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Enracinements polynésiens d'hier et d'aujourd'hui dans l'archipel de Nouvelle Calédonie

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par Tomasi TAUTU'U
Université de Nouvelle Calédonie - Master 2 arts, lettres et civilisations option francophonie 2012
  

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4. La visite D'ENTRECASTEAUX.

Comme pour James COOK en 1774, le procédé d'accueil a été identique, dix neuf ans plus tard, lors des premiers contacts avec l'équipage d'Entrecasteaux. Le 23 avril 1793, les « Naturels » de Balade, après quelques échauffourées au moment où les marins embarquaient, revinrent sur la plage «  en agitant une banderole blanche », en guise de paix selon les nouveaux venus. Les cinq hommes présents, regrettaient ce qui s'était passé, et reconnaissaient la faute des « kaya176(*) » c'est-à-dire des «  étrangers » parmi eux. Ce détail nous informe la présence d'autres personnes « étrangères » à la région au moment des faits. Etaient-ils « Polynésiens » ?

D'Auribeau l'un des coéquipiers du commandant pense à ce propos que :

« La connaissance que Monsieur Cook leur a laissé des objets de fer, leur en a fait connaître le prix ; une hache est pour le naturel un objet d'un prix inestimable. La quantité qu'ils en ont aperçue aux travailleurs leur a fait concevoir le téméraire dessein de les enlever de force. Les vols commis la veille et leur impunité, toutes ces raisons les déterminèrent sans doute à les attaquer177(*) ».

Fig.18 : d'Entrecasteaux arrivé en N.Calédonie en 1793.

Concernant le massacre de l'équipage d'une pinasse du navire de guerre français « l'Alcimène » par les habitants de Poum  à cette même époque, jean GUIART, ayant la même interprétation que Maurice LEENHARDT écrit : 

«  Les gens s'étaient jetés sur les marins au moment même où ils quittaient pour aller plus au sud. Partir ainsi, après avoir reçus au mieux, ne pouvait être compris que comme une trahison : n'étaient ils pas les morts venus apporter à leurs descendants, et à eux exclusivement, leur richesses ? Leur état de mortels se découvrait ainsi en paiement d'un mauvais procédé attribué à leur état de divin».178(*) 

Cette interprétation des évènements lors des premiers contacts, semble correspondre tout à fait à la mentalité océanienne d'antan. Le vol, lors des premières rencontres avec les Européens, aurait été la cause récurrente des représailles violentes des arrivants occidentaux. Notons tout de même que dans les cultures océaniennes, l'équilibre des échanges est fondamental. S'ils considéraient les nouveaux arrivés, du moins au début, comme leurs ancêtres défunts revenus179(*), il n'y avait pour eux, aucun mal à prendre tout ce qu'ils pouvaient. Encore de nos jours dans le milieu océanien, un membre de la famille qui après un long séjour d'absence revenant parmi les siens, est souvent « pris à partie » par ses congénères qui lui « subtilisent »180(*) ses biens. Le nouvel arrivant ne se sentira pas offusqué ou mal à aise pour ces usages presque protocolaires. Bien au contraire, sa générosité lui donnera du prestige auprès de son cercle familial, du moins, momentanément...

E.P.E Chevalier de Rossel, celui qui prit la tête de l'expédition après la mort de l'Amiral, rédigea la relation officielle et la publia en 1807, écrit ainsi181(*) :

Nous prîmes des informations pour tâcher de savoir si les habitants de la Nouvelle Calédonie avaient vu leurs côtes quelques bâtiments européens. Nous crûmes entendre qu'ils se souvenaient du capitaine Cook ; mais je n'oserais pas l'assurer : au reste, nous ne vîmes aucun des objets qu'il dit avoir laissés dans leur île. Cependant l'avidité que ces insulaires témoignaient pour les haches, auxquelles, ils donnent le même nom que les habitants îles des Amis, semble annoncer que la connaissance qu'ils en ont leur avait été donnée par COOK, et que ce navigateur leur en avait également appris le nom. En général ils faisaient très grand cas du fer, et ils nous ont paru en sentir le prix.

Ainsi, le fait que les habitants de Nouvelle Calédonie donnaient à la « hache » le même nom que ceux habitants aux îles Tonga : « Toki » a été interprété comme un héritage du passage de James Cook, minimisant la présence de « Polynésiens » dans ces contrées.

Après quelques jours passés à Balade, le 4 mai 1793 dans  l'après midi il se produisit un évènement important et capital concernant notre sujet d'étude :

« Une pirogue à deux voiles venant du large, de la direction des îles Beaupré, accosta la « Recherche » vers quatre heures. Il y avait sept hommes et une femme bien faits, très robustes, de physionomie agréable et très différents des naturels de Balade. Ils parlaient la langue des îles Tonga et venaient d'une île qu'ils appelaient Aouvéa. Ils montraient en même temps la direction des îles Beaupré. Ils connaissaient le fer et le cochon qu'ils désignaient du même mot que les Tongans 182(*)».

D'Entrecasteaux et ses coéquipiers ont confirmé la présence de « Polynésiens » dans l'atoll de Beautemps Beaupré ou d'une autre île dont ils doutent encore de l'existence. Leur connaissance du fer et du cochon semble indiquer qu'ils venaient d'une région de l'est déjà explorée par les Européens, mais on ne peut savoir s'ils étaient des migrants Polynésiens « fraîchement » arrivés ou des descendants d'immigrés. La présence d'une femme dans la pirogue peut alimenter d'autres hypothèses à ce sujet183(*). La description contrastée entre le « Polynésien » et le « Mélanésien » est flagrant non seulement sur le plan physique que sur le plan psychologique.

* 176 Remarquons tout de même qu'en langue Uvéa, « kai ha'a » signifie « voleur ».

* 177 D'Auribeau cité par PISIER. D'Entrecasteaux en Nouvelle Calédonie (1792 1793), Publications de la Société d'études historiques de la Nouvelle Calédonie, Nouméa, 1976,

* 178 Jean GUIART- Une histoire exemplaire- op.cit., p 251.

* 179 Cette croyance indigène dans tout le Pacifique confirme sans doute ce que les premiers contacts des insulaires avec les navigateurs européens il y a un demi millénaire ont produit dans l'inconscient ou dans la conscience collective.

* 180 Les proches (cousins, cousines et les maternels) demandent au voyageur fraîchement rentré de « faire coutume » de ses affaires personnels.

* 181 E.P.E Chevalier de Rossel, Voyage d'Entrecasteaux, Paris, 1807.

* 182 Cf. Georges PISIER D'Entrecasteaux en Nouvelle Calédonie (1792 1793), Publications de La Société d'Etudes Historiques de la Nouvelle-Calédonie, Nouméa, 1976,

* 183 Certaines personnes ont avancé qu'il n'y avait pas de femmes dans l'excursion de KAULELO.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe