WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Ménages Gécamines, précarité et économie populaire

( Télécharger le fichier original )
par Didier Kilondo Nguya
Université Catholique de Louvain - Diplôme d'Etudes Approfondies 2004
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

1.2. ANALYSE DES PROCESSUS EN TERMES D'ECONOMIE POPULAIRE

1.2.1. Le concept de << secteur informel>>

Observer les économies de la majorité des pays en développement sous l'angle de leur évolution économique et sociale, revient a faire un piètre constat: la plupart de gens n'ont pas ou peu accès a des biens et services de base décents et le plus gros de la population vit d'une <<économie populaire >> ingénieuse, mais économiquement peu efficiente. Si de manière globale, le phénomène de "l'informel" est né de la débrouillardise des populations les plus modestes, il est devenu au cours de ces deux dernières décennies une affaire de spécialistes interdisciplinaires qui s'impliquent dans l'analyse et la compréhension de l'immense complexité que renferme cette économie afin de mieux l'appréhender.

En effet, le Bureau International du Travail (B.I.T.) avait utilisé pour la première fois au début des années 1970, l'expression de "secteur informel". Ce concept est dü a K. Hart et a été popularisé par le rapport Kenya de 1972. Cette expression servait a désigner les activités se développant spontanément en milieu urbain, permettant d'absorber une partie de la main-d'>uvre provenant des migrations rurales, et n'obéissant pas aux règles formelles de l'économie du travail, a savoir la comptabilité, le droit du travail40. Mais depuis lors, de nombreux qualificatifs sont venus par la suite dénommer, parfois dans la confusion la plus totale ce phénomène41. De l'anglais 'informal' qui signifie ce qui est officieux, non officiel, l'informel traduit donc ce qui est en dehors des règles ou des statuts. Ce terme a été francisé sous le concept 'informel' et a été utilisé dans les différents secteurs. Dès lors, sa définition ne fait pas l'unanimité des auteurs. Elle varie selon les chercheurs et selon le point de vue considéré. Pour contourner cette difficulté, certains chercheurs

ont estimé que la méthode la plus facile de définir ce secteur est celle d'en donner les caractéristiques42.

Plusieurs classifications des activités informelles ont été fournies par différents auteurs. Ainsi, par exemple, Anne de Lattre distingue trois catégories principales : les artisans ruraux, les artisans urbains, et les prestataires de services de toute nature43. Marc Penouil parle lui

d' <<informel de subsistance>> correspondant a l'ensemble des petits métiers n'impliquant pas ou peu de capital, d' <<artisanat traditionnel rural>> oü les volumes de production sont faibles et la technologie peu capitalistique, mais l'organisation sociale souvent poussée soit en raison de structures corporatives efficaces, soit en raison de l'existence de monopoles ethniques pour l'exercice du métier, et enfin d' <<informel concurrentiel>> offrant des biens ou des services se voulant concurrents de ceux produits par le secteur moderne44. Pour J. -Ph. Peemans, l'économie informelle en Afrique, c'est l'économie populaire séculaire qui appartient a un tissu de production existant avant la colonisation, mais qui a été a la fois marginalisée et diversifiée par cette dernière et pendant une bonne partie de la post colonie45.

Il nous paraIt important de souligner qu'aucune définition n'a rencontré l'unanimité des auteurs sur l'informalité de ces activités économiques hétérogènes. De méme, eu égard a la multiplicité des caractéristiques de ce secteur informel, il est peu probable qu'une activité les collectionne toutes a la fois.

Pour notre part, nous convenons avec Penouil pour adopter la considération suivante: <<Les activités informelles sont avant tout une forme particulière de la dynamique sociale dans les sociétés en développement. Elles sont une réponse de la société aux besoins nouveaux, aux mutations structurelles, aux contraintes sociales résultant de l'influence du développement transféré sur toutes les catégories sociales. >>46

Cependant, est-il rationnel d'utiliser le terme de <<secteur informel>> lorsqu'on considère les activités aussi variées que le commerce, l'artisanat, la sous-traitance a l'industrie, les pratiques alimentaires et divers petits métiers?

