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L'alternance politique au Sénégal : 1980-2000

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par Adrien THOUVENEL-AVENAS
Université Sorbonne Paris IV - Master 2 2007
  

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4. L'ouverture politique :

La principale nouveauté de cette Constitution est la création - ou plus exactement le retour - du poste de Premier ministre. Responsable devant le Président de la République et les parlementaires, il coordonne la politique intérieure en ayant à sa charge le gouvernement. Le Président de la République retrouve dans les textes une fonction "à la française", en concentrant l'essentiel de son action sur la diplomatie internationale. Le 26 février 1970, un "inconnu",

8 François Zuccarelli, La vie politique sénégalaise (1940-1988), pp. 113, Paris, Publication du Cheam, 1988.

Abdou Diouf, est nommé Premier ministre du Sénégal 9.

Abdou Diouf est né le 7 septembre 1935 à Louga, vieux bassin arachidier de la région du Cayor, localisé à 25 kilomètres de Dakar 10. Son père, qui fait parti "de la moyenne élite administrative" du Sénégal, envoie le jeune Abdou à l'age de 2 ans chez sa grand-mère paternelle à Saint-Louis. Il suit dans la capitale sénégalaise une double scolarité, à l'école française et à l'école coranique. Cette dernière, passage obligé pour tout bon musulman sénégalais, lui enseigne le Coran. Cependant, estimant avoir "assez appris de Coran pour faire ses prières ", il quitte l'école coranique après son entrée au lycée Faidherbe. Il y obtient son baccalauréat en 1955.

Cette jeunesse à Saint-Louis lui permet aussi de rentrer en contact indirectement avec Léopold Sédar Senghor. Sa grand-mère paternelle, héberge chez elle sa nièce, qui s'avère être "la grande amazone de Senghor" à Saint-Louis. Celle-ci s'occupe du comité des femmes senghoriste de Saint-Louis, qu'elle réunit tous les soirs. Etant le seul lettré de la maison, Abdou Diouf se charge durant cette période de faire quotidiennement une revue de presse, qu'il relate au comité. Il s'occupe également de rédiger les lettres envoyées à Senghor et de lire ses réponses 11.

Après ce long passage à Saint-Louis, Abdou Diouf gagne Dakar pour y suivre des études de droit public et de sciences politiques. Etudiant brillant, il rentre en 1958 à l'Ecole nationale de la France d'outre-mer, située à Paris. Il se destine alors à intégrer à terme l'administration publique. Au cours de ce séjour parisien, il fait la rencontre de deux personnes qui vont fondamentalement changer sa vie : Elisabeth, qui devient sa femme en 1962, et Habib Thiam. Abdou Diouf reste toutefois studieux. Il finit Major de sa promotion.

Diplômé en juin 1960, il retourne au Sénégal au moment même où le pays accède à l'indépendance. Il intègre l'administration et se retrouve nommé en décembre 1961 gouverneur de la région du Sine Saloum. Néanmoins, il est rapidement démis de ses fonctions, s'étant distingué des autres gouverneurs en refusant de faire acte d'allégeance à Senghor lors de la crise de 1962. Sa traversée du désert ne dure que très peu de temps, puisqu'il intègre le cabinet du ministre des Affaires étrangères, Assane Seck, en 1962 avant de rejoindre le cabinet présidentiel de Léopold Sédar Senghor en mai 1963. Cette progression rapide dans la hiérarchie montre qu'en dépit de l'affront qui lui a été fait, le Président de la République sénégalaise maintient sa confiance à Abdou Diouf et lui réserve une destinée exemplaire. Devenu en février 1964 secrétaire général de la présidence de la République, le jeune technocrate apparaît au sein du gouvernement en mars 1968, en tant que ministre du Plan et de l'Industrie. Il conserve ce poste jusqu'à sa nomination à la Primature.

Son physique tout en longueur - il mesure 1m 96 - qui lui donne un air emprunté, ainsi que son visage juvénile, ne le servent pas auprès du grand public. Il doit s'affirmer et montrer qu'il est

9 A cette occasion, Senghor aurait déclaré à Abdou Diouf : "J'ai décidé de vous nommer Premier ministre. Je ne vous ai pas choisi parce que j'ai une affection particulière pour vous, mais parce que j'ai considéré que vous êtes le meilleur de tous". Abdou Latif Coulibaly, Le Sénégal à l'épreuve de la démocratie ou L'histoire du PS de la naissance à nos jours, pp. 92, Paris Montréal, L'Harmattan, 1999.

10 Contrairement à ce qui a été longtemps soutenu par la propagande officielle, Abdou Diouf n'a jamais véritablement vécu à Louga. Dès l'age de 3 mois, Abdou Diouf quitte Louga pour Bakel en raison d'une mutation de fonctionnaire de son père, receveur des PTT. Il affirme d'ailleurs : "Je connais beaucoup mieux Saint-Louis du Sénégal que Louga ". Abdou Diouf : entretiens avec Philippe Sainteny, Emission livre d'or, RFI, 2005.

11 Abdou Diouf : entretiens avec Philippe Sainteny, Emission livre d'or, RFI, 2005.

plus qu'un technocrate sous la coupe du "Père de la nation". Pour se défaire de cette impression, Senghor lui confie des responsabilités locales. Diouf prend la tête de l'instance dirigeante de sa ville natale, Louga, et succède à un "historique de l'UPS", Moustapha Cissé. Ce rajeunissement des cadres locaux est perceptible dans d'autres régions : Alioune Sène, secrétaire d'Etat à l'Information, prend place à Fatick tandis que Babacar Bâ, directeur du cabinet de Senghor, s'installe à Kaolack. Ces changements s'étendent au bureau politique de l'UPS : Abdoulaye Fofana, instigateur de la chute de Mamadou Dia en 1962, et Doudou Thiam, ancien ministre des Affaires Etrangères, sont remplacés par Jean Collin et Abdou Diouf, qui accèdent respectivement après 1972 aux postes de secrétaire et secrétaire adjoint de l'UPS. On assiste aussi à l'entrée d'Ousmane Camara (liaisons avec les comités d'entreprises), Moustapha Niasse (secrétaire à la Jeunesse) et Babacar Bâ (secrétaire aux Affaires Economiques).

Le milieu syndical, principal responsable des troubles de 1968 et 1969, connaît lui-aussi des restructurations. L'UNTS est affaibli par le départ de son dirigeant Doudou N'Gom, nommé à la présidence d'un nouveau syndicat, la Confédération Nationale des Travailleurs du Sénégal (CNTS), crée le 14 juin 1969. Très clairement rattaché au parti senghorien, "la CNTS est intégrée dans l'UPS et dotée d'un statut organisationnel identique à celui d'une section régionale du parti. L 'adhésion devient obligatoire pour tous les salariés affiliés à l'UPS et vice versa" 12 . Cette filiation est renforcée avec l'arrivée au gouvernement de syndicalistes CNTS - Doudou N'Gom à l'Enseignement Technique et à la Formation Professionnelle et Adama Mawa N'Diaye en tant que secrétaire d'Etat aux Affaires Etrangères - et par l'élection en 1973 d'une dizaine de députés UPS appartenant à la CNTS.

Avec cette "participation responsable", le pouvoir tend à mettre fin au malaise social et à "éliminer" l'agitateur UNTS. Celui-ci rend les armes dès juillet 1971.

Les larges victoires du 28 janvier 1973 de Senghor et de l'UPS - ils obtiennent 99,1 % et 98,9% des suffrages - ne reflètent cependant en rien la popularité du pouvoir. La CNTS, payant sa relation privilégiée avec l'Etat, n'est pas considérée par la population comme "un défenseur" et voit sa stratégie de plus en plus critiquée. Senghor doit trouver un nouveau moyen pour calmer l'insatisfaction grandissante des Sénégalais, qui commencent de surcroît à ressentir les premiers signes de la crise économique. C'est pourquoi on constate, à partir de l'année 1974, une ouverture démocratique dans le pays qui se manifeste par la fin du régime à "parti unifié" et l'instauration du tripartisme.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand