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Etude du projet de reboisement de palétuviers rhizophora en basse-casamance (sénégal) par l'ONG océanium.

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par Nicolas FAUGERE
ISTOM - Ingénieur en Agro-Développement International 2009
  

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III.4. Le projet doit tenir compte des problèmes fonciers

On retrouve souvent les explications du conflit actuel en Casamance dans l'« accroissement de population » (BROWN et al., 1977). « Un texte de 1862 (Archives Nationales du Sénégal 13 G366) montre comment les villageois ont fait appel aux autorités coloniales pour faire respecter la coutume, les gens de Mlomp se plaignant des habitants de Pointe Saint Georges qui "ont pris du poisson dans leurs pêcheries" » (CHAVEAU et al., 2000). A l'origine des conflits armés, il y aurait donc un conflit sur la délimitation des zones de pêches. En 1987 la pêche était dominée par 3 ethnies de migrants (Guet-Ndariens, Niominka et Lébou) (SAMBA, 1987). « Tant qu'il y avait dans l'océan plus de poissons que l'on ne pouvait espérer pêcher, les conflits d'intérêt portant sur les pêcheries étaient rares » (BROWN, et al. 1977)62. Nous pensons que cette vision est trop simpliste pour expliquer les origines du conflit en Casamance. Le conflit a plusieurs catalyseurs. Parmi ces catalyseurs on peut citer la délimitation non concertée de l'augmentation des surfaces pour la riziculture. « On remarque que les conflits sont souvent à l'occasion de la délimitation des terres rizicultivables de la mangrove, comme en témoignent les tensions entre communautés villageoises d'Affiniam et de Diatok à propos de l'appropriation des 30.000 ha de rizières de mangrove à la construction du barrage d'Affiniam63 » (CHAVEAU, et al., 2000).

L'augmentation des surfaces de riz n'a pas résulté d'un compromis entre la législation officielle et la juridiction coutumière, pouvant mener à des conflits entre allochtones et autochtones64. « La réaffirmation et la création, voire l'extension, des droits d'usages territoriaux se heurtent à la fois à la législation officielle, qui ne reconnaît pas les juridictions coutumières locales, et aux stratégies spatiales des communautés allochtones » (CHAVEAU, et al., 2000).

Le schéma suivant illustre la place que tient la mangrove dans la zone de parcours et dans la zone de terroir villageois.

61 On appelle partie maritime d'un fleuve celle qui s'étend de l'embouchure jusqu'au point où les plus fortes marées, pendant les Périodes d'étiage du débit fluvial, cessent de se faire sentir (BRUNET-MORET, 1970). La partie maritime du fleuve Casamance s'étend de son embouchure à Diana-Malari sur le fleuve lui-même soit sur 217 km et sur son affluent principal le Soungrougrou jusqu'à Diaroumé (à 86 km du confluent et 184 km de l'embouchure) (BRUNET-MORET, 1970).

62 Pages 98 à 104.

63 Le barrage d'Affiniam est réalisé entre 1985 et 1987 avec la coopération chinoise

64 Ces conflits participent aux revendications indépendantistes.

Schéma 15 : La mangrove se situe à l'interface entre les terroirs et les parcours en Basse-Casamance (CORMIER- SALEM, 1995).

Le terme de terroir aquatique est utilisé en priorité pour désigner les plans d'eaux susceptibles d'être enclos telles les eaux intérieures et lagunaires, les zones de mangrove et les récifs coralliens. Le terme de parcours de pêche désigne davantage les espaces halieutiques maritimes, dont les limites sont mobiles, les frontières plus ou moins perméables, les ressources instables (CORMIER-SALEM, 1995).

On note que la mangrove se situe entre le terroir des paysans-pêcheurs et le parcours des marins-pêcheurs.

La mangrove comme terroir aquatique

Les modalités d'appropriation et d'accès au terroir aquatique sont variables selon les acteurs, les formes d'exploitation et la saison. Certaines zones sont mises en défens une partie de l'année ou même plusieurs années consécutives. Les bas-fonds inondables sont les zones du terroir les plus proches du village. Elles sont appropriées individuellement par les chefs de ménage (CHAVEAU et al., 2000). Les bassins piscicoles gagnés sur des zones de mangrove incomplètement défrichées sont, en fonction de leur taille et de leur site, appropriés collectivement par le lignage ou le clan. Les bolons, qui donnent accès au village, et leurs rives colonisées par la mangrove sont gérés collectivement par la communauté villageoise qui en a l'usufruit (CHAVEAU et al., 2000). Seuls les hauts-fonds, exploités de façon plus ou moins permanente au moyen de barrages-palissades, considérés à ce titre comme une parcelle d'eau, au statut équivalent à celui d'une rizière, sont appropriés par le pêcheur ou son lignage. Au total, les eaux intérieures, qui font partie du terroir villageois, sont déterminées par la législation coutumière (CHAVEAU et al., 2000). En revanche, la mer, perçue comme un milieu dangereux, peu exploitée par les paysans-pêcheurs locaux -les Diola- jusqu'à une date récente, n'est soumise à aucun droit d'usage territorial traditionnel bien établi (CHAVEAU et al., 2000). A la gestion des espaces aquatiques comme des terroirs par les populations diola de Casamance, s'oppose la gestion des espaces maritimes comme des parcours par les pêcheurs migrants originaires des autres régions du Sénégal. Si, en principe, le littoral et la mer sont considérés comme des espaces ouverts et accessibles à tous, dans les faits, tous les pêcheurs

ne sont pas égaux, du fait même de leur compétence et de leurs moyens techniques mais aussi de leur appartenance à une communauté qui s'identifie à un territoire de pêche et en contrôle les droits d'usage. Les meilleurs fonds de pêche tendent à être transmis au sein de la communauté, considérés comme une chasse gardée, dont sont exclues les autres communautés (CHAVEAU, et al., 2000).

Dans ce contexte, il est essentiel de définir le mode de protection des parcelles. En effet, « les espaces aquatiques non aménagés du terroir villageois ne sont pas appropriés mais tous les membres de la communauté villageoise peuvent en exploiter les ressources » (CORMIER- SALEM, 199 1b). Ainsi, rien n'empêche les pêcheurs de jeter leurs filets sur les espaces où les propagules viennent d'être plantées. Un règlement moral est plus susceptible de garantir la protection qu'un règlement légal (CORMIER-SALEM, 1991b). N'étant pas avertis, les pêcheurs peuvent jetter leurs filets sur les propagules sans le savoir car celles-ci sont recouvertes par la marée. Il faudrait alors baliser, mettre une pancarte ou tout autre indice indiquant la présence d'un « champ de propagules de palétuviers ».

Il est d'autant plus important de définir le mode de protection que les terroirs de pêches s'étendent. La carte suivante illustre le déplacement de l'aire de pêche des villages entre 1940 et aujourd'hui.

Carte 7 : Extension des terroirs65 de pêche de Tionk-Essyl (CORMIER-SALEM, 1994c).

L'estuaire, encore largement sous-développé au début du XXème siècle est dans les années 1980 un lieu où la compétition pour la ressource met en rapport des technologies variées, des communautés diverses et des populations de plus en plus nombreuses (158.370 habitants à Ziguinchor en 2007) (DIAW, 1986).

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe