SECTION I : DE
L'EMERGENCE DU DROIT DE L'HOMME A UN ENVIRONNEMENT SAIN
Nous poserons dans un premier temps le principe de la
reconnaissance du droit à un environnement sain (§1) et, dans un
second temps, nous identifierons ses créanciers et débiteurs
(§2).
§1. La reconnaissance d'un
droit de l'homme à un environnement sain
Nous évoquerons, d'abord, la question de la
consécration et du contenu du droit de l'homme à un environnement
sain et ensuite, nous le distinguerons du droit de l'environnement.
I. Consécration et
contenu du droit à un environnement sain
La proclamation d'un droit de l'homme à un
environnement sain est la résultante d'un constat sur un certain nombre
d'atteintes à l'environnement.
1. Consécration du droit
à un environnement sain
Le concept de l'environnement s'étend au milieu et
à l'ensemble de la nature et des ressources, y compris le patrimoine
culturel et les ressources humaines indispensables pour les activités
socio-économiques et pour le meilleur cadre de vie61(*). L'aspiration à un
environnement sain s'oppose à tout ce qui est attentatoire tant à
la vie qu'à la dignité de la personne humaine. En effet,
« plus que toute autre époque de l'histoire, la nôtre se
distingue par la progression technologique mais aussi par la régression
des conditions écologiques».62(*)
a. Un constat
inquiétant
Depuis quelques décennies, le souci d'assurer à
l'homme un environnement de qualité est devenu une préoccupation
planétaire. Cette prise de conscience universelle est née du fait
d'un constat selon lequel l'activité humaine, tant celle liée
à la production qu'à la consommation, serait en train de modifier
les systèmes planétaires, engendrant ainsi des dangers
horrifiants pour la survie même de l'espèce humaine.
De ce constat, nous pouvons épingler les quelques faits
ci-après :
- La pollution, que ce soit de l'air, des eaux ou des
forêts, dont les sources sont de plus en plus accrues, est un danger
quotidien pour l'homme qui ne sait plus vivre en symbiose avec la nature. En
effet, elle perturbe l'écosystème, c'est-à-dire
« l'interaction entre les organismes végétaux et
animaux et les facteurs liés à l'environnement dans un territoire
déterminé »63(*) et expose l'homme à certains facteurs
environnementaux qui sont attentatoires tant à sa santé
qu'à sa vie.
- L'altération des grands équilibres de la
planète, conséquence notamment de la perturbation des
écosystèmes, s'accompagne d'un déboisement criminel qui
réduit la quantité d'oxygène sur terre et de la
destruction de la biodiversité, c'est-à-dire « la
variabilité des organismes vivants de toute origine »64(*) (plantes, animaux et
micro-organismes) qui, pourtant, rend la vie possible sur terre.
- La croissance économique et démographique
exponentielle a conduit à la surexploitation du sol et de ses richesses,
ce qui fragilise davantage la terre, cadre de développement de toute
vie. Car, d'une part, le sol épuisé ne pourrait plus fournir
assez pour nourrir cette population mondiale croissante et, d'autre part,
certaines de ses richesses comme le pétrole ou le gaz, énergies
fossiles indispensables à l'homme, sont susceptibles de
s'épuiser ; « cette frénésie de
l'exploitation a conduit à des menaces globales comme celles de
l'accroissement de l'effet de serre,... ».65(*) ;
- L'avènement d'une ère technologique plus
qu'ambitieuse avec des « expériences » dont les
conséquences pourraient s'avérer destructives aussi bien de
l'espèce humaine que de la terre. L'on peut, en effet, citer
l'érosion de la diversité génétique allant
jusqu'à l'altération de l'essence humaine, la
bioingénierie dans le domaine des graminées avec le risque de
créer des espèces nocives. De même le risque de destruction
de l'humanité par des armes chimiques, biologiques ou
bactériologiques comme l'illustre le désastre de Tchernobyl qui
« manifeste au grand jour la vulnérabilité des
sociétés à l'âge du nucléaire »
66(*).
Ce constat est inquiétant. La vie sur terre est
menacée. Les droits de l'homme auront-ils encore droit de
cité ? Avec cette interrogation, il paraissait urgent de proclamer
un droit de l'homme à un environnement sain.
* 61 KAMTO (Maurice),
Droit de l'environnement en Afrique, Edicef, Paris, 1996, p. 16.
* 62 ZEMMALI (Ameur), La
protection de l'environnement en période de conflit armé dans les
normes humanitaires et l'action du CICR, C.I.C.R., Genève, 1994, p.
2.
* 63 NATIONS UNIES, Le
Nouveau projet de développement des Nations Unies, UNIC, Bruxelles,
2002, p. 28.
* 64 NATIONS UNIES, Le
Nouveau projet de développement des Nations Unies, UNIC, Bruxelles,
2002, p. 28.
* 65 CHOUALA (Yves Alexandre),
La biographie Juridique de l'impératif écologique, in
Ecovox, accessible sur :
http://www.wagne, net/ecovox/eco 23.
* 66 DE SENARDEN (Pierre),
La politique internationale, Armand colin, Paris, 1992, p. 181.
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