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L'apport des ONG et projets dans le processus de décentralisation au Burkina Faso : cas du ficod-b ( Fonds d'Investissement pour les Collectivités Décentralisées ) dans la région de l'est, étude des activités du volet infrastructures

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par Ilassa OUEDRAOGO
Institut africain de professionnalisation en management (IAPM)- Ouagadougou - Master II (DESS) en développement local et décentralisation 2008
  

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II.4.2. L'approche communale

Lors de la fusion du PFA dans le FICOD-B, un mode d'approche très important dans la lutte contre la pauvreté a été conservé : c'est l'approche par la demande. Dans le passé, « Les programmes de développement en milieu rural ont privilégié des appuis institutionnels basés

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sur le développement de l'offre de services des structures déconcentrées de l'Etat »77. Cette offre ne valorisait pas la vision des bénéficiaires et a, par la même occasion, favorisé l'émergence de projets peu adaptés aux besoins des porteurs d'initiatives et limité la portée des appuis à l'autopromotion. L'approche par la demande reprise par le FICOD-B est un facteur de développement à la base car elle montre que les acteurs sont capables de définir leurs besoins. Elle oblige les prestataires à améliorer l'offre des services. Cette approche montre que le FICOD-B intervient dans la logique de la Lettre Politique de Développement rural Décentralisé (LPDRD) qui prône des approches diversifiées dont « l'approche demande [qui] sous entend une liberté d'adhésion aux objectifs du projet à condition de présenter une certaine cohésion sociale».78

Le FICOD-B a maintenu le principe du cofinancement au niveau des infrastructures qui oblige les futurs bénéficiaires à contribuer financièrement et/ou physiquement à la réalisation de chaque projet. Ce principe permet aux populations à la base de se sentir concernées car ayant contribué malgré leurs maigres ressources. Cette contribution les pousse obligatoirement à prendre conscience qu'elles doivent s'approprier les projets réalisés pour que leurs investissements ne soient pas inutiles. Cependant, le cofinancement a ses limites. Sont de ceux-là : la pauvreté des populations de certaines zones ; l'opposition de certaines personnes qui pensent que le FICOD-B a déjà toute la somme et que les chargés de projets veulent s'enrichir sur leurs dos ; les détournements de fonds dans des cotisations antérieures ; l'analphabétisme et l'insuffisance de formation des bénéficiaires ; etc.

Du passage du PFA au FICOD-B, il y a une confrontation entre deux types d'approche dans la maîtrise d'ouvrage et la mobilisation des fonds. En effet, le PFA pratiquait l'approche communautaire qui consistait à toucher directement les communautés à la base. Mais avec le FICOD-B et la communalisation intégrale, les chargés de projets passe par les responsables des communes (approche communale).

Cette approche communale n'est pas encore bien acceptée à la base pour plusieurs raisons : - les anciennes associations se sentent lésées dans ce nouveau dispositif. Elles avaient cofinancé avec le PFA des ouvrages et doivent les remettre à la commune car elles ne disposent plus de la maîtrise d'ouvrage. Même si dans les contrats avec le PFA, il était prévu la cession des infrastructures à la commune après la communalisation intégrale, certaines associations villageoises continuent à faire de la résistance tout en sachant

77 ADELE, 2006, L'approche par la demande, Fada N'Gourma, 11 pages.

78 MEDEV, 2006, Bilan de la mise en oeuvre de la Lettre de Politique de Développement Rural Décentralisée 2002-2005, p. 25.

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qu'elles finiront par céder. Les membres des associations en milieu rural refusent cette situation car au moment de la mobilisation des ressources, elles n'ont pas eu l'appui de certains villages de la commune. Ils ne comprennent pas aujourd'hui que tout le monde puisse jouir du fruit du travail pour lequel ils ont été les seuls à participer. C'est le cas du village de Bilanga-Yanga, dans la commune de Bilanga (province de la Gnagna). La CVGT de ce village a sollicité le soutien de Bilanga et d'autres villages dans le but de mobiliser la somme de 5 700 000 F CFA pour la réalisation d'un marché. Les autres populations ont refusé d'apporter leur contribution. Bilanga-Yanga a alors, tout seul, décidé de faire face aux dépenses. Aujourd'hui, les populations de Bilanga-Yanga refusent que le marché soit transféré à l'autorité de la commune surtout que le chef-lieu est Bilanga.79 Dans la commune de Partiaga (province de la Tapoa), le même cas s'est posé avec le marché du village de Natiabonli. Les membres de la CVGT étaient d'accord pour partager les recettes avec la préfecture (CVGT : 30% et préfecture : 70%). Mais avec la communalisation intégrale, ils ont catégoriquement refusé que la commune touche la part qui était réservée à la préfecture. Le village de Natiabonli n'a pas eu le soutien de Partiaga lors de la construction du marché. Il a fallu l'intervention du FICOD-B et de l'Etat pour que la population accepte le nouveau partage ;

- certaines associations ne veulent pas que leurs projets passent par une délibération en conseil municipal. Elles estiment qu'elles ont la possibilité d'apporter leurs parts de contribution dans la réalisation de leur projet. Elles ne voient pas la nécessité de passer par la commune. Il va de soi que leurs demandes ne trouveront pas de suite favorable au FICOD-B. Il y a des associations qui, pour des questions de manque de confiance, ne veulent pas associer la commune. Elles pensent qu'elles seront victimes d'abus de confiance et que les responsables communaux ne transmettront pas leur contribution au FICOD-B. Il existe des associations qui jugent leurs actes tellement nobles qu'elles ne voient pas la nécessité d'envoyer leurs projets en délibération. Un dernier groupe d'association manque d'information et ne sait pas qu'avec la communalisation intégrale, il faut recourir à la commune ;

- des projets sont écartés au niveau des délibérations. En effet, des associations ont vu leurs projets rejetés en session par le conseil municipal alors que ceux-ci étaient pertinents et que les moyens de cofinancement étaient déjà réunis. Les initiateurs des

79 TABOUDOU Kader, membre de la CVGT de Bilanga-Yanga, le jeudi 04 octobre 2007.

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projets rejetés pensent qu'ils sont victimes de règlements de comptes politiques entre localités. Ils affirment que le développement de leurs villages a été stoppé avec la communalisation intégrale et des conseillers municipaux qui n'ont aucune légitimité à la base même s'ils ont la légalité étatique avec eux. Ils accusent les responsables des nouvelles collectivités de vouloir torpiller leurs initiatives. En somme, il y a une crise de confiance entre certains élus locaux et les populations à la base ;

- la décentralisation intégrale a donné naissance à plusieurs communes démunies dans la zone d'intervention du FICOD-B. La priorité de ces dernières est de trouver des ressources nécessaires pour faire fonctionner l'administration décentralisée. Les maires, dans ces cas, préfèrent opter pour des infrastructures qui pourront leur apporter des recettes. Ainsi, ils choisissent les marchés ordinaires, les marchés à bétail, les abattoirs, les auberges, les gares routières, les aires de stationnement, etc. Toutes ces demandes de projets qui peuvent générer des recettes sont faites au détriment des infrastructures sociales dont a besoin la population. On ne sent pas l'implication des élus locaux dans la réalisation des centres de santé ou les infrastructures scolaires. Prenons le cas du village de Kamséogo dans la commune de Yondé (province du Koulpélogo) où la commune ne se sent pas concernée dans la mobilisation des ressources pour la réalisation d'un CSPS. En allant sur le terrain, nous avons constaté que c'est une zone isolée et le centre de santé le plus proche est à une vingtaine de kilomètres avec une piste impraticable en saison pluvieuse. Ce sont les chargés de projets du FICOD-B qui sont obligés de revenir aux vieilles méthodes du PFA afin que les populations puissent réunir leur part de contribution qui est de 1 775 666 F CFA pour un coût global de 88 783 295 F CFA.80 Normalement, c'est la commune qui devait trouver des voies et moyens pour mobiliser cette somme. Mais le désintéressement de cette dernière a obligé le FICOD-B à intervenir directement ;

- les conseils municipaux se réunissent difficilement dans les communes rurales pour des sessions car il y a de nombreux illettrés81 qui ne maîtrisent pas assez bien l'organisation de ce genre de rencontres. Cette situation n'est pas sans conséquence sur les activités du FICOD-B/Est dans la mesure où les demandes de réalisation de projets par les villages mettent du temps avant d'atteindre l'Antenne régionale. Elles arrivent à Fada N'Gourma par dizaines pour chaque commune et il devient difficile de les traiter. Les responsables des communes rurales n'ont pas encore l'expérience de

80 Justin KAFANDO, chargé de projets au FICOB-B/Est, le jeudi 22 novembre 2007.

81 Les conseils municipaux de Foutouri et Bartiébougou dans la Komondjari comptent 100% d'analphabètes.

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ceux des communes urbaines rodées dans la décentralisation. Ils n'arrivent pas encore à organiser leurs demandes de financement parce qu'ils n'ont pas encore pu établir un plan de développement qui leur permettrait de prioriser leurs besoins ;

- comme autre problème de l'approche communale, nous avons la maîtrise d'ouvrage au niveau des nouvelles communes rurales. Elles ne disposent pas de services techniques comme les communes aguerries. Elles n'ont pas de ressources humaines leur permettant de s'impliquer dans l'exercice de la maîtrise d'ouvrage communale. La gestion au quotidien des ouvrages est confiée au maire et à quelques personnes ressources comme le SG, lorsqu'il y en a. Lorsque le maire réussit à mettre en place des comités de gestion, on constate que « les mêmes personnes se [retrouvent] dans une multitude de structures,[il y a aussi] la faiblesse de capacités des membres (...) [et], le manque de termes de référence clairs régissant ces structures entre autres ».82 En somme, les communes rurales ont des difficultés pour s'approprier les infrastructures qui leur ont été cédé par les CVGT.83

Malgré ces failles qui ont été énumérées, il faut tout de même noter que l'approche communale a aussi ses avantages :

- le respect par le FICOD-B du principe qui veut que ce soit la commune qui assure la maîtrise d'ouvrage. C'est dans cette logique qu'avec la communalisation intégrale, toutes les étapes de la procédure incluent la commune. Le FICOD-B intervient dans le strict respect de la loi car c'est la commune qui est chargée d'impulser le développement à la base ;

- l'approche communale permet aux conseils municipaux de suivre un plan général d'investissements sur leurs territoires. En effet, par le passé, il y avait des projets tout azimut selon les capacités financières de chaque localité. Ce qui ne veut pas dire que les investissements du PFA ne suivaient pas la politique nationale d'aménagement du territoire. Tous les projets instruits devaient avoir l'approbation des services techniques déconcentrés. Mais avec les communes, ces investissements seront mieux organisés spatialement et temporellement en respectant un plan d'aménagement de la commune conçu par la base et qui est lui-même issu d'un schéma d'aménagement régional et national du territoire ;

82 CND/GTZ, 2002, Atelier de réflexion et de propositions sur l'exercice de la maîtrise d'ouvrage communale par les municipalités, Ouagadougou, CND/GTZ, p. 10.

83 LANKOANDE Djingri Charles, maire de la commune rurale de Bilanga, le jeudi 04 octobre 2007.

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- avant que la communalisation n'englobe toute l'étendue du territoire burkinabé, toutes les localités n'étaient pas touchées par les projets de développement surtout qu'il existait le principe de cofinancement. Comme conséquence, nous avons constaté que ce sont les localités dynamiques qui bénéficiaient d'infrastructures. Aujourd'hui avec l'approche communale, plus de localités seront touchées par les activités du FICOD-B/Est selon le plan communal qui sera conçu. Le plan prendra en compte les localités selon leurs besoins et non selon leurs capacités à cofinancer la réalisation des infrastructures.

La fusion du PFA dans le FICOD-B a créé un bouleversement important dans la gestion des projets de développement dans la région de l'Est. Le bouleversement s'est ressenti autant au niveau de l'organisation de la structure que dans les procédures de financement de projets. Le Fonds a maintenant la charge d'aider financièrement les collectivités territoriales.

Dans son appui aux communes, le FICOD-B a également repris en main toutes les infrastructures qui avaient été réalisées par le PFA.

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