditions nautiques plus sûres que le domaine maritime.

Enfin, les îles constituent un monde original et une destination privilégiée. Cela tient autant aux conditions climatiques particulières des îles : l'atténuation des amplitudes thermiques et, dans la zone tropicale, l'opposition entre la côte « au vent » très humide et la côte «sous le vent » plus abritée-qu'aux caractéristiques topographiques proprement insulaires, notamment la proximité du littoral et de l'intérieur.

Le relief intervient donc doublement dans la sélection des sites aménageables sur le plan touristique parce qu'il a contribué à forger les paysages, que l'homme a ensuite retouchés. Parce qu'il commande les possibilités de pratique de certaines activités inhérentes aux séjours touristiques.

Le relief intervient encore d'une troisième façon : l'accès à ces sites n'est pas toujours aisé et peut demander des aménagements particuliers. C'est parfois le cas sur le littoral. Cela l'est aussi pour certains sites de l'intérieur, par exemple les gorges ou canyons ; les routes peuvent les longer sur les plateaux supérieurs ou, au prix de travaux souvent complexes, de risques parfois et d'atteintes au paysage toujours, les parcourir par le fond ou en corniche. C'est très souvent le cas en montagne39(*).

Les sommets les plus élevés et les plus élancés, les glaciers et en particulier leurs secteurs les plus crevassés, les parois rocheuses les plus verticales sont rarement accessibles directement par un moyen de transport classique. On doit utiliser d'autres moyen (hélicoptère, à pied, ou observer de loin). Le relief peut donc être à la fois un attrait et un obstacle à vaincre.

Le climat40(*) peut, de même, constituer un facteur favorable41(*), mais imposer des contraintes. La recherche de climats agréables a été en partie à l'origine du développement du tourisme de villégiature. Les habitants du Nord de l'Europe recherchaient notamment des hivers doux sur le littoral méditerranéen. A l'inverse, la fraîcheur est recherchée en saison chaude par les habitants de pays tropicaux, voire de pays tempérés à climat continental où l'été peut être très chaud.

L'activité touristique paraît à présent largement déterminée par les conditions climatiques. Il n'en a cependant pas toujours été ainsi, le choix des destinations et des saisons ayant évolué au cours des siècles. Si les bourgeois français du XIXe siècle aiment, comme les Romains aisés de l'antiquité, passer l'hiver sur le littoral et fuir les chaleurs estivales pour des stations de moyenne altitude, il faut rappeler que, jusqu'au lendemain de la Première Guerre mondiale, les rivages méditerranéens furent fréquentés exclusivement en hiver, aucune personne sensée ne s'avisant de s'exposer sur une plage en plein été pour des raisons sanitaires. Les impératifs climatiques sont aujourd'hui draconiens pour nombre d'activités de plein air. La courbe de fréquentation des plages suit fidèlement celle du temps et l'absence de neige est encore fatale aux stations trop basses, malgré l'arrivée des camons à neige.

Dans ce cadre, on distingue, les climats tempérés océaniques et continentaux. Ils sont caractérisés avant tout par de forts contrastes saisonniers. Rien d'étonnant si l'été est la grande saison touristique dans cette zone qui reste avec ses marges méditerranéennes, la plus fréquentée du monde. Aussi, le climat méditerranéen, les régions caractérisées par ce climat sont les plus fréquentées par les touristes. Et enfin la zone chaude constitue une large bande axée sur l'équateur et débordant au-delà des tropiques jusqu'au contact des domaines tempérés. Elle comprend deux grands types de milieux offrant au tourisme des possibilités différentes. Les tropicaux pluvieux sont les régions des basses latitudes, marquées et les tropiques secs, aux latitudes plus hautes, sont caractérisés par de moindres précipitations et de plus forts contrastes saisonniers.

L'eau, élément essentiel dans les pratiques touristiques, intervient différemment selon son état.

- Soit il est liquide, on trouve dans ce cadre, la mer qui est le plus attractif des plans d'eau. Elle permet bain, plongée, plaisance, pêche, croisières... Les cours d'eau et plans d'eau favorisent le tourisme fluvial. Tandis que la pluie est souvent considérée comme l'ennemie du tourisme.

- Soit il est solide : la neige est un élément fondamental de la pratique des sports d'hiver. Aussi la glace a moins d'importance dans la vie touristique, mais on ne peut passer sous silence le ski de glacier.

La végétation joue un rôle analogue, tant par sa place dans les paysages, quel que soit le milieu, que par les possibilités qu'elle offre (promenade en forêt par exemple). Elle contribue en outre largement à l'équilibre et à l'harmonie des paysages. Cependant, la végétation est souvent l'occasion d'activités de découverte, du sentier botanique au circuit, voire au séjour, mis en place sous la canopée. Quant à la végétation cultivée, elle est loin d'être sans intérêt, qu'elle soit à but productif (cultures, prairies, haies, forêts.), ou à but décoratif (parcs, jardins). Aussi la faune qui donne vie aux paysages, anime le décor dans lequel se meut le touriste mais procure aussi des émotions et est parfois objet de tourisme.

En dehors de ces facteurs attractifs, les autres domaines touristiques sont moins fréquentés : la plaine (le touriste est toujours attiré par le milieu naturel des plaines qui entoure les villes), les stations thermales (à côté de l'eau de mer et de l'eau douce, il en existe une autre variété, celle qui sort de sources). Elle est chargée d'éléments chimiques, de la façon la plus naturelle. C'est aussi un des plus anciens buts de tourisme et encore aujourd'hui. Cette eau attire, au moins dans certains pays, un bon nombre de voyageurs qui trouvent dans son utilisation une occasion de vacances. On l'appelle « tourisme de santé »42(*) . Les villes et lieux historiques sont aussi des pôles d'attraction pour les touristes de par leur histoire et leur environnement naturel et architectural. Elles exercent un attrait important sur la démographie du tourisme. En somme, on voit clairement que l'environnement est un des grands moteurs touristiques. Mais, les endroits fréquentés par les touristes autres que la montagne et la mer reçoivent du tourisme une marque qui tend aujourd'hui à être très nette dans le paysage qui en ont fait un pôle d'attraction. Ce qui veut dire, qu'il n'y a donc rien d'étonnant à ce que le poids du tourisme sur l'environnement soit si grand.

II.2.2. Le poids du tourisme sur l'espace naturel

« Le tourisme épuise notre planète... En l'an 2000, il se peut qu'il y ait 650 millions de personnes voyageant à l'étranger, et cinq fois plus de gens dans leur propre pays. La consommation d'énergie que cela implique est colossale... Le tourisme de masse, ce sont des plages et des pistes de ski surpeuplées, des littoraux et des montagnes bétonnés, des embouteillages d'automobiles et des files d'attente, des charters, des autocars et des multitudes de voitures individuelles, des shorts à fleurs, des peaux brûlées ou bronzées, et aussi des tiroirs- caisses qui résonnent. Le tourisme de masse, c'est ça ! un phénomène n'inspire que du mépris ! il est vrai qu'en masse, le touriste con-somme» 43(*).

La massification implique la passivité. Si le bourgeois du XIXe siècle apparaissait comme producteur de ces pratiques, le touriste populaire ne semble guère avoir le choix : ou il est pris en charge par le système associatif ou il est manipulé par l'industrie qui, non contente de produire le tourisme, produit également la demande pour celui-ci au travers de la publicité. Le touriste globalisé ne pense pas, l'industrie du tourisme s'en charge. Parce que populaire, parce qu'en masse, ce touriste perdrait donc toute autonomie, sa consommation ne serait que passivité. Le touriste ne produit rien.

La masse a un pouvoir destructeur sur les lieux, cela fait partie du sens commun. Le tourisme de masse est ainsi accusé d'être un puissant facteur de destruction. Partout où il s'installe massivement, le tourisme ne fait qu'anéantir ce qui l'y avait attiré. La critique reste d'actualité comme en témoigne le titre de l'ouvrage de G. CAZES 44(*) « Les nouvelles colonies de vacances ? Le tourisme international à la conquête du tiers monde» publié en 1989.

On accuse le tourisme d'importer des modèles de consommation occidentaux ayant un fort pouvoir attractif, et allant aussi de pair avec certaines perversions de l'économie comme le commerce de la drogue et la prostitution. La confrontation avec les sociétés traditionnelles n'est pas à l'avantage de ces dernières et les déstructure.

Les excès du tourisme de masse tuent l'attractivité des lieux touristiques. Dans la littérature scientifique, la destruction comme résultat du tourisme de masse est un point commun aux modèles décrivant le développement touristique des lieux. Ces modèles diffèrent par leur échelle. Certains s'attachent à l'évolution de grands bassins touristiques (S.-C. PLOG, 1972, E. GOMSEN, 1981) ou privilégient l'espace touristique régional (J.-M. MIOSSEC, 1976) ou encore la station (R.-W. BUTLER, 1980)45(*). Leur « entrée» est également originale : S.-C. PLOG classifie les types de populations parcourant l'espace touristique, E. GOMSEN définit des périphéries du tourisme, R.-W. BUTLER décrit la croissance de la population touristique. Enfin, ils différent aussi par leurs modes de représentations : courbe, graphique, modèle cartographique, etc. Mais tous se rejoignent sur le fond : l'idée d'un déclin inéluctable des lieux touristiques sous la pression de la masse. (voir tableau 1 ci-dessous )46(*)

La logique de ces modèles est géographique et part d'un constat simple : les flux touristiques sont centrifuges. A moins de visiter une grande métropole qui possède aussi une fonction touristique, le tourisme est considéré comme un phénomène de migration depuis les grands centres industriels et urbains vers des espaces en marge où la production industrielle et donc les grandes concentrations permanentes de populations sont absentes.

Afin de mieux comprendre le fonctionnement de l'espace touristique, nous allons nous limiter à deux modèles qui serviront à d'illustration. Il s'agit du modèle de J.-M. MIOSSEC ainsi que celui de R.-W. BUTLER.

Le modèle de J.-M. MIOSSEC (1976)

Le schéma historique est simple. Tout d'abord, le lieu est découvert, car faisant partie d'une marge, il n'est pas vraiment connu. Appartenant à une périphérie, son accès n'est pas aisé et son économie connaît des formes de sous développement. C'est la période de «pré- tourisme» pendant laquelle arrivent les premiers touristes.

Cette première phase touristique est décrite comme un phénomène pionnier. Une station voit le jour mais son activité reste marginale tant du point de vue des touristes que de la population locale. Puis s'en suit une période de complexification, pendant laquelle le lieu s'intègre au système. Le développement correspond à une augmentation remarquable du volume des touristes, la création d'emplois plus nombreux offerts à des classes sociales moins élevées de la population locale. Lorsque tout un espace régional est concerné, on assiste à une multiplication des stations, puis à leur spécialisation et hiérarchisation. Cet avènement du tourisme de masse serait donc concomitant d'une certaine saturation du touristique, voire de son déclin. La masse des touristes a modifié considérablement le lieu, jusqu'à créer des désagréments. L'attractivité du lieu décline, le nombre de touristes aussi comme si l'intégration induisait une banalisation du lieu, entraînant à terme une désaffection de la masse : (voir la courbe1)

La Floride, la côte d'Azur ou encore la Costa Brava connaîtraient cette évolution que J.-M. MIOSSEC considère comme « quelque peu catastrophique». Sa dynamique est sa reproduction à l'identique dans des lieux de plus en plus éloignés des centres émetteurs : l'intégration de la périphérie au système touristique implique son développement, mais ce dernier est incompatible avec les exigences des découvreurs qui le quittent pour d'autres lieux où le même phénomène se reproduit. C'est ainsi que le phénomène se diffuserait dans l'espace. On reconnaît là le fonctionnement du modèle colonial : après épuisement, on va exploiter un gisement plus éloigné.

L e modèle du cycle de R.-W. BUTLER (1980)

La représentation en forme de cycle fait une irruption précoce dans la littérature consacrée au tourisme. Le terme est utilisé dès 1963 par W. CHRISTALLER,  « au même moment, en d'autres lieux, le même cycle se reproduit, de plus en plus de lieux deviennent à la mode, changent de nature, tournent au lieu fréquenté par Mr tout- le- monde»47(*).

Cette idée est précisée dans un article de 1978 sur Atlantic City. Mais c'est en 1980, qu'elle est présentée sous la forme d'un modèle d'évolution générique par R.-W. BUTLER qui applique alors au lieu touristique le concept économique et commercial de cycle de vie du produit. R.-W. BUTLER propose la présentation graphique d'une courbe d'évolution du nombre de touristes selon le temps (voir courbe2).

Les phases se définissent par rapport au niveau de fréquentation touristique, évoqué au travers du poids de la fréquentation sur la population locale. Ainsi le ratio nombre de touristes/ population résidente devient un des critères de définition : la phase de développement consiste en ce que le nombre de touristes soit égal, voire dépasse le nombre de la population permanente. Mais c'est surtout le taux de croissance de cette fréquentation qui est pris en compte. Pour les phases dites d'implication, de développement et de consolidation, le volume absolu de fréquentation est toujours en progression, mais pas le taux de croissance : dans les deux premières périodes, le taux de croissance est en progression rapide, voire très rapide, alors que la phase de consolidation correspond à son tassement.

En effet, si le nombre total de touristes continue d'augmenter, le taux de croissance s'affaiblit considérablement. Le phénomène est entériné par la phase suivante, la phase de stagnation où le taux de croissance devient nul. Il s'agit d'un modèle générique, aussi l'auteur ne précise- t- il aucun niveau de fréquentation.

Toutefois la définition qu'il fait des différentes phases ainsi que les exemples qu'il donne, permettent d'en présager. C'est donc le tourisme de masse que le modèle fait coïncider avec le déclin.

Toutefois, ce modèle ne se contente pas uniquement de décrire une courbe de croissance. Ce dernier propose aussi une interprétation de la forme de la courbe et en particulier le phénomène de stagnation voire de déclin de la population touristique. Pour ce faire, il utilise la notion de population limite ou encore capacité de charge, traduction littérale de l'anglais carrying capacity48(*). Si le lieu connaît des problèmes, c'est qu'il y a trop de touristes, c'est qu'il existe une limite au delà de laquelle les problèmes apparaissent.

C'est donc le dépassement de cette limite qui induit le déclin de la destination accusé par une baisse de fréquentation, ou du moins une crise grave : « Enfin le taux de croissance du nombre de visiteurs déclinera lorsque les niveaux de la capacité de charge seront atteints».

L'espoir est donc permis. On peut éviter l'inexorable issue de la destruction. Il suffit de ne pas dépasser la limite. Il suffit de ne pas avoir trop de touristes.

Comme nous avons pu le constater, la croissance soutenue que devrait connaître l'industrie touristique posera de sérieuses difficultés dans le domaine de la protection de l'environnement. L'industrie touristique a tendance à avoir des effets nocifs sur l'environnement du fait des ressources qu'elle consomme, de la pollution et des déchets résultant du développement des infrastructures et installations touristiques, et de l'intensification des transports et des activités touristiques.

Les effets les plus graves situés au niveau de transport touristique49(*), qui intervient soit pendant le déplacement lui-même des engins de transport, soit aux points de départ et d'arrivée des passagers. Dans l'un et l'autre cas, l'affluence supplémentaire est source de nouvelles nuisances. Dans ce cadre, on classe quatre types de transports à savoir : transports aériens, ferroviaires, maritimes et routiers.

Au niveau du transport aérien, les installations proprement aéronautiques prennent aussi beaucoup de place, et il faut y ajouter celles qui sont destinées à l'accueil du public, avec en plus des infrastructures hôtelières, des parking pour automobiles, des surfaces pour transports en commun. Chaque aérodrome est gros consommateur d'espace aussi, ceci constitue pour les habitants logés à proximité une source de pollution importante et de bruit qui est accompagné d'odeurs qui sont néfastes pour la santé.

La même chose pour ce qui concerne les installations pour le transports ferroviaires, le chemin de fer représente à cet égard un merveilleux moyen de transport pour le tourisme. Ce dernier occupe aujourd'hui une grande place dans la géographie des transports. Aux périodes de vacances, il pèse d'un poids important dans le paysage et le modifier parfois dans une grande mesure. Son emprise au sol, la gare, en fait un gros consommateur d'espace. Outre la gare, le chemin de fer nécessite pour son exploitation des voies, des guichets, des salles des pas perdus, des quais et les ouvrages d'art sont non moins nécessaires, mais ils constituent à la fois une construction qu'on peut juger incongrue dans le paysage et un but de visite touristique.

Le chemin de fer est donc un gros mangeur d'espace, avec ses gares, ses voies et ses ouvrages d'art. Mais, en plus de la consommation d'espace, et comme tous les moyens de transports, il est aussi une source de nuisances et pollutions plus intenses encore aux moments de pointe, tels que sont les vacances.

Au niveau des transports maritimes et fluviaux, ces transports maritimes destinés aux touristes sont bien moins nombreux que ceux qui se chargent des marchandises et ils nécessitent moins de place, moins d'installations. Mais, il y a quand même des atteintes à l'environnement comme tous les navires ne marchent plus maintenant qu'au mazout, on retrouve là aussi la pollution pétrolière. Cependant elle reste très inférieure à celle des routes. Un navire, fût il de croisière, rejette dans l'atmosphère les habituels gaz d'échappement de tout moteur diesel. Il en est de même dans toutes les marinas et dans tous les ports de plaisance. Les voiliers quittent leur appontement au moteur pour aller au large ou rentrent au port.

Plus spécifiques sont les rejets d'eaux usagées et de déchets solides. L'air et l'eau sont ainsi inévitablement souillés. Mais, dans les ports la pollution est très forte à cause de la trop forte densité d'activités. Là, les rejets s'accumulent dans les bouts des bassins, où des nappes d'eaux polluées stagnent, mélangées aux ordures de tout type et parfois même à des amas surabondants d'algues drossées là par le vent. Cela peut se voir dans un port de plaisance comme celui de la commune de Arzon (Morbihan), Port-Gouesty, où à l'extrémité du port, sur la droite, s'accumulent toutes les ordures.

Et enfin, les transports routiers ont aussi un poids considérable sur l'environnement. surtout que l'automobile est devenue aujourd'hui le moyen idéal et universel de déplacement. Sa disponibilité immédiate dès que le démarreur est actionné, son alimentation commode en source d'énergie abondante et de nature peu coûteuse, la possibilité qu'il assure de pouvoir se rendre rapidement et facilement à peu près partout expliquent son actuelle universalité. C'est essentiellement l'automobile et ses dérivés (autocars) qui, à côté des transports routiers permanents, rendent accessible le tourisme à des foules importantes. Le deuxième véhicule routier utile pour le tourisme est l'autocar, soit l'autocar de jonction qui permet d'accéder à une station non desservie par le rail, soit l'autocar d'excursion.

Le transport routier a besoin des infrastructures comme la route qui est quand même une grande consommatrice de terrain : si ce n'est par des gares, c'est par toute une série de services il y a d'abord les aires de péage, qui sont un élargissement momentané considérable de la surface consacrée à l'autoroute. Il y a ensuite les aires de ravitaillement en carburant, avec restaurants, snacks, parfois hôtels. Aussi, on trouve la surface due aux échangeurs d'autoroutes. Enfin, tenant un peu lieu de gares, les parkings plus les routes, les voies et les chemin sur lequel se déplacent les automobiles.

Donc non seulement la route avec tous ses accessoires, est une grosse consommatrice d'espace par elle-même, mais encore il faut considérer les gênes qu'elle peut causer par certains tracés. Et en zone vraiment touristique, c'est même un cauchemar on a déjà fait allusion plus haut aux routes de bord de mer. Cette coupure est alors encore plus ressentie avec désagrément : en l'absence de feux rouges, aller de la station à la plage en traversant cette voie est un exploit périlleux, il s'y ajoute les odeurs, la pollution et le bruit. Les touristes préfèrent ce type de transport car il permet de s'arrêter chaque moment désiré ou dans chaque lieu voulu. Et cet arrêt engendre des effets négatifs sur les sites visités (pollution, déchets, rejets, etc.).

En dehors du transport et faute d'une planification et d'une gestion appropriées, le développement du tourisme peut susciter une forte concurrence entre l'activité touristique et d'autres activités faisant elles aussi appel à l'exploitation de terrains, entraînant de ce fait une hausse des prix de ces terrains et une pression accrue sur l'utilisation des terres agricoles à des fins de construction.

D'autre part, un développement inconsidéré du tourisme peut favoriser une utilisation intensive ou impropre des terres, facteur possible de déforestation, d'érosion des sols et d'amenuisement de la diversité biologique. D'intenses perturbations humaines de la végétation et de la faune par l'activité touristique peuvent mettre en péril ou détruire des activités traditionnelles telles que la pêche et, ce qui est peut être encore plus important, causer des dégâts irréversibles à de précieux écosystèmes.

Le tourisme suscite également de sérieuses préoccupations touchant sa viabilité du point de vue de l'environnement construit. Par exemple, le tourisme historique peut être une cause de problèmes urbains tel qu'un engorgement du trafic comme en connaissent de nombreux centres de villes historiques.

Le développement des zones côtières pour les besoins du tourisme est une préoccupation particulière. La construction effrénée d'installations touristiques peut saccager la beauté naturelle de ces zones, et l'érosion due à des installations et infrastructures de tourisme construites trop près de la côte peut être un facteur de destruction des plages et de dégradation de la côte. Des pratiques telles que l'extraction intensive de sable pour des travaux de construction liés au tourisme, communes à de nombreuses régions côtières, ont été responsables d'une destruction des plages ; dans les zones côtières où les récifs coralliens ont été détruits par les eaux usées et d'autres formes de pollution, les plages détruites ont peu de chances de se reconstituer naturellement.

Le traitement et l'élimination des déchets liquides et solides produits par l'industrie touristique est un autre problème préoccupant, en particulier pour les économies moins développées qui ne disposent pas de l'infrastructure ou des ressources physiques pour traiter ce surcroît de déchets.

Dans les Caraïbes50(*), la multiplication des navires pour croisières touristiques entraîne un accroissement des volumes de déchets liquides et solides qui doivent être éliminés aux ports d'escale. Lorsque des effluents non traités sont évacués dans les zones terrestres et maritimes environnantes, il en résulte souvent une pollution des rares ressources en eau douce des terres intérieures, une disparition de précieuses espèces marines, fauniques et végétales, une destruction des récifs coralliens et un processus d'envasement et d'érosion des plages côtières.

La pollution due aux déchets provenant de navires est un problème majeur pour les petits états insulaires en développement, où le déversement de déchets d'hydrocarbure, d'eaux usées, d'ordures et de sédiments de soute sur le passage des navires de croisière et de commerce peut entraîner une pollution de la mer et des plages.

Le problème de l'eau douce reste pressant et l'approvisionnement en eau douce, face à la demande croissante de l'agriculture, de l'industrie et des ménages, devient de plus en plus difficile pour un nombre toujours plus élevé d'économies51(*).

L'industrie touristique fait un usage extrêmement intensif de l'eau douce et, à mesure de l'expansion de cette industrie à l'échelle mondiale, le problème de l'approvisionnement en eau risque de s'aggraver. La situation est plus sérieuse encore dans de nombreuses régions où la pollution des eaux non seulement endommage les sites touristiques mais contamine les réserves en eau douce.

S'ajoute à cela un risque d'aggravation de la pollution atmosphérique, localement et à l'échelle mondiale, par la suite de l'augmentation des émissions de dioxyde de carbone liées à la consommation d'énergie dans les transports à but touristique ainsi que pour la climatisation et le chauffage des installations touristiques.

Conclusion de section

Le tourisme s'impose comme un phénomène majeur de la fin de ce siècle. Les flux touristiques ne cessent de croître, également, le nombre des touristes. Cette évolution implique des effets multiformes touchant les sociétés, les systèmes économiques et l'environnement. Ils ne sont pas toujours quantifiables. Ils apparaissent souvent contradictoires, de sorte qu'un bilan global est difficile à établir.

Les pays d'accueil n'en profitent pas nécessairement, et peuvent même voir leur dépendance accrue. Le tourisme crée directement des emplois, mais une part élevée relève du travail saisonnier, voire clandestin. Indirectement, il contribue au fonctionnement de nombreuses autres branches économiques. Les populations d'accueil profitent de débouchés accrus ou de l'apparition de métiers nouveaux. Mais, le tourisme peut tout aussi accélérer la disparition d'activités avec lesquelles il entre en concurrence pour l'espace ou la main-d'oeuvre. C'est l'emploi qui explique que les espaces touristiques sont souvent dynamiques sur le plan démographique. Les sociétés d'accueil ne sortent jamais indemnes de la rencontre touristique. Suivant les lieux, mais aussi ses formes, son volume, le tourisme peut être tantôt un agent de subversion des sociétés traditionnelles, tantôt l'occasion d'une redécouverte du patrimoine et des spécificités culturelles.

Mais son effet sur le milieu naturel est tout aussi puissant. Les problèmes posés sont réels : dégradation des sites par les infrastructures de circulation et d'hébergement, altération, voire destruction de milieux fragiles, dunes, marais, forêts, pelouses d'altitude, pollution des aires, et surtout des eaux.

Comme nous avons pu le constater, le tourisme de masse ne prend aucune considération de l'espace local. Des valeurs négatives lui sont de plus en plus associées telles que l'inactivité culturelle et les contacts superficiels avec les milieux d'accueil, les risques environnementaux et surtout la prise de conscience de l'existence d'un produit uniformisé dans des sites encombrés et défigurés par le tourisme de masse. Les sites comme ceux de montagne ayant font l'objet d'une exploitation industrialisante perdent progressivement leur attrait. L'offre touristique se retrouve dans l'incapacité de maintenir son rythme et se voit dans l'obligation d'innover afin de répondre à des besoins nouveaux. Donc le recul constaté est- il simplement la conséquence d'un environnement moins propice au développement du tourisme ou est-il le reflet de difficultés réelles propres au modèle qu'il conviendrait de surmonter ?

Section III. L'émergence d'un tourisme post-fordiste

L'aménagement du temps de travail, l'élévation générale du niveau de vie depuis les années 1950, le progrès des transports ferroviaires et aériens et l'engouement pour l'automobile individuelle ont considérablement favorisé la croissance touristique.

Ainsi, depuis le début des années 1960, le développement touristique a surtout été concentré sur le littoral. La majorité des touristes ne recherchait que le repos et le soleil, « Bronzer idiot ». Cette forme de tourisme reposait sur le concept de la pensée unique qui a donné naissance à ce que l'on appelle le modèle des 4 "S". Ce produit reflète la volonté de passivité des touristes. Cette tendance a conduit à un marché touristique composé d'une seule offre et d'une seule demande.

Cependant, depuis quelques années, on assiste à une remise en cause de cette forme de tourisme au profit d'une demande plus diversifiée.

Après avoir remis en cause le modèle de développement touristique fordiste, une analyse sur l'émergence d'une nouvelle demande touristique sera réalisée.

III.1. L'épuisement du tourisme de masse

Depuis une dizaine d'années, le tourisme dit de masse s'essouffle et sa crise semble irrémédiable. Nous constatons que le « fordisme touristique» n'est plus en corrélation avec l'évolution des besoins de marché. La clientèle recherche des « sites vrais» combinant la profondeur de l'échange interculturel, l'harmonie avec la nature et l'histoire des lieux visités. C'est cette vision qui est à expliciter, par la suite, au travers de la théorie des sites. De telles exigences semblent donc en contradiction avec l'offre du tourisme de masse qui privilégie le profit immédiat et la grande échelle détruisant ainsi la qualité relative des sites natifs d'activités touristiques. Comme le montre F. DEPREST52(*)(1997) dans une enquête sur le tourisme de masse, ce dernier a perdu de son attrait à la fois auprès de la clientèle et auprès des spécialistes du tourisme. Ce phénomène de répulsion touche aussi le tourisme dit d'élite dans la mesure où il n'échappe pas non plus à la crise du management industrialiste des activités touristiques. Cette crise est donc à apprendre en considération pour comprendre les nouvelles tendances de la consommation touristique. La crise de la quantité a donc ouvert la voie à la qualité. Du point de vue de la théorie des sites, il s'agit véritablement une crise des paradigmes et des pratiques classiques du tourisme en général53(*).

En somme, le produit touristique, traditionnellement consommé depuis les années 60, a connu, au cours du temps, des modifications. En premier lieu, un vieillissement qui peut être interprété sur la base de la notion de cycle de vie du produit de Vernon54(*). En second lieu, au niveau de la demande, un effet de saturation, la capacité de charge du site touristique est dépassée. Successivement, nous analyserons ces deux points, afin de mieux cerner cette crise.

III.1.1. Le déclin du mégatourisme

Les observations empiriques montrent bien que la demande tourne de plus en plus le dos au tourisme de masse et de grande distance. Le déclin de l'image du tourisme balnéaire des lointains tropiques en est une illustration. Des valeurs négatives lui sont de plus en plus associées telles que l'inactivité culturelle et contacts superficiels avec les milieux d'accueil, risques nutritionnels et pollution et surtout prise de conscience d'un produit uniforme dans des sites encombrés et défigurés par le tourisme de rentabilité à grande échelle.

L'Espagne nous en fournit un triste exemple avec le bétonnage de la Costa Bel Sol55(*) et bien d'autres sites sur la planète. Victime de son propre succès, le méga tourisme (par référence à la méga machine de Serge Latouche) semble ainsi répondre à la théorie du cycle de vie des produits56(*).

Après la phase de démarrage et celle de son essor (années 1960-1970), les sites qui ont fait l'objet d'une exploitation industrielle perdent progressivement de leur attrait. Donc jusqu'ici, le cycle du produit semble correspondre relativement bien au développement du produit touristique à savoir la démocratisation du voyage par le passage du tourisme réservé à une minorité au tourisme standard cristallisé dans le modèle des 4S.

Il convient maintenant d'appréhender avec cet outil conceptuel la crise du modèle des 4S. C'est durant la phase de maturité que naissent les signes annonciateurs du déclin. La démocratisation du tourisme tend à toucher des segments de la population ayant un statut de plus en plus bas.

Ce processus est rendu possible grâce à l'extraction de gains de productivité consécutifs à la massification. Ces gains ont tendance à diminuer les coûts fixes par certaines techniques comme l'utilisation des charters et de gains de productivité connaît un seuil en deçà duquel il semble difficile de descendre.

A ceci s'ajoute le fait que les nouveaux segments de clientèle concernés par cette massification sont de bas statuts et donc de rentabilité faible voire nulle pour les pays récepteur. Cette rentabilité réduite peut être à l'origine d'un cercle vicieux dans la mesure où elle entraîne la baisse de qualité et donc la baisse du statut de la demande.

La demande du produit touristique des 4 S a été croissante durant un certain nombre d'années. Une offre massive qui a cru à un rythme fort important lui a répondu. Mais, dans l'étape de la maturité, le rythme de la croissance se casse. C'est le cas en Espagne, cette offre touristique est aujourd'hui remise en cause depuis le retournement de la demande constatée en 1989 et 1990 (-4% des arrivées touristiques)57(*) et qui est le résultat d'une perte de compétitivité des prix touristiques, c'est-à-dire du rapport qualité-prix.

Selon, les estimations et les perspectives de l'O.M.T. cette offre est caractérisée par un ralentissement du taux de croissance économique pour les années 1995-2000 et jusqu'en 2010. Comme le montre le tableau.

Tendances et prévisions du tourisme mondial

Arrivées touristiques

Taux de croissance moyen annuel

%

1950-1970

9,9%

1970-1980

5,7%

1980-1990

4,7%

1990-1995

3,2%

1995-2000

3,4%

2000-2010

3,5%

Source : O.M.T.

Or justement, durant la période de maturité, le rythme de croissance de la demande s'essouffle.

Nous sommes dans l'étape d'un produit offert à de larges couches de la population. L'effort pour attirer une nouvelle demande doit donc être d'autant plus important en investissement sachant que cette demande est de bas statut.

Le modèle de croissance touristique soutenue n'arrive plus à se maintenir. Tel est le cas en Grèce58(*) où on constate même une stagnation des recettes en devises. En 1981, la Grèce avait accueilli 5,5 millions de touristes et reçu pour près de milliards de dollars de recettes touristiques. En 1988, le nombre de visiteurs est passé à 8 millions, mais les recettes n'ont pas dépassé 2,4 milliards de dollars et pour 1989, les statistiques indiquent une baisse de 20% de ce dernier résultat. La dépense moyenne par séjour et par personne a baissé de 308 dollars en 1988 à seulement 250 dollars en 1989.

Face à ce type de situation, la mise en place de nouvelles politiques du tourisme s'impose basée sur le développement de nouveaux marchés et de nouveaux produits susceptibles d'accroître les effets d'entraînement économique du tourisme.

III.1.2. L'incapacité de charge de site touristique

Le touriste-masse qui, chaque année, répète la même consommation touristique arrive à ressentir une certaine saturation conformément à la psychologie élémentaire de la courbe d'utilité marginale décroissante du consommateur.

Ce phénomène de saturation est aussi un phénomène de dénaturation59(*) ; lorsque la masse des touristes l'a envahi, le site n'est plus le même, il a perdu ses caractères originaux qui avaient attiré les premiers visiteurs.

Pour le Physicien, « Tout objet subit au moins une légère déformation lorsqu'il est soumis à des forces ou à des moments de forces. Ainsi une barre d'acier ou une poutre en bois fléchit lorsqu'un poids y est suspendu. Un os a tendance à se rompre sous l'effet d'un moment de force »60(*). Il semble bien que l'espace touristique fonctionne de la même manière que les solides en Mécanique61(*).

La masse touristique exercerait son poids sur l'espace. La pression touristique (la contrainte) produit un impact (la déformation). Les touristes polluent, leur présence induit des modifications de l'environnement et l'impact est d'autant plus net que le groupe de touristes intervenant est plus nombreux et plus dense.

Mais à l'image des solides, les lieux touristiques ont une limite au-delà de laquelle ils sont susceptibles de se détruire : « On pourrait croire qu'il s'agit d'une sorte de proposition théorique que nous suggère la physique (exemple : le moment d'inertie d'une poutre, d'un mât qui, en fonction des modules d'élasticité, de résistance, etc..., définit la contrainte limite supportable au-delà de laquelle la structure ne peut plus résister en se déformant élastiquement, et flambe). Il est exact que l'utilisation de ce terme[...] a correspondu d'abord à la nécessité de caractériser sous un vocable unique déjà disponible dans d'autres domaines, des phénomènes en apparence disparates selon qu'ils s'exercent tantôt dans une structure économique, tantôt dans un système socioculturel, ou encore dans un environnement écologique. Ces phénomènes ont tous ceci en commun, à savoir qu'ils semblent évoquer l'idée d'une déformation permanente de l'appareil économique, du système social, etc... susceptibles soit de bloquer, soit de simplement affecter son fonctionnement, localement ou globalement, par suite de l'effort excessif demandé à telle partie du système économique, social, etc. »62(*). La proposition d'une contrainte-limite en matière de tourisme se conforme assez fidèlement à celle de la physique.

Le lieu ou la société d'accueil sont conçus comme le milieu sur lequel s'exerce une pression. Le tourisme, ou plutôt les touristes sont les agents de la pression. Par analogie, la population touristique-limite ou capacité de charge touristique est le seuil au delà duquel l'activité touristique  « déforme » le lieu et la société d'accueil.

Malgré toutes ces attentes à l'environnement, aggravées en cas de sur fréquentation des espaces concernés, il n'y a pas de méthodologie de mesure de ces effets. La seule notion qui ait été définie dans cet esprit est celle de capacité d'accueil de THUROT.63(*)

D'autres auteurs préfèrent parler de capacité de charge. Les deux expressions ne sont pas synonymes. La capacité d'accueil traduit un nombre de places (par exemple, en termes de possibilités d'hébergements, le nombre de lits ou, pour un moyen de transports, le nombre de siéges). La capacité de charge est une notion plus complexe qui traduit les possibilités d'accueil d'un lieu sans dommage physique pour le milieu et sans dommage économique et social pour la communauté d'accueil. Elle peut donc être supérieure ou inférieure à la capacité d'accueil. Mais ces notions demeurent vagues, il s'agirait de prendre en compte les aptitudes et les contraintes du milieu à partir de critères significatifs établis au préalable, avec l'objectif de disposer d'un outil opérationnel d'évaluation pouvant servir tant a priori (planification) qu'a posteriori (gestion).

Selon l'organisation mondiale du tourisme O.M.T.64(*), cette capacité de charge viserait, « à établir en termes mesurables le nombre de visiteurs et le degré de développement qui sont susceptibles de ne pas avoir de conséquences préjudiciables aux ressources » et elle précise qu'il faut entendre par là tant « les dommages physiques pour le milieu naturel et pour le milieu artificiel » que  « les dommages sociaux / économiques pour la communauté et la culture locale » ou le déséquilibre entre développement et conservation.

En fait, si séduisant que soit ce concept, aucune méthodologie claire n'a précisé les critères à retenir et la façon de les combiner pour mesurer cette capacité de charge. On a bien tenté de la définir65(*) comme le rapport entre la superficie disponible et la surface moyenne utilisée par individu. Compte tenu de la durée moyenne de fréquentation, on peut faire face à un nombre d'usagers égal au produit de la capacité de charge par un coefficient de rotation des visiteurs.

Cependant cette tentation est assez vite remises en cause par la complexité des variables à prendre en compte. Surtout le côté humain de l'équation. Selon l'O.M.T., il faut prendre en compte des facteurs matériels, psychologiques et écologiques. Mais lesquels ? Et comment les mesurer ? En outre, la prise en compte d'une rotation dans le temps des usagers fait de leur concentration horaire, hebdomadaire ou saisonnière. En tout état de cause, l'appréhension de cette capacité de charge ne demeurera-t-elle pas largement subjective ? même ceux qui ont proposé des formules pour tel équipement ou tel site ont dû recourir à des choix arbitraires des critères et de leur pondération.

Des applications concrètes en ont cependant été faites dans des cas aussi différents que des villes d'art, des stations intégrées de sport d'hiver, des îles (pour les Galapagos ou pour l'îlot de Cayo Largo au large de Cuba par exemple)66(*). Il n'en reste pas moins que, même si le concept peut être utile, la mesure d'une capacité de charge est très délicate, voire souvent pseudo-scientifique.

Le passage du paradigme ancien au nouveau paradigme ne s'effectue pas instantanément, ni selon la même vitesse suivant les pays ou les régions. Certains pays connaîtront le déclin du modèle des 4S et envisageront une reconversion du produit touristique, voire un abandon du modèle ancien, alors que d'autres s'apprêteront à s'engager dans la voie du modèle essentiellement balnéaire ou préféreront songer à d'éventuelles combinaisons entre les deux types de tourisme. Et, comment alors, des solutions !

Les développements effectués jusqu'ici constituent un modèle explicatif qui, comme nous le verrons, semble assez bien correspondre à la réalité touristique de certains pays, à certaines époques. Cela dit, ce modèle est simplificateur et ne prétend ni embrasser toute la réalité touristique, ni être universellement applicable. Il en va de même du modèle qui lui succède, que nous appellerons post- fordiste.

III.2. Le tourisme post-fordiste 67(*)

L'internationalisation des marchés et la prise de conscience des effets du tourisme de masse ont conduit à une modification des pratiques des touristes.

Contrairement aux années précédentes, on assiste à une relative individualisation des comportements. Chaque individu est unique et cherche aujourd'hui, selon ses habitudes, à répondre à ses propres besoins.

L'évolution des mentalités a conduit à segmenter la demande. L'offre ne peut plus proposer qu'un seul type de produits pour répondre aux besoins mais doit au contraire se diversifier et s'adapter à la grande diversité des demandes et des sites à exploiter prudemment en mariant, selon la théorie des sites, leurs multiples dimensions économiques, sociales, culturelles.

Il s'agit là d'une critique et d'une alternative à l'économisme bien présent dans le mégatourisme. Ce n'est qu'avec ces nouvelles perspectives théoriques que la montée en puissance du tourisme de patrimoine et de proximité peut être convenablement décryptée. La proximité, la profondeur de l'échange culturel et interculturel, les nouvelles perceptions de la nature et des paysages expriment un besoin profond de se situer dans un monde anonyme et dominé par la technique et une économie dé-enchâssées et aliénantes68(*).

Dans cette perspective, les nouvelles demandes et les modes d'action sur le terrain s'orientent de plus en plus vers la prise en compte des contingences qualitatives de chaque milieu. C'est, entre autres, l'horizon et la philosophie de base du paradigme pluraliste des sites symboliques d'appartenance69(*). Les principes mis en oeuvre reposent, en effet, sur le respect de la diversité et de la multiplicité des pratiques, considérées comme une métamorphose des dimensions plus ou moins invisibles de la contrée considérée.

Sommairement, le site symbolique d'appartenance est un marqueur imaginaire d'espace vécu. Autrement dit, il s'agit d'une entité immatérielle qui imprègne l'ensemble de l'univers local des acteurs. Le site est, à chaque fois, singulier, ouvert et fermé. Il contient un code de sélection et d'évolution propre : en ce sens, il est dynamique. Contrairement au culturalisme, la « sitologie » est une approche non statique, elle pense le mouvant, le complexe et le métissage culturel. Dans cette optique, à l'opposé de l'économisme, aucune dimension de l'existence humaine ne peut être totalement séparée des autres. Croyances, concepts et comportements s'articulent autour d'un sens spécifique et créent ainsi une grande relativité des lois économiques et d'évolution des sociétés au moment même où le monde semble, en apparence, s'uniformiser.

Autrement dit, ce que nous séparons au plan de l'abstraction et de nos disciplines scientifiques est vécu par l'acteur sur le mode d'un enchevêtrement dans lequel il opère, dynamiquement, par pragmatisme. Cet homme concret, est l'homo-situs fondée par H. ZAOUAL se définit ici par l'apparition de cette nouvelle forme de tourisme dans laquelle le touriste prend de plus en plus en considération le site et ses spécificités locales. L'homo-situs est considéré comme un agent à dimension humaine. Il confère un rôle déterminant à la participation, la coordination et la dimension immatérielle (cultures, croyances, relations,...). L'homo-situs est une personne qui s'adapte au contexte local. Il privilégie la qualité à la quantité.

La notion d'homo-oeconomicus se définit, quant à elle, à travers le tourisme de masse basé sur le modèle fordiste dans lequel le touriste recherche un produit standard. Avec la modélisation des comportements économiques, l'homo-oeconomicus est un agent dont le seul moteur comportemental réside dans une rationalité instrumentale : la recherche de profits et de l'utilité. Contrairement à l'homo-situs, l'homo-oeconomicus privilégie la quantité à la qualité mais aussi la relation, la cohésion sociale ainsi qu'un grand nombre de principes comme le respect, l'estime, la tolérance de la différence sans oublier l'harmonie avec la nature.

La mutation actuelle du produit touristique et la nouvelle demande qui est devenue plus exigeante, variée et variable et se focalise de plus en plus sur la qualité et des besoins portant sur la culture et l'environnement. Donc cette nouvelle demande intègre la pluralité des aspects d'un site donné (culture, nature, architecture, histoire, etc.) tout en prenant conscience de l'importance du sens implicite des pratiques des acteurs, visiteurs et habitants du  « site d'appartenance »70(*). Il s'agit là d'un « tourisme dialogique ». Cette variété de dimensions correspond à une évolution des mentalités au sein du monde moderne. Or, la question qui se pose à ce niveau est la suivante : s'agit-il de nouvelles valeurs ou tout simplement d'un retour vers le passé ?

Les caractéristiques principales de la nouvelle demande sont : l'activité, la qualité et l'authenticité. P. PY71(*) identifie l'apparition d'un « nouveau rapport à la nature», on la respecte pour elle- même et pour nous- mêmes, comme cadre de vie. Cette identification est, nécessaire au décryptage de la notion de tourisme durable car elle restitue une idée selon laquelle ; les demandes deviennent de plus en plus sensibles à la qualité du cadre d'environnement respecté garant, d'une identité conservée. C'est ce point que nous allons essayer d'analyser dans ce paragraphe à travers trois points qui nous paraissent essentiels.

III.2.1. Les nouvelles tendances du marché touristique

Depuis quelques années, le tourisme semble prendre de nouvelles formes. En effet, les impacts dévastateurs du tourisme ont été largement décrits, aussi bien dans la littérature par des chercheurs sociologues, géographe, etc., que dans la presse. Ces écrits remettaient en cause une approche purement économique du tourisme qui a largement prédominé. Approche qui occultait, entre autres, la « folklorisation » de la culture locale, un dualisme social, l'effet de snobisme, etc.

Le tourisme source de rencontre, devient la négation du tourisme. Cette forme de tourisme que nous dénommons méga tourisme est remise en cause par l'émergence des nouvelles demandes. Celles- ci sont multiples et variées (culture, nature, architecture, sport et loisir, etc.). Le nouveau tourisme se base, entre autres, sur le patrimoine local. Le « nouveau touriste » cherche le calme, la facilité de circuler, l'authenticité du cadre et des relations humaines. Il se veut explorateur de nouvelles cultures (traditions, fêtes populaires, écomusées). En d'autres termes, il est la recherche d'une offre touristique variée, tout en respectant l'environnement.

A cet égard, P. FRANCES écrit  :  « Avant, on se mettait au vert, aujourd'hui on souhaite aussi se mettre au vert, une tendance illustrée par l'importance accordée, dans les motivations exprimées, d'une part au calme et à la tranquillité (rejet de la foule et des endroits encombrés et bruyants), d'autre part à la découverte de la nature, qu'il s'agisse de la montagne (de plus en plus fréquenté en été) mais aussi de la compagne, par opposition au littoral qui semble, lui, en passe de perdre, si cela n'est pas déjà fait, une position longtemps prédominante ». il relève aussi « le désir d'entrer réellement en contact avec d'autres cultures, d'autres façons de vivre[...], le regain d'intérêt pour les traditions, etc.»72(*). Comment expliquer ces constats ? La réponse est articulé en deux points : l'enjeu de la qualité et les piliers sur lesquels le nouveau modèle est fondé.

III.2.1.1. L'enjeu de la qualité

Il semble bien que les années 1990 ont vu apparaître un mode de production et de consommation, plus diversifiée dont l'enjeu principal serait la qualité73(*). La qualité semble être fondamentale. En fait, il s'agit d'un concept flou avec deux significations ; la première est qualifiée d'absolu, elle correspond à un optimum d'excellence tandis que la deuxième est relative74(*). Celle-ci met en exergue la qualité, le revenu, les prix, les goûts (etc.). Cette dernière est prise en considération par le système productif.

D'après L. BERGERY:  « La qualité repose sur cinq principes : la notion de conformité aux exigences, la responsabilité de chacun et de tous, la prévention, les mesures (mise en place d'indicateurs), l'excellence (attitude de zéro défaut) »75(*).

Aussi, « la qualité aurait diverses composantes parmi lesquelles la qualité des milieux naturels, des équipements et du cadre de vie, ainsi que l'appui sur des services patrimoniaux associés à des musées et ouvres d'art, monuments, ensembles architecturaux, villages traditionnels... ».76(*)

Toutefois, le grand problème se pose au niveau de contrôle de qualité qui s'inscrit dans contexte particulier de ralentissement des gains de productivité, d'une dégradation du climat social, et d'une concurrence internationale de plus en plus rude. Les entreprises sont confrontées à ces défis. Pour assurer le maintien de la compétitivité, elles peuvent, en particulier, tabler sur deux paramètres qui sont la productivité comme facteur de réduction des coûts unitaires à qualité donnée et la qualité du produit, dans certaines limites de coûts.

La qualité est devenue donc un impératif productif. Elle n'est synonyme d'une augmentation des coûts et une baisse de productivité. Le produit touristique est un ensemble de différentes composantes (biens et services), où le client participe lui- même à la fabrication du produit qu'il consomme, cette consommation s'effectuant en même temps que l'achat dans le secteur des services, le contrôle de qualité est beaucoup plus délicat à mener.

Ce que H. ZAOUAL 77(*) appelle l'incertitude et l'asymétrie d'information, l'aléa moral, et l'opportunisme. Mais la théorie des sites répond par la négative. Elle souligne que les lois du capital et du marché sont incapables, de par leur pauvreté intellectuelle, à restituer le caractère multiple des mobiles en jeu et à fortiori à en organiser l'évolution. Elle va encore plus loin lorsqu'elle suggère que même les « réussites économiques » présupposent la prise en compte du site. En ce sens, elle met en évidence les limites de l'économisme et démontre que pour faire de la bonne performance économique, il est nécessaire de mobiliser les croyances, les institutions, les règles, les conventions, sans oublier les cultures, et l'importance de la communication des acteurs de toutes les situations.

Concrètement, la qualité renvoie à divers sous service comme l'accueil, la prise de commande, les réservations, la livraison de documents, l'après- vente, le conseil, la pratique des langues, la connaissance parfaite du produit et l'adaptation au profil du client.

Nous pourrons emprunter deux voies complémentaire pour maîtriser et augmenter cette qualité à savoir ; la formation du capital humain qui constitue selon la plupart des professionnels du secteur l'un des enjeux décisifs des prochaines années. Le tourisme de masse n'était pas au moins dans sa phase ascendante, un tourisme de qualité. Mais comme nous l'avions déjà expliqué, ce modèle a été confronte à une demande de plus en plus exigeante. Il utilise une main d'oeuvre flexible et sous- payée avec une forte proportion des travailleurs au noir. La convivialité dans les hôtels, restaurants et entreprises touristiques est un élément fondamental afin d'éviter les conflits et d'apporter la qualité à la prestation.

Comme le travail dans l'industrie se caractérise par le contact tant entre l'homme et la machine, qu'entre êtres humains. Il s'avère donc vital de développer un modèle qui soit viable et qui répond à tous les goûts. Deuxièmement, le respect du capital physique et du patrimoine naturel. Nous sommes en train de passer d'un modèle de vente tous azimuts, d'un modèle considéré comme illimité où régnaient l'exploitation tant intensive qu'extensive des ressources naturelles et la spéculation à court terme, à un modèle peut-être plus réfléchi, plus responsable vis-à-vis du terrain (site) dans lequel il évolue. Le nouveau modèle prend en considération le contrat naturel établi tacitement entre le touriste et le milieu ambiant. Car le touriste passe la plus part de son temps libre à l'extérieur.

La qualité du séjour dépendra donc du soin apporté à la rue, de la propreté, de son design et de la lutte contre toute forme de pollution visuelle en particulier pour les villes dotées d'un riche patrimoine historique et culturel.

Le tourisme devient un outil d'aménagement du territoire. S'il est vrai, comme nous l'ont enseigné les économistes de l'offre78(*), que trop d'impôts tue l'impôt il est vrai aussi que trop de tourisme tue le tourisme. Bénéfices et risques coexistent en permanence en un même lieu au cours du processus de développement touristique (G. CAZES, 1989)79(*). La recherche de vacances actives dans un cadre naturel sauvegardé est une des caractéristiques de la nouvelle demande80(*). Apparaissent donc des orientations vers un tourisme aux formes plus respectueuses où le milieu local sera non seulement préservé mais en plus éventuellement enrichi par le présence du tourisme. Cette mise en place d'un tel modèle de développement touristique est à replacer dans l'option du « sustainable tourisme» à savoir un tourisme durable.

Au contraire de modèle des 4 S qui était fondé sur le grand nombre, le nouveau tourisme privilégie l'authenticité et le petit nombre (c'est à dire la qualité) vis-à-vis des grandes migrations vers le littoral. Enfin, le produit touristique c'est un support physique, un personnel en contact faisant partie de l'entreprise et un touriste qui est le client.

La qualité des destinations touristiques est un enjeu du tourisme mondial, qui va de pair avec la notion de durabilité, valeur montante du tourisme de ce début de troisième millénaire81(*). La qualité est un concept porteur de valeurs nouvelles pour le tourisme.

La qualité totale,82(*) devant désormais devenir globale, va permettre de mieux répondre aux attentes des touristes afin de reconquérir des parts de marché ou fidéliser les clientèles, et d'assurer un développement durable des territoires.

La recherche d'une cohérence territoriale, la préservation des ressources naturelles et culturelles, une plus grande attention aux ressources humaines et aux populations d'accueil sont autant de paramètres à considérer pour les opérateurs touristiques.

La qualité du produit dépendra donc partiellement de cette participation du touriste. Une grande responsabilité de touriste dans ses relations avec son milieu surtout que le nouveau tourisme se met au vert qui est très sensible et flexible.

III.2.1.2. Un nouveau produit touristique

Le tourisme de masse est centré sur l'exploitation intensive du soleil et de la mer s'asphyxie. Face à la faillite du modèle des 4 S essentiellement implanté sur le littoral, face aux considérations en termes écologiques, certains ont affirmé deux tendances la fin de littoral et la renaissance de la compagne.83(*) En fait, ce n'est pas la mort de ce modèle en lui- même mais plutôt un rejet du produit offert.

Depuis longtemps, cette forme de tourisme (littoral) exerce un effet d'attraction et conserve sa fonction dominante d'accueil. Mais, l'offre touristique se retrouve dans l'incapacité de maintenir son rythme de croisière. La dégradation des sites touristiques est aussi à envisager sous l'angle de l'épuisement de l'écologie globale, n'est donc pas sans limite. Celle-ci semble exprimer la loi des rendements décroissants84(*) si chère à MALTHUS. La même vision est retenue par RICARDO 85(*). Pour celui-ci, le modèle de l'état stationnaire est susceptible aussi d'être appliqué à la saturation dont est victime le système économique du tourisme de masse.

En effet, un site touristique repose sur ses dotations naturelles et culturelles 86(*). Une exploitation sans limite et sans respect de celles-ci entraînent irrémédiablement un épuisement et par conséquent, une répulsion. La recherche de la rentabilité maximale détruit, à long terme, les bases de cette même rentabilité.

En effet, la phase de maturité 87(*) du produit des 4 S aurait correspondu à un modèle qui reposait sur l'offre d'un support naturel appelé bien libre (mer et soleil) et sur une demande peu exigeante qui réclame justement la jouissance des biens libres. Le tourisme post- fordiste, quant à lui, se caractérise par une demande avide des services diversifiés et de qualité.

Et comme l'offre continuerait d'assurer le même support qu'elle proposait à l'époque du tourisme fordiste, il y aurait ainsi un décrochage entre l'offre et la demande. Ce qui pourrait expliquer la relative désertion de certaines plages comme lieu de vacances. Dans cette optique, le littoral devrait donc offrir un nouveau produit, centré autour de patrimoine local et fondé sur la diversité et la qualité. Le modèle des 4 S où le littoral constituait le monopole des destinations, aujourd'hui, il doit faire face à la concurrence des autres produits touristiques. Ainsi, le littoral ne constitue pas la destination privilégiée de l'ensemble des touristes.

De même le désir d'entrer réellement en contact avec d'autres cultures, d'autres façons de vivre, motivation principale des vacanciers voyageurs, trouve aujourd'hui des réponses qui ne sont pas nécessairement lointaines et exotiques. Ainsi, le regain d'intérêt pour les cultures, les traditions et les fêtes régionales, le succès des écomusées... comme si, à son tour, le dépaysement se mettait au vert.

C'est au XVIIIe siècle, en effet, que les Anglais découvrent le goût pour la villégiature à la compagne. Et c'est au XXIe siècle que la compagne est perçue comme un antidote à l'urbanisation. Cela dit, la ruée vers le littoral consécutive à la massification du tourisme allait négliger la mise en valeur de cette ressource touristique, considérée comme marginale ou réservée aux pauvres. C'est à partir des années 1960 88(*) que le tourisme rural s'est transformé en une puissance du mouvement écologique qui allait parachever l'intérêt majeur porté au « tourisme vert»89(*).

De plus, l'espace rural est porteur d'une demande et les potentialités en terme d'innovations et de créations de produits nouveaux sont considérables (équitation, chasse, pêche, etc.). Tout semble donc prêt afin de permettre de cette redécouverte campagnarde (prix, qualité, diversité, proximité 90(*), adaptation à la demande).

L'espace rural a développé depuis des siècles une fonction touristique récemment rajeunie sous l'effet du renouvellement des pratiques touristiques et de la multiplication d'équipements nouveaux. L'espace touristique rural doit largement sa spécificité à l'étendue des espaces disponibles pour le parcours touristique, aux paysages agricoles, forestiers, naturels qui plus qu'ailleurs, s'y déploient, mais aussi la dissémination de l'offre, le caractère diffus de la fréquentation. Son caractère social initial s'est atténué au profit d'une clientèle plus élitiste. Le patrimoine rural prend une place croissante dans la mise en oeuvre des politiques de développement local.

Mais les conditions économiques et démographiques, les dotations en infrastructures sont parfois trop défavorables pour pouvoir songer de manière rentable à l'implantation du tourisme rural. Il est possible dans des zones rurales, avec un aménagement urbain minimum, d'implanter le « tourisme vert » comme solution financière partielle à l'endettement et aux difficultés du monde rural 91(*).

Mais il convient de prendre conscience des difficultés de cette « mise en tourisme » de l'espace rural. Outre qu'elle n'est pas soutenue par l'ensemble de la population rurale, elle nécessiterait, pour devenir une activité économique majeure, une adaptation à l'évolution des clientèles (exigences plus grandes en matière de confort et de loisirs, développement des courts séjours et des vacances itinérantes), adaptation aux circuits de mise en marché en vigueur dans les autres milieux, professionnalisation accrue et recherche de rationalité économique 92(*).

Les conclusions sur le remplacement éventuel du littoral par le tourisme rural paraissent, maintenant, quelque peu hâtives. Les deux destinations, plus que substituables deviennent pour une part complémentaires dans cette géométrie touristique à caractères variables 93(*).

III.2.2. Un nouveau paradigme : le modèle des 4E

Le tourisme fordiste, comme modèle traditionnel d'aménagement et de développement du tourisme ne satisfait plus les nouvelles exigences de la clientèle touristique. Cette forme de tourisme reposait sur le concept de la pensée unique qui a donné naissance à ce que l'on appelle le modèle des 4S.

Ce produit reflète la volonté de passivité des touristes. Cette tendance a conduit à un marché touristique composé d'une seule offre et une seule demande. Sans oublier ses effets dévastateurs, essentiellement dans les pays en développement. Ce qui a remis en cause cette forme de tourisme au profit d'une demande plus diversifiée 94(*).

Plus qu'une crise passagère de type conjoncturel, nous avons voulu montrer qu'elle avait des racines structurelles à rechercher dans l'origine du développement du produit touristique. Notre objectif a été la recherche d'un modèle privilégiant le long terme par rapport au court terme, la qualité par rapport à la quantité, la diversité par rapport à l'uniformité.

Il est nécessaire d'esquisser les contours du nouveau modèle qui nous semble prendre racine aujourd'hui dans le monde du tourisme. Il se substitue au modèle des 4 S et par analogie symbolique nous l'appellerons le modèle des 4 E 95(*).

Ce dernier comprend quatre impératifs : L'équipement : c'est les infrastructures diversifiées (routières, ferroviaires et aériennes denses, de la qualité et permettant équilibre et complémentarité des modes de transport.) ; L'encadrement : c'est la qualité des ressources humaines ; L'événement : c'est les activités proposées ; et L'environnement : c'est le soin apporté à l'atmosphère.

Partiellement ou totalement, ce modèle hypothétique constitue l'option choisie parmi d'autres modèles comme celui des 3  L, « Lore, Lardscape, Leisure», (tradition, paysage et loisirs) dans lequel les produits « environnementally friendly» devront prendre en compte les coûts de conservation et de restauration de l'environnement pour accéder au « nouveau tourisme» 96(*). Le modèle des 4 E se différencie par rapport au modèle des 4 S sur le plan de la perception du tourisme. Considéré comme une manne à devises qui fonctionne toute seule, le tourisme s'est transformé en un secteur de toute première importance qui réclame planification, réflexion et construction.

Cette modification de l'appréhension du tourisme constitue pour ce secteur un changement considérable. Notre hypothèse est que nous assistons plutôt qu'à un remplacement radical et rapide d'un modèle par un autre, à une substitution lente et progressive avec des retours en arrière possibles et des blocages de type financier ou de type mental.

En effet, comme nous l'avions déjà signalé, la qualité se paie. La qualité désigne avant tout la qualité des produits touristiques surtout en ce qui concerne les services touristiques qui demandent une importante qualité du personnel des services touristiques. Il faut un bon encadrement pour ce personnel c'est à dire, qu'il faut réagir au niveau de la formation des ceux-ci.

La formation constitue un élément essentiel pour la qualité des produits touristiques, d'autant plus que la main d'oeuvre touristique est souvent jeune, assez féminisée et faiblement qualifiée. Le plus important dans ce modèle, c'est qu'il prend en considération les questions relatives à l'environnement. Le tourisme a souvent été accusé pour la dégradation des paysages.

Cependant, force est de reconnaître qu'il peut à son tour, être victime de formes diverses de dégradations de l'environnement qui lui sont extérieures, tout comme de l'évolution naturelle des rivages. Le nouveau tourisme met en premier degré cette problématique de l'environnement pour qu'il soit supportable et viable à long terme sur le plan écologique.

Aujourd'hui, on parle même d'un âge post-balnéaire valorisant la dimension culturelle et patrimoniale. Donc, il faut diversifier les pratiques touristiques c'est-à-dire les événements susceptibles de satisfaire tous les goûts 97(*).

Selon le nouveau modèle : la recherche de gains de productivité, la rationalisation des produits peuvent augmenter le coût des voyages, ce qui se traduit par une exclusion de toute une frange de la population de l'accès aux vacances.

Ceci va à l'encontre de l'objectif de démocratisation. De plus, le passage d'un type de vacances à un autre peut s'avérer délicat pour une partie de la population habituée à l'ancien modèle. L'inertie du modèle des 4S pourrait donc perdurer de ce fait.

III.3. Vers un tourisme durable

La notion de développement durable 98(*) a été reprise par les principales organisations de protection de l'environnement. A titre d'exemple, en 1991, l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature et de ses Ressources (UICN), le Fond Mondial pour la Nature (WWF), le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) ont publié un rapport intitulé Caring for earth qui en reprend les principaux thèmes :  « l'humanité doit vivre à l'intérieur des limites que représente la capacité de charge de la terre[...] nous devons adopter des modes de vie et modèles de développement qui respectent les limites de la nature et s'y inscrivent».

Cette étude décrit le développement durable comme :  « Une sorte de développement qui prévoient de réelles améliorations de la qualité de la vie humaine, et en même temps conserve la vitalité et la diversité de la terre»99(*).

En collaboration avec le PNUE, l'Organisation Mondiale du Tourisme (O.M.T.) a appliqué immédiatement la notion au domaine du tourisme. Les publications internationales les plus récentes parlent de « sustainable tourism development» ou en français « tourisme durable». Celui ci a trouvé un terrain d'autant plus favorable que la notion de capacité de charge y avait déjà fait l'objet d'un large développement : les fondations étaient construites.

En 1980, R.-W. BUTLER concluait ainsi son article sur le cycle de vie du lieu touristique : «Les attractions touristiques ne sont pas infinies et éternelles, mais doivent être considérées et traitées comme des ressources finies et non renouvelables. Elles pourraient être plus attentivement protégées et préservées. Le développement de lieu touristique doit être conservé dans des limites de capacité prédéterminées, et son potentiel de compétitivité maintenu pendant une plus longue période»100(*).

C'est à peu prés dans les mêmes termes, qu'en 1993 l'O.M.T., dans un guide de développement touristique durable destiné aux aménageurs locaux, affirme expressément : «L'environnement est la base des ressources naturelles et culturelles qui attirent les touristes. Par conséquent, la protection de l'environnement est essentielle pour un succès à long terme du tourisme. La capacité de charge est un concept clé dans la planification du développement touristique durable»101(*).

Néanmoins, la notion de tourisme durable reste floue. Nous essaierons de fournir une base de définitions et principes qui peuvent rendre opérationnel le tourisme durable.

Dans le premier point nous aborderons la question de la définition du tourisme durable. Ceci en se référant à l'approche par les sites. Le second point s'efforcera de répondre à la question suivante : comment rendre le tourisme durable opérationnel ?

III.3.1. Le tourisme durable : un concept fuyant

De nos jours, la notion de tourisme durable est en corrélation permanente avec le concept de développement durable dans un sens triptyque :  «  il doit être supportable à long terme sur le plan écologique, viable sur le plan économique, et équitable sur le plan éthique et social pour les populations locales»102(*). D'autres articles de la charte du tourisme durable de l'O.M.T. adoptée en 1995, détaillent les principaux éléments de ce tourisme à savoir :

- Le milieu écologique à protéger et à mettre en valeur est entendu au sens de maison commune : il englobe à la fois la nature et la faune, le patrimoine paysager, historique et architectural ainsi que le patrimoine ethnologique et culturel. L'environnement (au sens large) est la matière première d'un tourisme durable ;

- Les notions de développement et de progrès doivent être redéfinis en favorisant l'économie du tourisme, et en prenant en compte l'ensemble des coûts (environnementaux, culturels et sociaux) de l'activité sur le long terme, la répartition des richesses induites, et la qualité de vie des populations concernées ;

- La recherche d'un tourisme durable passant par une planification stratégique globale induit nécessairement une réflexion, une consultation, une information constante, une participation au processus décisionnel et un partenariat de tous les acteurs ;

La notion de tourisme durable est relativement récente et n'est apparue qu'au début des années 1990 dans la foulée du sommet de Rio et de l'Agenda 21, tandis que les préoccupations qu'il intègre sont parfaitement vieilles. A ce niveau, deux questions ont retenu notre attention :

- Le tourisme est il compatible avec la conservation du patrimoine naturel et monumental ?

Si le tourisme peut procurer une source de financement pour la réhabilitation de certains sites ou monuments, il est le plus souvent perçu comme étant consommateur d'espace et à l'origine de dégradations multiples, qu'il s'agit d'un tourisme primitif dit de « cueillette» ou encore plus lorsqu'il se transforme en tourisme « industriel».

Dés lors, les mesures de protection prises sont parfois très anciennes : création aux Etats- Unis Yellowstone National Parc en 1877, les lois sur le classement et la protection sites (1887) et sur les monuments historiques (1913) en France.

On retrouve aujourd'hui une logique similaire dans les 25 opérations grands sites (Pointe du raz, Gavarnie, Brouage, Provins, Pont du Gard, etc.) lancées depuis 1989. Il s'agit ici de concilier la restauration d'une qualité paysagère très dégradée et la gestion des flux de fréquentation ;

- Le tourisme peut il contribuer à un aménagement harmonieux du tourisme ?

Dès les années 1950 103(*), les pouvoirs publics ont vu dans le tourisme une opportunité pour revitaliser « le désert d'un territoire déterminé» des zones montagneuses et rurales. C'est la ruée vers « l'or blanc», la volonté d'encourager le tourisme rural (le premier gîte rural est ouvert en 1951) et l'agritourisme.

Aujourd'hui le tourisme demeure un des outils privilégies des politiques d'aménagement du territoire comme le montre l'adoption en 1999 d'une loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire qui affirme que le tourisme doit rechercher une compétitivité économique à long terme associant justice sociale, qualité de vie et d'environnement, préservation des ressources et participation de l'ensemble des acteurs dans les processus décisionnels.

Le tourisme durable est donc aujourd'hui le résultat d'une convergence entre la recherche moderne d'une dynamique de développement durable appliquée aux différents secteurs de l'économie et d'une histoire du tourisme, les acteurs se sont toujours interrogés, mais dans des termes différents, sur la meilleure façon de préserver ou de mettre en valeur durablement un territoire.

Le tourisme est une activité sectorielle où la durabilité joue et jouera un rôle majeur car il s'agit d'une activité qui connaît une croissance supérieure à la moyenne. Le nombre de voyages touristiques internationaux est ainsi passé de 170 millions en 1970 à 698 millions en 2000 et devrait atteindre à l'horizon 2020 un milliard six cent mille touristes 104(*). Cette progression de la demande au plan mondial s'explique à la fois par la démocratisation du transport aérien par une élasticité/revenu supérieure à un et par une extension du temps de loisir. Les facteurs de croissance devraient perdurer ;

· par nature est territorialisée, et de ce fait est irrémédiablement au confluent de l'économique, du culturel et de l'environnemental,

· engendre une concentration des populations sur des périodes restreintes (saison sur des espaces limités et souvent caractérisés par un équilibre fragile (littoral, centre historiques, moyenne et haute montagne, petites îles), concentration qui de plus peut être source de conflits d'usage avec la population locale (eau, chasse, agriculture, encombrements sociaux routiers, etc.),

· en tant qu'activité de contact porte en puissance des capacités à produire de changements sociaux, à déstructurer les sociétés locales et à homogénéiser les cultures et modes de vie,

· doit également préserver le droit au voyage des générations futures, leur droit à la découverte et à la connaissance du Monde.

Selon certains théoriciens « parler de tourisme c'est parlé de la nature, du jugement moral, de la beauté, de l'amour, de l'amitié, de la vérité, de la réalité, de l'obligation». En conséquence, il paraît logique de se poser la question suivante : comment rendre le tourisme durable ?

III.3.2. Rendre le tourisme durable

Ce point s'attachera à poser des principes qui doivent être retenus si l'on s'intéresse à la gestion d'un tourisme respectueux de son environnement. Cette gestion doit être adaptée à la réalité du lieu, car il ne faut pas espérer mettre au point une forme de tourisme durable qui prévaudrait quel que soit le lieu, ce serait nier sa propre définition, c'est à dire considérer les processus de développement comme uniformes, et par là, ignorer les spécificités du territoire d'accueil (son histoire, sa propre logique..).

Selon H. ZAOUAL , concepteur de la théorie des sites symboliques d'appartenance, « la prise en compte de la diversité des contingences conduit nécessairement à la nuance et à la meilleure écoute des acteurs du site. De là peuvent naître des procédures spécifiques à la résolution des problèmes supposées communs comme celui du développement économique »105(*).

On aboutit donc non pas à un schéma de développement touristique uniforme mais à un schéma de la diversité. Ainsi, la méthodologie des sites symboliques d'appartenance présente un intérêt particulier à savoir : éclaircir la notion même de tourisme durable afin qu'elle soit mieux appréhendé par les experts en la matière. Un des principes de base de cette démarche réside dans la prise en compte des valeurs communes du site pour que son développement économique soit « durable» ; sans l'écoute des acteurs du site, il s'avère impossible d'obtenir une croissance harmonieuse qui respectera les spécificités du terrain. Cette démarche essaye de rendre compte des désastres que peut engendrer par le tourisme de masse dans certains pays (notamment ceux impliqués dans le tourisme balnéaire). En effet, le sens commun a été, soit non identifié, soit ignoré, ceci au profit d'une uniformisation du produit touristique.

Il ne faut donc pas négliger l'importance du rapport local, ce que J. Perret appelle : « la dépendance créatrice»106(*) c'est-à-dire l'influence réciproque. Ces relations dynamiques fondent un territoire unique qui est logiquement doté d'une évolution qui lui est propre. Il existe donc un développement touristique qui doit être relatif au milieu. Opter pour un tourisme durable conduit à opérer la question dans un réseau d'informations pour la prise de décision. Ce que permet la recherche interdisciplinaire. Les gestionnaires devront donc être constamment  à l'écoute du territoire, ce qui conduit à définir le tourisme durable comme un tourisme fondé sur les ressources spécifiques à un lieu.

A. RALLET 107(*) nous propose le cas d'une région de Tunisie (zones montagneuses du Sud-Est), région à priori non concernée par le tourisme puisque caractérisée par l'aridité, l'éloignement de toute ville, etc., mais possédant une histoire, un artisanat qui peuvent être mis en valeur. A ce stade, le développement touristique s'oppose totalement à celui de type balnéaire fondé sur les ressources génériques du lieu (mer, soleil, etc.).

Valoriser donc les ressources naturelles et culturelles de la région définie plus haut suppose une démarche inverse de celle entreprise au sein du littoral quant à la conception du produit touristique. En effet, dans le second cas, on construit les infrastructures et ces dernières définissent un produit standard pour une clientèle ciblée (forme de mégatourisme).

Dans le cas d'un tourisme basé sur les ressources spécifiques, « c'est la construction d'une représentation dont il faut trouver les illustrations concrètes, en matière d'hébergement, d'organisation des circuits, d'animation culturelle et de produits artisanaux. Un important travail de conception du produit touristique doit être effectué avant la réalisation de l'infrastructure hôtelière, etc.».

Concevoir un tourisme fondé sur les ressources spécifiques nous aide donc à entrevoir des premières pistes quant à la réalisation d'un tourisme durable car il pose le principe de la conception, du produit par et à partir du territoire. C'est ici où se pose le problème de l'innovation touristique. Ceci montre qu'un tourisme durable ne peut se réaliser sans innovations dans la conception du produit. La création doit être en harmonie avec les valeurs et représentations indigènes. La créativité populaire est la richesse la plus nécessaire au développement de l'innovation.

Pour H. ZAOUAL, 108(*) les potentiels d'innovations locales du site sont à lire dans le sens commun. Celui-ci permet la transformation des non ressources en ressources, c'est à dire que l'ensemble des données sitologiques constitue la racine de l'innovation et permet la réalisation et la consolidation des activités économiques.

L'innovation implique la création de nouvelles institutions, c'est à dire des règles formelles et informelles qui y seront favorables. Le rôle de l'Etat est ici indispensable pour impulser la dynamique initiale, afin de créer un environnement dynamique qui accompagnera le processus d'innovation. Si l'on opte pour un tourisme durable, une politique publique s'avère utile et recommandée pour pallier aux échecs du marché (un système de management environnemental interne à une entreprise, qui impose à ses différents établissements et fournisseurs des normes d'économies d'eau, d'énergie, de recyclage des déchets, une meilleure intégration paysagère...

La question du tourisme durable reflète des préoccupations dues à des pressions touristiques très fortes qui ont eu pour résultat des effets dévastateurs sur le milieu physique, architectural, et même une sensation de perte d'identité. Les décideurs politiques essaient de pallier à ceci et plus exactement de mettre en place un tourisme durable.

Nous pensons que cette volonté est renforcée par la nécessité de satisfaire aux demandes de plus en plus soucieuses de trouver l'authenticité, le calme, les traditions. Le problème qui se pose d'emblée est la possibilité de fournir un cadre précis de ce qu'est une politique de développement touristique durable. Pour cela, il faut tenir compte de ces variations et tendances de vie. Comment concilier le développement touristique au profit des régions d'accueil tout en préservant le patrimoine naturel et culturel et en essayant d'élargir le droit aux vacances pour tous : tels sont les objectifs de l'aménagement touristique.

Depuis des années, la mondialisation du tourisme de masse a essayé d'uniformiser les sites, aujourd'hui, le touriste cherche à découvrir d'autres cultures et la diversité écologique.

C'est pour cette raison que H. ZAOUAL 109(*) écrit, « La mondialisation a besoin d'être habitée par des hommes avec toutes leurs différences, leurs moeurs de sites et leurs croyances... ».

Il est donc temps d'aboutir à une politique équilibrée entre développement économique et protection de l'environnement et des identités locales.

Le concept méritait donc d'être défini et on s'aperçoit, qu'il n'y aura pas un tourisme durable mais des tourismes spécifiques aux territoires concernés. Alors, tous les acteurs se trouvent mobilisés pour définir ce que sera leur produit touristique. Comme nous l'avions vu, le processus de création se trouve inversé par rapport à celui du méga tourisme. Le décryptage des valeurs communes est un préalable essentiel afin que le développement touristique soit propre au site. La problématique du tourisme durable réside ainsi dans les potentiels d'innovations du site. Celle ci mériterait donc un certain approfondissement afin de déterminer précisément quelles innovations institutionnelles et organisationnelles permettraient la réalisation effective d'un tourisme durable.

Conclusion du chapitre I

La crise du modèle fordiste de développement touristique est à mettre en relation avec l'évolution de la société contemporaine. C'est parce que la société a changé que le modèle fordiste n'est plus en mesure l'évolution de la demande touristique actuelle. Cette demande se caractérise par des exigences de qualités, de services et d'authenticité que le modèle fordiste ne peut prétendre.

La montée de la patrimonialisation s'est traduite par la recherche d'un nouveau modèle de développement touristique, post-fordiste, répondant aux nouvelles exigences du touriste du XXIe siècle. Celles ci répliquent à l'épuisement des croyances et des pratiques sur lesquelles s'est construite la vieille société industrielle. Les nouvelles significations symboliques qui sont à la racine du tourisme culturel et écologique expriment, comme nous avons essayé de le démontrer, un renversement des représentations collectives.

Le  mégatourisme de jadis s'en trouve irrémédiablement affecté dans sa croissance économique. Ce qui démontre, une fois de plus, que les changements culturels et sociaux peuvent fortement influence le monde économique et remettre en cause les modèles de développement touristique.

Dans un secteur économique dépendant des conditions extérieures (guerres, crises économiques, insécurité, etc.), le patrimoine, par ses caractéristiques propres, constitue une valeur sûre pour développer durablement le tourisme du XXIe siècle tout en préservant et réaffirmant les identités locales et tout en respectant l'environnement.

Pour nous le tourisme durable est un élément d'une réflexion plus globale sur les modes de vie au sein de la « société de consommation» (au double sens étymologique du terme, à la fois de destruction (consumer) et de but ultime de l'économie (con-sommer, additionner l'ensemble)).

L'application des principes environnementaux du tourisme durable est aussi un moyen d'attirer certains touristes : des amendes c'est ( en principe) plus de « propreté», l'écotaxe c'est (en principe) plus de « nature», la paiement du stationnement c'est (en principe) moins de monde sur le site. Les ressources dégagées permettent de rentabiliser les investissements nécessaires et de compenser la réduction du nombre de clients par une hausse du prix du séjour.

En fait, le concept de développement durable méritait d'être approfondie pour bien comprendre et pour déterminer précisément son rôle primordial de résoudre la contradiction entre l'économie du tourisme et l'écologie des lieux touristiques. Pour en tirer le meilleur profit, nous analyserons donc ce concept dans le second chapitre afin de fournir une base suffisante de définitions et des pistes pour rendre opérationnel le tourisme durable.

Chapitre II. Le développement durable: un paradigme en gestation

« L'homme est l'enfant de ses habitudes et un produit de sa nature et de son tempérament.

Le milieu dans lequel il vit remplace sa nature(...) son action sur le monde extérieur ne peut avoir lieu sans qu'il ait réfléchi d'abord à l'ordre des choses, puisque les unes dépendent des autres(...) »110(*)

Ibn KHALDOUN

Discours sur l'histoire universelle, 1337

« L'activité humaine est la première source des problèmes globaux d'environnement »111(*)

Benjamin DESSUS

Après nous le déluge ?, politique internationale, 1993

Introduction

Au cours des deux dernières décennies, le concept de développement durable s'est imposé dans la réflexion des pouvoirs publics. Le bien être a apporté aux sociétés non seulement la possibilité de répondre à une variété de préoccupations sociales et environnementales non satisfaites, mais aussi la capacité de s'adapter aux évolutions défavorables.

Pourtant, sans pratiques durables, la croissance économique peut aussi entraîner une dégradation excessive des ressources naturelles et humaines. Les pouvoirs publics sont donc mis au défi de concilier des pressions contradictoires sur les ressources naturelles et humaines sans sacrifier le progrès économique.

Comme on s'accorde de plus en plus à le reconnaître, il s'agit d'un défi qui ne saurait être relevé sur un plan exclusivement national sous l'effet de l'intégration économique croissante, les priorités de l'action publique se déplacent du plan local et national au plan régional et mondial.

L'action écologique mondiale entamée depuis les années 1970 suivie d'actions régionales et nationales a permis de rendre compte de la nécessité de protection de l'écosystème. Aussi nous sommes engagés dans des études qui portent à la fois sur le présent et l'avenir pour expliquer et comprendre les réalités qui permettent de voir les évolutions potentielles en vue d'un développement durable comme solution à la double crise du développement et de l'environnement en conciliant les impératifs économiques à court et moyen terme et les enjeux écologiques à long terme.

Toutefois, face à la difficile réconciliation entre ces deux réalités à l'intérieur des frontières nationales, une question s'impose à savoir : comment amener les pays à conjuguer leurs efforts afin de traiter les problèmes d'intérêt commun, et comment les atteindre, lorsqu'on connaît les différences qui existent sur le plan entre le Nord et le Sud ?

Le présent chapitre retrace les principaux aspects du développement durable tant au niveau théorique qu'au niveau empirique.

Section I. Naissance d'un nouveau paradigme

La problématique du développement durable, notion émergente depuis la fin des années 1980, vise un développement à la fois respectueux de l'environnement, équitable socialement et efficace sur la plan économique. L'avantage de cette approche est d'apporter un regard nouveau sur notre mode de développement qui répond le plus souvent à une logique de croissance de court terme et non à une logique de long terme.

Cette nouvelle approche de développement rendue nécessaire par les problèmes écologiques ressentis à l'échelle planétaire. En effet, la notion et le terme de développement durable apparaissent de manière institutionnalisée pour la première fois en 1972 lors de Stockholm sur l'environnement. Mais l'événement qui les sacralise est le rapport Brundtland demandé par la Commission mondiale sur l'environnement et le développement, publié en 1987 et intitulé  "Notre avenir commun" 112(*).

Le terme de développement durable est moins un concept qu'un mot d'ordre issu d'une prise de conscience qui précède la construction d'un contenu, d'un corpus de références. D'où le fait qu'il puisse aussi aisément prétendre par exemple englober l'environnement, l'économique et le social, auquel s'est récemment ajoutée l'idée de gouvernance ou l'art d'organiser l'exercice des pouvoirs mais aussi trouver difficilement à se traduire concrètement et spatialement dans les politiques nationales dans les politiques nationales, locales, globales ou sectorielles, même si plusieurs initiatives au niveau européen ont été prises113(*).

Les difficultés de mise en oeuvre sont liées aussi aux modes de penser et de faire des institutions et des organismes qui ne favorisent pas le plus souvent une approche globale et intégrée des phénomènes et des actions.

C'est pourquoi le développement durable s'attache à des préoccupations de résultat mais aussi de moyen. Ce moyen résulte là aussi pour beaucoup d'entre eux des limites actuelles des logiques, des outils et des pratiques de l'aménagement et de la planification territoriale.

C'est pourquoi le développement durable s'attache à réduire les oppositions traditionnelles entre les pays développés et les pays en développement, entre le penser et le faire, entre l'environnement et l'économie, etc., que traduit de manière universelle le message principal du rapport Brundtland, mais dont la traduction concrète sur le terrain s'avère plus difficile : « Penser globalement et agir localement»114(*). C'est dans ce cadre de réflexion que se situe le contenu des paragraphes suivants.

I.1. Définitions et enjeux de développement durable

I.1.1. Définitions et origine du développement durable

La prise de conscience des effets de la pollution auxquels donne lieu la croissance économique ne date pas d'aujourd'hui. Les problèmes de la population ont déjà fait l'objet d'une première vague de réflexions dès la fin des années 1960, début des années 1970.

Le rapport Meadows 115(*) sur les limites de la croissance de 1972 soulignait déjà les dangers que représente le maintien du rythme de la croissance économique et de la population de l'après guerre sur les ressources naturelles (prévoyant un épuisement rapide de ressources). Mais quelle que soit la nature des critiques, ce rapport avait pour mérite d'alerter l'opinion publique sur la nécessité d'intégrer l'aspect environnemental dans le processus de la croissance économique.

De son côté, la Conférence des Nations-Unies pour l'environnement, réunie à Stockholm la même année, proclame que le bien-être des populations et l'essor du développement économique dans le monde entier, dépend de la protection et de l'amélioration de l'environnement. Cette prise de conscience a donné lieu ou concept d'éco-développement116(*) qui se veut comme une stratégie de développement fondée sur la satisfaction des besoins endogènes avec respect de l'environnement.

Mais, cette conception subit un ébranlement lorsque l'on observe que  « l'autre développement» ne se fait pas et que les pays en développement adoptent les mêmes modes de consommation que les pays occidentaux. L'importance de la conférence de Stockholm réside plutôt dans le fait qu'elle a su cristalliser les enjeux sous-jacents de la politique environnementale mondiale appliquée jusqu'en 1972. Elle s'est imposée en tant que forum permettant de formuler les différents programmes d'action du Nord industrialisé et des pays en développement et, d'autre part, en facilitant l'élaboration d'un compromis, fragile mais réel, qui allait servir de base aux futurs accords et actions internationales en matière de protection de l'environnement.

Au cours des deux décennies suivantes, les mêmes forces politiques qui avaient présidé au déroulement de la conférence de Stockholm ont continué à déterminer l'évolution des bases conceptuelles du développement durable à savoir les pressions exercées d'une part un mouvement de défense de l'environnement hétérogène mais de plus en plus largement représenté, et d'autre part par les tensions entre le Nord et le Sud. Ces deux sources de pression internationale ont trouvé leur expression dans une mesure inégale, il est vrai dans deux documents qui, dans les années 1980, ont formulés pour la première fois les principes de base de développement durable.

La première déclaration intitulée Stratégie Mondiale pour la conservation, a été publié conjointement par l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (N.I.C.N), le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (P.N.U.E) et WWF-International en 1980 117(*).

Elle a renforcé les bases conceptuelles comme le rapport de Founex quelques années plus tôt sur lesquelles le développement durable devait s'articuler par la suite dans le rapport de la commission Brundtland, intitulé « Our commun future» présenté en 1987 par la Commission Mondiale sur l'Environnement et le Développement (C.M.E.D) ou commission Brundtland.

Pour la première fois, dans un document officiel, le terme de développement durable est affiché. Après avoir identifié, face à la croissance démographique, les problèmes environnementaux qui menacent le développement des pays du Sud (déforestation, prélèvements excessifs sur les espaces cultivables, disparition des espaces, modifications climatiques), le rapport présente la protection de l'environnement comme une priorité internationale, qui implique elle-même à l'échelle planétaire une redistribution des ressources financiers et révision en profondeur des démarches scientifiques et techniques, ainsi qu'une réduction des inégalités économiques à l'échelle planétaire.

En effet, le rapport Brundtland a consolidé les bases conceptuelles et politiques sur lesquelles devait reposer la future Conférence des Nations-Unies sur l'Environnement et le Développement118(*) (C.N.U.E.D), qui s'est tenue à Rio en 1992. Mais avant, en 1991, la déclaration de Toronto sur les villes mondiales et leur environnement, dans laquelle 130 villes119(*) se sont engagées à mettre au point des plans d'éco-développement.

Revenant à la C.N.U.E.D, également appelée le « Sommet de la Terre» à Rio de Janeiro, a remporté en 1992 un succès considérable à plusieurs égards. Des conventions internationales sur le changement climatique et la diversité biologique ont été signées. La charte de la Terre, une liste de principes devant être respectés par les gouvernements et par les populations a été signée par 178 120(*) gouvernements, un programme d'action en faveur du développement appelé l'Agenda 21, a été adopté et un mécanisme institutionnel a été crée au sein des Nations-Unies, comprenant notamment la commission sur le développement durable qui propose un cadre d'action et des recommandations aux gouvernements, aux collectivités locales, aux industriels, à la société civile..., qui décline les problèmes qui se posent pour l'environnement et le développement, fixe les objectifs à atteindre pour faire de l'éco-développement une réalité pour le XXIe siècle, et en précise quelques règles et orientation.

Dans le cadre conceptuel du développement durable qui s'est dessiné lors de la conférence de Rio visait de manière plus précise la nécessité de faire évoluer les relations économiques Nord-Sud, il n'as pas réellement modifié la recommandation fondamentale formulée quelques années plus tôt par la commission Brundtland à l'égard de la croissance selon le schéma habituel.

A l'instar de la Conférence de Stockholm, le Sommet de la Terre n'a pas fondamentalement modifié les approches adoptées vis-à-vis du développement, ni amélioré de façon significative les politiques qui pouvaient mettre la planète sur la voie du développement durable. La conférence de Rio n'a pas tenu ses promesses121(*).

En un mot, elle a débouché sur une profusion d'accords verbaux tout en respectant à une date ultérieure non spécifiée la prise d'engagements concrets et la mise en oeuvre de réformes structurelles propres à favoriser le développement durable. Une autre carence importante de la conférence de Rio a influencé par la suite la réflexion internationale en matière de développement.

Si la CNUED prétendait avoir forgé un lien essentiel entre les dimensions économiques et environnementales du développement durable, elle a minimisé l'importance pourtant vitale de son troisième pilier, à savoir la dimension sociale : cette omission a été à l'origine d'une série des Sommets internationaux convoqués sous la houlette des Nations-Unies pour réaffirmer la priorité qui devait être accordée de droit à ces questions par les décideurs.

Ces réunions ont été lancées en 1994 lors du Sommet de Vienne sur les droits de l'Homme, rapidement suivi par le Sommet de Caire sur la population en 1994, le Sommet social de Copenhague et le Sommet de la femme de Beijing en 1995, et le Sommet Mondial des villes d'Istanbul (dit Habitat II) en 1996.

Compte tenu du peu d'attention accordée par la CNUED aux questions sociales, il n'est pas sur prenant que les déclarations officielles négociées au cours des Sommets successifs sur celles-ci passent pratiquement sous silence les fonctions vitales de l'environnement qui sont indispensables à toute activité humaine. En fin, en 1997, la conférence de New York (Earth Summit Review) ayant pour objet de faire le point, cinq ans après, sur l'application de l'Agenda 21 aux niveaux mondial, national et local.

I.1.2.  Une approche opérationnelle de développement durable

Le concept durable ou durabilité (en anglais  « sustainable », et « sustainability »122(*)) : l'adjectif a donné naissance à un nom qui désigne l'état d'un système, d'un mode de développement (d'une ville, d'une agriculture, un tourisme, etc.) durable.

Ce concept est emprunté à la littérature scientifique, où il caractérise la gestion d'une ressource naturelle d'une manière qui compatible avec la préservation de sa capacité de production. Dans les sciences sociales, le développement durable implique que l'on porte l'attention sur des considérations plus générales que la croissance économique et le bien-être matériel. Le concept englobe des préoccupations d'équité et de cohésion sociale, ainsi que la nécessité de parer aux menaces contre les biens communs de l'humanité. Il met l'accent sur les liens entre elles en cas de conflit.

D'après COSTANZA, « la durabilité est le rapport entre des systèmes économiques dynamiques et des systèmes écologiques dynamiques plus grands mais aux changements plus lents dans lesquels : la vie humaine peut continuer indéfiniment ; les individus peuvent s'épanouir ; les cultures humaines peuvent se développer ; mais dans lesquels les effets de l'activité humaine restent à l'intérieur de certaines limites afin de ne pas détruire la diversité, la complexité et la fonction du système qui sert de base à la vie écologique »123(*)

Une formulation lus brève de l'Union Internationale pour la Protection de la Nature (UIPC), en 1991, considère que le développement durable est une amélioration des conditions de vie des communautés humaines tout en respectant les limites de la capacité de charge des écosystèmes. D'après I. SACHS 124(*), il faut prendre en compte les cinq dimensions de la durabilité (économique, sociale, écologique, spatiale et culturelle et plurielle).

Donc, le développement durable présente cinq dimensions qui constituent le socle du développement durable ces éléments sont interdépendants, si bien que les efforts visant à promouvoir le développement doivent soutenir les cinq en même temps 125(*).

a) la durabilité économique 

Elle exige de la société qu'elle privilégie les voies de croissance économique capables de générer durablement un accroissement du revenu réel, au lieu des politiques à court terme qui débauchent sur l'appauvrissement à long terme. Elle implique en outre que la société génère un flux optimal de revenus tout en conservant son stock de capital. Dans ce contexte, la notion de capital recouvre le capital généré par l'homme, le capital humain et le capital naturel 126(*).

Pour éviter la dégradation de l'environnement. L'accès libre et gratuit à de nombreuses ressources environnementales fait que les producteurs ne sont guère incités à prendre en compte l'intégralité des coûts de la dégradation de l'environnement.

Un élément indispensable pour progresser efficacement vers un développement durable consiste donc à déterminer le « juste prix» des biens. Tant que le prix des matières premières et des produits ne reflétera pas correctement les coûts et avantages sociaux et environnementaux et que l'on n'aura pas fixé un prix pour les ressources en air, en eau et en sols qui servent actuellement de réceptacles gratuits ou peu coûteux pour les déchets que produit la société, les ressources continueront d'être utilisées de façon inefficace, et la pollution ira croissant.

Par conséquent, il importe d'internaliser les « externalités»,127(*) en agissant sur les prix, en établissement des droits de propriété ou par d'autres moyens.

Toute amélioration des conditions environnementales et sociales se traduit normalement par des coûts d'opportunité en termes de développement économique. Il paraît donc logique de chercher à atteindre les objectifs en la matière de la façon la moins coûteuse. S'agissant de la protection de l'environnement, cela signifie que l'avantage marginal, en termes d'amélioration de l'environnement, obtenu pour toute dépense de ressources supplémentaire, doit dans l'idéal être égal pour les diverses interventions possibles.

Les principes instruments économiques fondés sur le marché-taxes d'environnement et permis négociables devaient être utilisées pour améliorer l'efficience dans le respect des objectifs d'environnement, mais ils soulèvent certaines difficultés en matière de répartition des revenus utilisé à l'échelle d'un pays, le produit de ces taxes ou de la vente de permis peut permettre aux pouvoirs publics d'abaisser d'autres impôts qui entraînent une distorsion des comportements économiques, comme ceux frappant la main-d'oeuvre, et d'obtenir à la fois des avantages écologiques et des gains d'efficience sous la forme d'une amélioration des performances économiques utilisés au plan international, ces instruments sont un moyen d'atteindre des objectifs à des coûts plus faibles 128(*).

Plus précisément , la durabilité économique dépend d'une répartition et d'une gestion des ressources plus efficaces et d'un flux constant d'investissement privés et publics. Ce qui nécessite de venir à bout des contraintes externes actuelles : le fardeau du service de la dette et le flux net de ressources financières du Sud vers le Nord, les termes de l'échange défavorables, les barrières protectionnistes imposées par les pays industrialisés et, enfin, l'accès limité à la science et à la technique.

En outre, il faut évaluer l'efficacité économique en termes macro sociaux plutôt qu'à travers les seuls critères micro-économiques de profit de l'entreprise.

b) la durabilité sociale 

La dimension sociale du développement durable est fondée sur le principe selon lequel l'égalité des chances et la prise en compte de l'interdépendance des communautés humaines ont les conditions de base d'une qualité de vie acceptable celle-ci constituant en définitive l'objectif fondamental du développement durable.

Pour qu'une voie de croissance soit viable à long terme, les richesses, les ressources et les chances doivent être partagées de telle manière que tout un chacun puisse accéder à une qualité de vie minimale en termes de sécurité, de droits de l'homme et d'avantages sociaux (alimentation, santé, éducation, logement et opportunités d'épanouissement personnel entre autres).

Le principe d'égalité signifie qu'il faut s'assurer que tout un chacun puisse accéder à l'éducation et soit en mesure d'offrir à la société un travail productif et équitablement rémunéré. L'interdépendance de la communauté humaine exige que soit reconnue la menace que les inégalités sociales flagrantes font peser sur la stabilité et viabilité à long terme de l'entreprise humaine. Elle exige également que l'on reconnaisse que le niveau de vie de la communauté humaine est lié, en définitive, à la taille de la population que les ressources et les infrastructures environnementales de la planète doivent faire vivre.

On peut déduire cette définition de la durabilité sociale : « Un développement est durable en termes sociaux si les politiques publiques qui le composent économiques, sociales, environnementales ne causent pas de dysfonctionnements sociaux tels qu'ils remettent en cause les possibilités d'amélioration du bien être pour l'ensemble de la population actuelle comme à venir »129(*).

Autrement dit, un développement socialement durable relie la lutte contre la pauvreté, sous ses formes d'accessibilité et de capacités, à la régulation des formes correspondantes d'inégalités et de vulnérabilité. Cela ne fait que conforter les termes du rapport Brundtland : « satisfaire les besoins essentiels » et « favoriser un état d'harmonie entre les êtres humains » pour « les générations actuelles et futures » en se référant aux différentes dimensions du bien-être.

La dimension sociale du développement durable exige en outre la participation active sur le plan politique de tous les secteurs sociaux, ainsi que la responsabilité des gouvernements devant l'ensemble du public en ce qui concerne la mise en place de mesures sociales visant à résoudre, entre autres les problèmes d'égalité sociale et de démographie. Elle implique par ailleurs la mise à profit des naissances et de l'expérience des populations, ainsi que le renforcement des capacités des groupes sociaux à déterminer et à gérer leur propre devenir.

c) la durabilité écologique 

Elle est fondée sur la nécessité d'en préserver l'intégrité pour les générations actuelles et futures et, partant, la productivité à long terme des systèmes et des infrastructures écologiques de la planète qui conditionnent le cycle de perpétuation de la vie.

Cette exigence ne peut satisfaite qu'en investissant dans l'infrastructure de la biosphère afin d'assurer la continuité et la qualité des biens et services environnementaux dont dépendent toutes les formes de vie.

Du point de vue de l'environnement, le développement durable exige donc que ces biens et services soient utilisés de manière à ne pas diminuer la productivité du milieu naturel ni affaiblir la contribution de ces biens et services au bien-être de l'humanité.

Le principe de précaution 130(*) doit devenir un élément clé de tous les programmes de développement, pour prévenir les actions destructrices de l'homme et les atteintes irréversibles à l'environnement.

En résumant, ceci suppose la limitation de la consommation des ressources non renouvelables, la réduction de la pression que les plus riches exercent sur celles-ci, une utilisation plus rationnelle des ressources renouvelables ou non.

d) la durabilité spatiale 

Il s'agit d'une meilleure répartition géographique des activités et des hommes avec un accent mis sur les problèmes suivants :

- concentration excessive dans les métropoles ;

- destruction des fragiles mais importants écosystèmes, par des colonisations incontrôlées ;

- promotion d'une agriculture moderne régénératrice et de l'agrosylviculture auprès des petits paysans en leur fournissant les moyens techniques appropriés, du crédit et un accès au marché ;

- possibilités d'industrialisation décentralisée liée à la nouvelle génération des techniques (spécialisation flexible), en particulier des industries de transformation de la biomasse capables de créer des emplois ruraux non agricoles.

- Etablissement d'un réseau de réserves naturelles et de biosphère pour protéger la biodiversité131(*).

e) la durabilité culturelle et plurielle 

La culture a été mise en avant au Sommet de Johannesburg par le président de la république comme composante majeure du développement durable. Elle concerne à la fois la production, le patrimoine, la diversité et l'expression culturelles, les pratiques culturelles, les manière de faire, de vivre, la diversité linguistique et l'état des connaissances. De ce point de vue, la culture constitue un vecteur important du développement durable et concerne ses différentes facettes économique, environnementale et sociale.

Il s'agit de promouvoir le changement dans la continuité culturelle, traduisant le concept normatif d'éco-développement en une pluralité de solutions locales, propres à chaque écosystème, à chaque contexte culturel et à chaque site132(*).

Prises dans leur l'ensemble, ces cinq composantes du développement durable doivent converger de façon à générer un courant continu de revenus, assurer l'égalité sociale, obtenir des niveaux de population socialement tolérables, préserver les ressources naturelles et celles générées par l'homme, et protéger les services de l'environnement dont dépendent toutes les formes de vie.

I.1.3. Le développement durable : une approche en termes d'enjeux

Les réflexions sur la relation entre les activités économiques et l'environnement étaient déjà présentes dans la philosophie antique, mais elles prennent une place importante dans la seconde moitié du XXe siècle avec l'apparition des pollutions, des déchets issus de modes de consommation gaspilleurs de ressources, la surexploitation des systèmes naturels, la consommation croissante d'énergies d'origine fossile dans un contexte de croissance exponentielle de la population mondiale.

Le développement durable est un concept qui apparaît dans les années 1960, au moment même où l'idée d'une croissance illimitée commence à être remise en cause (Meadows, 1972)133(*). La croissance Zéro134(*) est alors considérée comme une solution qui permet d'assurer le développement économique tout en garantissant la protection de l'environnement.

Ce qui n'est pas une opération neutre en soit. Ainsi, la première difficulté majeure lorsqu'on passe du « concept à l'action » est d'adapter la recherche conceptuelle du développement durable à une réflexion plus pragmatique. En quelque sorte, l'ensemble des décideurs est partagé entre, d'une part, la dérive théorique des modèles de durabilité, et, d'autre part, les actions (trop) ponctuelles prises en faveur de l'environnement.

Pour ce faire, notre analyse part des notions clés, des centres d'intérêts autour desquels gravitent la problématique du développement durable :

En premier lieu, nous basons notre analyse sur la notion de développement qui correspond, à la lecture du rapport Brundtland, à une certaine conception de l'humanité où tout être humain a le droit fondamental à un environnement suffisant pour assurer sa santé et son bien être.

Aussi, à l'instar de la déclaration de Rio, nous retiendrons que c'est l'homme et le développement qui demeurent au centre de préoccupations relatives au développement durable (rapport de la conférence des nations unies sur l'environnement et le développement, 1992, principe1).

D'autre part, il nous semble que les dimensions spatiale et temporelle sont inextricablement liées à la notion de durabilité. En effet, l'une des questions essentielles, soulevée par la CMED, est la question de la durée du développement, de sa pérennité, qui apparaît comme la condition sine qua non pour combattre le cycle vicieux de la pauvreté (qui entraîne la détérioration de l'environnement, qui provoque à son tour une indigence plus grande encore).135(*)

Enfin, troisième notion clé, le territoire, substrat de l'environnement, naturel ou habité, représente le champ d'action de l'homme, que ce soit à l'échelle globale, régionale ou locale.

A partir de cette triade, nous pensons pouvoir définir les 3 axes de réflexion inhérents à une analyse relevant du développement durable 136(*) :

En recoupant deux à deux les méta-variables (l'Homme, le temps, le territoire), nous pensons révéler les enjeux d'un développement durable, c'est à dire, l'ensemble des préoccupations caractéristiques de la problématique du développement durable les principes émis seront donc autant des voies de réponses perçues face à ces enjeux.

a) La dimension humaine du développement durable

A partir de sa réflexion sur l'Homme qui l'aspire à une vie toujours meilleure137(*), le rapport Brundtland a recours à la notion d'équité, postulant l'égalité des chances entre les individus138(*), de façon à garantir les possibilités de tout un chacun à améliorer sa situation. L'équité vise essentiellement à bannir l'inégalité de l'accès aux ressources, qui nuit à la recherche de l'intérêt commun139(*). Cette définition fait référence à une équité d'ordre intergénérationnelle (le temps) et à une équité d'ordre intragénérationnelle (le territoire).

- l'équité intergénérationnelle 

Exige pour le moins de maintenir l'intégrité de la biosphère et ses mécanismes régulateurs. Il s'agit donc d'introduire une responsabilité éthique vis à vis de nos descendants en faisant implicitement référence à des stratégies de préservation du patrimoine naturel et des écosystèmes.

En bref, la recherche d'équité intergénérationnelle rejette l'idée d'une préférence pour le présent au détriment des générations futures. Le principe 3 adopté dans la déclaration de Rio va dans ce sens en rappelant que : « le droit au développement doit être réalisé de façon à satisfaire équitablement les besoins relatifs au développement et à l'environnement des générations présente et futures »140(*).

La difficulté majeure posée par cet enjeu, provient de l'asymétrie d'information des générations présentes quant aux préférences des générations futures : il est dés lors délicat de poser des règles au nom d'un partage équitable du bien être intergénérationnel... l'une des solutions envisageable est de laisser intact « l'état des choix actuels » notamment en affirmant un principe de « ressources à caractères universel » qui concerne aussi bien la conservation des espèces, qu'une meilleure maîtrise énergétique basée sur l'avancée technologique qui s'alimenterait des seules ressources renouvelables141(*).

- L'équité intragénérationnelle 

Rejette l'idée d'un développement inégalitaire qui ne respecte pas le principe de non discrimination sociale entre les hommes, entendu que cette non-discrimination repose sur l'apport des besoins fondamentaux (se nourrir, se loger, se vêtir, s'éduquer,...), conditions premières pour un véritable développement cet enjeu concerne « tous les Etats et tous les peuples qui doivent coopérer à la tâche essentielle de l'élimination de la pauvreté qui constitue une condition indispensable du développement durable, afin de réduire les différences de niveau de vie et de mieux répondre aux besoins de la majorité des peuples du Monde » 142(*).

Plus précisément, dans le rapport Brundtland, il est fait mention à plus de solidarité venant des pays du Nord, mieux placés techniquement et financièrement envers le Sud, le but étant d'aider au décollage économique des pays en mal de développement qui sont également les plus affectés par les catastrophes naturelles les plus meurtrières, notamment par sécheresse (Afrique, Inde et Amérique latine) et inondations (Asie et Afrique).

A une autre échelle, la lutte contre la pauvreté et l'appel à la solidarité entre les hommes restent valables, car le plus souvent, les perdants dans les conflits environnement/ développement, ce sont les pauvres qui assument plus que leur part du coût de la pollution, par le biais des effets sur la santé, la prospérité ou les dommages aux écosystèmes143(*).

Par exemple, le rapport Brundtland constate que les inégalités ne font que s'accroître à mesure qu'un système s'approche de ses limites écologiques ; ainsi, au niveau d'une ville, quand la qualité de l'air se dégrade, les plus pauvres, dans leurs quartiers exposés, ont plus de problèmes de santé que les riches qui vivent dans des quartiers plus salubres 144(*).

b) le temps et les enjeux de la maîtrise du long terme 

La dimension temporelle du développement introduit une nouvelle conception des systèmes en portant les réflexions sur le long terme. Plus exactement, il s'agit d'articuler les différentes échelles temporelles afin de coordonner les actions de court terme avec l'enjeu d'équité intergénérationnelle.

L'introduction du long terme dans l'étude des systèmes implique une rupture de l'inertie des liaisons et des données constantes à court terme, en quelque sorte, il s'agit d'un véritable appel à la complexification du noyau dur de l'analyse économique, notamment par l'ouverture à d'autres champs du savoir : le social, l'historique, les relations des sociétés à leur environnement biophysique...

Deux enjeux liées découlent de cette complexification des représentations, compte tenu des structures chaotiques et complexes, l'incertitude (puisque l'incertitude croît avec l'éloignement dans le temps) et l'irréversibilité présent sur les mécanismes de prise de décision, d'anticipation. L'hypothèse d'un mécanisme fondamental régissant l'ensemble des phénomènes dans une conception déterministe cartésienne, n'est dés lors plus satisfaisante.

D'une part, l'incertitude « croît objectivement notamment du fait des révolutions technologiques et subjectivement parce que la science nous en rend plus conscients »145(*). L'incertitude est omniprésente dans tout le domaine des ressources naturelles et de l'environnement, qu'elle concerne l'évolution des techniques ou, de manière générale, la complexité des systèmes écologiques. D'autres part, l'émergence de phénomènes irréversibles à l'échelle de la vie humaine, comme la baisse de la couche d'ozone ou le renforcement de l'effet de serre contraignent les générations actuelles à plus de responsabilité, plus de prudence dans leur activité anthropique 146(*).

Le principe fort adopté à la conférence de Rio pour faire face à l'incertitude et à l'irréversibilité, est le principe de précaution (principe 15) mis en place en vue de protéger l'environnement. Ce principe postule qu'en cas de risque de dommages graves ou irréversibles, l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l'adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l'environnement. D'autres principes s'ajoutent et accompagnent son application : les principes de transparence, de démocratie, de responsabilité...

c) les enjeux liés à une perspective territoriale du développement durable 

L'analyse spatiale ne désigne pas une échelle particulière d'analyse, même s'il est vrai que le rapport Brundtland adopte un point de vue d'emblée global, concernant la planète dans son ensemble. Cependant, à maintes reprises, il est fait référence à des échelles infra-régionales (les villes) où une approche en termes de développement durable s'avère indispensable. Aussi, à travers notre approche territoriale, nous adopterons une échelle d'analyse à géométrie variable pouvant se décliner, suivant le cas d'étude, du très local (la ville) au très global (le vaisseau spatial terre)147(*).

Deux enjeux découlent de l'approche territoriale du développement durable :

L'approche territoriale148(*), déclinée sur l'axe territoire-Homme, reprend la notion d'équité, faisant apparaître un enjeu d'équité inter territoriale, bien que cette notion ne soit pas directement reprise dans le rapport Brundtland. Pourtant, l'un des lieux communs en matière de développement durable, c'est bien l'existence d'interactions écologique et/ou économique qui se manifestent à l'échelle planétaire (ou régionale).

Ce que nous entendons alors par équité interterritoriale, c'est l'ensemble des préoccupations visées par le rapport Brundtland, qui relèvent d'un problème de responsabilité (de droits et devoirs) des territoires entre eux.

Par exemple, le principe 2 de la Conférence de Rio, bien qu'il reconnaisse le droit souverain des Etats d'exploiter leurs ressources selon leur propre politique d'environnement et de développement, rappelle qu'il relève de leur devoir de faire en sorte que les activités exercées (dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle) ne causent pas de dommages à l'environnement dans d'autres Etats ou dans des zones ne bénéficiant d'aucune juridiction nationale (cas des biens de l'humanité).

D'après C. LACOUR, «tout développement, tout aménagement, à un moment donné sont censés correspondre à une nécessité et à des possibilités. Ils répondent à des demandes économiques d'un groupe, d'une collectivité. Cette production nulle bien souvent, va se faire par une destruction de l'état antérieur, qu'il soit naturellement sauvage ou naturellement construit » 149(*)

Ainsi, l'enjeu d'un aménagement rationnel du territoire est issu de la contrainte pour l'Homme de créer un développement, compte tenu de ses besoins mais sous conditions éthiques (induites, par exemple, par la notion d'équité).

Cet enjeu se décline à trois niveaux :

- le territoire perçu en tant que dotations de facteurs que l'homme organise en production (conception biocentrique), contraint celui-ci à le gérer rationnellement face aux risques d'épuisement du stock des ressources, d'où la nécessaire application de principe clés : nous distinguons le principe d'économicité qui vise à assurer la lutte contre la rareté qui frappe les ressources épuisables non renouvelables, et le principe de bonne gestion qui doit permettre la régénération des ressources renouvelables ;

- les actions directes de l'Homme sur le territoire (conception anthropocentrique) afin de l'aménager, de le transformer suivant les besoins et les connaissances techniques du moment, ne doivent pas se faire au détriment de l'environnement (respect des écosystèmes, paysage,...) ce qui l'oblige à adopter une vision intégrée de l'économie et de l'environnement ;

- enfin, le territoire perçu en tant que réceptacle de pollutions (conception technocentrique ou clinique), implique la prise compte de la capacité de charge des écosystèmes et des impacts environnementaux qui nuisent, en dernier ressort à l'Homme (catastrophes écologiques, effets délétères sur la santé,...).

La déclinaison à partir d'une trilogie mettant en jeu l'Homme, le temps et le territoire, nous a permis de déterminer les principaux enjeux de la problématique du développement durable (les trois équités intergénérationnelle, intragénérationnelle et inter territoriale, les deux enjeux liés à l'incertitude et à l'irréversibilité, l'enjeu d'un aménagement rationnel des territoires). Entre ces trois axes de réflexion décrivant une certaine philosophie politique, il s'établit une étroite complémentarité, interdisant toute lecture partielle du schéma, en raison notamment du principe de transversalité.

En définitive, notre approche du développement durable reste fidèle aux textes fondateurs, mettant en évidence l'enchevêtrement des problématiques qui la caractérise, chacun des enjeux ne prenant son sens qu'à travers une vision systémique de ces interactions.

I.2. Le développement durable, notion de recherche et catégorie de l'action

Depuis la conférence de Stockholm de 1972 sur l'environnement jusqu'à la conférence de Rio en 1992 sur l'environnement et le développement, on peut dire que la globalisation des solutions à apporter au problème de la dégradation de l'écosystème mondial s'est affirmée et que désormais la relation est établie entre la protection de l'environnement et le développement.

En effet, six termes ou expressions au moins ne peuvent pas en être dissociés : l'environnement, le patrimoine, l'éthique, la culture et la gouvernance.

Chacun de ces termes correspond à un important courant tant sur le plan de la réflexion que sur le plan de l'action. Nous tenterons d'expliciter ces différents termes en quelques formules qui montrent les rapprochements entre la notion de développement durable et chacun de ces termes.

I.2.1. Développement durable et gouvernance

La gouvernance est devenue un mot clé et une solution universelle au développement durable. L'expression pourtant vient du monde de l'entreprise 150(*).

La gouvernance est un concept, à l'origine économique, qui apparaît dans les travaux de R. COASE 151(*) qui défend que des solutions négociées peuvent se prendre avantageusement sans recours à l'Etat. La Banque mondiale a popularisé le concept à la suite des échecs des plans d'ajustement structurel imputés au manque de pouvoir moral et à la désorganisation des Etats des pays aidés.

De façon générale, la gouvernance désigne l'ensemble des relations de pouvoir au sein d'une société, ainsi que les modes d'arbitrage entre les différents détenteurs de pouvoirs. Le gouvernement désigne l'exercice du pouvoir politique sur une communauté d'individus et, par extension, le pouvoir qui dirige un Etat. Le gouvernement n'est qu'un des acteurs de la gouvernance.

La gouvernance au service du développement durable a un contenu original. En imposant une transformation des formes de la décision et de l'action publique ainsi que des institutions, elle contient une éthique des comportements (lutte contre la corruption ou contre la délinquance écologique, transparence...) et de la précaution dans les actions à entreprendre, et elle favorise les partenariats garants de l'intégration des dimensions sociales et environnementales. Concrètement, c'est un processus décisionnel continu et coopératif entre des acteurs ayant des intérêts différents, voire conflictuels.

Un exemple de gouvernance152(*) appliquée au développement durable est celui lié aux négociations internationales autour du changement climatique. A la suite de la convention sur le changement climatique signé en 1992 à Rio, les Etats les plus riches se sont engagés à ramener, au plus tard en l'an 2000, leur émission de gaz à effet de serre à leur niveau de 1990. en décembre 1997, cette convention a été complétée par le protocole de Kyoto. Ce dernier, plus contraignant, impose aux pays industrialisés de réduire, d'ici 2012, leurs émissions d'au mois 5% par rapport à leur niveau de 1990. ce n'est qu'en novembre 2001, à Marrakech, que les pays signataires du protocole sont parvenus à un accord sur les modalités d'application permettant de le rendre enfin opérationnel.

Par conséquent, le choix et la mise en oeuvre effective des politiques et instruments relèvent essentiellement d'un processus politique et font l'objet de négociations entre l'ensemble des acteurs. Une validation de ce choix par les différents acteurs, sous la forme d'un consensus ou d'un arbitrage conflictuel entre eux, s'avère nécessaire pour assurer sa légitimité et éviter les conflits concernant son interprétation et son utilisation.

Par ailleurs, les politiques, mesures et instruments qui seront retenus lors des différentes phases du processus de négociation sont par nature évolutifs. La pertinence d'une négociation est donc établie dans le contexte des projets et des préoccupations d'une société, voire dans le contexte d'un projet de société.

Il s'avère donc qu'une bonne gouvernance153(*) est indispensable pour un développement durable. L'exercice n'est pas facile, car il suppose de trouver les justes niveaux d'expression, de diversifier les formes de décision et d'encourager la démocratie participative, de délivrer une information transparente globale et solide, de constituer un dialogue libre et constructif, de multiplier les partenariats, de favoriser la transversalité, de croiser les logiques et pratiques sectorielles, de développer des procédures d'évaluation continue collectives et contradictoires...

Le Programme des Nations Unies pour le développement donne la définition suivante : « La gouvernance peut être considérée comme l'exercice des pouvoirs économique, politique et administratif pour gérer les affaires des pays à tous les niveaux. Elle comprend les mécanismes, procédés et institutions (...). La bonne gouvernance est (...) participative, transparente et responsable. Elle est aussi efficace et équitable. La bonne gouvernance assure que les priorités politique, sociales et économiques sont fondées sur une large consensus dans la société et que les voix des plus pauvres et des plus vulnérables sont au coeur du processus de décision sur l'allocation des ressources pour le développement »154(*).

Le souhait de fonder un développement durable sur le volontariat des entreprises plutôt que sur des politiques environnementales publiques est une tendance lourde.

Par exemple155(*), dans le cadre de la préparation du sommet mondial pour le développement durable qui a eu lieu à Johannesburg du 26 août au 4 septembre 2002, les Nations-Unies, dans les documents préparatoires, ont mis l'accent sur les alliances entre le secteur public et le secteur privé. Pour les experts, ces alliances constitueraient un vecteur puissant de création de capacités, de transferts de technologie et une passerelle entre l'aide publique au développement et les investissements étrangers directs.

En effet, en présence d'incertitudes fortes dans l'avenir sur les conventions environnementales, un élément clé de la coordination économique est l'intervention de partenariats collectifs pour offrir des connaissances et visions du monde communes et de nouvelles normes de comportement ayant un effet de légitimation d'une orientation ou d'une préoccupation donnée.

Dans ce contexte, la définition d'une bonne gouvernance est d'autant plus importante qu'il est difficile de faire l'hypothèse que les évolutions dans les comportements publics, les régulations environnementales ou les pratiques stratégiques des firmes satisferont automatiquement aux conditions de durabilité économique, sociale et écologique.

En somme, les réflexions sur les modes de gouvernance au service d'un développement durable induisent de nouvelles méthodologies inhérentes à l'élaboration des normes, des réglementations, des mesures économiques et d'aide à la décision. Elles conduisent à mettre en oeuvre des systèmes d'apprentissage collectif basés sur des processus consultatifs et participatifs. L'interaction au sein de ces dispositifs engendre une légitimité des mesures environnementales retenues.

Par exemple, le récent développement de certains instruments de protection de l'environnement tels que les engagements volontaires ou les écolabélisations, souligne l'évolution du cadre institutionnel des politiques environnementales. Cette tendance croissante à réunir des parties prenantes hétérogènes revient ainsi à réaffirmer les principes du développement durable.

I.2.2. Développement durable, culture et patrimoine

Les notions de patrimoine et de développement durable se recoupent de trois manières au moins.

En premier lieu, elles sont toutes deux fondées sur l'idée d'une obligation de solidarité intergénérationnelle :

Donc, qui dit patrimoine dit héritage devant être transmis à la génération suivante156(*), qui dit développement durable dit développement « qui répond aux besoins et aux aspirations de l'actuelle génération sans compromettre la possibilité pour les générations futures de satisfaire les leurs »157(*).

En second lieu, la notion de patrimoine donne à cette solidarité un contenu : ce qu'il faut précisément considérer comme patrimoine. De ce point de vue, on peut dire qu'elle complète la notion de développement durable : elle dit que celui-ci ne peut être défini tant que ce qui doit être transmis n'est lui-même pas défini.

Inversement, on peut dire que la notion de développement durable implique celle de patrimoine. C'est d'ailleurs ce qu'exprime - et c'est là le troisième recoupement entre les deux notions - l'élargissement de la notion de patrimoine au patrimoine dit naturel. On retrouve là les préoccupations environnementales qui sont au coeur de la conception d'un développement durable. De même que l'on retrouve l'idée de solidarité planétaire dont est empreinte la notion de développement durable dans la notion de «  patrimoine commun de l'humanité » (qui est appliquée tout particulièrement, précisément, au patrimoine158(*) « naturel »).

Dans un autre côté, le renouvellement des ressources a une dimension culturelle évidente dès lors que l'on définit assez largement le domaine de la culture. Les ressources culturelles incluent, par exemple, les sites, les paysages, les monuments, les objets et les documents associés aux activités humaines présentes et passées. Elles ont aussi un aspect immatériel comme les mythes, les idées, les normes sociales, la langue que chaque génération reçoit, enrichit et transmet. La plupart des ressources culturelles sont uniques et non renouvelables. Elles sont apparues ou ont été délibérément créées dans des lieux particuliers, à des dates déterminées, par des individus donnés.

La durabilité relative à l'environnement et à la présentation des ressources culturelles est donc largement complémentaire : les valeurs culturelles et l'histoire des populations représentent des adaptations ou des réponses à l'environnement. La préservation de la biodiversité et la préservation des langues moins diffusées sont deux versants d'une même protection des dangers qui pourraient naître d'une réduction des espèces et d'une uniformisation des modes de vie et des langages. C'est là un souci qui anime les défenseurs des « peuples premiers »159(*) et que partagent tous ceux qui se préoccupent des dimensions territoriales et culturelles du développement durable.

Aux côtés de la culture et de ses déclinaisons matérielles et spirituelles, l'espace constitue certainement une dimension fondamentale des processus orientant le développement durable. Le choix des outils d'aide à la décision et des moyens à mettre en oeuvre peuvent changer selon l'entité spatiale considérée. Les dimensions locale, régionale ou nationale du développement contiennent différentes facettes de la préservation de la qualité de l'environnement, de la nécessité de diminuer la production de déchets ou encore des modalités de gestion des ressources naturelles multifonctions.

Dans ce contexte, les formes de gouvernance guidant le développement durable sont nécessairement liées à l'histoire des populations concernées, à leurs pratiques culturelles et à l'espace qu'elles occupent à un moment donné.

I.2.3. Développement durable et éthique

La question de l'éthique hante de plus en plus notre société, au risque de devenir un sujet à la mode. Il s'agit pourtant d'un sujet, qui met chacun d'entre nous, individuellement ou collectivement, face à ses responsabilités d'être humain. L'objectif de ce paragraphe est de s'interroger sur la signification de ce recours à l'éthique. Sur sa pertinence par rapport aux enjeux posés par le développement durable.

Sur le plan philosophique, l'éthique vise à rationaliser les comportements collectifs sur une base juste. Elle est propre au groupe dont elle renforce la cohésion et l'identité. L'approche éthique considère que l'idéal de ce qu'il est bon de faire procède d'une construction personnelle. Cet idéal s'enracine dans la recherche par chacun d'une vie heureuse. L'éthique est plus une élaboration, une démarche progressive, dans laquelle chacun cherche à développer le meilleur de lui même. L'éthique s'intéresse aux conséquences des actes ; elle est associé à la responsabilité, destinée à être opérationnelle dans la société160(*).

Là, ce n'est pas à proprement parler le terme d'éthique lui-même qui est en cause, mais la montée en puissance de l'idée qu'il contient. C'est donc à quel moment la notion de développement durable prend place dans ce contexte général d' « éthicisation » 161(*).

Face à la double crise de l'environnement et du développement et la difficile réconciliation de ces réalités, on est amené de plus en plus à évoquer un recours à l'éthique, c'est-à-dire solliciter de nouvelles règles de conduites capables de dénouer la crise dont il est question. Le développement vu sous l'angle de la durabilité demande un changement des schémas actuels de production et de consommation économique.

Le problème c'est comment atteindre, lorsqu'on connaît les différences qui existent sur ce plan entre le nord et le sud ? c'est pourquoi, et juste titre d'ailleurs, que la commission Brundtland s'était préoccupée de l'éthique de l'équité. Il faudrait donc corriger l'inéquité, en ce sens que la crise de l'environnement n'est pas seulement écologique mais aussi politique, car préserver l'environnement c'est aussi se préoccuper d'équité entre les individus et les nations en tenant compte prioritairement des besoins des plus démunis.

Ainsi, la notion d'équité fait partie intégrante du concept de développement durable et il ne saurait y avoir de développement sans sa promotion. Alors le nord va t-il consentir à modifier son mode de vie ses technologies et ses aspirations à plus de bien-être pour laisser au sud, l'espace écologique indispensable à son développement ? Que de bouleversements à prévoir dans la perception et les comportements vis-à-vis de l'environnement une nouvelle tache est à entreprendre, et il appartiendra à tous de tisser de nouveaux liens sur la base d'une responsabilité commune pleinement partagée pour établir un contrat nouveau qui assurera autrement les solidarités.

D'un autre côté, ceux qui attirent l'attention sur ce problème rappelant que le texte qui est pour eux fondateur de la notion (le rapport Brundtland), il est clair que c'est d'abord une idée de progrès social et de justice sociale qui l'anime. Et pour eux, le terme de sustainable doit être pris dans son sens fort de « soutenable », autrement dit de « défendable ». on retrouve là la notion d'équité : l'éthique réapparaît pleinement. S'appliquant à l'ensemble de la définition de la notion de développement durable, elle est même pour le coup étendue à ses dimensions économiques et écologiques.

Au terme de ces analyses, on peut donc compléter la définition habituelle du développement durable en précisant que c'est un développement soucieux de ménager l'environnement, reposant sur le respect du principe de précaution, fondé sur une éthique patrimoniale, c'est-à-dire sur l'idée d'un patrimoine à transmettre dans son intégrité et d'une responsabilité des générations présentes par rapport aux générations futures.

Section II. Le développement durable : aspect théorique

Comme , nous venons de l'aborder dans la première section, la question des rapports entre la nature, le patrimoine, l'éthique et le développement durable a suscité une place centrale dans les milieux scientifiques que politiques mondiaux. La problématique du développement durable recherche les modalités d'intégration entre la sphère économique et la biosphère.

Cependant cette réponse est restée largement ambiguë au niveau théorique propre à la science économique.

Il n'existe pas une théorie du développement durable, mais un ensemble d'interprétations qui partent toutes d'une définition : « le développement durable est un développement qui permet de répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs »162(*). Nombreux sont les auteurs ayant mis l'accent sur le « flou conceptuel» qui en émane (comme TURNER, FAUCHEUX, FROGER, NOEL, PEARCE, SACHS, etc.).

En effet, reprenant la typologie proposée par TURNER163(*), la soutenabilité (ou durabilité) déclinée suivant son degré d'intensité (très faible, faible, forte, très forte) peut tout autant relever d'une analyse dite « anthropocentrée» ou alors « écocentré»,164(*) aux conclusions antinomiques.

Ainsi, le courant théorique qui fait primer l'intérêt de l'homme coeur de l'analyse, est, par excellence, le courant néoclassique à la soutenabilité très faible. En revanche, le courant qui défend avant tout les intérêts de la nature, est, le courant écologique de la « Deep Ecology», à la soutenabilité très forte.

Chacun de ces courants raisonne en termes d'exclusivité du champs étudié, qu'il soit économique ou écologique, ce qui fait dire à certains auteurs qu'ils relèvent d'une rationalité substantielle165(*).

A contrario, les deux autres courants aux soutenabilités faible et forte (respectivement, l'école de Londres et le courant de l'économie écologique), recherchent un arbitrage cohérent entre les deux sphères économique et écologique. Leur approche relève alors d'une rationalité procédurale caractérisée par la mixité.

Les deux autres derniers courant (respectivement, l'éco-développement, la gestion patrimoine) sont réellement procéduraux et l'articulation des trois logiques166(*) y est la plus équilibrée.

Nous allons procéder à une rapide présentation des écoles mentionnées ci-dessus, mettant en évidence la dérive théorique qui affecte le concept.

II-1 Les modèles substantiels  167(*)

Les modèles substantiels sont successivement, le courant néoclassique et le courant écologique profond (la Deep Ecology). Ces modèles sont marqués par la prééminence de la rationalité substantielle. Pour traiter les problèmes de l'intégration de l'économie et de son environnement, du développement soutenable, elles ne cherchent pas à concilier, confronter diverses rationalités, elles intègrent (ou excluent) simplement de leur « système autocentré» les objets qu'elles veulent traiter. Pour bien comprendre, nous analyserons les deux courant successivement.

II.1.1. Le courant néo-classique

Selon PEZZEY 168(*), la définition standard du développement durable, interprétée par le courant néo-classique, se résume à l'utilité non décroissante du capital par tête. Cette définition renvoie à la vision d'une soutenabilité « très faible» puisque seule la dimension économique (l'utilité retirée du capital) est prise en compte dans le raisonnement.

Egalement, R. PASSET169(*) a montré comment la théorie économique depuis ses débuts (avec les Physiocrates) s'est progressivement renfermée sur elle-même, formant un système extrêmement cohérent et intégré dont l'archétype est la théorie économique standard. Dans ce mouvement historique, elle s'est progressivement coupée de la dimension naturelle, écologique. Les ressources naturelles (notamment renouvelables ne sont pas monétarisables, elles n'ont pas de prix. En tant que phénomène hors marché, elles sont donc évacuées de la science économique. Le mécanisme par lequel la théorie néo-classique réagit aux problèmes environnementaux (pollution et épuisement des ressources) est se base sur quatre postulats fondamentaux 170(*)que nous aurons à traiter, point par point.

1) Une vision utilitariste du bien-être social 

D'une manière générale, les économistes néoclassiques conçoivent la société comme un ensemble d'individus libres et égaux qui maximisent leurs utilités (ou bien être) par l'intermédiaire du marché. Cette vision utilitariste du bien-être repose sur la construction de fonctions de bien-être social où l'ensemble des décisions individuelles permet de diriger l'activité économique dans les directions qui aboutissent à la plus grande utilité totale (optimum social de Pareto171(*)).

2) La possibilité de substitution entre les capitaux 

Compte tenu de la définition retenu de la durabilité, il est postulé que la substituabilité entre les arguments de la fonction d'utilité (bien de consommation et bien d'environnement) sont équivalents. Cette équivalence est rendue possible grâce à la traduction monétaire de la valeur de l'environnement, HARTWICH a établi que les rentes issues de l'exploitation d'une ressource épuisable doivent être investies dans des actifs reproductibles pour que ces derniers puissent se substituer aux imputs ressources naturelles.

3) Une optimisation intertemporelle 

La non-décroissance du capital dans le temps se fonde sur la recherche d'une équité entre les générations inspirée des travaux de J. RAWLS et son incontournable « théorie de la justice»172(*). Le critère retenu en vertu du principe d'équité entre les générations est celui du « maximum  » qui cherche à maximiser l'utilité de la génération la moins favorisée.

4) Les pollutions en tant qu'externalités 

Dans la tradition classique de l'utilitarisme, seules les activités de production et de consommation sont prises en compte par le marché qui détermine le prix de tout bien et service. Dans cette perspective, l'environnement n'a pas de valeur en soi, en raison même de sa « gratuité ».

En fait, pour que l'environnement soit pris en compte par la sphère économique, il faut lui affecter une valeur monétaire. Ainsi, en cas de pollutions, la tradition Pigouvienne les assimile à des effets « hors marché» (à des effets externes) qu'il est nécessaire d'évaluer en termes monétaires afin d'en faire supporter privativement les coûts à travers un système de taxation (procédure dite d'internationalisation des effets externes).

Les auteurs néoclassiques les plus optimistes peuvent ainsi écrire, à la manière de Wilfrid Beckerman (1972, p. 327), que « le problème de la pollution de l'environnement n'est qu'une simple question de correction d'un léger défaut d'allocation de ressources au moyen de redevances de pollution»173(*). Ainsi, les pollution ne sont perçues qu'en tant qu'externalités, c'est à dire, en tant que phénomène hors marché qui affectent la sphère économique.

En revanche, les problèmes environnementaux proviennent d'une mauvaise détermination des droits de propriété des « biens libres», l'intervention étatique n'est donc pas nécessaire puisqu'il suffit de répartir des droits d'utiliser l'environnement (les droits à polluer) pour inciter les agents économique à gérer efficacement les biens environnementaux. L'environnement n'est donc pas véritablement pris en compte dans l'analyse néo-classique pure. A l'opposé des courant néoclassique, l'approche écologique développe une autre argumentation du développement durable.

II.1.2. Le courant écologique profond

Le courant de la  Deep Ecology  s'est constitué en réaction contre l'approche économique conventionnelle dont il récuse la  foi démesurée à l'égard du progrès technique et des possibilités de substitution. Il repose sur un système de valeurs conférant aux espèces non humaines des droits moraux. La  Deep Ecology s'élève contre les conséquences prédatrices de la rationalité économique et l'utilitarisme qui la sous-tend.

Ce courant ne doit pas être confondu avec la science de l'écologie174(*), et qui s'articule principalement autour de considérations éthiques s'appliquant à tous les éléments de la nature et pas seulement à l'homme, et débouche généralement sur des positions conservationnistes extrêmement rigides. C'est également l'aspect non anthropcentré ou plus précisément « biocentré » de cette conception qui nous fait la rapprocher de toutes celles qui insistent sur le primat de la nature sur l'homme.

Pour le courant écologique profond d'A. LEOPOLD, « les effets d'échelle ont atteint ici les limites à ne pas dépasser, il faut minimiser les taux d'énergie et d'utilisation des matières, il faut viser la stagnation économique (croissance 0) et démographique par les moyens de contraception ou d'abstinence, qui stimulent les productions d'échelle. la seule croissance économique acceptable est celle qui est qualitative»175(*).

Dans cette perspective , la soutenabilité de notre mode de développement passe par la promotion de la diversité écologique et culturelle176(*), la planification décentralisée et le développement des écotechniques. Cette vision de la soutenabilité est qualifiée de « très forte» puisque seule la vision écologique est prise en compte dans le raisonnement. Les trois hypothèses suivantes constituent le fondement de cette analyse.

1) Une vision systématique et hiérarchisée des relations environnement-économie 

La nature est décrite en tant qu'un monde de procédés dans un état continuel de flux où les systèmes les plus larges (comme la sphère écologique) changent plus lentement que le systèmes les plus petits (comme la sphère économique). En outre, tous les processus du système sont reliés les uns aux autres, les systèmes écologiques ayant des capacités variables à résister aux pressions et chocs (résilience des systèmes écologiques). Subséquemment, il est préférable de viser une amélioration qualitative du développement économique, ce qui passe par une limitation des croissances démographique et économique (croissance 0).

2) Le refus d'une approche monétaire des biens environnementaux 

L'approche néoclassique, qui traduit en termes monétaires les effets délétères des pollutions, ne peut qu'être réductionniste car l'environnement représente un système plus large que le système économique. En vertu de cette caractéristique, ce sont donc les lois écologiques qui doivent s'imposer au système économique, et non l'inverse. en outre, l'évaluation monétaire des biens environnementaux est, de toute façon, techniquement difficile à mettre en place et idéologiquement peu souhaitable puisqu'elle est le moyen technique d'assurer la substitution entre le capital naturel et le capital productif partant. La soutenabilité ne peut donc être mesurée qu'à l'aide d'indicateurs physiques, véritables étalons invariants et stables dans le temps.

3) La préservation de la nature comme sujet de droits 

 

L'intégration de la préservation de la nature en tant que contrainte dans le raisonnement économique pour des raisons éthiques, idéologiques, et non pas en raison de son seul enjeu économique, comme le laisse entendre l'approche néoclassique. A la valeur d'usage de l'approche subjective néoclassique, la « Deep Ecology » oppose une valeur en soi propre à la faune et à la flore, indépendamment de leur utilité pour l'Homme177(*). Les biens environnementaux possèdent donc une valeur intrinsèque détachée de tout usage, même futur.

Certains tenants de la «Deep Ecology » (DEVALL et SESSIONS) 178(*), par exemple, vont très loin dans leur affirmation de la valeur intrinsèque, puisqu'ils postulent l'égalité des valeurs intrinsèques, ce qu'ils appellent « l'égalité biocentrique»: « toutes les choses présentes dans la biosphère ont un droit égal à vivre et à s'épanouir, et à atteindre leurs formes individuelles de déploiement et de réalisation, grâce à la prise de conscience qu'à une plus vaste échelle tous les organismes et entités de l'écosphère, en tant que parties interreliées d'un tout, sont égaux en valeur intrinsèque »179(*).

Dans cette perspective, « le développement soutenable se définirait comme un développement ne portant pas atteinte aux autres formes de vie terrestre », ainsi que le fait remarquer HATEM (1990) 180(*), ce qui peut paraître, pour le moins, une vision extrêmement réductionniste.

L'espace humaine n'est privilégiée en aucune façon. La nature, en semble des écosystèmes, est considérée comme ayant seulement objet de droits humains. Dans cette perspective, la substitution entre les capitaux, envisagée par les néoclassiques, est jugée inacceptable, et donc, la solution consiste à maintenir constant le stock de capital naturel ce qui revient à dire que la nature doit rester en l'état, en réponse au principe d'équité intergénérationnelle 181(*).

De même, la  Deep Ecology se méfie d'un excès de confiance (des néoclassiques) envers le progrès technologique car il contribue à accélérer la substitution entre les deux formes de capitaux naturel et artificiel. Systématiquement à la rationalité économique substantielle néoclassique, le modèle de la  Deep Ecology dégage une rationalité écologique substantielle.

Les deux approches substantielles ont donc pour point commun de faire découler leurs analyses et en conséquence leurs prescriptions pour l'action, d'un équilibre, d'un optimum expression même de leur rationalité exclusive. Les approches qui vont suivre font au contraire dialoguer dans leur système théorique les contraintes économiques et les contraintes écologiques.

II.2. Les modèles mixtes

Les modèles mixtes tentent d'articuler de façon équilibrée les différentes logiques afin de traiter le problème du développement soutenable. Ils sont, néanmoins, dominés en dernier recours (certains plus que d'autres) par la logique écologique. Nous analyserons ces modèles mixtes successivement : l'École de Londres et le courant de l'Économie Écologique.

II.2.1. L'École de Londres 

L'optique du développement soutenable propre à D. PEARCE et à ses collègues constitue une avancée importante puisqu'elle met l'accent sur la préservation de l'environnement en l'articulant avec les exigences de la croissance économique. Elle se situe alors à mi-chemin entre les analyses conduisant à la soutenabilité faible et celles de la soutenabilité forte. Toutefois elle se heurte à des limites dans la détermination des règles et indicateurs de soutenabilité.

L'École de Londres vise à conserver des proportions ou des composantes de stocks de capital naturel, mesurés physiquement et évalués monétairement, se basant sur l'approche thermodynamique et l'idée de complémentarité entres les capitaux technique et naturel, et du respect de la diversité écologique.

D. PEARCE 182(*) et son équipe se sont inspirés des travaux de BAUMOL et OATES (1971). Ces derniers, en réaction contre l'approche Pigouvienne, ont proposé que la rationalité écologique intervienne comme facteur limitant vis-à-vis de la rationalité économique (et non dominant).

La « séquence d'optimisation » se décompose alors en deux étapes :

1) L'objectif de soutenabilité écologique fixe les limites de pollution ou de consommation à ne pas dépasser (constitution de normes).

2) Compte tenu des contraintes écologiques, physiques, la rationalité économique de terminer un optima de second rang recherchant à minimiser le coût.

Dans cette perspective, la soutenabilité retenue est qualifiée de faible puisque, en dernier ressort, c'est l'efficacité économique sous contrainte écologique qui permet d'orienter la prise de décision. Trois postulats fondamentaux caractérisent l'approche de l'École de Londres 

1) Le refus d'une substituabilité infinie entre les capitaux 

 

D'après le critère de soutenabilité retenu, un minimum de capital naturel doit être préservé, et donc, le principe de substitution183(*) ne s'applique que de façon limitée. Les capitaux reproductibles doivent être perçus comme complémentaires à ceux qui ne le sont pas. Cette complémentarité devant assurer la comptabilité entre la recherche de l'efficacité économique d'une part, et la contrainte de respect de l'environnement, d'autre part.

En effet, comme le fait remarquer TOMAN (1992) 184(*), il existe une relation positive entre l'échelle du dommage potentiel au capital naturel, le degré d'irréversibilité et l'importance de l'injustice infligée aux générations futures. Dans ces conditions, une distinction serait souhaitable. Le capital naturel dont la dégradation potentielle est réversible et porte sur une petite échelle peut être traité par des critères d'efficience économique traditionnelle.

En revanche, le capital naturel dont la dégradation risque d'être irréversible et sur une grande échelle devrait avoir un usage soumis à des contraintes a priori. L'hypothèse de substituabilité entre capital manufacturé et capital naturel est jugée pertinente quand les fonctions économiques et productives du capital naturel sont concernées. Toutefois, lorsque des fonctions de « survivabilité » du capital naturel sont en jeu, cette hypothèse doit être abandonnée au profit de celle de complémentarité.

2) Le concept de valeur économique totale (V.E.T) 

 

L'école de Londres a certes montré l'intérêt de la conservation d'un stock minimal de capital critique, mais elle n'a pas accordé toute l'attention nécessaire aux problèmes de la mesure de ce stock de capital. C'est la raison pour laquelle les membres de L'école de Londres retombent sur l'évaluation monétaire du stock de capital naturel afin d'agréger les différents actifs environnementaux, tout en soulignant le caractère réductionniste de cette procédure par rapport à l'objectif initial d'évaluation en termes physiques.

Donc, L'école de Londres adopte un raisonnement en termes de V.E.T ce qui permet de dépasser les problèmes d'évaluation monétaire de l'environnement liés à l'incertitude, à l'irréversibilité ou à l'évaluation de valeurs non économiques. En effet, la V.E.T. comprend à la fois les valeurs de non-usage. L'avantage d'un tel mode de calcul réside donc dans sa capacité de concilier logique économique (valeur d'usage) et logique écologique (valeurs intrinsèques de non-usage).

3) Les trois règles de durabilité 

L'École de Londres, compte tenu des objectifs sur-cités, édicte trois catégories de contraintes écologiques qui encadrent la fonction d'utilité (D. PEARCE, 1988) :

Règle1 : le taux d'utilisation des ressources renouvelables ne doit pas excéder le taux de renouvellement naturel.

Règle2 : les ressources épuisables doivent être extraites à un taux permettent leur remplacement par des ressources renouvelables (possibilité de substitution limitée entre le capital naturel et le capital physique), cette règle est complétée par l'application d'un principe d'efficience qui vise à améliorer l'efficacité de la fonction productive accordant ainsi une confiance raisonnable envers l'évolution du progrès technique.

Règle 3 : les émissions de déchets ne doivent pas excéder la capacité d'assimilation des écosystèmes.

Cette approche n'utilise donc que des critères économiques pour évaluer la norme environnementale et pour déterminer les moyens les plus efficaces de l'atteindre. Une telle ambiguïté rapproche, là encore, cette analyse de celles de la soutenabilité faible.

L'approche de l'École de Londres ne se situe donc plus dans un cadre strict de rationalité substantielle. L'idée d'une procédure (bi-dimensionnelle) d'optimisation y est introduite, on a ainsi une articulation de la rationalité procédurale et de la rationalité substantielle.

II.2.2. Le courant de « l'économie écologique »

FAUCHEUX, FROGER, NOEL, 185(*) peuvent être considérés comme des continuateurs de R. PASSET186(*). L'intérêt de leur analyse est de vouloir fonder un modèle de développement soutenable (explicitement) sur rationalité procédurale : « l'enjeu pour la mise en oeuvre de véritables analyses et modèles de développement soutenable semble résider dans la prise en compte simultanée et équitable de diverses rationalités».

Ils donnent une grande place dans leur analyse aux institutions (en s'inspirant notamment des travaux d'O. GODARD187(*)) : « Une approche du développement soutenable obéissant à une rationalité procédurale appelle le renouvellement des institutions». Le dispositif institutionnel doit comporter des fonctions propres pour chacune des institutions, mais aussi des fonctions partagées entre elles pour les enjeux de nature conflictuelle.

L'Économie Ecologique dénonce le risque du manque de soutenabilité écologique en indiquant une sous-évaluation des fonctions et processus de support de vie, et une perte de résistance des écosystèmes face aux pressions et chocs exogènes. La perte de capital naturel accentue la vulnérabilité écologique des systèmes naturels, ce qui est jugé inacceptable compte tenu des effets de seuil des écosystèmes. Ce que nous propose l'économie écologique, c'est de dépasser les disciplines économique et écologique conventionnelles pour aller dans le sens d'une véritable synthèse intégrée188(*). Dans cette perspective, nous qualifierons la soutenabilité en question de « forte». Deux postulats fondamentaux sous-tendent cette théorie.

1) L'approche durable de l'économie écologique passe par l'approche écoénergétique 

L'interprétation thermodynamique de l'économie considère Celle-là comme un « système quasi-vivant» (PASSET, 1979). L'interdépendance dynamique (existence d'effets de rétroaction) entre l'économie et l'écologie débauche sur des limites fixées par les écosystèmes au système économique.

A l'instar de l'école de Londres, l'économie écologique définit, dans un premier temps, l'espace à optimiser , dans la limite des contraintes environnementales. En revanche, à la différence de l'école de Londres, monétarisation des contraintes n'est pas systématique car, par certains aspects, elle peut apparaître appauvrissant. Les principes thermodynamique vont ainsi servir de référence pour mesurer l'efficience économique des projets à l'aide d'indicateurs comme le taux de rendement énergétique ou le taux d'investissement énergétique189(*).

2) Une approche institutionnaliste de l'environnement 

Compte tenu du caractère complexe et incertain propre à l'économie de l'environnement, l'économie écologique reconnaît les limites d'une rationalité substantielle et s'emploie donc à appliquer une méthodologie relevant plutôt d'une rationalité procédurale.

Ainsi, le marché n'est pas perçu comme la seule forme d'institution possible pour coordonner la décision, d'autres formes, comme par exemple, l'arbre de soutenabilité190(*) construit par ( FAUCHEUX, NOEL, 1995), permettent d'atteindre une solution globalement satisfaisante c'est à dire une solution de second rang, économiquement efficace et écologiquement prudente.

L'arbre de soutenabilité a pour objectif de décomposer l'objet global de soutenabilité du développement en sous-objectifs de soutenabilité selon trois filtres : sous-objectif biophysique, sous-objectif social191(*), sous-objectif économique. Chacun de ces sous-objectifs peut lui même être éclaté en plusieurs sous-sous-objectifs. Le processus de dissociation s'arrête précisément au moment où chaque sous-sous-objectifs est mesurable de façon homogène.

Les modèles mixtes tentant d'arbitrer avec des dosages différents entre rationalité substantielle et rationalité procédurale pose donc comme principe que le problème de l'intégration de l'économie et de l'environnement ne peut se résoudre que sur des modalités multidimensionnelles. Il est notable que ces modèles restent relativement abstraits et globaux, oublient le concret et le local ; et ont des difficultés à traiter ce que nous avons appelé le critère politique.

Leur caractère procédural en est affecté : peu de méthodes, peu de méthodologies, d'outils analytiques concrets qui permettent de loger la rationalité dans la procédure de résolution des problèmes environnementaux, l'univers de la décision, espace privilégie d'épanouissement de la rationalité procédurale et de l'action, n'est pas véritablement pénétré.

Les deux modèles qui vont suivre sont peut être les seuls réellement procéduraux. Ils réalisent une articulation plus équilibrée entre les trois logiques. Ils se complètent d'ailleurs remarquablement.

II.3. Les modèles procèduraux

L'éco-développement et la gestion patrimoniale, sont réellement procéduraux et l'articulation des trois logiques (politique, économique, écologique) y est la plus équilibrée.

II.3.1. L'Éco-développement

La prise de conscience des effets de la pollution auxquels donne lieu la croissance économique ne date pas d'aujourd'hui. Les problèmes de la pollution ont déjà fait l'objet d'une première vague de réflexion dés la fin des années soixante. Cette prise de conscience a donné lieu au concept d'Éco-développement conçu comme une nouvelle approche du développement, fondée sur la satisfaction des besoins endogènes avec respect  de l'environnement. Ce modèle est la problématique la plus globale en matière de développement durable.

I. SACHS192(*) donne au concept des fondements philosophiques et éthiques. Selon ce modèle l'homme n'a pas seulement des besoins matériels, il a des besoins non matériels qui doivent être pris en compte : ils comprennent le libre à la culture, la possibilité d'exercer une activité créatrice dans un environnement de travail approprié, la convivialité et une participation active à la conduite des affaires publiques.. la relation homme/nature est fondamentalement positive : « la nature est un jardin qu'il faut cultiver en développant les facultés créatrices de l'homme».

Selon I. SACHS, « l'écodéveloppement est un développement des populations par elles-mêmes, utilisant au mieux les ressources naturelles, s'adaptant à un environnement qu'elles transforment sans le détruire [...] C'est le développement lui-même, tout entier, qui doit être imprégné, motivé, soutenu par la recherche d'un équilibre dynamique entre la vie et les activités collectives des groupes humains et le contexte spatio-temporel de leur implantation. » 193(*)

Cette durabilité sociale, économique, écologique, spatiale et culturelle, comme I. SACHS194(*) la désigne désormais, est assurée par la prise en compte de trois dimensions essentielles à ce qu'est un développement des sociétés :

1) L'autonomie des décisions  et la recherche de modèles de développement endogènes propres à chaque contexte historique, culturel et écologique. Les populations doivent définir leurs besoins de manière autonome. Il leur faut explorer des « styles de développement », comme l'explique I. Sachs, des « styles de vie » 195(*) compatibles avec le contexte culturel, institutionnel et écologique qui est le leur. Cela suppose la mise en place de stratégies de transition, qui devraient s'étaler sur trois ou quatre décennies, en tenant d'agir à la fois sur la demande et sur l'offre de biens e de services ;

2) La prise en charge équitable des besoins de tous les hommes et de chaque homme, des besoins matériels et immatériels, à commencer par celui de se réaliser à travers une existence qui ait un sens, qui soit un projet; ce qui suppose aussi une solidarité diachronique avec les générations futures et une solidarité synchronique avec la génération présente ;

3) La prudence écologique, c'est-à-dire la recherche d'un développement en harmonie avec la nature. « L'échelle de l'intervention humaine de la nature, a atteint aujourd'hui des proportions suffisamment dangereuses pour la prudence écologique devienne la règle »196(*). Il y a là une idée qui préfigure ce que l'on désigne désormais comme le principe de précaution.

La mise en cohérence de ces différentes exigences doit être assurée par un planificateur. L'écodéveloppement, déclare I. SACHS, n'est rien d'autre que la sensibilisation du planificateur à la double dimension de l'écologie et de l'anthropologie culturelle »197(*). Il s'agit d'une « planification participative »198(*), qui doit permettre un rééquilibrage des pouvoirs entre le marché, l'Etat et la société civile, au profit de cette dernière. Comme le note O. GODARD, « le planificateur apparaît davantage comme un animateur, un fédérateur, un négociateur, un innovateur qu'un décideur s'appuyant sur les modèles des experts et sur les résultats de leurs calculs économiques »199(*). Un rôle tout particulier dans cette dynamique est dévolu à la technique, laquelle doit être adaptée et sélectionnée aussi bien à partir des savoirs et savoir-faire locaux que des connaissances occidentales les plus sophistiquées.

Le modèle se constitue dans le cadre d'une rationalité procédurale : « L'Eco-développement n'est pas une doctrine, ni encore moins un ensemble de prescriptions rigides. Ils s'agit d'un outil heuristique qui permet au planificateur et au décideur d'aborder la problématique du développement dans une perspective plus large moyennant une double ouverture sur l'écologie naturelle et l'écologie culturelle»200(*).

C'est la technique selon I. SACHS qui concentre toutes les vertus procédurales : c'est à ce niveau que peuvent se concilier les différentes logiques économiques, sociales et écologiques.

Toujours selon I. SACHS : « au coeur du développement, il y a un autre modèle de développement incorporant la liberté des générations à venir » nous devons apprendre à vivre avec plusieurs échelles de temps, sans abandonner la nôtre, c'est très difficile ; si l'adjectif définit des modalités, le développement est le concept central qui organise l'ensemble des activités humaines, c'est un concept pluridimensionnel : il n'existe pas sans coordination des décisions économiques, financières, sociales et environnementales. Ainsi, il appelle à une redéfinition des finalités d'abord, à une recherche d'autres modalités en suite. On pourrait reprendre cette formule : « développer, c'est construire une civilisation de l'être dans le partage équitable de l'avoir».

Aussi, I. SACHS souligne les difficultés entre les pays du Nord et du Sud, c'est le partage des responsabilités dans l'espace qui est la source de ces difficultés. Le Nord insiste sur les risques environnementaux globaux et sur la responsabilité partagée imposées sous prétexte des dommages causés à l'environnement à l'économie du Sud, criblée de dettes et privée de ressources, pendant que le Nord poursuit son modèle de vie sans soucier de l'environnement.

L'éco-développement n'est pas un simple style technologique. L'intégration des objectifs environnementaux ne peut être atteinte que par une redéfinition, dans le système économique, des structures de la demande en même temps que des modalités d'offre. une série de variables spatiales, temporelles, culturelles, interdépendantes doivent alors être simultanément modifiées dans la société.

II.3.2. La gestion patrimoniale 201(*)

Le modèle de la gestion patrimoniale n'est pas sur le même plan conceptuel que les autres modèles. Il ne porte pas en effet à proprement parler sur le développement. Ce modèle est le produit d'une recherche commune d'universitaires, de consultants en environnement, de techniciens du ministère de l'environnement, son but premier est d'articuler une grille conceptuelle et un ensemble d'outils opérationnels provenant de plusieurs champs disciplinaires afin de gérer à long terme les milieux naturels.

Or, la portée de ses concepts centraux (patrimoine et éco-socio-système) et la richesse opérationnelle de méthodologie des procédures qu'il met en place (l'approche système-acteur, les outils économiques et écologiques) donnent à ce modèle de la gestion patrimoniale une grande envergure potentielle. L'approche est nettement liée au niveau local (décentralisé). Mais si, dans sa forme actuelle, elle ne peut pas accéder à un échelon spatial supérieur, il nous semble néanmoins qu'elle constitue le fondement prometteur, le premier étage spatial local d'un modèle global de développement soutenable.

Ce modèle semble en effet apporter une contribution importante, selon nous, là où les autres échouent plus ou moins : trouver un langage formel commun pour articuler les logiques écologiques, économiques et éthiques, culturelles... mais ce langage n'est ni l'énergie, ni la monnaie (ou tout autre étalon), c'est le langage construit au cours d'une procédure , la fréquentation micro-politique organisée, la négociation inter-acteurs gérée de façon méthodique avec des outils conceptuels.

L'objectif est que la logique politique réconcilie (sous la forme de compromis acceptables) les rationalités écologiques et économiques, et les représentations sociales, culturelles, étatiques qui sous tendent les rapports inter-acteurs.

Quatre rubriques fondamentaux caractérisent l'approche patrimoniale :

1) L'épistémologie systématique (fonde l'approche)

Nous pouvons définir l'épistémologie systématique comme un ensemble de méthodes de formalisation et d'analyses des problèmes perçus comme complexes, à des fins d'intervention202(*). Mais il y a deux conceptions de la systématique : celle des « réalistes» pour qui les systèmes observés sont constitutifs de l'objet lui même, et celle des « constructivistes relativistes» qui pensent que l'information sur la réalité ne préexiste pas à l'acte d'observer, elle est générée par la rencontre d'un objet et d'un sujet de connaissance.

Nous ne voyons donc pas la réalité, mais une image structurée par nos catégories de représentation. Elle est la clef épistémologique de l'ensemble du modèle.

2) Patrimoine et éco-socio-système (structure l'approche)

Les deux notions sont deux versants de la réalité « milieu naturel», « espace ou milieu de vie», vue sous deux angles différents.

Selon E. TORRES l'éco-socio-système,  « est l'ensemble des relations existant à propos de la gestion d'une ressource naturelle (nous préférons à propos d'un espace, d'un territoire donné et donc du développement économique et social qui le transforme) »203(*).

Cet ensemble comprend :

- les relations que les facteurs écologiques qui conditionnent l'évolution du milieu naturel,

- les relations que les acteurs sociaux qui sont parties prenantes dans l'aménagement et la transformation de l'espace considéré notamment dans le cadre d'activités économiques, ont eux à l'occasion de la gestion de cette ressource et du développement du territoire qu'ils habitent,

- et enfin, les relations que les acteurs sociaux ont avec les divers facteurs du milieu.

Initialement, une telle définition met en relation deux pôles : la nature et le social. En général, le système social contient le sous-système économique dont le rôle dans l'évolution de l'éco-socio-système est souvent décisif.

E. TORRES propose une première définition de la notion de patrimoine , « le patrimoine est une construction sociale complexe qui n'est immédiatement apparente, y compris aux titulaires eux-mêmes. Déterminer les trajectoires possibles d'un « développement patrimonial » et les modalités éventuelles de sa mise en oeuvre appelle donc un premier travail de repérage et de construction du patrimoine. »204(*)

L'analyse patrimoniale se fonde, comme son nom l'indique, sur le concept de patrimoine. Celui-ci est traité, non pas en tant qu'objet isolé des acteurs avec lesquels il entre en relation, mais comme sujet d'une relation identitaire et symbolique qui le lie à ces acteurs. C'est ainsi que, toujours selon E. TORRES, il s'agit de comprendre les formes d'appropriation sociale et symbolique de l'espace et des objets qu'il supporte.

Le patrimoine est donc une construction sociale dépendant des systèmes de valeur. H. OLLAGNON définit le patrimoine comme suit : « un patrimoine est un ensemble d'éléments matériels et immatériels qui concourent à sauvegarder l'autonomie et l'identité de leur titulaire et son adaptation au cours du temps dans un univers variant »205(*).

Le patrimoine recoupe trois types de biens : biens privés, biens publics et bien communs. Chacun de ces biens a un ou plusieurs titulaires, souvent différents ; ils appellent des modes de gestion différents. La gestion en bien commun est la gestion patrimoniale par excellence.

A partir de ce couple de concepts articulés (éco-socio-système et patrimoine), on pourra définir ce qui relève d'un développement soutenable local ou encore d'un éco- développement local. Le développement économique et social d'un territoire remarquable par une certaine unité « éco-socio-systèmatique» sera considéré comme patrimonial suivant sa capacité à développer l'identité et l'autonomie des titulaires du bien commun « milieu de vie».

4) L'approche système-acteur  

Elle constitue une branche de la systématique qui propose des méthodes spécialisées pour le diagnostic et l'intervention au sein des organisations humaines.

5) La négociation patrimoniale et ses outils 

 

Elle est la finalité de l'approche patrimoniale. Elle concentre toute l'originalité de l'approche patrimoniale par rapport aux autre modèles de développement soutenable. L'idée est de livrer le processus d'intégration du développement économique et de son milieu naturel au jeu des acteurs ; mais cela sous contrôle et en alimentant judicieusement le jeu en matière, en règles, en outils. C'est le rôle du négociateur patrimonial. Cette négociation est donc la condition de l'instauration d'une relation patrimoniale entre la société locale et l'état du milieu local ; chaque acteur doit non seulement assumer et faire vivre la relation qui lie directement son comportement à la qualité du milieu et au cadre de vie mais encore contrôler cette qualité du milieu et celle de la gestion qui en est faite par la société.

Les outils techniques mobilisés durant la négociation sont innombrables : graphique, statistiques, cartes, maquettes, procédures diverses : analyse coût-avantage, analyse multicritères, enquêtes, etc., ils constituent de véritables objets patrimoniaux dont on attend qu'ils cristallisent progressivement autour d'eux le consensus, intégrant ainsi les différents systèmes de légitimité qu'ils objectivent.

Nous avons qualifié de dérive théorique la volonté de chacun des grands paradigmes d'adapter le concept de développement durable à leur propre vision du monde. Le paradoxe est donc d'accentuer le flou, le caractère imprécis qui émane de la notion du développement durable en développant des théories aux approches exclusives et parfois antinomiques. En outre, chacune de ces interprétations de la durabilité n'est pas exempte de limites, qu'elles soient internes ou externes aux modèles.

En fait, aucune des approches ne détient de vérité absolue sur le concept mais seulement une interprétation possible, c'est pourquoi, il est plus juste de parle de problématique du développement durable.

* 29 Pour plus de détails voir l'ouvrage de MAURER M., Tourisme, prostitution, sida, traduction française par THERENAZ M., Genève, CETIM, l'Harmattan, 1992.

* 30 CAZES G., Fondement pour une géographie du tourisme et des loisirs, Paris, Bréal, 1992.

* 31 LEON B., « Tourisme, développement durable et mondialisation », Géoéconomie, n° 25, printemps 2003, pp. 24-26.

* 32 Voir l'ouvrage de ZAOUAL H., Du rôle des croyances dans le développement économique, l'Harmattan, 2002.

* 33 Dans ce cadre voir, LANFANT M.-F., « Le tourisme dans le processus d'internationalisation », Revue internationale des sciences sociales de l'Unesco, 1980, pp. 14-45. LANFANT M.-F., « Tourisme international reconsidéré : milieu exclu, tiers exclu ? Le principe de l'alternative », Cahiers du Centre des hautes études touristiques, n°C165, juin 1991.

* 34 Voir par exemple l'article, « Lutter contre le tourisme sexuel sur l'Internet : un nouveau défi », La gazette officielle du tourisme, n° 1692, 7 mai 2003. Aussi, MICHEL F., Tourismes, touristes, sociétés, Paris, l'Harmattan, 1998.

* 35 Secrétaire général, Conseil économique et social, Rapport sur « Le tourisme et le développement durable », 1999, p. 7.

* 36 VELLAS F., 1985, op. cit., p. 270.

* 37 Ibid., p. 8.

* 38 DEWAILLY J.-M. et FLAMENT E., Le tourisme, Sedes, 2000, p. 24.

* 39 MERLIN P., Tourisme et aménagement touristique, op. cit., p. 63.

* 40 Plus de développements dans l'ouvrage, BESANCENOT J.-P., Climat et tourisme, Paris, Masson, 1980.

* 41 L'attrait de la Côte d'Azur, de la côte basque en France, celui de la Californie et de la Floride aux Etats-Unis doivent avant tout à leur climat jugé favorable.

* 42 ESCOURROU P., Tourisme et environnement, Paris, Sedes, 1993, p. 114.

* 43 DEPREST F., op. cit., p. 23.

* 44 CAZES G., Les nouvelles colonies de vacances ? le tourisme international à la conquête du tiers monde, Paris, l'Harmattan, 1989.

* 45 DEPREST F., op. cit., p. 31.

* 46 Ibid., p. 32.

* 47 DEPREST F., op. cit., p. 37.

* 48 Voir section 3 du chapitre I.

* 49 ESCOURROU P., Tourisme et environnement, op. cit., Aussi voir l'ouvrage de WACKERMANN G., Tourisme et transport, Paris, Sedes, 1993.

* 50 ESCOURROU P., Tourisme et environnement, op. cit., p. 34.

* 51 Pour plus de précision, voir la thèse de DERUE C., Institutions et territoire : l'expérience de l'intercommunalité dans la gestion de l'eau potable, thèse de doctorat, au sein du GREL, Université de Lille1, Octobre 2001,

* 52 DEPREST F., op. cit.

* 53 KHERDJEMIL B., PANHUYS H. et ZAOUAL H. (dir.), Territoires et dynamiques économiques, Paris, l'Harmattan, 1998. Voir, plus aussi, En collaboration ZAOUAL H. et PAVOT C.  (Doctorante), Les nouveaux visages du Tourisme : une approche par les sites symbolique, Communication au colloque : Images et Patrimoine, Facteurs du développement du tourisme dans le Nord-Pas-de-Calais, Université du Littoral, 11 Décembre 1997. Publié par le site Internet de l'Université de Versailles Saint Quentin en Yvelynes. htmwww.cybercable.tm.fr/~jarmah/public_html/hassan2.htm et www.reseautourisme.com/articles%20revues/lilianearticle.dwt

* 54 VERNON R., International investment and international trade in the product cycle, Quarterly Journal of Economics, Mai 1966.

* 55 CUVELIER P., TORRES E., GADREY J., 1994, op. cit., p. 62. Voir notamment CUVELIER P., L'émergence de nouveaux modèles de développement touristique le cas Espagnol, in ZAOUAL H. (dir.), La socio-économie des territoires : Expériences et théories, Paris, l'Harmattan, 1998, pp.170-175.

* 56 Selon cette théorie, tout produit, au cours de son existence passe par quatre étapes : l'installation ou lancement du produit, la phase de croissance, la phase de maturité et le déclin.

* 57 VELLAS F., op.cit., p. 22.

* 58 VELLAS F., Le tourisme mondial, Economica, 1996, pp. 20-21.

* 59 LATOUCHE S., « Main invisible et main-mise sur la nature », Colloque international : L'environnement une vue d'en bas, Institut interculturel de Montréal, 1992.

* 60 SERWAY R.A., Physique I, Mécanique et thermodynamique, 1992, p. 421.

* 61 DEPREST F., op. cit., p. 40.

* 62 THUROT J.-M., « Capacité de charge et production touristique », centre des hautes études touristiques, Aix-en-provence, Etudes et mémoires, n°43, 1980, p. 8.

* 63 Ibid.

* 64 Rapports des colloques O.M.T. de Manille et Nicosie en 1980.

* 65 DEPREST F., op. cit., p. 49.

* 66 MERLIN P., Tourisme et aménagement touristique, op. cit., p. 75.

* 67 Pour plus amples développements, il convient de se reporter à CUVELIER P., TORRES E., GADREY J., op. cit.

* 68ZAOUAL H. et PAVOT C., Les nouveaux visages du Tourisme : une approche par les sites symbolique, Communication au colloque : Images et Patrimoine. Facteurs du développement du tourisme dans le Nord-Pas-de-Calais. Université du Littoral, 11 Décembre 1997. Publié par le site Internet de l'Université de Versailles Saint Quentin en Yvelynes. htmwww.cybercable.tm.fr/~jarmah/public_html/hassan2.htm et www.reseautourisme.com/articles%20revues/lilianearticle.dwt

* 69 ZAOUAL H., La socio-économie de la proximité et du site, Paris, l'Harmattan, 2005, p. 7. voir aussi ZAOUAL H., « Economie et sites symboliques africains », Revue Internationale de Recherche Interculturelle et Transdisciplinaire, Volume XXVII, n°1, Cahier n°122, Montréal, 1994.

* 70Voir ZAOUAL H., Du rôle des croyances dans le développement économique , Paris, l'Harmattan, 2002.

* 71 PY P., Le tourisme un phénomène économique, Paris, La Documentation française, 1996, p. 42.

* 72 Cité par PAVOT C., Du méga tourisme au tourisme durable : une approche en terme de développement local, in Territoires et dynamiques économiques, KHERDJEMIL B., PANHUS H., ZAOUAL H. (dir.), Paris, l'Harmattan, 1998, p. 172.

* 73 Pour bien cerner l'enjeu de la qualité voir l'article de CHAZAUD P., « La qualité, un thème fédérateur impliquant une démarche stratégique d'ensemble », Cahiers Espaces, n°61, juillet 1999, pp. 63-65.

* 74 BERGERY L., La qualité globale et tourisme, Paris, Economica, 2002, p. 34.

* 75 Ibid., p. 51.

* 76 BERGERY L., op. cit., p. 51.

* 77ZAOUAL H., 2005, op. cit.

* 78 CUVELIER P., TORRES E., GADREY J., 1994, op. cit., p. 93.

* 79 CAZES G., Le tourisme international, mirage ou stratégie d'avenir ?, Paris, Hatier, 1989.

* 80 D'après FRANGIALLI F., La France dans le tourisme mondial, Paris, Economica, 1991. Une enquête d'opinion a révélé en 1990 que pour un touriste allemand sur deux, la qualité de l'environnement est devenue un élément de décision essentiel quant au choix de ses vacances.

* 81 GODIN P., « Qualité, environnement et développement durable dans les destinations touristiques », Cahiers Espaces, n°61, juillet 1999, pp.17-24.

* 82 Pour plus de précision voir par exemple, KELLER P., « La notion de qualité totale et la politique du tourisme », séminaire de l'OMT, La qualité un défi pour le tourisme, 1992.

* 83 Comme par exemple, FRANCES P., Les vacanciers se mettent au vert, Le Monde, 1992.

* 84 Pour bien cerner la loi des rendements décroissants voir par exemple l'ouvrage de EL COHEN A., Les pensées économiques, Marrakech, Walili, 1994, p.164.

* 85 ZAOUAL H. et PAVOT C., op. cit.

* 86 Pour bien comprendre l'importance de ses dotations pour le tourisme qui assure la production de l'ensemble des services de tourisme. Et montrer que l'abondance relative de ces ressources va avoir une influence décisive pour expliquer la place d'un pays dans le tourisme international, voir l'ouvrage de VELLAS F., Economie et politique du tourisme international, Paris, Economica, 1985, p.39.

* 87 Dans cette phase de maturité où le produit devient standard, des phénomènes d'imitation tendent alors à banaliser le produit. On lui trouve des substituts qui répondent au problème d'obsolescence. Les coûts deviennent relativement faibles. Ainsi, s'amorce le déclin du produit selon le cycle de vie de VERNON.

* 88 Voir l'ouvrage de MERLIN P., op. cit., p. 176. En France, par exemple, les années 1960 c'est les années où la France a défini les politiques d'aménagement rural. Parmi ses objectifs il y a le développement de tourisme en milieu rural sans nuire au cadre naturel.

* 89 BETEILLE R., Le tourisme vert, Paris, PUF, 2000.

* 90 Pour plus de détails sur le concept de la proximité voir l'ouvrage de ZAOUAL H., La socio-économie de la proximité et du site, 2005, op. cit.

* 91 CUVELIER P., TORRES E., GADREY J., op. cit., p. 98. On trouve la même idée dans l'ouvrage de MERLIN P., op. cit., p. 182.

* 92 BETEILLE R., op. cit., pp. 113-124.

* 93 CUVELIER P., TORRES E., GADREY J., op. cit., p. 99.

* 94 ZAOUAL H. et PAVOT C., op. cit.

* 95 sigle emprunté à l'étude de la Casa de Vélasquez, « Aménagement et développement du tourisme en France et en Espagne », 1991, d'après CUVELIER P., TORRES E., GADREY J., op. cit., p. 99.

* 96 On peut citer en particulier l'exemple de la ville du Touquet et de DESPREZ L son maire, qui tente de substituer à la saisonnalité du modèle des 4S le tourisme des quatre saisons en axant la politique touristique de la ville sur chacun des 4E ( d'après CUVELIER P., TORRES E., GADREY J., op. cit., p.100.).

* 97 A ce propos d'ailleurs, en Espagne, il est à constater le changement de slogan touristique pour la promotion à l'étranger. « Tout sous le soleil », vantant les mérites de l'Espagne au travers de la plage, et de la mer a laissé place à une nouvelle propagande : « Passion pour la vie » qui reflète l'élargissement de la gamme des produits offerts.

* 98 Pour d'autres développements relatifs au concept de développement durable, voir le chapitre 2.

* 99 DEPREST F., op. cit., p. 69.

* 100 Ibid., p. 69.

* 101 O.M.T., Sustainable tourism development: guide for local planners, 1993, p.16.

* 102 Article 1 de la Charte du tourisme durable de l'O.M.T. , 1995.

* 103 CAIRE G. et ROULLET-CAIRE M., « Le tourisme peut-il être un élément de développement durable ? », 3avril 2001, p. 2, article publié sur le site www.Tourisme-Durable.net.

* 104 VELLAS F., 1985, op. cit., p. 22.

* 105 ZAOUAL H., Du rôle des croyances dans le développement économique, 2002, op. cit., p. 315.

* 106 Cité par PAVOT C., Du mégatourisme au tourisme durable : une approche en terme de développement local, in KHERDJEMIL B., PANHUYS H., ZAOUAL H. (dir.), Territoires et dynamiques économiques, Paris, l'Harmattan, 1998, p. 179.

* 107Ibid., p. 182.

* 108 KHERDJEMIL B., PANHUYS H. et ZAOUAL H. (dir.), 1998, op. cit., Voir, plus aussi, En collaboration ZAOUAL H. et PAVOT C. (Doctorante). Les nouveaux visages du Tourisme : une approche par les sites symbolique, op. cit.

* 109 ZAOUAL H., « La mosaïque des cultures face à un monde uniforme », Foi et développement, Réseau International Network, n° 290, janvier 2001.

* 110 KERDOUN A., Environnement et développement durable: « enjeux et défis », préface de BOUGUERRA M.-L., PUBLISUD, 2000, p. 5.

* 111 Ibid, p. 5.

* 112 Rapport Brundtland, du nom de Mme Gro Harlem Brundtland, Premier ministre norvégien, a été publié par la CMED sous le titre « Notre avenir à tous » en 1987, est l'un des documents fondateurs du développement durable et mis en place en 1983. Ce rapport constitue la référence clé pour la popularisation du développement durable.

* 113 Le développement durable est un axe fondamental de la politique de l'Union européenne. Le traité d'Amsterdam (article 6) place le concept de développement durable parmi les objectifs majeurs de l'Union européenne. Une stratégie de développement durable a été adoptée lors du sommet de Göteborg en juin 2001, et couvre plusieurs domaines. Des objectifs prioritaires ont été retenus pour les politiques communautaires dans quatre domaines : le changement climatique, les transports, la santé publique et les ressources naturelles. Pour plus de développements voir l'ouvrage de ROUXEL F., RIST D., Le développement durable :approche méthodologique dans les diagnostics territoriaux, CERTU, Ministère de l'Equipement, des Transports et du Logement, 2000, p. 15.

* 114 Le principe « penser globalement, agir localement », fut une devise accompagnant la conférence de Rio. Elle ne lui est pas propre, puisque ce précepte a par exemple aussi été par des entreprises multinationales pour leurs stratégies et activités. Sa première partie découle directement de l'idée que le niveau pertinent pour les conceptions est le niveau mondial. La seconde partie traite de l'action. L'une des significations de la devise est de ne pas démotiver toute initiative par cet horizon mondial si l'on se place au niveau des actions écologistes portées par des individus ou des organisations, dans la majorité des cas, l'action ne peut être que locale. Pour plus de développements voir par exemple l'ouvrage de DEMAZIERE C., Du local au global : les initiatives locales pour le développement économique en Europe et en Amérique, l'Harmattan, 1996, p. 11. Egalement, ZACCAI E., Le développement durable, dynamique et constitution d'un projet, 2002, pp. 94-96.

* 115 Publié par la Conférence de Stockholm sous la pression des citoyens des pays industrialisés et suite à l'institutionnalisation du champ de l'environnement, ce rapport constitue un fait marquant dans la compréhension des origines institutionnelles de la notion de développement durable.

* 116 Plus de développements sur le concept d'éco-développement dans la deuxième section de ce chapitre.

* 117 REED D., Ajustement structurel, environnement et développement durable, Paris, l'Harmattan, 1999, pp. 25-32.

* 118 La CNUED, réunie à Rio de Janeiro du 3au 14 juin 1992, réaffirmant la déclaration de la Conférence des Nations Unies sur l'Environnement adoptée à Stockholm le 16 juin 1972, et cherchant à en assurer le prolongement, dans le but d'établir un partenariat mondial sur une base nouvelle et équitable en créant des niveaux de coopération nouveaux entre les Etats, les secteurs clefs de la société et les peuples, oeuvrant en vue d'accords internationaux qui respectent les intérêts de tous et protègent l'intégrité du système mondial de l'environnement et du développement, reconnaissant que la Terre, foyer de l'humanité, constitue un tout marqué par l'interdépendance.

* 119 ROUXEL F., RIST D. , op. cit., p. 16.

* 120 CNUED, Action 21 :  « Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement déclaration de principes relatifs aux forêts » conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement (CNUED), 1993.

* 121 TUBIANA L., « Environnement et développement, l'enjeu pour la France », Rapport au premier ministre, Paris, La documentation française, 2000, p.7.

* 122Citation traduite de l'anglais. Le verbe « to sustain » signifie « soutenir, supporter, entretenir, nourrir ». De sorte que le « sustainable development » dénote le fait que le développement puisse s'entretenir, se maintenir (ou être maintenu, être soutenu). Certains auteurs préfèrent l'expression de « développement soutenable », voir par exemple HARRIBEY J.-M., Le développement soutenable, Paris, Economica, 1998, pp. 11-18. Mais le terme de développement durable est la traduction officielle retenue pour l'expression anglaise sustainable development.

* 123 COSTANZA R., « The ecological economics of sustainability: Investing in natural capital», in Goodland et alii (dir.), Environmentally sustainable Economic Developpement: Building on Brundtland, UNESCO, 1991.

* 124 SACHS I., L'écodéveloppement, Paris, Syros, 1993.

* 125 REED D., op. cit., p. 33.

* 126 OCDE , « Le développement durable, les grandes questions », 2001, p. 38.

* 127 Une externalité est une conséquence engendrée par l'activité d'un agent sur un autre sans que cela se traduise par un prix de marché. La pollution en est un exemple.

* 128 OCDE, Développement durable : un effort renouvelé de l'OCDE, www.oecd.org//publications/pol_brief/9808-fre.htm., 1998.

* 129 MARTIN J.-Y., Développement durable ? Doctrines, pratiques, évaluations, Paris, IRD, 2002, p. 83.

* 130 EWALD F., GOLLIER C., SADELEER N., Le principe de précaution, Paris, PUF, 2001. Voir entre autres aussi FREESTONE D., HEY E., The precautionary principle and international law. The challenge of implementation, Den Haag, Kluwer, 1996, ZACCAI E., MISSA J.-N., Le principe de précaution : significations et conséquences, Bruxelles, ULB, 2000.

* 131 La biodiversité ou diversité biologique définie comme la richesse en organisme vivants qui peuplent la biosphère englobant à la fois les individus et leurs relations fonctionnelles. La biodiversité est avant tout une ressource naturelle fournissant aussi bien de la nourriture, que l'énergie conserver assure également la préservation de supports de production biologiques. Le développement peut être qualifié de durable s'il préserve cette diversité.

* 132 En se référent à l'auteur ZAOUAL H. (1998, 2005), op. cit.

* 133ALCOUFFE A., FERRARI S., GRIMAL L., « Autour du développement durable », Sciences de la société, n°57, octobre 2002, p. 3.

* 134 L'idée de la « croissance zéro » est souvent associé au rapport Meadows, dans ce cadre, la situation de catastrophe peut être évitée grâce à « un état d'équilibre, qui signifie de maintenir un niveau constant de population et de capital ». Cette idée de la « croissance zéro » a été soumise à de vives critiques, également formulées lors de la conférence de Stockholm.

* 135 CMED, Notre avenir à tous, Montréal, Québec, Fleuve, 1987, p. 36.

* 136 CHAUTARD G., « Mise en oeuvre d'une problème de développement durable appliqué aux régions de conversion », Ve journée IFRESI, 20 et 21 mars 1997, p. 191.

* 137 CMED, op. cit., p. 52.

* 138 Définie de la sorte, l'équité ne doit pas être confondue, comme c'est souvent le cas, avec l'égalitarisme qui récuse le principe de différence entre les individus.

* 139 CMED, op. cit., p. 57.

* 140 CNUED, Action 21 : « Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement déclaration de principes relatifs aux forêts », Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement (CNUED), 1993.

* 141 Groupe de travail sur les instruments économiques et les mesures dissuasives à de saines pratiques environnementales, Les objectifs de développement durable, www.ec.gc.ca/grngvt/1_2_f.htm, 1994, p.1.

* 142 Principe 5 de la Conférence de Rio.

* 143 CMED, op. cit., p. 57.

* 144 Ibid., p. 58.

* 145 CHAUTARD G., op. cit., p. 194.

* 146 Pour plus de développements voir CHASSANDE P., Développement durable, pourquoi ? comment ?, Paris, Edisud, 2002, pp. 91-110.

* 147 Notons toutefois que le changement d'échelle d'analyse ne va pas sans affecter le contenu et la structure même de la durabilité [Chautard, Zuindeau, 1996], rejoignant Godard qui précise que la durabilité n'admet pas une structure fractale [Godard,1994]

* 148 Voir par exemple l'ouvrage de ZUINDEAU B., Développement durable et territoire, Presses Universitaires du Septentrion, 2000.

* 149 LACOUR C., « Intégration environnement-aménagement : fondements théoriques », Economie Régionale et Urbaine, n° 4, 1994, pp. 537-556.

* 150 CDU, Gouvernance, Centre de documentation de l'urbanisme, Ministère de l'Equipement, des Transports et du Logement, 1999.

* 151 COASE R., « The problem of social cost », The Journal of Law and Economics, 1937, pp. 1-44.

* 152 ALCOUFFE A., FERRARI S., GRIMAL L., op. cit., p. 7.

* 153 La « bonne gouvernance » consistait à accepter les plans d'ajustements structurels -soit une réduction du nombre des fonctionnaires et un désengagement de l'Etat dans la vie économique-, à ne pas être trop corrompu et à dialoguer avec les citoyens pour faire accepter les réformes. Plus de développement voir MARTIN J.-Y., Développement durable ? Doctrines, Pratiques, Evaluations, IRD, 2002, pp. 114-116.

* 154 PNUD, 1997.

* 155 ALCOUFFE A., FERRARI S., GRIMAL L., op. cit., p. 10.

* 156 JOLLIVET M., Le développement durable, de l'utopie au concept, Elsevier, 2001, p. 102.

* 157 CMED, 1987, op. cit.

* 158 Plus de détails sur le concept du patrimoine dans la deuxième section.

* 159 ALCOUFFE A., FERRARI S., GRIMAL L., op. cit., p. 11.

* 160 BERGERY L., Qualité globale et tourisme, Economica, 2002, p. 160.

* 161 JOLLIVET M., op. cit., p. 103.

* 162 CMED, 1987, op. cit., p.51.

* 163 TURNER R.K., Sustainable environmental economics and management - Principles andpractice, Belhaven Press, 1993.

* 164 Des concepts empruntés à l'auteur HATEM F., «Le développement soutenable : une origine récente, une notion ambiguë, des applications prometteuses », Economie prospective internationale, n° 44, 1990, pp. 101-117.

* 165 FAUCHEUX S., FROGER G. et NOEL J.-F., « Quelle hypothèse de rationalité pour le développement soutenable ? », Economie appliquée, Tome XLVI, n°4, 1993, pp. 59-103.

* 166 Selon TORRES E., il y a : - La logique économique est plus constitué (la plus hégémonique probablement aussi). En l'identifiant fortement au modèle néoclassique de l'économie qui est l'idéal type, elle peut être définie synthétiquement comme la recherche de la maximisation de l'utilité nette.

- La logique politique est la recherche constante d'accords entre les acteurs du jeu politique. C'est l'univers du pouvoir de la décision. Nous posons qu'au travers de cette logique, les représentations culturelles éthiques, sociales se confrontent, un modèle qui obéirait à cette logique, chercherait les modalités de l'intégration entre l'économie et l'environnement dans un processus politique de détermination du compromis si les agents parviennent à un accord, la solution proposée est bonne, efficace pour modifier le réel dans le sens voulu, sans autre considération.

- La logique écologique nécessite une définition double elle est en effet influencée à la différence des autres logiques par la distinction entre une appréhension anthropocentrée ( posera comme objectif le maintien de l'aptitude de la nature à permettre la vie de l'homme : les finalités de préservation de la nature et de l'homme sont totalement fusionnées.) et une appréhension non anthropocentrée ( le maintien de la nature en état est affirmé comme droit absolu. La nature accède alors à un statut identique voire supérieur à celui de l'homme.) des relations économie/environnement.

* 167 CUVELIER P., TORRES E., GADREY J., op. cit., p. 114.

* 168 PEZZEY J., Definitions of sustainability, University of Colorado, UK, CEED, 1989.

* 169 PASSET R., L'économique et le vivant, Paris, Payot, 1979.

* 170 CHAUTARD G., 1997, op. cit., pp. 187-188.

* 171 Selon la pensée dominante, l'optimum dit de Pareto, que les économistes contemporains préfèrent souvent appeler « efficacité parétienne » pour gommer son caractère normatif reposant sur un jugement de valeur, est souvent définie par rapport aux individus : aussi longtemps que, pour un état donné de la répartition, la position d'un agent au moins peut être améliorée sans dégrader celle d'un autre agent, l'avantage collectif peut être amélioré ; l'optimum est atteint lorsqu'il n'est plus possible d'améliorer la position d'un agent sans dégrader celle d'un autre.

* 172 RAWLS J., Théorie de la justice, Seuil, 1987.

* 173 Cité par l'auteur CHAUTARD G., 1997, op. cit., p. 188.

* 174 FAUCHEUX S., NOEL J.-F., Economie des ressources naturelles et de l'environnement, Paris, Armand Colin, 1995, p. 26.

* 175 CHAUTARD G., (1997), ibid., p. 188.

* 176 pour savoir plus sur la diversité culturelle voir : la théorie des sites symboliques, ZAOUAL H. (1998, 2002, 2005).

* 177 CHAUTARD G., 1997, op. cit., p. 189.

* 178 DEVALL B., SESSIONS G., Deep ecology : Living as if Nature Mattered, Peregrine Smith Books, Salt Lake City, 1985.

* 179 FAUCHEUX S., NOEL J.-F., 1995, op. cit., p. 28.

* 180HATEM F., 1990, op.cit.

* 181 ROUXEL F., RIST D., 2000, op. cit., pp. 18-19.

* 182 CUVELIER P., TORRES E., GADREY J., 1994, op. cit., p. 119 .

* 183 La plupart des actifs non marchands faisant partie du capital naturel se caractérisent par leur multifonctionnalité. Une même ressource, relevant de cette catégorie, peut remplir des fonctions économiques, des fonctions récréatives, des fonctions biologiques et des fonctions de traitement de la pollution. A cet égard, l'eau d'une rivière constitue un bon exemple. Il n'est pas possible de trouver un substitut à l'ensemble des fonctions d'un actifs environnemental de ce type. Le progrès technique ne peut pas non plus s'appliquer uniformément à toutes ces fonctions. De ce point de vue, une partie du capital naturel est qualifié de « capital naturel critique ».

* 184 TOMAN M.-A., « The difficulty in defining sustainability », in DARMSTADTER J. (ed.), Global Development and the Environment: Perspectives on Sustainability, Washington DC, 1992, Cité par FAUCHEUX S., NOEL J.-F., 1995, op. cit., p. 299.

* 185 FAUCHEUX S., FROGER G. et NOEL J.-F., 1993, op. cit.

* 186 PASSET R., l'Économie et le vivant, Paris, Payot, 1979.

* 187 GODARD O., Aspects institutionnels de la gestion intégrée des ressources naturelles et de l'environnement, Paris, la maison des sciences de l'homme, 1980.

* 188 CHOUTARD G., op. cit.

* 189 Pour plus de développement voir l'ouvrage de, PILLET G., ODUM H.T., E3. Energie, Ecologie, Economie, Genève, Georg, 1987.

* 190 FAUCHEUX S., NOEL J.-F., 1995, op. cit., p. 318.

* 191 Pour le moment, l'aspect social n'est pas pris en compte dans les arbres de soutenabilité.

* 192 SACHS I., Stratégies de l'écodéveloppement, Paris, Economie et Humanisme, Ouvrières, 1980.

* 193 Ibid., p. 37.

* 194 SACHS I., L'écodéveloppement, Paris, Syros, 1993, pp. 28-31.

* 195 « Les déférentes styles de vie, écrit SACHS I., 1980, op. cit., p. 78, se caractérisent essentiellement par la manière dont chaque société aménage ses divers temps et dont elle occupe le temps ».

* 196 SACHS I., 1980, ibid., p. 29.

* 197 Ibid., p. 117.

* 198 SACHS I., « Environnement, développement, marché : pour une économie anthropologique », entretien accordé à Jacques Weber, Natures Sciences Sociétés, 2, 3, 1994, pp. 258-265. explique (p.259) :  « sa définition de la planification est la plus sobre qu'il m'ait été donnée d'entendre : « planifier, c'est penser par variante ». Il lui semblait impossible de tendre vers un optimum lorsque la fonction objective était complexe ; il fallait tout simplement s'efforcer de trouver au travers de la pensée par variante l'option qui paraissait la moins mauvaise ». dans un de ses ouvrages, il parle d' « une planification engagée qui ne se cache pas derrière le paravent de la technicité et de la neutralité politique. En aidant les décideurs à penser par alternatives, elle prépare leurs choix qui engagent l'avenir de la société sans pour autant prétendre qu'elle est capable d'atteindre l'optimalité ».

* 199 GODARD O., L'écodéveloppement revisité, Economies et Sociétés, 36, 1, 1998, p. 224.

* 200 SACHS I., 1980, op. cit., p. 62.

* 201 D'après TORRES E., ce modèle n'est pas un modèle théorique substantiel, il est plus une méthodologie des procédures, une structure cohérente qui accueille en son sein divers outils, théories et pratiques articulés par une épistémologie précise, cette structure étant tournée vers les objectifs de la décision et l'action.

* 202 CUVELIER P., TORRES E., GADREY J., 1994, op. cit., p. 128.

* 203 Ibid., p. 129.

* 204 TORRES E., « Environnement et économie locale. Les contrats et conventions de développement patrimonial », in CUVELIER P., TORRES E., GADREY J. (1994), p. 137.

* 205Ibid., p.130.

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