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Identité et appartenance: temps et comput anthropologique chez R. E. Mutuza Kabe

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par Jean Francis Photios KIPAMBALA MVUDI
Université de Kinshasa RDC - Doctorat en philosophie 2012
  

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Chapitre troisième: HUMANISME DE MUTUZA

Introduction

Nous cherchons le lien concret qui existe entre la vie de Mutuza et la signification de son oeuvre, c'est-à-dire son intention et son but. Or il est nécessaire (sans réduire l'oeuvre à n'être que l'expression de la vie) de rapporter cette oeuvre à la situation existentielle et politique de Mutuza pour comprendre que sa doctrine n'est pas un jeu éclectique des évolués des pays anciennement colonisés, mais l'effort pour apporter les réponses au problème que pose l'aliénation individuelle (passionnelle), culturelle, politique et religieux, et la recherche de la confirmation de l'identité et appartenance qui est le lot des Pays de Grands Lacs, et notamment dans le Congo-Zaïre qui vécut le flux migratoire de Tutsi en 1959 et plus tard en 1994, la guerre d'agression de 1998 à 2003 avec l'accession de P. Kagame au pouvoir au Ruanda ; mais n'en est pas moins tombée après Lusaka et récemment à Sun City sous le joug d'une attribution de la nationalité (à partir de 1960) et d'une idéologie africanophile d'une citoyenneté transfrontalière ou d'une crainte de taxation de xénophobie.

Ce qui prouve que l'on dépend toujours de son époque. Et les principaux ouvrages de Mutuza sont des témoignages très fidèles du trouble, en ce siècle, de la vie et de la pensée africaines. Dans le chapitre précédent, nous avons évoqué le vide que Mutuza ressent quand il se trouve seul, coupé des autres. Nous aussi, nous avons un tel besoin d'être reconnus et confirmés par quelqu'un qui ait confiance en nous ! Cela n'est pas assez. Être en relation avec une seule personne ne suffit pas, nous avons aussi besoin d'amis, d'avoir une place au sein d'une famille, d'un groupe, d'une communauté, d'une culture. Il faut aller jusqu'aux racines de ces réalités. En métaphysique, on oppose l'anthropologie à l'ontologie. Une philosophie anthropologique est une philosophie de l'homme qui est à la base l'humanisme. L'humanisme est une doctrine morale qui reconnaît à l'homme la valeur suprême(259(*)). Son principe est celui de la tolérance. La philosophie défend l'idée du progrès des civilisations vers une forme idéale de l'humanité, où l'homme serait à la fois libre, grâce au progrès technique, à l'égard des contingences et déterminisme de la nature(260(*)), et libre à l'égard des hommes(261(*)), grâce à la mise en oeuvre d'une Constitution idéale et mondiale. Dans le cas sous examen, Mutuza est contre cette Constitution idéale et mondiale à cause de la citoyenneté transfrontalière des pays des grands lacs.

Ainsi l'humanisme classique est connu sous le prisme où les penseurs occidentaux l'ont logé. Il s'agit d'un retour aux textes et à des valeurs de l'Antiquité. Ils se sont adjoints tout naturellement à l'esprit de liberté et d'indépendance face aux dogmes trop rigides grâce à la Réforme. Une nouvelle libération de l'homme et l'apparition d'un esprit de tolérance que le Don Juan de Molière (+ 1673) appelle l'amour de l'humanité, a vu jour. C'est une espèce de foi en l'homme tout-puissant et maître absolu de la matière. Une anthropolâtrie.

L'humanisme de Mutuza se maintient dans la culture des Balega, tout en la poussant à la rupture semblable à celle opérée par Nietzsche (+ 1900) avec la morale judéo-chrétienne : déclarant la « mort de Dieu », pour fonder l'humanisme de surhomme. La référence à l'Homme comme sujet universel, qui espère agir au nom des valeurs, disparut avec des mouvements idéologiques du XIXe siècle comme la colonisation et des philosophies diverses qui nièrent ou nient encore l'humanité des Noirs, dont celles de Lévy Brühl (+ 1939) en France ou de Lévi-Strauss et Tempels, donnèrent la mesure.

L'humanisme de Mutuza est une autre rupture culturelle d'avec la tradition dominatrice exhibant les limites de la colonisation.

Il se dégage, dans sa quête anthropologique, les termes qui signifient une tendance générale du néocolonialisme à attacher la plus grande importance à faire le bien forçant les autres d'être heureux et à considérer l'époque ante-coloniale comme le standard et le modèle communs par lesquels il faut guider toute activité culturelle.

Il s'établit le lien entre l'anthropologie et la politique. Les Récits épiques sont étudiés et évalués pour leur valeur propre, et non pour servir à embellir et justifier la civilisation des Baame... L'intérêt pour cette époque antique (au sens du temps anthropologique) s'exprime dans une quête fervente de l'oralité: les récits épiques, proverbes, dictons, etc., les oeuvres des dramaturges, poètes et rapsodes qu'on connaissait par coeur et, pour la première fois, éditées de manière critique par certains occidentaux qui acclimatent leur réalités aux faits africains observés. Ils les interprètent avec leurs schèmes et catégories culturels où il y a compartimentation des classes.

L'humanisme de Mutuza est la partie anthropologique de son oeuvre. Et dans cette anthropologie nous étudions ce qu'il entend par la lutte politique. Pour y parvenir nous voyons d'abord le problème de la rencontre ensuite le marxisme mutuziste ou son isolement politique ; nous en arriverons enfin à la considération de l'ordre et du désordre dans la lutte politique.

La lutte politique démontre directement l'affront d'Atalante(262(*)) comme réponse au nominalisme méthodologique : le nominalisme méthodologique ; l'importance de la déconstruction du langage philosophique. Est-ce la terre comme espace qui guide l'affront ou la géométrie qui en est l'arpentage qui conduit à la lutte ? L'idée de société pluraliste et diapasonnée nous permet de comprendre la résistance mutuziste.

Avec la résistance politique nous avons le paradoxe de la communauté et la question de savoir si les faibles ont une place. Mutuza se présente en philanthrope (öéëáíèñüðùò) pour répondre aux nominalistes et, pour résister à la tendance politique d'aliénation.

Section 1. Lutte politique

§1. Rencontre

Nous trouvons chez Mutuza des indications générales sur l'état de la politique de son époque. Dans Les fondements culturels du fédéralisme, une oeuvre détaillant la possibilité d'appartenance, il nous donne de la communauté ancestrale des Balega une vision idéale.  : Les baame vivent détachés de tout impérialisme et il justifie sa position face au modernisme: « la notion d'Etat au sens moderne est récente pour la plupart des pays du Tiers-Monde qui ont accédé à l'indépendance grâce au phénomène de la décolonisation »(263(*)). Mutuza croit qu'au commencement Dieu créa le ciel et la terre, que l'esprit de Dieu(264(*)) planait sur les Lega quand il fit et prouva l'impossible, c'est-à-dire que deux fois deux font cinq(265(*)). Il le fait pour rappeler à l'homme blanc. Ce qu'il a fait de mal quand il a déformé le concept de Bwami en le considérant comme une institution tutsie alors que les baame sont des Hutu et leur mode de gestion, bien que cédé aux Tutsis, gardaient sa substance.

* 259 L'humanisme s'oppose aussi bien au fanatisme religieux qu'à l'étatisme politique, qui voudrait sacrifier l'individu à la raison de l'Etat.

* 260 On peut penser à la faim, au froid et aux maladies.

* 261 Certains philosophes pensent qu'il y aurait une société sans lutte, sans classe, et cependant organisée.

* 262 Atalante, dans la mythologie grecque, fille de Schoenée de Béotie ou de Iasos d'Arcadie. Déçu qu'elle ne soit pas un garçon, son père l'abandonna sur une montagne peu après sa naissance. Elle fut secourue et nourrie par une ourse, puis élevée par des chasseurs. Devenue grande, c'était elle-même une chasseresse habile. L'exploit qui la rendit célèbre fut sa participation à la chasse au sanglier de Calydon, une ville d'Étolie dans le centre de la Grèce. Selon une autre légende, Atalante était une athlète au pied léger qui accepta de se marier avec celui qui la battrait à la course à pied. Ceux qui perdaient étaient tués. Le jeune Hippomène (ou Mélanion) gagna avec l'aide d'Aphrodite, déesse de l'Amour, qui lui donna trois pommes d'or des Hespérides, et, en s'arrêtant pour les ramasser, Atalante perdit la course. Ils furent plus tard tous deux changés en lions en châtiment d'un affront fait aux dieux. Parthénopée, leur fils, se joignit à l'expédition des Sept contre Thèbes.

* 263 MUTUZA, Fondement culturels du fédéralisme au Zaïre, p. 43.

* 264 Cette conception mutuziste de la rencontre est, dans l'original du texte, un pot pourri de latin, de grec et d'hébreu.

* 265 Mutuza se réfère à la lettre que Graeber a reçue en 1841. Dans cette lettre, c'est l'éminence de la rencontre qui y est chantée.

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