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L'application de la loi dite foncière dans la résolution des conflits fonciers en territoire de Lubero en RDC

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par Jackson MUMBERE KINANGA
Université oficielle de Ruwenzori - Graduat en droit privé 2012
  

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2.2. LES OBSTACLES DE L'APPLICATION DE LA LOI FONCIERE EN TERRITOIRE DE LUBERO.

La résolution des conflits fonciers est une question qui ressort des règles du droit procédural. Mais il est évident qu'une justice ne saurait être bien rendue sur base d'un droit substantiel mal posé. Il est à noter que les obstacles de l'application de la loi foncière sont multidimensionnelles. Parmi lesquels nous en avons retenus les suivants : les problèmes liés à la genèse des textes légaux (§1), l'inadéquation entre la loi et la coutume (§2), ambiguïté du statut des terres rurales (§3), ainsi que la prédominance des pratiques en marge de la loi (§4).

2.2.1. LES PROBLEMES LIES A LA GENESE DES TEXTES LEGAUX.

La plupart des dispositions juridiques coulées sous forme des lois demeurent desuètes tant que leurs conceptions ou élaborations ne tiennent pas compte de l'environnement sociologique ou culturel du milieu dans lequel elles sont appelées à être appliquée46(*). La non-implication des communautés locales dans la production des textes légaux fonciers en milieu rural, spécialement en RDC et en territoire de Lubero paraît bien reposer sur cet autre facteur qui consiste en une traduction imparfaite du droit non seulement sur le plan processuel ou judiciaire, mais d'une manière plus fondamentale sur le plan de la genèse de la règle du droit positif en l'occurrence de celui qui s'applique au domaine foncier. Il est vrai qu'un droit mal posé ne peut être que mal traduit par les tribunaux au point de ne pas obtenir l'adhésion du sujet du droit47(*).

Le droit deviendrait alors un facteur criminogène si l'on prend en compte non seulement l'exigence de conformité à la norme positive dans le processus de gestion préventive de conflit, mais aussi et surtout l'inclination à un ordre normatif non légitimé aux yeux du peuple. Un droit qui ne traduit pas les valeurs intrinsèques de la population qu'elle est sensée régir, tombe dans l'illégitimité et devient une source de boycott entraînant une opposition entre la population48(*). Opérant un juste diagnostic à propos des praticiens congolais bien avisés notent avec raison que si le problème foncier du territoire de Lubero peut s'analyser en un problème de l'histoire politique et sociale de cette partie du pays « Il est aussi le problème de l'enchevêtrement des textes régissant la propriété foncière ; dans notre pays les textes à bien des égard mal diffusés, incompris et inaccessibles à la masse laborieuse à laquelle ils sont destinés49(*). En effet, la loi foncière N°73-021 du 20/07/1973 portant régime général des biens, régimes fonciers et régimes de sûretés, illustre bien le phénomène d'une oeuvre législative congolaise, dont la publication par voie classique du journal officiel n'est que théorique au point de faire mériter la règle « Nemo censentur ignorare legem » tout le ridicule que le commun des mortels lui réserverait dans le domaine qui intéresse la présente analyse.

Alors que la loi précitée n'a guère fait l'objet de consultation ou de sensibilisation suffisante dans la phase précédent son adoption au Parlement, cette importante oeuvre législative congolaise post indépendante ne semble pas avoir bénéficié d'une publicité efficiente, encore moins d'une vulgarisation suffisante. Il serait superflu de souligner le risque que cette passivité emporte sur le double plan de la prévention comme de la résolution des conflits fonciers. Un phénomène de rébellion aux lois ne peut que s'alimenter de cette ignorance à laquelle tristement abandonnées les populations destinataires de ces lois50(*).

Quand bien même on trouverait une quelconque prise en compte de l'intérêt des communautés rurales, ne serait ce que par le processus d'intégration du droit coutumier, il reste fort regretable qu'en cette matière importante d'élaboration du droit n'ait pas suffisamment capitalisée. Les multiples bénéfices des méthodes participatives et de concertation vivement recommandées dans tout projet de développement. In fine, cette profonde sagesse de Ghandi selon laquelle : « Tout ce que vous faites pour moi mais sans moi, vous le faites contre moi », pourrait se vérifier en l'occurrence. La clé de tout est la participation : il ne devrait y avoir de projet qui n'implique pas à un certain degré de participation de la part des destinataires.

Les conclusions ne doivent pas surprendre presque toutes les enquêtes sur les composantes des projets réussis soulignent l'importance capitale de la participation51(*). La participation devra être effective dès les premières phases de la conception des projets des lois. On pourra ainsi être sûr que ses objectifs sont fondés autant que possible sur les besoins ressentis par les gens sur leurs priorités, sur l'intérêt porté à ce qu'ils considèrent comme des problèmes importants. Au plan législatif, la participation doit être perçue également comme un moyen de s'assurer que les projets sont montés en tenant compte des conditions ou réalités locales. C'est pourquoi la légitimité de la loi dite « foncière » de 1973 est parfois contestée par les chefs coutumiers de la République Démocratique du Congo et en particulier par ceux du Territoire de Lubero. Il s'agit d'un système qui leur apparaît comme étrange, inadapté à leurs moeurs et basé sur des règles dont ils ne connaissent pas l'origine52(*).

L'inadéquation entre la loi et la coutume est aussi un obstacle de l'application de la loi foncière en Territoire de Lubero.

* 46 V. MUYAYALO. ; cours de droit, structure et institutions socio-traditionnelles africaines, UOR, inédit, Butembo, 2010-2011, P13

* 47 D. KAKULE PILIPILI, Résolution extra-judiciaire des conflits fonciers en Territoire de Masisi, mémoire édité, UNIKIS, Kisangani, 2009-2010, P38

* 48 C. PALUKU MASTAKI et C. KIBAMBI VAKE, «  Droit écrit et droit coutumier : principe d'articulation. Réflexion inspirée par une enquête foncière dans le Masisi » in Etudes juriidiques N°3, Goma, AAP, avril 2005, P.70

* 49 NAWEZA KATOK-A-NAKAMBO, et al. le problème foncier du Nord-Kivu : de ses causes et celles de l'inexécution des décisions de justice y relative, Kinshasa, 1981. P3

* 50 D. KAKULE PILIPILI, Op. cit, P.28

* 51 P. HARRISON, une Afrique verte, Paris, éd. Kartala, 1991, P 365

* 52 Rapport de la conférence tenue par l'ONG USAID avec les autorités coutumières : « coutumiers sur la transformation des conflits, Butembo, du 29 mars au 1 Avril 2011, P.13

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