42 B.I.T./ILO, Employment, Incomes and Equality: A Strategy For Increasing Productive Employment in Kenya, p. 7.

43 Anne de LATTRE, "La petite entreprise et le développement du Sahel", L'Observateur de l'OCDE, n° 163, Paris, Avril-mai 1990, p. 3 1-35.

44 Marc PENOIJIL, "Pays en développement. Les activités informelles : réalités méconnues, espérances illusoires", Problèmes Economiques, n° 2196, Paris, octobre 1990, p. 1-6 et 24.

45 Jean-Phiiippe PEEMANS, Crise de modernisation etpratiques populaires au zaire et en Afrique, Paris, L'Harmattan, 1997,p. 109.

46 Marc PENOIJIL <<Secteur informel et crises africaines >>, Afrique contemporaine, Numéro spécial, 4e trimestre, 1992, p. 74, cité par Jean-Phi~ippe PEEMANS, Le développement des peuples face a la modernisation du monde, op. cit., p. 384.

Des avis de certains auteurs, il est par exemple difficile de parler d'un "secteur" bien singulier en raison de l'hétérogénéité de la réalité que l'informel renferme et de la diversité des activités qui le constituent. Par ailleurs, l'idée d'opposer d'un côté un "secteur informel" par rapport a "un secteur formel", ne convainc toujours pas certains experts. Pour la plupart cependant, les circuits, les relations et les interactions entre "l'informel" et le "formel" sont tels que la frontière entre ces deux prétendues réalités n'est pas nette pour les opposer. S'agissant de la caractéristique "non structurée" du "secteur informel", elle ne fait guère l'unanimité chez les auteurs car, pour plusieurs d'entre eux, des pans entiers de cette économie sont a bien des égards, savamment organisés.

A la lumière de ces différentes tendances, nous percevons la difficulté de normaliser ces types d'activités. Des divergences de terminologie de cette nature sont légion et certaines expressions utilisées malhabilement faussent bien souvent le positionnement de la problématique. Certains auteurs vont préférer le concept d'économie populaire a celui de secteur informel. C'est le cas de B. Lautier qui affirme que la réalité de l'économie populaire est plus riche que la notion du secteur informel47. Tout comme pour L. Mozere qui estime que le concept de secteur informel n'est pas opérationnel dans la mesure oü il n'y a pas deux secteurs, mais une imbrication des deux, une hybridation des activités48. Cela est d'autant plausible car nous retrouvons dans ce secteur aussi bien l'exploitation minière, les travaux agricoles, la transformation manufacturière qu'une myriade de services, avec une identification possible dans la nomenclature de l'économie formelle.

Par ailleurs, ce qui est intéressant de voir dans le contexte de l'analyse des processus de développement, c'est le fait que certaines de ces activités ont précédé la modernité, et ont donné lieu a ce qu'on a appelé "l'informalité avant le mot". Ce sont ces anciennes unités de production artisanale, soumises a de lourdes pesanteurs sociologiques et a un processus d'évolution lent tant sur le plan qualitatif que quantitatif. D'autres activités informelles, par contre, se sont forgées dans la modernité depuis la crise de l'urbanisation et du salariat. C'est cette deuxième catégorie d'activités informelles qui a véritablement explosé ces dernières années dans les villes des pays en développement.

Vouloir ainsi rassembler en un secteur la pluralité d'activités informelles hétérogènes dénote d'une certaine inattention aux dimensions socio-historiques des acteurs qui les pratiquent. D'ailleurs, souvent, dans la logique de la configuration de ces activités en secteur, ce sont les seuls critères économiques qui sont souvent considérés. C'est ce qui explique entre autre les difficultés encourues jusqu'alors pour la traduction par des auteurs de la réalité de cette complexité qu'est l'économie informelle.

Dès lors, une évidence se dégage: la notion du "secteur informel" devient moins pertinente pour l'analyse des processus de développement "réel" des peuples. Une approche réaliste devrait plutôt prendre en compte l'univers socio-économique dans lequel se déploie ce type d'activités. C'est dans cette optique que va s'inscrire notre approche de l'informel en termes de l'économie populaire comme présentée dans la sous-section qui suit.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots"   Martin Luther King