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L'assemblée nationale comme pouvoir constituant dérivé au Cameroun entre 1990 et 2008

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par Jules Bertrand TAMO
Université de Dschang Cameroun - Master de droit public 2011
  

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B - La thèse de l'inconstitutionnalité de la révision constitutionnelle du 14 avril 2008

Les tenants de l'inconstitutionnalité de la révision constitutionnelle de 2008 avaient mis en avant une série d'arguments tendant à dénier le bien fondé de la révision opérée. Mais, à l'analyse ils tournent tous à établir l'incompétence de l'organe saisi du projet de révision, l'Assemblée nationale. Deux auteurs ont particulièrement défendu cette thèse à savoir Alain-Didier OLINGA et Mathias Eric OWONA NGUINI.

Selon le Professeur Alain-Didier OLINGA, la compétence de l'instance saisie du projet de révision est discutable au regard de la Loi fondamentale en vigueur. En effet, rappelle-t-il, l'article 63 alinéa 3 de la Constitution énonce : « Le Parlement se réunit en congrès, lorsqu'il est appelé à se prononcer sur un projet ou une proposition de révision de la Constitution ». Il se trouve que dans l'exposé des motifs du projet de révision de la Constitution, il était indiqué : « Tel est l'économie du présent projet de loi soumis à l'examen de l'Assemblée nationale ». Il s'agit là, selon l'auteur, d'une méconnaissance de la lettre de la Loi fondamentale. Car, depuis la révision de janvier 1996, le pouvoir constituant dérivé qu'est le pouvoir de révision est organiquement et formellement distinct de la législature, avec l'avènement de la figure organique du congrès, lequel est, à côté du peuple saisi par voie référendaire, l'instance compétente en matière de révision de la Constitution403(*). Donc, la formule de l'article 63 au présent de l'indicatif (``se réunit''), doublée du fait qu'elle se situe dans le chapitre traitant spécialement de la révision de la Constitution, doit l'emporter sur celle de l'article 14 alinéa 4 suivant laquelle « Les deux Chambres du Parlement peuvent se réunir en congrès, à la demande du président de la République (...) pour se prononcer sur un projet ou une proposition de révision constitutionnelle ». Autrement dit, selon le Professeur Alain-Didier OLINGA, l'Assemblée nationale, convoquée régulièrement en session ordinaire à partir du 12 mars 2008, ne pouvait brusquement sans convocation spécifique aux fins de l'examen d'un projet de révision, siéger tacitement comme congrès à partir du 4 avril, par le seul fait de la transmission du projet de révision pour examen et adoption par la Chambre.

En conséquence, d'un point de vue du strict formalisme juridique, le président de la République n'aurait pas dû transmettre le projet de révision à l'Assemblée nationale, et la Conférence des présidents de l'Assemblée nationale n'aurait pas dû se prononcer favorablement sur la recevabilité du texte déposé par le président de la République. L'auteur conclut sur ce point en ces termes : « En théorie pure, on pourrait dire que les institutions qui méconnaissent si ouvertement la Constitution en vigueur ne peuvent prétendre faire oeuvre constitutionnelle légitime. L'intervention d'une instance incompétente pour accomplir une tâche clairement normée, devrait en principe, être frappée de nullité »404(*). Mais, le droit constitutionnel est un droit marqué profondément de considérations politiques qu'il est difficile de soumettre au test judiciaire, notamment dans un contexte où la saisine de la juridiction constitutionnelle demeure limitativement attribuée. Une fois que la loi constitutionnelle est promulguée, il n'y a plus de recours possible au plan interne, le texte étant dès sa promulgation réputé régulièrement entré dans l'ordonnancement normatif de l'Etat.

Le Docteur Mathias Eric OWONA NGUINI rejette lui aussi l'évocation de l'article 67 alinéa 3 de la Constitution pour justifier la constitutionnalité de la révision de 2008. En écho à la position de Stéphane BOLLE qui défend la constitutionnalité du recours à l'Assemblée nationale pour la révision de 2008 en se fondant sur les dispositions transitoires de l'article 67 alinéa 3 de la Constitution, l'auteur affirme que « cette argumentation donne à voir les limites de la lecture de la Constitution opérée par l'analyste ». La procédure de révision envisagée au Cameroun ne peut selon cet auteur être envisagée dans une vision en termes d'exceptionnalisme. Peut-on se suffire de justifier et de fonder en droit la démarche de révision constitutionnelle envisagée au Cameroun, en passant allègrement de l'article 63 alinéa 3 (règle de principe en matière de révision par la voie parlementaire) à l'article 67 alinéa 3 (règle prévue dans le cadre du dispositif de transition constitutionnelle et institutionnelle) ? Quelle est finalement la règle qui fonde vraiment l'opération de révision envisagée ?

Dans le même ordre d'idées, Monsieur Noé NDJEBET MASSOUSSI allègue que « Le président de la République n'a pas respecté toutes les conditionnalités d'une révision de la Constitution que lui impose la Constitution »405(*). Il dénonce lui aussi la non-convocation du congrès par le président de la République ; il apporte également un argument nouveau tiré de l'article 18 alinéa 3 de la Loi fondamentale. Pour lui en effet, l'article 18 alinéa 3 liste les textes qui peuvent être inscrits à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale réunie en session ordinaire comme c'est le cas. La révision constitutionnelle n'y figure pas. Ce qui confirme, selon lui, le caractère illégal de la voie de révision empruntée par le président de la République406(*).

En somme, on relève que la question relative à la constitutionnalité de la révision constitutionnelle du 14 avril 2008 ne fait pas l'unanimité. Mais au-delà de ce constat, il y a lieu de cerner les innovations qu'apporte la loi constitutionnelle issue de cette révision controversée.

* 403 OLINGA (A.-D.), cité par BATONGUE (A. B.), « La modification de la Constitution est légale ? », disponible sur File://F:\ar, la_modification_ de _la_Constitution_est_légale _, 4303. html, 5 p., notamment p. 1.

* 404 Ibid., p. 2.

* 405 Cf. le journal Le Messager n° 2587 du 7 avril 2008, p. 8.

* 406 Ibid., p. 8.

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