Le non-respect de la législation se manifeste en
un double point de vue : d'une part la création et le
fonctionnement informel des entreprises en zones assiégées (A) et
d'autre part, le non-respect des droits des travailleurs (B).
A/ LA CREATION ET LE FONCTIONNEMENT INFORMEL
DES ENTREPRISES EN ZONES ASSIEGEES
Après le déclenchement de la crise
socio-politique de nombreuses entreprises telle que la société
ivoirienne de tabac a continué à fonctionner dans les zones
occupées de même, comme l'a révélé le dernier
forum économique qui s'est tenu à Bouaké, de nombreuses se
sont créées et fonctionnent de façon informelle entre
autres entreprises on peut citer : Gonfreville (textile), Moov
(téléphonie cellulaire), Micronet (Vente d'ordinateurs et
accessoires), CEPCI (épargne), LONCI (loterie), TRITURAF (alimentaire).
Cette liste n'est pas exhaustive, mais elle démontre du nombre important
de travailleurs se trouvant dans cette zone.
Tout cela nous amène à nous poser la question
suivante : quel est le sort des travailleurs de ces entreprises là
?
D'autant plus qu'il n'existe plus d'inspection du travail et
des lois sociales. Il serait nécessaire que les autorités se
penchent sur le cas de ces travailleurs, notamment les autorités de la
rébellion.
Le non respect de la législation sociale a pour
conséquence le non respect des droits des travailleurs.
B/ LE NON-RESPECT DES DROITS DES TRAVAILLEURS
Le fonctionnement normal d'une entreprise implique, qu'au sein
de celle-ci règne, un climat harmonieux et serein dans les rapports
entre l'employeur et les salariés. Cela sous-entend que la
législation sociale sur laquelle se basent toutes ces relations soit
bien appliquée. Hors, les partenaires sociaux, que ce soit les
employeurs ou les salariés, veulent tirer profit des failles de la
législation sociale. Ainsi, dans une zone ou il règne l'anarchie
et l'absence totale de contrôle de l'application de la législation
sociale, il est naturel que les droits des travailleurs ne soient pas
respectés.
En définitive, la crise socio-politique n'a pas fait
que des victimes dans les affrontements armés, elle continue de faire
des victimes en zones assiégées et même dans la zone
gouvernementale. En effet, avec le nombre important de travailleurs
déplacés de guerre dans la zone gouvernementale, les inspections
du travail qui manquent de moyens (financiers, matériels, humains) sont
débordées et ne peuvent plus veiller à l'application de la
législation sociale. Il est vrai que l'accroissement du nombre de
travailleurs dans la zone gouvernementale n'empêche pas les inspecteur du
travail d'effectuer leurs missions de contrôle mais, au regard du nombre
important des travailleurs déplacés qui le plus souvent ne sont
pas tous déclarés, et au regard du manque de moyens des
inspecteurs du travail ceux-ci ne pourront pas exercer leur action de
contrôle. Par conséquent, la fraude à la législation
sociale existe dans les deux parties du pays.
CONCLUSION GENERALE
En somme, il faut retenir que face à la fraude
à la législation sociale ivoirienne, l'inspection du travail et
des lois sociales est totalement inefficace. En effet, lorsque l'état a
mis sur pied l'inspection du travail, c'était dans l'objectif
d'éviter que la législation sociale ne soit contournée, ne
soit pas appliquée par les partenaires sociaux principaux que
sont : Les employeurs et les travailleurs.
Mais, force est de constater que ce corps de
fonctionnaires de l'administration du travail ne joue pas pleinement le
rôle qui lui a été attribué. Témoin, la plus
part des employeurs refusent dans un souci de profit personnel d'assumer leurs
obligations vis-à-vis de leurs employés. Ainsi, les cas les plus
récurrents concernent le paiement du salaire en dessous du salaire
minimum interprofessionnel garanti, le non respect de la durée
légale de travail, la non déclaration des salariés
à la caisse nationale de prévoyance sociale, les embauchages
prohibés. Cette nomenclature n'est pas exhaustive, mais elle
témoigne du mépris des employeurs face à la
législation sociale. Les employeurs ne sont pas les seuls fraudeurs
sociaux, car les travailleurs commettent aussi des entorses à la
législation sociale. Il s'agit par exemple de la falsification de
certificats médicaux dans le but de s'absenter pour vaquer à
leurs occupations personnelles au détriment de l'employeur (entreprise
concurrente), la délivrance ou la divulgation de secret de fabrication,
la vente de marchandises appartenant à l'entreprise de l'employeur,
etc...
Ainsi, on se rend compte de l'existence
réelle de la fraude et de son caractère évolutif, dans la
mesure où les acteurs principaux du monde du travail font chaque
jour preuve d'ingéniosité et de créativité pour
échapper à l'application des dispositions des textes en
matière sociale.
Face à cette fraude que va faire l'inspection du
travail et des lois sociales ?
Initialement, lorsque les pouvoirs publics avaient
décidé de mettre sur pied l'inspection du travail, c'était
dans le but d'éviter que les dispositions de la législation
sociale ne soient pas appliquées.
Mais aujourd'hui, le constat est amer, car malgré
l'existence de l'inspection du travail, il y a tous les jours des cas de
fraude.
Il ressort des enquêtes et des rencontres avec les
inspecteurs du travail, que ce corps de contrôleur de l'administration du
travail souffre de nombreuses difficultés. L'inspection du travail
rencontre deux types de difficultés : l'insuffisance des moyens
théoriques et la faiblesse des moyens pratiques de l'inspection du
travail.
Les difficultés au plan théorique que rencontre
l'inspection du travail résident dans le fait que la législation
sociale dans son entièreté ne répond plus aux exigences
nouvelles. En effet, les moyens d'actions et les pouvoirs que confèrent
les dispositions législatives et réglementaires à
l'inspection du travail ne lui permettent plus d'assumer correctement ses
missions.
La plupart des inspecteurs du travail rencontrés se
plaignent de l'absence de coercition dans leurs prérogatives.
Témoin, l'ancien code du travail de l964 et celui de 1995 qui demeure en
vigueur aujourd'hui ne leur confère aucun pouvoir coercitif. De plus, il
y a une forte proéminence de l'appareil judiciaire notamment du tribunal
du travail. En effet, cette prépondérance du pouvoir judicaire
est préjudiciable pour les salariés, dans la mesure où les
tribunaux ayant de nombreux dossiers n'arrivent pas toujours à
satisfaire rapidement les usagers. De sorte que, certains meurent avant l'issue
du procès. Il est malheureux de constater que l'état dans son
choix à préférer démunir l'inspection du travail et
des lois sociales, dans l'objectif de permettre aux chefs d'entreprise d'abuser
de leurs employés. Ce constat amer se fait dans la plupart des pays
d'Afrique noir francophones, dans lesquels les pouvoirs publics ont
optés pour le même choix à savoir : laisser
l'inspection du travail sans moyens.
Ce manque de moyen, apparaît aussi dans les pays
développés notamment en France où les inspecteurs du
travail se plaignent du manque de moyens matériels, d'effectifs et du
choix des politiques en faveur des employeurs.
L'élaboration de ce travail n'a pas du tout
été aisée notamment à cause de l'insuffisance
d'écrits nationaux en la matière, et de l'impossibilité de
rencontrer certains administrateurs du travail.
Ainsi, il faudrait une importante réforme de la
législation sociale, notamment du titre 9 sur le contrôle du
travail et de l'emploi. Ensuite, il faudrait que des textes
réglementaires soient rapidement pris en remplacement des anciens. De
plus, il faudrait que les propositions faites par les inspecteurs du travail
lors des ateliers et des séminaires soient sorties des tiroirs et
analysées par les autorités compétentes. Enfin, il faut
que l'état puisse aider franchement l'administration du travail, car si
les travailleurs qui sont censés animer ce secteur souffrent dans
l'accomplissement de leur travail, du fait de la non application de la
législation sociale par les employeurs, c'est l'économie
nationale qui subira les conséquences de cette fraude à la
législation sociale.
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