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La métaphore du voyage, quête et subversion de la quête chez Louis-Ferdinand Céline

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par Franck Macé
Université Paris Sorbonne - Master 1 2008
  

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2) L'influence de Freud

Durant les années vingt paraissent des textes importants de Freud qui ouvrent un nouveau domaine d'étude sur l'homme et sur les ressorts de son âme, un en particulier s'adosse au traumatisme de la guerre paru en 1920 Au-delà du principe de plaisir qui expose la tendance des névrosés de guerre à réactiver leur trauma dans leurs rêves. Il est possible que le docteur Destouches ait eu connaissance de ces études au vu du fait que ce trauma continu, répété structure le récit du premier roman de Céline dans lequel le chaos de la guerre habite le narrateur. En effet ce dernier y fait souvent référence et a tendance à la déceler partout caractérisée par sa propension à perdurer sous différentes formes: colonie, guerre. Enfin l'aspect onirique qui accompagne le ressassement du traumatisme est marqué dans le texte par le délire fantastique adossé à l'irréalité. Dans cette étude Freud met en lumière la notion de Thanatos, la pulsion de mort inhérente à l'homme face aux pulsions de vie: Eros. C'est là un nouvel éclairage concernant le profil psychologique du narrateur, citons également l'étude de Deleuze aux accents freudiens sur le personnage de Lantier servant de préface à l'édition Folio de La bête humaine et parue dans Logique du sens où il évoque la fêlure de ce dernier et précise ceci: « Ce que la fêlure désigne, ou plutôt ce qu'elle est, ce vide, c'est la Mort, l'Instinct de mort. » et un peu plus loin: «l'instinct de la mort, qui n'est pas un instinct parmi les autres, mais la fêlure en personne, autour de laquelle tous les instincts fourmillent61. ». Nous connaissions la dimension naturaliste des romans de Céline cependant il semble que les oeuvres de ce dernier puissent être rapprochées de celles de Zola au vu également des angles d'étude freudiens choisis par la critique en guise d'herméneutique. Au reste à l'instar de Vitoux dans la biographie de Céline concernant la dimension freudienne du texte nous pouvons nous demander si l'oeuvre littéraire n'inspire pas davantage la sphère psychanalytique

59 Ibid, p.299.

60 Ibid.

61 Gilles Deleuze, préface de La bête humaine, Paris, Gallimard, 2001, p.14.

qu'elle ne s'en nourrit réellement. Quoi qu'il en soit le prisme freudien s'avère pertinent afin d'explorer cette écriture en rupture. La lecture de Freud par Céline n'est pas certaine toutefois Vitoux dans cette même biographie rappelle que le médecin s'intéressa à cette nouvelle sphère d'étude de l'homme notamment lors de séjours à Vienne où il côtoya un cercle psychanalytique dont les recherches ne le laissèrent pas indifférent ainsi que le précise l'auteur arguant cela de sa soif de comprendre: « Voyeur de l'inconscient, cette ambition ne pouvait qu'enchanter l'écrivain62. ». A ce propos nous pouvons observer des marques significatives de la présence de cette science dans le récit, marques qui valorisent la psychanalyse tout en réduisant l'apport des études naturalistes antérieures à Freud comme à la page 397 du premier roman où Bardamu expose une nouvelle sentence: « De nos jours, faire le « La Bruyère » c'est pas commode. Tout l'inconscient se débine devant vous dès qu'on s'approche63. ». Une seconde marque d'intérêt pour cette science serait illustrée en la personne de Baryton et l'éclairage porté sur les aliénistes au cours de la dernière section du roman. Ainsi et de manière cohérente nous pouvons déduire qu'à l'exploration littéraire que représente cette écriture se joint une seconde rupture: la présence d'une science nouvelle tendant à explorer les profondeurs de l'âme. En outre les références à Freud, multiples, se trouvent aussi en dehors du champ littéraire confirmant le grand intérêt de notre auteur comme lors d'un entretien où une question est posée à propos de ses influences: « -Eh! Bien, c'est Balzac, Freud et Breughel64. ». Il est intéressant de noter que le panthéon de Céline adjoint à la rigueur scientiste de Balzac le goût pour les délires et les convulsions parfois sous-jacentes de Freud ou Breughel. L'attelage réalisme-délire, loin d'être contre-nature, est toujours valorisé. Cependant à l'image de l'huile qui au contact de l'eau la dénature, les apports de la psychanalyse offrent un dépassement du simple naturalisme et de sa vérité révélée. En effet il n'est plus possible à l'image des romans du XIXème siècle d'imposer une vérité par le biais d'un narrateur omniscient. La certitude de la connaissance de l'homme s'amenuise à mesure que les complexités de son âme sont révélées. C'est là un nouvel exemple de l'influence freudienne selon Godard dans l'article consacré à notre auteur issu de Une grande génération car Céline a compris cela en ne proposant que le jugement très personnel du narrateur, de plus il renouvelle le roman par le biographique. Un second exemple de la distance prise avec le simple naturalisme se trouve dans l'hommage rendu à Zola par Céline en 1933 puisque l'auteur montre certaines limites de cette esthétique avec des accents freudiens ostensibles comme le montre cet extrait: « Nous avons appris sur les âmes, depuis qu'il est parti, de drôles de choses. » ou encore peu avant dans le discours: « Zola croyait à la vertu, il pensait à faire horreur au coupable, mais non à le désespérer. Nous savons aujourd'hui que la victime en redemande toujours

62 op.cit., p.403.

63 op.cit., p.397.,

64 L.F.Céline, cahiers Céline, vol 1, Paris, Gallimard, 1976, p.41

du martyr, et davantage65. ». Afin de conclure nous jugeons utile de souligner combien la psychanalyse est traitée avec ambivalence par Céline tant ce qu'elle apprend sur l'homme va dans le sens de son obscurcissement tandis que ces mêmes révélations vont dans le sens d'une nouvelle exploration littéraire progressiste, régénérée.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault