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Enracinements polynésiens d'hier et d'aujourd'hui dans l'archipel de Nouvelle Calédonie

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par Tomasi TAUTU'U
Université de Nouvelle Calédonie - Master 2 arts, lettres et civilisations option francophonie 2012
  

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CHAPITRE VII

VERS UN NOUVEL ORDRE COLONIAL

1. Les stratégies coloniales et les « nouveaux Polynésiens »

Nous l'avons souligné précédemment, la colonisation coupe court aux réseaux maritimes et coutumiers existants et permet le contrôle des populations autochtones. Quelles seront les conséquences de ces coupures de réseaux traditionnels ? Il est vrai que la période coloniale proprement dite, dans une moindre mesure, favorisait des déplacements organisés et planifiés. Dans quelles conditions ces «  déplacements » se faisaient-elles ? Comment les Wallisiens et les Futuniens se sont-ils retrouvés en Nouvelle Calédonie ?

A. Au temps des « Traders »

Les contacts inter îliens entre Uvéa238(*) ou autres îles de la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie dans la période dite coloniale du début du XIXème siècle, à la première moitié du XXème siècle, étaient sporadiques mais effectives.

Les pouvoirs ecclésiastiques et administratifs dans l'ensemble de l'Océanie avaient entravé les échanges naturels et les réseaux traditionnels, afin de mieux contrôler les populations239(*). Auparavant, lors des premières conquêtes commerciales et d'exploitations, les Polynésiens avaient souvent été enrôlés dans les équipages anglo-saxons des « beachcombers », santaliers ou autres. Pour ravitailler les grands ports du Pacifique, Sydney, Auckland et avant de vendre leurs produits en Asie, les marchands avaient besoin de main d'oeuvre à bon marché pour récolter les produits. Les Européens ont élaboré cette stratégie, dans le but de leur éviter tout contact direct avec les insulaires afin d'éviter des agressions. Ainsi, les Polynésiens, plus dociles et toujours volontaires, semblaient être à même de s'infiltrer plus facilement dans les tribus mélanésiennes. En cas de conflits, de nature imposante et guerrière, ils avaient la capacité de se défendre et même de mener l'offensive.

Dorothy SHINEBERG240(*) fait allusion à ces indigènes originaires de Tonga, recrutés au sein des équipages santaliers anglais diligentés par un certain Samuel HENRY à partir de 1829 dont le navire affrété se nommait «  Sophia ». L'auteur nous raconte que les rencontres de ces Polynésiens manoeuvriers avec les populations autochtones mélanésiennes, en particulier du Vanuatu, avaient été plus ou moins violentes. Ainsi, naissaient les premiers conflits « organisés » interethniques entre Polynésiens et Mélanésiens, tels que nous pouvons encore observer de nos jours. En Nouvelle Calédonie, où tous les ingrédients conflictuels sont présents, avec en arrière plan la stratégie d'approche de l'Européen241(*), les exemples en sont multiples.

L'auteur raconte que centre treize Tongiens étaient à bord de la «  Sophia », quand le commandant envoya une équipe abattre du santal. Les premières altercations violentes se sont produites avec les habitants de l'île d'Erromango242(*). Plus tard, des alliances se sont créées dans les stratégies de conflits internes tribaux. L'année suivant, la petite île a été envahie par plus de six cents travailleurs polynésiens originaires d'Hawaï, de Rotuma et de Tonga, embrigadés par les navires anglais exploiteurs de bois de Santal. Le contact avec les autochtones d'Erromango devenait de plus en plus difficile car des divergences de comportement au sein des équipes de travailleurs se faisaient sentir. Apparemment, selon les récits, les Hawaïens ont été souvent à la source de conflits, ayant la ferme intention d'occuper l'île et de tuer tous ses occupants. Mais le destin de tous ces travailleurs a s'est soldé par une épidémie de fièvre qui les a, en partie exterminés.

Si l'archipel du Vanuatu a été visité dès cette époque, l'archipel voisin néo-calédonien a notamment été accosté. A cette même époque, le capitaine Henry aurait aussi rencontré à l'île des Pins, un groupe originaire de Tonga et un autre originaire des îles Samoa, qui avaient vécus parmi les Kunié suite au naufrage d'une pirogue. Le témoignage de ce capitaine nous renvoie d'une manière évidente, à la tradition orale dont nous avons évoqué la teneur au chapitre IV concernant l'arrivée des Tongien à Mu Lifou243(*). Dès le début du 19ème siècle, d'autres contacts ont sûrement eu lieux avec les traders244(*), les baleiniers avaient l'habitude de créer des campements d'avant-garde, aussi, les destinations étaient, selon les dires, souvent camouflées par les capitaines, la concurrence du trafic l'oblige245(*).

A Wallis et Futuna, les baleiniers, les santaliers ou autres marchands anglais ou américains qui fréquentaient ces eaux au début du XIXème siècle246(*), recrutèrent des Indigènes au sein de leurs équipages lors de leurs escales de ravitaillement. Ces navires faisaient du troc avec les populations autochtones. Quand les premiers missionnaires catholiques s'installèrent pour la première fois dans ces archipels en 1837, ils constatèrent que les Indigènes possédaient non seulement des biens susceptibles d'échanges (clous, étoffes, etc.) mais aussi de nombreux outils (haches, pioches, et couteaux) avec lesquels ils cultivaient leurs champs. Les missionnaires rencontrèrent notamment dans ces îles quelques marins européens isolés vivant parmi eux, issus de mutineries ou de naufrages247(*).

Par ailleurs, le chef Sam Kélétaona, ancêtre éponyme de la dynastie des Kélétaona248(*) actuelle de Futuna, fît plusieurs campagnes de pêche à bord de baleiniers dans le Pacifique, en passant par Sydney. Puis il revint dans son île natale après plusieurs années d'absence en 1837. Plusieurs wallisiens ont été ramenés de Fidji par J.P Twyning en 1834, à bord d'un brick. Ce marin marchand avait fini par épouser une Futunienne en juin 1836, et à l'église en 1837. Frédérique Angleviel insiste que : 

«  Les cas de désertion sont très fréquents chez les matelots océaniens car leur engagement s'effectue souvent de force249(*) ».

Le retour à leurs îles natales n'était pas évident. Ils attendaient le plus souvent une opportunité. A cette époque là, il n'était pas été étonnant de voir s'incruster parmi les habitants de l'île accostée ou de les voir s'embarquer un peu plus tard dans une pirogue, avec d'autres personnes dans le but de retrouver leur pays natal. Ainsi, ces échanges pouvaient créer de nouveaux réseaux ou renforcer des réseaux déjà existants entre les îles. L'arrivée des missionnaires religieux dans le Pacifique contribuera à poursuivre ces stratèges d'approche des populations à des fins d'évangélisation.

* 238 Nom originel de l'île de Wallis.

* 239 ANGLEVIEL, Frédérique, Wallis et Futuna (1801-1888, livre deuxième, Thèse, Université de Lille, 1989, p 467, 545 p.

A Futuna dès 1852, le Mgr BATAILLON fait voter aux différentes instances coutumières locales un code de Loi dont l'article 34 et l'article 36 interdisant tout embarquement dans un navire sans le consentement du roi. Dans l'archipel vanuatais les autochtones évitaient d'aller d'île en île de peur d'être kidnappé par les écumeurs de mer.

* 240 SHINEBERG, Dorothy, ils étaient venus chercher du santal, Ed SEHNC, 1973.p 40-51.

* 241 Les Polynésiens abordaient souvent les plages armés par les recruteurs blancs qui eux les attendaient à bord des navires pour charger la cargaison.

* 242 On pourrait se demander si des démarches «  coutumières » ont été entreprises et de quelle manière ?

* 243 & Annexe 2.

* 244 Ce mot anglais signifiant « commerçant », ou « négociant », il prend un sens particulier dans le Pacifique, car les commerçants sont aussi des marins qui pratiquaient la traite c'est-à-dire une forme élémentaire de commerce qui consistait à échanger des marchandises manufacturées de faible valeur contre des produits locaux.

* 245 Opt.cité.p 62

* 246F. ANGLEVIEL, Les missions à Wallis et Futuna au XIXème siècle, collection Iles et Archipels-Editions CRET- Bordeaux-Talence, 1994. p 32 : « Le premier navire marchand ayant accosté ces îles serait le Kamaholelani, appartenant au gouvernement Hawaïen dont le capitaine est un dénommé Moarn ».

* 247 Opt.cité p.26-27. Ces Européens qui vivaient parmi les indigènes, pour être acceptés avaient sûrement épousé des femmes du milieu.

* 248 Plusieurs membres de cette lignée sont installés à Nouméa et au Mont-Dore depuis les années 70, un des leur, ancien mineur de Kouaoua a été promu roi de Sigavé en 2001.

* 249 Opt.cité p.28.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius