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Les limites de l'application du droit sur les ressources naturelles: le cas des territoires palestiniens et du sahara occidental

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par Sandrine DAVANTURE
Université du Québec à Montreal - LLM 2006
  

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Sous-section 2 L'exploitation des ressources naturelles du Sahara occidental par le Maroc

Selon plusieurs associations de défense des droits du peuple sahraoui155(*), le territoire du Sahara occidental recèle d'importantes richesses naturelles, ce qui expliquerait les convoitises de la part du Maroc. Cependant, selon Afifa Kermous, qui travaille pour l'association France Libertés, aucune étude sérieuse sur les ressources naturelles du Sahara occidental n'a pu être menée en raison du conflit latent qui sévit dans cette région156(*). De plus, si certaines études ont été faites, elles ont pu être sacrifiées en raison des intérêts stratégiques.

C'est pourquoi l'état des lieux des ressources naturelles que nous allons dresser s'appuie sur les déclarations des associations qui oeuvrent pour l'indépendance du territoire sahraoui. Il y a tout d'abord les ressources minérales (I), ensuite il y a les ressources halieutiques (II) et enfin les ressources pétrolières (III).

I. Les ressources en minerais.

Le sous-sol du Sahara occidental recèlerait de grandes richesses en minerais, notamment en fer, en titane, manganèse, pierres précieuses, ainsi qu'en uranium, titanium, vanadium157(*). Il y aurait également la présence de galène et de bismuth dans la partie libre du territoire158(*). Toutefois, la plus grande ressource minière du Sahara occidental est sans aucun doute le phosphate, matière naturelle utilisée principalement dans la fabrication des engrais. En effet, en 1947, dans le bassin de Laâyoune à Bou Craa, est découverte ce qui est alors considérée comme la plus grande réserve mondiale de phosphates159(*). C'est une mine de grande qualité et facilement exploitable car à ciel ouvert160(*). Les réserves sont estimées à 3 milliards de tonnes, les gisements s'étendent sur 250 Km²161(*). Le 4 juillet 1962, est créée la Société nationale des Mines du Sahara, qui appartient à la société publique espagnole de l'industrie (Instituto Nacional de Industria ou INI). Le 22 mai 1968, elle devient la société Fosbucraa. Cette société a pour but la mise en valeur des minerais de Bou Craa. Suite aux accords de Madrid de 1975 conclus entre l'Espagne, le Maroc et la Mauritanie162(*), la direction de la société Fosbucraa est transférée à l'Office Chérifien des Phosphates (ci-après dénommé O.C.P.), entreprise privée marocaine créée en 1920 et ayant pour but l'extraction et l'exploitation des mines de phosphates dans le royaume marocain163(*). Dès lors, grâce à ces accords, et à la direction de la société Fosbucraa, le Maroc, par l'intermédiaire de l'O.C.P. est libre d'exploiter les phosphates sahraouis. D'après les informations recueillies auprès de l'O.C.P., et l'Association ARSO164(*), le minerai extrait à Bou Craa est transporté par un convoyeur mécanique jusqu'au port de Laâyoune, la capitale du Sahara occidental, où il est lavé à l'eau de mer puis rincé à l'eau douce et séché. Le phosphate est ensuite acheminé jusqu'au quai de chargement des navires (Warf), avant d'être exporté aux quatre coins du monde165(*). Il perd alors son identité de phosphate sahraoui. Selon le rapport d'activités de 2002 de l'O.C.P., de nombreux investissements ont été engagés pour le site de Bou Craa. Par exemple, des opérations de reconnaissance géologique complémentaire des gisements de Bou Craa ont été lancées166(*), ainsi que la réalisation d'un convoyeur de liaison de 12,5 kilomètres167(*), l'installation d'une unité d'épierrage et de criblage de capacité annuelle de 3 millions de tonnes, la réhabilitation du Wharf du port de Laâyoune...168(*). Toutefois même si, lorsque l'on examine le rapport d'activités de 2002 de l'O.C.P., on s'aperçoit que le gisement de phosphates de Bou Craa ne représente qu'1% de la production marocaine de phosphates169(*), on ne peut ignorer le fait que le Maroc exploite, par le biais de la société Fosbucraa, le gisement de Bou Craa alors qu'il ne dispose pas, au regard du droit international, de la souveraineté sur ce territoire. En effet, dans ce rapport d'activités, le site de Bou Craa y figure au titre de l'une des cinq zones géographiques exploitées par le groupe O.C.P.170(*).

Nous avons également constaté dans ce rapport, que le site de Bou Craa est considéré par l'O.C.P. comme une ressource naturelle marocaine171(*) alors que la souveraineté du Maroc, comme nous l'avons déjà dit, sur le Sahara occidental n'est aucunement fondée, elle n'existe pas. Même si le site de Bou Craa ne constitue pas la part substantielle de la production marocaine de phosphates, il est choquant de constater que le Maroc se considère comme le souverain de droit des ressources naturelles du Sahara occidental et les exploite ainsi à sa guise. L'exploitation des réserves du Sahara occidental permet au Maroc de conforter sa place de leader mondial en matière d'exportation et de détenir 28% de part du marché international172(*).

Le Maroc ne se contente pas d'exploiter les réserves sahraouies de phosphates, il a également entrepris d'autres recherches géologiques sur tout le Sahara occidental. En effet, le royaume du Maroc recherche activement des ressources minérales sur tout le territoire sahraoui. Grâce au Bureau de Recherches et de Participations Minières (B.R.P.M.), le Maroc a entrepris au Sahara occidental, dans la région d'Awserd, une campagne géophysique aéroportée visant à établir les « potentialités minières des provinces sahariennes » pour la recherche de minéralisation à métaux précieux et de base sur une superficie de 20 852 Km²173(*). Le rapport d'activité 2002 du B.R.P.M. précise que les potentialités minières de cette région concernent l'or, l'argent et le cuivre et que « la campagne hyperspectrale d'acquisition de données autour de la région d'Awserd174(*), dans nos provinces du sud, concrétise la première phase importante d'un vaste programme qui va, en particulier, nous permettre d'avancer rapidement dans la connaissance du potentiel minier de cette zone »175(*). Dans ce même rapport, figure une carte de la situation des objectifs 2002 du B.R.P.M, sur laquelle on peut voir que le Sahara occidental est complètement intégré dans la représentation géographique du royaume marocain176(*). Sur cette carte, la région d'Awserd figure parmi les régions exploitées par le B.P.R.M. car elle constitue une région contenant des métaux précieux.

Hormis les phosphates, le Sahara occidental a également d'importantes ressources en sel dont les principaux minerais de ces gisements sont l'halite et le sylvite utilisés dans l'industrie de la photo, du verre, des couleurs et des explosifs177(*). L'eau de mer est évidemment également un fournisseur potentiel.

En sus des ressources minières, le Sahara occidental dispose d'importantes ressources halieutiques, convoitées non seulement par le Maroc mais aussi par d'autres États.

II. Les ressources halieutiques.

Le Sahara occidental dispose de côtes très riches en ressources halieutiques. En effet, avec ses 1200 Km de côtes, le Sahara occidental bénéficie d'eaux parmi les plus poissonneuses au monde.

Toutefois l'occupation marocaine et l'appropriation par ce pays du territoire sahraoui privent le peuple sahraoui de ses propres ressources maritimes. Le Maroc exploite pour son compte les ressources halieutiques du Sahara occidental privant ainsi le Sahara occidental d'importantes ressources financières. Ce qui est encore plus préoccupant est le fait que le Maroc exploite intensément les ressources halieutiques sahraouies. Certains diront même que le Maroc pille ces ressources au détriment de la nature elle-même178(*).

En effet, du fait de l'importance des prises non seulement par les pêcheurs marocains mais également par les pêcheurs européens, les ressources halieutiques du Sahara occidental s'amenuisent rapidement. Alors qu'en 1991 les prises de céphalopodes n'étaient que de 1100 tonnes, elles sont passées à 88 000 tonnes en 1999179(*). Il en résulte une baisse alarmante du stock de céphalopodes qui est passé de 100 000 tonnes en 2000 à 8000 tonnes en juin 2004180(*). Cette surpêche provient non seulement du Maroc lui-même mais également des pays européens grâce aux premiers accords de pêche signés entre l'Union européenne et le Maroc dans les années 90. Accords en vertu desquels le Maroc, qui n'a aucune souveraineté sur le Sahara occidental d'après l'avis consultatif de la Cour internationale de justice de 1975181(*), permet aux pays européens de venir pêcher le long des côtes sahraouies. En effet, sur les 1200 bateaux européens qui pêchent dans les eaux de l'Atlantique le long de l'Afrique, plus de la moitié concentrent leur activité le long des côtes du Sahara occidental182(*). Aujourd'hui, alors même que ces accords de pêche sont expirés, de nouveaux accords ont été signés en juillet dernier183(*). Ce qui signifie que les sociétés européennes de pêche ainsi que le Maroc vont continuer d'exploiter les ressources halieutiques sahraouies en dépit de la souveraineté des sahraouis sur ces ressources.

Enfin, il semblerait que le territoire du Sahara occidental renferme des ressources pétrolières, récemment découvertes.

III. Les ressources pétrolières.

Le territoire du Sahara occidental recèlerait des réserves de pétrole situées le long du littoral sahraoui. Le Maroc a entrepris officiellement des prospections au Sahara occidental afin d'y déterminer les réserves de pétrole disponibles. Pour ce faire, le Maroc a conclu, à travers l'Office National de Recherches et d'Exploitations Pétrolières (ci-après O.N.A.R.E.P), des contrats de prospections pétrolières avec des sociétés américaine et française. C'est ainsi que la société américaine Kerr McGee et la société française Total Fina Elf ont signé avec l'O.N.H.Y.M (Office national des hydrocarbures et des mines qui regroupe désormais le B.R.P.M. et l'ancien O.N.A.R.E.P.)) de tels contrats.

L'Espagne, au temps où celle-ci colonisait le Sahara occidental, avait déjà entrepris des explorations sur le territoire sahraoui. Toutefois, lorsque le conflit entre le Maroc et les sahraouis éclata, toutes les recherches furent gelées. En 2001, le Maroc décide de reprendre les recherches là où elles avaient été laissées. Un contrat de reconnaissance entre l'O.N.A.R.E.P. et la société américaine Kerr McGee fut signé le 4 octobre 2001 qui portait sur une zone de 110 400 Km² au nord de Boudjour184(*). La concession des côtes sud du Sahara reviendra à Total Final Elf qui signera le contrat de reconnaissance le 28 décembre 2001 portant sur 115 000 Km²185(*). Parallèlement, le gouvernement de la République Arabe Sahraouie Démocratique, qui a été proclamée par le Front Polisario en 1976, a annoncé le 27 mai 2002 la signature d'un contrat technique de coopération avec la société anglo-australienne Fusion Oil & Gas en vue d'évaluer le potentiel pétrolier off-shore du Sahara occidental.

Il faut noter, au sujet de la société américaine Kerr McGee, que le fils de Monsieur James Baker, qui fut l'envoyé personnel du secrétaire général de l'ONU pour le Sahara occidental, et auteur du plan de paix pour l'autodétermination du peuple sahraoui dit plan Baker II, siègerait au Conseil d'administration de Kerr McGee186(*). Cette situation n'est pas des plus impartiales et pourrait même encourager le Maroc à tourner définitivement le dos au plan Baker.

* 155 Notamment l'Association de soutien à un référendum libre et régulier au Sahara occidental (ARSO) ; L'association France Libertés- Fondation Danielle Mitterrand ; Le colloque international des Juristes sur le Sahara occidental.

* 156Afifa Kermous, « Les autres ressources naturelles », dans Colloque international des juristes sur le Sahara Occidental (28 avril 2001), Paris, l'Harmattan, 2001, à la p.173.

* 157 Christoph M. Brenneisen, « Les ressources exploitables du Sahara occidental », L'Ouest saharien : État des lieux et matériaux de recherche, L'Harmattan, Paris, 1998, à la p.26 et s.

* 158 Ibid.

* 159 Ce ne fut plus le cas après la découverte aux Etats-Unis d'importantes réserves de phosphates.

* 160 France Libertés- Fondation Danielle Mitterrand, Rapport de la Mission internationale d'enquête au Sahara Occidental. État des droits civils, politiques, socio-économiques et culturels des saharouis, État de l'exploitation économique de ce territoire non autonome (novembre 2002), en ligne : France-libertes.fr <http://France-libertes.fr> à la p.38.

* 161 Christoph M. Brenneisen, supra 157, à la p.32.

* 162 Les accords de Madrid du 14 novembre 1975, en ligne : Arso.org <http ://www. arso.org/ac3madridFr.htm>. Ces accords organisent une répartition tripartite du territoire du Sahara occidental entre l'Espagne, le Maroc, et la Mauritanie. La Mauritanie se retirera toutefois définitivement du Sahara occidental en 1979.

* 163 Voir le site de l'Office chérifien des phosphates : Ocpgroup.ma < http:// www.ocpgroup.ma>.

* 164 L'Association de soutien à un référendum libre et régulier au Sahara Occidental

* 165 Office Chérifien des Phosphates,  « La mine saharienne », en ligne : Ocpgroup.ma

< http://www.ocpgroup.ma/jurisprudence/metiers/boucraa.jsp>.

* 166 O.C.P., Rapport annuel d'activités de 2002, en ligne : Ocpgroup.ma <http://www.ocpgroup.ma>, à la p.16

* 167Ibid. à la p.33 et p.38.

* 168 Ibid.

* 169 Ibid, p.15. Selon Christoph M. Brenneisen, la production annuelle de Bou Craa représente 5% de la production annuelle totale de phosphates du Maroc, supra note 157, à la p.33.

* 170 O.C.P., rapport d'activité de 2002, supra 166, à la p. 3 et 15.

* 171 Ibid. à la p.16.

* 172 Ibid. à la p. 3.

* 173 Philippe Riché, « Le Maroc investit dans l'exploitation des richesses du Sahara Occidental », (septembre 2004), en ligne : Arso.org < http://www.arso.org>; Afifa Kermous, supra note 156, à la p. 174.

* 174 Awserd est située dans la partie sud du Sahara occidental.

* 175 Bureau de recherches et de participations minières, Rapport d'activité 2002, Rabat, B.R.P.M., 2002, à la p.4.

* 176 Ibid, à la p. 42-43.

* 177 Christoph M. Brenneisen, supra note 157, à la p.34.

* 178 Philippe Riché, « L'actualité de l'exploitation des ressources naturelles sahraouies », (Janvier 2004) en ligne : Arso.org <http://www.arso.org>.

* 179 Philippe Riché, « Note d'actualité sur l'exploitation, par le Maroc, des ressources naturelles du Sahara Occidental », (Novembre 2004) en ligne : Arso.org <http://www.arso.org>.

* 180 MAP 1er novembre 2004 www.map.com

* 181 Sahara Occidental, Avis consultatif, [1975], C.I.J. rec. 12.

* 182 Colloque des juristes sur le Sahara Occidental. Paris le 28 avril 2001, Mohamed Sidati, « Les réserves halieutiques, la question du droit de pêche, accord UE-Maroc », Paris, L'Harmattan, 2001, à la p.161.

* 183« L'Union européenne et le Maroc signent un nouvel accord de pêche », Tageblatt (30 juillet 2005), en ligne : Tageblatt.lu <http://www.tageblatt.lu/édition>.

* 184 Philippe Riché, « Le Maroc ouvre le territoire du Sahara Occidental à l'exploration pétrolière » (Juillet 2004), en ligne : Arso.org <http://www.arso.org>.

* 185 Ibid.

* 186 http://www.geopolitique.com du 21 octobre 2003. Nous n'avons toutefois pas pu vérifier cette information.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote