1.2 Charlie Parker
L'influence exercée par Charlie Parker sur Konitz se
manifesta en deux étapes: une attitude de rejet tout d'abord puis une
assimilation irrépressible de sa musique. Nous commencerons par une
brève étude des innovations de Parker, puis nous comparerons son
style à celui de Konitz en mettant en perspective leurs traits communs,
ainsi que le son, le répertoire, la virtuosité et les divergences
visibles dans leurs conceptions respectives de l'improvisation. Il s'agira
moins d'observer des critères de différenciation entre
deux styles à partir d'exemples musicaux que de comparer les
procédés employés par ces musiciens, afin de disposer de
repères à partir desquels pourra être menée
l'analyse de la musique de Lee Konitz.
1.2.1 Charlie Parker, une révolution musicale
L'année 1945 marqua le sommet de la carrière de
Charlie Parker avec la publication sur le label Savoy des enregistrements
mythiques du quintette comprenant « Koko »,
42 «consulté en août 2010»
dothemath.typepad.com/dtm/1-18-with-lee-k.html»So many guys came out
of Pres: Stan Getz, Zoot Sims, Al Cohn, Paul Desmond, Wardell Gray, Allen
Eager...but Warne did not just an imitation, but embodied the actual spirit of
Lester Young.»
43 KONITZ Lee, Oleo, Sonet, New York, 1975
44 YOUNG Lester, The Kansas City Sessions,
Commodore, New York, 1938
45 KONITZ Lee, Tenorlee, Candid, New York,
1977
46 KONITZ Lee, DANKO Harold, Once upon a
Line, Musidisc, Paris, 1990
47 KONITZ Lee, The Lee Konitz Duets,
Milestone, New York, 1967
« Now's the Time » et « Billie's Bounce.
»48 À ce moment, le swing et ses grands orchestres
laissaient la place au jazz moderne et à ses petites formations. Le
be-bop, plus qu'un style parmi d'autres, devint le courant majeur du jazz. Son
premier représentant en était Charlie Parker. Ses innovations
établirent un nouveau standard de jeu. Aucun autre musicien n'aura
autant sollicité l'intérêt de ces pairs. Sa musique
était une synthèse de divers éléments provenant
à la fois du blues de Kansas City, du swing, de la musique populaire,
des chansons de Broadway, de Tin Pan Alley 49 et des folks
songs. Les musiciens de jazz qui ont le plus compté pour Parker
étaient précisément Louis Armstrong, Don Byas, Lester
Young (avec qui il enregistra lors des concerts du JATP50), Johnny
Hodges, Art Tatum, Benny Carter et Coleman Hawkins. Parker réussit
à adapter le blues rural à une musique moderne plus
élaborée. Dans son laboratoire musical, Parker mêla d'une
manière naturelle les nuances du blues vocal aux harmonies chromatiques.
Son sens de la pulsation et son concept rythmique lui permirent une grande
liberté mélodique. Ainsi, il pouvait commencer ses phrases
musicales sur n'importe quel temps de la mesure, faible ou fort, à
l'image de Lester Young. Le style de Parker comprenait donc l'habilité
à jouer le blues, à swinguer à l'instar de jazzmen des
années 1930, un vocabulaire harmonique élaboré et une
technique phénoménale du saxophone alto.
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