5.3.2.2 Stratégies des agro éleveurs
Ces éleveurs ont développé le
habbanayé, l'entraide, la main d'oeuvre agricole et le contrat de berger
comme stratégies face aux crises alimentaires et pastorales. Ils
pratiquent aussi l'agriculture combinée soit au petit élevage
(caprins et ovins) et d'autres activités (petits commerces, exode,
etc.).
58
5.3.2.3 Eleveurs pratiquant le système de grande
mobilité (bergers moutonniers)
Le déplacement vers les zones pourvues de
pâturages verts est la principale stratégie
développée par les moutonniers. En cas des catastrophes
naturelles (sécheresse, crise alimentaire et pastorale) et pour leur
ravitaillement en nourriture, ces derniers procèdent à la vente
des animaux les plus fatigués. Raison pour laquelle leur
déplacement est toujours guidé par la présence du
marché sur les parcours de transhumance.
5.3.2.4 Eleveurs pratiquant le système camelin
C'est le système le plus résistant parmi ces
systèmes parce que ces animaux peuvent faire plusieurs jours sans
s'abreuver et ne profitent que du pâturage aérien. Mais en cas des
crises pastorales ou alimentaires aigues, ces éleveurs se
déplacent vers les zones pourvues du pâturage aérien avec
la diversification du cheptel (caprins et ovins). Ces éleveurs utilisent
cette deuxième stratégie parce qu'une chamelle prend deux (2)
à trois ans avant de mettre bas. 5.3.3 Stratégies
adoptées par les associations et les projets de développement
Les associations et les projets de développement ont
développé plusieurs stratégies pour aider les
éleveurs à surmonter les difficultés en cas de crises
pastorales et alimentaires. Il s'agit entre autres de déstockage des
animaux pendant la période de soudure, la création des Banques
d'Aliment Bétail (BAB) et Banques d'Intrants Zootechniques (BIZ). Ces
associations en partenariat avec les partenaires techniques et financiers
procèdent aussi à la vente à prix modéré des
aliments bétail et la recapitalisation des ménages
vulnérables à travers le habbannayé.
5.3.4 Stratégies développées par
l'État.
Face à des crises, l'Etat du Niger à
développé des stratégies pour assister les
éleveurs. Ces stratégies sont entre autres la vente à prix
modéré des aliments bétail et des produits vivriers, la
récupération des terres dégradées et la
distribution des petits ruminants aux femmes les plus démunies.
5.4 Discussion des résultats
Les résultats de cette étude fait ressortir
plusieurs enjeux fonciers et d'énormes stratégies des acteurs.
Parallèlement, les résultats d'enquête ont ressorti des
conflits liés à l'utilisation des ressources naturelles.
Après analyse, il ressort que les principaux enjeux
autour de la Tarka sont liés à l'historique de l'occupation de
l'espace, la mobilité pastorale et le sérieux problème de
la limite nord des cultures. Cette occupation s'est effectuée à
travers la création des villages et des champs par des éleveurs
et agropasteurs suite à des sécheresses chroniques. Ces constats
confirment les
59
résultats d'Abdoulaye (2009) sur la
décentralisation et pouvoir local au Niger. Ceci, a poussé les
agriculteurs eu aussi à pratiquer l'agriculture au-delà de la
limite des cultures. Les chefs traditionnels ignorent les textes relatifs au
foncier et font croire aux administrés qu'ils ont le monopole du foncier
dans la vallée de la Tarka. Ces chefs locaux, procèdent souvent
à des transactions foncières. Ainsi nos résultats
confirment aussi ceux de Dagobi (2004) qui montent qu'à Dessa, la
chefferie et les grandes familles de la chefferie distribuent les terres aux
dépendants. Contrairement à Dakoro, les chefs perçoivent
la fakurma (dîme locative), assurent la régulation
foncière et s'adonnent aux spéculations de tous ordres.
En effet, Arifari (1999) montre que dans la région de
Gaya, le foncier est revendiqué de façon symbolique par les chefs
traditionnels dans leurs stratégies d'auto-réhabilitation. Ainsi,
leur participation au règlement de litiges fonciers est le principal
privilège de la chefferie traditionnelle discuté selon les cas
avec les pouvoirs officiels. Ce même auteur, montre qu'au Bénin,
à partir du cas de la région de Gomparou, il y a plutôt une
politisation négociée par le bas avec une faible présence
de l'Etat. Ce ne sont pas les conflits fonciers en eux-mêmes qui ont
conduit à la politisation, mais les itinéraires informels de la
résolution des conflits, et les stratégies de partage de pouvoir
au sein des différentes fractions de l'élite locale.
Malheureusement, les différents acteurs sur le terrain ne
perçoivent pas les enjeux de la même façon et ne sont
surtout pas conscients des implications sur les conditions de vie dans les
années à venir.
La mal gouvernance sur le foncier et la cohabitation entre
différents acteurs provoquent des conflits entre acteurs. Les conflits
les plus fréquents sont à 46% liés aux dégâts
champêtres, 13,33% aux réclamations des champs et 4,44%
liés à l'accès aux points d'eau. Selon Sougnabé
(2003), dans la zone méridionale du Tchad, ces conflits dans la plupart
des cas trouvent leurs origines dans la gestion des ressources naturelles et de
l'espace.
Cette mauvaise gouvernance foncière rend difficile la
mobilité des éleveurs qui traversent la vallée de la
Tarka. En effet, les éleveurs rencontrés sont à 73% des
transhumants. Les premiers problèmes évoqués par ces
éleveurs sont l'occupation de l'espace pastoral par les agriculteurs,
les feux de brousse et la monétarisation de l'accès à
l'eau. Ces résultats confirment en partie ceux de PSSP (2009), qui
montrent que les conquêtes des espaces pastoraux par le front agricole ;
la privatisation et la monétarisation de l'accès aux ressources
pastorales et le non-respect des droits de personnes et les droits de
mobilité sont autant des problèmes qui rendent difficile la
mobilité. Selon Bodé (2011), ces difficultés de
déplacement et d'exploitation pastorale des ressources naturelles par
les transhumants entrainent une exacerbation des conflits fonciers.
60
Les résultats de cette étude montrent aussi que
plusieurs acteurs interviennent directement ou indirectement dans cette
question foncière qui est très complexe. Il s'agit des acteurs
internes et externes (les élus, les autorités administratives, la
COFO, les projets et les associations). Ces acteurs ont développé
beaucoup de stratégies dans la gestion du foncier et des catastrophes
naturelles. Selon Thréance (2010), l'évolution des
stratégies des acteurs influence et complique la gestion du patrimoine
foncier rural de la commune de Klouékanmé au Burkina Faso.
Cette situation d'insécurité foncière et
des difficultés liées à la mobilité rend les
ménages pastoraux vulnérables.
Vu la tendance actuelle de la gestion foncière dans la
Tarka, les éleveurs risqueront de se transformer en agriculteurs dans un
avenir proche.
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