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Presse et responsabilité civile

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par Antoine Petit
Université Toulouse 1 Capitole - Master 2 droit privé fondamental 2012
  

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Paragraphe 2 : Les articles 9 et 9-1 dans leurs rapports avec les textes concurrents

146. Dès lors que la faute est constitutive d'une atteinte portée à la vie privée ou à la présomption d'innocence de la victime, il semblerait que les articles 9 et 9-1 du Code civil supplantent la clausula generalis (A). Il en va autrement concernant leur relation avec la loi sur la liberté de la presse qui nous le verrons, paraît là encore chercher à asseoir son hégémonie (B).

A. L'exclusivisme face à la responsabilité pour faute

147. Quelques temps avant les célèbres arrêts de l'assemblée plénière du 12 juillet 2000, la Cour d'appel de Paris affirmait la chose suivante : « Le régime général de la responsabilité civile, qu'aucun texte n'exclut en matière de presse ou d'édition, ne peut toutefois trouver à s'appliquer que lorsque la publication litigieuse ne relève pas des dispositions spéciales de la loi du 29 juillet 1881 ou de celles des articles 9 et 9-1 du Code civil »318. Par conséquent, les articles 9 et 9-1 sont d'application exclusive à l'égard de l'article 1382 du Code civil.

148. Une telle solution est-elle justifiée ? Il semble en tout cas qu'elle soit en accord avec la logique adoptée par la jurisprudence constante concernant les rapports entre la loi du 29 juillet 1881 et l'article 1382. Les arguments avancés au soutien de celle-ci pourraient

317 V. à titre d'exemples : Civ. 1e, 19 oct. 1999 : Bull. civ.I. n286 ; Civ. 1e, 21 fév. 2006 : Bull. civ.I. n89. Dans ces deux arrêts, la Cour de cassation fait valoir que les articles de presse en question ne tiennent « aucune conclusions définitives tenant pour acquise la culpabilité » du mis en cause, démentant ainsi l'analyse des juges du fond.

318 CA Paris, 12 mai 2000 : D. 2000, Jurisp. p. 796, note D. Boccara.

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d'ailleurs être repris. En effet, une telle solution est vraisemblablement destinée à sauvegarder au mieux la liberté d'expression car la portée plus restrictive de la protection assurée par les articles 9 et 9-1 permet d'assurer une plus grande prévisibilité au journaliste de ce que constitue ou non un abus aux yeux de la loi. Aussi, il semblerait qu'elle coïncide avec le principe specialia generalibus derogant, l'article 1382 du Code civil faisant figure de droit commun à l'égard de ces dispositions.

149. Néanmoins, l'autonomie des articles 9 et 9-1 vis à vis de l'article 1382, bien qu'affirmée319, ne vaut pas pour autant rupture complète avec les règles du droit commun de la responsabilité civile320. Bien entendu, les multiples décisions ayant fait valoir que « la seule constatation de l'atteinte à la vie privée ouvre droit à réparation »321 pourraient être perçues comme l'illustration d'un incontestable détachement de l'article 9 vis à vis de l'article 1382. Or, tout d'abord, il n'est pas vain de rappeler que c'est justement l'article 1382 du Code civil qui a permis l'avènement du concept des droits de la personnalité. Comme le rappelle Geneviève Viney, c'est à partir des diverses jurisprudences rendues au visa de l'article 1382 en vue de condamner les atteintes portées aux intérêts moraux des victimes que la doctrine a élaboré une véritable théorie des droits de la personnalité322. De plus, comme pour la responsabilité pour faute, la réparation est évaluée en fonction du préjudice subi et comme celle-ci encore, le défendeur à l'action sera toujours la personne physique ou morale responsable de l'atteinte alléguée323.

Tout cela nous amène finalement à considérer qu'en réalité les articles 9 et 9-1 contribuent pour l'essentiel à préciser la notion de faute à laquelle renvoie l'article 1382 du Code civil, ce qui semble davantage correspondre aux exigences de précision et prévisibilité prévues par les articles 11 de la DDHC et 10 de la Conv. EDH. On peut donc se réjouir de l'exclusivisme de ces dispositions civiles spéciales vis à vis de la responsabilité pour faute. D'ailleurs on notera que si très souvent les décisions visant à promouvoir la liberté d'expression le font au détriment du droit des personnes, il en est autrement ici, car n'oublions pas que la seule atteinte portée au droit subjectif emporte droit à réparation, et ce sans qu'il soit nécessaire de prouver une faute.

319 Civ. 1e, 5 nov. 1996 : D. 1997, Jurisp. p. 403, note S. Laulom.

320 A. Lepage, L. Marino et C. Bigot, « Droits de la personnalité : panorama 2004-2005 », Recueil Dalloz, 2005, n°38.

321 Civ. 3e, 25 fév. 2004 : D. 2004, somm. 1631, obs. C. Caron ; Civ. 1e, 6 oct. 1998 : RTDciv. 1999, p. 62, obs. J. Hausser ; Civ. 1e, 25 fév. 1997 : JCP 1997. II. 22873 ;

322 G. Viney, « Pour ou contre un principe général de responsabilité pour faute ? », Mél. P. Catala, Litec, 2001, p. 560.

323 CA Aix-en- Provence, 4 janv. 2005 : Juris-Data n°2005-265807.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand