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La notion de fonds libéral en droit camerounais

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par Sébastien AGBELE NTSENGUE
Université de Yaoundé 2 - Diplôme d'études approfondies en droit des affaires 2008
  

Disponible en mode multipage

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La Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l'Université de Yaoundé II-SOA n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les mémoires. Celles-ci doivent être considérées comme propres à leur auteur.

Ce mémoire est dédié:

A mes parents, NTSENGUE Michel et NKE Léonie ;

A mon épouse, Suzanne AGBELE ;

A mes enfants : BEDIGA AGBELE Franck-Loïc, NKE AGBELE Grâce

Manuella et NYEBE AGBELE Marie Reine.

Nous remercions sincèrement tous ceux qui ont contribué à la réalisation de ce mémoire. Il s'agit notamment :

- De Monsieur le Professeur Victor-Emmanuel BOKALLI qui a accepté, malgré ses nombreuses occupations, de diriger nos premiers travaux de recherche ;

- De Monsieur le Professeur Paul-Gérard POUGOUE ;

- De Monsieur le Professeur Adolphe MINKOA SHE ;

D'une manière générale, tous les enseignants qui ont participé à notre formation académique.

Nous adressons également nos remerciements à Messieurs NGOLO René Jacques, NGAVANGA Nicaise, BETSAMA Gaston, ESSOMBA Auguste, Christian Achille TSALA, NOMO Maximilien, NDOMAN Oscar et NDOGMO Samuel pour leur sollicitude durant la rédaction de ce mémoire.

Que tous ceux qui n'ont pas été nommément désignés ici soient rassurés de notre profonde reconnaissance.

Aff

:

affaire

A.U.D.C.G. 

:

Acte uniforme relatif au droit commercial général

A.U.P.Coll 

:

Acte uniforme portant Organisation de procédures collectives d'apurement du passif.

A.U.P.S.R.V.E. 

:

Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution

A.U.S.C. 

:

Acte uniforme portant organisation des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique

Al. 

:

Alinéa

Arch. Philo. droit 

:

Archives de philosophie du droit.

Art. 

:

article.

Biblio. dr. privé 

:

Bibliothèque de droit privé.

Bull.civ 

:

Bulletin civil.

C.A. 

:

Cour d'Appel.

C.cass. 

:

Cour de Cassation.

Cf. 

:

Comparer avec.

Ch. 

:

Chambre.

Chron. 

:

Chronique.

D.

:

Recueil Dalloz.

E.N.A.M 

:

Ecole Nationale d'Administration et de Magistrature.

Ed.

:

Edition.

Ibid. 

:

Ici même.

IRPP

:

Impôt sur le revenu des personnes physiques.

J.C.P. 

:

Jurisclasseur périodique.

L.G.D.J. 

:

Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence.

L.P.A

:

Les Petites Affiches

:

numéro.

Obs. 

:

Observations.

OHADA

:

Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires.

p.

:

Page

P.U.A 

:

Presses Universitaires d'Afrique.

P.U.F 

:

Presses Universitaires de France.

R.T.D.civ.

:

Revue Trimestrielle de Droit Civil.

s. 

:

Suivants.

S.C.M. 

:

Société Civile de Moyens.

S.C.P. 

:

Société Civile Professionnelle.

S.E.L. 

:

Société d'Exercice Libéral.

SA

:

Société anonyme

SARL

:

Société à responsabilité limitée

SNC

:

Société en nom collectif

T. 

:

Tome.

T.V.A. 

:

Taxe sur la Valeur Ajoutée.

TAFIREE 

:

Tableau des ressources et des emplois.

V.

:

Voir.

INTRODUCTION GENERALE 1

TITRE I : L'EMERGENCE D'UNE NOTION DE FONDS LIBERAL EN DROIT CAMEROUNAIS. 2

CHAPITRE I : L'apport de l'équipement à l'émergence d'une notion de fonds libéral 9

SECTION I- Les origines du mouvement de matérialisation des professions libérales 10

SECTION II- Les manifestations de la matérialisation 21

CHAPITRE : L'apport de l'équipe à l'émergence d'une notion de fonds libéral 30

SECTION I : Les raisons du regroupement des praticiens libéraux 31

SECTION II : Les formes juridiques permettant un exercice collectif des professions libérales 38

TITRE II : LA RECEPTION DE LA NOTION DE FONDS LIBERAL EN DROIT CAMEROUNAIS 48

CHAPITRE I : La résistance apparente du droit camerounais à l'égard d'une notion de fonds libéral 50

SECTION I : La prohibition prétorienne des opérations de cession de clientèles civiles. 52

SECTION II : La démesure de l'hostilité du droit à l'égard d'une notion aux multiples vertus 60

CHAPITRE II : L'hospitalité du droit à l'égard d'une notion de fonds libéral 66

SECTION I : La contribution législative à la patrimonialisation des activités libérales 67

SECTION II : La bienveillance du juge à l'égard d'une notion de fonds libéral 82

CONCLUSION GENERALE 93

La grandeur et le prestige des professions libérales se sont jadis bâtis autour de certains principes. Il s'agit notamment de l'exigence d'une prestation de caractère intellectuel, de l'exercice désintéressé des activités libérales, de l'indépendance du praticien et du lien de confiance qui devait unir ce dernier à ses clients. Mais ces principes ont aujourd'hui perdu en solidité, ce qui a entraîné la dépersonnalisation des acticités libérales.

En effet, pour satisfaire les besoins sans cesse croissants de la clientèle libérale, les praticiens libéraux seront amenés à adopter des habitudes des commerçants. A l'instar de ces derniers ils vont non seulement se doter de matériels sophistiqués mais également se regrouper pour exercer leurs activités. Ce regroupement leur permettra de se répartir la charge inhérente à l'acquisition du matériel et de fournir aux clients une prestation d'ensemble. Mais tout ceci a un coût financier énorme que le praticien ne souhaite plus supporter par la seule perception des honoraires. Il souhaiterait aussi que lui soit reconnue la titularité d'un fonds de caractère libéral.

Mais le droit camerounais n'a pas encore validé expressément la patrimonialisation des activités libérales, il n'a donc pas encore consacré la notion de fonds de libéral. Toutefois, il faudrait signaler que les vertus de simplicité, de célérité et de clarté qu'on reconnaît aux règles de droit commercial ont séduit le droit civil qui n'a pas manqué de domestiquer celles-ci. On peut entre autres citer l'extension des procédures collectives aux praticiens libéraux exerçant en équipe, l'extension du statut des baux commerciaux aux non commerçants, la possibilité de recouvrement des créances civiles par la procédure d'injonction de payer, l'obligation de tenir une comptabilité pesant sur le praticien, etc. Ceci incline aujourd'hui à penser que la commercialisation des activités libérales amorcée par les législateurs supranational et national devrait normalement déboucher sur la consécration d'une notion de fonds libéral en droit camerounais.

ABSTRACT

The grandour and prestige of liberal professions have been known to build around a number of principles, notably a sublime intellectual disposition, a selfless practice of liberal activities, and an independence of the practitioner from the confidence tie bonding the latter to his customers. But today these principles are wanting, leading to a depersonalization of liberal activities.

For the purpose of satisfying the ever crescending demands of the liberal customer, liberal practitioners are called upon to adopt the attitude of traders; with the pressures of the former in perspective, there is bound to be a need, not only for sophisticated equipments, but also for a regrouping or teaming up of the practitioners for excellent service. Teaming up thus permitting them come to terms with the intrinsic material-purchasing difficulties, and to furnish a befitting service to their customers. His services bearing quite an enormous financial cost for which the fee due his services seem largely unsatisfactorily improportionate, the practitioner wishes, beside the fee, that be granted him the entitlement of fund of liberal nature.

Cameroon's judiciary system not being explicit as to ownership in liberal activities, the notion of liberal funds is still pending. This notwithstanding, it should be noticed that the simplicity, promptness and transparence characteristic of commercial laws, have in a way enticed civil law, which in turn has adopted the formers trends. Among which are: the extension of, collective procedures to liberal status to non-braders, the possibility to retrieve civil credentials by the procedure of payment injunction, the obligation to an account at the practitioner's cost, etc. This withstanding, one is made to believe today that the commercialization of liberal activities, as undertaken by supranational and national legislators alike, would normally result to the realization of the notion of liberal funds in Cameroon law.

INTRODUCTION GENERALE

1. La notion de fonds libéral n'évoque a priori rien pour certains juristes - «commercialistes»; elle fait au plus penser à une excroissance de la notion de fonds de commerce. Et pourtant, cette notion alimente aujourd'hui tous les débats, spécifiquement ceux portant sur la distinction droit civil, droit commercial. Il ne s'agit donc pas d'un « concept-éprouvette », c'est-à-dire d'une notion issue tout droit d'un laboratoire juridique1(*). L'apparition de cette notion en doctrine est fortement tributaire des mutations sociales, notamment du mouvement de matérialisation des activités libérales2(*) .

2. A l' origine, les activités libérales étaient exclusivement exercées par des hommes riches et libres ; en revanche, les professions manuelles jugées viles et dégradantes, étaient réservées aux pauvres et aux esclaves. Etant à l'abri des ennuis matériels, les praticiens libéraux n'exigeaient pas en contrepartie de la prestation fournie, une véritable rémunération, leur mission étant essentiellement philanthropique. Toutefois, pour leur faire honneur, les clients leur versaient une libéralité pudiquement appelée « honoraire »3(*). En outre, comme particularité de cette conception classique, les praticiens libéraux n'avaient pas de matériels pour l'exercice de leur art. Pour le client, le praticien était un confident à qui on pouvait se confier ; les professions libérales étaient donc fortement marquées par l'intuitu personae4(*).

Mais aujourd'hui, cette conception des professions libérales est en nette décadence. Les principes autour desquels elle s'était bâtie perdent déjà en solidité et en rayonnement, l'érosion de ceux-ci est dû à la matérialisation. En effet, pour fournir une prestation conforme aux avancées de la science et de la technique, les professionnels libéraux ont de plus en plus recours aux matériels sophistiqués 5(*) mais dont le coût est souvent assez élevé pour être supporté par une seule personne.

3. La matérialisation ainsi présentée n'améliore pas seulement la prestation fournie, elle a aussi pour inconvénient de créer de nouveaux besoins pour la clientèle libérale au point qu'il n'est plus possible pour un seul praticien de les satisfaire. Il faudrait pour ce faire toute une équipe où chacun des membres est spécialisé dans l'exécution d'une tâche précise6(*).

Il faudrait en outre signaler que le caractère intellectuel n'est plus aujourd'hui suffisant pour caractériser les professions libérales parce que plusieurs professions manuelles exigent de plus en plus l'intellect ; de même, plusieurs professions libérales sont aussi devenues manuelles. On peut à ce titre citer les professions de chirurgien et de radiologue qui mêlent maniement des appareils et l'intellect. Toutefois, il n'y a pas que le lien de confiance et le caractère intellectuel qui connaissent de sérieuses attaques, il y a aussi les caractères de désintéressement et d'indépendance7(*).

Malgré l'attachement des textes et la jurisprudence au caractère de désintéressement, il se dégage aujourd'hui un constat dans la pratique, celui de l'exercice intéressé des professions libérales. Pour mieux s'en convaincre, il suffit simplement de considérer le coût des honoraires perçus par les praticiens libéraux de nos jours, auxquels s'ajoutent parfois d'autres types de rémunérations, telles que les dépens, les débours et les émoluments8(*). La recherche du lucre apparaît comme l'une des conséquences de la matérialisation des professions libérales : voulant amortir les investissements consentis pour l'acquisition des équipements, les praticiens sont conduits à répercuter les coûts sur les honoraires.

Pareillement, il convient de signaler que, le recours au salariat apparaît aujourd'hui comme la règle dans les professions libérales, surtout celles exercées en équipe9(*). Ceci contribue à rogner considérablement l'autonomie des praticiens libéraux, ce qui est évidemment contraire à la conception classique des professions libérales. Mais l'érosion des critères classiques des professions libérales qui s'opère en pratique, est parfois appuyée par le législateur ou le juge.

4. Les mesures d'origine textuelle ou jurisprudentielle entraînant la commercialisation des professions libérales sont assez nombreuses, mais pour l'instant nous ne pouvons que les évoquer. Il s'agit notamment de l'extension du statut des baux commerciaux à tous les professionnels, de l'extension des procédures collectives à toutes les personnes morales de droit privé, de l'obligation d'immatriculation au registre du commerce et du crédit mobilier (RCCM) faite à tous les groupements d'intérêt économique (GIE), y compris ceux à objet civil, des obligations comptables et fiscales faites aux praticiens.10(*) Cependant nous ne saurions terminer cette énumération sans faire mention de la validation jurisprudentielle des opérations de transmission de clientèles civiles et de l'intégration du cabinet dans la communauté conjugale11(*).

Ces mutations ont conduit les praticiens à exiger du législateur l'achèvement de ce mouvement de patrimonialisation. Tout ceci nous suggère quelques interrogations essentielles : la patrimonialisation des activités libérales amorcée dans la pratique ne devrait-elle pas se traduire sur le plan juridique par la reconnaissance en droit camerounais d'une notion de fonds libéral ? En d'autres termes, la matérialisation et la dépersonnalisation des activités libérales ne justifient--elles pas que soit aujourd'hui consacrée en droit camerounais une notion de fonds libéral ?

5. Afin d'éviter tout malentendu, il importe avant tout de préciser les termes de notre sujet, particulièrement celui de notion. La définition de la notion de « notion » est particulièrement malaisée ; cela est non seulement dû au fait que ce mot est un outil de sa propre connaissance, mais également parce que la pluralité et la variété d'études y relatives ne permettent pas toujours d'entreprendre une synthèse12(*). Quoiqu'il en soit, on peut néanmoins retenir quelques définitions qui ont de longue date été proposées par certains auteurs, particulièrement celle de Madame PARAIN-VIAL13(*) pour qui la notion (ou le concept) est :

« Le résultat d'un double acte de généralisation et d'abstraction symbolisé par un mot, qui nous permet de penser les choses absentes soit par leur éloignement dans l'espace, soit par leur éloignement dans le temps».

Il apparaît de cette définition que l'élaboration d'un concept qui relève de la compétence de la doctrine, commande un mouvement ascendant et descendant14(*), de la réalité au concept, puis du concept à la réalité.

Mais cette définition d'essence théorique et doctrinale, se heurte à plusieurs écueils. On peut notamment citer la difficulté de distinguer la notion de notion des autres qui lui sont voisines, telles que l'idée, le concept et les catégories juridiques.

6. L'idée n'est pas synonyme de notion, l'idée est la façon dont l'esprit perçoit la réalité et le concept la façon dont l'esprit présente la réalité15(*). Nous ne parlerons donc pas dans le cadre de cette étude de l'idée de fonds libéral. Mais au contraire nous utiliserons volontiers tout au long des développements qui vont suivre le concept de fonds libéral, puisque les notions de notion et de concept sont considérées en théorie comme des synonymes, même si en pratique on estime que ces deux notions sont distinctes. Le terme notion est utilisé de façon superfétatoire, c'est-à-dire qu'il n'ajoute rien à ce qui suit. En revanche, le terme « concept » renvoie davantage à l'essence qu'au régime 16(*) ; cette distinction est trop ténue pour être retenue, c'est la raison pour laquelle nous allons utiliser indistinctement les termes de « notion » et de « concept ».

7. De même, il est important de distinguer la notion de la catégorie juridique. Certes ces deux notions ont ceci de commun qu'elles sont toutes les éléments du système juridique17(*), mais elles s'en distinguent nettement, dans la mesure où, contrairement aux catégories juridiques, les notions ne sont pas figées18(*) . Ainsi, dans un article au titre fort évocateur, le Professeur Jean-Louis BERGEL19(*) définit les catégories juridiques comme : « ...des ensembles de droits, de choses, de personnes, de faits ou d'actes ayant entre eux des traits communs caractéristiques et obéissant à un régime juridique commun ». Les catégories juridiques ont donc pour rôle de discipliner le désordre et l'hétérogénéité des faits sociaux.

Ces définitions nous amènent à faire quelques précisions d'importance à savoir que l'étude des notions juridiques postule deux attitudes : soit la juriste qui s'y adonne démontre l'existence de la notion et son élaboration à partir de ce qui a été découvert, soit au contraire cette étude le conduit simplement à connaître et à maîtriser son domaine20(*). Notre travail ne vise pas à étudier le domaine et le contenu de la notion de fonds libéral, tout simplement parce que cette notion n'a pas encore été consacrée ; il a plutôt pour objet principal l'étude de la notion de fonds libéral dans son essence. Il vise donc à démontrer que la notion de fonds libéral peut être consacrée au regard des mutations qui s'opèrent aujourd'hui dans le monde libéral.

8. De même, faudrait-il le préciser, ce travail n'est pas intitulé « Le fonds libéral en droit camerounais », mais plutôt « la notion de fonds libéral en droit camerounais ». Ce premier intitulé ne conviendrait pas à la matière de notre sujet, tout simplement parce que la notion de fonds libéral n'a pas encore été consacrée.

Le sujet dont les termes ont été précisés n'est pas dénué de tout intérêt scientifique. Son examen permettra de savoir si la valorisation de l'activité humaine déjà admise en matière commerciale peut être étendue en matière civile, notamment avec la consécration de la notion de fonds libéral. De même, il permet de saisir l'ampleur de l'effritement de la distinction classique droit civil, droit commercial. Il faudrait enfin évoquer le fait que ce travail pourrait permettre d'apporter une réponse à la question de l'adaptation du droit camerounais aux mutations sociales tendant à la patrimonialisation des activités libérales21(*).

Certes, la pratique contribue fortement à la patrimonialisation des activités libérales, donc à l'apparition sur la scène juridique de la notion de fonds libéral (Titre I), mais le droit camerounais semble quelque peu en retard sur ces mutations sociales, il ne s'est pas encore adapté aux faits, auxquels il semble d'ailleurs opposer une certaine résistance (Titre II).

TITRE I :

L'EMERGENCE D'UNE NOTION DE FONDS LIBERAL EN DROIT CAMEROUNAIS

« La règle doit toujours s'incliner devant la pratique, les moeurs, l'opinion publique. Elle ne pourrait d'ailleurs, leur résister : le droit est impuissant à défendre la morale. Le fait dicte le droit. » ATIAS (Ch) et LINOTTE (D), Le mythe de l'adaptation du droit aux faits, Dalloz 1977, n° 2, P.253.

9. L'histoire est pour le juriste une source d'enseignement et de compréhension des phénomènes sociaux couverts par le droit.22(*) Elle nous enseigne que le mouvement de matérialisation et de patrimonialisation a d'abord commencé avec les activités libérales pour s'étendre ensuite au monde commercial23(*). En effet, les praticiens libéraux vont s'approprier les modes de gestion des entreprises commerciales.

A l'instar des commerçants, les praticiens libéraux ont été amenés à faire face à la concurrence de leurs confrères. Pour y parvenir, ils ont été contraints de consentir des efforts financiers importants pour l'acquisition des équipements professionnels de pointe, et vont entamer l'exercice en équipe de leurs activités. Tout ceci a incontestablement un coût financier énorme que les praticiens libéraux ne sauraient supporter par la seule perception des revenus, des honoraires. Ils souhaiteraient que leur soit reconnue, à l'instar des commerçants, la titularité d'un fonds de caractère libéral.24(*)

A l'évidence donc, l'acquisition par les praticiens libéraux d'un équipement de pointe (CHAPITRE I) et l'exercice par ceux-ci de leurs activités en équipe (CHAPITRE II) constituent des phénomènes prémonitoires de l'apparition sur la scène juridique d'un bien nouveau : le fonds libéral.

CHAPITRE I :

L'APPORT DE L'EQUIPEMENT  À L'EMERGENCE D'UNE NOTION FONDS LIBERAL

10. Pendant longtemps, l'exercice d'une activité libérale semble avoir été préservé de l'invasion de la technique et n'exigeait alors que peu de moyens matériels25(*). Le recours aux techniques appartenait donc aux métiers mécaniques26(*). Mais avec l'accélération de l'histoire27(*), on va assister au développement prodigieux des sciences et des techniques. Et, désirant satisfaire la clientèle libérale en lui procurant une prestation conforme aux avancées de la science, les praticiens libéraux vont consentir des investissements importants pour l'acquisition des équipements sophistiqués.

Pour saisir et comprendre les manifestions actuelles de ce mouvement de matérialisation des professions libérales dans route sa complexité (section II), il conviendrait au préalable de sonder l'histoire afin d'en retracer les origines (section I).

Section I : Les origines du mouvement de matérialisation des professions libérales

11. Le mouvement de matérialisation des professions libérales a des origines et une histoire toute faite de nuances. Cette histoire est celle d'une rupture, mieux d'une révolte de la pratique contre certains principes quasi dogmatiques considérés par la doctrine classique comme étant les piliers des professions libérales.

Il s'agit notamment de la confiance qui devrait exister entre le praticien et son client, puisque le second confie au premier ses intérêts intimes et personnels28(*). De même, la prestation libérale devrait avoir un caractère intellectuel, pour être distincte des prestations manuelles, lesquelles sont vulgaires, viles et par conséquent moins nobles que celles intellectuelles29(*). Ayant fourni une prestation intellectuelle, le praticien libéral devrait être indépendant, et ne devrait pas faire l'objet d'une quelconque sujétion ; de même qu'il devrait exercer son art avec un désintéressement total30(*).

Tous ces principes, en même temps qu'ils permettent d'identifier une profession libérale parmi tant d'autres, ont en outre pour vertu principale de garantir une certaine noblesse des professions libérales, d'assainir le monde libéral.

Mais avec les nombreuses mutations économiques et scientifiques, ces principes ne semblent plus faire recette ; ils ne sont plus suffisants pour caractériser les professions libérales31(*).

A l'analyse donc, pour appréhender les origines profondes du mouvement de matérialisation des professions libérales, il ne nous suffira pas seulement de présenter leurs piliers classiques, il faudrait aussi souligner l'impact des mutations scientifiques sur ce mouvement.

Paragraphe I : Les piliers traditionnels des professions libérales

12. Le droit privé est une unité ou plutôt un bloc homogène, puisque constitué de deux grandes branches, le droit civil et le droit commercial32(*). Cette distinction procède sans conteste de la summa divisio en droit privé. Aussi bien, chacune de ces branches recouvre une infinité d'activités. C`est donc à ce titre que le droit civil régit entre autres les activités agricoles, les activités artisanales, les activités libérales.

Mais une question se pose cependant à savoir, comment faire pour reconnaître les professions de nature civile ? Ce problème a depuis longtemps été résolu par la doctrine classique qui a pu identifier certains principes caractéristiques de la profession libérale. Il s'agit notamment, du lien de confiance qui devrait exister entre le praticien et son client, d'une prestation de nature intellectuelle, du désintéressement et de l'indépendance du praticien. De tous ces critères, le premier apparaît comme étant le critère général, les autres n'étant que ses dérivés33(*).

C'est donc logiquement qu'il serait de bonne méthode d'évacuer préalablement le critère général (A) avant d'examiner les critères qui lui sont dérivés (B).

A/ Le critère général des professions libérales : le lien de confiance entre le praticien et son client

13. La confiance est classiquement considérée comme l'un des traits distinctifs de la profession libérale. C'est même, pourrait-on dire, la clef de voûte de toute relation libérale. Il s'agit précisément de la confiance presque aveugle du client à l'égard du praticien, dans la mesure où le premier confie au second des intérêts qui lui sont personnels et intimes34(*).

Le praticien libéral connaît les problèmes de ses clients, leur origine et leur nature ; il connaît même parfois la consistance de leurs patrimoines. Dans ce sens, une personne peut nier la commission d'une infraction devant le juge répressif et avouer ces faits à son avocat. De même que l'architecte connaît les plans des constructions de ses clients, le notaire connaît les transactions immobilières de ses clients, le contenu de certains testaments dont la rédaction lui est parfois confiée. Il s'agit bien là des intérêts personnels, intimes au client et dont il ne souhaite pas la connaissance par tout le monde et même pas la divulgation par le praticien libéral. La relation libérale est donc marquée par un fort intuitus personae contrairement aux relations commerciales qui sont empreintes d'un « intuitus firmae »35(*).

Si la relation libérale est à ce point sacralisée, mystifiée, c'est parce que la confiance y apparaît comme étant le pilier central, sans toutefois en être l'unique. Il existe à cet effet, d'autres critères, quoique dérivés, de la, profession libérale.

B/ Les critères dérivés: les caractères intellectuel, d'indépendance et de désintéressement

14. La profession est définie par le dictionnaire encyclopédique Hachette comme une « activité rémunératrice exercée habituellement par quelqu'un ». On distingue à cet effet les professions commerciales des professions libérales. Ces dernières étant classiquement entendues comme les « activités que pouvaient pratiquer sans déchoir des homme libres (par exemple, peinture, sculpture) par opposition aux arts mécaniques (maçonnerie, tissage, etc.) réservés aux esclaves ou aux artisans ».

15. Quelque pertinente qu'elle puisse paraître, du moins sur le plan classique, cette définition n'en suscite pas moins quelques observations. Il faut entre autres souligner que la profession libérale est exercée par un homme libre et non par un esclave, que la prestation libérale a un caractère intellectuel et non manuel. Le travail intellectuel étant considéré comme noble et réservé de ce fait aux hommes libres ; le travail manuel apparaît en revanche comme étant vulgaire, vil et est en conséquence exercé par les esclaves36(*). Ces deux observations à elles seules ne rendent pas suffisamment compte de la conception classique des professions libérales, d'où la nécessité de faire une précision d'importance, à savoir que la prestation libérale est exercée de manière désintéressée37(*).

A l'analyse donc, en plus du lien de confiance, trois critères permettant aussi de reconnaître, voire de définir la profession libérale peuvent être tirés de ces observations. Il s'agit notamment des caractères intellectuels, d'indépendance (1) et de désintéressement (2)

1) Les caractères intellectuel et d'indépendance

16. Les professions libérales se caractérisent classiquement par la prégnance de l'intellect. C'est ce trait qui les distingue surtout des professions manuelles auxquelles elles sont habituellement opposées. Le praticien libéral est à ce titre tenu de fournir une prestation d'ordre intellectuel. Ainsi, l'avocat plaide-t-il sans avoir à recourir à des instruments, il existe seul en pensée, sans rien de manuel38(*). Le caractère intellectuel est très saillant aussi bien chez l'avocat que chez le notaire, l'huissier de justice, bref chez tous les membres des corps judiciaires. Signalons opportunément ici que le caractère intellectuel de la profession libérale a une histoire faite de rejet, mais surtout de préjugés. Il s'agit précisément des préjugés39(*) voire de la répugnance, que les hommes de l'époque avaient manifestés à l'égard du travail manuel.

17. A l'époque, le travail manuel était regardé avec beaucoup de mépris à cause de son caractère, vulgaire, dégradant et déshonorant40(*). Pour ces raisons, ce travail était réservé à la foule, aux esclaves, aux pauvres. Les riches étant appelés à exercer des prestations intellectuelles jugées plus nobles et valorisantes41(*). C'est ce qui justifie l'érection du caractère intellectuel en un véritable pilier des professions libérales par la doctrine classique, encore faudrait-il que la prestation intellectuelle ait été fournie par un praticien indépendant, autonome et libre de toute sujétion.

18. La liberté, l'indépendance, l'autonomie sont les maîtres mots de la profession libérale. En effet, les professions libérales sont exercées par des hommes indépendants, libres de toute sujétion de quelque nature qu'elle soit. D'ailleurs, le mot libéral dans son acception étymologique connote l'idée d'indépendance, d'autonomie. L'indépendance du praticien apparaît à cet égard comme un principe d'ordre public que l'on pourrait sans doute rattacher à la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme42(*).

L'indépendance du praticien libéral s'oppose ainsi à toute idée de subordination de celui-ci. C`est pour cette raison que les professionnels libéraux sont très hostiles au salariat, ou plus exactement, à toute idée d'exercice des professions libérales dans le cadre d'un contrat de travail. L'exercice salarié des professions libérales crée une certaine dépendance du praticien à l'égard de son employeur43(*). En conséquence, le professionnel libéral n'a pas d'employeur, il est son propre employeur, il ne reçoit d'ordre de personne pour l'exercice de son art.

C'est cette indépendance qui lui permet de gérer avec le maximum de diligence les intérêts intimes qui lui sont confiés, même si c'est de manière désintéressée.

2) Le caractère de désintéressement

19. Les professions libérales sont exercées par des hommes libres et riches, par conséquent à l'abri des soucis matériels. Elles sont exercées par des hommes qui voudraient se divertir tout en rendant service. Etant à l'abri des problèmes matériels, le praticien libéral devrait exercer son art de manière désintéressée ; autrement dit, il doit fournir une prestation sans contrepartie financière sans rien attendre en retour. La recherche du lucre, caractéristique essentielle des professions commerciales y est donc proscrite.

La relation libérale est donc parfois présentée comme une double libéralité. Le praticien agissant « animo donandi » gratifie son client d'une libéralité non pas pour le rémunérer, mais pour l'honorer44(*). D'ailleurs, les honoraires que les professionnels libéraux perçoivent sont en principe largement inférieurs au service rendu pour être considérés comme une rémunération. L'honoraire n'est donc pas dans la doctrine classique, une rémunération, c'est une gratification45(*).

20. Mais cette conception classique, voire passéiste des professions libérales n'est plus aujourd'hui suffisante pour les caractériser parce qu'elle « semble en effet teintée d'immobilisme et ne plus correspondre à la réalité des activités exercées en cette fin de 20ème siècle »46(*). Les nombreuses mutations survenues depuis lors dans le monde libéral ont érodé et rogné de manière importante les piliers classiques des professions libérales, provoquant du même coup leur ruine. L'exercice en équipe des activités libérales et l'exercice avec des équipements sophistiqués ont contribué à distendre le lien de confiance. De même, l'introduction du salariat dans l'exercice des activités libérale a porté atteinte à l'indépendance des professionnels libéraux47(*). Aussi bien, les prestations libérales ne sont plus exclusivement intellectuelles, elles sont aussi parfois manuelles et leur fourniture n'est plus aussi désintéressée qu'elle ne l'était au départ.

Le moins que l'on puisse dire, c'est que la forte matérialisation des professions libérales a contribué à l'érosion de leurs piliers classiques.

Paragraphe II: Les conséquences de la matérialisation : la ruine des piliers classiques

Avec l'accélération de l'histoire48(*), tous les quatre piliers classiques des professions libérales apparaissent de nos jours comme étant trop étroits pour définir et caractériser celles-ci (1), de sorte que leur renouvellement à l'aune des mutations économiques et scientifiques paraît souhaitable (2).

A) L'étroitesse des piliers classiques

Sous la pression des mutations économiques, les critères classiques des professions libérales sont devenus trop étroits, moins adaptés pour les caractériser. Cette obsolescence touche non seulement le critère général mais également les critères dérivés.

1) L'obsolescence du critère général

21. De tous les critères classiques des professions libérales, la confiance apparaît à bien des égards comme étant le critère général ou mieux encore comme le critère principal. Il s'agit précisément de la confiance presque aveugle qu'éprouve le client envers le professionnel. Mais aujourd'hui, la relation libérale n'est plus tellement sacralisée et mystifiée. Du fait de la commercialisation des activités libérales, de la matérialisation de celles-ci, le lien de confiance s'est distendu.

L'introduction des sciences dites « exactes » et des techniques a eu pour vertu principale pour les professions libérale, la réduction de l'aléa - qui était jusque-là inhérent à la fourniture des prestations libérales - et du risque d'erreur. La technique chasse donc l'aléa et l'erreur dans l'exercice des professions libérales49(*). C'est pour cette raison que la clientèle libérale exige que le praticien libéral lui offre une prestation conforme aux meilleures avancées techniques. Il est d'autant plus exigeant qu'il est tenu de verser en contrepartie de la prestation libérale des honoraires parfois élevés. Ayant payé cher les honoraires, le client exige que le praticien lui offre ce que la technique offre de meilleur50(*). A l'analyse, il apparaît que la recherche de compétence a supplanté la quête quasi mystique du client et a changé le regard des clients envers le praticien libéral. De profane à initié, ce regard est désormais celui d'ignorant au savant51(*).

L'évaporation de l'intimité résulte aussi de l'exercice en équipe des professions libérales. Le client n'a plus qu'un seul interlocuteur à qui il fait religieusement confiance, il a désormais en face parfois tout un groupement, toute une société de praticiens. Le lien de confiance et l'intuitus personae n'appartenaient plus à la conception moderne des professions libérales, ils relèvent d'une conception classique et passéiste. Le professionnel doit recourir à la technique permettant d'accomplir une prestation scientifiquement et déontologiquement conforme aux règles de son art. Les professions libérales n'ont pu résister à cette évolution non seulement parce que la clientèle l'exigeait mais encore parce que les activités libérales sont devenues elles-mêmes techniques.

Mais la matérialisation n'a pas que touché le critère général - le lien de confiance, elle a aussi contribué à l'effritement des critères dérivés.

2) L'insuffisance des critères dérivés

22. Dans la conception classique des professions libérales, les prestations libérales devaient être intellectuelles et non manuelles, le praticien libéral devait être indépendant et exercer son art de manière désintéressée. Mais, sous l'influence des mutations économiques et scientifiques, tous ces trois critères se sont profondément fissurés, perdant au passage leur épaisseur et leur rayonnement d'antan52(*) .

Le caractère intellectuel de la prestation libérale est aujourd'hui démenti par la pratique. D'ailleurs, ce caractère relève plus d'un préjugé contre le travail manuel, que d'une véritable rigueur scientifique, et s'il a aujourd'hui perdu en prestige, c'est parce que certaines professions libérales allient aujourd'hui travail manuel et travail intellectuel53(*). Pour mieux s'en convaincre, il suffit pour cela de considérer l'activité de chirurgie dentaire, laquelle allie parfaitement travail de l'esprit et travail manuel.

«  Le second critère, celui d'indépendance, a longtemps servi de prétexte à certains pour enfermer la profession libérale dans une tour d'ivoire »54(*). Mais ce critère d'indépendance, à l'instar des autres, subit aujourd'hui de nombreux coups de boutoir, de nombreuses attaques.

23. La première de ces attaques résulte de l'intervention étatique dans l'exercice des professions libérales. L'Etat y intervient à travers des organismes - des ordres - pour contrôler l'exercice de ces activités et pour s'assurer que les professionnels libéraux remplissent correctement les missions de service public à eux confiés. Le contrôle exercé par ces organismes a pour but de maintenir le prestige des professions libérales et d'éliminer les indignes afin de créer une autocritique et une autodiscipline corporative55(*). L'interventionnisme étatique est une attaque de moindre importance par rapport au salariat qui rogne véritablement l'indépendance des professionnels libéraux.

Aujourd'hui, le salariat et les sociétés commerciales sont entrain de prendre d'assaut les forteresses de l'univers libéral. Avec l'introduction du salariat dans le monde libéral, il se pose un problème majeur relatif à l'indépendance des professionnels libéraux. De nombreux auteurs affirment que le salariat porte en lui les germes d'une forte dépendance, dans la mesure où tout contrat de travail implique la dépendance de l'employé à l'égard de l'employeur56(*).

Le salariat n'est plus regardé avec autant de défiance, certainement parce qu-il comporte beaucoup de vertus. Le salariat permet en effet au jeune praticien qui n'a pas assez de moyens, ou même une charge de pouvoir exercer son art.

En outre, le salariat fait bénéficier à la partie la plus faible - à savoir le praticien employé - la protection du droit du travail et d'une meilleure couverture sociale57(*). Quelque vertueux que puisse paraître l'introduction du salariat dans le monde libéral, celle-ci n'en comporte pas moins des risques énormes d'atteinte à l'indépendance des professionnels libéraux. Donc, de même que l'idée d'une indépendance absolue du praticien libéral n'est plus convaincante en tous points, de même que l'idée de l'exercice désintéressé par ce dernier de son art est à reconsidérer.

24. Le désintéressement est l'un des piliers classiques des professions libérales. Il signifie que le praticien libéral gratifie son client d'une prestation, lequel lui fait honneur en lui donnant une gratification. Mais depuis toujours, des voix se sont élevées pour critiquer une conception trop idéaliste de l'esprit libéral. Nombre d'auteurs non juristes ont d'ailleurs raillé ce trait à l'époque58(*). Ces critiques sont devenues encore plus véhémentes de nos jours. Ce caractère est démenti par la pratique et ne serait aujourd'hui qu'une vue de l'esprit. Les praticiens libéraux recherchent en effet le lucre dans l'exercice de leur activité, ce qui rend donc flou la ligne de partage entre les professions libérales et celles commerciales. Les professionnels libéraux perçoivent bien, à l'instar des commerçants, une rémunération qui est pudiquement appelée « honoraire ».

Aujourd'hui, les honoraires apparaissent de plus en plus élevés et tendent, sinon à être égaux à la prestation libérale, du moins à être supérieures à celle-ci. Et même dans l'hypothèse aujourd'hui rare où un déséquilibre pourrait apparaître entre la prestation libérale et les honoraires, ce déséquilibre est corrigé, pour certaines professions, libérales, par le versement d'autres rémunérations telles que les émoluments et les dépens59(*).

L'esprit lucratif est aujourd'hui si accentué dans le monde libéral à cause de la matérialisation croissante des professions libérales. En effet, les professionnels libéraux consentent des investissements importants pour acquérir des équipements de pointe. Par ces dépenses, ils entendent procurer une meilleure satisfaction à leur clientèle libérale devenue très exigeante. Ayant consenti ces efforts financiers, les professionnels libéraux entendent bien en tirer meilleur profit ; ceci passe par la perception des honoraires élevés, qui sont ni plus ni moins de véritables rémunérations60(*).

B) Le renouvellement des critères classiques a l'aune des mutations sociales

25. Tous les piliers classiques des professions libérales se fissurent profondément sous l'influence des mutations économiques et scientifiques. Le lien d'intimité s'est évaporé, les caractères intellectuel, d'indépendance et de désintéressement ont perdu en épaisseur et en prestige. Mais la crise que connaissent ces fondements classiques ne devrait pas faire illusion et faire penser qu'il y a disparition de tous ces caractères. Il y a juste pour ceux-ci un renouvellement pour leur arrimage aux mutations actuelles. Ce renouveau touche tous les critères des professions libérales, qu'il s'agisse du critère général ou des critères dérivés.

1) Le renouvellement du critère général

Classiquement entendu, le lien d'intimité implique une confiance quasi religieuse du client à l'égard du seul praticien. Mais la forte matérialisation des activités libérales a fait penser à la ruine totale des fondements classiques des professions libérales, notamment à l'évaporation du lien d'intimité.

Aujourd'hui cependant, le lien d'intimité n'a pas disparu, il a pris un autre visage, une autre couleur. Le lien de confiance s'est certes rétréci par rapport à son acception classique, mais s'est rajeuni sous l'influence des mutations sociales.

La confiance n'est plus faite à la seule personne du praticien, elle est désormais orientée vers tout un groupe, toute une équipe de praticiens. De même, pour beaucoup de professions libérales, spécifiquement celles scientifiques et techniques, la clientèle libérale fait confiance non plus seulement au praticien mais aussi et surtout aux appareils acquis par le praticien pour l'exercice de son art. A titre illustratif, nous pouvons citer les professions de chirurgie dentaire, de radiologie qui requièrent certes l'expertise du praticien, mais surtout la qualité des équipements.

Soulignons opportunément ici qu'il n' y a pas que le critère général - le lien de confiance - qui a connu successivement une crise suivie d'une mue, d'un rajeunissement, il y a aussi les critères dérivés qui ont connu cette métamorphose.

2) Le rajeunissement des critères dérivés

26. Pour une meilleure analyse de ces mutations, examinons tour à tour les critères de désintéressement et d'indépendance.

Si l'on s'en tient à l'acception traditionnelle, il apparaît clairement que les professions libérales sont aujourd'hui moins désintéressées qu'elles ne l'étaient autrefois. Mais ce caractère n'a pas pour autant baissé pavillon et ce, malgré la forte commercialisation des activités civiles. Il est toujours présent et prégnant dans les professions libérales, où il sert de trait distinctif entre les activités commerciales et celles libérales61(*). Seulement, il a pris un autre visage, le désintéressement ne signifie plus seulement absence de recherche de lucre, de bénéfices ou bien encore inexistence d'un esprit mercantile. Désormais, il signifie aussi disponibilité  du praticien, son dévouement et sa diligence62(*). Vu sous le seul prisme de la conception classique, le caractère de désintéressement s'est totalement dégradé. Mais en intégrant les mutations actuelles, ce caractère sert toujours de pilier aux professions libérales, à la seule différence qu'il a pris une autre signification. Toute aussi similaire est la situation du critère d'indépendance.

Dans la conception classique des professions libérales le praticien libéral doit être indépendant, autonome, libre de toute sujétion pour exercer avec le maximum de diligence son art et procurer aussi une prestation de qualité à sa clientèle, devenue avec la matérialisation des activités libérales, très exigeante. Mais ce fondement se trouve suffisamment menacé de nos jours, dans la mesure où on assiste à une infiltration pernicieuse, du salariat dans cette tour d'ivoire que constituent les professions libérales63(*).

Le salariat est regardé avec beaucoup de défiance par la doctrine qui estime qu'avec son cortège de sujétions, il risque de rogner l'indépendance des praticiens libéraux. Mais à contre courant de ces inquiétudes, s'élèvent aussi en doctrine des voix qui, tout en relevant les dangers du salariat soulignent néanmoins sa compatibilité avec les professions libérales64(*). De manière plus précise, un praticien libéral peut parfaitement exercer son art dans le cadre d'un contrat de travail et demeurer indépendant65(*).

La subordination juridique, caractéristique de tout contrat de travail, signifie que le subordonné est assujetti à des conditions particulières de travail, reçoit donc des instructions ou des ordres. Mais « la perception d'une rémunération forfaitaire ne suffit pas à conférer à celui qui la reçoit le qualité de partie à un contrat (de travail) dès lors qu'il ne se trouve pas dans un rapport de subordination à l'égard de celui qui la lui verse »66(*). Autrement dit, toute relation de travail du praticien avec son confrère repose sur une base contractuelle, mais n'est pas forcément un contrat de travail, dans la mesure où le praticien garde une indépendance technique, malgré la dépendance matérielle67(*). L'indépendance technique postule la maîtrise par le praticien des conditions d'exercice de son art. S'il dépend matériellement du praticien, il ne reçoit pas pour autant d'ordre ni d'injonction de ce dernier. L'avocat demeure maître de l'argumentation qu'il développe, le médecin fait son diagnostic en toute liberté68(*). Tous ces développements traduisent bien l'idée d'une dépendance matérielle du praticien et son indépendance technique, donc d'une comptabilité possible entre le salariat et les professions libérales. Le salariat ne porte donc pas toujours atteinte à l'indépendance du praticien libéral.

Les mutations opérées sur le plan économique et scientifique ont corrompu et érodé les fondements classiques des professions libérales. Le lien d'intimité s'est évaporé, la recherche du lucre et de la rentabilité ont supplanté l'ambition d'assistance universelle, l'indépendance n'existe plus que dans une portion congrue. A l'analyse donc, la matérialisation des professions libérales est protéiforme, elle a plusieurs visages et se manifeste de diverses manières.

Section II: Les manifestations de la matérialisation

27. L'accélération de l'histoire69(*) a eu pour conséquence majeure la métamorphose des phénomènes sociaux70(*). Le développement rapide de la science a transformé profondément toutes les activités, qu'elles soient commerciales ou libérales. D'ailleurs, même les professions libérales si traditionnellement attachées aux tabous n'ont pas été épargnées par ces mutations, ceci même dans celles où la part « d'intuitus personae » est assez saillante, comme la profession d'avocat71(*).

Regardée avec beaucoup de suspicion par les uns et saluée par d'autres, le mouvement de matérialisation va contribuer au déclin des éléments subjectifs dans l'attrait de la clientèle libérale. Ce mouvement va ainsi valoriser les éléments objectifs pour la conquête et la conservation de la clientèle libérale. La nature des obligations a même changé ; au lieu d'une simple obligation de moyens comme par le passé, il pèse désormais sur les praticiens libéraux une véritable obligation de résultat, ce qui n'est pas sans conséquences sur les règles traditionnelles de la responsabilité civile.

Les manifestations de la matérialisation des professions libérales sont plurielles et apparaissent donc comme étant complexes ; aussi bien, pour en saisir au moins l'essentiel, il ne nous suffit pas seulement d'insister sur la transfiguration des règles traditionnelles de la responsabilité civile (Paragraphe B), il faut d'abord montrer le rôle joué par les éléments objectifs dans l'attrait de la clientèle libérale (Paragraphe A).

Paragraphe I : La prégnance des éléments objectifs dans l'attrait de la clientèle libérale

28. Avant le mouvement de matérialisation, la clientèle libérale était attirée par les éléments subjectifs. L'attraction de la clientèle libérale ne dépendait alors que des considérations personnelles au client, telles que son expertise, ses connaissances, sa diligence, son esprit d'initiative72(*). Mais le vaste mouvement de matérialisation a tellement transformé les comportements de la clientèle libérale au point qu'elle se sent plus attirée par les éléments physiques parce qu'ils sont seuls aptes à conjurer l'aléa et à procurer une meilleure satisfaction73(*). C'est donc tout naturellement que les praticiens vont se lancer dans la course à l'acquisition des matériels sophistiqués.

Pour y parvenir, il leur faudra trouver des capitaux importants74(*). Ils auront ainsi recours à moult techniques de financement à caractère commercial, notamment le prêt auprès des banques, le nantissement, l'appel public à l'épargne etc.

L'appropriation par les praticiens libéraux des modes de financement d'essence commerciale ne manquera pas de donner une coloration spéculative à l'activité libérale.

A) L'appropriation par les praticiens libéraux des modes de financement d'essence commerciale

29. Les équipements jouent un rôle important dans le ralliement et la fidélisation de la clientèle libérale, à tel point que tous les praticiens libéraux s'efforcent aujourd'hui de se doter des matériels sophistiqués (1) nonobstant le fait que ces investissements ne manqueront pas de susciter et d'aiguiser en eux un esprit lucratif (2).

1) Le caractère coûteux des investissements

Les professions médicales apparaissent aujourd'hui comme étant fortement matérialisées par rapport aux professions judiciaires75(*). La raison en est que les professions médicales se sont très tôt ouvertes, par nécessité aux avancées techniques76(*). Certaines d'entre elles sont très marquées par cet aspect - les professions de radiologue, de biologie -au point que l'humanisme médical, si caractéristique des professions libérales a disparu. « l'écran technique » s'étant dressé entre le praticien et son client77(*).

La clientèle est donc cristallisée pour toutes les professions libérales, par la présentation extérieure, le décor78(*) ; même les avocats « n'échappent pas à la loi commune de l'évolution : leurs bibliothèques, leurs machines à écrire, leurs dictaphones, voire leurs appareils à photocopier sont encore bien modestes en face de l'instrumentation de leurs amis médecins, mais il n'en existe pas moins »79(*). Le mouvement de matérialisation touche donc toutes les professions libérales, même celles qui étaient rétives à toute idée de patrimonialisation80(*). Pour mieux s'en convaincre, il suffit d'observer les architectes et les comptables dans l'exercice de leur art. Ainsi, l'utilisation des logiciels de conception assistée par ordinateur est-elle récurrente chez les architectes. De même, faut-il souligner que le traitement des informations comptables se fait de plus en plus par le recours à certains logiciels.

Mais l'acquisition de ces matériels ne va pas toujours sans soulever des difficultés financières, dans la mesure où les praticiens doivent réunir un capital important81(*). Ces difficultés sont encore plus lourdes pour les praticiens débutants, lesquels doivent soit recourir aux prêts - même si l'accès au crédit n'est point aisé pour tous ceux qui, à l'instar de ces derniers, ne présentent pas des garanties sérieuses de solvabilité - soit exercer son activité dans le cadre d'un groupe, encore faudrait-il se faire accepter par le groupe.

Il apparaît donc que l'acquisition des équipements a un coût financier que les professionnels libéraux répercutent sur les honoraires exigés, ce qui donne une coloration spéculative à l'activité libérale.

2) La coloration spéculative de l'activité libérale

30. Avec la matérialisation des professions libérales, l'exécution d'une prestation libérale apparaît comme étant très onéreuse pour le praticien libéral. Le « coût de production » d'une prestation libérale est donc très élevé puisqu'il intègre aussi bien les loyers, les salaires des employés, les factures d'eau et d'électricité, les amortissements de matériels82(*),les impôts payés83(*).

Les professionnels libéraux répercutent toutes les charges supportées sur les honoraires qui sont par conséquent considérés non plus comme une libéralité du client à l'égard du praticien mais comme une véritable rémunération, comme un bénéfice. Sur ce point précis, il faut souligner que les honoraires sont considérés par le législateur fiscal camerounais comme un bénéfice et sont à ce titre imposés à l'IRPP dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. L'assimilation des honoraires aux bénéfices s'explique par l'autonomie et le réalisme du droit fiscal84(*) , toutes choses qui justifient le rôle pionnier du droit fiscal dans l'oeuvre de commercialisation des activités civiles85(*).

B/ La place centrale des éléments incorporels dans l'attrait de la clientèle libérale

31. Loin de faire une étude comparative entre le fonds de commerce et le fonds libéral, il faut néanmoins souligner que le parallèle entre ces deux notions de droit privé est saisissant86(*). A l'instar du fonds de commerce, le fonds libéral comprend aussi certains éléments dits incorporels, lesquels permettent d'attirer et de fidéliser la clientèle libérale. Sans être exhaustif, nous pouvons entre autres citer le droit au bail et le « nom libéral ».

1) Le droit au bail

32. La localisation est un élément important chez tous les professionnels, qu'ils soient commerçants ou praticiens libéraux, à ce titre, elle doit être stable87(*). C'est ce besoin de stabilité qui a été à l'origine du démantèlement de l'ancienne propriété immobilière par la propriété commerciale88(*). Ce besoin a d'abord été ressenti par les commerçants à la fin de la première guerre mondiale. Pendant cette première boucherie humaine, une crise aux conséquences désastreuses pour les propriétaires d'immeubles français s'est produite : les bailleurs ont été contraints de baisser les loyers des immeubles.

La guerre terminée, l'accalmie retrouvée, les propriétaires voulurent revenir à la situation d'avant guerre en augmentant les loyers. Pour parvenir à leurs fins, ils invoquèrent simplement à leur bénéfice les dispositions du Code civil qui autorisaient le bailleur d'immeuble à refuser de renouveler le contrat de bail au terme de celui-ci89(*).

Cette décision des bailleurs souleva une telle hostilité chez les locataires que le législateur se trouva face à un dilemme : sacrifier la justice ou sacrifier la sécurité juridique90(*). Finalement, le législateur marqua sa préférence pour la sécurité juridique, donc pour la stabilité des locaux d'exploitation des commerçants. Le législateur dut donc intervenir à travers la loi du 30 Juin 1926 ; désormais, les bailleurs sont tenus soit de renouveler le contrat à l'expiration de celui-ci, soit de payer une indemnité d'éviction au locataire le plus souvent élevée. Le législateur consacrait donc de manière subtile une véritable propriété commerciale au profit du locataire, faisant ainsi entorse à l'ancienne propriété immobilière91(*).

Si le pari de la sécurité juridique plutôt que de la justice avait été fait, c'est parce que la localisation apparaît à bien des égards importante pour le commerçant. Mais très tôt, la préoccupation de stabilité est aussi apparue à l'occasion de l'exercice des activités libérales. Si les commerçants ont pu, s'affranchir des régimes des baux civils, tel n'a pas été le cas des professionnels libéraux qui sont restés longtemps soumis à une législation devenue de plus en plus inadaptée et obsolète92(*).

Face à la fragilité et à la précarité de cette situation géographique, les praticiens libéraux, rivalisant d'ingéniosité vont recourir à des moyens détournés pour maintenir et pérenniser leur situation géographique. Ils le feront surtout par le rattachement conventionnel au statut protecteur du bail commercial93(*).

Cette pratique illustre parfaitement l'idée selon laquelle la clientèle libérale n'est plus seulement attirée par des considérations personnelles donc subjectives, elle est de plus en plus attirée par des éléments objectifs de nature corporelle - les matériels ou incorporelle - la localisation, le « nom libéral ».

2) Le nom libéral et l'enseigne

33. Certains éléments - le nom commercial et l'enseigne - permettent d'individualiser le fonds de commerce. Le nom commercial et l'enseigne sont des notions bien distinctes, même si cette distinction apparaît souvent comme étant mystérieuse voire imprécise. Quelque sibylline que cette frontière puisse paraître, il n'en reste pas moins vrai que ces deux notions sont chargées de significations différentes94(*).

Le nom commercial est l'appellation sous laquelle le commerçant exerce son activité. C'est le plus souvent son nom patronymique, mais ce peut être un pseudonyme ou un nom de fantaisie. En revanche, l'enseigne est une dénomination ou emblème apposé sur un local pour individualiser le fonds de commerce qui y est exploité95(*). Elle peut être constituée avec le nom commercial, mais peut aussi en être distincte96(*). Le nom commercial et l'enseigne constituent des signes distinctifs qui sont protégés contre les confusions volontaires et involontaires97(*).

Mais l'utilisation des signes distinctifs pour attirer la clientèle n'est pas seulement l'apanage des commerçants. L'usage des noms et enseignes est aussi très fréquent dans les professions libérales, spécialement chez les experts comptables, les conseils juridiques et fiscaux. En effet, beaucoup de cabinets ne doivent leur clientèle que grâce à leur nom et non nécessairement à la qualité de la prestation fournie. D'ailleurs, les prestations fournies par ces cabinets sont regardées du côté de la clientèle comme étant de meilleure qualité, comme ayant été faites conformément aux règles de l'art.

Le nom est donc un élément d'attraction de la clientèle libérale, il a une valeur patrimoniale certaine98(*). Dans certains cas, le nom qu'il soit commercial ou libéral peut atteindre une notoriété si grande qu'il acquiert une valeur économique considérable et même supérieure à celle des autres éléments incorporels du fonds99(*). A ce titre, il peut être transmis avec le fonds ou même à titre isolé100(*). L'importance du nom libéral dans l'attrait de la clientèle libérale justifie sa cession avec le fonds. L'acquéreur du fonds est donc autorisé à utiliser le patronyme, sous réserve des restrictions retenues en matière commerciale qui pourraient valablement s'appliquer dans ce domaine. Le nom libéral est donc, à l'instar du nom commercial, le siège d'un droit de propriété incorporelle101(*).

34. La matérialisation des professions libérales se manifeste principalement par l'effritement des considérations personnelles dans l'attrait de la clientèle libérale, lesquelles ont été supplantées par des éléments objectifs tels que les équipements, le nom libéral ou l'enseigne. Il ne s'agit pas à l'évidence de la seule manifestation du mouvement de matérialisation des professions libérales, il faudrait opportunément souligner la transformation de la nature des obligations pesant sur les praticiens. D'une obligation de moyens, on est passé à une obligation de résultat, ce qui ne manque pas de perturber les règles traditionnelles de la responsabilité civile102(*).

Paragraphe II : La perturbation des règles traditionnelles de la responsabilité

35. Les professions libérales sont nobles et très sélectives. A ce titre, elles ne peuvent être exercées que par ceux qui en sont dignes103(*). Pour cette raison, il existe dans chaque profession libérale un organisme chargé de filtrer l'accès à la profession, d'édicter des règles de conduite et de sanctionner éventuellement tous les membres contrevenants104(*). Mais la responsabilité des praticiens n'est pas que disciplinaire105(*), elle est aussi civile, notamment dans l'hypothèse où un professionnel libéral se rendrait coupable d'un comportement dommageable à l'égard d'un client. Le praticien engage alors sa responsabilité civile contractuelle au cas où il manquerait à ses obligations contractuelles106(*).

A/ Une responsabilité classiquement basée sur l'inexécution d'une obligation de moyens

36. Avant le mouvement de matérialisation, il pesait sur tous les praticiens exclusivement des obligations de moyens, que certains auteurs n'ont pas manqué de qualifier d'obligations de prudence et de diligence107(*). Le praticien n'était donc tenu à rien de plus que de mettre au service du créancier - le client - les moyens dont il disposait, de se montrer prudent et diligent, de faire de son mieux. Donc, s'il était tenu de poursuivre un résultat, il n'était a contrario pas tenu de l'atteindre108(*). Il résulte donc de ceci que l'avocat comme l'huissier ou le notaire devait se montrer diligent dans le traitement des dossiers à lui confiés ; de même, le médecin n'était tenu de donner à son patient des soins consciencieux attentifs et conformes aux données acquises de la science.

Si seules les obligations de diligence pesaient à cette époque sur les praticiens, c'est parce que l'exécution d'une prestation libérale faisait beaucoup de place à l'humain, ce qui rendait très aléatoire l'atteinte du résultat recherché109(*). Il s'ensuit donc que la responsabilité du praticien pouvait être engagée au cas où il manquait à ses obligations contractuelles. Mais il n'était responsable  que si la victime, en l'espèce le client ou ses ayant droit réussissaient à prouver sa faute, ce qui était une entreprise malaisée

Mais depuis le mouvement de matérialisation des professions libérales, les obligations des praticiens ont changé de nature, elles ont connu une mue. Il ne pèse plus sur eux comme par le passé, de simples obligations de moyens, il pèse désormais sur ces derniers de véritables obligations de résultat.

B/ Une responsabilité actuellement basée sur l'inexécution d'une obligation résultat

37. Mais du fait de la matérialisation de l'activité libérale, on assiste depuis quelques temps à l'abandon de cette conception subjective de la responsabilité des professionnels libéraux et à la reconnaissance prétorienne de véritables obligations de résultat dans le cadre de la prestation libérale110(*).

La mutation de la responsabilité des praticiens libéraux se justifie par le fait qu'aujourd'hui, l'exécution d'une prestation libérale laisse aujourd'hui moins de part à l'humain et fait primer la technique111(*), dont l'une des vertus est, du moins théoriquement, la fiabilité112(*). La technique démystifie le travail libéral dans la mesure où elle rend le résultat moins aléatoire, moins improbable et plus contrôlable113(*). Cette démystification a transformé les relations du praticien avec son client : il ne s'agit plus d'une relation de profane à initié mais plutôt celle d'ignorant au savant114(*).

Cette évolution a des conséquences redoutables sur la responsabilité des praticiens ; la victime - le client - n'est plus tenue de prouver la faute du créancier, il pèse désormais sur ce dernier une présomption de faute. Il y a renversement de la charge de la preuve puisque c'est le praticien qui doit prouver qu'il s'est comporté en bon père de famille dans l'exécution de la prestation libérale, qu'il a été diligent, bref qu'il n'a commis aucune faute115(*).

CONCLUSION DU CHAPITRE I

38. Au terme de ce chapitre, il apparaît que les praticiens libéraux ont pris conscience du fait que les matériels, les appareils ne sont plus de simples artifices, de simple décors. Ils présentent aujourd'hui une grande utilité pour lui, notamment l'élimination de l'aléa et du risque d'erreur inhérents à la fourniture de toute prestation libérale. Fort de ces avantages, les praticiens libéraux ont été amenés à s'équiper, à se doter de matériels sophistiqués. Mais au-delà des vertus qu'on reconnaît parfois à la matérialisation, celle-ci n'en comporte pas moins quelques inconvénients ; elle a écorné les principes classiques des professions libérales.

La prestation libérale a cessé d'être exclusivement intellectuelle, elle est de plus en plus manuelle ; elle n'est plus exercé de manière désintéressée puisque la recherche du lucre , la spéculation apparaissent aujourd'hui comme la finalité de l'activité libérale. De même, il apparaît que le salariat a corrompu l'indépendance des praticiens libéraux.

A l'analyse donc, la matérialisation des professions libérales érodes la distinction classique droit civil, droit commercial et contribue à faire émerger la notion de fonds libéral en droit camerounais. Toutefois, il faut signaler que cette émergence est aussi rendue possible par le regroupement des praticiens libéraux.

Chapitre II :

L'APPORT DE L'EQUIPE A L'EMERGENCE D'UNE NOTION DE FONDS LIBERAL

39. Dans la tradition libérale, le professionnel libéral est seul tenu de l'exécution de la prestation libérale, il ne saurait en effet la confier à un autre praticien. Les professions libérales sont donc marquées d'un fort « intuitus personae » : ayant seul reçu les confessions de son client, le praticien est tenu d'exercer seul la prestation libérale116(*).

Mais très vite, la commercialisation des professions libérales a conduit les professionnels libéraux à sortir de cet isolement, à se regrouper et à exercer en équipe. Ceci est non seulement dû au fait que « la somme du savoir nécessaire pour fournir une prestation se révèle très souvent supérieure à ce que le praticien isolé peut proposer »117(*), mais également parce que les équipements devenus très coûteux, ne peuvent être acquis par une seule personne ; ils ne peuvent l'être que par une équipe de praticiens parfois en associant des non professionnels118(*). Le regroupement des praticiens pourrait donc avoir des explications d'ordre sociologique et économique ; et dans la pratique, il s'est souvent fait à travers certaines structures, notamment les GIE, les SCP, les associations et même de manière récente les SA, les SARL.

Pour comprendre ces structures de regroupement dans toutes leurs variétés (Section II), il importe préalablement de nous interroger tant sur les raisons que sur les conséquences d'un tel regroupement des praticiens libéraux (Section I).

Section I : Les raisons et les conséquences du regroupement des praticiens libéraux

L'examen des raisons (Paragraphe I) précédera celui des conséquences (Paragraphe II)

Paragraphe I : Les raisons du regroupement des praticiens libéraux

40. Le regroupement des praticiens libéraux tient à deux raisons fondamentales. Pour la première série de raisons, la doctrine estime que c'est la complexité des problèmes qui leur sont soumis, l'élargissement du champ d'action des professions libérales, l'atomisation du savoir et par suite l'apparition de nouvelles branches qui se ramifient à leur tour119(*) qui ont amené les praticiens à recourir à l'équipe. Pour la seconde série de raisons, la doctrine estime que c'est le coût des équipements qui explique le recours à l'équipe par les praticiens libéraux, les matériels étant trop chers, ils ne peuvent être acquis par un praticien pris isolément, ils ne peuvent l'être que par toute une équipe de praticiens120(*).

Il apparaît en effet que, si les praticiens se regroupent pour exercer leur art, c'est non moins pour des raisons sociologiques (A) que pour des raisons d'ordre économique (B).

A/ Les raisons sociologiques du regroupement des professionnels libéraux

41. Les mutations scientifiques qui se sont opérées dans le monde libéral ont entraîné une inflation de connaissances et par voie de conséquence une spécialisation des praticiens libéraux : l'homme libéral ne peut plus prétendre tout seul appréhender l'ensemble des matières concourant à sa profession. C'est donc le désir de spécialisation des praticiens libéraux face à la complexité croissante des activités libérales qui explique le recours à l'équipe par les professionnels libéraux121(*).

La technique et la science ne sont pas des notions juridiques et n'intéressent pas à priori le juriste ; ils relèvent du domaine, du non-droit pour reprendre l'expression du professeur Jean CARBONNIER122(*). Mais tous les jours, l'on est saisi d'étonnement par la manière dont ces deux notions interfèrent dans notre vie, et plus encore, dans le commerce juridique.

Par la profusion de biens qu'elle apporte, la technique transforme profondément le « donné social » et influence même le « construit juridique ». Ceci est encore plus vrai dans le monde libéral si traditionnellement caractérisé par des interdits et des tabous. Ainsi, les besoins de la clientèle libérale deviennent-ils plus nombreux, de nouvelles activités et de nouvelles branches apparaissent-elles « lesquelles se ramifient à leur tour »123(*). Il résulte de cette technique galopante que «  la somme du savoir nécessaire, se révèle très souvent supérieure à ce que le praticien isolé peut proposer. Le professionnel doit toujours se remettre en cause, être en état de formation permanente, aux risques de ne plus être concurrentiel et, donc de ne plus tirer profit de son activité. Cette nécessité d'un recyclage permanent des connaissances et des esprits est le foyer d'un sentiment d'insécurité dans la profession libérale qui n'est plus aussi « confortable » qu'autrefois »124(*).

Mais quel que soit son talent, le praticien libéral ne peut prétendre saisir avec autant de doigté qu'il le faisait l'ensemble des matière concourant, à sa profession. Il doit pour cela, se spécialiser s'il souhaite rester efficace. Cette spécialisation peut selon les professions, être reconnue et organisée ; c'est le cas de la médecine125(*) où les « médecins polyvalents traditionnels » ont été remplacés par une « ...génération de spécialistes de plus en plus nombreux, de plus en plus diversifiés »126(*).

42. La spécialisation des praticiens ne doit cependant pas être magnifiée à ce point dans la mesure où elle comporte quelques limites. Dans ce sens, la spécialisation cantonne le praticien, dans son champ d'intervention et ne lui permet pas à cet effet de fournir à sa clientèle une prestation d'ensemble127(*). Ainsi, un patient nécessitant une intervention chirurgicale sera-t-il contraint dans cette hypothèse d'aller tour à tour chez le chirurgien et chez l'anesthésiste. Pareillement, pour une même affaire, une personne pourrait être tenue d'aller tout à tour chez les spécialistes du droit des personnes, du droit public, du droit fiscal etc. , ce qui ne peut pas parfois manquer de dérouter le client qui désire obtenir très rapidement une solution à ses misères.

43. Pour contourner cette limite inhérente à la spécialisation, les praticiens vont, selon les professions, se rapprocher les uns les autres pour exercer leurs activités. Si la profession libérale entre donc dans l'ère de l'équipe, de la complémentarité, de la collaboration, c'est parce que les besoins du client ne sont plus susceptibles d'être satisfaits par un homme seul128(*). La confiance sera accordée non plus à un individu comme c'était le cas par le passé, mais plutôt à une équipe, à un groupe, de praticiens129(*). Avec l'exercice en équipe, le service ne s'identifie plus à une seule personne, il tend « ... à devenir un service anonyme» 130(*).

Mais la nécessité de recourir à l'équipe ne tient pas seulement à ces raisons d'ordre sociologiques notamment à l'isolement du professionnel exerçant seul, elle tient aussi à des raisons d'ordre économique. Les professionnels libéraux se mettent ensemble parce que les équipements nécessaires à l'exercice de leur art sont devenus très onéreux.

B/ Les raisons d'ordre économique du regroupement des professionnels libéraux

44. Pendant longtemps, l'exercice des professions libérales se faisait avec des équipements modestes ; cette époque semble aujourd'hui révolue puisque les praticiens recourent de plus en plus aux matériels sophistiqués pour l'exercice de leur art. Mais les progrès de la science ne sont pas à la portée de tous les praticiens du fait de leur coût financier. En effet, « la technique moderne tend même à exiger un matériel de plus important et perfectionné. Cela est particulièrement frappant dans les professions médicales où les méthodes d'investigation et de soins nécessitent un équipement si coûteux qu'il n'est souvent plus à la portée d'un professionnel isolé »131(*).

Il apparaît donc que l'acquisition des équipements a un coût financier énorme qui ne saurait de ce fait être supporté par un seul professionnel libéral ; la lourdeur des investissements rend donc nécessaire les regroupements132(*), de sorte que chaque praticien n'est finalement tenu de supporter qu'une partie de la charge financière. La répercussion du coût des investissements sur plusieurs praticiens permet à ceux qui n'ont que peu de moyens matériels de pouvoir exercer leur art. Si ceci est vrai pour tous les professionnels libéraux, cela l'est davantage pour les praticiens libéraux débutants.

45. Avec la matérialisation, il s'est dressé un « écran technique »133(*) entre le praticien et son client, de sorte que ce dernier ne fait plus seulement confiance au premier, sa confiance est aujourd'hui orientée vers les matériels parce que ceux-ci réduisent l'aléa et le risque d'erreur inhérents à toute action humaine. De leur côté, les praticiens sont tenus de se mettre ensemble pour acquérir les équipements et fidéliser ainsi une clientèle libérale devenue très exigeante134(*).

Quelles que soient les raisons qui poussent les professionnels libéraux à se regrouper pour exercer leurs activités, il faut relever que de tels comportements grégaires, outre le fait qu'ils contribuent à la dépersonnalisation des professions libérales, ils soulèvent également des difficultés d'identification des responsables en cas de dommages causé par l'un des membres du groupe. La question est dès lors posée : qui du praticien ou du groupe doit répondre des dommages causés ?

Paragraphe II : Les conséquences de l'exercice en équipe des professions libérales

46. L'exercice en équipe des professions libérales permet non seulement aux praticiens de se spécialiser pour procurer une prestation conforme aux avancées de la science135(*), mais également aux praticiens peu nantis de se répartir les frais d'acquisition du matériel136(*). Mais au-delà de ces vertus du reste très nombreux, il faut souligner que l'exercice en équipe n'est pas sans susciter des problèmes énormes. Qu'on ne songe pas seulement au risque de dépersonnalisation des professions libérales si souvent évoqué par la doctrine, qu'on pense aussi aux difficultés d'établissement des responsabilités au sein du groupe de praticiens137(*).

La question est dès lors posée en ces termes : qui du praticien ou de l'équipe est responsable des dommages causés à un client ? Du fait des difficultés d'identification du véritable auteur au sein du groupe, la jurisprudence éprouve un malaise voire de l'embarras à prendre une position tranchée, puisqu'elle est tiraillée par deux tendances contradictoires. Le juge ne se prononce plus seulement en faveur de la responsabilité d'un seul praticien de l'équipe, il marque de plus en plus sa préférence pour une responsabilité du groupe138(*), ce qui constitue une césure par rapport à la conception classique toute teintée d'individualisme.

Cette mutation est sans conteste due à l'influence qu'exerce le droit commercial sur le droit civil139(*), puisque le problème d'établissement des responsabilités au sein des groupes se pose aussi bien en matière commerciale, notamment dans les groupes de sociétés140(*). Ce qui ne peut que justifier l'émergence d'une notion de fonds libéral en droit camerounais de nos jours.

Mais pour saisir toute la justesse de cette idée, il ne nous suffira pas simplement de soutenir l'idée de la responsabilité collective des praticiens (B), il faudrait aussi au préalable marquer un temps d'arrêt sur la tendance jurisprudentielle de la responsabilité individuelle (A).

A/ La responsabilité individuelle du praticien

47. Si l'établissement des responsabilités se pose aujourd'hui dans presque toutes les professions libérales exercées en équipe, c'est surtout en matière médicale et paramédicale que des solutions ont longtemps été esquissées. Du fait de leur ancienneté et de la rigueur scientifique qui les sous-tend, ces solutions pourraient parfaitement être transposées à toutes les professions libérales touchées par ce problème. C'est donc à dessein que nous ferons référence tout au long des développements qui vont suivre aux arguments avancés par le juge et la doctrine en matière médicale en faveur de la responsabilité d'un seul praticien.

En matière médicale, il n'est pas rare qu'un malade ait affaire pour une même intervention à plusieurs médecins141(*) . Et lorsque ces derniers par leurs agissements causent un préjudice au malade ou sont à l'origine de son décès, la question se pose dès lors de savoir qui doit répondre de tels agissements, l'un des médecins ou toute l'équipe ?

48. A cette question, les juges retiennent parfois la responsabilité individuelle d'un seul praticien ou de chacun des praticiens pris isolément. Au soutien de leur position, les juges invoquent la notion de solidarité ou celle d'obligation in solidum, lesquelles supposent l'existence d'une pluralité de liens juridiques unissant chacun des membres de l'équipe au patient142(*). Ceci n'est pas seulement une hypothèse d'école ; il est des cas où les rôles au sein de l'équipe de praticien sont bien connus. A titre d'exemple, dans une équipe d'intervention chirurgicale, certaines tâches relèvent quasi exclusivement de l'anesthésiologue - examens préopératoire non spécifiques, prescription médicamenteuse préparant l'anesthésie, installation du malade sur la table d'opération, anesthésie proprement dite, perfusion - transfusion, groupage, réanimation, surveillance directe du malade jusqu'au réveil - d'autres en revanche ne relèvent que du chirurgien143(*).

Dans ces différentes hypothèses, la responsabilité individuelle peut être envisagée. Ainsi, l'anesthésiste est-il seul responsable dans le cas où sa technique propre est uniquement en cause144(*) ; mais si la faute relève plutôt de la technique opératoire, c'est la responsabilité du chirurgien qui est seule engagée.

Par conséquent, en tant que collaborateur techniquement indépendant, l'anesthésiste des compétences propres, distinctes de celles du chirurgien ; à ce titre, il doit répondre de ses agissements dans le cas où sa technique est seule en cause145(*). Mais en tant que collaborateur techniquement dépendant, l'anesthésiste doit se conformer aux instructions du chirurgien. Dans ces conditions, il est difficile d'identifier l'auteur réel de la faute. La faute étant indivisible, ce n'est qu'une responsabilité du groupe de praticien qui peut être envisagée146(*) pour donner satisfaction à la victime.

B/ La responsabilité de l'équipe de praticiens

49. La recherche des responsabilités dans l'équipe des praticiens est malaisée du fait de l'imbrication des tâches et du caractère parfois indivisible de la faute147(*). Il n'est donc pas facile de distinguer avec netteté le rôle joué par chaque membre du groupe, sauf évidemment dans les cas bien rares où chaque membre de l'équipe a passé un contrat particulier avec le client. Dans ce cas, les rôles sont clairement définis entre les divers praticiens ; et en cas de survenance d'un dommage, c'est le praticien, dont la technique est mise en cause qui en est responsable, la pluralité de liens juridiques suppose donc, une pluralité de responsabilités, une responsabilité individuelle du membre fautif148(*).

50. En revanche, il arrive fréquemment qu'un seul praticien conclut le contrat pour tout le groupe de sorte qu'il soit seul tenu à réparation en cas de préjudice causé à un client, et puisse se retourner vers ses coéquipiers pour un partage des responsabilités149(*). C'est donc finalement toute l'équipe qui est tenue à réparation même si c'est une seule personne qui a reçu mandat de lier tout le groupe. Et même dans l'hypothèse très rare où il existe une pluralité de liens juridiques unissant les membres du groupe à un client, il est admis en jurisprudence qu'un praticien qui constate certaines négligences ne peut s'en désintéresser même si les actes en cause relèvent d'un autre praticien150(*). Ceci en raison du fait que l'exercice en groupe des professions libérale s'accommode parfaitement de nos jours avec l'idée d'une responsabilité du groupe - véritable responsabilité collective.

51. La responsabilité de l'équipe donne plus de chances de réparation à la victime qui ne peut plus pour cela s'adresser à un seul praticien, mais plutôt à toute une équipe. C'est ce souci de protection des victimes qui a entraîné le durcissement de la jurisprudence, à travers la consécration d'une présomption de causalité151(*). Désormais, la victime est dispensée de prouver la faute du praticien comme cela lui était exigé avant l'arrêt de 1936 ; il y a depuis eu renversement de la charge de la preuve, et c'est plutôt l'équipe de praticiens qui doit, pour s'exonérer, rechercher la vraie cause du dommage, une sorte de « cause étrangère »

Section II : Les formes juridiques permettant un exercice collectif des professions libérales

52. Les mutations économiques, sociales, politiques ont sérieusement affecté le monde libéral ; elles ont en effet entraîné la dépersonnalisation des activités libérales et rogné considérablement l'intuitus personae qui caractérisait celles-ci. Pour cette raison donc, l'exercice en équipe des professions libérales qui se développait pourtant avec bonheur en pratique, était néanmoins regardé avec beaucoup de défiance et d'hostilité par le droit. Mais progressivement, cédant à la pression des faits152(*) et cherchant à faire correspondre la vérité juridique à la vérité matérielle153(*), le législateur va reconnaître quelques formes juridiques qui favorisent l'exercice en commun des professions libérales.

Il s'agit non seulement les sociétés civiles professionnelles (SCP) (Paragraphe I) mais aussi des sociétés à objet civil mais à forme commerciale telles que les sociétés d'exercice libéral (Paragraphe II).

Paragraphe I : L'exercice des professions libérales au sein des sociétés civiles professionnelles

53. Les sociétés civiles professionnelles (SCP) apparaissent historiquement comme étant les premières formes d'exercice collectif des professions libérales. Du fait de leur ancienneté, elles méritent d'être étudiées dans certains de leurs aspects qui peuvent nous aider à saisir l'ampleur de la dépersonnalisation, de la matérialisation et de la patrimonialisation des activités libérales.

Toutefois, cette étude ne saurait être menée à bien que si l'on traite séparément les sociétés civiles professionnelles (SCP) de droit commun (A) de celles obéissant à des régimes particuliers (B).

A/ Les sociétés civiles professionnelles de droit commun

54. Il n'existe pas en droit camerounais un régime unitaire des SCP ; les règles applicables en la matière sont donc éparses et disséminées dans les textes organisant les différentes professions libérales154(*). En droit français en revanche, il y a un texte155(*) qui définit les règles générales applicables à l'ensemble des SCP. Mais celles-ci ne sont pas très éloignées de celles prévues par les textes camerounais, c'est la raison pour laquelle nous allons les examiner un peu plus en profondeur, sans toutefois négliger les textes camerounais.

Mais avant d'entamer cet examen, rappelons brièvement que les SCP ont été créées pour résoudre les difficultés liées à l'exercice individuel des activités libérales, elles sont constituées entre des personnes physiques exerçant une profession libérale soumise à un statut législatif ou règlementaire156(*). Ce bref rappel sert d'aiguillon à l'étude des SCP tant dans leur constitution (1) que dans leur fonctionnement et leur dissolution (2).

1) La légère protection du lien personnel lors de la constitution des SCP

55. Sans doute pour éviter une évaporation totale du lien de confiance dans les professions libérales, les législateurs français et camerounais ont posé comme règle principale que les SCP ne peuvent se former qu'entre personnes physiques exerçant la même profession157(*). Cette règle signifie que ni les personnes morales, ni les personnes physiques exerçant des activités libérales différentes ne peuvent se regrouper en une SCP. La multiprofessionnalité est donc prohibée, sauf pour les SCI. Comme dans les sociétés commerciales, les associés d'une SCP doivent faire des apports : en nature, en numéraire ou plus rarement en industrie.

Les conditions de formation des SCP sus-évoquées nous suggèrent deux types de précisions, notamment : l'exclusion des personnes morales est doublement justifiée. Il s'agit en effet d'éviter un anonymat et une certaine irresponsabilité contraires aux intérêts de la clientèle et aux traditions des professions libérales158(*). Aussi, bien, l'exclusion des bailleurs de fonds étrangers s'explique par le désir de s'assurer que les membres de la profession soient maîtres de la société159(*).

Si pendant la constitution de la SCP, le lien personnel est relativement protégé, celui-ci semble au contraire se distendre tant pendant le fonctionnement qu'à la dissolution de cette société.

2) La forte dépersonnalisation des activités libérales pendant le fonctionnement et la dissolution de la SCP

56. Une fois la SCP constituée, elle doit être immatriculée pour jouir de la personnalité morale. Mais contrairement aux sociétés de droit commun qui ont une dénomination sociale, les SCP ont une raison sociale. C'est donc ce qui justifie que la clientèle cesse d'appartenir aux associés pris individuellement, elle « appartient » désormais à la société qui perçoit en contrepartie de l'activité professionnelle de chaque praticien les rémunérations versées par les clients.

La collaboration est beaucoup plus poussée dans ces sociétés dans la mesure où, contrairement aux SCM, les associés ne sont pas indépendants, ils sont tenus solidairement et indéfiniment du passif social. Cette transparence fiscale, entraîne l'imposition des revenus de chaque associé à l'IRPP160(*). En contrepartie de ces sacrifices, les associés ont droit aux bénéfices, ce qui constitue une entorse au caractère de désintéressement des professions libérales.

Le parallèle des SCP avec les sociétés de droit commun apparaît aussi avec la possibilité qui est offerte aux associés d'une SCP de céder leurs parts. Sur le plan juridique, la cessibilité des parts SCP entraîne la dépersonnalisation des activités libérales, même si la loi française de 1966 précise que els parts d'intérêts qui représentent les apports en industrie sont incessibles. Seuls sont donc cessibles les parts sociales qui sont la contrepartie d'apports en numéraire ou en nature.

57. A l'instar des sociétés commerciales, la SCP a vocation, à la pérennité ; mais à la vérité, cette vocation n'empêche pas la disparition de la SCP de la scène juridique161(*). Les causes de disparition de la SCP sont nombreuses. La SCP se dissout de plain droit à l'arrivée du terme162(*). Bien qu'en droit français, le décès de l'un des membres n'entraîne pas la disparition de la SCP, en droit camerounais, tout au moins pour ce qui est de la SCP constituée entre notaires, le décès de l'un des membres peut entraîner la dissolution de la SCP, notamment dans l'hypothèse où la SCP n'était constituée que de deux membres. De même, le décès de tous les membres entraîne la dissolution de la SCP ; l'interdiction définitive d'exercer la profession frappant tous les membres entraîne la dissolution de la SCP.

58. C'est le Ministre en charge de la justice qui constate ou prononce par arrêté la dissolution de la SCP et en ordonne par le même acte la liquidation. C'est donc à partir à compter de la date de signature de l'arrêté que la SCP est considérée comme étant dissoute163(*). C'est dans le même acte que le Ministre de la justice nomme des liquidateurs et définit leurs attributions. Mais en général, les liquidateurs sont chargés de réaliser l'actif pour éteindre le passif ; pour ce faire, ils ne sauraient accomplir des actes de nature à aggraver le passif164(*). Sauf s'ils cessent définitivement leurs fonctions, le Ministre de la Justice peut autoriser les membres d'une SCP dissoute à reprendre l'exercice individuel de leurs fonctions165(*). Il faudrait toutefois signaler que la réglementation des SCP, nonobstant les vertus qu'on lui a parfois reconnues, n'a pas pour autant résisté aux nombreuses critiques doctrinales. Faisons brièvement une recension de quelques unes.

59. Il est parfois fait grief aux SCP d'avoir un statut rigide qui laisse peu de place à la volonté des associés et qui ne permette pas les financements extérieurs. Enfin, du point de vue fiscal, elles sont soumises au régime de la transparence en ce qui concerne les bénéfices, ce qui n'est guère favorable à la constitution de réserves166(*). Toutes ces limites ont conduit le législateur, notamment français à consacrer des SCP qui obéissent à des régimes particuliers.

B/ Les sociétés civiles professionnelles aux régimes particuliers

60. Pour permettre aux praticiens libéraux de faire face aux problèmes de financement de leurs activités et ceux de multi professionnalité, le législateur français a consacré entre autres SCP, les SCP de moyens (1) et les sociétés civiles inter-professionnelles (2).

1) Les sociétés civiles professionnelles de moyens

61. Les SCM de peuvent en principe se constituer qu'entre elles sont proches des SCP de droit commun. Mais si les limites entre les SCM et les SCP de droit commun sont poreuses, il faut dire que ces deux types de sociétés sont juridiquement distincts. L'un des traits caractéristiques des SCM c'est l'autonomie des membres qui permet à chacun de percevoir les honoraires résultant de son activité professionnelles, ce qui n'est pas le cas des SCP où les honoraires sont dus à la société et non pas aux associés.

Les SCM permettent donc aux associés de réunir les moyens afin de faire face à leurs nombreuses charges. Il n' y pas partage de bénéfices mais seulement contribution aux frais communs dans l'espoir que ceux-ci seront élevés que la somme des dépenses individuelles167(*). Si elles ne permettent pas aux associés de partager les bénéfices, elles leur permettent au moins de profiter d'une économie. C'est ce qui les rapproche des associations et des GIE dont la finalité est aussi le profit d'une économie168(*). Instrument de collaboration entre des entreprises préexistantes, le GIE n'est ni une société ni une association. De structure légère et malléable, le GIE ne permet pas un partage de bénéfices ; il permet plutôt aux membres de profiter d'une économie169(*).

Même si, comme les sociétés de droit commun, il est doté d'une personnalité morale170(*), le GIE «  a pour but exclusif de mettre en oeuvre pour une durée déterminée, tous les moyens propres à faciliter ou à développer l'activités économique de ses membres, à améliorer ou à accroître les résultats de cette activité »171(*). C'est la raison pour laquelle il peut être constitué entre deux ou plusieurs personnes physiques ou morales, y compris entre personnes exerçant une profession libérale. L'objet du GIE peut donc être civil ou commercial172(*).

62. Ces développements démontrent à suffire le parallèle entre les SCM et les GIE. Il ne faudrait toutefois se méprendre sur le sens à donner à l'autonomie des membres des SCM. L'autonomie n'est pas ici compatible avec la multiprofessionnalité ou l'interprofessionnalité. Cette incompatibilité ne va pas toujours sans soulever des difficultés surtout à l'heure où la clientèle libérale exige de leurs praticiens une prestation d'ensemble. C'est certainement la raison pour laquelle le législateur français a consacré les sociétés civiles interprofessionnelles.

2) Les sociétés civiles interprofessionnelles

63. En principe, les SCP et les SCM n'admettent pas la multiprofessionnalité ; seules les SCI consacrées par la loi française du 29 Février 1966 offrent une telle possibilité aux praticiens libéraux. Elles permettent à des personnes physiques pratiquant des professions libérales différentes de se regrouper soit pour exercer, soit pour rassembler les moyens propres à faciliter à chacun l'exercice de son activité.

Mais les véritables SCI sont constituées entre des personnes relevant d'ordres professionnels différents, ce qui évite toute confusion avec les sociétés réunissant des spécialistes différents d'une même profession173(*). Contrairement aux SCP ou aux SCM, les SCI ont pour avantage de procurer une prestation complète ; mais cet avantage ne saurait occulter certaines de ses limites.

La question s'est souvent posée de savoir si un même fait peut constituer une faute disciplinaire au regard des règles de plusieurs ordres. Dans ce cas, comment déterminer l'organe compétent. Si l'on admet des compétences concurrentes, comment éviter les contrariétés de décisions ? 174(*) Ces interrogations masquent bien certaines des limites des SCI ; celles-ci, autant que celles que nous avons relevées à l'encontre des SCP et des SCM, ont conduit le législateur français à admettre que les praticiens libéraux puissent aussi exercer leurs activités professionnelles au sein des sociétés civiles, mais à forme commerciale comme les SEL.

Paragraphe II : l'exercice des professions libérales au sein des sociétés à objet civil et à forme commerciale : les SEL

64. Les SCP ne peuvent en principe se constituer qu'entre praticiens libéraux exerçant la même profession. Les « bailleurs de fonds étrangers » étant par conséquent regardés avec beaucoup de suspicion et de défiance. Cette exclusion constitue à n'en point douter un obstacle à l'équipement des praticiens libéraux exerçant en équipe175(*). C'est pour réduire ces inconvénients que le législateur français a consacré les SEL, et dont la maîtrise passe non seulement par la connaissance de ses composantes humaines (B) mais aussi par celle de sa structure (A).

A/ La structure des SEL

L'examen de la loi française du 31 décembre 1990 laisse apparaître une variété de SEL (1) mais dont la formation et fonctionnement sont quasiment identiques (2).

1) La typologie des SEL

65. Presque toutes les professions libérales peuvent exercées au sein des SEL. On peut entre autres citer les professions médicales et paramédicales, les professions libérales techniques176(*). Les formes auxquelles peuvent accéder ces diverses professions sont au nombre de trois ; il s'agit notamment des SARL, SA et des SCA. Ainsi, les abréviations communément issues de ces combinaisons sont-elles au nombre de trois : les sociétés d'exercice libéral a responsabilité limitée (SELARL) les sociétés anonymes d'exercice libéral (SELAFA), les sociétés d'exercice libéral en commandite par action (SELCA). Il découle donc de ceci que les sociétés de personnes, notamment les sociétés en nom collectif (SNC) et les sociétés en commandite simple (SCS) n'ont pas été retenues par le législateur français177(*).

Innovation du droit français, les SEL permettent contrairement aux autres sociétés civiles (SCP, SCM, SCI), de faire face aux nombreux problèmes de multiprofessionnalité et d'équipement dans le monde libéral puisqu'elles admettent dans une portion bien maîtrisée « les capitalistes étrangers 178(*)». Elles permettent ainsi aux praticiens libéraux de faire face aux défis du capitalisme moderne. Mais il est à signaler que le droit camerounais n'a pas encore consacré cette forme de société, alors même qu'elle est de formation et de fonctionnement assez souples.

2) Formation et fonctionnement des sociétés d'exercice libéral

66. La formation des SEL obéit aux exigences posées pour tous les contrats179(*). Mais à côté de ces exigences classiques, il faudrait envisager plus en détail celles qui sont spécifiques aux SEL.

Pour qu'une SEL soit valablement formée, il faudrait qu'elle ait un objet, que celui-ci soit en outre civil même si la forme est commerciale180(*). Cet objet doit aussi être uniprofessionnelle181(*) même si la multiprofessionnalité est exceptionnellement admise182(*), ce qui permet aux SEL de dépasser le cadre législatif antérieur de la loi du 29 Novembre 1966 sur les SCP. Parce qu'elles permettent aussi, quoique de façon modeste de résoudre le problème de l'Interprofessionnalité, les SEL se confondent quelque peu avec les SCM. Mais en réalité, la distinction entre ces deux formes de sociétés est bien nette qu'on ne le pense a priori. Contrairement aux SCM qui sont caractérisées par l'autonomie de chaque membre et qui ne permettent pas un exercice direct de l'activité par la société, les SEL supposent une interdépendance entre les membres et un exercice direct de l'activité par la société.

67. En outre, pour qu'une SEL voit le jour, il faudrait qu'elle ait, à l'instar des sociétés commerciales, un capital. Mais à la différence de ces dernières, la participation à ce capital n'est pas ouverte à tout le monde. En principe, seuls les professionnels libéraux en exercice au sein de la société participent au capital ; mais la loi française du 31 Décembre 1990 admet exceptionnellement la participation des personnes n'ayant aucun lien familial ou personnel avec l'un des associés. Il peut s'agir des professionnels ou même des non professionnels comme les ayants droits183(*).

Toutefois, la participation au capital n'est pas la même pour tout le monde. L'article 5 (1) de la loi de 1990 impose le respect d'une double majorité. Ainsi, les personnes qui vont exercer leur profession dans le cadre de la SEL doivent ensemble détenir plus de la moitié du capital social et des droits de vote184(*). La participation des « capitalistes étrangers »185(*) est par conséquent minoritaire, ceci afin de « garantir que les professionnels en exercice au sein de la société demeurent maîtres des décisions sociales et de la conduite des affaires »186(*).

Mais outre l'ouverture du capital aux « capitalistes étrangers », les SEL donnent la possibilité aux associés de choisir une dénomination de fantaisie, à la condition que celle-ci soit obligatoirement précédée ou suivie de deux mentions. Il s'agit notamment de la forme de société choisie qui doit figurer en toutes lettres ou sous formes d'abréviation composée des initiales SELARL SELAFA ou SELCA. La seconde mention qui figure à côté de la première concerne l'énonciation du capital social indiquée en chiffres ou en lettres187(*).

L'examen de la structure des SEL permet de connaître cette forme de société aux aspects hybrides. Toutefois, cette connaissance serait partielle, donc incomplète si l'on n'envisage pas aussi l'étude des composants humains des SEL que sont les associés.

B/ LES ASSOCIES DES SEL

68. Si la distinction de l'associé et de l'actionnaire était classiquement considérée comme une évidence en droit, celle-ci est de plus en plus contestée en doctrine188(*). L'actionnaire ne désigne plus toute personne propriétaire d'une ou plusieurs actions, et l'associé le membre d'une société de personnes. Le régime juridique de l'actionnaire est fréquemment étendu aux associés par le législateur et les juges189(*).

Pour justifier cette mutation importante en droit des sociétés, les auteurs invoquent entre autres arguments le fait que la SA, « merveilleux instrument crée par le capitalisme moderne pour collecter l'épargne en vue de la fondation et de l'exploitations des entreprises »190(*), est devenue un paradigme du droit moderne des groupements191(*) .Ce qui conduit inévitablement à l'abaissement de distinction de la part sociale et de l'action192(*). Mais quoiqu'il en soit, la terminologie retenue pour les SEL est bien celle d'associé. Il serait donc intéressant de nous interroger tant sur le statut des associés des SEL (1) que sur leurs fonctions (2).

1) Le statut des associés des SEL

69. Malgré leur forme commerciale, les SEL demeurent très proches des sociétés de personnes caractérisées par un fort « intuitus personae ». C'est donc à bon droit que l'article 13 (1) de la loi française de 1990 régissant les SEL pose comme condition de l'acquisition de la qualité d'associé l'accord de tous les membres de la société. Aussi bien la qualité d'associé se perd-elle par décès, retraite, démission, radiation ou destitution de l'intéressé193(*). Mais les similitudes avec les sociétés de personnes ne s'arrêtent pas à ce niveau, elles transparaissent aussi dans le régime de responsabilité.

Quelle que soit la forme juridique retenue, la limitation de responsabilité des associés de SEL n'est pas admise. Ceux-ci sont solidairement et indéfiniment responsables de leurs actes, et en cas de contentieux, ils sont justiciables des juridictions civiles et non commerciales194(*).

L'analyse du statut des associés nous montre à quel point le régime des SEL a du mal à s'affranchir de la conception classique des professions libérales. Toutefois, les fonctions exercées par les associés des SEL les rapprochent quelque peu des associés des sociétés commerciales.

2) Les fonctions des associés des SEL

70. L'un des traits caractéristiques des SEL est l'absence d'autonomie des associés et la personnalité morale dont jouit la société. La société exerce donc directement les activités et perçoit les honoraires. Mais cet exercice direct des activités par la SEL se fait par l'intermédiaire de ses membres195(*). En outre, l'exercice au sein de cette société est exclusif de l'exercice dans une autre SEL ou SCP ou même de tout exercice individuel de l'activité exercée dans le cadre sociétaire196(*).

CONCLUSION DU CHAPITRE II

71. Jusqu'à une certaine époque, la prestation libérale était fortement empreinte de considérations personnelles. C'est ce qui justifiait l'obligation qui était faite au praticien d'exécuter personnellement et individuellement la prestation, donc de ne pas confier cette exécution à un tiers. Mais pour plusieurs raisons, cette conception a été remise en cause, entraînant les praticiens libéraux à se regrouper.

Entre autres raisons très souvent évoquées, on cite non seulement le désir qu'ont les praticiens de se repartir les charges inhérentes à l'acquisition du matériel, mais également le désir de spécialisation qu'éprouvent les praticiens libéraux. E effet, incapable de satisfaire seul les besoins sans cesse croissants de sa clientèle, le praticien libéral sera amené à sortir de l'autarcie dans laquelle il se trouvait pour aller à la rencontre d'autres professionnels afin de pouvoir exercer collégialement la prestation libérale. Mais l'exercice en groupe des activités libérales ne va pas toujours sans inconvénients ; outre le fait qu'il contribue à distendre les liens existant entre le praticien et son client, il suscite également des interrogations nouvelles, et parmi celles-ci, on peut citer celle relative à l'établissement des responsabilités au sein du groupe. En effet, si la responsabilité du seul praticien fautif avait longtemps été retenue, il semble de pus en plus admis en jurisprudence comme en doctrine une responsabilité de toute l'équipe de praticiens.

A l'analyse, l'exercice en groupe des professions libérales contribue à distendre les liens existant entre le praticien et son client, et conséquemment à faire émerger la notion de fonds libéral.

CONCLUSION DU TITRE I

72. En définitive, il apparaît de nos jours que les professions libérales se commercialisent sans cesse ; les habitudes des commerçants deviennent celles des professionnels libéraux. Ainsi, à l'instar des commerçants, les praticiens libéraux recourent constamment aux appareils, matériels et se regroupent pour exécuter la prestation libérale.

Il faudrait tout de même signaler que, si la matérialisation permet de conjurer l'aléa et le risque d'erreur inhérents à la fourniture de toute prestation libérale, le regroupement quant à lui permet non seulement aux praticiens de se spécialiser, mais également de se répartir les frais d'acquisition des équipements. Toutefois, ces avantages ne sauvaient occulter les atteintes que ce mouvement de commercialisation fait subir aux principes classiques des professions libérales. On peut entre autres citer la dépersonnalisation de la relation libérale, l'exercice intéressé des activités libérales. Si les praticiens se livrent à une recherche, effrénée du lucre de nos jours, c'est parce qu'ils estiment que les revenus qu'ils perçoivent ne rémunèrent pas suffisamment leurs efforts. C'est la raison pour laquelle ils souhaiteraient que leur soit reconnue à l'instar des commerçants, la titularité d'un fonds de caractère libéral. Ainsi, nous pouvons dire que la pratique contribue de manière forte à faire émerger la notion de fonds libéral, mais une étape reste encore à franchir : celle de la réception de cette notion en droit camerounais.

TITRE II :

LA RECEPTION DE LA NOTION DE FONDS LIBERAL EN DROIT CAMEROUNAIS

« Armature intellectuelle, établie sur un certain consensus, le droit ne peut suivre l'évolution des faits que par à-coups, par paliers, de consensus en consensus. Ainsi le droit est presque toujours en retard sur l'évolution des faits, reflète rarement l'état ultime des faits ». DEKKERS (R), Le fait et le droit, Travaux du Centre National de Recherche Logique, Bruxelles, Bruylant, 1961, p.13.

73. Le monde libéral apparaît aujourd'hui comme le terreau fertile de toutes les mutations sociales, c'est dirions-nous, le domaine par excellence où le droit commercial étend son empire. Ainsi, le mouvement de matérialisation jadis caractéristique des seules activités commerciales est déjà entrain de prendre d'assaut les forteresses de l'univers libéral. Imitant ce qui se passe en matière commerciale, les praticiens libéraux vont engager la course de l'acquisition des matériels sophistiqués. Mais, comme nous l'avons souligné dans les précédents développement, ces acquisitions ont un coût financier énorme que les praticiens libéraux ne veulent supporter par la seule perception des revenus tirés de leur activité, il souhaite que leur soit reconnu la titularité, à l'instar des commerçants, d'un fonds mais de caractère libérale.

74. Mais cette mutation ne s'est pas traduite sur le plan juridique par la reconnaissance d'une notion de fonds libéral, le droit ne s'est pas encore adapté aux faits, alors que dans une opinion très largement répandue, mais de plus en plus contestée197(*), toute mutation sociale devrait entraîner une mutation du droit. Sans vouloir revenir sur ce débat, nous ne pouvons que constater que le droit camerounais n'a pas encore consacré la notion de fonds libéral. Au contraire, le droit semble organiser une véritable résistance contre cette notion. Il ne s'agit en réalité là que d'une résistance de façade si l'on considère les opérations de transmission de clientèles civiles entre vifs ou à cause de mort, le sort du cabinet libéral dans la communauté, l'extension de certaines normes commerciales aux praticiens libéraux, notamment le régime des baux commerciaux, les procédures collectives, la procédure d'injonction de payer, la tenue des comptabilités, le traitement fiscal etc.

75. Certes le droit n'a pas encore cédé à la pression de mutations sociales, mais nous pouvons dire que le droit à travers toutes ses sources se montre de plus en plus tolérant voire hospitalier à l'égard du mouvement de patrimonialisation des activités libérales. Voulant sacrifier aux tabous tout en accédant à la demande des praticiens, le droit notamment la jurisprudence va consacrer des solutions ambiguës et empreintes « d'hypocrisie ». Elle consacrera ainsi des solutions qui sont apparemment hostiles à la matérialisation des activités libérales mais qui semblent réellement marquer l'hospitalité du droit à l'égard du mouvement de patrimonialisation.

Loin d'être farouchement hostile à la notion de fonds libéral (Chapitre I), le droit camerounais se montre plutôt bienveillant à son égard (Chapitre II).

Chapitre I :

LA RESISTANCE APPARENTE DU DROIT CAMEROUNAIS A L'EGARD D'UNE NOTION DE FONDS LIBERAL

76. La matérialisation des activités libérales apparaît de nos jours comme l'une des mutations les plus remarquables jamais survenue dans le monde libéral. En effet, du fait des efforts financiers consentis pour acquérir le matériel parfois très onéreux, les praticiens libéraux vont trouver insuffisants les revenus tirés de leur activité. C'est la raison pour laquelle ils vont commencer à spéculer sur leur travail passé, ceci à travers la réalisation de leur clientèle.

Pour achever et affiner ce mouvement de patrimonialisation, ils exigeront du législateur, voire du juge que leur soit reconnue la titularité d'un fonds de caractère libéral. Malgré la force de cette pratique, le législateur n'a pas encore donné une onction juridique à cette notion. Le législateur n'a donc pas encore lu dans les faits198(*) pour fabriquer les normes juridiques traitant de la notion de fonds libéral, ceci lors même que les faits sont considérés par certains auteurs comme la source « réelle » du droit199(*). Même la jurisprudence dont le rôle supplétif de la loi a souvent été affirmé, fournit des solutions farouchement hostiles aux opérations de réalisation de clientèles civiles, et donc à la notion de fonds libéral. Pour justifier leurs positions, les juges invoquent une pluralité d'arguments. Il s'agit notamment du rôle considérable joué par l'intuitus personae dans la relation libérale et de l'irréductibilité de la clientèle libérale à l'objet de la convention.

Toutefois, quelle que soit la pertinence des arguments invoqués pour prohiber les opérations de cession de clientèle civile (Section I), il faut dire que l'hostilité du droit, apparaît comme étant démesurée à l'égard d'une notion fortement revendiquée par les praticiens libéraux du fait de ses nombreuses vertus (Section II).

Section I : La prohibition prétorienne des opérations de cession de clientèle civile

77. Les opérations de cession de clientèle se font aussi bien en matière commerciale qu'en matière civile. Mais paradoxalement, le droit n'a pas, à propos de cette opération une position unique selon qu'elle s'opère dans l'un ou l'autre domaine. Alors qu'il autorise les cessions de clientèle commerciale, il prohibe pour certaines raisons les cessions de clientèle civile (Paragraphe I) et sanctionne même très sévèrement les actes faits au mépris de cette interdiction séculaire (Paragraphe II), c'est sans nul doute à cause de l'attachement du droit à une certaine orthodoxie de l'activité libérale.

Paragraphe I : Les raisons de la prohibition des cessions de clientèles civiles

78. Deux séries de raisons fondent l'interdiction jurisprudentielle de cession de clientèle civile. Il s'agit non seulement de l'argument classique de l'intuitus personae (A), mais également celui plus récent de l'extracommercialité de la clientèle libérale (B).

A/ Le rôle excessif de l'intuitus personae dans la relation libérale

79. Contrairement aux activités commerciales, les facteurs personnels jouent un rôle assez considérable dans l'attrait de la clientèle libérale. Le lien de confiance occupe ici une place centrale et apparaît même comme le commencement et l'aboutissement, de toute relation libérale200(*). Pour cette raison, les magistrats n'entendent pas sacrifier ce caractère qui avait jadis fait - ou qui fait même encore, le prestige et la grandeur des professions libérales. Afin de rester fidèles à leur logique conservatiste, les juges se sont toujours opposés à toute idée de cession de clientèle civile, c'est-à-dire d'une « transmission entre vifs du cédant au cessionnaire d'un droit réel ou personnel, à titre onéreux ou gratuit »201(*).

C'est dire que le principe de l'incessibilité des clientèles civiles est très ancien, il a été affirmé pour la première fois avec l'arrêt de la troisième chambre du tribunal civil de la Seine qui prononça la nullité de « vente de la clientèle d'un médecin »202(*) ; et depuis lors, ce principe est constamment réaffirmé par la jurisprudence au point qu'il conserve encore sa jeunesse et sa vitalité originelles. Pour motiver leurs décisions, les juges affirment que la clientèle libérale repose exclusivement, sur des éléments personnels, mieux encore sur la confiance qu'impose le praticien au client203(*). L'attrait de la clientèle libérale est donc « ....fonction de considérations purement subjectives : qualités intellectuelles, habileté technique et se fonde sur la confiance et le libre choix des clients »204(*).

80. Si le principe d'incessibilité connaît une telle vitalité en jurisprudence comme en doctrine, c'est parce que la cession de clientèle civile recèle en elle, beaucoup d'inconvénients. Pour la plupart des auteurs, à l'instar de Monsieur BEIGNIER, les opérations de cession de clientèle libérale ont pour inconvénient majeur de porter atteinte à la liberté de choix du client205(*).

En effet, en cédant sa clientèle, le praticien oblige sa clientèle à traiter avec quelqu'un dont elle ignore les qualités morales, les compétences. En procédant ainsi, le praticien empêche sa clientèle de choisir son partenaire en toute liberté. C'est pourquoi, commentant la décision rendue par la cour d'Appel de Limoges206(*). Monsieur B. BEIGNIER affirme à travers une formule éloquente et dépourvue de toute équivoque que « ce qui est douteux, ce n'est donc pas qu'un patricien entende monnayer sa notoriété, mais c'est que voulant parvenir à ce but, il en vienne à porter atteinte à la liberté de choix des patients. C'est là, on peut dire, la tumeur du contrat. »

Mais c'est surtout dans les opérations d'apport en société d'une clientèle libérale que la confiance des clients subit les attaques les plus sérieuses. Les conventions d'intégration ayant pour inconvénient majeur de surprendre et de trahir la confiance des clients207(*).

81. Cette hostilité jurisprudentielle à l'égard de cessions de clientèles civiles se justifie davantage par la volonté affichée du juge de sacrifier à certains tabous que d'une véritable rigueur scientifique208(*). C'est ce qui expliquerait la fécondité des critiques doctrinales à l'égard des arguments invoquées pour soutenir le principe d'incessibilité des clientèles civiles.

En effet, pour une bonne partie de la doctrine, les cessions de clientèles civiles ne présentent pas autant de dangers que le laissent croire les magistrats et certains auteurs.

Pour ces auteurs, l'intuitus personae dont on fait traditionnellement étalage pour refuser ou pour invalider les cessions de clientèles civiles semble quelque peu exagéré puisque les clients conservent toute leur liberté de choix, tout au moins en terme de refus209(*). Dans ce sens, les clients restent donc toujours libres de refuser la poursuite des relations contractuelles avec le « cessionnaire » de la clientèle libérale. A ce titre, ils ne peuvent être contraints de continuer les relations contractuelle avec le «cessionnaire » s'ils ne manifestent pas cette volonté, c'est parce qu'ils le veulent et non parce qu'ils en sont contraints.

Il n'y a pas que la doctrine qui récuse le principe de l'incessibilité des clientèles civiles, il y a aussi la jurisprudence qui lui mène souvent un combat. C'est donc à bon droit que l'arrêt de la Cour d'Appel du 10 mai 1993 fut cassé par une décision de la première chambre civile de la Cour de Cassation210(*) en date du 07 juin 1995. La Haute Juridiction française constate en effet que nonobstant la cession, la clientèle conservait toujours une liberté de choix.

82. Pour mieux affiner leurs critiques, certains auteurs estiment à juste titre que l'intuitus personae n'est pas caractéristique des seules activités civiles, il est aussi quoique dans une portion congrue, présent dans les relations commerciales. Par conséquent, il  n'est pas rare que la confiance apparaisse tout autant déterminante pour le praticien libéral que pour le commerçant : le savoir-faire, l'honnêteté, le doigté, la dextérité constituent des qualités souvent recherchées chez un commerçant211(*).

Il apparaît à la lumière des critiques sus-évoquées que l'argument de la trahison de la confiance du client, partant de l'atteinte à sa liberté de choix en cas de réalisation des clientèles libérales est, à bien des égards insuffisant. C'est pourquoi il faut recourir à l'argument qui est souvent considéré comme étant imparable212(*) : l'extracommercialité et l'impossible commercialité de la clientèle civile.

B/ De l'extracommercialité à l'impossible commercialité de la clientèle civile

83. Malgré son apparente jeunesse, le principe de l'incessibilité des clientèles civiles est très ancien, il a en effet été affirmé dès le 19ème siècle avec l'arrêt rendu le 25 février 1846 par la troisième chambre du tribunal civil de la Seine213(*). Et s'il fait aujourd'hui l'objet d'une réaffirmation constante en jurisprudence, c'est grâce au fondement classique de l'extracommercialité des clientèles civiles qui le sous-tend.

Toutefois, il faut souligner qu'en dépit de l'invocation récurrente de l'argument de l'extracommercialité, celui-ci n'en subit pas moins de sérieuses attaques doctrinales, ce qui à l'évidence entame sa solidarité et contribue à faire émerger un autre fondement - celui de l'impossible commercialité214(*).

84. La jurisprudence a de tout temps considéré la clientèle civile - notamment libérale, comme un «  res extracommercium », c'est-à-dire une chose hors du commerce juridique, mieux encore, comme un objet illicite215(*). Mais il faut noter que l'exigence d'un objet licite n'est pas spécifique aux seules cessions de clientèles civiles, elle est traditionnelle pour la validité de toutes les conventions. L'article 1128 du code civil est à ce sujet assez éloquent lorsqu'il dispose « qu'il n' y a que les choses qui sont dans le commerce qui puissent être l'objet des conventions ». C'est en se fondant sur la subjectivité des liens qui unissent le professionnel aux clients et sur la liberté de ces derniers que la jurisprudence en vient à annuler les conventions de cession de clientèle civile. La confiance est donc indétachable de la personne même du professionnel, elle est insusceptible d'appropriation, elle n'est pas monnayable et ne peut à ce titre faire l'objet de transmission216(*).

85. Même si l'argument de l'extracommercialité est abondamment utilisé en jurisprudence, il semble aujourd'hui de plus en plus contesté par une grande partie de la doctrine, et ceci pour plusieurs raisons.

Pour certains auteurs217(*), l'argument de l'extracommercialité utilisé par les juges pour invalider les conventions de cessions de clientèles civiles est contestable, parce que la jurisprudence invoque au soutien de ses solutions uniquement l'article 1128 du Code civil applicable à l'ensemble des conventions, au lieu de l'article 1598 du Code civil spécifique à la vente. Ce qui devrait logiquement conduire à l'annulation de toutes les conventions portant sur la clientèle libérale ; or, tel n'est pas le cas, puisque le droit reconnaît un certain nombre d'opérations de clientèles. C'est le cas notamment du droit des sociétés qui autorise les apports d'éléments incorporels dans des sociétés d'exploitation libérale, c'est aussi le cas des cessions indirectes de clientèles civiles.

86. Pour d'autres auteurs en revanche, affirmer qu'une clientèle libérale est hors du commerce, c'est admettre qu'elle est une chose, ce qui est contestable218(*). Comme le remarque Monsieur BEIGNIER : « pour qu'une chose soit classée hors commerce, encore faut-il qu'elle existe en tant que chose », qu'elle puisse être, au sens de l'article 1128 du Code civil un bien juridique ; aussi bien, dire que la cession d'un bien est prohibée, c'est admettre implicitement que « ...cette cession n'est pas impossible, mais seulement non souhaitable et que son objet constitue un bien »219(*). Il serait donc superflu de raisonner à partir de l'extracommercilité pour justifier l'incessibilité des clientèles civiles, il serait beaucoup plus commode de recourir à l'argument de l'impossible commercialité de la clientèle civile220(*).

La clientèle civile ne serait donc pas cessible parce qu'elle n'est ni un bien juridique ni une chose. Le bien est traditionnellement défini comme « tous les éléments mobiliers et immobiliers qui composent le patrimoine d'une personne... »221(*). En revanche, la chose désigne tout ce qui est perceptible par les sens, tout ce qui a une existence matérielle222(*). Il en résulte de ces définitions que le client pris individuellement ou la clientèle en tant que groupe de personnes autonomes et libres ne peuvent donc être assimilés à des choses : les personnes ne sont pas objets de droits, elles sont sujets de droits.

87. La clientèle civile ne peut donc pas faire l'objet d'un droit réel, personnel ou intellectuel223(*) . Aucun praticien ne dispose, à ce titre ni d'un droit privatif, ni d'un droit direct sur sa clientèle ; celle-ci n'est pas l'objet de la convention de cession224(*) comme le laisse supposer les jurisprudences qui s'appuient sur l'argument de l'extracommercialité, elle est plutôt la cause225(*).

88 Sur le point de savoir si la clientèle est identifiable à la causa proxima ou la causa remotae autrement appelée cause objective ou cause de l'obligation et cause subjective ou cause du contrat, la doctrine penche pour la cause du contrat et exclut la cause concrète parce que l'opération de cession est un contrat synallagmatique, qui a ceci de particulier que les obligations réciproques se servent mutuellement de cause, la cause de l'obligation de l'un étant l'objet de l'obligation de l'autre226(*).

Or, la clientèle n'étant pas une chose, elle ne saurait être l'objet des obligations assumées par l'ancien titulaire de la clientèle. L'obligation du cessionnaire se trouve ainsi dépourvue de cause. Il ne peut donc s'agir dans ce cas que d'une cause subjective qui conduit à interroger les mobiles réels des parties contractantes227(*).

L'étude des fondements du principe d'incessibilité des clientèles civiles apparaît assez éclairante sur l'hostilité du droit à l'égard de la notion de fonds libéral. Toutefois, cette étude s'avère limitée tant que nous n'avons pas encore examiné les sanctions qui peuvent être prononcées en cas de violation de la prohibition jurisprudentielle de cession de clientèle civile.

Paragraphe II : la sanction du non respect de la prohibition de cession de clientèle civile.

89. Pour rester fidèles à une conception jugée surannée des professions libérales, les juges prononcent une sanction particulièrement lourde à l'égard des conventions de cession de clientèle civile. Mais avant d'examiner les effets de cette sanction (B), il importe d'en déterminer préalablement sa nature (A).

A/ la nature de la sanction des opérations de transfert de clientèle civile

90. C'est sans doute dans le dessein de marquer son hostilité à l'égard du mouvement de patrimonialisation des activités libérales que la jurisprudence a posé le principe d'incessibilité des clientèles civiles. Pour garantir le respect de ce principe, les juges ont prévu à cet égard une sanction particulièrement lourde : la nullité228(*).

Il faut bien préciser ici qu'il s'agit d'une nullité absolue et non d'une nullité relative229(*). Si les juges ont opté pour la nullité absolue plutôt que pour toute autre sanction, c'est parce qu'elle semble être la plus appropriée, dans la mesure où c'est celle qui est habituellement prononcée pour tout type de contrat qui ne satisfait pas à certaines exigences de fond relatives à la cause ou à l'objet230(*). C'est donc fort logiquement que le juge prononce le plus souvent la nullité absolue des conventions de cession de clientèle civile au motif qu'elles sont dépourvues d'objet et de cause. Ces conventions n'ont pas d'objet, donc de cause tout simplement parce que la clientèle n'est pas une chose, elle n'est pas objet d'obligations.

Les juges ne prononcent pas la nullité relative parce qu'elle sanctionne l'inobservation des conditions relatives aux parties telles que le consentement et la capacité, et dans une moindre mesure les contrats lésionnaires. De même, la jurisprudence ne choisit pas la résolution, parce qu'elle constitue la sanction de l'inexécution du contrat. Il faut, pour mieux s'en convaincre, lire les motivations des décisions relatives aux conventions de cessions de clientèle civile. Le juge sanctionne de pareilles conventions non parce qu'il s'y pose un problème d'exécution ou que le consentement de l'une des parties est vicié, c'est parce que l'objet et la cause y sont inexistants.

Si les juges ont choisi la nullité d'ordre public plutôt que toute autre sanction, c'est parce qu'elle produit des effets importants et suffisamment dissuasifs de toute velléité de transgression de la prohibition de cession de clientèle civile231(*)

B/ les effets de la nullité des conventions de cession de clientèle civile

91. En se fondant sur les articles 1128 et 1131 du Code civil, le juge annule les conventions de cession de clientèle civile pour absence de cause et d'objet. Cette sanction particulièrement lourde, entraîne l'anéantissement rétroactif, voire l'effacement du contrat. D'ailleurs, l'effet rétroactif de la nullité ne joue pas exclusivement à l'égard des conventions de cession de clientèles civiles, il joue aussi pour toutes les conventions qui n'auront pas satisfait aux exigences, posées par l'article 1108 du Code civil. C'est ce qu'exprime la maxime latine : « quod nullum est, nullum effectum pooducit », c'est-à-dire : « ce qui est nul ne produit aucun effet ».

Le contrat n'ayant jamais été formé, il ne saurait produire des effets. Les parties doivent par conséquent se restituer les prestations qu'elles s'étaient mutuellement dues. Ainsi, le cédant est-il tenu de restituer les sommes reçues, le cessionnaire étant en principe de son côté tenu de restituer la clientèle. Mais la clientèle n'étant pas une chose, l'exécution de l'obligation du cessionnaire ne pourra pas être exécutée de manière satisfaisante, à moins qu'elle ne se fasse à travers la restitution des éléments attractifs de la clientèle, que sont par exemple les matériels d'exploitation.

92. La nullité apparaît ainsi comme une sanction grave non seulement parce qu'elle entraîne la disparition de la convention de cession - contrat principal - mais également parce qu'elle provoque l'effacement de la scène juridique de tous les contrats qui lui sont accessoires232(*). Il s'agit entre autres des contrats passés entre le cédant et le cessionnaire, tel que le contrat de bail dans l'hypothèse où le cédant est en même temps propriétaire des murs233(*). Parfois même, la cession ne tient qu'à une seule clause du contrat, et la nullité de cette clause entraîne celle des autres clauses de la convention234(*).

93. Mais il faut préciser ici qu'il n' y a pas que les contrats passés entre le cédant et le cessionnaire qui sont annulés, il y a aussi ceux passés entre ce dernier et les tiers235(*). Ces hypothèses de nullité, source d'insécurité juridique236(*) touchent surtout les contrats de prêt passés entre un jeune praticien et un établissement financier. Héritant parfois d'un cabinet sinistré et suffisamment éprouvé, le praticien cessionnaire aura pour objectif premier la réhabilitation de son poste professionnel afin de le rendre productif et compétitif. Il devra, pour ce faire contracter des prêts pour disposer d'une trésorerie suffisante à même de couvrir les travaux que suppose une telle entreprise.

Si les jeunes praticiens peuvent aller jusqu'à consentir de tels sacrifices financiers, c'est parce qu'ils ont «  ...compris depuis longtemps que la véritable source de richesse se trouve davantage dans la patrimonialisation du cabinet que dans la capitalisation des revenus de l'activité »237(*). A l'analyse donc, le contrat de prêt participe à la réalisation de l'opération de cession dont il n'en est que l'accessoire. Le contrat de prêt est annulé en conséquence du contrat de cession parce qu'il est dépourvu de cause. Il ne s'agit pas de la cause abstraite ou cause de l'obligation, il s'agit de la cause concrète ou cause du contrat qui est ici la réalisation de l'opération litigieuse et non la remise des fonds. C'est dans ce sens que la Cour de cassation française238(*) a estimé dans une espèce que « ... le prêt ayant pour objet le financement partiel du rachat de la clientèle de M. Gelbart, sa cause qui n'était pas seulement la remise des fonds, mais cette remise en vue d'une opération illicite était elle-même illicite ».

94. Cette solution rigoureuse, si elle se justifie par une volonté des juges de maintenir une certaine pureté des professions libérales à l'heure où quantité d'activités civiles se commercialisent239(*), elle n'en suscite pas moins quelques inquiétudes. De tous les griefs qui lui sont faits, l'atteinte au principe de la relativité des conventions, apparaît comme étant le plus corrosif240(*). En prévoyant même la nullité des contrats de prêt, le juge limite aussi l'accès des jeunes praticiens au prêt bancaire241(*). Parce qu'ils sont d'abord des commerçants, les banquiers hésiteront à financer de pareilles opérations s'il existe un risque d'annulation du prêt242(*). Bien plus, en prévoyant la nullité des contrats satellites, la jurisprudence crée un risque d'insécurité juridique243(*) qui ne serait pas né si les contrats accessoires liant le cessionnaire aux tiers avaient été traités comme des contrats autonomes.

95. La nullité de la convention de cession et des contrats qui lui sont accessoires semble être une sanction forte non seulement à cause du désagrément qu'elle cause aux parties mais également à cause de l'insécurité juridique qu'elle génère auprès des tiers. La nullité est donc l'arme que le juge utilise contre les opérations de transfert de clientèle civile.

Mais il faut dire que cette hostilité du juge n'est qu'apparente puisqu'il affiche le plus souvent une position réellement tolérante à l'égard des opérations de cession de clientèles civiles. Si la jurisprudence adopte une position aussi « hypocrite » c'est certainement parce qu'elle est consciente que l'hostilité à l'égard de la notion de fonds libéral apparaît du reste démesurée si l'on tient compte des vertus possibles de cette notion.

Section II : La démesure de l'hostilité du droit a l'égard d'une notion aux multiples vertus

Décriée par certains, mais revendiquée avec insistance par d'autres, la notion de fonds libéral n'a pas encore reçu l'onction du droit. Et pourtant, cette notion mérite d'être consacrée parce qu'elle présenterait, à l'instar du fonds de commerce, une grande utilité tant à l'égard des praticiens (Paragraphe I) qu'à l'égard des tiers (Paragraphe II).

Paragraphe I : L'utilité du fonds libéral pour un praticien

96. De l'avis de certains auteurs244(*), le fonds libéral sera utile pour le praticien libéral non seulement pendant que ce dernier exerce ses activités (A), mais également lorsqu'il les a cessées (B).

A) L'utilité du fonds libéral pour le praticien encore en activité

97. La clientèle libérale est devenue très exigeante avec le mouvement de matérialisation des activités libérales. En effet, la clientèle libérale attend que lui soit fournie une prestation respectant les règles de l'art et conforme aux avancées de la science. Les praticiens libéraux doivent pour ce faire se doter de matériels sophistiqués, embaucher un personnel compétent, se recycler en permanence.

Mais aujourd'hui, les praticiens n'entendant plus consentir de tels efforts dans le seul dessein d'asseoir et d'accroître leurs revenus, mais au contraire d'augmenter leurs patrimoines personnels245(*). Toutefois, ce n'est pas seulement le patrimoine des praticiens qui en sort grandi du fait de ces investissements, c'est l'économie toute entière qui en tire profit. Donc, poursuivant son intérêt personnel, le praticien réalise l'intérêt général et contribue au développement de l'économie246(*).

98. Outre la capitalisation des activités, le fonds libéral favorise aussi le regroupement des praticiens. Incapables d'appréhender l'ensemble des matières concourant à leurs professions, donc de fournir une prestation d'ensemble, les praticiens libéraux vont se regrouper et exercer en équipe leurs activités de sorte que chacun des membres du groupe puisse se spécialiser dans un secteur d'activités bien précis247(*).

A l'analyse donc, seule la notion de fonds libéral est susceptible de fédérer les intérêts parfois antagonistes des praticiens. Ainsi qu'on peut le voir, le fonds libéral présente une utilité certaine pour le praticien encore en activité, mais c'est surtout au moment où ce dernier cesse ses activités que cette notion présente le plus d'utilité.

B/ l'utilité du fonds libéral en cas de cessation d'activités par le praticien libéral

99. Le praticien libéral est obligé de consentir des efforts financiers importants pour procurer une prestation de qualité à ses clients. Pour cela, il doit non seulement utiliser ses propres économies, mais également recourir parfois au prêt pour acquérir des équipements. Ayant consenti de tels efforts, le praticien en attend normalement un retour sur investissements, donc des revenus plus importants, une vie décente. Et pendant son activité, ses efforts sont heureusement récompensés.

Mais il est à craindre que ces revenus lui manquent une fois qu'il aura cessé ses activités248(*). Par conséquent, la patrimonialisation des activités libérales pourrait permettre au praticien qui cesse ses activités de disposer d'un capital qui pourrait compenser la perte de revenus et primer aussi les efforts de toute une vie, d'une vie laborieuse249(*). Le praticien ou ses héritiers serait ainsi capable, à l'instar du commerçant, de céder son fonds à l'un de ses confrères, moyennant le versement d'un prix. Cette cession a un double avantage à la fois pour le praticien cédant et pour le praticien cessionnaire.

Pour le praticien cédant, le capital reçu lui permettra de maintenir son pouvoir d'achat250(*). Pour le cessionnaire en revanche, la cession du fonds pourrait permettre l'intégration des jeunes praticiens. Cette intégration sera d'autant plus aisée pour le jeune praticien qu'il sera immédiatement en position concurrentielle251(*). Toutefois, il faudrait se garder de surestimer les vertus des opérations de cession dans la mesure où les manoeuvres spéculatives des propriétaires de fonds pourraient constituer de véritables entraves à l'intégration de jeunes praticiens252(*).

100. Pareillement, il peut arriver que le praticien ait envie de conserver la propriété de son fonds, tout en permettant l'exploitation par l'un de ses confrères avec qu'il partagera les revenus dans des proportions, qu'il leur conviendra de fixer contractuellement. C'est à travers la location-gérance du fonds que de tels objectifs peuvent se réaliser253(*). Cependant, il faut relever que le mécanisme de la location gérance n'est pas une découverte du droit civil, il existe depuis en matière commerciale et fait l'objet d'un encadrement rigoureux254(*). Mais à l'opposé de ce qui se passe en matière commerciale255(*), le locataire n'est pas considéré comme un praticien libéral, même si la doctrine estime qu'il devrait recevoir cette qualité parce qu'il exerce personnellement son activité256(*). De même, le loueur ne devrait plus être considéré comme un praticien libéral parce qu'il n'exerce plus personnellement son art257(*).

Tous ces développements ne sont faits qu'à titre de lege ferenda parce que ni le fonds libéral, ni sa location-gérance n'ont pas encore été consacrés par le droit, notamment par le droit civil. Mais une évolution est aujourd'hui perceptible à travers les décisions du conseil d'Etat qui consacrent indirectement la possibilité d'une location-gérance d'activité libérale, même si cela s'est fait uniquement en matière fiscale258(*).

Le fonds libéral constitue ainsi un merveilleux instrument de capitalisation des activités libérales et d'intégration des jeunes praticiens. Mais il n' y a pas que les praticiens qui ont intérêt à voir le fonds libéral consacré, il y a aussi les tiers pour qui le fonds libéral pourrait être une assiette de sûretés.

Paragraphie II : L'utilité du fonds libéral à l'égard des tiers

101. La notion de fonds libéral n'a pas encore été consacrée par le droit camerounais, et même pas par le droit français qui a souvent joué un rôle de pionnier sur quantité de problèmes juridiques. Au demeurant nous pouvons dire que c'est tout le système juridique259(*) d'inspiration française qui n'a pas encore exaucé le voeu des praticiens libéraux qui souhaitent que leur soient reconnus la titularité d'un fonds de caractère libéral. Et pourtant, cette reconnaissance semble s'imposer tant le fonds libéral, à l'instar du fonds de commerce, est une source potentielle260(*) de vertus pour le professionnel ; il n'est même pas jusqu'aux clients (A) et créanciers (B) du praticien qui ne puissent y trouver quelque utilité.

A/ Le fonds libéral, un instrument d'amélioration de la prestation reçue par les clients

102. La technique et la science innervent aujourd'hui tout le donné social ; aucun aspect de la vie ne leur échappe, même pas les professions libérales traditionnellement réfractaires à toutes idée de matérialisation. Cette mutation vient du fait que pour beaucoup, clients comme praticiens, « la perfection technique des appareils contribue largement à orienter la clientèle261(*) ». C'est dire que « la clientèle est cristallisée pour tout le monde par la présentation extérieure, l'appareil, le décor »262(*).

Fort de ce qui précède, les praticiens libéraux ont été amenés à s'équiper et à constituer un véritable potentiel de production. La construction du fonds pourrait donc permettre aux praticiens qui auront lourdement investi pour acquérir des équipements perfectionnés, d'offrir une prestation de meilleure qualité, de proposer une offre conforme à la demande de la clientèle et qui soit conforme aux règles de l'art et aux avancées de la science263(*).

Si pour les clients, le fonds contribue à l'amélioration de la qualité de la prestation reçue, pour les créanciers au contraire, le fonds libéral pourrait constituer une assiette de sûretés264(*).

B/ Le fonds libéral, une assiette possible de sûretés

103. Pour que le client puise se doter des équipements nécessaires à l'amélioration de la prestation, il lui faut mobiliser d'énormes moyens financiers. Il apparaît au vu de ceci que le fonds libéral ne saurait servir d'assiette à aucune de ces deux. Et comme en matière commerciale, c'est le nantissement qui semble adapté à la spécificité du fonds libéral parce qu'à l'opposé du gage, il n'entraîne pas dépossession du débiteur. C'est une véritable hypothèque mobilière265(*), qui présente un intérêt à la fois pour le praticien et pour le créancier.

Le praticien conserve, comme en matière commerciale, le droit de gérer son fonds, de l'administrer et d'en disposer. Il devrait toutefois maintenir le fonds en activité et s'abstenir de tout acte de nature à en diminuer la valeur266(*). Aussi, peut-on envisager de voir, comme en matière commerciale , reconnaître au créancier nanti un droit de préférence qui lui permettrait d'être payé avant tout créancier chirographaire ou tout créancier inscrit postérieurement. Mais on peut tout aussi admettre que les créanciers nantis sur un fonds libéral puissent passer après les privilèges fiscaux dits de premier rang conformément au droit commun. Le créancier nanti peut également se voir reconnaître un droit de suite qui lui permettrait de faire vendre le fonds libéral en quelque main qu'il se trouve, qu'il soit entre les mains du débiteur ou celles d'un acquéreur267(*). Comme en matière commerciale, des mesures de publicité268(*) pourraient être prévues pour avertir le créancier du danger qui pèse sur sa créance. Par conséquent, un droit d'opposition pourrait aussi être reconnu au créancier ; ce droit lui permettant de maintenir l'indisponibilité du prix de vente. Pour sortir de cette situation, on peut envisager comme en matière commerciale, plusieurs issues : la répartition du prix de vente, la consignation du prix de vente, le cantonnement et enfin la mainlevée lorsque l'opposition est abusive269(*).

104. Le droit camerounais n'a pas encore consacré la notion de fonds libéral et ce, malgré la pression des réalités sociales ; il entretient d'ailleurs à son égard une hostilité nourrie par une conception rustique des professions libérales. Mais à l'analyse, il ne s'agit que d'une hostilité de façade puisque la jurisprudence valide indirectement les opérations de transmission de clientèles civiles270(*). Ce qui est contraire au principe séculaire d'incessibilité de clientèle civile. Fort de ceci, nous pouvons dire que le droit est réellement bienveillant à l'égard de la notion de fonds libéral.

CONCLUSION DU CHAPITRE I

105 En conclusion, nous pouvons dire que la notion de fonds libéral, malgré les mutations observées dans la pratique, n'a pas encore été consacrée par le droit camerounais. D'ailleurs, ni les textes, ni la jurisprudence, ni même la doctrine n'évoquent cette notion. Ce mutisme s'assimile à une hostilité du droit camerounais à l'égard de toute idée de patrimonialisation des activités libérales. Cette hostilité se traduit dans les actes par l'interdiction des opérations de transmission de clientèles civiles ; celle-ci est en grande partie due au rôle quelque peu excessif qu'on accorde à l'intuitus personnae et au fait que la clientèle civile n'est pas une chose pour être objet de convention.

106. Mais aujourd'hui, cette hostilité du droit à l'égard du mouvement de patrimonialisation des activités libérales baisse en intensité parce que le fonds libéral pourrait présenter une grande utilité tant pour le praticien lui-même que pour les tiers. A l'analyse, si cette hostilité demeure, ce n'est point tant par rigueur scientifique, c'est davantage par souci de conformité à une certaine orthodoxie des professions libérales.C'est sans nul doute les nombreux avantages que regorge potentiellement la notion de fonds libéral qui amènent aujourd'hui le droit à se démarquer de cette conception rustique et à marquer son hospitalité à l'égard d'un mouvement dont on dit irréversible.

Chapitre II :

L'HOSPITALITE DU DROIT CAMEROUNAIS A L'EGARD D'UNE

NOTION DE FONDS LIBERAL

107. Malgré la pression des faits sociaux271(*), le droit, à travers toutes ses sources, n'a pas encore consacré la notion de fonds libéral. Et pourtant, des raisons sérieuses l'y invitent272(*). Ainsi, pour justifier sa farouche hostilité à l'égard d'une notion à laquelle la doctrine attache beaucoup d'intérêt en raison de ses vertus possibles, le droit se fonde sur moult arguments, notamment celui de l'incessibilité des clientèles civiles. Mais aujourd'hui, ces arguments ont perdu à la fois en prestige, en épaisseur et en solidité puisque le droit se montre de plus en plus hospitalier sinon à l'égard de la notion de fonds libéral, du moins à l'égard du mouvement de patrimonialisation des activités libérales.

Toutefois, cette hospitalité ne se fait pas toujours de la même façon selon qu'il s'agit du législateur ou du juge. En effet, alors que la contribution du législateur se fait surtout à travers l'extension des règles de droit commercial aux activités libérales273(*) (Section I), celle de la jurisprudence se fait davantage par le biais de la validation des opérations de cession de clientèle civile (Section II).

Section I : La Contribution législative à la patrimonialisation des activités libérales

108. Le législateur n'a pas encore accédé à la volonté des praticiens qui revendiquent que leur soit reconnu un fonds de caractère libéral. A défaut d'être, à l'instar de la doctrine ou du juge manifestement hostile à l'égard de la notion de fonds libéral, le Législateur se montre plutôt indifférent, puisqu'il n'est dans aucun texte fait allusion à cette notion. Mais à l'analyse, il est à souligner que, malgré le mutisme des textes de droit interne camerounais ou de ceux communautaires, la contribution législative à la patrimonialisation des activités libérales n'en est pas moins perceptible.

Ceci est particulièrement vrai non seulement lorsque le législateur camerounais ou africain étend certaines règles de droit commercial aux activités libérales (paragraphe I), mais également lorsqu'il oblige les praticiens à s'équiper afin de percevoir une rémunération juste et qui ne puisse faire l'objet de contestation (paragraphe II).

Paragraphe I : La contribution législative à l'extension des règles de droit commercial aux activités libérales

109. Le droit commercial est conquérant comme le commerce lui-même, il se développe parallèlement au commerce. Comme ce dernier, il est aussi victime de ses conquêtes et de ses invasions274(*), en ce sens qu'il étend son empire même à des matières traditionnellement civiles275(*). Deux mécanismes permettent ainsi de réaliser cette extension : la multiplication des actes de commerce et celle du nombre de commerçants276(*).

Par ce second mécanisme, le droit commercial devient applicable même à des non commerçants comme les praticiens libéraux, les agriculteurs, les artisans. C'est ce mécanisme qui est abondamment utilisé dans la plupart des législations où le droit privé refait son unité277(*). Pour nombre d'auteurs, si la législation commerciale est aujourd'hui préférée par rapport à celle civile, si les habitudes de commerce tendent à devenir des habitudes générales, c'est parce que la législation commerciale est plus équitable, plus simple et moins formaliste278(*).

110. Ainsi, l'Acte Uniforme OHADA a objectivement et subjectivement étendu la commercialité à des actes civils ou à des non commerçants, sans doute parce que le législateur africain a voulu élargir les frontières du droit commercial qui devient de la sorte Droit des affaires du moins si l'on s'en tient à la dénomination retenue par le Traité OHADA. Pour le professeur MAMADOU KONE, la dénomination officielle du traité OHADA ne reflète pas les options profondes du législateur africain qui a certainement voulu parler d'uniformisation plutôt que d'harmonisation du droit279(*).

La commercialisation des activités libérales est importante au point qu'elle a alimenté de véritables joutes doctrinales au siècle passé. Pour cette raison, nous ne saurions revenir sur l'ensemble des questions qui avaient opposé des auteurs à une certaine époque. Afin de saisir la contribution législative à l'émergence de la notion de fonds libéral, il suffira dans cette partie de présenter quelques manifestations du mouvement de commercialisation des activités civiles d'une part (A) et les effets de ce mouvement d'autre part (B).

A/ Les manifestations du mouvement de commercialisation des activités libérales

111. La commercialisation des activités civiles n'est pas un phénomène nouveau, il est apparu très longtemps à Rome, notamment avec les règles du droit des gens. celles-ci, initialement destinées à régir les relations commerciales avec les étrangers, ont par la suite été étendues aux romains280(*). Aujourd'hui, ce phénomène innerve même les législations du système juridique romano- germanique, caractérisées autrefois par le dualisme du droit privé281(*). L'Afrique noire, à travers l'OHADA, n'est pas restée en marge de cette évolution ; quantité de règles d'essence commerciale ont ainsi été étendues même aux non commerçants.

Toutefois, nous ne saurions examiner dans le cadre de ce travail toutes les matières où il y a eu extension du droit commercial. Une telle entreprise est d'ailleurs fastidieuse quand elle n'est pas simplement impossible. Nous ne retiendrons pour ce faire que les matières où l'extension présente les allures d'une révolution - juridique. Il s'agit entre autres du statut des baux commerciaux (1) et l'extension de certaines procédures d'essence commerciale à des non commerçants (2).

1) L'extension par le législateur OHADA du statut des baux commerciaux à tous les professionnels

112. L'histoire est pour le juriste une source d'enseignement et de compréhension des phénomènes couverts par le droit282(*), elle nous enseigne qu'à l'origine, les commerçants ne bénéficiaient d'aucune protection particulière par rapport aux non commerçants. Ainsi, tout commerçant locataire pouvait se voir expulser des locaux qu'il occupait ou même pouvait se voir refuser le renouvellement de son contrat de bail à l'expiration de celui-ci. Une telle législation était de nature à fragiliser la stabilité du poste professionnel du commerçant.

113. C'est surtout avec la deuxième guerre mondiale que l'insécurité prit des proportions inquiétantes. Ayant été contraints de baisser les loyers des immeubles pendant la période de guerre, les bailleurs d'immeubles voulurent, une fois la guerre terminée, revenir aux loyers d'avant guerre ; et pour certains, c'était l'occasion rêvée de toutes les spéculations immobilières les plus inéquitables. Pour réaliser leur dessein mercantiliste, les bailleurs d'immeubles refusèrent, conformément aux règles du Code civil seules applicables à cette époque, de renouveler nombre de contrats de location arrivés à terme. Une telle décision, certes conforme aux règles édictées par le Code civil, était ainsi privée du principal élément physique de ralliement de la clientèle.

Pour y remédier, le législateur à travers une loi consacra un statut particulier pour tous les commerçants. Ce statut leur conférait des prérogatives exorbitantes sur la chose louée à l'instar de l'obligation faite au bailleur soit de renouveler, soit de payer une indemnité d'éviction au commerçant locataire. C'est ce qui a fait dire à certains auteurs que le statut des baux commerciaux confère aux commerçants une véritable « propriété commerciale ». En dépit des controverses suscitées par cette notion, elle n'en a pas moins connu beaucoup d'heurs en droit ; et très vite la question s'est posée de savoir s'il n'était pas opportun d'étendre le statut des baux commerciaux aux professionnels non commerçants dans le mesure où ils exercent, comme les commerçants, dans un local. Et comme ces derniers, ils ont besoin d'une clientèle et d'un local stable.

114. Il faut signaler qu'avant l'Acte uniforme OHADA, le statut des baux commerciaux portait bien son nom puisqu'il n'était réservé qu'aux seuls commerçants. Mais avec l'Acte Uniforme OHADA, ce statut a été étendu à tous les professionnels qu'ils soient commerçants ou non, ce qui constitue une avancée considérable du droit africain par rapport au droit français qui n'a pas encore consacré une telle solution283(*).

Les termes de l'article 69 AUDCG sont à cet égard assez éloquents et il suffit simplement de les évoquer pour mieux s'en convaincre : le statut des baux commerciaux s'applique aux « locaux ou immeubles à usage commercial, industriel, artisanal ou professionnel... ». A l'opposé du Code de commerce, l'Acte uniforme ne fait plus allusion à la qualité de commerçant pour le bénéfice du statut des baux commerciaux. Désormais donc, tout professionnel commerçant ou non peut bénéficier du statut des baux commerciaux284(*). L'Acte Uniforme réalise donc un progrès considérable dans l'oeuvre fédératrice voire unificatrice du droit civil et du droit commercial285(*). Il s'agit sans doute d'un signe prémonitoire de la reconnaissance juridique du fonds libéral par le législateur africain. Toutefois, la pertinence de ces remarques n'épuise pas pour autant toutes les interrogations inhérentes à cette innovation opérée par le législateur OHADA.

115. L'article 69 AUDCG évoque la notion d'usage professionnel mais ne la définit pas286(*), ce qui peut compliquer l'application de ce statut à des non commerçants. Mais à l'analyse, il semble que le terme profession désigne une activité habituelle, indépendante et destinée à fournir à celui qui l'exerce des moyens d'existence. Sur la base de cette définition, nous pouvons dire que les médecins, les notaires, les avocats, les huissiers, les architectes, les agriculteurs, les artisans sont des professionnels parce qu'ils exercent en toute indépendance et de manière habituelle leur activité et en tirent l'essentiel de leur revenu.

Une autre interrogation demeure cependant, c'est celle de savoir si la dénomination des baux commerciaux se justifie encore, si on considère le fait que les commerçants ne sont plus les seuls bénéficiaires de son statut. Ne convient-il pas aujourd'hui de poursuivre l'unification du droit privé même sur le plan terminologique en parlant non plus du statut des baux commerciaux, mais plutôt du statut des baux professionnels ? Une telle dénomination a pour avantage qu'elle vise tous les professionnels. Dans le même sens, il conviendrait peut-être de ne plus parler en doctrine de « propriété commerciale » comme c'est jusqu'ici le cas, il conviendrait de substituer à cette notion celle plus novatrice et précise de « propriété professionnelle », parce que ce statut ne s'applique plus qu'aux seuls commerçants.

116. Comme on peut le constater, l'extension du statut des baux commerciaux à tous les professionnels, constitue le signe que le droit est entrain de s'adapter aux faits, que cette adaptation n'est pas un mythe287(*). C'est dire que le législateur n'est pas totalement opposé à la patrimonialisation des activités libérales qui sont pendant longtemps restées l'un des derniers bastions de résistance à la commercialité.

La contribution législative à la commercialisation des activités civiles n'est pas seulement perceptible au niveau du statut des baux commerciaux, elle l'est aussi lorsque le législateur étend certaines procédures d'essence commerciale aux professionnels libéraux.

2) L'extension de certaines procédures d'essence commerciale aux professionnels libéraux

117. Jusqu'à une période relativement récente, en France comme dans les anciennes colonies françaises, seuls les commerçants pouvaient se voir appliquer les procédures collectives puisque la tradition juridique française ignorait la faillite civile288(*).

Mais cette règle était peu satisfaisante à la fois pour les commerçants et leurs créanciers puisque les sociétés civiles jouaient un rôle économique parfois important ; elles recouraient parfois aux emprunts pour financer leurs activités. Et lorsqu'elles cessaient leurs paiements, la situation des créanciers était peu confortable voire catastrophique, compte tenu de l'inorganisation de la déconfiture289(*). Une réforme s'imposant donc, c'est la France qui étendit la première cette procédure aux non commerçants même si cette extension se fit par paliers.

118. D'abord, c'est l'article 1er de la loi du 13 juillet 1967 qui l'étendit à toutes les personnes morales de droit privé, même non commerçantes ; ensuite ces procédures furent étendues aux artisans à travers la loi du 25 janvier 1985, pour l'être enfin aux agriculteurs par la loi du 30 décembre 1988290(*). Mais cette réforme n'avait qu'une portée limitée puisque la procédure a certes été étendue à toutes les personnes morales de droit privé, mais elle n'a pas été étendue, exceptés les agriculteurs et les artisans, aux personnes physiques. Les praticiens libéraux n'exerçant pas dans le cadre sociétaire demeurent donc exclus291(*).

119. En Afrique, l'Acte Uniforme OHADA a marqué une rupture partielle par rapport au principe classique de l'exclusion des non commerçants des procédures collectives. L'article 2 alinéas 1 et 4 de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives (AUPCOLL). Étend les procédures collectives à toutes les personnes morales de droit privé, y compris les entreprises publiques constituées en la forme d'une personne morale de droit privé. Désormais donc, les procédures collectives peuvent être appliquées à toutes les personnes morales de droit privé même non commerçantes292(*).

120. L'on constate que l'Acte Uniforme ne va pas aussi loin que le droit français puisque la qualité de commerçant continue d'être exigée à toutes les personnes physiques. Contrairement à ce qui se passe en France, les artisans et les agriculteurs demeurent donc toujours exclus du bénéfice des procédures collectives, à moins qu'ils n'exercent sous la forme d'une société293(*). Les législations nationales ne sont même pas autorisées à élargir le domaine de ces procédures aux personnes physiques non commerçantes, quoique certains auteurs, à l'instar de Philippe TIGER  soutiennent la thèse de l'élargissement possible par les Etats parties à l'OHADA294(*). A l'analyse, l'extension des procédures collectives aux non commerçants, notamment aux membres des professions libérales exerçant sous forme sociétaire s'explique par le fait que les commerçants exercent de nos jours des activités économiques, ils se comportent donc de plus en plus comme des commerçants.

L'extension des procédures collectives à certains non commerçants est le signe que l'unité du droit privé est en plein chantier. Cette unification qui se manifeste aussi par l'extension de la procédure d'injonction de payer aux créances civiles, devrait normalement déboucher sur la reconnaissance aux praticiens libéraux d'un fonds de caractère libéral.

121. L'injonction de payer est une procédure dérogatoire au droit commun ; elle est née en 1937 en réaction contre les lenteurs et la complexité des voies ordinaires295(*). Cette procédure a été modifiée en France par le décret n° 81-500 du 12 mai 1981. Pour cette modification, le législateur s'est largement inspiré de la procédure de « commandement de payer » suivie dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle296(*). Cette dernière procédure elle-même inspirée du « mahnverfahren » allemand, même si elle s'en écartait sur deux points297(*).

Cette procédure permettait un recouvrement rapide et simplifié des petites créances commerciales. Elle permettait aussi l'obtention sans débat contradictoire d'une décision qui revêt pourtant ce caractère298(*). Mais très vite, le succès de cette procédure a poussé le législateur à l'étendre aux petites créances civiles299(*). S'inscrivant dans le sillage de cette évolution, l'Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution a également étendu cette procédure aux créances civiles, dans la mesure où son article 2 dispose que la procédure d'injonction de payer s'applique lorsque la créance a une cause contractuelle. C'est dire que les créances extracontractuelles, notamment les créances d'origine délictuelle quasi-délictuelle et quasi contractuelle, ne peuvent être recouvrées par la procédure d'injonction de payer300(*). L'Acte Uniforme OHADA ne distingue donc pas les créances civiles des créances commerciales, puisqu'il précise simplement que la créance doit avoir une cause contractuelle, c'est-à-dire qu'elle doit simplement résulter d'un contrat, civil ou commercial.

L'extension de la procédure d'injonction de payer pour le recouvrement des créances civiles constitue l'une des preuves de la commercialisation des activités civiles. Cette commercialisation qui justifie la consécration de la notion de fonds libéral, génère des conséquences innombrables qui militent toujours en faveur d'une notion de fonds libéral.

B/ Les conséquence de la commercialisation des activités libérales

122. Ces conséquences touchent non seulement les praticiens (1), mais également l'avenir même du droit commercial (2).

1) L'apparition à la charge du praticien d'obligations d'essence commerciale

La commercialisation des activités libérales crée à la charge des praticiens libéraux des obligations d'essence commerciale, que nous ne saurions entièrement énumérer ici. Nous ne retiendrons que les plus significatives. Il s'agit notamment de l'obligation faite actuellement aux praticiens libéraux de se faire immatriculer au registre du commerce, de tenir une comptabilité, de payer certains impôts. Examinons tour à tour chacune de ces obligations.

A l'origine301(*), le registre de commerce était exclusivement réservé aux commerçants. C'est de là qu'il tient son appellation de registre de commerce302(*), mais il n'était pas connu dans les législations ignorant la distinction entre le droit civil et de droit commercial303(*) comme l'Angleterre. Progressivement en France, ce registre a été étendu aux non commerçants, même si cette extension n'a eu qu'une portée limitée puisqu'elle ne s'est faite dans un premier temps qu'au profit des GIE et dans un second temps aux sociétés civiles304(*).

123. Une évolution similaire s'est faite en Afrique avec l'Acte Uniforme OHADA, même s'il est vrai que les prémices de cette évolution remontent bien avant le traité OHADA305(*). S'inspirant du droit français, le législateur OHADA poursuivra dans la même logique en étendant le registre de commerce306(*) à tous les GIE ; que le GIE soit civil ou commercial. Comme en droit français, cette extension n'est que partielle, elle ne vise pas tous les professionnels à l'instar des artisans, des agriculteurs, des professionnels libéraux, etc. au contraire, le droit OHADA plutôt régressé par rapport au droit français, puisqu'il n'étend pas le registre du commerce et du crédit mobilier aux sociétés civiles307(*).

Le registre de commerce ne porte plus parfaitement son nom, il n'est plus une institution réservée aux seuls commerçants, dans la mesure où il a été étendu à diverses catégories de non commerçants. Cette extension contribue à atténuer le particularisme du droit commercial. Mais, la distinction droit civil, droit commercial se fait plus ténue avec l'obligation faite aux commerçants de tenir une comptabilité.

124. Considérée par certains comme l'algèbre ou la mathématique du droit, la comptabilité est apparue avec les besoins du commerce. Progressivement, elle va apparaître comme étant un meilleur outil de gestion et de pilotage pour tous les professionnels, qu'ils soient commerçants ou non. C'est sans conteste pour cette raison que la tenue des documents et livres comptables a été imposée à certains professionnels libéraux notamment les huissiers de justice308(*), les notaires309(*), les avocats310(*), les professionnels médicaux et paramédicaux.

126. Dans le même sens, le législateur fiscal oblige les contribuables du régime de base, du régime simplifié et du régime du réel à tenir une comptabilité et à déposer conséquemment une déclaration statistique et fiscale auprès de leur centre de rattachement ; celle-ci comprend tous les « états financiers ». L'article 7 de l'Acte Uniforme OHADA régissant le droit comptable dispose que les « états financiers de synthèse regroupent les informations comptables au moins une fois par an sur une période de 12 mois appelés exercice ». Suivant le système dans lequel se trouve l'entreprise, la consistance des états financiers ne sera pas la même, mais globalement, les entreprises notamment celles du régime du réel seront tenues de produire le bilan, le compte de résultats, le Tableau financier des ressources et des emplois (TAFIREE), les états annexes et les états supplémentaires.

L'exigence de ces différents documents comptables aux praticiens ne relève pas d'un simple effet de mode. La comptabilité présente une utilité non seulement pour les tiers qui traitent avec le praticien, mais également pour le praticien qui aimerait connaître si le résultat de son activité est bénéficiaire ou déficitaire311(*) et pour l'Etat qui doit pouvoir déterminer le montant des impôts dus par le praticien.

127. Le paiement des impôts par les professionnels libéraux se justifie par l'idée de réalisme et d'autonomie du droit fiscal312(*). Même si l'on admet volontiers la thèse selon laquelle la prestation libérale constitue une libéralité, il y aura toujours imposition, dans la mesure où le fisc n'apprécie guère les libéralités ; c'est pourquoi celles-ci sont fortement taxées. C'est également la raison pour laquelle le législateur fiscal exige des praticiens libéraux qu'ils paient la patente313(*), déclarent la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) collectée sur leurs différentes prestations et paient l'impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP) au titre des bénéfices non commerciaux réalisés314(*). Mais de toutes ces impositions, c'est la TVA qui a suscité un intérêt particulier en doctrine.

Selon l'article 126 (1) du CGI « seules les opérations accomplies dans le cadre d'une activité économique effectuée à titre onéreux sont assujetties à la TVA ». Cette délimitation législative du champ d'application de la TVA a donné lieu à de nombreuses interrogations doctrinales. La question qui s'est toujours posée en doctrine était celle de savoir si les activités libérales devaient être assujetties à la TVA.

128. Si l'on s'en tient à la conception classique des professions libérales que nous avons déjà évoquée, les activités libérales ne devraient normalement pas subir l'imposition à la TVA parce qu'elles ne sont pas effectuées à titre onéreux : la prestation libérale constitue une libéralité du praticien libéral à son client. Bien plus, l'imposition à la TVA ne se justifie pas parce qu'il n'est pas certain que les activités libérales relèvent du secteur économique315(*).

En revanche, si l'on tient compte du fait que les praticiens libéraux s'investissement aujourd'hui dans une quête effrénée du lucre, l'on est fondé à émettre quelques réserves par rapport à la thèse de l'exemption de TVA des professions libérales. Pour Marcel RAFFRAY, qui s'appuie sur certaines jurisprudences, les activités libérales doivent faire l'objet d'une imposition à la TVA si elles s'insèrent dans le cadre fixé par la loi316(*). Le législateur camerounais a, en plus de donner un critère général d'imposition à la TVA317(*), énuméré certaines activités économiques passibles de TVA ; et parmi celles-ci, on retrouve « ...les activités de production, d'importation, de prestation de services et des distribution, y compris les activités extractives, agricoles, agro-industrielles, forestières, artisanales et celles des professions libérales ou assimilées »318(*). Par une formule dénuée de toute ambiguïté que, le législateur a voulu dissiper toute équivoque sur l'assujettissement des activités libérales à la TVA. Si le législateur fiscal a fait entrer les activités libérales dans le secteur économique, c'est sans conteste parce que la recherche des bénéfices y apparaît de plus en plus comme étant la finalité première, ce qui est contraire à leur vocation philanthropique originelle.

Toutefois, il faudrait signaler que la commercialisation des professions libérales a aussi pour conséquence majeure, outre qu'elle peut justifier certaines impositions traditionnellement réservées aux commerçants, elle peut également entraîner un nouveau découpage disciplinaire.

2) La commercialisation des activités libérales, un facteur d'émergence de nouveaux clivages disciplinaires.

129. La commercialisation des activités civiles a amené les « commercialistes » et les « civilistes » à repenser les frontières communes entre le droit civil et le droit commercial, bref, à procéder à de nouveaux découpages disciplinaires tant à l'intérieur du droit commercial qu'en dehors de cette branche du droit319(*). A l'intérieur du droit commercial, un nouveau découpage s'impose en raison des revendications autonomistes de certaines de ses « provinces » comme le droit maritime, le droit bancaire320(*) et des tendances d'émancipation de certaines de ses branches comme les procédures collectives et le droit des sociétés commerciales321(*). Certains auteurs proclament simplement la mort de cette discipline 322(*) et lui proposent même un successeur qui n'est pas toujours le même selon les thèses en présence.

130. Pour certains, le droit commercial est appelé à disparaître et à céder sa place au droit économique, entendu non pas comme droit des interventions de la puissance publique dans l'économie privée, 323(*) mais plutôt comme droit de l'entreprise 324(*). Mais pour d'autres, le successeur du droit commercial doit être le droit des affaires entendu soit comme le droit des relations entre entreprises325(*), soit comme l'ensemble des règles relatives aux activités économiques telles qu'elles se présentent aujourd'hui326(*).

131. C'est le lieu de signaler ici que, ni le droit des affaires, ni le droit économique n'ont encore reçu de consécration327(*) en droit positif, même si l'usage du droit des affaires est de plus en plus répandu : de nombreux ouvrages s'intitulent Droit des Affaires au lieu du droit commercial. Mais la consécration de l'appellation droit des affaires est en train de s'opérer en droit comme en témoigne la signification du traité OHADA : il s'agit du traité pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires. Le traité traite donc l'harmonisation du droit des affaires plutôt que du droit commercial.

Toutefois, l'on peut se poser la question de savoir ce qui sous-tend une telle mutation terminologique. Incontestablement, le législateur OHADA a voulu saisir toutes les activités professionnelles qu'elles soient commerciales ou non ; L'essentiel étant qu'elles contribuent à la création des richesses. Cette mutation terminologique pourrait entraîner à terme la reconnaissance par législateur africain de la notion de fons libéral, ce qui pourrait constituer un grand pas vers l'idéal actuel d'unification du droit privé. Mais l'émergence de la notion de fonds libéral apparaît plus nette encore avec la contribution législative à l'érosion, des piliers classiques des professions libérales.

Paragraphe II : La contribution législative a l'érosion des piliers classiques des professions libérales

132. Ce qui distingue les professions libérales des autres professions, comme celles artisanales, ce sont les caractères intellectuel, d'indépendance et de désintéressement. Mais aujourd'hui, ces caractères subissent de nombreuses attaques venant de la pratique, du juge et même du législateur. En effet, certaines dispositions législatives contribuent à ruiner les piliers classiques des professions libérales. Il s'agit surtout des caractères intellectuel (A) et de désintéressement (B).

A/ La contribution législative à la matérialisation des professions libérales

133. Forte dans les professions médicales et paramédicales, la contribution législative à la matérialisation des activités libérales n'en n'est pas moins perceptible dans les professions judiciaires et parajudiciaires.

En effet, comme nous l'avons dit dans les précédents développements, les professions libérales étaient exclusivement réservées à l'origine aux hommes riches. Pour cette raison, la prestation libérale n'avait qu'un caractère intellectuel ; le praticien n'avait donc pas besoin du décor, des artifices pour l'exercice de son art. Mais depuis la Révolution industrielle, beaucoup de mutations se sont opérées et la praticien a compris que les appareils et autres matériels revêtent aussi une importante capitale pour lui.

Ainsi, même le législateur très souvent préoccupé à maintenir et à protéger une certaine orthodoxie des professions libérales, n'a pas échappé aux influences de ce mouvement. Dans ce sens, il exige de plus en plus que les professionnels libéraux exercent dans la décence leur art.327(*) A travers cette formule, le législateur invite le praticien à s'équiper, à ne plus négliger le décor parce qu'il lui permet de fournir à son client une meilleure prestation. D'ailleurs, pour assurer non seulement le respect de cette obligation d'ordre déontologique mais également une certaine discipline autocorporative , les ordres ne manquent pas le plus souvent de d'exercer leurs pouvoirs réglementaire et répressif328(*)

Tout ceci montre comment certaines normes légales contribuent à effriter le caractère intellectuel des professions libérales. Toutefois, il faudrait signaler que celles-ci favorisent aussi l'atteinte du caractère de désintéressement des professions libérales.

B) L'atteinte législative au caractère de désintéressement des professions libérales

134. L'exercice des professions libérales n'est plus aussi désintéressé qu'il ne l'était à l'origine. La forte matérialisation des professions libérales conduit les praticiens à rechercher de plus en plus des bénéfices dans l'exercice de leur art. Ces mutations sociales ne laissent pas totalement le législateur insensible puisqu'il reconnaît aux praticiens libéraux une fourchette assez variée de rémunérations (1), ce qui entame forcément le pilier classique de désintéressement des professions libérales329(*). Et, pour faire face à la dégradation continue de ce caractère, le législateur a prévu un ensemble de normes destinées à prévenir les abus dans la perception de ces différentes numérations (2).

1) La reconnaissance législative d'une variété de rémunérations aux praticiens libéraux

135. Les praticiens libéraux supportent de nos jours d'importantes charges : les impôts, le loyer, les salaires des employés, l'électricité, l'eau etc. Pour leur permettre d'amortir leurs investissements, le législateur reconnaît aux praticiens libéraux le droit de percevoir différentes rémunérations. En général, presque toutes les professions libérales perçoivent, en contrepartie de la prestation fournie des honoraires. Mais les membres des professions judiciaires et parajudiciaires perçoivent en plus des honoraires, des débours, des dépens et des émoluments.

Les dépens sont les frais que l'une des parties au procès peut mettre à la charge de l'autre ; ils représentent toutes les dépenses engagées dans le procès 330(*) et relatives aux actes et à la rémunération de tous ceux qui interviennent ou peuvent intervenir aux instances, actes et procédures331(*). En principe, « toute personne qui succombe est condamnée aux dépens »332(*). Exceptionnellement cependant, les dépens peuvent être repartis entre le perdant et celui qui a gagné le procès. Autrement dit, et pour reprendre une terminologie qui semble inappropriée, la compensation des dépens peut s'opérer entre le perdant et le gagnant. Ceci est très fréquent dans les litiges opposant les membres d'une même famille, sans doute parce que les législateur a voulu éviter que la condamnation de l'une des parties ne puisse accélérer la division de la famille333(*).

136. Signalons aussi que c'est la partie qui a triomphé dans le procès qui bénéficie en principe des dépens. Mais il peut exceptionnellement arriver que les avocats obtiennent distraction des dépens à leur profit. C'est le cas notamment lorsqu'ils ont fait la plus grande partie des avances334(*). D'ailleurs toutes les avances faites par le praticien libéral pour l'exercice de la prestation sont remboursables, ceci au titre des débours. En dehors de ces deux rémunérations, les membres des professions judiciaires ont aussi droit aux émoluments ; les états d'émoluments des huissiers335(*) et les notaires 336(*) sont confectionnés trimestriellement, après visa du procureur de la république et du procureur général337(*).

137. De toutes ces rémunérations, ce sont les honoraires qui suscitent le plus d'attention. Jusqu'à une certaine époque, ils étaient considérés comme le don spontané de reconnaissance des clients338(*), ils avaient donc la nature de gratification. Mais aujourd'hui, il n'est pas certain que cette nature soit restée intacte, qu'elle n'est pas été corrompue par la recherche effrénée de bénéfices à laquelle se livrent aujourd'hui les praticiens libéraux. A la lumière de ces mutations, on peut dire que les honoraires sont devenues de véritables rémunérations, et le législateur a tenu à le rappeler dans l'article 18 de l'arrêté du 20 avril 1936 qui dispose que les honoraires « rémunèrent les plaidoiries, mémoires, consultations des travaux extraordinaires non prévus par les tarifs d'avoués... »339(*)

138. Cette définition qui renvoie à l'idée de rémunération est reprise successivement par les articles 16(2) de la loi du 9 mai 1972, article 21 (2) de la loi du 15 juillet 1987 et enfin l'article 23 (2) de la loi n° 90/059 du 19 décembre 1990 portant organisation de la profession d'avocats. En effet, les honoraires de l'avocat sont extra tarifaires, c'est-à-dire librement négociés par les parties. Le juge ne saurait donc réviser les conventions d'honoraires qui lui apparaîtraient très déséquilibrés340(*). Mais lorsque cette liberté s'exprime dans toute sa plénitude, elle peut être source de nombreux abus de la part des praticiens qui peuvent ainsi déterminer les honoraires de manière arbitraire, sans tenir compte de la situation de fortune des clients, de la difficulté de l'affaire, des frais réellement exposés, la notoriété et les diligences accomplies341(*).

Parce qu'ils érodent l'idéal de justice contractuelle, ces abus peuvent donner lieu à un abondant contentieux. Pour maintenir la rémunération des praticiens dans de justes proportions, le législateur a édicté deux types de normes : les unes de nature préventive, et destinées à prévenir les abus, les autres de nature curative et servant à l'apurement des litiges pouvant survenir entre le praticien et son client.

2) La protection législative du caractère de désintéressement des professions libérales.

139. Afin d'éviter les abus auxquels la détermination de la rémunération des praticiens peut donner lieu, le législateur a opté, exceptés les honoraires des avocats, la voie de la tarification des différentes rémunérations des praticiens. La tarification est très perceptible dans les professions judiciaires, qu'il s'agisse des émoluments des débours des dépens, des honoraires, même s'il reste vrai que les professions médicales n'ignorent pas la tarification.

140. En effet, des textes existent en matière médicale et paramédicale, qui fixent des tarifs. Certains d'entre eux décrivent les actes qui doivent être effectués par les professionnels médicaux342(*), d'autres au contraire ne se contentent pas seulement de décrire la nomenclature des actes qui doivent être effectués, ils vont même jusqu'à prévoir des tarifs applicables dans le secteur sanitaire privé pour les différents actes médicaux343(*).

Il est à signaler que les tarifications sont obligatoires, et aucun praticien ne saurait y déroger ni même les contester344(*). En matière médicale, le non respect de ces exigences tarifaires entraîne de lourdes sanctions à l'encontre du contrevenant, notamment la fermeture temporaire ou définitive de l'établissement345(*). Cette tarification, si elle peut contrarier par certains de ses côtés les partisans d'un libéralisme échevelé, se présente aujourd'hui comme une nécessité pour tous les camerounais qui souhaiteraient avoir accès aux soins de santé primaire. C'est donc une digue dressée contre les spéculations des professionnels médicaux.

Comme on a bien pu le constater, la contribution législative à l'émergence de la notion de fonds libéral est énorme, mais elle est de loin inférieure à celle de la jurisprudence dont l'oeuvre est significative.

Section II : La bienveillance du juge à l'égard d'une notion de fonds libéral

141. La patrimonialisation des activités libérales a été empiriquement initiée par les professionnels libéraux ; « Armature intellectuelle établie sur un certain consensus »346(*), le droit n'a pas suivi l'évolution des faits : les textes législatifs ou réglementaires sont restés quasiment muets sur la question de la patrimonialisation des activités libérales. Saisis d'une quantité importante de questions liées à la patrimonialisation des activités libérales, les magistrats ont fait montre d'une grande ingéniosité pour pallier ces lacunes textuelles. Ils vont ainsi se prononcer sur des interrogations fort variées, et dont certaines apparaissent comme étant essentielles347(*) ; il s'agit notamment de la question de la validité des opérations de transmission de clientèles civiles d'une part (paragraphe I) et de celle relative au sort du cabinet dans la communauté conjugale d'autre part (paragraphe II).

Paragraphe I : La reconnaissance de la validité des opérations de transmission de clientèles civiles

142. Malgré l'hostilité apparente des juges au processus de patrimonialisation des activités libérales, l'apport prétorien est des plus capital dans la construction d'une notion juridique de fonds libéral.

En dépit du fait qu'il est presque unanimement admis que la clientèle - et peut-être aussi la clientèle commerciale - n'est pas un bien, qu'elle est par nature volatile donc inappropriable et incessible348(*), il va se développer sous le regard bienveillant du juge de véritables opérations de transmission de clientèles civiles tant du vivant du praticien (A) qu'après sa mort (B).

A/ Les cessions de clientèles civiles réalisées par le praticien lui-même.

143. La conception classique des professions libérales ne s'accommode pas de toute idée de patrimonialité, de vénalité. Et pendant longtemps, cette conception a exercé une influence considérable sur le droit, particulièrement sur la jurisprudence, dont l'hostilité à l'égard du mouvement de patrimonialisation se manifestait - et se manifeste encore ? - par l'interdiction de cession de clientèles civiles.

Mais depuis quelques années, le mouvement de matérialisation des professions libérales a entraîné l'amenuisement de ce principe classique. Le juge a dû ainsi accéder à la demande des praticiens en validant a posteriori les cessions de clientèles civiles, même si cette reconnaissance s'est faite par paliers. Elle a d'abord été indirecte (1) avant de s'affranchir de cette chape « d'hypocrisie » qui l'enveloppait pour être plus directe (2).

1) La reconnaissance prétorienne des mécanismes de cession indirecte de clientèle civile

144. Le principe d'incessibilité de clientèle civile classiquement affirmé par la jurisprudence, avait fait l'objet de virulentes critiques doctrinales. Cette solution jurisprudentielle avait été critiquée pour son illogisme et sa rigueur excessive.

Solution rigoureuse « parce qu'elle empêchait une personne cessant d'exercer sa profession, ou décédant alors qu'elle exerçait une profession, de s'assurer pour elle-même ou d'assurer pour sa famille des moyens d'existence »349(*). Solution illogique parce qu'elle ne permettait pas la cession de clientèle civile «  ... alors que les commerçants et les officiers ministériels pouvaient tirer par la cession, profit de leur travail antérieur »350(*).

C'est fort de ces inconvénients que la Cour de Cassation française avait atténué considérablement la portée de cette prohibition en admettant la validité de l'engagement de présenter le successeur à la clientèle351(*) d'une part, et la validité des mécanismes d'intégration des praticiens au sein des cabinets d'autre part. Les conventions de présentation permettent de contourner le principe de l'incessibilité des clientèles civiles et d'obtenir un effet semblable à celui issu d'une véritable convention de cession de clientèle. Les conventions de présentation génèrent en effet deux types d'obligations : l'une positive - présenter le successeur à la clientèle, l'autre négative - ne pas faire concurrence à l'arrivant352(*).

145. La première obligation, consiste pour le praticien à présenter le successeur à sa clientèle afin que celle-ci reporte sa confiance sur ce dernier. De la sorte, il n'est pas mis fin aux liens que le praticien avait tissés avec sa clientèle, ces liens continuent avec la personne du successeur. Mais pour que le réseau de relations tissées avec les clients perdure et puisse bénéficier à l'arrivant, il faudrait une implication personnelle du praticien qui se retire353(*). C'est sans doute pour ces raisons que l'on a pu parler tantôt de « patronage »354(*) tantôt de « parrainage »355(*).

Toutefois, la convention de présentation ne saurait être bénéfique au professionnel qui s'installe qu'à condition que le professionnel qui se retire ne lui fasse pas concurrence. Si pour certains auteurs, la non concurrence est une obligation accessoire de celle de présentation356(*), pour d'autres auteurs au contraire, elle en est l'obligation essentielle357(*).

Si séduisante que cette construction jurisprudentielle ait pu apparaître, elle n'en a pas moins suscité d'importantes interrogations ; et parmi celles-ci, on peut citer celle relative au report de confiance358(*). La question s'est en effet posée de savoir comment ce report de confiance pouvait s'opérer sur la personne de l'arrivant. Cette question qui exprime bien une inquiétude doctrinale, a été résolue en pratique par la technique de l'information des clients de la réalisation d'une telle opération. Ce qui était par exemple possible par l'envoi de documents. Il se posait également le problème de la distinction entre cession de clientèles en principe prohibées et convention de présentation autorisées.

146. Il convient de relever que les décisions susceptibles de fournir un critère de distinction entre conventions de présentation et cessions de clientèles étaient rares. Cette distinction était au surplus sibylline dans la mesure où ce sont de véritables conventions de cession qui étaient requalifiées par les juges en convention de présentation. Ceux-ci s'appuyaient en effet sur l'article 1156 du Code civil qui leur permet de toujours rechercher la commune intention des parties à une convention litigieuse.

Pour cette raison, la doctrine estime non sans pertinence, que la distinction n'était en définitive que d'ordre terminologique. Il s'agit d'une construction jurisprudentielle artificielle359(*), d'un véritable paravent destiné à autoriser de véritables cessions de clientèles, tout en consacrant aux tabous360(*). Cette solution en demi-teinte, voire hypocrite des magistrats est toujours fermement maintenue, sauf en matière médicale ou de véritables cessions de clientèles ont déjà été autorisées361(*). Les conventions de présentation, mécanisme artificiel voilant de véritables cessions globales de clientèles, se distinguent de la technique d'intégration qui réalise des cessions partielles de clientèles.

147. Le mécanisme d'intégration permet aux praticiens déjà installés d'accueillir un nouveau praticien, le plus souvent jeune afin de l'intégrer au sein de leur cabinet et de lui éviter ainsi les difficultés inhérentes à l'installation et à la conquête d'une clientèle. Mais la technique d'intégration, au-delà du fait qu'elle permettrait le regroupement des praticiens, elle avait pour inconvénient majeur de porter atteinte à l'indépendance des patriciens, à la liberté de choix des clients362(*).

Tenant compte de ces limites, la jurisprudence avait toujours nourri à l'égard de la technique d'intégration, une farouche hostilité en annulant toutes les opérations qui y donnaient lieu. Une telle hostilité avait plutôt rendu possible la fraude des praticiens insatisfaits de leur installation, qui pouvaient ainsi remettre en cause la convention d'intégration, et récupérer conséquemment l'indemnité versée même s'ils étaient à l'origine de l'échec363(*). C'est pour éviter d'encourager la fraude et l'insécurité juridique que les magistrats ont dû assouplir leur position en opérant en 1985 le revirement de jurisprudence tant attendu, lequel coupe court aux controverses doctrinales puisqu'il valide explicitement les opérations d'intégration364(*).

Mais il faut noter que toutes les cessions de clientèles civiles ne se font pas de manière indirecte, détournée ; la jurisprudence se montre parfois hardie lorsqu'elle reconnaît la validité des cessions directes de clientèles libérales.

2) L'admission prétorienne des cessions directes

148. La solution classiquement admise par la jurisprudence est celle de l'incessibilité des clientèles civiles. Avant l'arrêt de 2000, ce principe n'avait jamais été sérieusement bousculé ; mais depuis cet arrêt, on assiste à la fin d'une hypocrisie juridique puisque la cessibilité de la clientèle médicale est finalement admise365(*). Spécifiquement dans cette matière, le juge n'use plus de subterfuges, de constructions juridiques aussi ingénieuses qu'artificielles pour valider les cessions de clientèles médicales ; il y va sans détours, de manière directe, « Désormais, la clientèle médicale devient chose de commerce au sens de l'article 1128 du code civil et peut par conséquent faire l'objet de conventions tout comme la clientèle commerciale »366(*).

Cette jurisprudence, qui n'a pas encore été généralisée et dont certains auteurs souhaitent l'extension aux autres professions libérales, est de formulation quelque peu imprécise dans la mesure où elle énonce que la cession de clientèle médicale « n'est pas illicite »367(*). C'est donc par un raisonnement a contrario qu'on en vient à penser que le juge a entendu par là valider les cessions de clientèles médicales.

149. L'on se pose donc la question de savoir pourquoi la Cour de Cassation a utilisé la forme négative plutôt qu'une forme simple qui affirmerait la cessibilité de la clientèle médicale368(*). C'est pour cette raison que certains auteurs, notamment Mme Sonia KOLECK-DESAUTEL pense qu « il s'agit plus d'un arrêt de transition destiné à ménager les susceptibilités que d'un véritable arrêt de principe »369(*).

Les cessions de clientèles civiles entres vifs, totales ou partielles, témoignent du caractère irréversible du mouvement de patrimonialisation des activités libérales. Sans doute, l'irréversibilité de ce mouvement apparaît encore beaucoup plus nette lorsqu'il s'agit de cessions de clientèles libérales faites par les héritiers du praticien.

B/ Les cessions de clientèles civiles opérées par les héritiers du praticien

150. La question de savoir si au décès du praticien le cabinet tombe dans la masse successorale a été fort débattue. Saluée par certains, mais combattue par d'autres pour son amoralisme (1), la réalisation des cabinets par les héritiers du praticien a pourtant été validée par les juges du fait de son utilité économique (2).

1) L'amoralisme des réalisations de cabinets par les héritiers des praticiens

151 Le principe de l'incessibilité a pour conséquences que ni le praticien ni a fortiori ses héritiers ne sauraient réaliser la clientèle libérale parce qu'elle n'est pas dans le commerce juridique ou tout simplement parce qu'elle n'est pas une chose370(*). Et pourtant dans la pratique, de nombreuses réalisations de cabinets ont été faites par les héritiers des professionnels libéraux.

Mais de telles conventions ont été combattues par la doctrine parce qu'elles sont attentatoires à la moralité, la respectabilité et l'honorabilité nécessaires à la survie du monde libéral371(*). En principe, la clientèle libérale, du fait de sa volatilité et de sa fluidité est inappropriable, donc incessible.

Et même dans les cas bien exceptionnels où la cession est admise, directement ou indirectement, c'est le praticien qui doit lui-même y procéder. C'est le praticien qui doit désigner un continuateur scientifiquement et moralement digne372(*). Il en résulte a contrario que les héritiers n'ont guère les compétences techniques, ni même les qualités morales pour le faire ; la confiance, l'expertise ne faisant pas partie du patrimoine génétique.

Toutes ces critiques doctrinales vont certes exercer une grande influence sur les juges, mais peut-être par réalisme, ceux-ci vont néanmoins reconnaître la validité des réalisations de cabinets faites par les héritiers du praticien.

2) La reconnaissance prétorienne de la validité des réalisations de cabinets faites par les héritiers

152. Influencés par les critiques doctrinales, les magistrats vont pendant longtemps afficher une hostilité à l'égard des réalisations de cabinets effectuées après la mort du praticien. Mais abandonnant le terrain de la morale qui fondait une telle défiance, pour celui du réalisme, les magistrats vont graduellement reconnaître de telles conventions.

C'est d'abord une décision de la Cour d'Appel de PAU373(*) qui est l'instigatrice de ce qui sera considérée par certains auteurs comme une hérésie juridique. Mais le revirement important s'opère avec les deux arrêts de la Cour de Cassation des 9 et 17 mai 1961374(*). Si cette solution a été accueillie avec ferveur par certains auteurs, elle n'en a pas moins été critiquée par d'autres qui y ont vu une voie biaisée empruntée par le juge pour reconnaître la validité de véritables cessions de clientèles civiles375(*).

Les mécanismes de cession directe ou indirecte de clientèles civiles contribuent de manière forte à la patrimonialisation des activités libérales. Toutefois, il faudrait se garder de sous-estimer l'apport des régimes matrimoniaux à l'émergence d'une notion juridique de fonds libéral.

Paragraphe II : L'admission prétorienne du cabinet au sein de la communauté conjugale

153. L'une des interrogations les plus passionnantes suscitées par le mariage d'un praticien libéral est celle de savoir à qui appartient le cabinet : est-ce la propriété exclusive du praticien ou au contraire un bien commun aux deux époux ? Autrement dit, le cabinet d'un praticien peut-il entrer en communauté ?

Cette interrogation a donné lieu à des réponses divergentes en doctrine ; et malgré l'âpreté des débats doctrinaux sur cette question (A), les juges ont, sur la base de la distinction subtile du titre et de la finance376(*), admis que le cabinet puisse être un bien qui échoit en communauté (B).

A/ En dépit de l'âpreté des débats doctrinaux sur l'admission du cabinet dans la communauté conjugale ...

154. La question de l'admission du cabinet dans la communauté conjugale divise les auteurs en deux camps. Alors que certains auteurs sont contre une telle admission (1), d'autres au contraire y sont favorables (2).

1) Les thèses hostiles à l'entrée du cabinet dans la communauté conjugale

155. Les opposants à l'entrée du cabinet dans la communauté font valoir certains arguments dont la pertinence n'est pas des plus absolue.

Parmi ces arguments, on peut citer celui avancé par le Professeur COLOMER selon lequel l'entrée des clientèles civiles en communauté ne peut se concevoir que si on leur reconnaît une valeur patrimoniale377(*). En principe, la clientèle civile n'a pas de valeur patrimoniale puisqu'elle dépend principalement des liens personnels unissant le client au praticien. N'ayant donc pas de valeur patrimoniale, la clientèle civile ne saurait entrer en communauté.

Si ces arguments sont parfois confortés par certaines décisions de justice378(*), ils sont souvent contredits par des thèses doctrinales qui sont favorables à l'intrusion du cabinet dans la communauté conjugale.

2) Les thèses favorables à l'entrée du cabinet dans la communauté conjugale

156. Pour soutenir l'entrée du cabinet dans la communauté conjugale, certains auteurs font valoir que le lien de confiance n'est pas aussi déterminant qu'il ne l'était par le passé. Sous l'influence du mouvement de matérialisation, ce lien se distend. Bien plus, ce lien n'est pas caractéristique des seules professions libérales, on le retrouve aussi de manière prégnante en matière commerciale, ce qui n'empêche pas les cessions de clientèles commerciales. Dans le dessein d'affiner leurs arguments, certains auteurs proposent de distinguer le titre - droit d'exercer la profession - qui est personnel à son titulaire et qui n'a pas de valeur patrimoniale de la finance - la valeur de la clientèle - qui seule a une valeur patrimoniale et peut par conséquent être admise en communauté379(*).

Toutes ces thèses ont eu pour effet majeur d'embarrasser le juge qui était ainsi ballotté entre autoriser l'entrée du cabinet dans la communauté et s'opposer à une telle entrée. Mais finalement, et quoique de manière hésitante, les magistrats vont reconnaître une valeur patrimoniale au cabinet, laquelle justifie son entrée en communauté.

B/ ... Le juge autorise subtilement l'entrée des cabinets dans la communauté conjugale

157. La clientèle libérale n'a en principe, pas de valeur patrimoniale; à ce titre donc, elle ne saurait entrer en communauté. Mais les juges ont trouvé des parades assez ingénieuses pour contourner cet obstacle juridique. Il s'agit du recours systématique à la distinction du titre et de la finance, non seulement avant la rupture du lien matrimonial (1) mais également à l'issue du mariage (2).

1- La reconnaissance jurisprudentielle d'une valeur patrimoniale à la clientèle libérale pendant le mariage

158. Malgré l'hostilité doctrinale et même jurisprudentielle au mouvement de patrimonialisation des activités libérales, les juges estiment de plus en plus que la clientèle libérale a une valeur patrimoniale qui figure à l'actif de la communauté et devrait de ce fait être partagée entre les époux après la dissolution du mariage380(*).

Il ne faudrait toutefois se méprendre sur cette jurisprudence qui n'entend pas faire entrer tout le cabinet dans la communauté. Le juge n'a entendu faire figurer à l'actif de la communauté que la seule valeur de la clientèle c'est-à-dire la finance; le titre qui est le droit d'exercer en étant donc exclu. Cette décision qui a été suivie par bien d'autres381(*), contribue grandement à l'émergence de la notion de fonds libéral, non seulement parce qu'elle reconnaît une valeur patrimoniale à la clientèle libérale, mais aussi et surtout parce qu'elle intègre cette valeur dans la communauté conjugale.

Mais la contribution jurisprudentielle à l'entrée en communauté de la clientèle libérale est beaucoup plus perceptible à l'issue du mariage entre le praticien et son conjoint.

Le sort du cabinet à l'issue du mariage entre le praticien et son conjoint

159. Le cabinet ne connaît pas toujours le même sort selon qu'on se situe dans la période post communautaire ou après la liquidation de la communauté382(*). La jurisprudence n'a pas encore donné de solution définitive à la question de savoir si pendant la période post communautaire, le cabinet doit ou non entrer en communauté383(*). Pour l'heure, les solutions qui ont été consacrées par la jurisprudence sont imprécises lorsqu'elles ne se contredisent pas simplement entre elles.

A ce propos, la cour de cassation affirmait en 1984 que: "...la possession de certains diplômes ne pouvait avoir pour effet... de faire échapper à la communauté la valeur de ce fonds et l'indivision post communautaire les fruits et revenus de ce fonds..."384(*). Cette solution qui limitait les droits du praticien à une simple rémunération385(*), a été très critiquée par le professeur G. PAISANT qui faisait remarquer que : " s'il apparaît équitable qu'un bien à caractère personnel serve à l'alimentation de la communauté pendant le mariage, cela l'est moins après la rupture du lien conjugal"386(*). Ces observations qui ne manquent pas de pertinence, ont entraîné la Cour d'Appel de Paris à dire que "...les revenus du cabinet n'ont pas à être rapportés à l'indivision et restent propres à celui qui les a acquis par son travail ". Le cabinet ne dépend de la communauté que pour la valeur du droit de présentation387(*).

160. Cette décision qui n'a pas encore été confirmée par la cour de cassation, met subtilement en exergue la distinction entre le titre et la finance. Donc, les revenus tirés du travail personnel du praticien n'ont pas à être rapportés à la communauté, seule la valeur du droit de présentation devrait par conséquent l'être. Tout aussi similaire est la solution jurisprudentielle lorsque la communauté a été liquidée.

Il peut arriver que le praticien ait, par son travail personnel, amélioré l'état du cabinet et contribué à augmenter sa valeur. La question qui se pose dès lors est celle de savoir si la plus - value ainsi dégagée peut être rapportée à la communauté. Pour les magistrats de la Cour de Cassation Française, la plus - value doit être exclue de la masse indivise non seulement parce qu'elle n'est pas un fruit mais également parce qu'elle résulte de la seule activité du praticien388(*). Cette décision qui reprend subtilement et discrètement la distinction classique du titre et de la finance, fut très critiquée par la doctrine389(*).

Entre autres griefs qui lui étaient faits, on peut citer celui qui l'accuse de vouloir réintroduire le système de ventilation existant antérieurement à la réforme des régimes matrimoniaux de 1976. Cette décision reproduit en effet l'ancienne jurisprudence relative aux "fruits de l'industrie". Contrairement à cette vielle jurisprudence qui excluait les prétentions du praticien sur les fruits de l'activité, la jurisprudence Française de 1987 lui attribuait la plus - value industrielle390(*).

161. C'est peut-être ces limites qui ont amené la Cour de Cassation en 1994 à opère un revirement important. Désormais, la plus - value issue du droit de présentation profite à l'indivision391(*), mais « ... sous réserve de l'attribution à l'indivisaire gérante de la rémunération de son travail conformément à l'article 815 - 12 du Code civil »392(*).

Ces deux décisions de la cour de cassation constituent une illustration éclairante que la distinction du titre et de la finance n'est plus aussi pertinente. En ce sens, qu'il s'agisse du titre ou de la finance, tout intègre la communauté conjugale. Les juges semblent donc avoir opté pour l'abandon de cette distinction qui permettait de contenir le mouvement de patrimonialisation des activités libérales. En ouvrant ainsi les portes à ce mouvement dont on dit irréversible, les juges contribuent à leur manière à faire émerger la notion de fonds libéral.

CONCLUSION DU CHAPITRE II

162. Il apparaît au terme de ce chapitre que la notion de fonds libéral n'a pas encore été consacrée en droit camerounais. Et pourtant, il apparaît à l'analyse des textes et de la jurisprudence que des indices favorables, au mouvement de patrimonialisation des activités libérales ne manquent pas.

Sur le plan textuel, l'on constate que le législateur étend certaines règles et institutions d'essence commerciale aux activités libérales. On peut entre autres citer le statut des baux commerciaux, la procédure d'injonction de payer, les procédures collectives, le registre de commerce etc. A contrario sur le plan jurisprudentiel, l'on évoque très souvent la reconnaissance de la validité des opérations de transmission de clientèles civiles, l'intégration du cabinet dans la communauté conjugale. Toutes ces mutations, textuelles ou jurisprudentielles, constituent à l'évidence une illustration assez éclairante que le droit camerounais est en train de s'adapter aux faits, et que la consécration de la notion de fonds libéral est certainement imminente.

CONCLUSION DU TITRE II

163. En conclusion , nous pouvons dire que, si le droit camerounais demeure encore hostile au mouvement de patrimonialisation des activités libérales, ce n'est point tant par rigueur scientifique que par souci de préserver une certaine orthodoxie, voire une certaine pureté de la profession libérale. L'hostilité du droit à l'égard de cette notion n'est donc qu'apparente ; pour mieux s'en convaincre, il suffit pour cela de constater que les juges, tout en rappelant leur attachement au principe séculaire d'extra patrimonialité et d'incessibilité des clientèles civiles reconnaissent néanmoins la validité de certaines opérations de transmission de clientèles et considèrent, le cabinet comme un bien susceptible d'être intégré dans la communauté conjugale.

164. La doctrine a jugé cette attitude faite de contradictions comme relevant d'une simple « hypocrisie » des juges. Et pour certains auteurs, une telle attitude ne se justifie plus face à un mouvement dont on dit irréversible et à l'égard duquel certains textes semblent favorables. D'ailleurs, en plus de la commercialisation des activités libérales déjà amorcée par les textes, il y a un pas important qui vient d'être franchi en jurisprudence, notamment avec l'arrêt de la cour de cassation du 7 Novembre 2000 qui valide expressément les opérations de cession de clientèles médicales. Tout ceci illustre à suffire qu'il faudrait une simple volonté du législateur à laquelle on pourrait associer le courage des juges pour que la patrimonialisation des activités libérales s'intensifie et ne soit plus un tabou.

CONCLUSION GENERALE

165. La patrimonialisation des activités libérales amorcée en pratique pour les raisons sus-évoquées, ne s'est pas encore traduite en droit par la reconnaissance de la validité de ce mouvement. Malgré ce retard du droit sur les faits393(*), on peut souligner que d'importances mutations sont entrain de s'opérer tant en jurisprudence qu'au niveau des textes. Et parmi celles-ci, on peut notamment citer l'extension par le législateur de certaines règles et institutions d'essence commerciale aux activités traditionnellement civiles394(*), la réification jurisprudentielle de la clientèle civile. En effet, triomphant des arguments, d'extra commercialité voire d'impossible commercialité de la clientèle classiquement invoqués, la jurisprudence n'hésite plus à reconnaître la validité des opérations de transmission de clientèles libérales395(*). De même, n'hésite-t-elle plus à intégrer le cabinet du praticien libéral non seulement dans la masse successorale, mais également dans la communauté conjugale.

166. Mais il est à noter que toutes ces mutations ne se sont pas encore traduites sur le plan juridique par la reconnaissance d'une notion de fonds libéral en droit camerounais. D'ailleurs, ni la doctrine, ni les juges, ni a fortiori le législateur n'évoquent cette notion. Si cette étape n'a pas encore été franchie, ce n'est point tant par rigueur scientifique, c'est davantage parce que le droit camerounais voudrait toujours maintenir inaltérées la pureté et l'orthodoxie des professions libérales.

Cependant, si cette hostilité jurisprudentielle à l'égard de la patrimonialisation des activités libérales peut se justifier, elle ne se comprendrait plus pour au moins deux raisons. La première raison viendrait du fait que, le fonds libéral, à l'instar du fonds de commerce, serait potentiellement porteur d'avantages à la fois pour le praticien et pour les tiers396(*). La seconde raison résulterait du fait que d'autres fonds voisins au fonds de commerce sont entrain d'être consacrés dans certains pays comme la France. On pense notamment au fonds artisanal, au fonds agricole. De plus en plus, une réflexion est même menée sur la possibilité de la consécration en France d'un « fonds d'enseignement»397(*).

Mais il est à noter que, si la consécration de la notion de fonds libéral est souhaitable parce que dictée par les faits et une bienveillance du juge et du législateur, celle-ci ne doit pas néanmoins se faire par mimétisme aveugle à la notion de fonds de commerce. De manière plus explicite, la réglementation du fond libéral ne devrait pas recopier à l'identique le régime du fonds de commerce, au risque pour celle-ci de reproduire les limites de cette notion398(*).

Le législateur devrait donc certes s'inspirer de la législation relative au fonds de commerce, mais il devrait faire un choix judicieux entre toutes les règles régissant cette dernière notion. Il ne devrait donc retenir que celles qui peuvent permettre une meilleure valorisation de l'activité des praticiens libéraux, sans toutefois remettre fondamentalement en cause les piliers classiques des professions libérales.

167. Au demeurant, on pourrait penser que si ces mutations sociale et juridique s'accentuaient, il arriverait un jour où une notion de « fonds professionnel » pourrait être consacrée. Ce qui érigerait la profession en critère de la commercialité399(*) et constituerait un pas important vers la fusion du droit civil et du droit commercial. C'est dire que si le législateur consacre la notion de fonds libéral, il y aurait progrès du droit400(*)civil et commercial.

BIBLIOGRAPHIE

I- LEGISLATION

- Code civil

- Code général des impôts

- Acte uniforme du 17 avril 1997 relatif au droit commercial général, J. O OHADA, n° 1, 01 /10 /97.

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- Décret n° 79-448 du 5 novembre 1979 portant organisation de la profession d'huissier de justice.

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- Décret n° 95-034 du 24 février 1995 postant organisation de la profession de notaire.

- Arrêté interministériel N° 162-A-MSP-DS et n° 24-A-MINCI-DPPM du 21 mai 1987 portant fixation dans le secteur sanitaire privé de la valeur des lettres-chefs correspondant aux actes médicaux, chirurgicaux ou de spécialités ainsi qu'aux analyses médicales figurant à la nomenclature des actes professionnels.

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III- OUVRAGES SPÉCIALISÉS

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IV- THÈSES, MÉMOIRES, RAPPORTS

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V- ARTICLES DE DOCTRINE

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VI- JURISPRUDENCES

 

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2. Trib. Civ. de la Seine, 27 Juin 1956, JCP, 9624, note Jean SAVATIER.

 

3. CA. de Montpellier, 8 Juin 1994, Bull. Civ.

 

4. Civ. 1ère, 29 Avril 1954, RTDCIV. 1954, p. 471, Obs. Lagarde.

 

5. CA de Limoges, 10 mai 1993, Dalloz 1994, p 161, note B. BEIGNIER.

 

6. Civ. 7 juin 1995, Dalloz 1995, p. 561, note B. BEIGNIER.

 

7. Civ. 1er Oct. 1996, Droit et Patrimoine, décembre 1996, n° 1533, p.76, Obs. P. CHAUVEL.

 

8. Cass civ, 1ère, 7 nov 2000, woessner c/M. SIGRAND, Bull. civ, n° 283, p.183.

 

9. Trib. civ. de Foix, 31 Mars 1948, JCP 1948, Ed. G.II, 4419, note Jean CARBONNIER.

 

10. Civ. 1ère 8 janvier 1985, Dalloz 1986, p. 417 note MEMETEAU, J. PENNEAU, J. MESTRE.

 

11. CA Pau 4 octobre 1954, JCP 1955, II, 8470, note Jean SAVATIER.

 

12. Civ. 1ère 9 mai 1961, RTDCiv 1963, p. 213, Obs. P. Julien.

 

13. Civ. 1ère 17 mai 1961, Gaz. Pal 1961, II, 213, Obs. G. CORNU.

 

14. Trib. Civ. de Lille, 12 mars 1957, JCP 1958, II, 10433, note A. COLOMER.

 

15. Civ. 1ère 12 janvier 1994, p. 313, note R. CABRILLAC .

 

16. Civ. 1ère 29 avril 1956, Dalloz 1956, p 523, note PERCEROU.

 

17. Civ. 1ère 10 mai 1984, Bull. civ, I, 1984 n° 152.

 

18. Civ. 1ère 25 mai 1987, JCP 1988, Ed. G. II, 20925.

 

19. Civ. 1ère 12 janvier 1994, Dalloz 1994, p 313, note R. CABRILLAC

L'INDEX ALPHABETIQUE

TABLE DES MATIERES

SECTION I : LES ORIGINES DU MOUVEMENT DE MATÉRIALISATION DES PROFESSIONS LIBÉRALES 10

Paragraphe I : Les piliers traditionnels des professions libérales 11

A/ Le critère général des professions libérales : le lien de confiance entre le praticien et son client 11

B/ Les critères dérivés: les caractères intellectuel, d'indépendance et de désintéressement 12

1) Les caractères intellectuel et d'indépendance 13

2) Le caractère de désintéressement 13

Paragraphe II: Les conséquences de la matérialisation : la ruine des piliers classiques 13

A) L'étroitesse des piliers classiques 13

1) L'obsolescence du critère général 13

2) L'insuffisance des critères dérivés 13

B) Le renouvellement des critères classiques a l'aune des mutations sociales 13

1) Le renouvellement du critère général 13

2) Le rajeunissement des critères dérivés 13

SECTION II: LES MANIFESTATIONS DE LA MATÉRIALISATION 13

Paragraphe I : La prégnance des éléments objectifs dans l'attrait de la clientèle libérale 13

A) L'appropriation par les praticiens libéraux des modes de financement d'essence commerciale 13

1) Le caractère coûteux des investissements 13

2) La coloration spéculative de l'activité libérale 13

B/ La place centrale des éléments incorporels dans l'attrait de la clientèle libérale 13

1) Le droit au bail 13

2) Le nom libéral et l'enseigne 13

Paragraphe II : La perturbation des règles traditionnelles de la responsabilité 13

A/ Une responsabilité classiquement basée sur l'inexécution d'une obligation de moyens 13

B/ Une responsabilité actuellement basée sur l'inexécution d'une obligation résultat 13

CONCLUSION DU CHAPITRE I 13

SECTION I : LES RAISONS ET LES CONSÉQUENCES DU REGROUPEMENT DES PRATICIENS LIBÉRAUX 13

Paragraphe I : Les raisons du regroupement des praticiens libéraux 13

A/ Les raisons sociologiques du regroupement des professionnels libéraux 13

B/ Les raisons d'ordre économique du regroupement des professionnels libéraux 13

PARAGRAPHE II : LES CONSÉQUENCES DE L'EXERCICE EN ÉQUIPE DES PROFESSIONS LIBÉRALES 13

A/ La responsabilité individuelle du praticien 13

B/ La responsabilité de l'équipe de praticiens 13

Section II : Les formes juridiques permettant un exercice collectif des professions libérales 13

Paragraphe I : L'exercice des professions libérales au sein des sociétés civiles professionnelles 13

A/ Les sociétés civiles professionnelles de droit commun 13

1) La légère protection du lien personnel lors de la constitution des SCP 13

2) La forte dépersonnalisation des activités libérales pendant le fonctionnement et la dissolution de la SCP 13

B/ Les sociétés civiles professionnelles aux régimes particuliers 13

1) Les sociétés civiles professionnelles de moyens 13

2) Les sociétés civiles interprofessionnelles 13

PARAGRAPHE II : L'EXERCICE DES PROFESSIONS LIBÉRALES AU SEIN DES SOCIÉTÉS À OBJET CIVIL ET À FORME COMMERCIALE : LES SEL 13

A/ La structure des SEL 13

1) La typologie des SEL 13

2) Formation et fonctionnement des sociétés d'exercice libéral 13

B/ LES ASSOCIES DES SEL 13

1) Le statut des associés des SEL 13

2) Les fonctions des associés des SEL 13

CONCLUSION DU CHAPITRE II 13

CONCLUSION DU TITRE I 13

SECTION I : LA PROHIBITION PRÉTORIENNE DES OPÉRATIONS DE CESSION DE CLIENTÈLE CIVILE 13

Paragraphe I : Les raisons de la prohibition des cessions de clientèles civiles 13

A/ Le rôle excessif de l'intuitus personae dans la relation libérale 13

B/ De l'extracommercialité à l'impossible commercialité de la clientèle civile 13

Paragraphe II : la sanction du non respect de la prohibition de cession de clientèle civile. 13

A/ la nature de la sanction des opérations de transfert de clientèle civile 13

B/ les effets de la nullité des conventions de cession de clientèle civile 13

Section II : La démesure de l'hostilité du droit a l'égard d'une notion aux multiples vertus 13

Paragraphe I : L'utilité du fonds libéral pour un praticien 13

A) L'utilité du fonds libéral pour le praticien encore en activité 13

B/ l'utilité du fonds libéral en cas de cessation d'activités par le praticien libéral 13

Paragraphie II : L'utilité du fonds libéral à l'égard des tiers 13

A/ Le fonds libéral, un instrument d'amélioration de la prestation reçue par les clients 13

B/ Le fonds libéral, une assiette possible de sûretés 13

CONCLUSION DU CHAPITRE I 13

SECTION I : LA CONTRIBUTION LÉGISLATIVE À LA PATRIMONIALISATION DES ACTIVITÉS LIBÉRALES 13

Paragraphe I : La contribution législative à l'extension des règles de droit commercial aux activités libérales 13

A/ Les manifestations du mouvement de commercialisation des activités libérales 13

1) L'extension par le législateur OHADA du statut des baux commerciaux à tous les professionnels 13

2) L'extension de certaines procédures d'essence commerciale aux professionnels libéraux 13

B/ Les conséquence de la commercialisation des activités libérales 13

1) L'apparition à la charge du praticien d'obligations d'essence commerciale 13

2) La commercialisation des activités libérales, un facteur d'émergence de nouveaux clivages disciplinaires 13

Paragraphe II : La contribution législative a l'érosion des piliers classiques des professions libérales 13

A/ La contribution législative à la matérialisation des professions libérales 13

B) L'atteinte législative au caractère de désintéressement des professions libérales 13

1) La reconnaissance législative d'une variété de rémunérations aux praticiens libéraux 13

2) La protection législative du caractère de désintéressement des professions libérales. 13

Section II : La bienveillance du juge à l'égard d'une notion de fonds libéral 13

Paragraphe I : La reconnaissance de la validité des opérations de transmission de clientèles civiles 13

A/ Les cessions de clientèles civiles réalisées par le praticien lui-même. 13

1) La reconnaissance prétorienne des mécanismes de cession indirecte de clientèle civile 13

2) L'admission prétorienne des cessions directes 13

B/ Les cessions de clientèles civiles opérées par les héritiers du praticien 13

1) L'amoralisme des réalisations de cabinets par les héritiers des praticiens 13

2) La reconnaissance prétorienne de la validité des réalisations de cabinets faites par les héritiers 13

Paragraphe II : L'admission prétorienne du cabinet au sein de la communauté conjugale 13

A/ En dépit de l'âpreté des débats doctrinaux sur l'admission du cabinet dans la communauté conjugale ... 13

1) Les thèses hostiles à l'entrée du cabinet dans la communauté conjugale 13

2) Les thèses favorables à l'entrée du cabinet dans la communauté conjugale 13

B/ ... Le juge autorise subtilement l'entrée des cabinets dans la communauté conjugale 13

1- La reconnaissance jurisprudentielle d'une valeur patrimoniale à la clientèle libérale pendant le mariage 13

Le sort du cabinet à l'issue du mariage entre le praticien et son conjoint 13

CONCLUSION DU CHAPITRE II 13

CONCLUSION DU TITRE II 13

CONCLUSION GENERALE 13

I- LEGISLATION 13

II- OUVRAGES GÉNÉRAUX 13

III- OUVRAGES SPÉCIALISÉS 13

IV- THÈSES, MÉMOIRES, RAPPORTS 13

V- ARTICLES DE DOCTRINE 13

VI- JURISPRUDENCES 13

L'INDEX ALPHABETIQUE 13

* 1 JARRASSON (Ch), La notion d'arbitrage, Paris, LGDJ, Bibl. de droit privé, tcxcvIII , n°35, p. 25.

* 2 VIALLA (F) L'introduction du fonds libéral en droit positif français, Paris, LITEC, coll. Biblio. Dr entreprise, T 39, 1999, Passim.

* 3 Ibid. , n°33 , p28.

* 4 VIALLA (F), ibid., n°32, p. 36.

* 5 CHAPLET (P), Ce qu'il faut entendre par la patrimonialité du cabinet de l'avocat, Dalloz 1987, chron.185 ; p. 186

* 6 TOULEMON (A), L'organisation d'une profession libérale, Gaz. Pal. 1968 ,II, .doctr.p.96.

* 7 BATHELEMY (J), Contrat de travail et activité libérale, JCP 1990, chron., 3450.

* 8 DAIGRE (J-J), Patrimonialité des clientèles civiles : du cabinet au fonds libéral, droit et patrimoine, déc .1995, n°33, p.36 et s.

* 9 BATHELEMY (J), ibid.

* 10 LYON- CAEN (Ch), De l'influence du droit commercial sur le droit civil depuis 1804, Livre du centenaire du Code civil, p.205 et s. ; MARTY(J.P.), La distinction du droit civil et du droit commercial dans la législation contemporaine, RTD.com. 1981, p.681 ; JAUFFRET (A), L'extension du droit commercial à des activités traditionnellement civiles, Mélange Kayser 1979, p.59 et s. CABRILLAC (M) , Vers la disparition du droit commercial ? Mélanges Jean Foyer, Paris, PUF, 1997, p.331 et s.

* 11 LAMBERT-PIERI (M-C), L'avenir de la distinction du titre de la finance dans la communauté légale, Dalloz. 1982, chron. , p. 65 et s.

* 12 JARROSSON (Ch), op.cit., n°451 p.216.

* 13 PARAIN-VIAL (J), Note sur l'épistémologie des concepts juridiques, arch. de philo. du droit, 1959, p.131.

* 14 BERGEL (J-L), Différence de nature (égale) différence de régime, RTDciv. 1984, p.225.

* 15JARROSON (Ch), op.cit., n°453, p. 217 ; l'auteur souligne que notion et idée peuvent parfois être considérées comme des synonymes.

* 16 Ibid., n°454.

* 17 VAN DE KERCHOVE (M) et OST (F), Système juridique entre ordre et désordre, Paris, PUF, Coll. « les voies du droit », 1988, pp. 47-147.

* 18 WALINE (M), Empirisme et conceptualisme dans la méthode juridique : faut-il tuer les catégories juridiques ?. Mélanges J. Dabin, T 1, 1963. Malgré les nombreuses critiques adressées au conceptualisme, celui-ci n'en a pas moins été maintenu, voire parfois magnifié en doctrine. V. dans ce sens RIVERO (J), Apologie pour les faiseurs de systèmes, Dalloz. 1951, Chron., p. 99.

* 19 BERGEL L (J-L), Différence de nature (égale) différence de régime, RTDciv 1984, n°3 p.258.

* 20 JARROSSON (Ch), Ibid, n° 33 pp.24-25.

* 21 ATIAS (Ch) et LINOTTE (D), Le mythe de l'adaptation du droit aux faits, Dalloz. 1977, Chron. 35, pp. 251-258

* 22 GAUDEMET (J), Etudes juridiques et culture historique, arch. de philo. du droit, T 4, 1959, p. 15 ; BERGEL (J-L), Théorie générale du droit, Paris, Dalloz, 1985, n°105 p. 117; SAVATIER (R), Les métamorphoses ..., chap. XI, n° 319 p. 311,: l'auteur souligne que l'histoire est un « instrument de comparaison et l'initiation à une certaine genèse ».

* 23 SAVATIER (R), L'introduction et l'évolution du bien clientèle dans la construction du droit positif français, Mélanges Maury, T. II, n°3  p. 561,: « d'une manière paradoxale au regard de l'esprit des professions libérales, les médecins paraissent avoir parfois ... devancer les commerçants... ».

* 24 VIALLA (F), op. cit.; p. 255, Le FLOCH (P), Le fonds de commerce, thèse droit, Paris , 1898, pp. 8 - 5, citée par François VIALLA.

* 25 SAVATIER (R), Les métamorphoses ..., 2e série, Chap. VII, p.196.

* 26 SAVATIER (R), Ibid.

* 27 SAVATIER (R), Le droit et l'accélération de l'histoire, Dalloz 1951, pp. 29-32

* 28 SAVATIER (R), Les métamorphoses, 2e série, chap. VII, p. 196.

* 29 SAVATIER (R), Ibid. p. 196.

* 30 SAVATIER (R), L'introduction et l'évolution du bien clientèle dans la construction du droit positif français, Mélanges Maury, p. 20 et s.

* 31 VIALLA (F), op. cit., p. 20 et S.

* 32 Mais on assiste depuis quelques temps à l'effritement de cette distinction ; voir dans ce sens, JAUFFRET (A), L'extension du Droit Commercial à des activités traditionnellement civiles, Mélanges KAYSER, T2, p. 60 et S. ; THALLER (E), De l'attraction exercée par le Code civil et par ses méthodes sur le droit commercial, Livre du centenaire du code civil, p. 225 et s. Certains prédisent même la disparition du droit commercial et la naissance du droit des affaires, CABRILLAC (M), vers la disparition du droit commercial ? Mélanges Jean Foyer, Paris PUF, 1997, pp.329-339

* 33 VIALLA (F), Ibid. n° 29 p. 20, « Dans une conception classique, le principal trait distinctif de la profession libérale est une donnée psychologique qui apparaît comme le critère général de la profession libérale auquel des critères dérivés sont adjoints ».

* 34 VIALLA (F), Ibid., n° 36 p. 30.

* 35 VIALLA (F), Ibid., n° 36 p. 32.

* 36 SAVATIER (R), les métamorphoses ..., 2e série, chapitre III, p.196 : l'auteur considère que la profession libérale représente « ... une aristocratie d'ordre, à la fois spirituelle et intellectuelle ... ».

* 37 VIALLA (F), op. cit., n° 33 p. 28,; «  le praticien gratifie son client d'une prestation, ce dernier à son tour va consentir une libéralité au profit du professionnel non pas pour le rémunérer mais pour l'honorer » d'où l'appellation d'honoraire désignant les sommes perçues par le praticien en contrepartie de la prestation fournie. L'idée de profit serait donc étrangère à la profession libérale, on peut à ce propos reprendre les termes du fameux serment d'Hippocrate : « ... je donnerais mes soins gratuits à l'indigent... ».

* 38 CHAPLET (P), Ce qu'il faut entendre par la patrimonialité du cabinet d'avocat, Dalloz, chronique, 1957 : « le vrai symbole de l'avocat est de consulter entre des murs nus. C'est dans son tête-à-tête avec le client que se forge la défense. Le reste demeure invisible même s'il est indispensable : l'avocat n'attire que par les traits qui l'individualisent ».

* 39 SAVATIER (RJ), Qu'est ce qu'une profession libérale ?, Revue Projet, 1966, p. 207.

* 40 SAVATIER (R), Les métamorphoses..., 2e série, chap. III, p. 196.

* 41 SAVATIER (R), Ibid.

* 42 BARTHELEMY (J), Contrat de travail et activité libérale, JCP 1990, chron., 3450.

* 43 Ibid.

* 44 VIALLA (F), op. cit ; p. 28, n° 33.

* 45 Ibid.

* 46 VIALLA (F), op. cit., n° 33 p. 29.

* 47 BARTHELEMY (J), op. cit.

* 48 SAVATIER (R), Le droit et l'accélération de l'histoire, Dalloz 1951, Chron, pp. 29-32.

* 49 VIALLA (F), op. cit., p. 87 : « Les exigences du client ne se limitaient pas à une rapidité accrue, il souhaite, encore une prestation d'ordre scientifique, dans laquelle l'aléa est réduit à sa plus simple expression ».

* 50 VIALLA (F), Ibid., n° 80 p. 88.

* 51 SAVATIER (R), Les métamorphoses ..., 2e séries, chap. VII, p. 189.

* 52 VIALLA (F), op. cit., p. 33.

* 53 VIALLA (F), Ibid., p. 33.

* 54 VIALLA (F), Ibid., p. 34.

* 55 SAVATIER (R), Les métamorphoses ..., 2e série, chap. VII, p. 198.

* 56 VAGOGNE (J), Les professions libérales, Paris, PUF, coll. Que sais-je ? 1984, p. 14.

* 57 BARTHELEMY (J), Contrat de travail et activité libérale, JCP 1990, chron. , 3450.

* 58 Ainsi, Rabelais écrivait-il dans le tiers livre à propos d'une discussion entre ·panurge et le Docteur Rondibilis : « Panurge s'approcha de luy et luy mit en main sans mot dire quatre nobles à la rose. Rondibilis les print très bien, puis luy dist en effroy, comme indigné : " hé, Hé, Hé ! Monsieur, il ne fallait rien. Grand mercy toutefois. De méchantes gens jamais je ne prends rien. Rien jamais des gens bien je ne refuse. Je suis toujours à votre commandement. - en poyant, dist Panurge. - cela s'entend « respondit Rondibilis ».

* 59 V. loi n° 90/059 du 19 décembre 1990 portant organisation de la profession d'avocat ; décret n°79/448 du 05 novembre 1979 portant organisation de la profession d'huissier de justice ; décret n° 95/034 du 24 février 1995 portant organisation de la profession de notaire.

* 60 DAIGRE (J-J), Patrimonialité des clientèles civiles : du cabinet au fonds libéral, Droit et Patrimoine, Déc. 1995, n° 33, p. 36 et S l'auteur affirme que : « la profession libérale est depuis longtemps, un métier dont on vit. La rémunération est la contre partie d'un travail ».

* 61 VAGOGNE (J), op. cit., p.19 : « Les professionnels libéraux se doivent de concilier tradition de désintéressement et recherche d'une rémunération dans leur activité. La ligne de partage des eaux est donc parfois floue entre activité commerciale et activité libérale ».

* 62 VIALLA (F), op. cit., n° 45 p. 47,.

* 63 BARTHÉLEMY (J), op. cit., 3450.

* 64 BARTHELEMY (J), Ibid. L'auteur estime qu'il y a compatibilité entre salariat et l'exercice des professions libérales.

* 65 BARTHELEMY (J), Ibidem.

* 66 Cass., Soc. 7 Mars 1979, Tapon C/ Cuasse, Bull. Civ., n° 205.

* 67 BARTHELEMY (J), op. cit.

* 68 BARTHELEMY (J), Ibid.

* 69 SAVATIER (R), Le droit et l'accélération de l'histoire, Dalloz1951, chron. pp29-32

* 70 SAVATIER (R), Les métamorphoses ... , pasim .

* 71 CHAPLET (P), op. cit., p. 185.

* 72 SAVATIER, Les métamorphoses ..., 2e série, chapitre VII, p. 186.

* 73 VIALLA (F), op. cit, n° 83 p. 92,: « ...La technique, simplifie et accélère la prestation en réduisant l'aléa ».

* 74 LAMBOLEY (A), op. cit, n°14  p. 10,: « Les difficultés que rencontrent les professions libérales à rénover leur cadre de travail par un équipement suffisant en locaux, appareillage et personnel,s'explique par le poids des traditions et de la routine, mais surtout par la nécessité de réunir un capital important ».

* 75 CHAPLET (P), op. cit, p. 185.

* 76 ALCADE (F), op. cit, n° 148 p. 143,.

* 77 ALCADE (F), Ibid, n° 148 p. 143,.

* 78 CHAPLEt (P), Ibid.

* 79 ALCADE (F), Ibid, p. 137.

* 80 CHAPLET (P), Ibid.

* 81 LAMBOLEY (A), op . cit, n° 14 p. 10,.

* 82 ALCADE (F), op. cit, p. 137, SAVATIER (J), Qu'est-ce qu'une profession libérale ? Revue Projet, p. 451 et S.

* 83 Au Cameroun, les praticiens libéraux paient la patente, les droits d'enregistrement sur leurs différents actes et mutations, l'IRPP dans la catégorie des BNC.

* 84 ffff

* 85 JAUFFRET (A), L'extension du droit commercial à des activités traditionnellement civiles, Mélanges Kayser, T2, p. 63 et S.

* 86 VIALLA (F), op. cit, p. 265 ; l'auteur souligne en effet que le parallélisme des évolutions n'impose pas un parallélisme de traitement parce que la notion de fonds de commerce est artificielle, le fonds libéral ne doit donc pas reproduire à l'identique le modèle commercial.

* 87 VIALLA (F), op. Cit. , n° 86 p. 95.

* 88 SAVATIER (R), Essai d'une présentation nouvelle des biens incorporels, RTD civ. 1958, n°34, p. 349.

* 89 Voir par exemple l'article 1737 du Code civil.

* 90 BERGEL (J-L), Théorie générale du droit, paris, Dalloz, 1985, n° 25, p. 32. : « Dans certains cas, le droit est indifférent à toute idée de justice... Il arrive enfin que le droit repousse toute finalité de justice au profit de l'ordre, de la sécurité, de la paix ... ».

* 91 SAVATIER (R), Ibid.

* 92 VIALLA (F), op. cit., n° 86 , p. 95; V. l'article 1737 du Code civil.

* 93 RAYNARD (R), Les locaux de l'entreprise libérale, Colloque sur l'entreprise libérale, rev. de l'ACE, p. 30 : « C'est donc à un statut protecteur emprunté que les entreprises libérales vont avoir recours ».

* 94 Sur la dissociation du nom et de l'enseigne, V. trib. Com. Lyon, 19 déc. 1949, D. 1930. 275, note Ripert.

* 95 DERRUPE (J), Fonds de commerce, Dalloz, répertoire de droit commercial, T3, 1998, n° 34, p. 8.

* 96 DERRUPE (J), Ibid. Sur la dissociation du nom et de l'enseigne, V. trib. com. Lyon, 19 déc., 1949, D. 1950, 275, note Ripert.

* 97 DERRUPÉ (J), Ibidem.

* 98 VIANDIER (A), Actes de commerce, commerçants et activité commerciale, Paris, PUF, 1988, n° 190, p. 204.

* 99 NGUEBOU (J), Le droit commercial général dans l'Acte Uniforme OHADA, Yaoundé, PUA, 1998, p. 42.

* 100 NGUEBOU (J), Ibid, p. 42.

* 101 VIANDIER (A), Ibid.

* 102 VIALLA (F), op. Cit., n° 94, p. 106.

* 103 SAVATIER (R), Les métamorphoses ..., 2ème série, chap. VII, p. 198.

* 104 SAVATIER (J), Contribution à une étude juridique de la profession libérale, 10 ans de conférence d'agrégation, études de droit commercial offerte à J. HAMEL, Dalloz 1961, p. 121.

* 105 SAVATIER (J), Ibid.

* 106 VIALLA (F), op. cit, n°92, p. 103,.

* 107 V. MAZEAUD (H), L'obligation générale de prudence et de diligence et les obligations déterminées, R.T.D.Civ., 1936 ; Passim ; TUNC (A), la distinction des obligations de résultat et des obligations de diligence, Sem. Jur.1945, I, p.449.

* 108 WEIL (A) et TERRE (A), Droit civil, les obligations, Paris, Dalloz, 4e Ed., 1986, p.4.

* 109 VIALLA (F), Ibid.

* 110 VIALLA (F), op. cit, p.103.

* 111 VIALLA (F), Ibid., p.102.

* 112 VIALLA (F), Ibid.

* 113 VIALLA (F), Ibid.

* 114 SAVATIER (R), Les métamorphoses..., p.187.

* 115 WEIL (A) et TERRE (F), op. cit, p. 403 et s.

* 116 VIALLA (F), op. cit, n° 36 p. 32.

* 117 VIALLA (F), Ibid. , n° 99 p. 114.

* 118 En effet, des non professionnels peuvent acquérir des actions ou des parts sociales auprès des sociétés ayant pour objet l'exercice d'une profession libérale.

* 119 FOYER (J), L'évolution des professions libérales et leur exercice en société, Mélanges Giraud , Ann. Fac.dr.Lille 1966, p. 156 et s. ; SAVATIER (R), Les contrats de conseils professionnels en droit privé, Dalloz. 1972, Chron. 137.

* 120 VIALLA (F), op. cit., n° 100 p. 116.

* 121 TOULEMON (A), l'organisation d'une profession libérale, Gaz.Pal. 1968, 2ème sem ; Doctr. p. 96

* 122 CARBONNIER (J), Flexible droit (pour une sociologie du droit sans rigueur), Paris, LGDJ, 10e Ed. 1995, pp.11-94.

* 123 FOYER (J), op. cit., p.156 et S.

* 124 VIALLA (F), op. cit., n° 99 p. 114,.

* 125 En France, la spécialisation touche même les professions d'avocat. Sur la question, voir le décret n° 91-1197 organisant la profession d'avocat, J. O. du 28 novembre 1991, l'arrêté du 08/06/1993 fixant la liste des mentions de spécialisation en usage dans la profession d'avocat, l'article 1er de cet arrêté fixe un certain nombre de spécialités reconnues : avocat spécialiste en droit des personnes, en droit pénal, en droit immobilier, en droit rural, en droit commercial, en droit des sociétés, en droit fiscal...

* 126LAMBOLEY (A), La société civile professionnelle, un nouveau statut de la profession libérale, Biblio. de droit de l'entreprise, Paris, LITEC, T3, 1975, n°11 p.9.

* 127 VIALLA (F), Ibid. , n° 99 p. 115.

* 128 Ce constat est amplifié par les fusions successives de professions dans le monde juridique, notamment fusion des professions d'avocats, d'avoués et agrées, loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, J. O. 5 Janvier 1972, p. 131.

* 129 Trib. Civ. de la Seine, 27 juin 1956, JCP, 9624, note J. SAVATIER.

* 130 ALCADE (F), La profession libérale en droit fiscal, Biblio. De droit de l'entreprise, Paris, LITEC, T15,1979 n°141 p. 137.

* 131 SAVATIER (J), cité par VIALLA (F), op.cit. , n° 100 p. 116.

* 132 VIALLA (F), Ibid. , n° 100 p. 116.

* 133 ALCADE (F) cité par VIALLA (F), Ibid. , n° 84 p. 93.

* 134 VIALLA (F) , op. cit., n° 878 p. 84.

* 135 TOULEMON (A), op. cit. , p. 96.

* 136 VIALLA (F), Ibid. , n° 100 p. 116.

* 137 LEYMARIE (F), Anesthésie et responsabilité civile des médecins en clientèle privée, JCP 1974, II, 2630 ; SOUBIRAN (M.-F), Quelques réflexions suscitées par l'exercice de la médecine au sein d'un groupe ou d'une équipe, JCP 1976, I, 2830.

* 138 SOUBIRAN (M.-F), Ibid.

* 139 JAUFFRET (A), L'extension du droit commercial à des activités traditionnellement civiles, Mélanges KAYSER, T2, p. 63 et S ; TALLON (D), Réflexions comparatives sur la distinction du droit civil et du droit commercial, Mélanges Jean FOYER, Paris, PUF, 1997, pp. 649-660 ; CABRILLAC (M), vers la disparition du droit commercial, Mélanges  J. FOYER, Paris, PUF, 1997, p. 332 et S.

* 140 SCHMIDT (D), Les responsabilités dans les groupes de sociétés, Actes de la journée d'Etudes du 19 Novembres 1993 organisée par le laboratoire d'Etudes et de recherches appliquées au droit privé de l'université de LILE II et de l'Ecole de Hautes Etudes Commerciales du Nord , Paris, LGDJ, 1994,pp.73-76.

* 141 SOUBIRAN (M.-F), op. cit.

* 142 SOUBIRAN (M.-F), op. cit.

* 143 LEYMARIE (F), op. cit.

* 144 LEYMARIE (F), Ibid..

* 145 LEYMARIE (F), Ibid.

* 146 SOUBIRAN (M.-F), Ibid.

* 147 LAYMARIE (F), Ibid.

* 148 SOUBIRAN (M.-F), Ibidem.

* 149 SOUBIRAN (M.-F), op. cit.

* 150 LEYMARIE (F), op.cit.

* 151 CHABAS (F), Vers un changement de nature de l'obligation médicale, JCP 1973, I, 2541.

* 152 SAVATIER (R), Le droit et l'accélération de l'histoire, Dalloz 1951, Chron. pp. 29-32; ATIAS (Ch) et

LINOTTE (D), Le mythe de l'adaptation du droit aux faits,  Dalloz. 1977, p. 253.

* 153 LOUIS-LUCAS (P), Vérité matérielle et vérité juridique, Mélanges René SAVATIER, Dalloz, 1965, pp. 583-600.

* 154 Art. 4 L ; n° 90-059 du 19 décembre 1990 portant organisation de la profession d'avocat ; art. 64 (4) Décret n° 95-034 du 24 février 1995 portant organisation de la profession de notaire.

* 155 Loi française de 1966.

* 156 GUYON (Y), Les SCP , Dalloz Société civiles, 1994, n° 4 p. 2,.

* 157 GUYON (Y), Ibid , n° 29 p. 6.

* 158 GUYON (Y), Ibid.

* 159 GUYON (Y), Ibid.

* 160 COZIAN (M), Images fiscales : transparence, semi-transparence, translucidité et opacité des sociétés, JCP 1976, 2817.

* 161 GUYON (Y), op. cit. , n° 126 p. 17.

* 162 Art. 78 (2) Décret n° 95-034 du 24 Février 1995 organisant la profession de notaire.

* 163 Art. 79 (1) (2) et (4) Décret précité.

* 164 Art. 80, Décret du 24 Février 1995 précité.

* 165 Art. 82, Décret précité.

* 166 GUYON (Y), SCP, Dalloz sociétés civiles, 1994, n° 5 p. 2.

* 167 CHEMINADE (Y), La Société civile de moyens, JCP 1971, I. 2405.

* 168 GUYON (Y), Ibid. , n° 116 p. 19.

* 169 Art. 870 AUDSC.

* 170 Art. 872 AUDSC.

* 171 Art. 869 AUDSC.

* 172 Art. 871 AUDSC.

* 173 GUYON (Y), op. cit. , n° 155 p. 21.

* 174 Ibid.

* 175 SAINTOURENS (B), Société d'exercice libéral, Recueil Dalloz sociétés civiles, janv. 1994, n° 1 p. 2,.

* 176 Ibid.

* 177 Ibid.

* 178 Ibid.

* 179 Cf. art. 1108 C. civ.

* 180 JEANDIDIER (W), L'imparfaite commercialité des sociétés à objet civil et à forme commerciale, Dalloz. 1979, Chron. 7.

* 181 Art. 1er L. Française du 31 Décembre 1990 régissant les SEL.

* 182 Art. 1er al 3 L. du 31 décembre 1990.

* 183 SAINTOURENS (B), Sociétés d'exercice libéral, Recueil Dalloz sociétés civiles, janv. 1994, n° 27 p. 6,.

* 184 Ibid., n°23 p. 5,.

* 185 CHAMPAUD (C), Obs. RTD Civ 1991, 63, cité par B. SAINTOURENS.

* 186 SAINTOURENS (B), Ibid.

* 187 Ibid, p. 4, n° 19.

* 188 REIGNE (P) et DELORMET (T), Réflexions sur la distinction de l'associé et de l'actionnaire, Dalloz 2002, n° 16, p. 1330, n° 1.

* 189 Ibid ; p. 1332, n° 9.

* 190 RIPERT (G), Aspects juridiques du capitalisme moderne, Paris, LGDJ, 2ème Ed. , 1951, n° 46, cité par

REIGNE (P) article précité, p. 1331.

* 191 REIGNE (P), Ibid.

* 192 Ibidem ., n° 13 p. 1333.

* 193 SAINTOURENS (B), Société d'exercice libéral, Recueil Dalloz sociétés civiles, janvier, 1994 pp. 9 -10.

* 194 Ibid. , pp 10 - 11.

* 195 Ibid. , n° 62 p. 11.

* 196 Ibidem., n° 63 p. 11.

* 197 ATIAS (Ch), et LINOTTE (D) , op. cit. , pp. 251-258.

* 198 ATIAS (Ch) et LINOTTE (D), op. cit. , pp. 251-258 ; DEKKERS (R), Le fait et le droit, Travaux du Centre National de Recherche Logique, Bruxelles, Bruylant 1961, p. 13 : « Armature intellectuelle, établie sur un certain consensus, le droit ne peut suivre l'évolution des faits que par à - coups, par paliers, de consensus en consensus. Ainsi, le droit est presque toujours en retard sur l'évolution des faits, reflète rarement l'état ultime des faits » - nous soulignons.

* 199 RIPERT (G), Les forces créatrices du droit, Paris, LGDJ, 1955, pp. 81-82 : « ...Dans la réalité, la règle juridique n'a été édicté que parce qu'une force sociale en a exigé l'existence, en étant victorieuse de celles qui s'y opposaient ou profitant de leur indifférence [...] le droit est imposé par les forces sociales mais il ne jaillit pas spontanément du jeu de ces forces [...] En réalité, les forces sociales luttent pour obtenir la règle, mais il n'y a pas de droit tant que le pouvoir n'a pas donné la loi... » Sur la  notion de source du droit V. AMSELEK (P), Brèves réflexions sur la notion de « source du droit » , Arch. Philo. du droit, T 27, pp. 251-258.

* 200 CHANIOT-WALINE, La transmission de clientèles civiles, Paris, LGDJ, Coll. Bibio. de droit privé, T.315, 2000, p.10.

* 201 Association H. Capitant, sous dir. G. CORNU, vocabulaire juridique, Paris, PUF, 7ème Ed, 2005, p.141.

* 202 Trib. civ. de la Seine, 27 Juin 1956, JCP 1956, II, note J. SAVATIER..

* 203 CA de Montpellier, 8 Juin 1994.

* 204 Civ. 1ère, 29 avril 1954, RTD civ. 1954, p.471 Obs. A Lagarde.

* 205 CA de Limoges, 10 mai 1993, Dalloz 1994, p. 161 note B. BEIGNIER.

* 206 CA de Limoges, 10 mai 1993, Dalloz 1994, p. 161 note B. BEIGNIER.

* 207 Trib.civ. de la Seine, 27 Juin 1956, JCP 1956, II, note J. SAVATIER.

* 208 VIALLA (F), op. cit. p.160

* 209 VIALLA (F), Ibid

* 210 Cassation, 1er Chambre civile, 7 Juin 1995, D. 1995, 560, note B. BEIGNIER.

* 211 AUGUET (Y), Concurrence et clientèle, contribution à l'étude critique du rôle des limitations de concurrence pour la protection de la clientèle, Paris, LGDJ, Biblio., de droit privé, T 315, 2000, p.252.

* 212 VIALLA (F), op. cit. n°138. p. 162.

* 213 AUGUET (Y), Ibid. , n°197 p.210.

* 214 Ibid., p. 256 et S.

* 215 Ibid., n°200 p. 215.

* 216 Civ. 1ère, 29 Avril 1954, RTDCiv. 1954, p.471, Obs. J. LAGARDE ; AUGUET (Y), Ibid., n°205 p.218.

* 217 AUGUET (Y), Ibid. , n°207 p.219; Civ. 7 juin 1995, D. 1995,p.561, note B. BEIGNIER, JP 560 « il faut donc être très clair. L'extracommercialité de la clientèle civile est un faux débat. Avant de se poser la question de la qualité, il faut résoudre celle de la nature : la clientèle n'est pas un bien » ; ZENATI (F), les clientèles, RTDCiv, 1991, p.561 : « cette justification (...) est contestable au plan théorique et dépassée sur le plan pratique, dire que la cession d'un bien est interdite, c'est admettre implicitement que cette cession n'est pas impossible mais seulement non souhaitable et, que son objet constitue un bien ».

* 218 BEIGNIER (B), op. cit. ; ZENATI (F), Ibid.

* 219 ZENATI (F), op. cit.

* 220  ZENATI (F), Ibid.

* 221 Ass-H Capitant sous Dir. De G. CORNU, op.cit. p.111.

* 222 Idem.

* 223 AUGUET (Y), op. cit., n° 254 p. 258.

* 224 AUGUET (Y), Ibid.

* 225 AUGUET (Y), ibid., p.266.

* 226 AUGUET (Y), Ibidem., p. 267.

* 227 AUGUET (Y), op. cit., p.267.

* 228 Tribunal civil de la Seine, 25 Février 1846 ; VIALLA (F), op. cit., n°142 p. 174 et s.

* 229 VIALLA (F), Ibid.

* 230 TERRE (F) et WEIL (A), Droit civil les obligations, Paris, Dalloz, 4e Ed. , 1986, pp. 298-349

* 231 La convention est anéantie rétroactivement, ce qui pose à l'évidence un problème de restitution entre les prestations que s'étaient mutuellement dues les parties.

* 232 VIALLA (F), op. cit., n°145 p. 178.

* 233 VIALLA (F), op. Ibid.

* 234 VIALLA (F), op. Ibid.

* 235 VIALLA (F), op. Ibid. n°147 p. 179,

* 236 Pour une définition de la sécurité juridique, voir notamment, BERGEL (J-L), Théorie générale du droit, PUF, paris, 1985, p. *******

* 237 VIALLA (F), Ibid n° 149 p. 180.

* 238 Civ. 1er octobre 1996.

* 239 JAUFFRET (A), op. cit.

* 240 VIALLA (F), op. cit. p. 183.

* 241 VIALLA (F), Ibid

* 242 VIALLA (F), Ibid.

* 243 LAGARDE (X), Jurisprudence et insécurité juridique, Recueil Dalloz, 2006, n°10, p. 678 et S.

* 244 VIALLA (F), Ibid.

* 245 VIALLA (F), op.cit., n° 127 p. 148.

* 246 VIALLA (F), Ibid., n° 117 p. 139.

* 247 VIALLA (F), Ibid., n° 118 p. 140.

* 248 VIALLA (F), op. cit. , p. 140, n° 120.

* 249 JULIEN (P), Les clientèles civiles, remarque sur l'évolution de leur patrimonialité, RTDciv 1963 p 221

* 250 VIALLA (F), Ibid. n° 120 p. 141.

* 251 VIALLA (F), Ibid.

* 252 VIALLA (F), Ibid.

* 253 VIALLA (F), Ibid, n° 122 p. 142.

* 254 Avant l'Acte Uniforme, la location-gérance des fonds de ce commerce était régie par la loi n° 56-277 du 20 Mars 1956 , mais depuis lors, la location-gérance des fonds de commerce est régie par les articles 106 et S. de l'AUDCG.

* 255 NGUEBOU (J), op. cit., p. 54. L'auteur souligne qu'en matière commerciale,le gérant du fonds de commerce devient commerçant.

* 256 VIALLA (F), Ibid., n° 124 p. 145.

* 257 VIALLA (F), Ibid.

* 258 CE 20 Juillet 1990, JCP, 1991, ed. E, II, 117.

* 259 OST (F) et VAN DE KERCHOVE (M), op. cit. pp.47-147.Ces deux auteurs y définissent le système comme un ensemble composé d'éléments disparates mais interdépendants et sous-tendu par l'unité et la cohésion de ces différentes composantes. Les auteurs se demandent ensuite si le droit est un système. A cette question, ils répondent par l'affirmative dans la mesure où les composantes de ce système sont les normes, les notions, les catégories juridiques, les institutions juridiques.

* 260 Le fonds libéral n'ayant pas encore été reconnu, nos analyses ne peuvent être que de lege ferenda, notamment en se référant à la notion de fonds de commerce qui a déjà été suffisamment éprouvée.

* 261 CHAPLET (P), Ce qu'il faut entendre par la patrimonialité du cabinet de l'avocat, Dalloz 1957, Chron., p. 186.

* 262 CHAPLET (P), Ibid.

* 263 VIALLA (F), op. cit., n° 127 p. 148.

* 264 JUGLART (M) et IPPOLITO (B), Traité de droit commercial, Paris, Montchrestien, T. 1er , 4ème Ed.,1988,p. 858.

* 265 Ibid, p. 857.

* 266 Ibid, p. 857.

* 267 Ibid , p. 861.

* 268 VIALLA (F), op.cit., p. 150.

* 269 VIALLA (F), Ibid., p. 151.

* 270 Cass. Civ. 1ère, 7 Novembre 2000.

* 271 ATIAS (C) et LINOTTE (D), op. cit. , pp 251-258.

* 272 Voir supra.

* 273 Sur la question de la commercialisation des activités civiles, notamment libérales, voir HAMEL (J), Les rapports du droit civil et du droit commercial dans la législation contemporaine, Rapport du congrès de la Haye , Annales de Droit commercial français, étranger et international, T.142, 1932, pp.183-196 ; TALLON (D), Réflexions comparatives sur la distinction du droit civil et du droit commercial, Mélanges JAUFFRET, 1974 pp. 649-660; CABRILLAC (M), Vers la disparition du droit commercial ?. Mélanges Jean FOYER, Paris, PUF, 1997 pp. 329-339; JAUFFRET (A), L'extension du droit commercial à des activités traditionnellement civiles, Mélanges KAYSER, 1979 pp. 59-76.

* 274 CABRILLAC (M), Vers la disparition du droit commercial ? Mélanges Jean Foyer, p. 331 et S.

* 275 JAUFFRET (A), L'extension du droit commercial à des activités traditionnellement civiles, Mélanges Kayser, T2, 1978, pp. 59-76.

* 276 JAUFFRET (A), Ibid. 59 - 60.

* 277 TALLON (D), op. cit , p. 656.

* 278 LYON-CAEN (C), De l'influence du droit commercial sur le droit civil depuis 1804, Le code civil 1804-1904, Livre du Centenaire, Dalloz, 2004 pp. 207-221

* 279 KONE (M), Le Nouveau droit commercial des pays de la zone OHADA (comparaison avec le droit français), LGDJ, Biblio. de droit privé,, T. 406, 2003, P. 4.

* 280 LYON-CAEN (C), op. cit., p. 207.

* 281 TALLON (D), op. cit., p. 650 et s ; L'auteur souligne que seuls les pays du système romano germanique connaissent la distinction droit commercial - droit civil. Les pays situés en dehors de ce système comme l'Angleterre adhèrent à une conception unitaire du droit privé, la common law est ainsi applicable à toutes les transactions, qu'elles soient commerciales ou non.

* 282 GAUDEMET (J), Etudes juridiques et culture historique, arch. de philo. du droit, T. 4, 1959, p. 15.

* 283 KONE (M), op. cit., n° 368 - 381 p. 231 et s,.

* 284 KONE (M), op. cit., n° 368 - 381 p. 231 et s.

* 285 CABRILLAC (M), op . cit., p. 331 et s.

* 286 KONE (M), Ibid. , n° 378 p. 235.

* 287 ATIAS (Ch) et LINOTTE (D), Le mythe de l'adaptation du droit aux faits, Dalloz. 1977, chron. , pp. 251-258

* 288 GUYON (Y), Droit des affaires, Paris, Economica, T2, 9ème Ed, 2003, n° 1093 p.107.

* 289 GUYON (Y), Ibid.

* 290 GUYON (Y), Ibid., p. 108.

* 291 GUYON (Y), Ibidem., p. 108.

* 292 KONE (M), op. cit., p. 38.

* 293 KONE (M), Ibid.

* 294 TIGER (P), op. cit., p. 37.

* 295 TAISNE (J-J), La réforme de la procédure d'injonction de payer, Dalloz, 1981 Chron. , p. 321.

* 296 Ibid, p. 319.

* 297 Ibidem, p. 319.

* 298 KONE (M), op. cit, p. 320.

* 299 KONE (M), Ibid, p. 24.

* 300 KONE (M), Ibid ., p. 24.

* 301 Loi française du 18 mars 1919 institué pour la première fois le registre de commerce.

* 302 KONE (M), Ibid., p. 40.

* 303 KONE (M), Ibidem.

* 304 Article 3 al. 1er ordonnance n° 67-821 du 23 Septembre 1967 portant création du GIE.

* 305 KONE (M), Ibid.

* 306 Avec l'OHADA, le registre de commerce est devenu le registre du commerce et du crédit mobilier.

* 307 KONE (M), Ibid., p. 41.

* 308 Selon l'article 26 (1) du décret n° 79/448 du 5 novembre 1979, les huissiers doivent tenir : un livre-journal, un grand-livre, un carnet à souches, un répertoire général en matière civile et un répertoire général en matière pénale.

* 309 Pour les documents comptables exigés des notaires, voir l'article 50 du décret n° 95/034 du 24 février 1995.

* 310 Selon l'article 33 (1) de la loi n° 90/059 du 19 décembre 1990 chaque avocat doit tenir un livre-journal, un grand-livre, et un carnet à souches.

* 311 L'article 17 du décret n° 79/448 du 5 novembre 1979 régissant la profession des huissiers de justice parle de bénéfice réalisé par l'huissier. La notion de bénéfice, donc de recherche du lucre, est normalement de l'essence du commerce.

* 312 COZIAN (M), Précis de fiscalité des entreprises, Paris, LITEC, 28e Ed., 2004-2005, p. 6.

* 313 L'article 161 (annexe I) du CGI soumet les activités libérales à la contribution des patentes

* 314 V. art. 54 et s du CGI.

* 315 RAFFRAY (M), Les professions libérales et la TVA, JCP, I, 1975, 2674.

* 316 Ibid.

* 317 V. article 126 (1) du CGI.

* 318 V. article 126 (2) du CGI.

* 319 KONE (M), op . cit., n° 65 p. 42.

* 320 KONE (M), Ibid. , pp. 43 - 44.

* 321 KONE (M), Ibid., pp. 46 - 47.

* 322 CARILLAC (M), op. cit ; p. 332.

* 323 KONE (M), ibid., n° 83 p. 50.

* 324 CHAMPEAUD cité par MAMADOU KONE, Ibid., p. 51.

* 325 PALLUSSEAU cité par MAMADOU KONE, Ibid. , p. 53.

* 326 MERCADAL (B) et MAQUERON (P), Le droit des affaires en France, Ed. FRANCIS LEFEBVRE 2000, n°8., Cité par KONE (M) op. cit.

* 327 Conformément à l'article 5 (8) de la loi N° 90/059 du 19 Décembre 1990 régissant la profession d'avocat, l'avocat doit entre autres conditions « justifier d'une installation décente , agréée par le conseil de l'ordre »

* 328 AUBY (J.M), le pouvoir réglementaire des ordres professionnels, JCP 1973, doctr . , 2545.

* 329 Nous entendons la loi ici dans son sens matériel et non dans son sens formel.

* 330 ZAMBO (N), Frais et dépens en matière civile, Mémoire ENAM, 1989, p. 14.

* 331 PAVA (J), La vérification et la contestation des dépens en matière civile, Mémoire ENAM, 1989, p. 2.

* 332 V. l'article 1001 CPCC. Le ministère public, l'Etat en matière électorale ne saurait être condamnées aux dépens.

* 333 ZAMBO (N), Ibid, p. 15.

* 334 Article 52 du CPCC.

* 335 Voir Décret n° 79/85 du 13 mars 1979.

* 336 Voir Décret n° 61/90 du 9 juin 1964.

* 337 ZAMBO (N), Ibid. , p. 11.

* 338 TIENTCHEU NJIAKO (A), Le juge et les honoraires des avocats au Cameroun et en France, Juridis. périodique, n° 58, avril-mai-juin 2004, p. 68.

* 339 Nous soulignons.

* 340 Ibid.

* 341 Ibidem., pp. 74 à 76.

* 342 Décret n° 87-529 du 21 avril 1987 fixant la nomenclature générale des actes professionnels des Médecins, Chirurgiens-Dentistes, pharmaciens, Biologistes et des professionnels Médico-sanitaires (Infirmier, Sage-femme, Technicien Médico-sanitaire).

* 343 Arrêté interministériel n° 162 - A-MSP-DS et n° 24-A- MINCI- DPPM du 21 mai 1987 portant fixation dans le secteur sanitaire privé de la valeur des lettres-clefs correspondant aux actes médicaux, chirurgicaux ou de spécialités ainsi qu'aux analyses médicales figurant à la nomenclature des actes professionnels

* 344 SEIDOU (A), La procédure des ordonnances de taxe, Mémoire des Auditeurs de Justice, ENAM, 1997, p.8

* 345 Article 5 de l'arrêté interministériel précité.

* 346 DEKKERS (R), Le fait et le droit, Travaux du Centre National de Recherche Logique, Bruxelles Bruylant, 1961, p. 13

* 347 VIALLA (F), op. cit.

* 348 CATALA (P), La transformation du patrimoine dans le droit civil moderne, RTD Civ. 1966, p. 205, n° 24 : « la clientèle est un ensemble de personnes que l'on ne saurait céder en raison de leur liberté individuelle ... De fait, il est bien évident qu'une clientèle attachée à la personne n'est pas dans le commerce, car les deux pôles de l' « intuitus personae » - l'art du praticien et la confiance du client - sont rigoureusement incessibles ».

* 349 KOLECK-DESAUTEL (S), Réflexions sur la cession des clientèles civiles, LPA n° 118, 14 Juin 2001, p. 25.

* 350 Ibid.

* 351 Ibid.

* 352 Ibid, pp. 25 et 26.

* 353 VIALLA (F), op. cit., p. 292.

* 354 CARBONNIER (J), note sous Trib., civil de FOIX, 31 mars 1948.

* 355 BEIGNIER (B), note sous Limoges, 10 mai 1993, p. 164.

* 356 CARBONNIER (J), note sous Trib., civil de FOIX, 31 mars 1948.

* 357 VIALLA (F), op.cit., p. 296.

* 358 KOLECK-DESAUTEL (S), op. cit., p. 27 « ...le report de la confiance de la clientèle sur le successeur était aléatoire, parce que nul ne pouvait savoir s'il s'effectuerait... ».

* 359 KOLECK-DESAUTEL (S), Ibid., p. 27.

* 360 VIALLA (F), Ibid., n° 210 p. 295.

* 361 Cassation civile, 1ère, 7 Novembre 2000, M. WOESSNER C/ M. SIGRAND, Bull Civ. I, n° 283, p. 183 ; SERRA (Y), L'opération de cession de clientèle civile après l'arrêt du 7 novembre 2000 : dorénavant, on fera comme d'habitude, Dalloz, Cahier droit des affaires, 2001, passim.

* 362 BARTHELEMY (J), Contrat de travail et activité libérale JCP 1990, Chron., 3450.

* 363 VIALLA (F), op. cit., n° 216 p. 303.

* 364 Civ. 1ère 8 Janv. 1985, notes G. Mémeteau, J. Penneau, J. Mestre.

* 365 KOLECK-DESAUTEL (S), op. cit. p. 25.

* 366 Ibid.

* 367 KOLECK-DESAUTEL (S), op. cit. p.25

* 368 Ibid.

* 369 Ibid, p. 27

* 370 Sur cette question, voir supra.

* 371 CHANIOT-WALINE (M), La transmission des clientèles civiles, Paris, LGDJ, BIBL. droit privé T. 244, LGDJ, 1994, n° 172 p. 144.

* 372 CARBONNIER (J), Note sous trib. civ. de FOIX, 31 mars 1948.

* 373 PAU 4 Octobre 1954, JCP 1955, II, 8470, note J. SAVATIER.

* 374 Civ. 1ère, 9 mai 1961, RTD Civ. 1963, p. 213, Obs. P. Julien ; Civ. 1ère 17 mai 1961, Gaz. Pal. 1961, 2, 213, RTDCiv. 1962, 132, Obs. G. CORNU.

* 375 JULIEN (P), Les clientèles civiles, remarques sur l'évolution de leur patrimonialité, RTDCiv. 1963, n° 13 et s p. 228. : « ... Mais, ne pouvant proclamer clairement la validité des cessions de clientèles civiles, ce qui pourrait être considérés comme une hérésie juridique, elle se contente de valider les conventions qui y conduisent ... par là-même, elle considère le cabinet comme un bien véritable qui, à sa mort, figure sans la succession du praticien. »

* 376 LAMBERT-PIERI (M-C), L'avenir de la distinction du titre et de la finance dans la communauté légale, Dalloz Sirey, 1982, Chron., p. 65 et S.

* 377 COLOMER (A), note sous trib. civil de LILLE, 12 mars 1957, JCP 1958, II, 10433.

* 378 Tribunal civil de la Seine, 6 mai 1943, Gaz. Pal. 1943, 2, 45.

* 379 LAMBERT-PIERI (M-C), op. cit., p. 65 et s. ; CABRILLAC (R), note sous Civ. 1ère, 12 Janvier 1994, Bull civil 1994. p.313.

* 380 Civ. 1ère 29 Avril 1954, Dalloz 1954, 796, Obs.P. LAGARDE.

* 381 Civ. 1ère 29 Avril 1956, Dalloz 1956, 523. Note Percerou.

* 382 VIALLA (F), op. Cit. p. 337 et s.

* 383 LAMBOLEY (A), Entreprises libérales et régimes matrimoniaux, Mélanges Colomer, n° 24 p. 206,

* 384 Civ. 1ère 10 mai 1984, Bull I, 1984, n°152.

* 385 VIALLA (F), Ibid. , n°234 p. 339,.

* 386 PAISANT (G), Peut-on abandonner la distinction du titre et de la finance en régime de communauté ?,

JCP 1984, Ed. N, n° 11 p. 21.

* 387 LAMBOLEY (A), Ibid.

* 388 Civ. 1ère 25 ami 1987,, note A. Breton, Obs. F. ZENATI, JCP 1988, ed. G. II, 20925

* 389 VIALLA (F), op. cit., n° 234-3 p. 342.

* 390 VIALLA (F), Ibid.

* 391 Civ., 1ère 12 janv. 1994.

* 392 Civ. 1ère 17 décembre 1996.

* 393 ATIAS (C) et Linotte (D), Le Mythe de l'adaptation du droit aux faits, Dalloz 1977, Chron. 35, pp 251-258 ; DEKKERS (R), Le fait et le droit, Travaux du centre National de Recherche Logique, Bruxelles, Bruylant, 1961, p. 13.

* 394 JAUFFRET (A), L'extension du droit commercial à des activités traditionnellement civiles, Mélanges KAYSER, 1979, pp. 59-76.

* 395 Cass. Civ. 1ère , 7 Novembre 2000,Bull. Civ., I, n° 283, p. 183.

* 396 Supra.

* 397 REYGROBELLET (A), Fonds de commerce, Paris, Dalloz, 2005, pp. 185-195.

* 398 Le FLOCH (P), Le fonds de commerce. Essai sur le caractère artificiel de la notion et ses limites. actuelles, Paris, LGDJ, Coll. Biblio. droit privé, T192, 1986, cité par AUGUET (Y), op. cit.

* 399 KONE (M), Op. cit, p. 59 et s. Pour cet auteur le droit commercial n'est ni un droit des commerçants, ni un droit des actes de commerce, il est les deux à la fois. C'est un droit à la recherche d'un critère.

* 400 LEBRETON (G), Y' a-t-il un progrès du droit ? Recueil Dalloz, 1991, Chron. pp. 99-104.






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