WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Crise systémique et paradigme de la décroissance : effondrement ou métamorphose

( Télécharger le fichier original )
par Billy FERNANDEZ
Université de Savoie - Master 2 Système Territoriaux, Développement Durable et Aide à  la Décision 2010
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2. Le développement durable, entre désillusion et critique

Le développement durable, invoqué comme le moyen de construire un monde à la fois soutenable et équitable tout en faisant croitre le PIB mondial, semble aujourd'hui montrer les limites de sa pertinence.

a. Oxymore et pléonasme à la fois

Au plan théorique, nous l'avons vu, le développement supposant une croissance économique illimitée, celui-ci ne peut fondamentalement etre « durable ». En effet, une croissance économique infinie est impossible dans un monde fini.

Ainsi, dans Le Macroscope, Jo`l De ROSNAY, défenseur du paradigme systémique - dans le prolongement de BERTALANFFY notamment, s'agissant des interactions économie/écologie, décrit, en conclusion, le systeme économique « comme un parasite drainant à son profit l'énergie et les ressources [de l'écosysteme], qu'il envahit et qu'ilfinira peut titre par tuer »91.

Le paradigme de la durabilitéfaible - fondée sur la substituabilité des facteurs92, se heurte d'une part aux limites de l'effectivité des réalisations techniques - songeons à ITER-, et d'autre part aux problemes axiologiques, éthiques et sociaux qu'il induit - transhumanisme, technoscience et démocratie, domination, logique du détour...

L'immatériel, ou économie de la connaissance, remplace moins l'économie industrielle qu'elle ne la complete, des lors qu'elle est fondée sur l'informatique, l'électronique, le numérique ou la convergence NBIC. La production d'une puce (microchip) nécessite par exemple une masse de matériaux qui dépasse 17 000 fois son poids93, tandis que deux cents clics par jour sur une souris émettent sur un an autant de GES que 5000km parcouru en voiture94.

Le développement durable (sustainable development ) constituerait également un pléonasme si l'on se réfère à la définition donnée par ROSTOW en 1960 du développement : « self-sustaining growth ». Le développement serait ainsi déjà « auto-soutenable »...

9 1 De ROSNAY, 1975, Le Macroscope, Point essai, 346p.

92 Le capital naturel serait substituable par un artifice, notamment technicien.

93 Voir rapport de l'ONU, Ordinateur et environnement, Kluwer Académie, 2004.

94 Du fait notamment de l'activité des serveurs. Selon une étude récente du MIT, cité par Paul ARIES, La simplicité volontaire contre le mythe de l'abondance.

b . Ecoefficience et « effet rebond È (SCHNEIDER, 2003)

Les progres en matiere d'écoefficience enfin, pour tres souhaitables qu'ils soient, sont partiellement contredits par la logique du paradoxe de Jevons95, ou effet rebond (SCHNEIDER, 2003). Il reside en ce que l'introduction de technologies plus efficaces en termes ecologiques - energetiques, consommation de materiaux...- a tendance, dans l'agregat, à augmenter l'empreinte ecologique globale96. Par exemple, les voitures sont moins polluantes, mais on parcourt de plus grandes distances, on a tendance à en consommer davantage en les jetant plus vite, ou on augmente la cylindree...97Ce paradoxe est accentue par la publicite, la mode et « l'obsolescence programmée » (LATOUCHE, 2006) des produits, qui accelerent le taux de renouvellement de consommation d'un produit98. Plus largement, on sait que, passes certains seuils de satisfaction99, les besoins peuvent devenir superflus et peuvent etre creer artificiellement par la persuasion publicitaire100 - deuxieme budget mondial apres l'armement. On parlera alors plutôt de désirs.

c. Le développement durable, outils de domination marketing ?

Par ailleurs, la plupart des acteurs economiques et politiques ont trouve dans le developpement durable un nouveau slogan mobilisateur et marketing mais, surtout, une nouvelle et formidable source de profit. C'est ainsi que nos imaginaires sont colonises par les merites vantes de la « voiture propre È101, et plus largement des technologies propres, allant meme jusqu'à l'invention de « l'autoroute ecologique »102... Le developpement des labels et les operations de communication « vertes » pratiquees par les firmes multinationales, dans le meilleur des cas au pretexte de « mesures » qui ne sont parfois que des diagnostics ecologiques ou sociaux, peuvent laisser perplexe. Ce d'autant plus lorsque l'on s'interesse à la definition qu'ont du developpement durable certains acteurs economiques eminents. Ainsi, pour Michel De FABIANI, president de British Petroleum France 103: « Le developpement durable, c'est d'abord produire plus d'énergie, plus de gaz, peut-être plus de charbon ou de nucléaire, et certainement plus d'énergies renouvelables. Dans le meme temps, ilfaut s'assurer que cela ne sefasse pas au détriment de l'environnement.È

95 En reference à l'economiste anglais Stanley Jevons, qui l'analysa à propos de la consommation de charbon par les chaudieres à vapeur à la fin du XIXème siècle.

96 Une definition plus large de l'effet rebond, proposee par Francois SCHNEIDER est « l'augmentation de consommation like à la reduction des limites à l'utilisation d'une technologie, ces limites pouvant etre monitaires, temporelles, sociales, physiques, liies à l'effort, au danger, à l'organisation... È

97 SCHNEIDER analyse egalement le fondement psychologique du phenomene. Par exemple, une voiture moins polluante permet des economies, qui seront affectees à un voyage aux Antilles...

98 Ou diminue sa duree de vie - ou d'usage - moyenne.

99 On pense notamment à la pyramide des besoins de Maslow.

100 Et/ou par beaucoup d'autres mecanismes tels le désir mimétique (GIRARD) ou la consommation ostentatoire (VEBLEN)

101 Un mythe d'autant plus trompeur que si celle-ci est electrique et que l'electricite est produite à partir de ressources carbonees fossiles (68% de la production mondiale en 2007), celle-ci emet près de 3 fois plus de GES qu'avec un moteur thermique classique...

102 Publicite Vinci 2010 à propos de l'A19.

103 Cite par Serge LATOUCHE, 2006, op. Cit.

d. L'oubli du social104

En outre, dans la plupart des discours et des actions menées au nom du développement durable, la dimension sociale est très timorée, quand elle n'est pas totalement absente. Ainsi, depuis que le développement durable a percolé les esprits et parfois les actions, les inégalités sociales n'ont pas diminuées et se sont même accrues dans de nombreux cas. Mais, quand l'équité sociale est parfois mentionnée, la réflexion sur << l'harmonie sociale È105, les conditions d'épanouissement de l'individu - sécurité, rapport au travail106- ou du collectif - dans son rapport au projet du territoire, à la convivialité- est quasiment totalement absente.

Ainsi, au plan conceptuel comme dans la manière dont il est investi par les acteurs économiques et politiques, le développement durable, symbole de la << résilience du développementÈ (LATOUCHE, 2004), ne semble pas valablement pouvoir survivre à ses contradictions.

D'ailleurs, le grand économiste roumain Nicholas GEORGESCU-ROEGEN, dont nous avons déjà eu l'occasion de parler, n'écrivait-il pas, en 1991 déjà: << Il nefait aucun doute que le développement durable est un des concepts les plus nuisibles È.

1 04 Voir Léa Sébastien et Christian Brodhag, << A la recherche de la dimension sociale du développement durable È, Développement durable et territoires [En ligne], Dossier 3 : Les dimensions humaine et sociale du Développement Durable, mis en ligne le 01 mars 2004, Consulté le 31 mai 2010. URL : http://developpementdurable.revues.org/index1133.html

105 L.Sébastien et Brodhag, ibid., 2004

106 On parle alors de <<réalisationÈ dans son travail, étant entendu que <<tout travail travaille à faire un homme en même temps qu'une chose Ç (Emmanuel MOUNIER)

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand