CONCLUSION GENERALE
La déclaration universelle des droits de l'homme et le
système juridique qui en découle se veulent universels, il reste
que se sont des textes humains inscrits dans un contexte et une histoire
particulière. Certains éléments et certaines formulations
peuvent exprimer l'origine occidentale de leurs rédacteurs (l'importance
de la dimension individualiste). D'autant qu'ils ont été
adoptés à une époque où la plus part des pays du
sud étaient encore sous domination coloniale. C'est pourquoi sont peu
à peu apparus des textes régionaux : des déclarations
africaines, arabes, européennes, asiatiques etc. Un texte comme la
charte africaine des droits de l'homme et des peuples adoptée en 1981
intègre par exemple la notion « de valeurs
traditionnelles reconnues par la communauté » et met en avant
les droits et devoirs de communauté « famille,
société, nation, Etat » : dans une approche plus
communautaire moins individualiste. On peut certes remettre en cause
l'européocentrisme et prendre plus en considérations les
spécificités culturelles et religieuses.
Les guerres les plus meurtrières de l'humanité
résultaient généralement de l'idéologie
prônant la supériorité d'une race par rapport aux autres
races. C'est dans ce sillage que le coriace impérialiste Jules
FERRY avançait que : « les colonies sont pour
les pays riches un placement de capitaux des plus avantageux ».
Aussi défie-t-il le soutien de la thèse sur
l'égalité, la liberté, l'indépendance des races
inférieures. Ainsi commence à être renforcée la
pratique de la servitude, de l'esclave dans cette mouvance de la
conquête coloniale. Consciente de ces enjeux pouvant engendrer des effets
néfastes à travers l'humanité, l'Assemblée
Générale des nations unies adopta le 10 Décembre 1948 une
déclaration universelle des droits de l'homme visant à
protéger et promouvoir les droits des humains dans un cadre
spatio-temporel. Ainsi la déclaration universelle des droits de l'homme
posa un certain nombre de principes qui devraient être insusceptibles de
violations, lesquels principes étant entre autres
« l'égalité des
hommes »(art1), « la non
discrimination »(art 2), « l' interdiction de l'
esclavage »(art 4), « l'interdiction de la
torture »(art 5), « droit à la
nationalité » ( art 15) etc.
Influencé par d'autres textes d' obédience
libérale et surtout par cette Déclaration Universelle des Droits
de l'Homme ,la notion de droits des peuples fut théorisée
au lendemain de la second guerre mondiale(1976) dans un processus de
revendications nationalitaires qui devaient aboutir à la
décolonisation .C `est dans ce sens que l'ethnologue français
Claude Levi STRAUSS dénonçait les méfaits de l'
acculturations et mettait l'accent sur la nécessité de
reconnaître les droits particuliers aux minorités ethniques. On
assiste, par conséquent, à des affirmations identitaires d
toutes sortes, à la sclérose grandissante des Etats-nations
réclamant leur indépendance voire souveraineté. En effet
la souveraineté ,qui est un principe essentiel définissant un
Etat qui n' est soumis à aucune autre puissance et qui exerce une
autorité suprême , se fonde sur un autre principe appelé
principe de l'auto-détermination qui permet à tout
à disposer de lui-même et à prendre les décisions
politiques qui les concernent .Ce principe général de l'
auto-détermination se trouve évoqué dans la
déclaration universelle des droits de l'homme en ses article 1et
15 . Delors des revendications nationalitaires se renforcèrent
et aboutirent, de nos jours, à la décolonisation, lesquels
mouvements de décolonisation vont gagner l'espace mondial. Ces peuples
opprimés se réfugièrent derrière cet esprit
humaniste de la déclaration pour revendiquer leur libération. Ce
fut le cas du Congo en 1960, de l'Algérie en 1962 ; le cas du
Bangladesh etc. En gros, 50 à 200 Etats souverains sont estimés
à l'heure actuelle.
Toute conception des droits de l'homme possède une
vocation à s'appliquer, voire à s'imposer à l'ensemble des
Etats, des peuples et des individus. La déclaration universelle des
droits de l'homme de 1948 forme le socle sur lequel se sont construits les
instruments à caractère régionaux. La déclaration
universelle a inspiré une importante activité normative et a
servi de modèle y compris en tant que première phase d'une
dynamique conduisant à la rédaction de traités à
plusieurs documents analogues qui jouent un rôle essentiel dans la
construction d'espaces politiques de dimension régionales. La
déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 a ainsi
directement inspiré le conseil de l'Europe créé un plus
tard, dans la rédaction de la convention européenne de sauvegarde
des droits de l'homme et des libertés fondamentales, traités
unique en son genre puisqu'il prévoit aussi un mécanisme de
surveillance de son respect de nature judiciaire et obligatoire, la cour
européenne des droits de l'homme créée peu après,
la communauté économique européenne, intégré
à l'union européenne en 1992 a progressivement affirmé son
identité politique, notamment par l'adoption des déclarations du
conseil des ministres de 1986 et du conseil européen de 1991 sur les
droits de l'homme, qui ont précédé la rédaction de
la charte européenne de droits fondamentaux adopté à Nice
en 2000. Et en d'autre part la cour de justice des communautés
européennes juridiction propre à l'union européenne a
progressivement reconnu la jurisprudence de la cour européenne des
droits de l'homme comme faisant parti des normes S'imposant aux
états-membres.
Dans une filiation étroite avec la déclaration
universelle, l'Europe dispose aujourd'hui d'un ensemble de normes relatives aux
droits de l'homme dont la surveillance est assuré par des
mécanismes juridictionnels éprouvés. La déclaration
américaine des droits et devoirs de l'homme et l'organisation des
états américains de 1948 est à l'origine de la convention
interaméricaine des droits de l'homme de 1978, assortie elle aussi
d'une cour de justice chargée de vérifier son respect, mais selon
un principe d'adhésion facultative des états. Force est de
constater que la déclaration a inspiré l'union africaine avec
l'adoption de la charte africaine des droits de l'homme et des peuple
adopté le 27 juin 1981 à Nairobi Kenya lors de la 18ème
conférence de l'organisation de l'unité africaine entrée
en vigueur le 21 octobre 1986. Les grandes conférences mondiales
thématiques que l'organisation des nations unies a réunies depuis
le début des années 1970 se sont, d'autre part conclus aussi par
des déclarations dont certaines ont été le prélude
à l'adoption de normes internationales contraignantes importantes.
Les Etats très sourcilleux sur la question de leur
souveraineté peuvent organiser eux-mêmes des limites aux effets
concrets des droits de l'Homme. Cela passe par la conception du droit en
opposant de manière rédhibitoire le droit interne au droit
international en refusant toute ingérence dans leurs affaires
intérieures. Ainsi, l'Etat peut créer un espace clos dans lequel
les pouvoirs publics se sentent libres d'agir à leur guise. Cela peut
prendre plusieurs formes :
Il peut s'agir de la non ratification d'un traité
international sur les droits de l'Homme rendant caduc de beaux textes
négociés au sein d'une organisation internationale car restant
sans effet. Le refus des Etats-Unis de ratifier les traités sur le
statut de la CPI est un très bon exemple. L'Etat peut aussi introduire
des réserves lors de la ratification des traités pour en limiter
certains effets dans son pays. Même après ratification il peut
freiner l'application réelle du texte ou en suspendre les effets pour
des raisons discrétionnaires d'ordre public.
Cette compétence discrétionnaire de
l'Etat peut se fonder sur l'article 124 de la CPI qui permet à un Etat
de refuser pour une période de 7 ans la compétence de celle-ci en
ce qui concerne les crimes de guerre commis par ses ressortissants. Mais aussi
en vertu du principe de complémentarité, la compétence de
la CPI s'exerce uniquement quand un Etat est véritablement dans
l'incapacité d'engager des poursuites contre des criminels de guerre
présumés relevant de sa compétence ou n'a pas la
volonté de le faire. A ce titre l'exemple du Sénégal est
très significatif dans la mesure où malgré les multiples
pressions internationales subies, a adapté sa législation pour
pouvoir juger l'ancien Président Hussein HABRE.
Par ailleurs le respect ou la protection des droits de
l'homme est souvent invoqué par certains Etats pour justifier une
attaque ou une mission d'inspection alors que les enjeux officiels sont, soit
d'ordre politique, soit d'ordre militaire. C'est le cas par exemple de la
guerre opposant les Etats Unies à l'Irak ou les objectifs humanitaires
invoqués par BUSH, trouvaient leurs fondements sur le fait de
libérer l'Irak de son dictateur Saddam Hussein afin qu'il devienne un
pays unis stable et libre, d'appuyer la reconstruction et l'aide humanitaire ,
réparer les dommages causés à l'infrastructure du pays et
à la population civile et de condamner Saddam Hussein pour ces crimes(
violations des droits de l'homme) et de promouvoir la démocratie et le
droit de la femme dans le monde musulman. Enfin les droits de l'homme sont
souvent vus comme un instruments de domination de certaines grandes puissances,
plutôt qu'un instrument d'humanisation progressive de la connivence
nationale et internationale.
Mais la contestation de la déclaration universelle des
droits de l'homme ne doit pas servir à remettre en cause sa valeur. Ces
critiques ont permis l'adoption par l'assemblée générale
des Nations Unies des pactes et conventions ayant un caractère
contraignant contre les Etats signataires en cas de violation. Il en est
ainsi de la convention internationale sur l'élimination de toutes
les formes de discrimination raciale(1965), du pacte international relatif aux
droits économiques, sociaux et culturels(1966), et tout récemment
l'adoption par les Nations Unies, en Septembre 2007, d'une déclaration
universelle des droits des peuples indigènes.
Malgré cette universalité proclamée par
la déclaration elle-même, certains Etats comme la Malaisie (1997)
et organisations non gouvernementales estiment qu'il faudrait
réécrire la déclaration universelle des droits de l'homme
pour la rendre moins tributaire de sa source occidentale et y intégrer
le droit des minorités et le droit au développement et à
l'environnement.
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