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Politique environnementale et développement durable en Côte d'Ivoire

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par Brou Alexis KOMENAN
Université catholique de l'Afrique de l'ouest- Unité universtaire d'Abidjan ( Côte d'Ivoire) - Maà®trise 2009
  

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Paragraphe 2 : Le rôle des populations

Examiner l'action potentielle des populations en faveur d'une économie écologique revient à étudier d'une part les collectivités territoriales, à travers leur administration, ce qui constitue le volet administratif (A), et d'autre part la société civile, c'est-à-dire les administrés, ce qui constitue le volet sociologique (B).

A. L'administration des collectivités territoriales

En ce qui concerne les collectivités territoriales, il sera procédé à une analyse des possibilités d'une économie s'inscrivant dans la durabilité en se situant à l'intérieur de la configuration politique et administrative actuelle. Cependant, une telle approche ne doit absolument pas occulter les sérieuses questions soulevées par une décentralisation mal comprise, qui constituerait pour les ressources naturelles un risque majeur175(*).

Les collectivités territoriales ont pour objectif de responsabiliser les populations en vue du développement local. La loi reconnaît à ces entités administratives 16 domaines de compétences basées sur le principe de subsidiarité. Comme le dit un auteur, « pour tout dire, les populations, à travers leurs collectivités territoriales, sont responsables de leur développement.176(*) » Mais quelle est l'option développementaliste prise par les populations ? S'inscrit-elle dans le cadre de la ligne économique commune grande consommatrice de ressources et destructrice de l'environnement ? Ou alors s'engage-t-elle dans une voie qui privilégie la pérennité de celui-ci ? Les chapitres précédents ont fourni des éléments de réponse montrant la situation précaire de l'environnement ivoirien, considéré à tort comme un sous-ensemble de l'économie177(*). L'investissement dans le secteur environnemental, qui comprend principalement l'arboriculture, les énergies renouvelables, l'architecture écologique, le recyclage et la gestion des aires protégées demeure peu développé178(*).

On mesure l'importance du projet de société et du programme d'action élaborés au niveau local par les représentants des populations dans un tel contexte. Ces réflexions doivent assumer toute la connaissance, les statistiques et l'expérience acquises aux plans local, national et international dans le domaine de l'écologie. Ceci afin de donner des fondations sûres au développement des collectivités. En cela, la voie indiquée par l'article 28 de la Constitution ivoirienne doit constituer l'une de ces fondations, au plan éthique. Forts de ces principes et de l'appui politique, technique et financier de l'Etat, il importe aux conseils des collectivités territoriales d'allouer un budget de plus en plus important à la pérennisation et à la rentabilisation écologiquement faisable de leur capital de ressources naturelles. Dans ce contexte, les partenaires extérieurs, dont le rôle é été précédemment décrit, entrent alors en scène comme de précieux assistants pour l'élaboration des politiques locales d'éducation et de sensibilisation à l'investissement dans la maintenance de l'environnement. En ce sens des actions prometteuses menées par certaines collectivités méritent d'être mentionnées pour l'exemple.

Ainsi, en 2003, la mairie de Cocody a signé avec la SODEFOR une convention pour l'aménagement des terre-pleins de certains boulevards de la commune. Comme la commune de Cocody, celle de Treichville a aussi sollicité la structure de gestion forestière pour l'étude de l'aménagement de certains sites jugés prioritaires dans son programme d'action. En 2006, le conseil général de Toumodi a fait l'acquisition d'un accumulateur de puissance et d'un chauffe-eau solaires respectivement pour le village de Ninkro et l'hôpital général de Toumodi. A ce propos, N'Dri Célestin, correspondant régional du quotidien Fraternité Matin, note : « Pour M. Patrice Kouamé, président du Conseil général de Toumodi, (...) l'énergie solaire apparaît, a-t-il noté, la meilleure alternative pour apporter la lumière et donc le développement aux populations qui n'en espèrent pas mieux. Eu égard aux nombreux avantages liés à l'exploitation de cette énergie naturelle et bon marché sous nos tropiques. »179(*) Point n'est besoin de mentionner le poids du facteur pauvreté dans les possibilités de développement. Car « l'énergie solaire constitue une source inestimable d'économie, tant pour l'investisseur que pour l'utilisateur... la batterie revient à 40000 F et l'ampoule à 1000 F... Comme on le constate, c'est une source d'énergie qui est parfaitement adaptée aux moyens financiers des masses paysannes qui ont besoin de s'éclairer, sans trop de contraintes. Surtout qu'une fois l'investissement effectué, il n'y a aucune facture à payer désormais... Et si le gouvernement songeait à prévoir une ligne budgétaire sur les 50 milliards du Fonds à l'Energie, pour promouvoir l'énergie solaire ? » Proposition intéressante à l'adresse des gouvernants180(*). Et Moussa Touré d'emboîter le pas à son confrère : « Il faut une implication que nous souhaitons vivement du reste des pouvoirs publics et ce, par l'entremise de leurs démembrements que sont les conseils généraux. En cela, disons sans fioritures que le Conseil général de Toumodi est un exemple à imiter. »181(*)

Pour ce qui est du financement propre des activités des collectivités, elles devraient songer à jouer à fond la carte environnementale. A ce sujet, l'une des sources de revenus les plus importantes pour les entités décentralisées se trouve être la gestion des ordures ménagères. Mais l'ordonnance présidentielle du 4 octobre 2007 les dessaisit désormais de cette activité. Cependant, deux grands champs de financement s'offrent à leurs autorités. Ce sont la conservation des ressources naturelles locales et la restructuration fiscale.

Conserver et entretenir les ressources naturelles locales est du plus haut intérêt pour les populations. Cela implique une sérieuse réflexion sur la pression démographique, la saine occupation de l'espace et la répartition équilibrée des populations sur le territoire en général et à Abidjan en particulier. Normalement, les principes écologiques veulent qu'une part respectable de la superficie d'une collectivité soit réservée à la nature. On a, au niveau étatique, l'exemple du parc national du Banco, dans le district d'Abidjan. Chaque collectivité doit donc s'engager plus fermement dans la protection et la promotion des espaces naturels et des superficies classées sur son territoire. Car le fait que les parcs nationaux, réserves et forêts classées soient du domaine de l'Etat n'exclut guère une saine collaboration avec celui-ci. De même la réduction controversée, par l'Etat, des prérogatives reconnues aux entités décentralisées en matière de préservation de l'environnement182(*) n'empêche nullement les autorités locales d'initier des projets écologiquement et économiquement productifs.

La restructuration fiscale s'inscrit dans une dynamique plus décisive que le seul entretien quotidien de l'environnement dans la mesure où l'impact d'une orientation fiscale nouvelle sur les acteurs économiques est potentiellement capable d'améliorer le visage du cadre de vie et des ressources naturelles. Or, les collectivités territoriales ont grand besoin de ressources financières pour leur développement.

Réfléchir à une politique fiscale qui engagerait les activités polluantes et dégradantes vis-à-vis de l'environnement et qui encouragerait par des avantages les activités promotrices du cadre de vie et de la nature serait d'un grand rapport. Cela constituerait non seulement une source substantielle de revenus, mais encore un moyen d'orientation de l'économie locale vers des activités plus viables écologiquement, donc plus durables. Des activités comme la production de tabac, les émissions de carbone, la mise en décharge, la possession d'une automobile, la conversion de terres cultivables à des fins non agricoles, l'abattage des arbres, l'usage de pesticides et celui de substances dangereuses pour l'extraction minière et l'exploitation de l'énergie sont à viser183(*).

Assurément, une telle orientation politique devra bien entendu se faire en tenant le plus grand compte des réalités socio-économiques nationales et locales. Etant donné que les populations y sont très sensibles et les ressentent souvent plus directement que les problèmes écologiques184(*). De plus, certains aspects de l'orientation écologique de la fiscalité sont connus, comme le principe du « pollueur-payeur185(*) ». Mais ce qu'il y a de significatif ici, c'est l'ampleur du rôle potentiel de construction d'une économie écologique par les collectivités territoriales et la diversité des ouvertures qui s'offrent à elles en la matière. Pour ce faire, la volonté politique de leurs décideurs sera décisive, mais aussi celle de l'Etat qui, de par ses prérogatives, devra puissamment soutenir ces initiatives, et celle des administrés, la société civile, qui sera on ne peut plus incontournable.

* 175 Voir le paragraphe intitulé « Les milieux anthropiques », p.  ?. Les auteurs de la présente étude partagent l'inquiétude de Francis LAUGINIE : « La décentralisation à outrance, prônée par les grandes institutions de financement, va faire courir un très grand risque aux parcs et réserves. » (op. cit., p. 377.)

* 176 Fraternité Matin. Les chantiers de l'avenir. Hors-série, septembre 2008, p. 61. Article de Franck A. ZAGBAYOU intitulé « La révolution par les conseils généraux. »

* 177 Pour l'état de l'environnement ivoirien, voir le chapitre 2 de la première partie de la présente étude. En ce qui concerne la réfutation de la perception erronée de l'environnement comme sous-ensemble de l'économie, voir le paragraphe intitulé « La primauté de l'écologie sur l'économie » (section 2 du chapitre 1, première partie.), p. 19-23.

* 178 La valeur de la consommation annuelle de venaison en Côte d'Ivoire était estimée, au début des années 1980, à environ 50 milliards de francs CFA. En comparaison, les dépenses pour les parcs nationaux ne représentaient, à la même époque, que 0,4 % de ce montant. Voir Francis LAUGINIE, op. cit. De 2001 à 2005 la sylviculture n'a représenté que 1,4 % du Produit Intérieur Brut (PIB) de l'Etat de Côte d'Ivoire, tandis que l'extraction minière progressait de 2,3 % sur la même période. Voir La Côte d'Ivoire en chiffres, édition 2007, op. cit.

* 179 Fraternité Matin, Cahier économie & environnement, n° 102 du Lundi 26 juin 2006, p. VII.

* 180 Voir le paragraphe intitulé « Le rôle des pouvoirs publics », p. 75-78.

* 181 Ibid., p.VI.

* 182 Ordonnance présidentielle n° 2007-586 du 4 octobre 2007 abrogeant certaines dispositions de la loi numéro 2003-208 du 7 juillet 2003 portant transfert et répartition de compétences de l'Etat aux collectivités territoriales.

* 183 Lester R. BROWN, op. cit. Pour ne citer qu'un exemple, on sait que la production de tabac est à la fois facteur de dégradation de la santé humaine et de la santé de l'environnement (incendies causés par les mégots de cigarettes). Voir Cahier éducation & santé, n° 102 du Mercredi 14 juin 2006, p.VI-VII. ; article « feu de brousse » du Grand Dictionnaire encyclopédique de la Côte d'Ivoire, op. cit., vol.3, p. 66-67.

* 184 On se rappellera, à ce propos, de la formule du président Houphouët : « Celui qui a faim n'est pas un homme libre. »

* 185 Voir le paragraphe intitulé « Le rôle des pouvoirs publics », p. 75-78.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo