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La compétence des juridictions militaires congolaises face aux civils.

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par Joel BONGOLONGONDO
Université de Kinshasa - Licence en Droit 2013
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE DE KINSHASA

FACULTE DE DROIT

Département de Droit Pénal et de Criminologie

B.P: 204 KINSHASA XI

B.P: 204 KINSHASA XI

La Compétence des Juridictions Militaires Congolaises face aux Civils

BONGOLONGONDO EMPENGO Joëlbongol

(Gradué en Droit)

Mémoire de fin d'Etude présenté et Défendu en vue de l'Obtention du Titre de Licencié en Droit.

Option : Droit Privé et Judiciaire

Promoteur: WANE BAMEME Bienvenue

Professeur Associé

Année Académique 2012-2013

Epigraphe

« Le jour où il n'y aura plus de juridiction militaire, il n'y aurait plus de subordination, les relations des chefs avec les inferieurs seraient analogues à celles d'un patron et de ses employés liés par un contrat ; ce seraient les relations qui existent dans la vie civile, il n'y aurait plus d'Armée. »

E.SELIGMANN, cité par B. WANE BAMEME, Cours de Droit pénal et procédure pénale militaires, G3 Droit, Département de droit privé et judiciaire, UNIMBA, 2010-2011, p.3.

« L'évolution moderne des idées en faveur d'une plus grande justice et d'un meilleur respect de la liberté et de la dignité de la personne humaine exige un nouvel aménagement du Droit pénal militaire.»

R.GASSIN, Avant-propos, in Général N. LIKULIA BOLONGO, Droit pénal militaire zaïrois, Tome premier, L'organisation et la Compétence des Juridictions des Forces armées, LGDJ, Paris, p. VI.

In memoriam

A la douce mémoire de ma tendre et chère mère Bolisomi Nsimba Augustine qui n'a eu que le temps de jeter le fondement et à qui le destin n'a pas permis de vivre l'achèvement de l'édifice ; alors qu'elle aurait pu se réjouir voyant son fils achever un monument plus dur que l'airain. O terre ne pèse pas sur elle car elle n'a pu peser sur toi !

A la mémoire de tous ceux de la famille tant paternelle que maternelle qui n'ont eu que le temps de jeter la semence sans pour autant vivre ces moments de la récolte.

A la mémoire de tous les innocents condamnés à mort par les Juridictions militaires dans le monde.

L'Auteur.

A Maguy Limbili Mbeno, ma chère et tendre amie et à Bébé Wanga Bokolo, qui sais consoler les sans mères; pour le soutien, l'amour et l'affection combien inestimable;

A mon père José Bokata Emangi, à Michaël Bolisomi Nceafeta et à Schékinah Kambala pour le prix de la solitude intellectuelle chèrement payé;

A tous ceux qui aiment la Justice, à tous ceux qui militent pour le respect des Droits de l'Homme et du bien-être collectif ainsi qu'à tous ceux qui m'ont enseigné le Droit et la morale;

A tous ceux qui luttent pour l'abolition de la peine de mort ;

Je dédie ce mémoire, fruit d'une faveur imméritée de la part de Jésus-Christ, mon Seigneur et Sauveur personnel.

L'Auteur.

Remerciements

Tout mémoire de licence est un passage obligé historique d'une double confiance : confiance faite à l'étudiant par ceux qui lui ont permis d'entreprendre et de conduire sa recherche ; et aussi, confiance de l'étudiant en lui-même pour la mener, avec plaisir, à bien. Quelques mots donc, de remerciements, à ceux et celles qui nous ont accordé l'une et ont construit l'autre.

Celui qui nous a fait confiance en premier lieu. Au Professeur WANE BAMEME Bienvenu-Alphonse, qui en dépit de ses charges et malgré le retard pour solliciter sa direction, a accepté en toute responsabilité et volonté de tracer l'itinéraire suivi pour l'élaboration de ce mémoire. Qu'il trouve en ces lignes le témoignage de nos profondes gratitudes et de notre attachement. Hommage aux Professeurs LIKULIA BOLONGO Norbert et AKELE ADAU Pierre pour ce fruit et pour leurs oeuvres scientifiques.

Ensuite aux autorités académiques, décanales et aux Professeurs respectivement de l'Université de Kinshasa et de l'Université de Mbandaka pour les enseignements des Sciences juridiques. Grand merci aux Professeurs DJOLI ESENG'EKELI Jacques, BASUE BABU KAZADI Greg, MWANZO idin'AMINYE Eddy, MANASI Raymond, KIENGE-KIENGE Raoul, et KOLONGELE Ebérande ; ainsi qu'aux membres du corps scientifique pour l'encadrement et différents conseils qui ont déterminé ce parcours : les Chefs de travaux BENKENYA LOFEMBE, BOLITENGE LOPOKA Benjamin, KPANYA MBUNZU Albert et Etienne BALEKA. Encore à nos enseignants des Humanités littéraires pour nous avoir stimulé à la connaissance du Droit par le Latin.

Les remerciements les plus sincères s'adressent à mes Grands parents paternels et maternels, à mes Oncles et tantes maternels et paternels pour leur écoute et pour leur assistance : à Papa NKOSO EFOLY et sa femme Maman MPUTU EFAMBE Sara, à l'Oncle Jean Rémy BONGENGWA et à sa femme Maman JOSE, à Papa Jean-Louis BOLINSOMI, à Papa BONGOLONGONDO Joseph OMO, aux tantes Annie BOMPOSA, Marie-Thérèse BOSOMBA, NGUNGU Antoinette, Charlotte YONDO, IFUNDA EYENGA et Maman Annie MPIA. Que le Pasteur Jean-Martin EKOTA et Betty LOFEMBE reçoivent l'expression d'une profonde gratitude.

« Il n'y a dans ce monde d'autres monstres que les ingrats ». Plusieurs personnes nous ont beaucoup aidé d'une manière tantôt d'une autre. Nous nous faisons l'obligation de leur dire merci. Ainsi donc, notre pensée se tourne vers l'évangéliste Paul NZUZI NGOMA et ses collaborateurs : Papa Félix BEKILA, Papa Jerry NKIENGE LANDU, l'évangéliste Papy MOKE, le Frère Teddy KITUKU, et vers les membres de l'église ``LA CONSECRATION'' dont les noms suivent : Papa Patrick MUNSEKI, Merlin MASEVO, Dr Steef MABAYA, Delord et Anne BOKOMBOKO, Jérémie MAWALA, Junior LUMU, Emmanuel NGIESI, Me Dieu N'SIALA, Me Sylvie KADUA. Que Papa Eric NSUMBU et Joël PAMI se sentent concernés.

L'occasion se prête pour féliciter et remercier profondément les couples Tony et Espérance NDEFRU, Freddy YOBA et Gisèle NSUMBU SEDI, pour qui la générosité et la bonté nous fait perdre de mots. Egalement pour le couple John et Merveilles BUSI.

Il y a aussi lieu de remercier les frères et soeurs de la famille pour l'affection et l'amour fraternelle : José BOKATA EMANGI Bokatol, Fabrice BOSIWA, Dieumerci BALENGOLA EKOTA, Dr Abetty, Sandrine BALANGI, Joël WABI, Héritier IMPAMBA, BOKOLO Salomon, Rémy BOLISA, Gerthie NGANGA, Elisabeth, Michaux et Mika BOKANGA, Nelly EFOLE, Esther BAMENGA, Jr BOMPOKO, Gégé, Ouda, Rebecca, Ephraïm et Delord BONGENGWA, Prisca et Yannick MBEMBE BONGOLONGONDO. Que Maître Jackson NKOSO EFOLY et LOKWA MBOYO Maxime se sentent concernés.

Pour tourner la page à cette série de remerciements, il importe de mentionner la solidarité des amis avec qui l'on a passé des moments tant merveilleux que difficiles durant ce passage à la Faculté de Droit : Junior-Van ABEZILO MBITAZOMA, MOYENGE NYAITEBU Darrel, Maguy BONDJEMBA NGOLE, Sam SAMBOKO DOTE, BOLODJWA Nicole, MUMBOLO Martinesse, LINZABE Serge, BONINGO Giresse, Joël BIAYA, Esther BONYEME, EKILA Thérésita, YAKOLI TONDO Joceline, LOKWA MBOYO Mitterrand, LETA LETA Bernard, Fiston NGALOMBE, LIKOKE Victor, NSIMBA-NSIMBA Abel, OMANEMBA Félix, MUFURA Christian, LOANA Blanchard et ELONGO Jean. A titre posthume, merci donc à TSHUNGU Eric-Papy qui était remarquable par ses gestes d'amour, alors qu'il a été rappelé auprès du Père au moment de la rédaction de ce Mémoire.

Bongolongondo Empengo Joëlbongol, l'auteur.

Liste des Principales Abréviations

Art.cit.  : Article cité

BA  : Bulletin des Arrêts

CCPS : Centre de Criminologie et de Pathologie Sociale

CEDI  : Centre Protestant d'Edition et de Diffusion

CEPAS  : Centre d'Etude Pour l'Action Sociale

CJM  : Code Judiciaire Militaire

CNS : Conférence Nationale Souveraine

COM  : Cour d'Ordre Militaire

CPI  : Cour Pénale Internationale

CPM  : Code Pénal Militaire

CPO  : Code Pénal Ordinaire

CSJ : Cour suprême de justice

CRP : Centre de recherches pédagogiques

DES  : Droit et Société

D.E.S. : Diplôme d'Etudes Supérieures

D-L  : Décret-loi

EDUPC  : Edition de l'Université Protestante au Congo

EUA : Editions universitaires africaines

FARDC  : Forces Armée de la République démocratique du Congo

HCM  : Haute Cour Militaire

Ibidem : Même auteur, même endroit

In idem loco : Même auteur, même ouvrage, même article.

JORDC : Journal Officiel de la République démocratique du Congo (1997 à ce jour)

LGDJ : Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence

L  : 50

MES : Mouvements et Enjeux Sociaux.

MONUC  : Mission de l'Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (jusqu'en 2010)

N° : Numéro

O-L  : Ordonnance-Loi

ONGDH  : Organisation non Gouvernementale pour la Défense des Droits de l'Homme

ONU  : Organisation des Nations Unies

OSISA  : Open Society Initiative for Southern Africa

Op.cit. : Ouvrage cité

p  : page

pp. : Pages

§  : Paragraphe

PNUD  : Programme des Nations Unies pour le Développement

PUC : Presses Universitaires du Congo

PUF : Presses Universitaires de France

PUK : Presses de l'Université de Kinshasa.

RA  : Rôle d'Appel

RDC : République démocratique du Congo

R.D. Congo : République démocratique du Congo

RP  : Rôle Pénal

RMP  : Registre du Ministère Public

TMG  : Tribunal Militaire de Garnison

UNIKIN : Université de Kinshasa

UNIMBA  : Université de Mbandaka

UNILU : Université de Lubumbashi

Sommaire

Introduction Générale :

01. Problématique

02. Intérêt du Sujet

03. Délimitation de l'étude

04. Méthodes et Techniques

Partie I : Une incompétence antérieure des Juridictions Militaires Congolaises face au Civils.

Chap. I. Compétence des Juridictions Militaires en Temps de Paix.

Chap. II. Compétence des Juridictions Militaires face aux Civils en Période Troublée.

Partie II : Une incompétence en vigueur des Juridictions Militaires Congolaises face aux Civils.

Chap. I. Incompétence tirée des sources normatives.

Chap. II. Incompétence tirée de la nécessité de la sauvegarde des droits de l'Homme.

Conclusion Générale

Introduction générale

O1. Problématique.

L'article 156 de la Constitution du 18 février 2006 en vigueur en République démocratique du Congo telle que révisée le 20 Janvier 2011, est au centre des inquiétudes sur la compétence des juridictions militaires face  aux personnes autres, que les membres des Forces armées de la République et de la Police nationale  congolaise.

Il ressort de cet article que les juridictions militaires ne peuvent juger des civils que pendant les circonstances exceptionnelles et à la condition que le Président de la République, en temps de guerre ou après que l'état de siège ou d'urgence aura été proclamé, décide après délibération en conseil des Ministères, de suspendre la répression des infractions qu'il fixe et pour une période déterminée, par les juridictions ordinaires.

De ce fait, la loi organique qui en vertu de l'alinéa dernier du même article précité, organise et détermine la compétence et le fonctionnement des juridictions militaires doit être conforme à la constitution.

PREMIERE PARTIE :

UNE COMPETENCE ANTERIEURE DES JURIDICTIONS MILITAIRES CONGOLAISES FACE AUX CIVILS

Aux termes de l'article 115 de la loi n° 04/023 du 12 novembre 2004 portant organisation générale de la défense et des Forces armées, le législateur congolais définit la Justice militaire comme une juridiction indépendante relevant du pouvoir judiciaire, chargée de respecter la loi et de renforcer le maintien de l'ordre public et de la discipline au service des Forces armées. Et à l'exposé des motifs jumelé des lois n° 023 et 024/2002 du 18 novembre 2002 portant respectivement Code judiciaire et Code pénal militaires, il est dit que la justice militaire apparaît désormais comme un instrument du pouvoir judiciaire au service des Forces armées1(*).

Sous ce même angle le Professeur LIKULIA BOLONGO Norbert, Général d'armées, notait ce qui suit: « le fondement du droit pénal militaire et de la justice militaire réside donc dans la nécessité du maintien d'une façon permanente et sans relâche, d'une discipline particulière aux Forces armées et de la mise en oeuvre des moyens propres à assurer la sécurité de l'Etat et l'unité de la Nation. A cette époque, le Droit pénal militaire se présentait ainsi comme le prolongement de l'action disciplinaire (...) car c'est lui qui impose et rétablit par la force l'ordre au sein de l'Armée lorsque les sanctions disciplinaires et pénales prévues par le droit commun se révèlent incapable d'assurer cet ordre. »2(*)

Lorsqu'on s'adonne à un petit exercice en demandant de façon désintéressée au commun des mortels ce qu'on entend par justice militaire, toutes les réponses convergent vers la considération d'une justice des militaires pour les militaires et par les militaires3(*).

Cette même question, n'a pas laissé indifférente la Commission Africaine des Droits de l'Homme qui a consacré très clairement dans ses Directives au §L le droit des civils à ne pas être jugés par un tribunal militaire4(*). Elle énonce à ce sujet que ``les tribunaux militaires ne peuvent en aucune circonstance juger des civils'', précisant que ceux-ci (les tribunaux militaires) ont pour seul objet de connaitre des infractions d'une nature purement militaire commise par le personnel militaire5(*).

La préoccupation fondamentale se situe autour de l'idée que les juridictions militaires sont essentiellement pénales et c'est au cours du procès pénal qu'apparaissent dans toute leur ampleur les droits fondamentaux de l'homme. Le délinquant risque ce qu'il a de plus sacré au monde: sa vie, sa liberté, son honneur, son patrimoine. Alors que, devant le juge statuant en matière de droit privé, l'on lui demande simplement de dire le droit applicable en ayant une connaissance technique des faits de la cause, au juge pénal, en sus de connaissance technique, on demande un sens profond de l'humain et du social, car la décision qu'il prend n'est pas une solution à une difficulté juridique. Le juge pénal prononce des mesures d'assistance, de surveillance, d'amendement ou d'élimination6(*). Cela requiert un mécanisme de protection face à cette menace de la sentence pénale sur la personne humaine.

C'est cela donc bien sur le rôle traditionnel des droits de l'Homme : protéger du pénal, protéger la personne contre les menaces que fait planer l'intervention du droit pénal sur ses droits7(*) (droit à l'honneur, droit à la vie, droit à la liberté, droit au patrimoine).

Malgré ce que prévoit la Constitution de la République dans son article 156 sus-évoque, malgré cette aspiration noble de la Commission africaine des droit de l'Homme, malgré la sensibilité et la délicatesse qui entourent le procès pénal au risque de voir une décision d'élimination ou touchant au patrimoine ou à la liberté du prévenu être prononcée, malgré le cri et l'appel à l'humanisme, malgré la spécialité, le fondement et les idéaux ayant conduit à l'institution de la justice militaire ; malheur est de voir qu'en République démocratique du Congo, pays qui a ratifié bon nombre d'instruments juridiques régionaux et internationaux en matière des droits de l'Homme et les a même consacrés par une soixantaine des dispositions constitutionnelles, il existe cependant les lois n°023 et 024/2002 portant Code judiciaire et Code pénal militaires devenus inconstitutionnelles, lesquelles attribuent aux Juridictions militaires une compétence à l'égard de tout individu étranger à l'Armée, civil soit-il.

Et pourtant, ces Juridictions à vocation pénale, statuant sur des questions de vie ou de mort, siègent avec des juges assesseurs en grand nombre, alors qu'ils ne justifient pas d'une maitrise en droit ou de tous les aspects délicats et sensibles qui entourent un procès pénal au niveau des droits mis en jeu.

Il est particulièrement regrettables que les juridictions militaires appliquant un code pénal militaire dont la plupart d'incriminations y prévues une fois aggravées sont punies de mort, soient compétentes même à l'égard des individus étrangers aux Forces armées et à la Police nationale. Aussi, est-il alarmant, que ces juridictions soient compétentes pour juger les auteurs (civils soient-ils) des crimes internationaux (crime de guerre, crime contre l'humanité et crime de génocide), infractions non seulement graves mais aussi complexes, alors que les juges assesseurs n'ont pas de connaissances approfondies pour ces genres de crimes.

Il va falloir s'interroger sur la compétence personnelle des juridictions militaires congolaises face aux individus étrangers à l'Armée et à la Police nationale.

Quel intérêt a-t-on alors à aborder un tel sujet ? La réponse à cette question se trouve au point 02 qui suit.

02. Intérêt du Sujet.

Le choix opéré sur ce sujet n'est pas un fait hasardeux, par rapport à la sensibilité et à la délicatesse de la question de la compétence personnelle face aux personnes étrangères à l'armée et à la police nationale.

Le choix a été porté sur le sujet qui se formule comme suit : « Compétence des juridictions militaires congolaises face aux civils ». L'objectif est celui de soulever et d'émettre un cri d'alarme sur l'inconstitutionnalité qui caractérise cette compétence juridictionnelle militaire, question qui touche aux droits fondamentaux de la personne humaine.

Question d'occasion et d'opportunité, vu l'intérêt qui convient à aborder un tel sujet, il est apparu nécessaire d'en parler sur le plan théorique et d'un point de vue pratique.

A. Intérêt théorique.

D'un point de vue théorique, cette réflexion constituera à la fois un outil de formation et d'information d'autant plus qu'elle se propose de soulever une question d'inconstitutionnalité de lois et de violation ou de non-respect des engagements internationaux relatifs aux droits de l'Homme.

Un outil de formation parce qu'il sera question de faire une analyse sur les dispositions constitutionnelles et de la loi judiciaire militaire n°023/2002 du 18 novembre 2002 susmentionnée. Cela sera tout de même, une source d'information à l'étonnement et à la satisfaction des uns et des autres sur le fait de non justiciabilité des civils devant la justice spécialisée propre à l'Armée.

B. Intérêt pratique.

Pris sous un aspect pratique, le présent mémoire, servira sans nul doute d'un argumentaire de taille pour les praticiens de droit sur l'incompétence décriée des juridictions militaires face aux civils. Dans une certaine mesure, il pourra servir d'un outil de travail et de réflexion pour les parlementaires qui voudront bien se l'approprier et faire de ces aspirations les leurs en vue d'une éventuelle proposition de loi complétant et modifiant le code judiciaire militaire de 2002. Les avocats et autres acteurs de la justice, adopteront l'attitude qu'il faut pour éviter de cautionner les multiples violations de la Constitution par les juridictions militaires.

Cela étant dit, il convient alors de circonscrire l'objet de l'étude.

03. Délimitation de l'étude.

Délimiter une étude, revient à marquer, à fixer ou à circonscrire son objet ou poser les bornes ou les limites qui tracent les contours d'une étude. Cela peut se faire, soit dans le temps, soit dans l'espace : à quelle période ou époque et dans quel territoire géographique ?

Ça peut aussi se faire sur la matière à traiter ou sur une législation en vigueur. C'est ainsi que pour le besoin de cette étude, l'on ne s'attardera que sur la compétence personnelle des juridictions militaires congolaises face aux civils, prévues principalement dans le Code judiciaire militaire de 2002, mise en cause par la Constitution de la République démocratique du Congo du 18 février 2006 telle que révisée le 20 janvier 2011, et précisée à ce jour par la Loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l'ordre judiciaire (voir les articles 100 et suivants).

Pour plus de rigueur et de cohérence, cela a amené à l'emprunt des méthodes et techniques de recherche.

04. Méthodes et Techniques d'approche.

Il est de bonne logique qu'une recherche comme celle-ci soit l'objet d'un emprunt des méthodes (A), car il a même été affirmé dit-on, que la science c'est la méthode et cela appelle à des techniques (B).

A . Méthodes.

Le concept méthode vient de deux mots grecs, meta : suivant et odo : chemin. Ainsi la méthode est le cheminement cohérent de la pensée humaine en vue de donner une solution définitive à une question de fond.8(*)

Dans leur manière de voir les choses claires, les Professeurs AKELE et SITA, définissent la méthode comme étant une « marche rationnelle de l'esprit pour arriver à la connaissance ou à la vérité. »9(*) Le professeur MWANZO pour sa part estime que la méthode peut être définie comme l'ordonnancement intellectuel des idées en vue d'atteindre un but, d'organiser un travail.10(*)

Et certains auteurs quant à eux, pensent que la méthode est un ensemble des processus pour parvenir à un résultat11(*) ou c'est une voie particulière en vue d'éclairer l'itinéraire de la réflexion permettant de saisir et de démontrer le soubassement du phénomène sous examen12(*). Il est à retenir que la méthode, est une marche pour parvenir à un raisonnement à portée scientifique, mieux un ensemble des procédés raisonnés pour faire une chose ou ordre qu'on suit pour mener une étude.

Ainsi, pour l'efficacité de cette réflexion et en ce qui concerne cette étude, on a emprunté la méthode juridique, la quelle consiste à scruter à fond les textes légaux, la jurisprudence des cours et tribunaux de l'ordre judiciaire(...) et la doctrine juridique relatifs à l'objet de l'étude.13(*) C'est une méthode dogmatique, casuistique : elle expose et analyse le Droit positif. Elle n'ignore pas le fait, mais part du texte et confronte le fait au Droit, elle s'attache aux problèmes de conformité d'un événement donné à la constitution14(*).

La méthode juridique comparative permettra de recourir au Droit judiciaire militaire comparé sur la compétence personnelle des juridictions militaires face aux civils sous d'autres cieux.

La méthode juridique exégétique par contre, amènera à l'interprétation, à l'analyse et à la critique de la loi n° 023/2002 du 18 novembre 2002 par rapport à la Constitution en vigueur et à certains instruments et idéaux juridiques internationaux relatifs à la compétence des cours et tribunaux répressifs spécialisés, pour essayer de penser le réel à la manière de l'évolution de la question en philosophie du Droit pénal militaire.

A cela, il a aussi été fait emprunt à la méthode sociologique, qui, conduira à ramener le Droit judiciaire militaire dans son environnement social. Elle est utile en ce qu'elle permet d'appréhender, en respectant le principe de l'objectivité, les règles juridiques régissant les hommes vivant en société et s'imposant à eux, comme des faits sociaux15(*).

B. Techniques de Recherche.

Pour être à mesure de trouver les données qui ont servi de développement dans cette étude, certains procédés ont de ce fait été indispensables, et ce sont des techniques. Cependant, il est important de dire un mot à titre de définition sur ce qu'est une technique. Ainsi, s'étant penché sur la question depuis plusieurs années, le Professeur Sylvain SHOMBA définit la technique comme dire « l'ensemble des procédés exploités par le chercheur dans la phase de collecte des données qui intéressent son étude. »16(*)

En ce qui concerne la présente réflexion, l'attachement au Centre de Criminologie et de Pathologie Sociale de la Faculté de Droit de l'Université de Kinshasa, a offert un cadre où la technique documentaire a permis d'être en contact avec la doctrine et les textes officiels. Et le progrès technique fait aujourd'hui de l'internet l'un des moyens utilisés pour la même cause. Cela n'a pas cependant empêché de faire des entretiens libres avec les praticiens de Droit, parmi lesquels figurent les magistrats auprès de qui on a été en stage et les avocats. L'assistance aux audiences publiques, a sans doute été d'un apport considérable.

A ce niveau, il convient d'aborder la première Partie.

PARTIE I:

UNE COMPETENCE ANTERIEURE DES JURIDICTIONS MILITAIRES CONGOLAISES FACE AUX CIVILS

« Les juridictions militaires connaissent des infractions commises par les éléments des Forces armées et de la Police nationale. »

Article 156 alinéa 1er de la Constitution de la République démocratique du Congo, in JORDC, 52ème Année, Numéro Spécial, Kinshasa, 5 février 2011, p.52.

A la suite de Gérard CORNU, la compétence peut désigner l'ensemble des affaires dont une juridiction ou un ensemble des juridictions a vocation à connaitre ou l'aptitude à instruire et juger une affaire, à en connaître ; ou encore l'aptitude déterminée par l'ordre auquel appartient la juridiction, par le degré de juridiction, par la nature de la juridiction17(*). Tandis que la juridiction est entendre comme étant l'ensemble des tribunaux de même classe ou degré, envisagés en tant qu'ils exercent le pouvoir de juger dans un secteur déterminé correspondant à leur nature18(*). Ainsi parler de la compétence des juridictions militaires congolaises face aux civils, revient à traiter de l'aptitude des cours et tribunaux militaires à instruire et juger les affaires dont les civils sont impliqués en République démocratique du Congo.

Depuis 2002, la justice militaire est rendue en République démocratique du Congo par la Haute Cour Militaire, les Cours Militaires, les Cours Militaires Opérationnelles (qui accompagnent les fractions de l'armée en campagne), les Tribunaux Militaires de Garnison et les Tribunaux Militaires de Police. C'est ce que prévoit la loi n° 023/2002 du 18 novembre 2002 portant Code judiciaire militaire, dans son article 1er. Il s'agit dans la présente étude, de ces cours et tribunaux qu'on désignera tour à tour par les expressions ``Juridictions militaires'', et ``Juridictions des Forces armées'' ou ``Justice militaire''.

Elles sont reparties à travers le pays comme peut bien le présenter le tableau ci-contre :

Juridictions

Ressorts

Sièges ordinaires

Compositions du siège

Haute Cour Militaire

Tout le territoire national (article 6, alinéa 2 CJM).

Kinshasa, capitale de la RDC (article 6, al. 1er CJM)


· En cas de circonstances exceptionnelles, à n'importe quel endroit du territoire national fixé par le Président de la République (article 7, al. 1er CJM)


· En temps de guerre, le Président de la

République peut décider d'organiser des chambres foraines dans les zones opérationnelles (article 7, al. 2 CJM).

Cinq membres dont deux magistrats de carrière (article 10, alinéa 2)


· En cas d'appel, cinq membres dont trois magistrats de carrière (article 10, alinéa 5 CJM).

Cours Militaires

La province ou la ville

de Kinshasa (article 12, alinéa 1er CJM).


· Chef-lieu de la province, lieu où se trouve le quartier général de la région militaire ou autre lieu fixé par le Président de la République (art 12, al. 2 CJM)


· En cas de circonstances exceptionnelles, le Ministre de la Défense peut changer le siège des cours opérationnelles (article 13, alinéa 2 CJM).

Cinq membres dont deux magistrats de carrière (article 16, alinéa 1er CJM).

Cours Militaires opérationnelles

Zones opérationnelles déterminées par le Président de la République (article 18, alinéa 2 CJM).

Elles accompagnent les troupes dans les zones opérationnelles (article 18, alinéa 1er CJM).

Cinq membres dont un magistrat militaire de carrière au moins.

Tribunaux Militaires de Garnison

District, ville, garnison ou base militaire (article 21, alinéa 1er).

Chef-lieu du district, de la ville où est situé l'état-major de la garnison ou tout autre lieu fixé par le Président de la République (article 21, alinéa 2 CJM).

Cinq membres dont un magistrat de carrière au moins (article 22, alinéa

2 CJM).

Tribunaux Militaire de Police

Ressort du tribunal

de garnison (article 23 CJM).

 

Trois membres dont un magistrat de carrière au moins (article 24, alinéa

1er CJM).

Source: Defense Institute of International Legal Studies, in M. WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., p.35.

En attendant l'érection de nouvelles provinces prévues par les articles 2 et 226 de la Constitution, la République démocratique du Congo est composée de dix provinces auxquelles il faut ajouter la ville de Kinshasa qui a, elle aussi, le statut d'une province. En conséquence, outre la Haute Cour Militaire, la justice militaire comprend douze cours militaires. Il faut y ajouter 36 tribunaux militaires de garnison. Comme Jean-Paul Tshibangu, chargé d'observation de l'administration de la justice à la MONUC l'avait constaté, au regard de l'étendue du territoire national, le fait de fixer le ressort des tribunaux de garnison, juridictions militaires de base au niveau du district n'est pas de nature à faciliter l'accès à la justice. Généralement, lesdits tribunaux sont situés très loin du lieu où se commettent les infractions. Dans ces conditions, le recours aux audiences en chambres foraines s'avère nécessaire pour que justice soit faite. C'est ce qui explique que, de manière générale, pratiquement tous les procès pour crimes internationaux enregistrés jusque-là ont été organisés au cours de ces audiences en chambre foraine.19(*)

Pour quelle raison parle-t-on d'une incompétence antérieure des juridictions militaires congolaises dans cette étude ?

La constitution en vigueur en République démocratique du Congo, ne reconnait plus à ces juridictions les pouvoirs qu'elles continuent à exercer, malgré cet état d'inconstitutionnalité.

En effet, En plus des faiblesses institutionnelles qui se traduisent par l'incapacité objective de juger un nombre important de cas, la justice militaire est rendue ineffective par un cadre législatif totalement anachronique et contraire aux normes constitutionnelles et internationales sur le droit à un procès équitable. Son indépendance est constamment minée par le contrôle de plus en plus accru qu'exerce le commandement militaire sur son fonctionnement et les interférences politiques dans ses décisions judiciaires. Plus préoccupant, les tribunaux militaires étendent leur compétence sur les civils, une pratique à la fois contraire à la Constitution et aux normes internationales et africaines applicables au Congo.20(*)

Les constitutions qui ont régi la République démocratique du Congo jusqu'à l'entrée en vigueur du décret-loi du 18 décembre 1964 portant Code provisoire de justice militaire n'avaient prévu une compétence expresse des juridictions militaires à l'égard des personnes n'ayant pas la qualité de militaire ou de policier. En effet, l'article 17 de la loi sur le Gouvernement du Congo-belge prévoyait que « la justice civile et la justice militaire sont organisées par décret.»21(*) Et la loi fondamentale du 19 mai 1960 à son tour dans l'alinéa 2 de l'article 191 disposait ce qui suit : « les lois règlent l'organisation des tribunaux militaires, leurs attributions, les droits et les obligations des membres de ces tribunaux et la durée de leurs fonctionnements.»22(*) Arrivé le 1er août 1964, la Constitution dite de Luluabourg précisait qu'en temps de paix, les tribunaux militaires ne connaissent que les infractions commises par les membres des Forces armées.23(*)

Toutefois, ces textes constitutionnels reconnaissaient au Roi (époque coloniale) et au Président de la République, les prérogatives de suspendre sur tout ou partie du territoire de la République, pour une durée, l'action répressive des cours et tribunaux ordinaires et y substituer celle des juridictions militaires pour les infractions qu'il devait déterminer. C'est ce qui ressortait des dispositions des articles 19, alinéa 2, 187, alinéa 2, 124, alinéa 2 et 58, alinéa 1er, respectivement de la loi sur le Gouvernement du Congo-belge, de la Loi fondamentale de 1960, de la Constitution du 1er août 1964 et de la Constitution du 24 juin 1967 telle qu'elle fut plusieurs fois révisée.24(*) A lire les décrets et les lois qui ont organisé les juridictions militaires avant le Code de justice militaire du 25 septembre 1972, la justice militaire n'était conçue que pour réprimer des actes pénaux d'extrême gravité commis par les militaires.

D'où le décret du 22 décembre 1888 plusieurs fois modifié et complété tour à tour par les décrets du 24 novembre 1890, du 12 mai 1943 et du 29 avril 1944, créait ainsi les conseils de guerre et prévoyait les peines et les fautes militaires graves érigées en infractions. Ils connaissaient (ces conseils de guerre) de tous les crimes et délits prévus par les lois pénales ordinaires et en outre des fautes commises par les Officiers, sous-officiers et soldats de la Force publique de l'Etat.25(*) Mais la modification amorcée déjà par le décret du 09 juillet 1923 dans son article 86 avait élargi la compétence des conseils de guerre jusqu'aux « Européens appelés à prester leurs services aux troupes mobilisées et commissionnées à cette fin à un grade militaire pendant la durée de leurs fonctions militaires, des porteurs, serviteurs d'Européens et conducteurs des véhicules automobiles qui accompagnaient les troupes en campagne, des gardes territoriaux militaires.»26(*)

Ayant été l'objet des critiques déjà à cette époque, ce système devait changer pour laisser le règne à un autre. Ce fut l'oeuvre du décret du 08 mai 1958 dont l'idée essentielle comme l'avait déjà dit le Professeur LIKULIA BOLONGO Norbert, alors Général des Forces armées, était que « le militaire comme les autres citoyens doit bénéficier de l'expérience des magistrats et que les conseils de guerre ne doivent connaître que des mutilations volontaires et des fautes militaires graves érigées en infractions.»27(*) Ces juridictions militaires qui ne devaient connaître que des fautes militaires graves poursuivit-il, laissaient ainsi à la compétence des tribunaux répressifs ordinaires la connaissance des infractions de droit commun commises par les militaires.28(*)

Il en est de même du décret-loi du 18 décembre 1964 portant Code provisoire de Justice militaire, qui n'attribuait pas la compétence aux juridictions militaires sur les personnes autres que les militaires. Car son but, était de rendre, le justifiait ainsi MOBUTU Joseph-Désiré, alors Général de Corps d'Armée, comme c'est le cas dans nombreux pays, compétence générale aux conseils de guerre, c'est-à-dire compétence pour toutes les infractions commises par les militaires, tant les infractions de droit commun que les infractions militaires proprement dites.»29(*)

Comme on peut le constater, il convient de s'interroger sur l'extension de compétence des juridictions militaires, car, ces juridictions des Forces armées comme les termes l'indiquent, n'ont été instituées, que pour juger les militaires concernant toutes les formes que peut revêtir leur délinquance.30(*) A cette préoccupation, l'article 59 de la Constitution du 24 juin 1967 précitée disposait que : « l'ensemble des cours et tribunaux comprend une Cour suprême de Justice, des cours d'appel, des cours militaires et des tribunaux. L'organisation, la compétence des cours et tribunaux ainsi que la procédure à suivre sont réglées par la loi.»31(*)

C'est cette dernière disposition qui a ouvert la boite à Pandore quant à l'extension de compétences des juridictions militaires, car, le législateur congolais dans le Code de justice militaire de 1972 avait la latitude de le faire s'appuyant ainsi sur cette constitution en vigueur à l'époque, était amené à reconnaître aux conseils de guerre une compétence personnelle tout en délimitant les domaines respectifs des tribunaux ordinaires et des tribunaux militaires, et à instituer, dans l'intérêt du prévenu comme dans celui de l'ordre public militaire(...).32(*) Il s'agit finalement de cette même extension de compétence que les lois n°023/2002 et n° 024/2002 du 18 novembre 2002 sus-évoquées ont héritée.

Telle est l'origine et le soubassement juridique de l'extension de compétences des juridictions militaires congolaises face aux civils, que nous développons dans cette partie où il sera question d'en parler en temps de paix (Chapitre 1er) et en période troublée (Chapitre 2ème).

Chapitre 1er : La compétence des Juridictions militaires congolaises face aux civils en temps de paix.

Le temps de paix, qu'est-ce ?

Le temps de paix est entendu comme : « la période durant laquelle un Etat souverain, jouit d'une tranquillité publique sur toute l'étendue de son espace géographique national : l'ordre public et la sécurité des populations y étant pleinement assurés par les institutions légitimes appropriées (Armée, Police, etc.). Il n'y a point d'agression externe, il n'y a point d'affrontement armé dû à une guerre civile. Mais cela n'exclut pas totalement les crises ou troubles graves que les forces de l'ordre peuvent contenir de temps à autre.»33(*) Ainsi donc, une partie du territoire d'un Etat peut connaître le temps de paix pendant qu'une ou plusieurs autres sont dans le trouble.

L'interprétation des textes de lois sur la compétence des juridictions militaires à l'égard des personnes n'ayant pas la qualité de militaire ni de policier (civils) pose problème, car, la loi n'attribue pas expressément à ces juridictions la compétence de juger les civils à la hauteur de l'interprétation dont s'est livré le juge militaire, d'autant plus que le Code pénal militaire qui est une loi de la République, peut être appliqué même par le juge pénal de droit commun.

Or, la tendance actuelle et comme on va le découvrir, est de faire justiciable des juridictions militaires, toute personne qui se rend coupable d'une quelconque infraction définie par le Code pénal militaire, allant ainsi jusqu'au-delà de l'extension normale et logique de compétence, laquelle ne devait du reste être qu'une exception au principe qui voudrait que tout citoyen soit renvoyé devant son juge naturel pour répondre des actes pénaux commis par lui.

C'est à juste titre que le Professeur LUZOLO Bambi Lessa Emmanuel-Janvier, a pu déceler ce qui suit : « un des écueils de l'organisation judiciaire congolaise est depuis longtemps la controverse sur les rapports entre la distribution de la justice civile et la justice militaire. Bien qu'à première vue cela ne paraisse pas perceptible (poursuit-il), cette question pendante peut avoir une incidence sur l'institution de la détention préventive. C'est pourquoi, à la liste des solutions qu'appelle ce problème (renchérit-il), il y a lieu d'inscrire la solution du règlement du rapport entre la justice militaire et la justice civile du point de vue de la compétence et du point de vue de la procédure.»34(*) Controverse qui fait oublier aux animateurs de la justice militaire la portée objective de leur compétence, lequel oubli les plongent dans l'ignorance allant jusqu'à s'attribuer une compétence large non seulement face aux civils, devenant même des médiateurs pour trancher des questions purement civiles qui ne relèvent aucunement de la compétence matérielle des juridictions militaires.

Pour s'en convaincre à ce point de vue, il faudrait considérer l'alinéa 2 de l'article 30 du Code judiciaire militaire qui dispose en subsistance que : « lorsqu'une juridiction militaire et une juridiction de droit commun se trouvent simultanément saisies de la même infraction ou d'infractions connexes, la Cour suprême de Justice, à la requête du Procureur général de la République détermine la juridiction compétente.»35(*) A la suite de l'écartement de la Cour suprême de justice en trois cours distinctes et de la promulgation le 11 avril dernier de la loi organique n° 13/011-B portant notamment compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, cette compétence revient actuellement à la Cour de cassation en installation et logiquement à la requête du Procureur général près la dite Cour.

Comme on peut le voir, non seulement qu'il y a des infractions au Code pénal militaire qui peuvent être soumises au juge pénal ordinaire, mais aussi même le législateur avait du mal à résoudre ce problème de conflit de compétences et il l'a soumis à la sagesse du juge suprême.

Question d'interprétation et de découverte de l'esprit des lois, la lecture combinée des articles 73, 74, 76, 79, et 104 du même Code judiciaire militaire, laisse hypothétique la compétence des juridictions militaires face aux civils en période d'absence de péril public. En effet, les cours et tribunaux militaires ont plénitude de juridiction pour juger les individus traduits ou renvoyés devant eux pour les infractions prévues et punies par la loi.36(*) Il s'agit ici sans doute de la loi pénale militaire, parce que l'article qui suit précise que la soumission aux lois militaires commence pour les miliciens et les volontaires de toutes les catégories dès le moment où un agent commis à cet effet leur fait, après leur avoir préalablement donné lecture des lois militaires, la déclaration qu'ils sont soumis à ces lois.37(*)

Cela appelle cependant à l'observation et à la préoccupation sur le nombre de lois militaires visées dans cette lecture et aux séances ou au temps qu'il faut pour ce faire. Car, sans cette formalité, à la lumière du deuxième alinéa de l'article 74 sous analyse, ces individus n'ayant pas encore acquis la qualité de militaire, ne sont pas soumis aux lois militaires, tant que le procès-verbal de constat de ladite formalité n'aura pas été signé par l'agent et les recrues ou leurs témoins.

Parlant de la compétence matérielle de ces juridictions, laquelle compétence a d'incidence sur celle dite personnelle, les alinéas 1 et 2 de l'article 76 prévoient que : « les juridictions militaires connaissent sur le territoire de la République, des infractions d'ordre militaire punies en application des dispositions du Code pénal militaire. Elles connaissent également des infractions de toute nature commises par des militaires et punies conformément aux dispositions du Code pénal ordinaire.»38(*)

De ces considérations, il convient de scruter le sens des expressions ''traduits'' ou ``renvoyés'' employés à l'article 73, ci-haut cité. Pour cela, l'expression ''traduits'' renvoie aux militaires et ''renvoyés'' s'applique aux civils qui en réalité relèvent du juge pénal ordinaire ou de droit commun.

Quant à l'article 79 qui rend les juridictions militaires compétentes pour les infractions au Code pénal militaire commises par des civils, il énonce que: « lorsque le Code pénal militaire définit ou réprime des infractions imputables à des justiciables étrangers à l'Armée, les juridictions militaires sont compétentes à l'égard de l'auteur, du co-auteur ou du complice, sauf dérogation particulière.»39(*)

Pour tourner la page à cette question, l'article 104 dispose que « la compétence personnelle des juridictions militaires est déterminée par la qualité et le grade que porte le justiciable au moment de la commission des faits incriminés ou au moment de sa comparution.»40(*) Cependant, pour les civils, il est tenu comptent du privilège de juridiction pour déterminer laquelle juridiction militaire sera compétente, et à défaut, c'est le tribunal militaire de garnison qui juge tous les civils qui ne bénéficient pas dudit privilège qui du reste n'est pas prévu pour tout le monde.

Ainsi, il est prévu ce qui suit : « sont justiciables de la Haute Cour militaire: b) les personnes justiciables, par état, de la Cour suprême de Justice, pour des faits qui relèvent de la compétence des juridictions militaires41(*)» et « sont justiciables de la Cour militaire: b) les personnes justiciables, par état, de la Cour d'appel pour des faits qui relèvent de la compétence des juridictions militaires; c) les fonctionnaires de commandement du Ministère de la Défense, de la Police nationale, du Service national ainsi que de leurs services annexes. »42(*)

Il est à observer ici que le législateur congolais, en ce qui concerne les règles relatives à l'extension de compétences de la justice militaire en dehors des Forces armées et de la Police, a manqué de cohérence sur la portée et l'étendue desdites compétences qui devaient être prévues à titre d'exception. Or comme on va le voir tout au long de cette étude, il n'est plus question d'une compétence exceptionnelle, mais plutôt ordinaire en ce sens qu'en droit judiciaire congolais le juge pénal tant ordinaire que militaire se partagent les mêmes justiciables au point que le juge militaire dépasse.

Malgré ces observations, plusieurs situations résultant tant des dispositions expresses que de la mauvaise interprétation des lois et de la pratique, rendent les civils même qui n'ont pas servi au sein des Forces armées à quelque titre que ce soit ou sous la qualité de militaire ou de policier, justiciables des juridictions des Forces armées, dont pour le besoin de la présente étude, on en analysera selon qu'il s'agit du personnel civil oeuvrant ou embarqué au sein des Forces armées ou de la Police nationale (Section 1ère) et selon qu'il s'agit des civils impliqués aux infractions des militaires ou policiers et ceux qui commettent des infractions au Code pénal militaire (Section 2ème).

Section 1ère : Du personnel civil oeuvrant ou embarqué au sein des Forces armées ou de la Police nationale.

Dans l'exercice de leur fonction et dans l'accomplissement de leur mission, les Forces armées et la Police nationale, recourent au service de certaines personnes n'ayant pas la qualité de militaire, ni celle de policier. Il s'agit des agents de l'Etat affectés dans des différents services des FARDC et de la PNC et des individus qui prennent place à bord de leurs embarcations.

Bien que cela peut laisser à désirer, le législateur congolais avait estimé utile de les soumettre aux lois pénales militaires pour des raisons qu'on va traiter dans les deux paragraphes qui suivent.

§1er : Du personnel civil des Forces armées ou de la Police nationale.

Aux termes de l'article 108 du Code judiciaire militaire congolais, hérité de l'article 121 du défunt Code de justice militaire du 25 septembre 1972, les personnes non revêtues de la qualité de militaire, employées dans un établissement ou dans un service de l'Armée ou dépendant du Ministère de la Défense sont justiciables des juridictions militaires pour des infractions commises au sein de l'Armée ou dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. Il en est de même, poursuit l'alinéa 2, des personnes employées dans un établissement ou dans un service dépendant de la Police nationale ou du Service national.43(*)

Comme on peut le remarquer, le législateur congolais n'énumère pas en détail les personnes visées dans cette disposition. Il convient alors d'interpréter et chercher le sens de la généralité des termes employés.

A. Personnes concernées.

Parmi les membres du personnel civil militaire, on retrouve dans la première catégorie les agents de l'Etat sous statut de la fonction publique affectés au Ministère de la Défense nationale, du fait que le statut de la fonction publique s'applique (notamment) au personnel civil militaire oeuvrant au sein des Forces armées et de la Police nationale.44(*)

Ces civils qui travaillent au Ministère de la Défense, occupent des fonctions correspondant à leurs grades. Et il convient de signaler que le grade est le titre juridique conféré par la titularisation ou l'acte de nomination qui autorise, le fonctionnaire à exercer un emploi correspondant.45(*)

Il apparait dès lors important de le rappeler avec le Professeur VUNDUAWE te PEMAKO Félix, qu'il y a trois catégories d'emplois ou d'occupations et sont considérés46(*) :

1) Comme emplois de commandement les fonctions de Secrétaire Général, Chef de Division, Chef de Bureau ;

2) Comme emplois de collaboration, les fonctions d'Attaché de Bureau de 1ère classe, de 2ème classe, Agent de Bureau de 1ère classe ;

3) Comme emplois d'exécution, les fonctions d'Agent de Bureau de 2ème classe, Agent auxiliaire de 1ère classe, de 2ème classe et d'Huissier.

En deuxième catégorie, on pouvait retrouver un personnel civil sous régime contractuel, mais la notion d'agent temporaire a été supprimée du fait que plus d'un agent temporaire engagé initialement pour effectuer certaines tâches spécifiques pour une durée déterminée s'est vu confirmé par arrêté de nomination définitive sous le régime du statut devenant ainsi un agent de carrière. Le principe de l'unicité du statut a eu également pour conséquence la suppression des agents sous le régime de contrat. Celui-ci était un contrat administratif.47(*)

Ainsi, les civils visés par cette extension de compétence comme on le dit, sont repartis dans les différents services techniques et administratifs de la Direction Générale du Ministère de la Défense nationale, tels que l'Institut géographique du Congo, le Service de l'Informatique, la Direction du personnel et des Finances, le Centre Supérieur Militaire, l'Académie militaire de Kananga (Ex-EFO). On trouve d'autres au Commandement des Forces armées, à la Police nationale, à la Justice et à la presse militaires (...), dans des Bataillons, Compagnies indépendantes et des Camps militaires, dans des Mess des Officiers, des Cantines-troupes, dans des Foyers sociaux, dans des écoles primaires et jardins d'enfants de l'Armée (...).48(*)

Il va falloir cependant s'interroger sur la soumission de ces civils qui, bien qu'ils sont affectés au service de l'Armée ou de la Police, n'ont jamais acquis la qualité de militaire. A cette préoccupation, les justifications se sont réfugiées à ce que l'on dit, dans le simple fait que « ces civils qui travaillant dans les mêmes conditions que les militaires ont parfois accès à des documents très important au point de vue de la sécurité militaire, peuvent ainsi par leur comportement porter atteinte non seulement aux intérêts vitaux de la Défense nationale par la violation de ce secret militaire, mais aussi détruire ou dégrader les dispositifs de défense établis par l'Armée ; il a donc paru nécessaire de les placer dans les mêmes conditions que les militaires en les soumettant à la rigueur de la loi pénale militaire.»49(*)

De toutes les façons, il est à relever que si cette idée pouvait être bien accueillie à cette époque-là, en plein vingt et unième siècle cependant, elle ne trouve pas tout fondement utile en ce sens que le juge pénal de droit commun à qui revient la compétence orthodoxe de juger les civils, a la mission de protéger non seulement les libertés individuels par son action répressive, mais aussi sans nul doute celle de protéger les intérêts fondamentaux de la Nation desquels dépendent intimement ces droits et libertés; et comme on va l'observer lors de l'analyse des incriminations visées à ce sujet, ce juge pénal ordinaire n'est pas moins outillé pour réprimer toutes fautes pénales susceptibles de compromettre à la Défense nationale.

En tout état de cause, un civil qui oeuvre sous statut au sein des services de l'Armée ou de la Police, n'est concerné que s'il est en activité, qu'il convient d'entendre comme « la position du fonctionnaire qui exerce effectivement les fonctions correspondant à l'emploi qui lui a été attribué, à inclure les misions officielles, les congés ainsi que les absences autorisées par le chef hiérarchique.»50(*) C'est cette logique de chose que renferment les expressions ''au sein de l'armée'' ou ''dans l'exercice de leurs fonctions'' usitées à l'article 108 précité du Code judiciaire militaire.

Quelles sont alors les infractions visées par le législateur, susceptibles d'être perpétrées par les civils oeuvrant au sein de l'Armée ou de la Police à l'occasion ou dans l'exercice de leurs fonctions et pouvant compromettre aux intérêts de la Défense nationale ?

C'est l'anatomie même du point B suivant qui sans pour autant faire une étude approfondie des infractions et le mode de leur perpétration, se limite de les prélever et démontrer leur lien avec les fonctions susvisées.

B. Les infractions visées dans le Code judiciaire militaire.

L'examen de l'article 108 du Code judiciaire militaire laisse entendre que les infractions qui soustraient les civils travaillant au sein de l'Armée ou de la Police de leur juge naturel pour les soumettre à la justice militaire, peuvent être celles prévues tant dans le Code pénal militaire que dans les lois pénales ordinaires ou spéciales éparses, pour autant qu'elles ne soient commises au sein de l'Armée, de la Police, à l'occasion ou pendant l'exercice de la fonction.

a. Les infractions prévues par le Code pénal militaire.

S'étant inspiré de l'idée de la sauvegarde du patrimoine et des intérêts de la Défense, idée fustigée ci-haut, le législateur du Code pénal militaire du 18 novembre 2002, lequel code est né de la réforme inachevée du défunt Code de justice militaire du 25 septembre 1972, a prévu diverses dispositions qui incriminent des comportements des individus suscités.

1. Abus du droit de réquisition.

C'est l'incrimination de l'article 110 du Code pénal militaire, qui dans les alinéas 1 et 2 dispose que : « quiconque au service des Forces armées, abuse des pouvoirs qui lui sont conférés en matière de réquisition ou refuse de donner reçu des quantités fournies, est puni de deux mois à deux ans de servitude pénale ; quiconque, au service des Forces armées exerce une réquisition sans en avoir la qualité, est puni, si cette réquisition est faite sans violence, de trois ans à cinq ans de servitude pénale ; sans préjudice des peines prévues ci-dessus, le coupable est, en outre condamné à la restitution.»51(*)

Dans l'un tout comme l'autre alinéa, les personnes concernées sont du personnel de service des Forces armées ou de la Police, civil, militaire ou policier soient-elles. Et l'acte incriminé est le faite d'abuser de ce pouvoir de réquisition si l'on en a reçu, de refuser de dire exactement sur quoi la réquisition a porté, d'en exercer alors qu'on n'a pas été autorisé. Pour ce qui est de l'élément intentionnel, il suffit que l'agent se retrouve dans l'une des hypothèses prévues par cet article.

2. Des faux, falsification, détournements, concussions et corruptions.

Cette série d'incriminations est prévue dans la section 5 du chapitre II du Code pénal militaire qui, traite des incriminations contre l'honneur ou le devoir. Aux travers des articles 71 à 84, le législateur congolais interdit à quiconque chargé d'un service dans les Forces armées ou au Ministère de la Défense, de commettre des actes de faux et d'usage du faux, de falsification, de dissipation, de détournements, de perception et réception de l'indu, d'accord, de contrefaçon, d'altération, de délivrance indue, de fabrication, d'établissement, de corruption, de certification ou dissimulation fausses, de distribution et de prise d'intérêt sur : la comptabilité, les deniers ou matières, le rapport de commandement, la situation de l'outil ou des moyens de Défense ou sur les données de renseignements opérationnels, les matériels, les unités ou les troupes, les documents, les substances, les denrées ou boissons, les armes, les munitions, véhicules, effets, objets, les reliquats provenant des fonds de la paie des militaires, dans les actes, adjudications, dans une affaire d'ordonnancement de la paie ou de liquidation, la surveillance ou le contrôle d'une entreprise privée, la passation de marchés ou contrats au nom de l'Etat, les déclarations, les certificats ou attestations, les feuilles de route, ordre de mission, carte militaire, certificat de malade ou d'infirmité, état de grossesse et cause de décès.

La réalisation de ces infractions, exige pour leur consommation, la qualité de l'auteur qui doit être au service des Forces armées, de la Police ou du Ministère de la Défense, ou qui, simplement trompe la vigilance des concernés sur les actes prohibés dans cette énumération pour en faire usage ou en être bénéficiaire.

L'acte matériel consiste au fait pour l'incriminé d'avoir commis l'un des actes susvisés, de les provoquer ou de les favoriser, d'en bénéficier ou d'en faire usage. Quant à l'élément psychologique, il vise le fait pour l'agent de se retrouver dans l'une des hypothèses sachant que l'acte est prohibé.

En ce qui concerne les peines à encourir, il y a lieu de noter qu'elles varient selon les cas prévus aux articles susmentionnés. C'est ainsi que le coupable des cas prévus à l'article 71, écopera d'une peine d'emprisonnement allant de dix à vingt ans ; à l'article 72, il s'agit de quinze à vingt ans en temps de paix (la mort en période de trouble), un à cinq ans, dix à vingt ans pour l'article 73 sous réserves de l'application des peines plus graves prévues par le Code pénal ordinaire. Les mêmes peines vont d'un à dix ans et même la confiscation de tous les biens produits du vol, du détournement ou de la dissipation52(*) en cas des actes prévus à l'article 74.

Comme on le voit, la peine de mort prévue pour cette série d'incrimination est excessive et simplement intimidatrice, alors que le droit pénal ne se veut pas un droit d'intimidation, mais plutôt bien que demeurant sanctionnateur, un droit de la resocialisation du délinquant et cette resocialisation vise à la fois le milieu socioprofessionnel où il vivait, travaillait et évoluait. Pourtant à la suite de Robert BADINTER, sacrilège contre la vie, la peine de mort est de surcroît inutile. Jamais, nulle part, elle n'a réduit la criminalité sanglante. Réaction, et non dissuasion, elle n'est que l'expression légalisée de l'instinct de mort. Elle abaisse sans protéger. Elle est vengeance et non justice.53(*) D'ailleurs au Congo on ne le dira jamais assez, malgré que cette peine d'élimination soit suspendue dessus les têtes des auteurs, les faux, les falsifications, les détournements, les concussions et les corruptions susvisés sont érigés en mode de création de richesse pour s'acheter les belles villas et les véhicules de luxe.

Signalons que le législateur dans le Code pénal militaire, définit le détournement de deniers publics comme étant « le fait pour un commandant d'Unité, un Officier chargé de finances ou un préposé à la paie, d'utiliser, à des fins quelconques, des reliquats provenant des fonds de la paie des militaires sans en avoir préalablement obtenu l'autorisation du Ministre de la Défense.»54(*)

Sur cette même série d'incrimination, le cas de l'article 76 est puni de cinq à dix ans et aussi d'une amende de 5.OOO à 10.000 Francs congolais lorsqu'on se place aux articles 77 et 78 ; dix ans et 15.OOO Francs congolais d'amende pour l'article 79, six mois à cinq ans et 5.000 Francs congolais maximum au cas de l'article 80 ; six mois à dix ans et 10.000 Francs congolais d'amende dans les cas portés aux articles 81 et 82 ; un à cinq ans de servitude pénale dans les coups des articles 83 et 84.

Enfin, l'article 189 du même code, punit de quinze à vingt ans, toute personne qui pouvant disposer de la force publique, en aura requis ou ordonné, fait requérir ou ordonner l'action ou l'emploi pour empêcher l'exécution des lois sur le recrutement militaire ou sur la mobilisation.55(*)

3. La divulgation des informations secrètes.

Le chapitre III du titre III qui protège les intérêts fondamentaux de la Nation incrimine les atteintes au secret de la Défense nationale. Par secret de la Défense au sens de l'article 149, il faut entendre : « les renseignements, procédés, objets, documents, données informatisées ou fichiers intéressant la Défense nationale qui ont fait l'objet de mesures de protection destinée à restreindre leur diffusion.»56(*) Ainsi donc ici, la culpabilité résulte d'un acte souvent règlementaire interdisant et restreignant la diffusion des susvisés.

C'est alors que l'article 150 punit de vingt ans de servitude pénale en temps de paix: «ceux qui se rendent coupables de divulgation, diffusion, publication ou reproduction des informations visées à l'article ci-dessus ou ceux qui en fournissent les moyens (...) sans préjudice des peines plus fortes qu'ils peuvent encourir par d'autres dispositions légales.»57(*)

L'article 151 pour sa part punit quiconque civil ou militaire se rendra bénéficiaire de l'acte prohibé à l'article 150, car, l'incrimination de divulgation des informations concerne non seulement le fait de divulguer, mais aussi la réception illicite d'un écrit ou d'un document secret.58(*)

4. De l'usurpation d'uniformes, décorations, signes distinctifs et emblèmes.

L'alinéa 2 de l'article 85 du Code pénal militaire punit aussi tout individu employé par le Ministère de la Défense qui porte des décorations, médailles, insignes, uniformes ou costumes militaires étrangers sans y avoir été préalablement autorisé. C'est en fait la même infraction de l'article 454 de l'ancien Code de justice militaire de 1972 qui dans son alinéa dernier disposait que : « la même peine (deux mois à cinq ans de servitude pénale) est prononcée contre tout militaire ou tout individu employé par le Département de la Défense nationale qui porte des décorations, médailles ou insignes étrangers sans y avoir été préalablement autorisé.»59(*)

5. De la rébellion.

Aux termes de l'article 91 du Code pénal militaire, est constitutif de rébellion avec ou sans arme : « toute attaque, toute résistance avec violences et voies de fait commises par un militaire ou un individu embarqué ou employé par le Ministère de la Défense envers les Forces armées ou les agents de l'autorité publique.»60(*)

La peine va de cinq à dix ans, de dix à vingt ans de servitude pénale et s'il résulte des actes de rébellion des blessures ou la mort de l'autorité contre laquelle ils sont dirigés, les coupables sont punis de servitude pénale à perpétuité ou de la peine de mort selon le cas ; c'est ce qui ressort de l'alinéa 2 du même article.

6. Du refus d'obéissance.

L'article 93 du Code pénal militaire en examen dispose que : « quiconque, militaire ou civil, embarqué ou employé par le Ministère de la Défense, refuse d'obéir aux ordres de son supérieur, ou s'abstient à dessein de les exécuter ou, hors le cas de force majeure, n'exécute pas l'ordre reçu, est puni de dix ans au maximum de servitude pénale.»61(*)

7. Des voies de fait et outrages envers des supérieurs.

Quiconque, civil, militaire ou assimilé, embarqué ou au service des Forces armées, dispose l'article 95 « exerce les pendant le service ou à l'occasion du service, même hors du bord, les voies de fait envers un supérieur ou une autorité qualifiée, est puni de cinq ans au maximum de servitude pénale.»62(*) La peine est réduite de six mois à deux ans au maximum, si les voies de fait n'ont pas été exercées pendant le service ou à l'occasion du service. C'est ce prévoit l'article 96 du même Code.

En revanche, l'article 97 prévoit que quiconque, embarqué ou au service des Forces armées, outrage son supérieur ou un supérieur, par paroles, écrits, gestes ou menaces, se verra infligé une peine qui peut aller de six mois à cinq ans de servitude pénale (emprisonnement).

8. Des insultes à sentinelle.

L'article 102 punit de deux mois à deux ans de servitude pénale, quiconque, civil ou militaire, embarqué ou au service des Forces armées, insulte une sentinelle par paroles, écrits, gestes ou menaces. Par sentinelle ici, il est à entendre tout élément des Forces armées ou de la Police Nationale Congolaise commis à la garde d'un établissement ou pour la sécurité d'une autorité.

9. Des infractions aux consignes.

Il y a des mesures prohibitives ou des instructions, des instructions formelles que les supérieurs donnent aux subordonnés et on parle de consigne, laquelle peut être donnée à toute la troupe ou à un seul individu (militaire ou policier) à raison de sa mission spécifique. C'est ce qui ressort de l'interprétation de l'article 113 du Code pénal militaire.

La combinaison faite des articles 113 et 195 du même code, laisse entendre que la violation de consigne vise également les personnes n'ayant nullement la qualité de militaire ou de policier.

En effet, il est prévu ce qui suit : « quiconque, au service des Forces armées, de la Police nationale et du Service national, viole une consigne générale donnée à la troupe ou une consigne qu'il a personnellement reçue mission de faire exécuter ou force une consigne donnée à un militaire, est puni de trois à dix ans de servitude pénale.»63(*) Et dans cette même catégorie, l'article 195 dispose en encore que : « est passible des peines prévues pour violation de consignes, tout militaire ou tout individu qui, dans une installation militaire, ou assimilé, se rend coupable de culture, détention, trafic ou commercialisation de la drogue, du chanvre à fumer, des stupéfiants ou d'autres substances narcotiques.»64(*) Cette interdiction de cultiver, trafiquer, vendre, détenir ou commercialiser les produits susmentionnés est prise comme une consigne générale donnée à tout individu même civil.

10. Du défaut de dénonciation d'une infraction relevant de la juridiction militaire.

Dans son titre VII qui traite des infractions diverses, le Code pénal militaire prévoit que : « tout militaire ou tout individu embarqué ou au service des Forces armées, qui refuse ou s'abstient volontairement de dénoncer une infraction commise par un individu justiciable des juridictions militaires est puni de dix ans au maximum de servitude pénale.»65(*) Toutefois, ici il convient de comprendre que la culpabilité tombe si l'agent refuse dénoncer un membre de sa famille ou une personne habitant sous son toit.

11. De la non-assistance à personne en danger.

Pour mieux comprendre la nature de cette incrimination dans ce sens qui ne concerne ici que ceux qui travaillent au sein de l'Armée ou de la Police nationale, il parait évident de rappeler les dispositions du Code pénal ordinaire qui traite de ladite infraction, spécialement dans ses articles 66 bis, 66 ter et 66 quater.

En effet, sera puni d'une servitude pénale de trois à un an et d'une amende de cinq à cinquante zaïres, ou de l'une de ces peines seulement, quiconque pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ni pour les tiers, une infraction contre l'intégrité corporelle de la personne, s'abstient volontairement de le faire.66(*) Sera puni d'une servitude pénale de trois mois à deux ans et d'une amande de cinq à cinquante zaïres67(*), ou de l'une de ces peines seulement, quiconque s'abstient volontairement de porter à une personne en péril l'assistance que, sans risque pour lui ni pour les tiers, il pouvait lui prêter, soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours.68(*)

Cependant, les civils membres du personnel civil de l'Armée ou de la Police qui commettent cette infraction visée aux à ces deux articles, sont malheureusement soustraits de leur juge pénal naturel en l'occurrence le juge du Tribunal de paix en fonction du taux de la peine. Et ce, en vertu de l'article 188 du Code pénal militaire qui prévoit que : « tout militaire ou tout individu embarqué ou au service des Forces armées, qui se rend coupable de non-assistance à personne en danger est puni de dix ans maximum de servitude pénale.»69(*) Or ici, les peines prévues par le Code pénal ordinaire sont aggravées, les amendes sont supprimées et toutes sont portées à dix ans maximum d'emprisonnement. Cette extension de compétence résulte du fait que les juridictions militaires sont seules compétentes pour connaître des infractions définies et prévues dans le Code pénal militaire. L'on se demande alors comment concilier l'application du principe ``specialia generalibus derogant'' par rapport à la spécialité du Code pénal militaire sur le Code pénal ordinaire et le principe de l'application de la loi pénale plus favorable au prévenu ?

Il parait enfin nécessaire de signaler qu'en dehors de ces infractions ci-haut énumérées, plusieurs autres même non reprises dans ce point, sont susceptibles d'être commises par les susvisés pendant le service ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions au sein de l'Armée ou de la Police, et étendre davantage cette compétence.

b) Infractions de Droit commun.

En République démocratique du Congo, les infractions de droit commun commises par les civils oeuvrant au sein de l'Armée, de la Police ou du Ministère de la Défense nationale sont réprimées par le juge militaire. C'est ce qu'il convient de dire de la généralité des termes utilisés par le législateur judiciaire militaire.

En clair, l'article 108 de ce code déjà cité dispose pour rappel que : « les personnes non revêtues de la qualité de militaire, employées dans un établissement de l'Armée ou dépendant du Ministère de la Défense sont justiciables des juridictions militaires pour des infractions commises au sein de l'Armée ou dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. Il n'en est de même des personnes employées dans un établissement ou dans un service dépendant de la Police nationale ou du Service national.»70(*) Ainsi donc, il s'agit de toute infraction à la pénale militaire ou ordinaire, le seul fait qu'elle ait été commise au sein ou pendant l'exercice du service suffit pour être emportée pat ledit article.

Comme on peut le voir, l'extension de compétence dans ce cas-ci est vraiment large et ne se justifie d'ailleurs pas au sens même de la question de protection ou de sauvegarde du patrimoine ou des intérêts de la Défense ci-haut évoqués comme on voudrait bien. Il a paru alors nécessaire à cet égard de chercher le sens des expressions utilisées dans cet article avant de prendre quelques exemples.

1°) Au sein de l'armée.

Quelle est la nature de l'endroit ou du lieu qui peut être couvert par cette expression ?

Par l'expression au sein de l'Armée, il convient d'entendre : « tout milieu ou tout endroit où se trouve, pour raison de service, une Unité de l'Armée sous l'autorité d'un Chef ; comme un camp militaire, une caserne, un quartier, un bâtiment affecté au service de l'Armée, un établissement militaire ou un endroit où se trouvent les militaires en exercice par exemple sur les terrains où se déroulent les manoeuvres militaires et de tout lieu momentanément affecté à l'usage militaire ou occupé par des militaires en invoquant la théorie des lieux publics par destination ou des lieux publics par accident.»71(*) De même, un véhicule, un bateau ou un avion conduit sous les ordres d'une autorité militaire peut être pris pour un établissement de l'Armée; peu importe que ces embarcations soient en stationnement et en quelque lieu qu'elles se trouvent.72(*)

2°) Dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice des fonctions.

Une infraction de droit commun commise par un civil oeuvrant au sein de l'armée peut entrer dans la portée de ces termes si elle résulte « du travail de l'agent, des fonctions qu'il exerce, des actes qu'il accomplit suivant son emploi et qui constituent l'essence même de ses fonctions.»73(*)

C'est ainsi que l'article 108 sous examen, soumet à la compétence des juridictions militaires, toute infraction à la loi pénale commise par des civils oeuvrant au sein de l'Armée, de la Police ou du Ministère de la Défense nationale. Il s'agit par exemple de l'escroquerie ou du vol commis à l'aide de ses fonctions, de l'abus de confiance, du meurtre commis contre son supérieur, de trafic d'influence, des coups et blessures, d'un accident de circulation ou des infractions graves prévues dans le Code de la route ou qui peuvent être commises pendant la circulation routière au cas où le conducteur usait un véhicule appartement à l'Armée ou à la Police nationale.

En revanche, il est à écarter toute tentative de soumission à la compétence des juridictions militaires, lorsqu'il y a abus de fonction, lorsqu'un acte n'a aucun lien avec le service, c'est-à-dire si l'abus de fonction est manifeste (...).74(*)

Que dire des civils qui prennent place à bord des embarcations des Forces armées ou de la Police à quelque titre que ce soit ? C'est la préoccupation du paragraphe suivant.

§2ème : Des individus à bord des embarcations des Forces armées ou de la Police.

Pour permettre leur mobilité, les Forces armées sont dotées des moyens de locomotion selon qu'il s'agit de l'Armée de terre (Force terrestre), des eaux (Force navale) et de l'air (Force aérienne). D'autres peuvent appartenir à des particuliers mais mis à leur usage soit par réquisition soit par volonté expresse du propriétaire. Alors lors des déplacements, les civils peuvent être embarqués à titre d'équipage ou de simples passagers voyageurs. La loi judiciaire militaire congolaise, les livre alors à la compétence de la Justice militaire pour les infractions commises pendant ces circonstances.

Qui sont précisément concernés et quel type d'infractions peut être commis en étant embarqués ?

A. Personnes concernées.

C'est à l'article 112 de la loi n° 024/2002 du 18 novembre 2002 qu'il est fait mention des personnes visées par le terme embarqué. En sus, cet article dispose que : « ceux qui sont portés présents, à quelque titre que ce soit, sur le rôle d'équipage d'un navire ou embarcation de la Force navale, de la Police, du Service national ou le manifeste d'un aéronef militaire, de la Police ou du Service national ; ceux qui sans être liés légalement ou contractuellement aux Forces armées, sont portés sur le rôle et accomplissent du service(...)».75(*)

Il importe de signaler que conformément à l'article 156 précité de la Constitution de la République, les membres du Service national ne sont plus justiciables naturels des juridictions militaires car n'ayant pas été expressément repris dans cette disposition fondamentale. Par conséquent toute personne figurant sur son manifeste et qui commettrait une infraction de droit commun sur son navire ou son embarcation sera jugée devant la juridiction de Droit commun et non plus devant les juridictions militaires.76(*)

Pour pouvoir ressortir les personnes visées à cet article, il est aisé de rechercher le sens des vocables employés par le législateur : ''ceux qui sont portés présents sur le rôle d'équipage à quelque titre que ce soit.''

En fait, l'expression `'personne embarquée'' : « désigne ainsi d'une part les personnes inscrites sur le rôle d'équipage d'un navire ou embarcation de la Force navale ou sur le manifeste d'un aéronef, d'autre part, les individus qui se trouvent en fait à bord d'un navire, d'un aéronef militaire comme passagers proprement dits, soit en vue d'effectuer le voyage.»77(*)

Il y a lieu de penser à deux catégories de personnes : d'une part les membres d'équipage n'ayant pas la qualité de militaire embarqués pour raison de leur prestation comme les ingénieurs, les mécaniciens et les éclaireurs, et d'autre part les civils embarqués comme passagers au moyen d'une feuille de route. Il peut aussi s'agir des capitaines, des pilotes et leurs membres d'équipage pour les navires, aéronefs ou embarcations appartenant à des particuliers réquisitionnés par l'autorité militaire. Mais pour quelles infractions sont-ils soumis à la rigueur de la procédure pénale militaire ?

B. Infractions visées.

Certains d'entre les faits pénaux visés ici, sont repris au B du §1er ci-dessus. C'est comme cela que dans ce point, il sera question que des infractions qui n'ont pas été traitées supra.

a) Les infractions au Code pénal militaire.

1. De la désertion à l'ennemi ou en présence de l'ennemi.

Est puni de mort dit l'article 50 du Code pénal militaire, tout militaire, tout individu non militaire faisant partie de l'équipage d'un navire ou d'un aéronef militaire coupable de désertion à l'ennemi. On parle de désertion à l'ennemi, lorsque l'individu quitte donc les Forces loyales pour aller renforcer les agresseurs extérieurs ou internes.78(*) Pour l'alinéa 1er de l'article 51 : « est considéré comme se trouvant en présence de l'ennemi, tout militaire ou assimilé, ou tout individu non militaire faisant partie d'une Unité ou d'une Formation, de l'équipage du navire ou de l'aéronef pouvant être rapidement aux prises avec l'ennemi ou déjà engagé avec lui ou soumis à ses attaques.»79(*) Dans ce cas-ci, l'individu quitte l'armée régulière, les services apparentés, l'aéronef ou le navire militaire pour échapper aux menaces ou aux attaques de l'ennemi.80(*)

2. Des pillages.

Par pillages le code pénal militaire vise tous les actes de dépouillement ou de spoliation des denrées, marchandises ou autres effets appartenant soit à l'Etat, soit à d'autres personnes morales nationales ou étrangères, soit à des particuliers(...).81(*)

Aux termes de l'article 63 du code pénal militaire, tous pillages ou dégâts de denrées, marchandises ou effets, commis en bande par des individus embarqués, soit avec des armes ou force ouverte, soit avec bris des portes et clôtures extérieurs, soit avec violences envers les personnes, sont punis de servitude pénale à perpétuité. Dans tous les autres cas le pillage est puni de dix à vingt ans de servitude pénale (alinéa 2 du même article).

Force est de considérer l'article 64 dans son alinéa deuxième qui dispose que : « si les pillages ont été commis avec la participation des individus non militaires, les juridictions militaires sont seules compétentes.»82(*) On comprend ici que les pillages relèvent de la compétence du juge pénal ordinaire dans le cas où ils sont commis par les civils embarqués, sans armes ni l'intervention des militaires. Si ces pillages ont été commis en pendant la guerre ou lors d'une opération de police tendant au maintien de la paix, les coupables sont à éliminer. C'est ce qui ressort de l'article 65 du Code pénal militaire congolais.

3. Des destructions.

Les actes de destruction, perte ou mise hors de service définitive ou temporaire, de rendre impropre au service commis sur les édifices, les ouvrages, les navires, les aéronefs, les approvisionnements, les armements, le matériel, les installations, les objets à l'usage des forces armées ou concourant à la Défense, les armes, les munitions ou les effets affectés au service des Forces armées, sont prévus et punis par les articles 66, 67 et 68 du Code pénal militaire. On reproche aux auteurs des actes, le fait de les avoir commis soit par négligence, soit avoir occasionné leur commission, soit par incendie, soit par échouage, soit par abordage ou une manoeuvre intéressant la sûreté du navire ou de l'aéronef.

Sont visés dans ce cas notamment les pilotes d'aéronefs ou commandants de navires qui peuvent être des civils et les civils embarqués. Quant aux peines, elles varient den six mois à cinq ans, de six mois à dix ans et de dix à vingt ans de servitude pénale en temps de paix selon les cas prévus dans les articles susmentionnés.

4. De la rébellion, du refus d'obéissance, des voies de fait et outrages envers des supérieurs, de l'insulte à sentinelle, de la violation des consignes, de l'abstention de dénoncer une infraction relevant de la compétence des juridictions militaires, du refus d'assistance à personne en danger(...).

Ces différentes infractions sont susceptibles d'être perpétrées par des civils embarqués. Elles ont fait l'objet de développement au §1er de cette même section.

b) Infractions de Droit commun.

Les personnes embarquées, justifie-t-on, se trouvent donc placées dans des conditions de faits analogues à celles auxquelles sont administrativement soumis les militaires. Cette extension se justifie par le fait que les personnes embarquées se trouvent momentanément au sein de l'Armée.83(*)

L'article 112 du code judiciaire militaire précité, ne précise pas les infractions visées. Il se borne seulement à soumettre à la compétence des juridictions militaires les personnes embarquées, et que le Code pénal militaire a même repris certaines infractions prévues par le Code pénal ordinaire (le cas de la non-assistance à personne en danger prévue aux articles 66 bis, 66 ter et 66 quater).

Ainsi donc, l'article 103 du Code pénal ordinaire exempli gratia, punit de quinze à vingt ans ceux qui auront mis le feu soit à des édifices, navires, magasins ou tous autres lieux quelconques servant une ou plusieurs personnes au moment de l'incendie, soit à tous lieux, même inhabités, si, d'après les circonstances, l'auteur a dû présumer qu'il s'y trouvait une ou plusieurs personnes au moment de l'infraction84(*).

Il importe de retenir qu'il s'agit des infractions de toute nature prévues par les dispositions pénales éparses, commises par des civils embarqués, peu importe le lieu où se trouve l'embarcation et peu importe qu'elle soit en stationnement.

En dehors du personnel civil des Forces armées, et des individus embarqués dans des navires ou aéronefs militaires, la loi judiciaire de 2002 a soumis également à la compétence des juridictions militaires, les individus impliqués aux infractions des militaires ou policiers et ceux qui commettent des infractions dirigées contre l'Armée ou prévues par le Code pénal militaire. C'est l'objet de la section suivante.

Section 2ème : Des civils impliqués aux infractions militaires.

L'article 112 du Code judiciaire militaire en étude prévoit aux points 7 et 8 que sont également justiciables des juridictions militaires, ceux qui même étrangers à l'Armée, provoquent, engagent ou assistent un ou plusieurs militaires, ou assimilés, à commettre une infraction à la loi ou au règlement militaire. Il en est de même de tous ceux qui commettent des infractions dirigées contre l'Armée, la Police nationale, le Service national, leur matériel, leurs établissements ou au sein de l'Armée, de la Police nationale ou du Service ; les personnes à la suite de l'Armée ou de la Police nationale.85(*)

§1er : Assistance ou incitation des militaires et Policiers.

Il est de cas où un civil peu inciter ou assister un ou plusieurs ou policiers à commettre des infractions contraires à la loi ou au règlement militaire. Il peut s'agir d'un civil à la suite de l'Armée tout comme d'un civil qui sans être à la suite de l'Armée serait en contact avec des militaires ou policiers.

A. Notions.

Pour qu'un civil soit justiciable des juridictions militaires à ce point, il faut qu'il tombe dans l'une des conditions prévues par la loi.

Ainsi pour que la culpabilité soit établie, l'agent doit avoir provoqué, engagé ou assisté des militaires ou policiers à commettre des intrications, lesquelles doivent être définies par le Code pénal militaire. Dans ce cas, provoquer, c'est inciter, amener à, porter à, soutenir, contribuer à, concourir à la perpétration de l'insoumission par exemple.86(*) Est exclue cependant toute provocation à l'infraction de Droit commun.87(*)

A ce point, il convient de faire allusion aux infractions visées par cette hypothèse d'extension de compétence des juridictions des Forces armées à l'égard des personnes n'ayant pas la qualité de militaire ou de policier.

B. Etudes des cas.

L'article 141 du code pénal militaire punit à dix ans maximum de servitude pénale, le fait d'inciter à s'armer contre l'autorité de l'Etat ou contre une partie de la population.

Sera punit de mort, dit l'article 143, quiconque, en vue de nuire à la Défense nationale, incite des militaires appartenant aux Forces armées congolaises à passer au service d'une puissance étrangère.

Les dix ans d'emprisonnement sont prévues aux termes de l'article 145 du même code, à tout individu qui, en vue de nuire à la Défens e nationale, incite à la désobéissance, par quelque moyen que ce soit, des militaires ou des policiers ou des assujettis affectés à toute forme de service civique. La même sanction est à infliger au fait de commettre l'une des infractions contre le secret de défense militaire ou offre ses services pour les commettre, dans le cas où l'instigation ou l'offre seraient acceptées ou non mais que l'infraction n'aurait pas été commises. C'est ce qui ressort des dispositions de l'article 153, Code pénal militaire.

Cette soumission des civils à la compétence des juridictions militaires tirée de l'assistance ou de l'incitation, étant une forme particulière de participation criminelle qui a toujours été prévue dans notre système répressif comme le notait déjà le Professeur LIKULIA déjà cité, ne trouve à ce jour aucune assise utile en ce sens que le code pénal ordinaire prévoit la participation criminelle et le juge pénal de Droit commun n'est pas incapable de corriger par son action, des civils qui compromettent à la discipline des éléments des Forces.

Malgré cela, l'application de ces dispositions d'alors prévues notamment par le défunt code de justice militaire de 1972, avait fait malheureusement que trois Commissaires du Peuple (équivalent de Députés nationaux) aient été jugés et condamnés par l'ancien Conseil de guerre général (remplacé aujourd'hui par la Haute Cour Militaire) pour avoir incité le Chef d'Etat-major Général de la Force terrestre de l'époque, à commettre un acte attentatoire au devoir consistant à comploter contre l'autorité du Commandant suprême des Forces armées. Un autre Commissaire du Peuple fut jugé par la même juridiction pour avoir incité un Officier subalterne à lui révéler le secret militaire. Et le Conseil de Guerre de Région (aujourd'hui Cour militaire) siégeant à BUKAVU avait lui aussi retenu sa compétence en jugeant le Directeur de cabinet du Commissaire de la Région (aujourd'hui Gouverneur de Province) pour avoir détourné un militaire de son devoir ; en l'espèce le prévenu avait chargé un soldat de garde d'une mission personnelle sur le Lac Kivu, provoquant ainsi l'abandon de poste. Ce soldat avait d'ailleurs trouvé la mort durant l'exécution de cette mission.88(*)

Pour sa part, le Tribunal militaire de garnison de Kinshasa-Gombe, siégeant en foraine à la Prison Militaire de Ndolo sise à Kinshasa-Barumbu, a le 20 septembre dernier, condamné le Pasteur Dénis Lessie, fondateur de l'Eglise évangélique Arche de Noé à 10 ans de prison dans l'affaire qui l'a opposé depuis cinq mois au Pasteur de l'Eglise Mont Carmel, Jean-Baptiste Ntawa, pour avoir été reconnu coupable d'escroquerie, association des malfaiteurs et incitation à violer les consignes militaires. Ses deux coaccusés, l'adjudant Louis Kasongo et Thierry Ukunimo ont écopé respectivement de 10 ans de prison et de 5 ans.89(*)

Bien qu'ayant pas retenu dans le dispositif du jugement l'hypothèse d'incitation des militaires à commettre des actes contraires à leur devoir, le même a eu à condamner deux civils en participation criminelle avec un militaire des FARDC. Malgré que le Tribunal n'ait retenu que le vol à main armée à la charge de ces deux civils, l'examen de l'exposée du jugement montre qu'il était question d'incitation d'un militaire à commettre un acte contraire à son devoir.

En effet, à Kinshasa, ville de ce nom et capitale de la République démocratique du Congo, en date du 04 janvier 2012, vers 02 heures du matin, dans l'immeuble dit du Cinquantenaire abritant l'Ambassade du Royaume de Belgique dans la Commune de la Gombe, au 8ème niveau Appartement 31, il y a eu soustraction frauduleuse d'une somme estimée à 12.000 dollars américains, quatre téléphones au préjudicie de Monsieur EL FAHKI REDA, avec cette circonstance qu'ils ont torturé la victime et ligoté les jambes et les bras à l'aide d'une ficelle de nylon servant de séchoir. Dans partage du butin, chacun des membres de la bande avait reçu 4.000 dollars américains.

Au finish, le Tribunal les condamnera à 10 ans, 10 ans et 3 ans pour le premier cité, à 20 ans et 20 ans pour le deuxième et le troisième ; ce, en application de la plus haute expression pénale prévue à l'article 7 du Code pénal militaire. Ils ont été en outre à 10 ans de sûreté incompressible et 100.000 Francs congolais chacun pour les frais d'instance.

Le Tribunal, contradictoirement, en audience publique et à la majorité de ses membres déclarera recevable et fondée l'action en réparation ou en indemnisation du préjudice introduite par la Victime, condamnera les prévenus in solidum à payer au titre de dédommagement pour le préjudice matériel subi, au payement d'une somme de l'ordre de 5.OOO dollars américains, et à la restitution du montant perçu indument chez la victime.90(*)

Toujours en ce qui concerne l'assistance ou l'incitation des policiers et militaires à commettre des actes contraire à la discipline, l'on retiendra par exemple que, utiliser un militaire ou un policier en tenu ou armé pour se faire payer une créance ; se payer les services d'un militaire pour menacer la personne d'avec laquelle on est en conflit parcellaire ou pour détruire les constructions entamées ; amener des militaires à commettre des infractions(...)91(*) conduira à rendre compétentes les juridictions des Forces armées face aux civils.

En outre, dans ce pays, les juridictions militaires jugent des civils qui se rendent coupables des infractions dirigées contre l'armée, la Police nationale et leurs installations, comme des vols, des viols, des destructions commis dans des camps militaires ; des infractions commises au moyen d'armes de guerre et tant d'autres prévues par diverses dispositions des lois n° 023/2002 et n° 024/2002 du 18 novembre 2002.

C'est ce qui convient de traiter au §2ème ci-contre.

§2ème : Des civils coupables des infractions dirigées contre l'Armée, des infractions commises au moyen d'armes de guerre et des dispositions diverses.

L'article 111 du code judiciaire militaire dans son deuxième alinéa, soustrait de la compétence de leur juge naturel pour les livrer aux rouages des juridictions militaires, des civils qui commettent des infractions commises au moyen d'armes de guerre. Il est en effet prévu ceci : « elles sont (les juridictions militaires) en outre compétentes à l'endroit de ceux qui, sans être militaires, commettent des infractions au moyen d'armes de guerre.»92(*)

De même la phrase b du point 7 de l'article 112 prévoit qu' : « il en est de même de tous ceux qui commettent des infractions dirigées contre l'armée, la Police national, le service national, leur matériel, leurs établissements ou au sein de l'armée, de la Police nationale ou du service national.»93(*)

A. Des infractions dirigées contre l'Armée et la Police nationale.

A la préoccupation de savoir quelles sont les infractions pouvant être commises par des civils contre l'armée et la Police, il convient d'emblée de dire qu'il s'agit des infractions de toute nature, aussi bien de Droit commun que celles de Droit pénal militaire susceptible de troubler la discipline au sein de l'Armée ou de la Police nationale, soit de porter atteinte à son matériel ou son patrimoine.94(*)

La simple commission d'une infraction par un civil dans une caserne militaire ou dans tout autre endroit reconnu appartenir aux Forces armées ou policières, fait perdre à l'auteur son droit légitime, celui d'être entendu et jugé par son juge naturel. C'est le cas d'un viol commis dans un camp militaire, l'adultère commis dans l'enceinte des bâtiments des forces armées relevaient également de la compétence de la juridiction militaire et tous les civils, femmes des policiers et militaires, leurs enfants ou domestiques relèvent ainsi de la compétence des juridictions pour les infractions de toute nature qu'ils commettent au sein de l'Armée ou de la Police.95(*)

En voici quelques exemples :

1. Outrage à l'armée.

L'article 87 du Code pénal militaire définit l'outrage à l'armée comme étant « toute expression injurieuse dirigée contre les Officiers et hommes du rang des Forces armées sans indiquer les personnes visées.»96(*) L'auteur en est puni de six mois à cinq ans, et si cette absence d'indication a pour conséquence que chacun des militaires de la Garnison, est touché par ces injures, lesquels atteignent en même temps l'armée tout entière dans la personne de ces Officiers et hommes du rang, l'injure tombe sous l'application de la loi.

2. Des destructions.

L'article 69 du Code pénal militaire réprime à la hauteur de cinq à dix ans de servitude pénale notamment, tout individu (civil, policier ou militaire) coupable d'emploi abusif d'édifice, ouvrage, de navire, d'aéronef, de véhicule, d'approvisionnement, d'armement, de matériel ou d'installation quelconque à l'usage des Forces armées ou concourant à la défense.

L'emploi abusif est à entendre comme « toute utilisation ou gestion non conforme aux règles techniques ou administratives définies par les lois et règlements de l'un des objets énumérés ci-dessus.»97(*)

Aux termes de l'article 70, est puni de cinq à dix ans notamment, tout individu même civil qui, volontairement, détruit, lacère des registres, des documents, des minutes ou des actes de l'autorité militaire.

Force est de considérer les articles 103 à 113 du Code pénal ordinaire qui punissent les incendies, les destructions, les dégradations des constructions, des machines, tombeaux, monuments, arbres, récoltes ou autres propriétés. Ces infractions entrent ici dans l'hypothèse où elles sont commises au détriment de l'Armée ou de la Police nationale.

3. De l'usurpation de commandement, de la levée des Forces armées et de l'incitation à s'armer illégalement.

Est puni de dix à vingt ans de servitude pénale comme en prévoit l'article 140 du Code pénal militaire « quiconque sans droit ou sans autorisation, prend un commandement militaire quelconque ou le retient contre l'ordre des autorités légales, lève des forces armées, sans ordre ou sans autorisation des autorités légales.»98(*)

4. Des atteintes à la sécurité des Forces armées et aux zones protégées intéressant la défense nationale.

Est voué à l'élimination par la peine de mort, quiconque, en vue de nuire à la défense nationale, incite des militaires appartenant aux forces armées congolaises à passer au service d'une puissance étrangère. C'est ce que qui ressort de l'intégralité des dispositions de l'article 143 du Code pénal militaire. Il en est ainsi des cas similaires prévus aux articles 144, 145, 146, 147 et 148 du même code, dont les peines varient de deux à vingt ans d'emprisonnement à encourir selon le cas et ce, en temps de paix.

Il va de même aux cas prévu au chapitre III du titre III qui traite des atteintes au secret de la défense nationale où le législateur incrimine tout individu avec la généralité des termes, sans détermination des personnes visées (donc tout le monde). Il s'agit en fait des infractions prévues par les articles 149 à 155.

5. De la contrefaçon ou falsification des sceaux, timbres, poinçons, marques(...).

Seront punis d'une servitude pénale d'un à quinze ans et d'une amende de cinq mille à vingt-cinq mille zaïres (à équivaloir) aux termes de l'article 121 du Code pénal congolais, ceux qui auront contrefait ou falsifié les sceaux, timbres, poinçons ou marques de l'Etat congolais et des administrations publiques, ceux qui auront fait usage de ces objets contrefaits ou falsifiés et ceux qui auront sciemment exposé en vente les produits de ces contrefaçons ou falsifications.

6. De l'usurpation de fonctions publiques.

L'article 123 du Code pénal ordinaire punit pour sa part d'un mois à deux ans et d'une amende de cinquante à cinq cents zaïres, ou d'une de ces peines seulement, quiconque se sera attribué faussement la qualité de fonctionnaire publique ou aura porté publiquement tout insigne ou emblème destiné à faire croire à l'existence d'un mandat public. C'est le cas d'un civil qui se fait passer pour un militaire ou policier pour se faire bénéficier d'un avantage ou d'une considération ou pour intimider.

L'alinéa 2 du même article précise que si l'insigne ou l'emblème n'est pas destiné, mais est simplement de nature à faire croire à l'existence d'un mandat public, celui qui publiquement l'aura porté ou l'aura laissé ou fait porter par une personne à son service ou sous son autorité sera puni d'une servitude pénale de sept jours au maximum et d'une amende qui ne dépassera pas deux cents zaïres ou d'une de ces peines seulement.

Un civil coupable de ces infractions tombe dans la compétence du juge des armées, si les fonctions usurpées ou la qualité portée sont de nature militaire ou policière, ou si l'auteur l'a fait avec l'intention de donner une mauvaise image ou tout simplement salir la réputation des éléments des Forces.

7. Du port illégal de décorations.

Toute personne qui aux termes de l'article 123 bis du Code pénal ordinaire, aura publiquement porté une décoration, un ruban ou autres insignes d'un ordre qui ne lui appartient pas, sera punie d'une servitude pénale de sept jours au maximum et d'une amende de cinquante à cinq cents zaïres ou d'une de ces peines seulement. Il s'agit dans ce cas d'espèce, du port illégal de décorations, insignes ou rubans de l'armée ou de la Police nationale.99(*)

8. De l'association formée dans le but d'attenter aux personnes et aux propriétés.

Les juridictions militaires congolaises se veulent compétentes lorsque l'association formée dans le but d'attenter aux personnes a visées des militaires, des policiers, leurs propriétés ou le patrimoine de l'armée ou de la Police.

En effet, l'article 156 du Code pénal ordinaire dispose que : « toute association formée dans le but d'attenter aux personnes ou aux propriétés est une infraction qui existe par le seul fait de l'organisation de la bande.»100(*) Les provocateurs de cette association, les chefs de cette bande et ceux qui auront exercé un commandement quelconque seront punis de mort. C'est ce que prévoit l'article 157 du même code. Il appert cependant de se demander si ce serait justice le fait de punir le provocateur, le chef ou le commandant de mort pour le fait de l'organisation de la bande même si rien n'a été réalisé ? Il se pose un problème de proportionnalité de la peine.

Qu'il soit ici permis de signaler que cette énumération n'est qu'indicative d'autant plus que les infractions tant du Code pénal militaire qu'ordinaire, sont toujours susceptibles de tomber dans cette extension des compétences desdites juridictions face aux civils.

B. Des infractions commises au moyen d'armes de guerre.

En République démocratique du Congo, les infractions commises à l'aide d'armes de guerre, échappent à la compétence du juge pénal ordinaire, en ce sens que ces infractions rentrent dans la compétence matérielle des juridictions militaires, chose qui entraine leur compétence personnelle à l'égard des civils. C'est ce qui ressort de l'alinéa 2 de l'article 111 du code judiciaire sus-évoqué.

Comme on peut se rendre compte, ces infractions sont les unes prévues par les dispositions pénales ordinaires, les autres dans les dispositions pénales militaires, dont voici les exemples.

1. Participation à un mouvement insurrectionnel.

L'article 137 du code pénal militaire punit de cinq à vingt ans de servitude pénale, quiconque participe à un mouvement insurrection en étant soi-même porteur d'arme. Il importe de relever que cette infraction se commet le plus souvent en période troublée, mais la répression s'étend à ces actes même en temps de paix.

C'est ainsi que le Tribunal militaire de Garnison de Mbandaka et la Haute Cour Militaire, ont eu à juger les civils qui ont participé au Mouvement insurrectionnel qui a eu lieu dans la Province de l'Equateur, mouvement qui est parti du Territoire de DONGO jusqu'à Mbandaka et le long du fleuve. Bien que l'insurrection ait pris fin, les insurgés étaient jugés par ces deux juridictions militaires pour les actes commis à DONGO et tout au long de leur itinéraire jusqu'à atteindre Mbandaka où ils avaient emporté des armes au Palais de Justice.

2. Du Terrorisme.

Constituent des actes de terrorisme lorsqu'ils sont en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur, notamment : «  la fabrication, la détention, le stockage, l'acquisition et la cession des machines, engins meurtriers, explosifs ou autres armes biologiques, toxiques ou de guerre.»101(*)

3. La détention illégale d'armes et munitions de guerre.

L'article 203 du Code pénal militaire prévoit 20 ans de servitude pénale à l'encontre de tout individu qui détient sans titre ni droit des armes ou des munitions de guerre.

Par son arrêt rendu le 10 septembre 2010, la Haute Cour Militaire sous le RP n° 003/09, a retenu notamment qu'il est une obligation légale que la détention et tous les autres actes matériels ci-haut cités ne peuvent se réaliser qu'en vertu d'un titre ou d'un droit. Ainsi, la détention par un militaire ou un Policier des armes et munitions de guerre non couvertes par un document lui reconnaissant ce droit constitue l'infraction.102(*) Si à ceux qui touchent naturellement aux armes on en incrimine une détention non justifiée, pour les civils ça ne peut que faire un problème auquel la justice militaire a une grande sensibilité.

C'est comme ça que le Tribunal militaire de garnison de Lubumbashi a dans son jugement du 13 septembre 2013, à la suite d'un procès organisé suivant la procédure de flagrance, condamné quatre personnes civils, tous étudiants, à la peine de mort aux motifs qu'ils se seraient rendus coupables de détention d'armes de guerre et d'association de malfaiteurs103(*).

4. Vol à main armée.

L'article 81 bis du Code pénal ordinaire dispose ce qui suit : « le vol à mains armées est punit de mort.»104(*)

Par vol il faut entendre, soustraction frauduleuse d'une chose n'appartenant pas à celui qui se rend coupable. En effet, l'article 79 du Code du même code prévoit que : « quiconque a soustrait frauduleusement une chose qui ne lui appartient pas est coupable de vol.»105(*)

5. De la fourniture d'armes, munitions, instruments d'infraction à une bande ou une association de malfaiteurs.

Aux termes de l'article 158 du Code pénal ordinaire, tous les individus faisant partie de l'association et ceux qui auront sciemment et volontairement fourni à la bande des armes, munitions, instruments d'infraction, seront également punis de mort.

6. De la trahison.

Sera coupable de trahison et puni de mort, tout Congolais qui, livrera à une puissance étrangère ou à ses agents, des ouvrages de défense, postes, ports, magasins, matériels, munitions, vaisseaux, bâtiments ou appareils de navigation aérienne appartenant à la République démocratique du Congo. C'est ce qui est prévu à l'article 182.2 du Code pénal ordinaire.

7. Infraction contre l'autorité de l'Etat.

L'article 198 du Code pénal punit de cinq à vingt ans, ceux qui auront levé ou fait lever des troupes armées, engagé ou enrôlé, fait engager ou enrôler des soldats, ou leur auront fourni des armes ou des munitions, sans ordre ni autorisation du Gouvernement.

C. Extension de compétence résultant des dispositions diverses.

Hormis les cas qui viennent d'être épinglés ci-haut, plusieurs dispositions tant du Code pénal que du Code judiciaire militaires, rendent les civils justiciables des juridictions militaires.

En effet, l'article 76 du code judiciaire militaire dispose en son alinéa 1er que : « les juridictions militaires connaissent, sur le territoire de la République, des infractions d'ordre militaire punies en application des dispositions du Code pénal militaire.»106(*)

Il en est ainsi des diverses situations prévues à l'article 112 du même code dans les points 2, 3, 4, 5, 6 et 8. Sont concernés ici, ceux qui sans être liés légalement ou contractuellement aux Forces armées, sont portés sur les rôles et accomplissent du service ; des exclus de l'Armée ou de la Police pour les infractions de trahison, espionnage, participation à une révolte prévue par le code pénal militaire, violences ou outrages envers un supérieur qu'ils ont connu dans l'Armée ou envers une sentinelle (garde militaire ou policière), participation à une désertion avec complot commise par des militaires, détournement ou soustraction frauduleuse d'objets quelconques affectés au service de l'Armée ou appartenant soit à l'Etat, soit à des militaires et le pillage. Et, les élèves des écoles militaires, les prisonniers de guerre, les membres des bandes insurrectionnelles et les personnes à la suite de l'Armée ou de la Police nationale.

Par personne à la suite de l'Armée ou de la Police, il convient de considérer tout individu qui est autorisé à accompagner une Unité de l'Armée ou de la Police nationale.107(*)

Pour plus de précisions sur cette catégorie des civils, il importe de faire allusion aux enfants qui fréquentent des écoles qui préparent aux fonctions militaires et qui n'ont pas souscrit un engagement à l'Armée, aux jeunes gens soumis aux obligations militaires ou qui s'engagent volontairement à l'Armée ou à la Police souscrivant un contrat d'engagement alors qu'ils ne remplissent pas les conditions requises (juristes en stage professionnel dans les auditorats militaires), les familles des policiers et militaires ainsi que des personnes à leur charge tels que les domestiques, les journalistes, les photographes, cinéastes qui peuvent accompagner une Unité de l'Armée pour le besoin de leur métier, et enfin, les spécialistes ou généralement les techniciens dont l'Armée a besoin pour ses déplacements par exemple les ingénieurs pour faire des ponts, des chauffeurs ou même des cantonniers pour réparer des routes.108(*)

En revanche, est justiciable des juridictions militaires au cas prévu à l'article 110 du Code judiciaire militaire, celui qui, dans les cinq années qui suivent la date à laquelle les lois militaires ont cessé de lui être applicables, commet contre l'un de ses anciens supérieurs ou un autre supérieur hiérarchique, en raison des relations de service qu'ils ont eues, l'une des infractions de voies de fait et d'outrage, de violence ou meurtre ainsi que ses attentats contre la liberté individuelle et à l'inviolabilité du domicile (articles 67 à 70, CPO Livre deuxième) et des imputations dommageables et des injures prévues aux articles 74 à 78 du Code pénal ordinaire.

Force est de remarquer le renforcement de la soumission des civils à la compétence des juridictions militaires à l'article 79 du Code judiciaire militaire qui prévoit que : « lorsque le Code pénal militaire définit ou réprime des infractions imputables à des justiciables étrangers à l'Armée, les juridictions militaires sont compétentes à l'égard de l'auteur, du co-auteur ou du complice, sauf dérogation particulière.»109(*) Par cette dérogation particulière, il est clair de songer au Président de la République, du Premier Ministre qui relèvent de la compétence exclusive de la Cour constitutionnelle et des justiciables par état de la Cour de cassation qui est actuellement une juridiction suprême même pour la justice militaire.

Au Code pénal militaire d'enfoncer le clou lorsque son article 207 dispose que : « sous réserve des dispositions des articles 117 et 119 du Code judiciaire militaire, seules les juridictions militaires connaissent des infractions prévues par le présent code.»110(*)

En effet l'article 117 dispose que : « lorsque la juridiction ordinaire est appelée à juger une personne justiciable de la juridiction militaire, elle lui applique le Code pénal militaire. Le président de la juridiction civile compétente peut requérir les services d'un juge militaire, magistrat de carrière, pour faire partie du siège. De même, lorsque les cours et tribunaux militaires sont appelés à juger des personnes qui ne sont pas justiciables des juridictions militaires, conformément au présent Code, le président de la juridiction militaire compétente peut requérir les services d'un juge civil pour faire partie du siège.»111(*)

Et quant à l'article 119 de ce code judiciaire militaire, il est prévu ceci : « en cas d'infraction continue s'étendant d'une part sur une période où le justiciable relevait de la juridiction de droit commun et, d'autre part, sur une période pendant laquelle il relève de la juridiction militaire ou vice-versa, la juridiction militaire est compétente.»112(*)

La situation de l'article 161 du Code pénal militaire mérite une attention soutenue. En effet, cet article prévoit pour sa part que : « en cas d'indivisibilité avec ou de connexité d'infractions avec des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité, les juridictions militaires sont seules compétentes.»113(*) Il est prévu ainsi en toute contrariété ou ambigüité si on peut le dire comme cela, avec l'article 115 du Code judiciaire militaire qui prévoit à son tour que : « Les juridictions de droit commun sont compétentes dès lors que l'un des coauteurs ou complices n'est pas justiciable des juridictions militaires, sauf pendant la guerre ou dans la zone opérationnelle, sous l'état de siège ou d'urgence, ou lorsque le justiciable civil concerné est poursuivi comme coauteur ou complice d'infraction militaire.»114(*)

On s'interroge d'ailleurs si dans quel cas on peut tomber dans l'application de ces deux articles, lorsqu'on se met à considérer les hypothèses dans les deux bouts de cette phrase et l'indivisibilité ou la connexité dont question à l'article 161 ci-dessus, quand bien même que l'on peut parler d'une exception au principe de l'article 115 ?

Peut-on vraiment soutenir l'hypothèse d'une extension de compétence sur cette exclusivité des juridictions militaires sur les crimes internationaux sur tout qu'il est rare que ces crimes soient commis sans connexité ni indivisibilité ?

Cet état de chose n'a pu laisser indifférent le Professeur TASOKI MANZELE Jean-Marie, alors Assistant à la Faculté de Droit lorsqu'il notait ceci: «dès lors qu'un co-auteur ou un complice d'un génocide, d'un crime contre l'humanité ou d'un crime de guerre n'est pas justiciable des juridictions militaires, le juge civil peut valablement se saisir de l'affaire et juger.»115(*)  

L'article 161 du code pénal militaire poursuit-il, admet l'exclusivité de compétence du juge militaire dans l'hypothèse où l'infraction de la C.P.I. est commise en connexité ou en indivisibilité avec une autre infraction de droit commun. La meilleure illustration dans ce domaine peut être trouvée dans l'affaire Thomas LUBANGA.116(*)

La prorogation des compétences ainsi envisagée dans cette espèce et telle que prévue par cet article ne concerne que la question de pluralité d'infractions imputables à un seul individu. En outre, ledit article ne fait aucunement allusion à la prorogation des compétences résultant de la pluralité des prévenus. Cette hypothèse suppose la commission d'une infraction de la C.P.I. par plusieurs individus ne relèvent pas nécessairement de la justice militaire. Il n'est pas aisé d'affirmer qu'en dehors de toute hypothèse de prorogation des compétences, seul le juge militaire est compétent pour connaitre de toute infraction relevant de la compétence de la C.P.I.

Tout compte fait, il me semble difficile dit-il encore, d'affirmer et je ne saurai le faire que le juge militaire est seul compétent en cas de commission d'infractions de la compétence de la C.P.I. Le simple fait que ces infractions soient prévues par le Code pénal militaire ne se suffit pas en soi pour constituer un critère attributif de compétence au juge militaire.117(*)

On remarque ici que ces exposées ne se rallient pas avec l'article 207 sus-évoqué du Code pénal militaire qui veut que les juridictions militaires seules connaissent des infractions définies et réprimées par ce code.

En revanche, cette exclusivité est à l'opposé du Professeur TASOKI MANZELE, affirmée par le Professeur Raphaël NYABIRUNGU mwene SONGA lorsqu'il souligne ce qui suit : « ainsi, partant du principe majeur du Statut de Rome qui veut que la C.P.I. n'intervienne que qu'à titre de complémentarité, nous avons vérifié, dit-il, la mise en oeuvre de ce principe par les juridictions militaires congolaises, seules aujourd'hui compétentes en la matière (...)118(*).

C'est ce qui a été observé dans le rapport d'AfriMAP rédigé sous la main de Maitre WETSH'OKONDA KOSO du Barreau de Kinshasa-Gombe en ces termes: « Les juridictions militaires ont ainsi commencé à exercer une compétence exclusive à l'égard des infractions définies dans le Traité de Rome. La qualité civile ou militaire de l'auteur de ces crimes importe peu, puisque la réforme de 2002 étend aux civils la compétence personnelle des tribunaux militaires, une violation claire des principes de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples sur le droit à un procès équitable.»119(*)

Il convient de retenir avec le Professeur WANE BAMEME Bienvenu-Alphonse qu'en tenant compte de la compétence personnelle des juridictions militaires, on constate que ces matières graves prévues dans le code pénal militaire dans la catégorie des infractions mixtes et non essentiellement militaires, échappent à la compétence exclusive de ces dernières lorsque ces infractions sont commises par des militaires en participation criminelle avec des civils ou des civils seuls120(*).

Il sied de signaler que la promulgation de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l'ordre judiciaire a définitivement mis fin à cette polémiques doctrinale lorsqu'elle prévoit en son article 91 que les cours d'appel connaissent également, au premier degré :1) du crime de génocide, des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité commis par les personnes relevant de leur compétence et de celle des tribunaux de grande instance.121(*)

Ainsi donc, les juridictions militaires congolaises ne sont plus seules compétentes à connaître des crimes internationaux et comme ces infractions ne sont pas encore intégrées dans le Code pénal ordinaire, le juge de droit commun pourra appliquer les stipulations du statut de Rome de la CPI.

Qu'à cela ne tienne, il parait important à titre indicatif de prendre quelques exemples des infractions du Code pénal militaire incriminant tout individu à la lumière des dispositions évoquées sous ce point.

1. De l'insoumission.

L'article 41 du Code pénal militaire punit de deux mois à cinq ans de servitude pénale en temps de paix, tout citoyen coupable d'insoumission aux termes des lois sur le recrutement des Forces armées. L'article 42 qui suit pour sa part punit des mêmes peines, tout individu qui, par quelques moyens que ce soit, qu'ils aient été ou non suivis d'effets, provoque ou favorise l'insoumission.

2. De la provocation à la désertion et du recel de déserteur.

Aux termes de l'article 53 du Code pénal militaire, est puni de deux mois à cinq ans de servitude pénale en temps de paix, tout individu qui, par quelques moyens que ce soit, qu'ils aient été ou non suivis d'effets, provoque ou favorise la désertion. A l'égard des individus non militaires ou non assimilés aux militaires, une peine d'amende de 5.OOO à 10.000 Francs congolais constants peut, en outre, être prononcée.

Aussi est-il prévu, tout individu convaincu d'avoir sciemment soit recélé un déserteur, soit soustrait ou tenté de soustraire, d'une manière quelconque, un déserteur aux poursuites ordonnées contre lui par la loi, est puni, en temps de paix, de deux mois à cinq ans.122(*)

3. De la mutilation volontaire.

S'il est vrai que la mutilation volontaire ne peut être commise que par un militaire, il n'en demeure pas moins vrai que cette infraction peut être réalisée à l'aide des personnes qui n'ont pas la qualité de militaire.123(*)

C'est en ce sens que l'article 56 du Code pénal militaire incrimine même des civils sur la mutilation lorsqu'il prévoit que : « si les complices sont médecins, pharmaciens, assistants médicaux, infirmiers, guérisseurs, tradipraticiens, ou autres professionnels de santé, la peine encourue peut être la peine de servitude pénale à perpétuité en temps de paix. Pour les individus non militaires ou non assimilés aux militaires, la peine d'amende de 50.000 à 100.000 Francs congolais constants est obligatoirement prononcée.»124(*)

4. Des pillages.

L'alinéa 2 de l'article 64 du même code réprime les pillages qui sont commis avec la participation des individus non militaires, et dans pareils cas, ils sont soustraits de leur juge naturel. Il est de ce fait prévue ce qui suit : « si ces pillages ont été commis avec la participation des individus non militaires, les juridictions militaires sont seules compétentes.»125(*)

5. Des faux et falsifications.

Quiconque aura contrefait, falsifié ou altéré des documents délivrés par les autorités militaires en vue de constater un droit, une indemnité ou une qualité, ou d'accorder une autorisation, est puni de dix ans de servitude pénale au maximum et d'une amende qui n'excède pas 15.000 Francs congolais. Les mêmes peines seront applicables à celui qui aura fait usage desdits documents contrefaits, falsifiés ou altérés. Il en sera de même de celui qui aura fait usage des mêmes documents lorsque les mentions invoqués par l'intéressé sont devenues incomplètes ou inexactes. C'est ce qui est prévu à l'article 79 du code pénal militaire.

6. De l'espionnage.

Tout étranger même civil, auteur des actes visés à titre d'espionnage, se sera rendu coupable est puni de mort aux termes de l'article 129 du Code pénal militaire.

7. Des détournements et corruptions.

Est puni d'un à dix ans de servitude pénale dit l'article 74 du Code pénal militaire, quiconque dissipe, vole ou détourne des armes, munitions, véhicules, deniers, effets et autres objets lui remis pour le service ou à l'occasion de service ou appartenant à des militaires ou à l'Etat. Le Tribunal peut en outre prononcer la confiscation de tous les biens produits du vol, du détournement ou de la dissipation.

Quant à la considération de l'article 84, sera puni d'une année à cinq ans de servitude pénale, hors le cas de corruption prévu par la loi, tout médecin, chirurgien, dentiste, sage femme ou autre professionnel de santé qui, dans l'exercice de ses fonctions et pour favoriser un membre des Forces armées, certifiera faussement ou dissimulera l'existence de maladies ou infirmités ou un état de grossesse, ou fournira des indications mensongères sur l'origine d'une maladie ou d'une infirmité ou la cause d'un décès.

Plusieurs autres cas soumettent également les civils à la compétence des juridictions militaires, parmi lesquels le refus de témoigner devant une juridiction ou parquet militaire lorsqu'on a régulièrement été cité pour ce faire. Surtout lorsqu'on se réfère à la disposition de l'article 217 déjà cité du Code pénal militaire qui voudrait que les juridictions des Forces armées seules connaissent des infractions définies et prévues dans ledit code.

Il faut enfin signaler que les hypothèses de compétence des juridictions militaires face aux civils relevées dans ce chapitre, ne concerne que le temps de paix où il n'y a pas un péril public et que toutes les institutions de la République fonctionne normalement sans entrave, sous réserve de quelques émeutes qui peuvent se produire et être vite dispersées par les Forces de l'ordre.

Bien que justifiant la compétence des juridictions militaires à l'égard des civils, lesquelles juridictions ne devaient connaître que des infractions purement militaires commises par des policiers et militaires, on parle d'une extension de compétence, c'est-à-dire une compétence exceptionnelle, il est cependant alarmant comme on le voit de constater qu'il s'agit là d'une compétence qui dépasse même le cadre normal d'une extension de compétence si ça devait être comme le soutient-on. Les juridictions militaires à une interprétation rigoureuse de la loi, se révèlent compétentes à l'égard de tout le monde sans distinction de catégorie ou de la qualité des personnes.

C'est comme ça que dans le Code pénal militaire, il est fait recours à des termes génériques globaux, totaux et groupaux comme ''quiconque'', ''tout individu'', ``ceux qui'' pour désigner les coupables des infractions ou les personnes visées.

Qu'en est-il alors de la compétence desdites juridictions à l'égard des non militaires et de non policiers pendant la période de trouble ?

C'est la question que s'empresse d'aborder le chapitre 2ème suivant de la partie.

Chapitre 2ème : La Compétence des Juridictions Militaires congolaises face aux civils en période troublée.

La justice militaire en République démocratique du Congo, varie en fonction des circonstances de temps. Si en temps de paix, la compétence des juridictions militaires et les peines applicables aux infractions prévues sont telles que développées dans le premier chapitre, il n'en demeure pas le même cas en période de trouble pendant qu'il y a un péril public qui plane où la compétence desdites juridictions subit une large extension avec l'aggravation des peines.

Plusieurs circonstances de temps seront ainsi épinglées en ce sens, selon qu'il s'agit du temps de guerre, de l'état d'urgence ou de l'état de siège et, d'autres comme les insurrections.

Section 1ère : La compétence des Juridictions Militaires face aux civils pendant la guerre.

Si en temps de paix il y a des cas de violation des droits garantis aux individus tant par la constitution que par les instruments juridiques internationaux dument ratifiés, violation occasionnée par des vols, viols, meurtres, assassinats, pillages et arrestations arbitraires ; en temps de guerre cependant, la situation s'amplifie et les droits sont bafoués comme s'ils n'étaient ni protégés, ni garantis moins encore connus. On est là dans une circonstance de péril public qui se caractérise par des bavures, au point même de normaliser certains.

La guerre, qu'est-ce ?

§1er : Notions.

Comme on va le voir, la compétence des juridictions militaires, est largement étendue à l'égard des individus n'ayant pas la qualité de militaire, ni de policier en République démocratique du Congo.

Il importe cependant, de s'interroger au point de savoir qu'est-ce que c'est la guerre et quand est-ce que sur le plan juridique, un pays peut se trouver en guerre pour la mise en application des règles relatives à cette extension de compétence.

A. La Guerre.

En effet, l'article 1er alinéa 4 du Protocole additionnel I de 1997 complétant et modifiant la convention de Genève du 18 août 1949 sur le traitement des prisonniers de guerre126(*), la guerre est entendre comme étant :

· Tout conflit armé entre deux ou plusieurs Etats, Hautes parties contractantes, même si l'état de guerre n'est pas reconnu par l'une des parties. Il s'agit de la guerre ouverte déclarée ;

· L'occupation de tout ou partie du territoire de l'une des Hautes parties contractantes, même si l'occupation est faite sans la force des armes et sans résistance, et même si l'occupation n'est pas reconnue par l'une des parties ;

· Les conflits armés dans lesquels les peuples luttent contre la domination coloniale et l'occupation étrangère et contre les régimes racistes dans l'exercice du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.

En revanche, le législateur congolais pendant la transition 1+4, avait défini la guerre comme étant : «le recours légal et ultime à tous les moyens militaires ou non militaires de Défense nationale pour mettre un terme à la menace ou à l'agression contre les intérêts fondamentaux du pays.»127(*)

Quant à la doctrine, le temps de guerre peut s'entendre : « de toute période exceptionnelle durant laquelle la sûreté d'un Etat souverain se trouve gravement mise en péril, soit par une menace imminente d'une agression extérieure, soit par la survenance effective d'une guerre active ou passive engagée par ledit Etat ou que lui-même au moins une puissance ennemie, soit encore par une rébellion interne bénéficiant ou non d'un appui extérieur, ayant recouru aux armes en vue d'instaurer un nouvel ordre institutionnel ; laquelle période est en principe déterminée par l'autorité légitime, en l'occurrence le Président de la République.»128(*)

De ce fait, il se dégage que les règles relatives à l'extension de compétence des juridictions militaires ne peuvent s'appliquer comme prévu, qu'à la condition que l'autorité habilitée à cette fin puisse, prendre une décision, il ne suffit pas qu'il y ait constatation de la guerre.

Pour s'en convaincre, il convient de considérer l'article 29 de ce même code judiciaire militaire en étude ici, qui prévoit que : « pour l'application des lois pénales et l'organisation des juridictions militaires, le temps de guerre commence au jour fixé par le président de la République pour la mobilisation des Forces armées. Il prend fin au jour fixé par le président de la République pour la remise de l'armée sur pied de paix.»129(*)

Cependant, le Professeur LIKULIA avait estimé dans son ouvrage de 1977 déjà cité que : « par le seul fait de la déclaration de guerre la compétence des juridictions militaires s'étend non seulement aux actes inhérents à cette situation mais aussi à tous ceux qui sont susceptibles d'amoindrir la défense nationale ou de porter atteinte à la sécurité de l'Etat.»130(*)

Quand en est-il alors de l'état de siège et de l'état d'urgence ? C'est ce qu'il importe d'évoquer dans les phrases suivantes.

Les notions d'état de siège ou d'urgence peuvent prêter à confusion en ce sens que c'est souvent ou généralement pendant la guerre que l'état de siège ou d'urgence est proclamé. Toutefois, la guerre peut exister sans pour autant que l'état de siège ou d'urgence n'ait été proclamé. C'est le cas de la République démocratique du Congo qui, a connu des temps de guerre et des agressions de la part du Rwanda, de l'Ouganda (...) et des insurrections armées depuis 1996 et continue à les connaitre en 2013 par l'agression en cous des rebelles du Mouvement du 23 mars (M 23), mais l'état de siège ou d'urgence n'a jamais été proclamé à cette fin.

B. L'état de siège.

L'état de siège est une période qui consiste selon le Colonel Laurent MUTATA LUABA, à mobiliser tous les moyens (humains, matériels, financiers) pouvant permettre la défense de l'intégrité territoriale du pays ou le rétablissement rapide de la paix. La doctrine récente par l'entremise de BURDEAU Georges qu'il cite par ailleurs, parle d'une mesure très grave par laquelle les pouvoirs publics décident de suspendre les effets normaux de la loi pendant une période de la tension intérieure grave.131(*)

Cette notion peut aussi dans une certaine manière, être comprise comme étant une mesure légale ayant pour objet de protéger tout ou partie du territoire de la République, en cas de péril imminent résultant d'une guerre étrangère ou d'une insurrection armée.132(*)

C. Etat d'urgence.

L'état d'urgence constitue un régime exceptionnel destiné à permettre au Président de la République de résoudre les crises nationales par une série des mesures de toute sorte dont certaines restreignent la liberté ou les garanties individuelles lorsque des circonstances graves menacent d'une manière immédiate l'indépendance de la Nation ou qu'elles provoquent l'interruption du fonctionnement régulier des organes de la République ou encore lorsqu'elles risquent de porter atteinte aux intérêts vitaux de l'Etat.133(*)

Le Professeur NTUMBA LUABA Daniel-Alphonse en ce qui le concerne abondant presque dans le même sens, parle de la proclamation de l'état d'urgence, lorsque le danger menace le République ou que le fonctionnement régulier des institutions de la République ou l'une de ses entités administratives se trouve interrompu.134(*)

En dehors de la guerre, l'état de siège ou d'urgence, il convient de considérer aussi les opérations de police tendant au maintien de la paix ou au rétablissement de l'ordre public, qui peuvent à tout moment intervenir lorsqu'il y a des dérapages ou des émeutes même sans armes, qui peuvent selon les autorités troubler ou porter atteintes à l'ordre public ou à la sécurité intérieure : les revendications sur la voie publique accompagnée des casses, destructions, pillages (...) et les mouvements des Kuluna par exemple lorsque ceux-ci sont généralisés et troublants.

C'est ce qu'on peut retenir de ces notions regroupées en période de trouble dans le cadre de la présente étude. Ainsi, il parait nécessaire d'envisager l'étendue des compétences des juridictions militaires pendant ladite période.

§2ème : Etendu des compétences dites exceptionnelles des juridictions militaires.

En République démocratique du Congo, la compétence des juridictions militaires varie, on l'a dit, selon qu'on est en temps de paix ou selon qu'on se trouve dans une période de trouble : les circonstances exceptionnelles de péril public. C'est ainsi que si en temps de paix, la rigueur de la justice militaire ne s'abat qu'à l'égard d'une catégorie des personnes déterminées ; il n'en est pas le cas si le pays traverse des moments des troubles causés par les agressions étrangères ou internes.

L'examen de la production constitutionnelle congolaise, montre que le constituant congolais consacre toujours, malheureusement l'extension de l'action répressive des juridictions militaires.

En effet, l'article 19 de la loi sur le Gouvernement du Congo-belge prévoyait que : « l'autorité administrative ne peut empêcher, arrêter ou suspendre l'action des cours et tribunaux. Toutefois, le Roi peut, pour des raisons de sûreté publique, suspendre, dans un territoire et pour un temps déterminés, l'action répressive des cours et tribunaux civils et y substituer celle des juridictions militaires.»135(*)

Pour sa part l'article 187 de la loi fondamentale de 1960 relative aux structures du Congo était rédigé comme ce qui suit: « Le pouvoir exécutif ne peut empêcher, arrêter ou suspendre l'action des cours et tribunaux. Toutefois le Chef de l'Etat peut, pour des raisons graves de sûreté publique, et après avis du procureur général, suspendre dans une région et pour un temps qu'il détermine, l'action répressive des cours et tribunaux et y substituer celle des juridictions militaires. Le droit au double degré de juridiction ne peut être supprimé.»136(*)

Les constitutions qui s'en sont suivies ont abondé du reste dans le même sens, parmi lesquelles, celle du 18 février 2006 en vigueur, telle que révisée le 20 janvier 2011.

En effet, à titre de rappel, l'article 156 de cette constitution prévoit que pendant la guerre ou lorsque l'état de siège ou d'urgence est proclamé, le Président de la République peut, par une décision délibérée en conseil des Ministres, pour la durée et les infractions qu'il fixe, suspendre l'action répressive des juridictions ordinaires au profit des juridictions militaires.

Cette disposition comme tant d'autres, est amèrement contraire aux normes internationales pertinentes notamment avec le point L des Directives et des Principes sur le droit à un procès équitable et à l'assistance judiciaire en Afrique qui prévoit que : « les tribunaux militaires ne peuvent en aucune circonstance juger des civils. De même, les juridictions spéciales ne connaissent pas des infractions qui ressortissent de la compétence des tribunaux ordinaires.»137(*)

Et pourtant, dans ce pays même, on a connu une constitution qui à l'époque, contenait une disposition qui si elle était maintenue en vigueur par le constituant aujourd'hui; elle allait vraiment être en phase avec les instruments juridiques régionaux et internationaux favorables aux droits de l'Homme et des peuples.

Allusion faite à l'article 124 de la constitution du 1er août 1964 dite de Luluabourg (Kananga), mais qui l'alinéa 2 était comme c'est le cas actuellement et dans d'autres. En effet l'alinéa de cet article disposait ceci : « en temps de paix, les tribunaux militaires ne connaissent que des infractions commises par les membres des Forces armées.»138(*)

Cette contrariété de la constitution congolaise avec des instruments juridiques régionaux et internationaux, est matérialisée aussi par l'existence d'un décret-loi du 24 novembre 1964 portant Organisation de l'action répressive des juridictions militaires lorsque celles-ci sont substituées aux cours et tribunaux de droit commun, qui aggrave les peines applicables tant pour les infractions d'ordre militaire que celles de droit pénal commun.

A présent, il parait nécessaire de voir quelques règles applicables dans pareils cas dans un point A, avant de prendre quelques infractions qui peuvent faire expressément l'objet de cette mesure au point B.

A. Application de l'extension de compétence des juridictions militaires résultant du temps de guerre, de l'état de siège ou d'urgence.

A quel moment les juridictions militaires peuvent-elles exercer l'action répressive en substitution de celles de droit commun ?

La lecture de l'article 156 en examen, laisse sans nul doute voir que, pour que les juridictions militaires étendent leur compétence dans cette hypothèse, il faut tout d'abord, qu'il y ait une déclaration de guerre, ou que l'état de siège ou d'urgence ait été proclamé et qu'après le Président de la République prenne une décision non motu proprio, mais délibérée en conseil des Ministres. Mais, est-ce qu'au Monde même si le Président de la République sans justification utile, prenait cette décision sans délibération en conseil des Ministres, sera-t-elle annulable au moment où tous les membres du Gouvernement sont de son obédience et que personne ne pourra dénoncer une telle violation de la constitution ? Il y a à boire et à manger sur cette réalité.

Mais, il a été affirmé que par le seul fait même de la proclamation de l'état d'urgence ou de siège une catégorie de personnes relève intégralement de la compétence des juridictions militaires.139(*)

Pareille extension devra être écartée par l'idée même de l'article 29 sus-évoqué du Code Judiciaire Militaire qui se penche sur la fixation du jour de commencement du temps de guerre en mobilisation des forces armées, par le Président de la République pour l'application des lois pénales et l'organisation des juridictions militaires.

Toutefois, le Président de la République doit démontrer que le recours à des tels tribunaux est nécessaire et justifié par des raisons objectives et sérieuses et où, relativement à la catégorie spécifique des personnes et des infractions en question, les tribunaux civils ordinaires ne sont en mesure d'entreprendre ces procès.140(*)

Aux termes de l'article 3 du décret-loi de 1964 précité, le délai de procédure n'est pas de rigueur et ne constitue pas une irrégularité. C'est ce qui ressort de cet article lorsqu'il prévoit ce qui suit : « L'inobservation des délais de procédure par les juridictions militaires n'est pas une cause de nullité.»141(*)

Pendant ces circonstances dites exceptionnelles, les juridictions militaires, jugent même des civils qui commettent des infractions déterminées par le Président de la République et les prisonniers de guerre, étant donné que pour de telles infractions, les compétences sont étendues à tout le monde.

Les peines prévues sont ainsi aggravées et dans la plupart des cas, elles sont remplacées soit par la prison à vie (servitude pénale à perpétuité), soit par la peine de mort (dont l'exécution peut être considérée comme supplice interdit par le Droit international). C'est ce qui est prévu dans bon nombre de dispositions surtout du Code pénal militaire, qui, utilise des termes comme : ``et même la peine de mort ou la peine prévue peut être portée à...'' et ce, pendant la guerre, lorsque l'état de siège ou d'urgence est proclamé ou lors d'une opération de police tendant au maintien de la paix ou au rétablissement de l'ordre public.

Cette compétence des juridictions militaires comme il parait important de le signaler, s'étend non seulement aux infractions commises postérieurement à la proclamation de l'état de siège ou d'urgence mais encore aux faits délictueux qui ont provoqué la déclaration de cet état.142(*)

B. Les infractions prévues par le Décret-loi du 24 novembre 1964.

Il s'agit ici des infractions qui ont été déterminées dans le cadre des prérogatives reconnues au Président de la république, concernant la substitution de l'action répressive des juridictions militaires à celles de droit commun pendant la guerre, lorsque l'état de siège ou d'urgence a été proclamé.

L'article 5 de ce décret-loi prévoit certaines infractions dont les peines initialement prévues sont aggravées, lorsqu'elles sont perpétrées pendant cette période. En effet, cet article dispose ceci : « la servitude pénale prévue par la loi ordinaire peut être portée jusqu'à la peine de mort pour les infractions ci-après lorsqu'elles ont été commises dans les régions visées à l'article 1er ci-dessous (tout ou partie des territoires concernées par la proclamation de l'état d'urgence) ».143(*)

1. Le meurtre commis pour faire acte d'insurrection contre l'ordre établi ou pour faire attaque ou résistance envers l'autorité ou les forces de l'ordre agissant dans l'intérêt de l'ordre intérieur ou par la défense extérieure de la République.

2. Le vol commis à main armée.

Cette forme de vol est prévue et puni par l'article 81 du Code Pénal ordinaire de la même peine. Seulement qu'en pareilles circonstances, l'auteur, civil soit-il, relève de la compétence des juridictions militaires.

3. Des attentats, complots et autres infractions contre l'autorité de l'État et l'intégrité du territoire.

· L'attentat dont le but aura été soit de détruire ou de changer le régime constitutionnel, soit d'inciter les citoyens ou habitants à s'armer contre l'autorité de l'État ou à s'armer les uns contre les autres, soit de porter atteinte à l'intégrité du territoire national, sera puni de la servitude pénale à perpétuité.144(*)

· Le complot formé dans l'un des buts mentionnés à l'article 195 sera puni d'une servitude de dix à quinze ans si quelque acte a été soumis ou commencé pour en préparer l'exécution, et d'une servitude pénale de cinq à dix ans dans le cas contraire. S'il y a eu proposition faite et non agrée de former un complot pour arriver à l'une des fins susmentionnées à l'article 195, celui qui aura fait une telle proposition sera puni d'une servitude pénale de un à cinq ans.145(*)

On constate ici que la peine prévue est moins grave et favorable au criminel, malheureusement, elle est ramenée à l'élimination (la mort). Or, la règle de principe sur l'application de la loi pénale dans le temps voudrait que si la loi nouvelle aggrave la situation du prévenu, elle soit simplement écartée au profit de celle ancienne profitable ou favorable. En l'espèce, le code pénal ordinaire antérieur à ce décret-loi est favorable avec sa peine variant d'un à cinq ans au lieu de la peine de la mort ou de la servitude pénale à perpétuité visée.

· Seront punis d'une servitude pénale de cinq à vingt ans, ceux qui auront lever des troupes armées, engagé ou enrôlé, fait engager ou enrôler des soldats, ou leurs auront fourni des armes ou munitions, sans ordre ni autorisation du Gouvernement.146(*)

· L'article 199 du même code punit ceux qui, sans droit ou motif légitime auront pris un commandement militaire quelconque; ceux qui, contre l'ordre du Gouvernement, auront retenu un tel commandement; les commandants qui auront tenu leur armée ou troupes rassemblées, après que le licenciement ou la séparation en auront été ordonnés.

· Le complot formé dans l'un des buts mentionnés à l'article 200 (l'attentat dont le but aura été de porter le massacre, la dévastation ou le pillage sera puni de mort) sera puni d'une servitude pénale de quinze à vingt ans si quelque acte a été commis ou commencé pour en préparer l'exécution, et d'une servitude pénale de dix à quinze ans dans le cas contraire.147(*)

4. Le fait d'engager ou provoquer d'une manière quelconque un ou plusieurs militaires à commettre l'insubordination, le meurtre sur leurs supérieurs, la révolte ou la résistance simultanée aux ordres d'un supérieur (plus de trois militaires réunis), ainsi le fait de participer à un complot formé dans le but de commettre ou de faire commettre une de ces infractions.

5. Des destructions et dégradations prévues aux articles 103 et 110 du Code pénal ordinaire, commises soit pour faire acte d'insurrection contre l'ordre établi, soit pour entraver l'accomplissement de mesures gouvernementales destinées à assurer l'ordre intérieur ou à pourvoir à la défense extérieur de la République.

L'article 6 du même décret-loi, fait remplacer la peine de servitude pénale à temps prévue (de deux à vingt ans) par la servitude pénale à perpétuité pour les infractions ci-après en cas de leur commission dans un territoire ou l'état d'urgence ou de siège est proclamé :

· De la rébellion, de l'association formée dans le but d'attenter aux personnes et aux propriétés et de la participation à des bandes armées prévues aux articles 135, 157 et 203 du Code pénal ordinaire dont les peines en temps de paix varient de cinq à quinze ans, d'une amende de deux cents à mille zaïres (à équivaloir) et de la peine de mort selon le cas.

L'article 7 pour sa part fait porter à dix ans la peine de servitude pénale prévue par la loi ordinaire pour les infractions ci-après lorsqu'elles ont été commises dans les mêmes circonstances exceptionnelles :

1) Quiconque aura provoqué directement à désobéir aux lois sera puni d'une servitude pénale de deux mois à trois ans et d'une amende de mille à dix à dix mille zaïres, ou d'une de ces peines seulement.148(*)

2) Des autres atteintes à la sûreté intérieure de l'État :

Sera puni d'une servitude pénale de deux mois à trois et d'une amende de mille à dix mille zaïres, ou d'une de ces peines seulement : celui qui, en vue de troubler la paix publique, aura sciemment contribué à la publication, à la diffusion ou à la reproduction, par quelque moyen que ce soit, de nouvelles fausses ou de pièces fabriquées, falsifiées ou mensongères attribuées à des tiers; celui qui aura exposé ou fait exposer, dans les lieux publics ou ouverts au public, des dessins, affiches, gravures, peintures, photographies, tous objets ou images de nature à troubler la paix publique.149(*)

3) L'emploi des armes sans ordre.

4) Le fait d'engager ou de provoquer, d'une manière quelconque un ou plusieurs militaires à commettre la désertion, les réclamations faites par plusieurs militaires et l'emploi des armes sans ordre.

L'article 8 quant à lui, punit de mort le fait de provoquer ou d'une manière quelconque, un ou plusieurs militaires à commettre l'infraction de lâcheté (fuite d'un militaire devant l'adversaire ou emploi par un militaire de moyens irréguliers pour se soustraire à un danger).

Ce sont là les infractions prévues par le Décret-loi du 24 novembre 1964 sur l'organisation de l'action répressive des juridictions militaires lorsque celles-ci sont substituées aux cours et tribunaux de droit commun. Toutefois, en vertu de l'article 156 de la constitution mis en exergue, le Président de la république a la latitude de viser n'importe quelle autre infraction à la loi pénale pour la soumettre à cette extension de compétence.

Cependant, il se sera heurté dans l'évolution actuelle des questions des droits de l'homme, notamment l'une des directives de la commission africaine des droits de l'homme et des peuples qui voudrait que l'état qui prend des telles mesures de restrictions des libertés publiques, puisse démontrer l'ultime nécessité d'y recourir et que l'action répressive des juridictions ordinaires serait inefficace pendant cette période. Donc, le Président de la république, agissant en vertu de ses prérogatives, ne peut plus comme celui de 1964 sous quelque motif à invoquer, d'aggraver les peines aux infractions. Il se bornerait seulement à déterminer et y fixer le temps.

Toutefois il noter que les Directives sont des mesures prises sans nécessairement exiger le consentement des membres. Elles peuvent intervenir contre leur volonté et elles lient quant à l'objectif visé mais les États ont la latitude ou la liberté quant aux moyens de mise en oeuvre.150(*)

Ainsi dit, il importe de passer à la section suivante concernant l'insurrection qui généralement peut faire appel à la proclamation de l''état de siège, mais étant donné qu'en République Démocratique du Congo, les insurgés et les participants à l'insurrection relèvent de la compétence des juridictions militaires même si le calme est revenu (temps de paix), il a apparu opportun d'en aborder séparément.

Section 2ème : Pendant l'insurrection.

On ne le dira jamais assez, l'insurrection est une circonstance exceptionnelle qui étend les compétences des juridictions militaires à l'égard des civils. Très complexe et sensible, elle s'apparente à la guerre car elle peut à tout moment aboutir à une guerre comme c'est le cas en République Démocratique du Congo qui en a connue plusieurs fois et continue d'ailleurs à vivre ces moments: notamment le cas de triste mémoire qu'a connu la Province de l'Équateur lors des tiraillements qui ont opposé les Enyele et les Monzaya à Dongo.

L'insurrection peut conduire à la proclamation de l'état de siège ou de l'état d'urgence dans l'hypothèse où elle aboutit à une véritable guerre. Mais vu son caractère récurrent et avec sa particularité d'être même le fait des civils dans ce pays, il a paru nécessaire d'en parler séparément avec le temps de guerre proprement dit.

Selon le Petit Larousse illustré, l'insurrection est voulue comme étant le fait de s'insurger, de se soulever contre le pouvoir établi pour le renverser; révolte; soulèvement.151(*)

Quant aux personnes civiles concernées par l'extension de compétence des juridictions des Forces armées, il s'agit dans ce contexte des civils participants à l'insurrection et des civils qui ont apporté assistance aux insurgés.

§1er : Des civils participants à une insurrection.

Sans pour autant les soutenir, les actes d'insurrection doivent être fortement réprimés car ils conduisent à des violations graves des droits et libertés fondamentaux garantis aux individus par la loi de la République. Mais est-ce pourtant un motif d'empêcher au juge pénal ordinaire d'exercer ses compétences attributives et de priver aux personnes civiles leur droit parmi les plus légitimes d'être déférées devant leur juge naturel?

Malgré cette préoccupation, les insurgés civils sont soumis à la justice militaire par le fait même de l'existence d'un mouvement insurrectionnel. Ainsi lorsque l'état de siège ou d'urgence est déclaré tous les faits commis par les membres des bandes insurrectionnelles relèvent automatiquement des juridictions militaires. Leur compétence est générale car elle n'est pas limitée aux faits déterminés ou énumérés dans l'ordonnance proclamant l'état de siège ou d'urgence.152(*)

C'est ce fait qu'il y ait plusieurs dispositions, pénales qui renforcent cette extension de compétence. Il en est notamment de l'organisation des milices privés réprimée par l'ordonnance-loi no 11/130 du 25 mars 1960 portant mesures intéressant la sécurité publique.153(*)

Or, comme on le sait, il ne saurait y avoir une insurrection sans qu'une milice privée de quelque nature que ce soit ne fût organisée. Ainsi par milices privées, il est à entendre notamment : « une organisation de particuliers ou toutes milices privées dont l'objet est de recourir à la force ou de suppléer l'armée ou la police, de s'immiscer dans leur action ou de se substituer à elles »154(*) ou exhibition en public de particulier en groupe qui, soit par les exercices auxquels ils se livrent soit par l'uniforme ou les pièces d'équipement qu'ils portent, ont l'apparence de forces militaires.155(*)Ces deux définitions peuvent aujourd'hui dépasser ce cadre par rapport à la situation qui prévaut dans le pays depuis des décennies où il y a des actes qui constituent des milices privées ne sont pas prévus ici.

Conflit de compétences des juridictions cependant, ladite ordonnance-loi ne prévoit pas la compétence des juridictions militaires face à cette incrimination, mais l'interprétation élargie des lois militaires et de la pratique en a fait coutume et les insurgés civils sont ainsi jugés par des militaires.

A. État de la question en Droit pénal congolais.

Les articles 195 à 200 et suivants du Code pénal ordinaire prévoient et punissent la participation à des bandes armées. La participation à un mouvement insurrectionnel est prévue à l'article 206 du même code, les mouvements insurrectionnels sont prévus aux articles 208 du code pénal ordinaire, 136, 137 et 138 du Code pénal militaire duquel résulte la compétence des Juridictions militaires face aux civils insurgés.

Cependant, il est à observer que si le juge des Forces armées en est compétent en vertu des articles 136 et 137 du Code pénal militaire selon l'idée de l'article 217 du même code, le juge ordinaire peut normalement l'être dans les hypothèses prévues au Code pénal de Droit commun. Car ces infractions, ne sont pas prévues que par le seul Code pénal militaire qui attribue en exclusivité la compétence au juge militaire.

Par mouvement insurrectionnel, il est en entendre : « un mouvement collectif qui s'extériorise, soit par des actes portant atteintes au pouvoir ou à l'ordre établi, soit par des agressions contre les personnes, la dévastation ou le pillage.»156(*)

Plusieurs infractions tant au code pénal ordinaire que militaire peuvent être commises par les insurgés comme les pillages et les destructions et s'ils sont civils comme on le voit, par ce qu'il s'agit d'une infraction définie par le code pénal militaire et au terme de l'article 217 dudit code, ils seront donc poursuivis par les juridictions militaires tant pendant qu'après l'insurrection.

B. Cas de l'insurrection des Enyele et Monzaya dirigée par Udjani et Ibrahim Mangbama.

On retiendra ici parmi nombreux cas que la République a connus, qu'on le rappelle, celui des Enyele et des Monzaya sus-évoqué, qui d'une simple dispute entre deux tribus a pris par la suite les allures armées. En effet, ces deux tribus vivant dans un même secteur au nord-ouest de la province de l'Équateur, se disputaient en 2009 les étangs de poissons (centres d'alevinage) auxquels les uns tout comme les autres se réclamaient avec force la propriété coutumière. Cette situation débouche à un bagarre sanglant entre les deux tribus et se transformant aussitôt à une insurrection mystifiée où l'on invoquait le bénéfice d'une main si pas pour les uns mystérieuse, pour les autres simplement noire. Cette insurrection aux contours flous dans l'Équateur157(*) n'était un simple affrontement ethnique. Au départ, le gouvernement Congolais « n'a pas pris toute la mesure de la situation à Dongo, principale ville où sévit la guerre. Il s'est laissé prendre au piège de la thèse apparente des affrontements interethniques », avait déclaré Joshua BOKELA, chef coutumier habitant de Dongo selon le site. De villages en villages le mouvement qui n''opposait que les Enyele et les Monzaya, est devenu une rébellion qui se nomme Patriotes Résistants Enyele.158(*)

De ce qui était de savoir qui finalement étaient ces insurgés, leurs revendications... et même les informations fiables, jusqu'aujourd'hui, l'histoire ne continuera qu'à amener à des multiples questions. Or, l'insurrection atteignit Bobito, Bokonzi, Bozene, Dongo, Gemena, Tandala et tant d'autres cités et localités de cette partie de la province où il n'y avait pas les étangs problématiques.

Il n'y a pas que ça, avant d'arriver à Mbandaka ou ils avaient pris d'assaut l'aéroport en mettant en débandade les éléments des FARDC et de la MONUC après avoir pillé les armes au Parquet sise au palais de justice, les insurgés avaient aussi pris le contrôle de Libenge selon les informations relayées par un autre site. Selon celui-là, ces violences interethniques avaient débuté à Dongo à la fin du mois d'octobre 2009 et opposaient Enyele et Monzaya. Depuis le mouvement fait tache d'huile et semble vouloir défier le pouvoir central à Kinshasa. La nouvelle de la chute de Libenge note-t-il, serait un signal d'alarme important pour le président Kabila. Une source militaire citée par congoindépendant.com `'qu'il règne une atmosphère de désengagement pour ne pas parler de débandade au sein de l'armée `'. Motif : impayés, les militaires n'ont pas le coeur à aller faire le coup de feu.159(*)

Ledit mouvement comme il convient de le retenir, qui se nommait `'Patriotes Résistants Enyele'' prit officiellement le nom du Mouvement de Libération Indépendante des Alliés, MLIA en sigle. Un bon nombre d'insurgés civils, femmes, hommes, filles et garçons, adultes comme mineurs furent arrêtés par l'Auditorat militaire de Garnison de Mbandaka qui les déféra devant le tribunal militaire de la Garnison du même nom ou ils furent jugés et condamnés du moins pour les uns.

Pour sa part, Udjani, chef de ces insurgés selon un autre site web, est à la base (selon le grief mis à sa charge) d'un mouvement insurrectionnel à l'Équateur. Mouvement qu'il a déclenché en novembre 2009, autour de la localité de Dongo. Les affrontements meurtriers consécutifs à cette insurrection ont provoqué le déplacement de milliers des personnes dans le territoire de Kungu et de Libenge. Environs 115.000 personnes ont dû traverser la rivière Ubangi pour trouver refuge en République du Congo voisin.160(*)

Le père d'Udjani, Ibrahim Mangbama fut arrêté par le Parquet militaire de Garnison de Kinshasa- Gombe où il fut ensuite traduit devant le juge militaire.

Comme on le voit, les membres des bandes insurrectionnelles relèvent des juridictions militaires pour les actes de toute nature ayant un caractère infractionnel commis pendant ce temps. Au Congo Démocratique, peu importe que l'insurrection ait été armée ou non.

Par membres des bandes insurrectionnelles, il faut entendre toutes personnes faisant partie du mouvement insurrectionnel autrement dit les rebelles.161(*)

Comme il a été révélé ci-haut, l'extension des compétences des juridictions des forces armées à l'égard des insurgés civils, résulte d'une mauvaise interprétation de la loi car, les motivations qui ont poussé à cette extension de compétence ont visé les membres des Forces Armées étrangères.

En effet, l'auteur du Décret-loi du 18 décembre 1964, portant code provisoire de justice militaire indiquait que cette extension de compétence tenait l'essentiellement au fait que le pays s'est trouvé à l'état de siège ou l'état d'urgence. La deuxième raison invoquée par l'exposé des motifs est celle qui permet de mettre les membres des armées étrangères ennemis et ceux nationaux ou étrangers appelés communément rebelles sur le même pied que les membres des Forces Armées, au point de vue des voies de recours. Ce sont les mêmes raisons qui ont inspiré le législateur de 1972 à soumettre intégralement les insurgés à la compétence des conseils de guerre162(*), lesquelles raisons le législateur de 2002 organisation actuelle justice des Forces armées à héritées du reste.

Et pourtant dans le cas relayé ci-haut des Enyele et des Monzaya, il s'agit des civils qui d'ailleurs utilisaient des machettes (armes blanches) et des fétiches qui n'avait rien à avoir d'une force militaire, et qu'en outre il n'a jamais été révélé qu'ils avaient bénéficié de l'assistance d'une force armée fut-ce étrangère. Donc le juge pénal ordinaire était qualifié à réprimer ces actes.

Il est cependant une autre catégorie des civils soumis à cette même extension de compétence. C'est le cas de ceux qui coopèrent ou apportent assistance aux éléments de la bande insurrectionnelle.

§ 2ème : Des civils qui apportent assistance aux insurgés.

Il y a des cas où un individu n'a ni pris part à la préparation, ni à l'organisation du mouvement insurrectionnel, moins encore à son aboutissement; mais il entre en contact avec les insurgés après qu'ils aient commencé leur opération, soit pour leur vendre la nourriture, soit pour leur rendre service. Il peut aussi s'agir de celui qui ne faisant pas partie de la bande, aura fourni de l'aide ou de l'assistance par un moyen que ce soit.

A. Position du problème.

On aura plus qu'à pouvoir le rappeler, le droit pénal congolais punit la participation criminelle. Mais serait-ce pour cette hypothèse que les civils qui sans pour autant prendre activement part à une insurrection, mais ont été en intelligence par leur assistance aux insurgés sont soumis à la rigueur décriée de la justice aux Forces armée?

En effet, il y a participation criminelle lorsque plusieurs personnes prennent part plus ou moins active et plus moins directe à la perpétration d'une infraction. Il y a alors pluralité d'agents et unité de délit.163(*) A cet effet, l'article 22 du Code pénal congolais Livre I prévoit ce qui suit : « sont considérés comme complices ceux qui auront donné des instructions pour la commettre; ceux qui auront procuré des armes, des instruments ou tout autre moyen qui a servi à l'infraction sachant qu'ils devaient y servir; ceux qui hors le cas prévu par l'alinéa 3 de l'article 22, auront avec connaissance aidé ou assisté l'auteur ou les auteurs de l'infraction dans les faits qui l'ont préparée ou facilitée ou dans ceux qui l'ont consommée; ceux qui, connaissant la conduite criminelle des malfaiteurs exerçant des brigandages ou des violences contre la sûreté de l'État, la paix publique, les personnes ou les propriétés, leur auront fourni habituellement logement, lieu de retraite ou de réunion. »164(*)

Aux termes du point 3 de l'article 137 et du point 2 de l'article 138 du Code pénal militaire, celui qui respectivement, participe à un mouvement insurrectionnel en assurant le transport, la subsistance ou les communications des insurgés; en procurant aux insurgés des armes, des munitions ou des substances explosives ou dangereuses ou de matériel de toute espèce.

Ainsi, les civils qui assistent les insurgés, notamment par la fourniture des informations, de moyen des subsistances, de communication ou sont simplement en intelligence avec eux relèvent de l'action répressive des juridictions des forces armées. Il en est de même des civils qui fournissent des armes, des munitions de guerre, des moyens de transport et autres moyens logistiques aux membres des bandes insurrectionnelles. Cela, en considération toujours de l'article 217 du Code pénal militaire qui voudrait on l'a déjà dit que les Juridictions militaires connaissent seules les infractions définies par ce code.

C'est le cas de quelques-uns d'entre les co-prévenus des insurgés Enyele qui furent poursuivis par le tribunal militaire de Garnison de Mbandaka siégeant en audience publique et solennelle à la place Parc d'attraction des jeunes ``Joseph Kabila'' à Mbandaka en 2010, pour avoir notamment apporté des vivres aux insurgés en fuite dans la forêt.

L'on pourra retenir à ce sujet que plusieurs infractions prévues par les dispositions pénales de tous ordres précipitent les civils dans les juridictions des Forces armées lors de la répression des actes insurrectionnels.

B. Critiques.

Si les insurgés peuvent être déférés devant le juge militaire pour s'être emparés des armes ou des munitions de l'État ou pour avoir fait usage des armes, ceci ne parait cependant pas motivé pour ceux qui ont assisté les insurgés en leur fournissant les logements, le matériel, sans pour autant prendre directement ou activement part audit mouvement.

Ainsi les justifications sont les suivantes.

D'abord, il n'y a aucun doute que le juge pénal de Droit commun est compétent pour juger les auteurs, les co-auteurs et les complices de toutes les infractions prévues par le Code pénal ordinaire et en application des dispositions relatives à la participation criminelle prévues dans ledit code.

Ensuite, la participation à un mouvement insurrectionnel est prévue et définie par le Code pénal ordinaire (articles 206 à 208) ; qui constitue le principal instrument dont le juge pénal ordinaire sert pour réprimer les violations à la loi pénale.

Enfin, rien ne justifie la répression de la vente des denrées alimentaires ou des cartes (unités ou crédits) de communication aux insurgés contre un commerçant ou un vendeur qui n'avait aucune intention de soutenir ou d'assister les insurgés, qui agit pour le besoin de son commerce en livrant ses produits de consommation à quiconque se présente comme client.

La lecture des dispositions du Code pénal ordinaire et du Code pénal militaire sur la participation à un mouvement insurrectionnel ou sur le mouvement insurrectionnel, ne laisse nullement entendre que le législateur punit le fait de vendre de la nourriture ou des consommables qui n'ont rien à avoir avec les munitions ou les armes. Il est ainsi de la fourniture des vivres aux insurgés moyennant payement d'un prix à la normale dont le commerçant ou le vendeur en a besoin.

Malheureusement, dans le procès dit des Enyele à Mbandaka évoqué ci-haut, il a été reproché à certains d'entre les prévenus, le fait pour eux d'avoir vendu la nourriture et les cartes cellulaires aux insurgés en fuite dans la forêt.

Conclusion Partielle

L'examen de la question de la compétence des juridictions militaires congolaise face aux civils tant en temps de paix qu'en période troublée présent des inquiétudes. On a eu à le démontrer dans les deux précédents chapitres que les raisons évoquées pour justifier ces extension de compétences se sont heurtées dans le vide en ce sens qu'elles dépassent le cadre normal d'une extension qui devait être prévue à titre d'exception au principe d'attribution de compétence. Alors que dans le cas sus-évoqués, il s'agit d'une attribution ordinaire des compétences que le code judiciaire et pénal militaire reconnaissent aux juridictions militaires pour juger les civils.

L'idée du prolongement de l'action disciplinaire du commandement à l'égard des militaires et le renforcement de cette discipline au sein des Forces armées, et de la Police Nationale qui a présidé l'institution des juridictions militaires ne se consolide pas lorsque ces juridictions doivent connaître les infractions commises par les civils même sans participation avec des militaires. Ainsi donc, si hier la compétence des juridictions des Forces armées à l'égard des civils pouvait être justifiée, aujourd'hui elle tombe en désuétude par le fait de l'application de l'article 156, alinéa 1er, de l'article 215 de la constitution de la République et de plusieurs dispositions contenues tant dans des instruments juridiques régionaux et internationaux que de la loi organique no13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l'ordre judiciaire dont fait partie la justice propre aux Forces armées.

PARTIE II:

INCOMPETENCE EN VIGUEUR DES JURIDICTIONS MILITAIRES FACE AUX CIVILS

« Sans préjudice des dispositions des articles 120 et 121 du Code judiciaire Militaire, lorsque plusieurs personnes justiciables des juridictions de nature ou de rang différents, sont poursuivies, en raison de leur participation à une infraction ou à des infractions connexes, elles sont jugées l'une et l'autre par la juridiction ordinaire compétente du rang le plus élevé. »

Article 10O de la Loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l'ordre judiciaire.

Pourquoi parler d'une incompétence des juridictions militaires face aux civils alors qu'elles continuent à siéger valablement?

C'est cette question qui constitue la préoccupation fondamentale dans cette partie de l'étude, qui, partira des normes tant internationales, régionales que nationales qui donnent des réponses aux questions posées y compris la jurisprudence et d'autres sources étrangères en la matière. Si le problème ne pouvait être résolu depuis très longtemps, le constituant congolais, nonobstant dans la constitution du 1er août 1964, est resté capricieuse. Mais celui du 18 février 2006 en a tranché en coupant court, et fait de la reproduction constitutionnelle congolaise une production positive et complètement en phase avec les instruments juridiques régionaux et internationaux que le pays a eu en bonne et due forme ratifiées au plan normatif interne. Il en est de même de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l'ordre judiciaire dont les principes régissent désormais les juridictions militaires.

L'on retiendra par ailleurs que tous ces instruments juridiques font partie désormais du droit interne et occupent la pyramide de la hiérarchie de normes législatives. En effet, le constituant tient à réaffirmer l'attachement de la République Démocratique du Congo aux Droits humains et aux libertés fondamentales tels que proclamés par les instruments juridiques internationaux auxquels elle a adhéré. Aussi, a-t-il intégré ces droits et libertés dans le corps même de la constitution.165(*)

C'est ce qui est mis en exergue dans le préambule de la constitution du 18 février 2006 telle que révisée le 20 janvier 2011, constitution actuellement en vigueur dans le pays : « réaffirmant notre adhésion et notre attachement à la Déclaration universelle des Droit de l'homme, à la charte africaine des Droit de l'homme et des peuples, aux conventions des Nations Unies sur les droits de l'enfant et sur les droits de la femme (...) ainsi qu'aux instruments internationaux relatifs à la protection et à la promotion des droits humains.»166(*)

Plusieurs dispositions tant sur le plan interne qu'internationale permettra de développer sur l'incompétence des juridictions des Forces armées face aux individus n'ayant jamais servi à l'armée en qualité de militaire ou de policier, les civils. Ainsi, il apparait logique de parler de l'incompétence tirée des sources normatives et de l'incompétence tirée de la nécessité de la sauvegarde des Droits de l'Homme.

Chapitre 1er : Incompétence tirée des sources normatives.

La République démocratique du Congo comme nombreuses nations dans le monde, a ratifié comme dit ci-haut bon nombre d'instruments juridiques défavorables à la compétence des juridictions instituées pour renforcer la discipline au sein de l'Armée face aux civils. Aussi, a-t-elle consacré ces dispositions comme d'autres Républiques, dans son arsenal juridique interne. C'est ce qui n'a pas échappé aux multiples points de vue de la doctrine et de la jurisprudence des certains organes oeuvrant pour la promotion et la sauvegarde des droits de l'Homme menacés aussi par le droit pénal et ses institutions.

Cependant, la Justice militaire connaît depuis 2002 une extension du champ de ses compétences matérielles et personnelles sans aucun précédent dans son histoire. Les infractions les plus graves commises au cours des conflits armés qui ont affecté le Congo sont de la seule compétence des tribunaux militaires et, faute d'une loi d'attribution de compétence, elles ne peuvent pas être déférées devant les tribunaux ordinaires. En même temps se réalise une extension de la compétence propre des tribunaux militaires qui jugent des civils et des personnes qui ne sont liées aux forces armées que de la manière la plus indirecte167(*).

Cette extension des compétences se réalise alors que se renforcent les pesanteurs politiques, institutionnelles et juridiques qui ont traditionnellement constitué des obstacles à l'indépendance de la magistrature militaire. Le commandement des forces armées exerce un contrôle de plus en plus direct sur les décisions des procureurs militaires. Les interférences politiques dans les décisions judiciaires se font de plus en plus fréquentes, en partie parce que la Réforme de 2002 a accru le risque des poursuites contre les acteurs politiques, dont une bonne partie se recrute parmi les anciens chefs de groupes armés, auteurs des crimes poursuivis devant la justice militaire. Les magistrats militaires eux-mêmes résistent à l'exercice par les juridictions ordinaires des différents mécanismes de contrôle, notamment par voie de recours constitutionnels, prévus par la Constitution, et érigent des obstacles à la jouissance par les justiciables de leurs droits constitutionnels à un procès équitable168(*).

Que disent le Droit congolais et ceux qui l'interprètent concernant cette compétence accrue des Juridictions des Forces armées à l'égard des civils? Que disent les autres législations en la matière? C'est l'objet même du présent chapitre dont il convient de le subdiviser en deux sections.

Section 1ère : En Droit congolais.

De ce qui est de la question de l'incompétence des juridictions militaires face aux civils, les règles de droit qui abondent dans ce sens sont aussi développées par la jurisprudence et la doctrine, mais avec des divergences qu'il conviendra de souligner.

§1er : Textes des lois.

Au nom du monisme, en République démocratique du Congo, les textes de lois sont soit ceux de la production législative interne, soit ceux de la production conventionnelle internationale ratifiée et intégrée dans l'arsenal juridique interne par des dispositions constitutionnelles.

A. Dispositions purement internes.

C'est depuis 1964 après les assises de Luluabourg que les nécessités de soustraire les civils de la compétence des juridictions des Forces armées, s'étaient faites sentir. L'article 124 précité de la constitution du 1er août 1964 qui disposait qu'en temps de paix, les tribunaux militaires ne connaissent que des infractions commises par les membres des forces armées constitue sans doute le point de départ.

Au titre V intitulé des institutions de la transition, au point 3 traitant du pouvoir judiciaire dans sa partie b de l'Accord global et inclusif, il a été dit que l'organisation du pouvoir judiciaire sera déterminée dans la Constitution de la transition et dans une loi. Pendant que les délégués au Dialogue inter Congolais s'accordaient sur ce point, les codes judiciaire et pénal militaires étaient en vigueur et que s'il était question de les maintenir, on allait en faire expressément allusion. Ceci paraît évident que les participants à ce dialogue n'étaient pas favorables aux lois judiciaires existantes et les innovations apportées par la Constitution du 18 février 2006 ainsi que l'éclatement des juridictions par trois ordres, lequel a conduit notamment à l'avènement de la loi organique no 13/011-B du 11 avril 2013, peuvent justifier ce point de vue.

Il suffit pour cela, de considérer l'exposé des motifs de la Constitution pour s'en convaincre, car, il est écrit ceci : « pour plus d'efficacité, de spécialiste et de célérité dans le traitement des dossiers, les cours et tribunaux ont été éclatés en trois ordres de juridictions parmi lesquels les juridictions de l'ordre judiciaire placées sous le contrôle de la cour de cassation. »169(*)

Cela a de ce fait jeter les bases de la remise des civils à leur juge naturel qu'est le juge de droit commun d'autant plus que désormais, l'action des juridictions des Forces armées est soumise au contrôle du juge de cassation sous tous ses niveaux.

C'est par l'article 156 que le constituant congolais a été convaincu de la nécessité d'adapter ne fut-ce que pour le temps de paix, la justice militaire non seulement à la législation en vigueur, mais aussi aux nécessités qui ont présidé à son institution et aux fondements qui la cristallisent dans un État de droit.

En effet, pour cet article plusieurs fois déjà évoqué, les juridictions militaires ne connaissent que des infractions commises par les membres des Forces armées et de la Police nationale. Il s'agit concrètement des faits infractionnels mis à la charge des policiers et des militaires. Sauf dans le cas prévu à l'alinéa 2 du même article concernant la substitution de l'action répressive des juridictions ordinaires par celles des juridictions militaires; hypothèses contraires à d'autres dispositions de cette même constitution qui reconnaît la suprématie des instruments juridiques à portée régionale ou internationale dûment ratifiés par le pays.

Il va falloir à ce sujet, s'intéresser à l'organisation et à la compétence des juridictions militaires congolaises assises sur les codes judiciaire et pénal militaire complètement en déphasage avec l'article 215 de la Constitution qui dispose ceci : « les traités et accords internationaux régulièrement conclus ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour chaque traité ou accord, de son application pour l'autre partie. »170(*)

On va le voir plus loin s'agissant de la non-conformité des règles régissant la justice militaire avec les accords et traités dont question dans cet article de la Constitution.

Pour sa part, l'article 221 dispose que : « pour autant qu'ils ne soient pas contraires à la présente constitution, les textes législatifs et réglementaires en vigueur restent maintenus jusqu'à leur abrogation ou leur modification. »171(*) Par cette disposition, le constituant congolais comme on le voit ici, a posé une autre question de contrôle de constitutionalité des lois antérieures à la Constitution en vigueur. Toutes les lois antérieures ne peuvent être maintenues en vigueur désormais qu'à la condition qu'elles soient conformes à la nouvelle constitution. Et cela implique qu'une nouvelle loi ne peut être adoptée que si elle est en conformité avec la Constitution dorénavant en vigueur.

A ce point de vue, il importe de souligner avec la pertinence du Professeur Dieudonné KALUBA DIBWA, qu'il n'est pas interdit d'exercer un contrôle de constitutionnalité contre une loi organique lorsqu'elle porte des dispositions contraires à la loi fondamentale. La déclaration de conformité qui fait partie de son élaboration n'empêche pas le juge constitutionnel de statuer ultérieurement sur sa constitutionnalité lorsque celle-ci pose problème à l'occasion d'un contentieux172(*). C'est qu'énonce par ailleurs le constituant.173(*)

Or, quelque paradoxal que cela puisse paraître, l'on s'accordera sur l'inconstitutionnalité à ce point des lois no 023/2002 et 024/2002 du 18 novembre 2002 portant respectivement Codes judiciaire et pénal militaires à la base de laquelle l'action répressive des juridictions des Forces armées est fortement assise. Pour rappel, la Constitution du 18 février 2006 en vigueur en République démocratique du Congo telle que modifiée le 20 janvier 2011 a instituée trois ordres des juridictions on l'a déjà dit, parmi lesquels les juridictions de l'ordre judiciaire coiffées par la cour de cassation dont font partie les juridictions militaires en étude.

Grande a été l'occasion où pourrait être résolu la question de l'article 156 de la Constitution sur la compétence des juridictions militaires lors de l'adoption de la loi organique no 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétence des juridictions de l'ordre judiciaires. Mais l'on retiendra avec satisfaction que cette loi a été adoptée sans qu'il ne soit question de faire expressément allusion à la loi judiciaire militaire de 2002 comme en a fait le constituant à l'article 156 précité. Idée tirée du point VII b de l'Accord global et inclusif de 2003 sur la loi qui va régir la Justice militaire. Cette loi étant de 2002, les délégués au Dialogue inter Congolais de 2003 à Pretoria, les élus du peuple de la législature de la transition qui ont adopté la Constitution de 2006 et ceux de l'actuelle législature qui ont adopté cette année même la loi organique sus évoquée, n'ont pas entendu maintenir ou juger conforme et digne d'application ces deux lois, si c'était cela, ils en auraient dû les maintenir expressément. Mais, eux ont plutôt dans tous les trois cas ici, prévu une loi organique, c'est-à-dire une nouvelle loi organique devant être élaborée selon le jalon de fondement conforme à la loi suprême issue des idéaux de l'entente de Sun City à Pretoria.

Cependant, l'article 6 alinéa 3 de la loi organique dont question dispose que : « les règles de compétence, d'organisation et de fonctionnement des juridictions militaires sont fixées par une loi organique distincte conformément à l'article 156 de la constitution. »174(*) Ainsi, le législateur congolais dans ce cas comme on peut bien vouloir le comprendre n'a pas ignoré l'existence du Code judiciaire militaire de 2002. Est-ce un simple mutisme? L'actuel projet de réforme de la justice militaire n'est que pour appuyer cet argumentaire.

Siégeant avec les juges assesseurs non magistrats de carrière, l'action répressive des juridictions militaires ne cadre pas avec beaucoup de dispositions en vigueur. A cette question il apert de considérer les articles 10 et 16 de la loi organique précitée sur les innovations apportées quant à la composition des tribunaux de paix et de grande instance. En effet, aux termes de l'article 10 de ladite loi organique, les tribunaux de paix qui autrefois siégeaient à juge unique, aujourd'hui en matière répressive, ils siègent avec trois juges, tous magistrats de carrière; et à l'article 16 il est prévu pour les tribunaux de grande instance que, lorsque l'effectif présent ne permet pas de composer le siège, le Président du tribunal peut assumer à titre de juge, sur réquisition motivée du Procureur de la République, un magistrat civil ou militaire, du Parquet de grande instance ou de l'Auditorat ou du tribunal militaire de garnison, un avocat ou un défenseur judiciaire résidant en ce lieu.

Par ces deux dispositions, le législateur congolais se refuse à ce qu'un citoyen poursuivi pour un fait pénal soit jugé par un seul magistrat juriste ou par des non-juristes, c'est pourquoi, il a expressis verbis donné la possibilité au Président du tribunal de recourir au service d'un collègue même militaire ou un praticien de droit, avocat ou défenseur judiciaire, pourvue que la justice pénale soit l'oeuvre non seulement d'un seul, mais aussi de ceux qui connaissent le droit pénal et qui comprennent tous les en jeu liés à la nature de ce procès combien sensible et délicat. Et le code judiciaire militaire reconnait au juge militaire la faculté de recourir à juge civil pour composer le siège. Cela montre combien le législateur est préoccupé de ce qui est de la composition du siège d'une juridiction répressive par les assesseurs non juriste. Alors, si le législateur voudrait que le tribunal de paix ne soit composer en matière pénale que des juristes alors qu'ils ne vont jamais prononcer une peine supérieur à cinq ans, logiquement cela doit être le cas pour les tribunaux militaires de garnison qui prononcent même la peine de mort.

La compétence des Juridictions militaires résultait aussi de l'exclusivité qui était reconnue à ces juridictions de connaître seules des crimes internationaux ou crimes de la CPI incorporés dans le Code pénal militaire. Cependant, l'article 91 précité de la loi organique du 11 avril 2013, a tranché sur cette question en rendant les cours d'appel compétentes pour juger les auteurs desdits crimes en complémentarité bien sûr avec la Cour Pénale Internationale.

L'on se permettra aussi de considérer avec force le placement des juridictions militaires sous le contrôle de la Cour de cassation, une juridiction ordinaire, et avec cette particularité que le législateur fait allusion notamment sur la violation des traités en ce qui concerne les traités internationaux dûment ratifiés. En effet, l'article 95 de cette loi organique prévoit que : « la Cour de cassation connaît des pouvoirs pour violation des traités internationaux dûment ratifiés, de la loi ou de la coutume formés contre les arrêts et jugements rendus en dernier ressort par les cours et tribunaux civils et militaires de l'ordre judiciaire »175(*)

Et l'article 96 suivant précise que la violation de la loi ou de la coutume comprend notamment la fausse application ou la fausse interprétation. C'est à ce point que les juges militaires sont heurtés lorsqu'ils évoquent la justification de leur compétence à l'égard des civils basée sur l'article 156, alinéa 3 de la constitution qui prévoit une loi organique pour fixer les règles de compétence desdits juges. Or la loi organique en question n'est pas celle de 2002 tombée en désuétude, mais il s'agit d'une loi organique qui doit être élaborée conformément à l'article 156 ici qui parle des infractions commises par les membres des Forces armées et de la Police nationale. Pareils cas doivent faire l'objet d'un pourvoi en cassation lorsque le juge militaire refuse des se déclarer incompétent.

L'on regrettera malheureusement l'attitude de la Haute cour militaire dans l'affaire Kutino Fernando qui sur le troisième moyen qui parlait de l'incompétence des juridictions militaires pour juger les civils, la Haute Cour Militaire avait directement vidé la question disant avoir déjà rendu un arrêt à ce sujet. Les civils sont jugés du fait qu'il y a eu des fusils de guerre dans cette opération.176(*)

Lorsqu'une personne est poursuivie simultanément du chef de plusieurs infractions qui sont de la compétence des juridictions de nature ou de rang différents, la juridiction ordinaire du rang le plus élevé, compétente en raison de l'une des infractions, l'est aussi pour connaître des autres.177(*) Il ressort de l'exégèse de cette disposition que si des civils sont poursuivis avec des militaires pour associations de malfaiteurs, vols, coups et blessures volontaires par exemple, la juridiction ordinaire sera compétente, même si l'on évoque l'infraction d'assistance d'un ou plusieurs militaires à commettre des actes contraires à leur devoir, à raison de vol infraction relevant de la compétence de cette juridiction ordinaire.

C'est ce qu'affirme le Professeur WANE BAMEME déjà cité, lorsque concernant la compétence des juridictions des Forces armées en matière des crimes de la CPI note ceci : « en tenant compte de la compétence personnelle des juridictions militaires, on constate que ces matières graves prévues dans le code pénal militaire dans la catégorie des infractions mixtes et non essentiellement militaires, échappent à la compétence exclusive de ces dernières lorsque ces infractions sont commises par des militaires en participation criminelle avec des civils ou des civils seuls.»178(*)

Comme on peut le remarquer, cette disposition met en cause plusieurs articles des Codes judiciaire et pénal militaires sur la compétence des juridictions des Forces Armées tant à l'égard des civils que des militaires.

L'article 100 de la Loi organique n° 13/011 du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l'ordre judiciaire précitée, abonde dans le même sens lorsqu'il prévoit malgré exception faite à l'hypothèse des articles 120 et 121 du Code judiciaire militaire que lorsque plusieurs personnes justiciables des juridictions de nature ou de rang différents, sont poursuivies, en raison de leur participation à une infraction connexe, elles sont jugées l'une et l'autre par la juridiction ordinaire compétente du rang le plus élevé.

En fin, l'article 153 de la même loi organique a fait perdre à la Haute Cour Militaire bon nombre de ses cas de compétence en tranchant ainsi une question qui a toujours partagé la doctrine même au sein de notre faculté sur la suprématie de la Cour Suprême de Justice à la Haute cour militaire.

En effet, cet article dispose que : « les affaires relevant de la compétence de la Cour de cassation pendantes devant la Cour Suprême de Justice et la Haute Cour Militaire sont transférées, en l'état, à la Cour de cassation dès son installation. »179(*)

Si la Cour Suprême de Justice est appelée à disparaître de la scène juridictionnelle congolaise, notamment, par la succession des lois organiques sur les juridictions des trois ordres existants, la Haute Cour Militaire par contre doit être soumise à une réforme quant à son organisation et sa compétence.

Bien qu'ils ne se soient jamais mis d'accord, les tenants de la doctrine même les rétentionnistes de la peine de mort sont d'avis que les Juridictions militaires se limitent à leur mission orthodoxe, celle de juger les militaires pour les infractions qui troublent l'ordre public militaire au sein de l'armée.

Qu'en est-il des dispositions internationales?

B. Dispositions internationales consacrées en Droit interne.

Il est de bon droit que les instruments juridiques régionaux et internationaux ratifiés comme le réaffirme le Peuple congolais dans le préambule et l'exposé des motifs de la Constitution, font partie de l'arsenal juridique interne. C'est ainsi que l'incompétence des juridictions militaires congolaises face aux civils, se recrute notamment dans les dispositions contenues dans ces différents instruments juridiques.

En effet, le 1er considérant de la Déclaration universelle des Droits de l'Homme adoptée par la résolution 217 A de l'Assemblée Générale des Nations Unies dans sa troisième session du 10 décembre 1948, les peuples des Nations Unies dont la République démocratique du Congo fait partie, considèrent : « la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde. »180(*)

L'on s'interrogera cependant si l'organisation, le fonctionnement et le rattachement de la justice militaire à un organe de l'Armée et du Ministère de la défense avec sa spécialité d'être le prolongement du Commandement militaire pour le renforcement de la discipline au sein des Forces armées et de la Police nationale, correspondent au principe sus-venté de la DUDH.

Ainsi aux termes de l'article 5 de la DUDH, nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. On se demande si la boucherie du Code pénal militaire dans ses multiples dispositions qui prévoient la peine de mort ne se heurte pas contre cette disposition. Car, aucun traitement et aucune peine, n'est cruel ni inhumain ou plus dégradant que la peine de mort laquelle tout être humain redoute a en horreur. Mais le Code pénal militaire qui définit les infractions qui ne doivent être jugées que par les Juridictions militaires prévoit abondamment ces peines.

En revanche, l'article 10 de cette même déclaration prévoit que : « toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, qui décidera, soit de ses droits et obligations, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. »181(*)

Nul n'ignore que la Justice militaire congolaise est le prolongement du Commandement militaire, elle est une des branches de l'Armée et que de ce fait, elle ne saurait ni être impartiale, ni garantir le droit à un procès équitable comme le prévoit cet article.

Pour sa part, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques adopté par l'Assemblée Générale des Nations Unies dans sa Résolution 2200 de la vingt et unième session du 16 décembre 1966, ratifié par la République démocratique du Congo le 23 mars 1976, dans son article 6 au point 2 prévoit que : « dans les pays ou la peine de mort n'a pas été abolie, une sentence de mort ne peut être prononcée que pour les crimes les plus graves, conformément à la législation en vigueur au moment où le crime a été commis et qui ne doit être en contradiction avec les dispositions du présent pacte ni avec la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. Cette peine ne peut être appliquée qu'en vertu d'un jugement définitif rendu par un tribunal compétent. »182(*)

Il est clair que le Code pénal militaire congolais dont les infractions relèvent de la compétence exclusive des juridictions militaires (article 217) prévoit la peine de mort même pour les peines les moins graves. Dans le préambule du statut de Rome de la CPI, ratifié par la République Démocratique du Congo le 30 mars 2002 suite au Décret-loi no 013/2002, les parties ont eu à l'esprit qu'au cours de ce siècle, des millions d'enfants, de femmes et d'hommes ont été victimes d'atrocités qui défient l'imagination et heurtent profondément la conscience humaine.183(*)

Les parties ont en outre souligné que la CPI dont le présent statut porte création est complémentaire des juridictions criminelles nationales.184(*) Malgré, comme on le voit, que le fait pour le statut de qualifier les crimes des plus graves comme défiant l'imagination et heurtant profondément la conscience humaine, ne les a pourtant pas punis de mort et cela qu'ils aient causé quels dégâts.

C'est ce qu'on peut lire dans l'article 77 qui prévoit ceci : « la Cour peut prononcer contre une personne déclarée coupable d'un crime visé à l'article 5 du présent statut (crime de guerre, crime contre l'humanité et le crime de génocide) l'une des peines suivantes :

a) Une peine d'emprisonnement à temps de 30 ans au plus;

b) Une peine d'emprisonnement à perpétuité si l'extrême gravité du crime et la situation personnelle du condamné le justifient. »185(*)

Il est cependant regrettable que la République démocratique du Congo qui a expressément prévu ces crimes dans le Code pénal militaire puisse continuer à garder une telle législation qui prévoit des peines aussi graves même pour des infractions qui ne défient pas l'imagination comme ceux de la CPI.

Les États africains en ce qui leur concerne par l'entremise de la Charte africaine des droits de l'Homme et des Peuples ratifié par la République démocratique du Congo alors Zaïre le 20 juillet 1987 sous l'ordonnance-loi no 87-027, ont réaffirmé leur attachement aux libertés et aux droits de l'Homme et des peuples contenus dans les déclarations, conventions et autres instruments adoptés dans le cadre de l'Organisation de l'Unité Africaine, du Mouvement des Pays Non-alignés et de l'Organisation des Nations Unies.

Ainsi, il est prévu ce qui suit à l'article 5 de cette Charte Africaine des droits de l'Homme et des peuples : « tout individu a droit au respect de la dignité inhérente à la personne humaine et à la reconnaissance de sa personnalité juridique. Toutes formes d'exploitations et d'avilissement de l'homme notamment l'esclavage, la traite des personnes, la torture physique ou morale, et les peines ou les traitements cruels inhumains ou dégradants sont interdites. »186(*)

La question des peines et des traitements cruels, inhumains ou dégradants méritent d'être vue avec un oeil des droits de l'Homme en mettant l'accent sur le respect de la dignité de la personne humaine. En fait, il est sans doute qu'aucune peine n'est plus cruelle, plus inhumaine ou plus dégradantes que la peine de mort ou même la peine de servitude pénale à perpétuité en considération des conditions de vies dans les milieux carcéraux de la République démocratique du Congo. Et si les État du monde s'insurgent contre les traitements cruels, inhumains ou dégradants, ils redoutent sans doute la mort qui est une élimination qui prive la société de ses membres. La loi pénale militaire tant de fond que de forme ne s'inscrit pas dans cette logique et par conséquent, le fait pour les Juridictions militaires de juger les personnes et les faire appliquer ces lois, constitue un non-respect et une violation pure et simple des engagements internationaux et régionaux par le pays de Lumumba.

L'article 7, point 1 litera d de ladite charte demande à ce que toute personne soit jugée dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale. Malheureusement, l'article 209 du Code judiciaire militaire auquel les magistrats instructeurs militaires trouvent refuge en violation des droits et libertés garantis aux détenus. En effet, cet article dispose que : « si l'instruction de l'affaire doit durer plus de quinze jours et que le magistrat instructeur militaire estime nécessaire de maintenir l'inculpé en détention, il en réfère à l'Auditeur militaire. Celui-ci statue sur la détention provisoire et décide sur sa prorogation pour un mois; et, ainsi de suite, de mois en mois, lorsque les devoirs d'instructions dûment justifiés l'exigent. Toutefois, la détention préventive ne peut être prorogée qu'une fois si le fait ne paraît constituer qu'une infraction à l'égard de laquelle la peine prévue par la loi n'est pas supérieure à deux mois de servitude pénale. Si la peine prévue est égale ou supérieure à six mois, la prolongation de la détention préventive ne peut dépasser douze mois consécutifs. Dépassé ce délai, la prorogation est autorisée par la juridiction compétente. »187(*)Par la référence à cette disposition, il est une pratique malheureuse qui a élu domicile dans les Parquets militaires au fait que même si rien n'exige le maintien du prévenu en détention quant à la procédure, mais parce que le magistrat a été négligeant ou n'a pas eu le temps de poursuivre l'enquête, il se contente simplement de couvrir sa défaillance par la prorogation de cette détention préventive au détriment alors de l'inculpé.

Le devoir dont les Nations africaines par l'entremise de leurs Chefs d'États et Gouvernements se sont fait, mérite d'être pris en compte concernant l'incompétence en vigueur des juridictions militaires. En effet, comme on va le comprendre, l'article 26 de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des peuples prévoit ce qui suit : « les États parties à la présente charte ont le devoir de garantir l'indépendance des tribunaux et de permettre l'établissement et le perfectionnement d'institutions nationales appropriées chargées de la promotion et de la protection des droits et libertés garantis par la présente charte. »188(*)

On ne le dira jamais assez, les juridictions militaires sont soumises au Commandement militaire de qui elles reçoivent des instructions, font partie des services des Forces armées et dépendent aussi du Ministère de la Défense nationale. A cela s'ajoute le principe de la subordination hiérarchique auquel les magistrats militaires sont soumis. Ce qui ne permet jamais à ces juridictions de fonctionner conformément à cet instrument d'intégration régionale. Deux situations peuvent amener à mettre à l'écart une possibilité éventuelle de l'indépendance de la Justice militaire : d''abord le fait que tous les magistrats doivent être revêtus de la qualité de militaire et sont de ce fait des militaires à part entière soumis à la hiérarchie du Commandement et ensuite le fait qu'il est prévu dans la composition du siège, l'existence des juges assesseurs recrutés parmi les officiers de l'Armée et de la Police ne justifiant nullement d'une formation suffisante en Droit moderne, soumis eux aussi aux Commandants des Unités dans lesquels ils sont administrés.

L'article 30 se veut plutôt créateur d'un organe. En effet, cet article prévoit ce qui suit : « il est créé auprès de l'OUA une Commission Africaine des Droits de l'Homme et des peuples ci-dessous dénommée « la Commission », chargée de promouvoir les droits de l'homme et des peuples et d'assurer leur protection en Afrique. »189(*)

Cette commission comme l'ont voulu les États africains, a pour mission aux termes de l'article 45, de formuler et élaborer, en vue de servir de base à l'adoption de textes législatifs par les Gouvernements africains des principes et des règles qui permettent de résoudre les problèmes juridiques relatifs à la jouissance des droits de l'Homme et des peuples et des libertés fondamentales notamment. Cela implique que les législations des pays membres doivent être conformes ou s'adapter aux Directives et recommandations de cet Organe qu'ils ont dû créer.

C'est en vertu de cette compétence que la Commission a consacré dans ses Directives suscitées le droit des civils à ne pas être jugés par un tribunal militaire. Elle a de ce fait énoncé que les tribunaux militaires ne peuvent en aucune circonstance juger des civils en précisant que ces tribunaux ont pour seul objet de connaître des infractions d'une nature purement militaire commise par le personnel militaire.

Soucieuse de sauvegarder et de promouvoir les droits de l'Homme comme elle se montre du moins dans sa volonté, la République démocratique du Congo a ratifié la Charte Africaine des droits et du bien-être de l'enfant par le décret-loi no 007/01 du 28 mars 2001. En effet, l'article 19 de ladite Charte prévoit que : « tout enfant a droit à la protection et aux soins de ses parents et, si possible, réside avec ces derniers. Aucun enfant ne peut être séparé de ses parents contre son gré, sauf si l'autorité judiciaire décide (dans le cadre de droit civil si on peut le dire ainsi), conformément aux lois applicables en la matière, que cette séparation est dans l'intérêt même de l'enfant (allusion faite à la peine de mort infligée à un parent ou une femme enceinte. »190(*)

De ce fait, tout État partie à cette charte ne saurait échapper à la violation de ses dispositions s'il continue à maintenir dans son arsenal juridique comme le cas du Code pénal militaire congolaise, la peine de mort avec cette particularité que la loi dans certains cas oblige aux juges de la prononcer. Il ne saurait pas non plus penser au bien-être de l'enfant lorsque la peine de mort peut à tout moment menacer les parents, ceux-là même qui sont appelés à protéger les enfants. C'est ce qui continue à mettre en cause la crédibilité et l'équité de la Justice militaire par rapport aux peines applicables et à leur conformité à la législation régionale ou internationale.

En revanche, dans l'article 30, les États parties se sont engagés à prévoir un traitement spécial pour les femmes enceintes et les mères des nourrissons et de jeunes enfants qui ont été accusés ou jugés coupables d'infraction à la loi pénale et se sont engagés en particulier à :191(*)

a) Veiller à ce qu'une peine autre qu'une peine d'emprisonnement soit envisagée d'abord dans tous les cas lorsqu'une sentence est rendue contres ces mères;

b) Établir et promouvoir des mesures changeant l'emprisonnement en institution pour le traitement de ces mères;

c) Créer des institutions spéciales pour assurer la détention de ces mères;

d) Veiller à interdire qu'une mère soit emprisonnée avec son enfant;

e) Veiller à interdire qu'une sentence de mort soit rendue contre ces mères;

f) Veiller à ce que le système pénitencier ait essentiellement pour but la reforme, la réintégration de la mère au sein de sa famille et la réhabilitation sociale.

Il est clair qu'en ratifiant cet instrument, la République démocratique du Congo s'engageait sans entrave à s'y conformer et à promouvoir les droits qui y sont énumérés. Pourtant comme on peut le constater, le cortège des dispositions du Code pénal militaire prévoyant ou imposant l'application de la peine de mort ou de la servitude pénale à perpétuité n'est ni favorable à l'application de cet instrument régional ni en conformité avec l'esprit et la lettre que les États parties ont voulu pour ledit instrument. Aucun article d'une loi dans notre législation ne prévoit un mécanisme d'application effective de cette disposition à l'égard des mères qui y sont concernées et qu'elles sont remballées dans sus-épinglées qualifiées d'attrape-tout.

§2ème : Doctrine et Jurisprudence.

Hormis les sources normatives développées dans le premier §, source tirées tant des dispositions constitutionnelles, légales que des instruments juridiques régionaux et internationaux défavorables à l'extension des compétences des juridictions des Forces armées à l'égard des civils, personnes autres que les militaires, les points de vue doctrinaux et jurisprudentiels sont d'une importance irréfutable.

A. Doctrine.

Non seulement qu'elle est une source du droit, mais aussi depuis des temps immémoriaux, la doctrine contribue beaucoup quant à l'interprétation des lois et à la portée essentielle à attacher à la production législative.

S'agissant particulièrement de la compétence des juridictions militaires face aux civils, certains auteurs notamment congolais sont d'avis que les cours et tribunaux des forces armées ne jugent pas les personnes qui n'ont pas la qualité de militaire. C'est ainsi que certains s'expriment en ces termes : 

« l'option levée initialement par la législation congolaise pouvant être perçue comme une réminiscence des expériences de Nuremberg et de Tokyo sus ventées, rien ne peut présentement disculper le flux des civils devant les juridictions militaires pour répondre des actes de violations graves des droits et libertés fondamentaux des humains ou d'atteintes graves au patrimoine. Il est temps que les personnes civiles accusées de ces actes heurtant la conscience universelle soient déférées devant leur juge naturel de principe, non seulement pour se conformer aux prescrits des instruments internationaux et régionaux auxquels la République démocratique du Congo est partie ainsi qu'à la Constitution nationale, mais encore pour décharger les Juridictions militaires d'une surpopulation des incriminés. Le juge militaire aura le mérite d'avoir jeté les jalons d'une jurisprudence nationale de référence et à son collègue civil de la consolider et de contribuer à son amélioration soutenue au regard de l'évolution de la science et de la jurisprudence internationale. »192(*)

Comme on le voit, cet auteur qui est un haut magistrat militaire, n'encourage jamais l'impunité, mais il comprend seulement qu'il y a opportunité pour plusieurs raisons à ce que les civils soient jugés par leur juge de principe qu'est le juge de droit commun en s'appuyant sur la Constitution de 2006 et en militant pour le respect des instruments juridiques régionaux et internationaux. C'est ce qu'il affirme avec vigueur lorsqu'il écrit qu' « il n'y a point de doute que le constituant congolais soustrait les personnes civiles de la compétence des juridictions militaires. »193(*)

Allusion faite à l'article 156 de la constitution de la république en vigueur depuis 2006. L'actuelle incompétence des juridictions militaires face aux civils sur le plan doctrinale tient au fait de la suprématie de la constitution sur les lois existantes peu importe qu'elles aient été élaborées avant la Constitution en vigueur. Car le changement intervenu à l'échelon constitutionnel appelle sans nul doute à un nouvel ordonnancement juridique.

L'illustre Professeur MPONGO BOKAKO BAUTOLINGA Édouard avait raison lorsqu'en 2001 il notait que : « la suprématie matérielle tient à ce que l'ordre juridique tout entier repose sur la constitution. Étant à l'origine de toute activité juridique qui se déploie dans l'État, elle est nécessairement supérieure à toutes les formes de cette activité puisque c'est d'elle et d'elle seulement, qu'elles tiennent leur validité. Elle est, au sens propre du mot, la règle fondamentale. »194(*)En d'autres termes plus précis, la suprématie matérielle de constitution résulte du fait qu'elle organise des compétences, elle est nécessairement supérieure aux autorités qui en sont investies. Celles-ci ne pourraient pas par conséquent aller à l'encontre de la constitution sans se dépouiller du même coup, de leur titre juridique.195(*)

Or si l'on admet la suprématie de la constitution sur les lois, il faut de tout même admettre celle des traités et accords internationaux qui sont au-dessus de la constitution de par la constitution elle-même. Alors que le Code judiciaire militaire ni le Code pénal militaire n'est conforme aux traités et accords internationaux et à la constitution en vigueur. Ceci parait évident du fait que ces deux lois ont été adoptées sous un contexte et la Constitution en vigueur est intervenue sous un autre contexte en instituant d'ailleurs un nouvel ordre juridique du haut jusqu'au bas de la pyramide.

C'est ainsi que si c'était aux États-Unis, tous les tribunaux militaires congolais depuis le plus modeste (tribunal militaire de police) jusqu'à la cour suprême (Haute Cour Militaire) peuvent contrôler la constitutionnalité des lois (partant de leur compétence). Ils le font à l'occasion de n'importe quel procès. Le problème de la constitutionnalité s'ajoute donc indirectement au procès, le juge est saisi par voie d'exception. Il s'agit d'un contrôle diffus; ce modèle a été transposé au Canada, au Brésil, en Argentine et au Japon.196(*) Ça aurait pu résoudre le problème ici au Congo où la Constitution prévoit clairement la compétence personnelle des Juridictions militaires pour les éléments des Forces armées et de la Police. Le juge militaire allait simplement se déclarer incompétent sans manoeuvre comme il le présentement en cas d'exception d'inconstitutionnalité de sa compétence face aux civils soulevée.

De ce qui est de la valeur des traités, l'on peut comprendre à ce point avec le Professeur Prosper NGOMA BINDA que la RDC « adopte le système moniste en vertu duquel les traités et accords internationaux produisent effet automatique et directement, après ratification et publication par insertion au journal officiel. Ils ont une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour chaque traité ou accord... »197(*)

L'on comprend que les traités comme dit ci-haut font partie du droit interne en ce qu'ils occupent le sommet pyramidal de l'arsenal juridique congolais et le constituant ne les affirme pas seulement dans les préambules mais au corps même de la constitution. C'est ce qui contrarie ce qui pouvaient prétendre à l'appréciation de la constitutionnalité ou de l'inconstitutionnalité d'une loi par rapport à la constitution qui était en vigueur au moment de l'adoption d'une loi mise en cause. Car si on échappe à la Constitution, on sera heurté sur les instruments régionaux ou internationaux d'autant plus que la constitutionnalité doit s'apprécier aussi en considération de tous ces instruments dont la Constitution elle-même fait allusion tant au niveau du préambule que de son corps même.

Eu égard à l'importance des droits consacrés, cette manière de procéder a été jugée plus satisfaisantes qu'une simple référence dans les préambules aux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme.198(*)En claire, la doctrine relève le caractère contradictoire du système judiciaire militaire avec les instruments juridiques que la République a ratifié et la Constitution, et par là l'incompétence des Juridictions militaires à l'égard des civils malgré les dispositions qui peuvent la justifier étant donné que ces dispositions ne pouvant pas s'appliquer du fait de leur incompatibilité avec les normes supérieures.

Visant cette incompétence, la doctrine s'appuie aussi au point de vue suivant : « sur les options de la création d'une Cour de cassation militaire, le rejet s'est basé sur le fait que la Cour de cassation militaire aurait à connaître des jugements et des arrêts impliquant des civils complices des militaires. Or, on ne peut pas soumettre les civils aux juridictions militaires généralement caractérisées par une procédure expéditive.199(*) On peut ici penser aux Cours militaires opérationnelles qui accompagnent les fractions de l'Armée en campagne, lesquelles généralement dans des endroits où il n'y a pas des avocats pour que le prévenu se fasse assister d'un défenseur de son choix comme il en a le droit. Car pour ceux qui ont milité pour cette justice, le jugement doit être exécuté de manière immédiate et spectaculaire et qu'on doit écarter les voies de recours au front car estime-t-on ceux-ci vont retarder l'exécution des sentences prononcées200(*).

Pour bon nombre des membres de la défense et d'autres organes indépendants de défense des droits de l'Homme, la Constitution nationale ayant sans équivoque tranché cette question conformément au courant normatif international, les juridictions militaires doivent se déclarer incompétentes pour connaître des causes dans lesquelles les civils sont impliqués.201(*)

Si l'alinéa premier de l'article 156 de la Constitution soustrait les civils de la compétence des juridictions militaires, son alinéa 2 cependant le sommet en temps de guerre ou lorsque l'état de siège ou d'urgence est proclamé. Cette dernière hypothèse est contraire aux instruments juridiques internationaux et les doctrinaires n'acquiescent pas.

En ce sens, le Professeur NYABIRUNGU mwene SONGA Raphaël dans un style hostile, se montre défavorable lui aussi à la compétence des juridictions des Forces armées à l'égard des civils, et note qu' « un traité l'emporte sur une constitution auquel celle-ci doit céder le pas. La législation de la République doit être adaptée aux traités et non pas les traités aux lois. »202(*) Il note par ailleurs que les juridictions militaires disposant seules de la compétence matérielle des crimes relevant de la CPI, se référant au Statut de Rome dans la définition de ces crimes ainsi que dans la détermination des peines203(*) . Fustigeant hostilement le Code pénal militaire qui réprime les crimes internationaux, même à l'égard des civils, cet auteur estime qu'étant une législation particulière, il ne saurait être le siège des valeurs les plus fondamentales pour l'ordre public interne et international, lorsqu'on sait que ce rôle revient au Code pénal ordinaire, où ces mêmes valeurs doivent s'exprimer de la manière la plus générale, la plus solennelle et la plus stable à l'intention de tous les citoyens et de tous les habitants de République. Étant exceptionnelles, les juridictions militaires ne sauraient juger les atteintes les plus graves faites aux valeurs les plus importantes d'une société donnée.204(*)

Ainsi, la préoccupation fondamentale est celle de l'adaptation aux réalités vécues étant donné qu'il y a un objectif visé particulièrement. Cette justice est considéré comme transitionnelle. Elle marque donc à la fois son caractère éphémère, et surtout sa fonction de soudure de passage entre l'état de violence et de non droit du temps de guerre que celui-ci suppose le respect d'une légalité minimale se référant aux valeurs humanitaires et chevaleresques universelles et l'état de paix et de droit ; tel que recherché et voulu par la République démocratique du Congo.205(*)

De même, les Juridictions militaires étant particulière, elles ne peuvent et ne doivent limiter leur compétence personnelle qu'aux militaires, l'extension de celle-ci aux civils ne devant se faire qu'au vu des actes en rapport avec l'ordre militaire. L'extension de la compétence personnelle, au-delà de ces limites, conduirait à satisfaire les civils à leur juge naturel, pour les confier à un juge qui ne saurait être impartial, le procès devenant aussitôt inique et partial, violant ainsi toutes les dispositions de droit international qui imposent un procès équitable. Les juridictions militaires doivent par principe, être incompétentes pour juger des civils.206(*)

Bien que ne s'étant pas clairement prononcé, le Professeur DJOLI ESENG'EKELI Jacques ne dit pas le contraire lorsqu'il note qu'il faut continuer la réflexion sur la qualification de la place des Juridictions militaires conformément à l'esprit de l'article 153 alinéa 2 de la Constitution qui enlève à la Haute Cour Militaire la compétence d'annulation que lui accordait le Code judiciaire militaire (article 123 abrogé par la loi organique no 13/011-B).207(*)

C'est autant avec le Professeur Pierre AKELE ADAU répondant à la question orale du professeur NGOY wa NSENGA Théodore lors de la réouverture du CCPS précité sur l'article 133 de la Constitution concernant l'application de la coutume par les Cours et tribunaux : comment une juridiction militaire ou dans quelle circonstance peut-elle appliquer la coutume, il faut une réattribution des compétences avec des matières spécifiques entre les juridictions ordinaires et les juridictions militaires.208(*)

L'on accordera à dire que les deux lois piliers de la justice militaire sont antérieures à la Constitution de la République qui a donné naissance à un nouvel ordonnancement juridique, or normalement en pareil cas toute loi fut-elle antérieure ou nouvelle doit être conforme aux règles de base concernant les compétences projetées par la loi suprême en vigueur. Il faudrait admettre en effet que, les codes judiciaire et pénal militaires de 2002, non seulement qu'ils sont antérieurs à la constitution en vigueur, mais ils ont été pris dans un contexte d'adoption d'une législation sur mesure alors que dans un État de droit, la loi est impersonnelle, abstraite et générale209(*).

Malheureusement, il a été évité expressément à ce que les prévenus du procès de l'assassinat du Président Laurent Désiré KABILA parmi lesquels des civils ne puissent pas bénéficier de l'application de ces deux lois; car le 18 novembre 2002 date de la promulgation des nouveaux codes, le procès était en cours. En application des règles relatives à l'application des lois pénales, dans le temps, ces codes auraient dû être appliqués dans le cadre de ce procès, ce que la loi a donc explicitement écarté dans un effort apparent.210(*)

Il a été aussi observé que les tribunaux militaires étendent leur compétence à l'égard des civils par le recours à des notions vagues et attrape tout, comme celle d'incitation des militaires à commettre les actes contraires à la loi ou à leur discipline, qui permette d'établir le lien le plus indirect entre le civil et l'infraction de caractère militaire. Ces dispositions constituent une claire violation de la Constitution et des normes internationales.211(*)

Concernant la garantie du droit de former un recours contre un jugement posé par l'article 21 de la Constitution, un Magistrat militaire de carrière a décrié le fait que les articles 87 et 276 du Code judiciaire militaire dérogent à ce principe constitutionnel en méconnaissant la possibilité d'attaquer par voies de recours les arrêts des Cours militaires opérationnelles. Il estime qu'à son entendement ces deux dispositions du Code judiciaire militaire constituent un revirement regrettable.212(*)

Quant à la compétence des juridictions militaires à l'égard des civils sur les infractions du statut de Rome de la Cour Pénale Internationale, la doctrine congolaise se montre abondamment d'avis contraire en ce que les auteurs ne s'accordent pas avec les Codes judiciaire et pénal militaire. Ils estiment que ces infractions sont sensibles et d'extrême gravité, du fait que leur perpétration ne laisse pas intacts les droits et libertés garantis aux individus, les Juridictions militaires ne peuvent pas être un cadre de leur répression.

C'est ce qui pousse le Professeur NYABI RUNGU à affirmer que les juridictions militaires ne sont pas les mieux placées pour juger les crimes relevant de la compétence matérielle de la CPI. Le Code pénal militaire estime-t-il est en contradiction avec la Convention sur la prévention et répression du génocide de 1948 dont le but, à ce sujet était de considérer comme criminel le fait de sortir des enfants de leur groupe, identifié et ciblé, vers un autre, réalisant ainsi leur déracinement et la destruction, totale ou partielle, de ce groupe bien déterminé. Il est entendu, ajoute-t-il, que les infractions relevant de la compétence matérielle de la CPI, doivent relever de la Cour d'appel au premier degré, permettant ainsi aux justiciables de bénéficier d'un deuxième degré de juridiction au niveau de la Cour de cassation.213(*)

C'est cette même position que prend à son tour le Professeur LUZOLO lorsqu'il s'exprime en ces termes : « considérant la compétence non rétroactive de la CPI, prenant en compte les réclamations exprimées dans l'opinion en faveur de la création d'un tribunal international ad hoc pour la RDC qui heurte la réticence et aux tergiversations des milieux internationaux comme le Conseil de Sécurité de l'ONU, conscient, cependant de la nécessité de réprimer les crimes graves qui ont émaillés la période précédant la création de la CPI, le gouvernement annonçait son projet d'instituer, au sein des juridictions répressives congolaises des chambres spéciales qui seront chargées de cette répression. »214(*)

Ces préoccupation concernant un tribunal ad hoc ou des chambres spécialisées au sein des cours d'appel comme on peut le constater, sont émises non seulement de l'idée des crimes commis avant la mise en vigueur du statut de Rome, mais aussi avec l'idée que les cours et tribunaux militaires vu leur caractère et considérant leur composition, elles ne sont pas à mesure de connaître de tels crimes non seulement graves mais aussi complexes, et que les droits mis en jeu touchent tant des prévenus que les victimes.

Selon le projet de la loi sus-évoqué, les chambres spécialisées de premier degré fonctionneront au sein des Cours d'appel de Kinshasa/Matete, de Lubumbashi, de Bukavu et de Kisangani. Celles du degré d'appel fonctionneront, quant à elles, au sein des Cours d'appel de Kinshasa-Gombe, de Goma et Kananga. Le président et le conseillers sont de nationalité congolaise, alors que les conseillers ad litem pourront être de nationalité congolaise ou étrangère, magistrats de carrière ou non, mais dans le cas, juristes de formation ayant une expérience professionnelle ou judiciaire d'au moins cinq ans en matière de droit international humanitaire justifiant de la capacité morale indispensable à l'exercice de ces fonctions.215(*)

Par contre, en attendant la loi de mise en application du statut de Rome, ratifié par la République démocratique du Congo depuis le 30 mars 2002, les juridictions congolaises doivent considérer que le statut fait désormais partie intégrante de l'arsenal juridique répressif congolais et peut être appliqué au niveau des juridictions congolaises de droit commun et même militaires au nom du monisme du droit congolais.216(*)

On estime que la répression des crimes les plus graves vise à protéger les droits fondamentaux liés à la nature humaine ou inhérente à la vie, donc les droit de l'Homme reconnus à la fois aux auteurs des crimes et aux victimes; pour les uns les garanties à un procès équitable au fait qu'ils risquent de perdre la vie, la liberté ou le patrimoine et pour les autres les mêmes garanties pour assurer les réparations des préjudices qu'ils ont subis. Cela n'est possible que par une bonne et juste application de la loi pénale.

Or, le Code pénal militaire comme on le voit, n'est nullement le cadre pour réussir une telle application, compte tenu de son but et de son objet qui ne doivent concerner que les militaires et la discipline au sein de l'armée, et compte tenu de ses propres dispositions qui, à maintes égards, sont en deçà des exigences du droit international.217(*)

Il est cependant alarmant et regrettable de constater que le Sénat congolais pour un motif moins soutenable a décidé du rejet de ce projet de loi sur les chambres spécialisée, estimant notamment que l'argent à investir dans la mise en place de telles chambres serait mieux utilisé dans le renforcement des capacités des juridictions internes.218(*) A ce point il convient d'une part de se poser la question de savoir si le seul renforcement des capacités sus-vanté suffit pour résoudre le problème alors que l'on sait que cela n'a pas été fait dès lors, et d'autre part l'on retiendra que le problème n'est pas que sur la contradiction ou l'inconstitutionnalité des dispositions légales en la matière, mais aussi la capacité des acteurs comme il est à comprendre dans le motif évoqué pour le rejet dudit projet de loi.

En clair, il convient de continuer à réaffirmer d'une part la primauté des traités et accords internationaux sur la constitution et les lois internes. Et que les lois qui organisent la justice militaire ne peuvent sous quelque motif que ce soit être en vigueur si elles ne sont pas conformes. Ceci vaut également pour les juges qui doivent à chaque fois et à chaque cas se référer l'article 152 de la Constitution qui dispose que les Cours et tribunaux appliquent les traités et accords internationaux. Ceci implique qu'ils doivent toujours préférer toute interprétation conforme au droit international à une interprétation non-conforme. Cette approche conduit à importer les normes et les valeurs du droit international au sein même de l'interprétation des lois nationales219(*). Ainsi, les Juridictions militaires une fois saisies des faits dont les civils sont impliqués, n'ont à cette considération, qu'à se déclarer incompétentes et se dessaisir sans désemparer. C'est en agissant ainsi que le juge militaire pourra jeter le fond à une jurisprudence de base en cette matière et créant par là le Droit sans attendre l'intervention du juge de cassation ou du juge constitutionnel.

Si la justice est rendue en référence des dispositions d'une loi contraire aux instruments juridiques régionaux et internationaux, c'est une violation pure simple de la loi interne et un jugement rendu en ce sens ne peut pas être exécuté. Au contraire, il doit être cassé. Car, par le fait de ratification, un traité fait partie de notre Droit, et ses normes sont supérieures à toute disposition constitutionnelle ou légale interne.220(*) De ce fait, il n'y a donc aucune raison que les Juridictions militaires soient seules compétentes pour connaître les crimes contre l'humanité, car, ils présentent aucun lien nécessaire avec la guerre ou l'existence d'un conflit armé. Il peut donc se commettre aussi bien en temps de guerre qu'en temps de paix.221(*)

Les auteurs pour écarter la compétence des juridictions des Forces armées à l'égard des civils, s'attachent sur le caractère même du droit pénal militaire qui du reste n'a été conçu que pour le renforcement de la discipline au sein de l'armée. En effet, le fondement du droit pénal militaire et de la justice militaire réside donc dans la nécessité du maintien d'une façon permanente et sans relâche, d'une discipline particulière aux forces armées et de la mise en oeuvre des moyens propres à assurer la sécurité de l'État et l'unité de la nation. Très souvent la justice militaire intervient contre les individus qui menacent l'existence de l'État.222(*)

C'est ainsi qu'un lieutenant-colonel des FARDC, magistrat de son état, analysant le Code pénal militaire, a relevé ou souligné que cette loi exprime la préoccupation du législateur de doter le pays d'une armée puissante, disciplinée et toujours prête à répondre à toute éventualité.223(*)

Critiquant le fait que les civils sont justiciables des juridictions militaires même s'ils ont déjà quitté l'armée, TONA MBENZA Alphonse a estimé que : « un réserviste démobilisé ayant repris la vie civile, n'est plus soumise aux ordres des chefs militaires et lois militaires. Cette compétence poursuit-il, ne concerne que des personnes ayant appartenu ou appartenant à l'armée ainsi que celles qui n'ont pas la qualité de militaire pour les infractions qui sont de nature à troubler la discipline militaire. Il y a lieu conclut-il enfin, de revoir le présent code de justice militaire au point de vue de sa pénalité qu'il faut du moins tenir de rigueur que pendant les circonstances exceptionnelles qu'au lieu d'appliquer cette même pénalité pendant les circonstances normales. »224(*)

Branche spéciale du droit criminel, le droit pénal militaire, renfermant en son sein les règles procédurales, judiciaires et celles relatives aux incriminations, a pour objet de prévenir par intimidation et au besoin de réprimer par l'application de différentes sanctions (peines et mesures de sûreté), les actions ou les inactions susceptibles de troubler l'ordre public militaire au sein de l'armée.225(*) Il importe à cet effet de souligner que toutes les infractions qui précipitent les civils devant le juge militaire, ne sont pas toute de nature à troubler l'ordre public militaire, ni de nature à compromettre la discipline au sein de l'Armée.

On comprend dès lors que les règles relatives à l'action, aux institutions, aux compétences et aux actes visés sont essentiellement pénales et doivent rentrer dans le cadre de cette définition. Car au demeurant, l'action répressive des juridictions militaires concerne « naturellement » les justiciables militaires, et en droit congolais « les personnes assimilées au statut de militaire », en l'espèce les membres de la Police nationale.226(*)

Par ailleurs, la doctrine n'est toujours pas d'accord avec la compétence des juridictions militaires à l'égard des policiers bien qu'assimilés aux militaires par certaines missions qu'ils sont appelés à remplir et par les instruments utilisés comme les armes. C'est ce qui est soulevé dans le rapport précité : « les juridictions militaires peuvent juger des personnes assimilées au statut de militaire, pour des infractions strictement liées à l'exercice de leur fonction assimilée. »227(*) La réforme de la justice militaire en cours offre une opportunité pour mettre la législation pénale militaire en harmonie avec la constitution et les normes internationales qui interdisent la compétence des juridictions militaires à l'égard des civils. Elle est également une opportunité d'engager un débat sérieux sur la nécessité d'assimiler les policiers aux militaires pour justifier la compétence de tribunaux militaires à leur égard.228(*)

Alors si on refuse aux juridictions militaires de juger les policiers pour les infractions qui ne sont pas liées à l'exercice de leur fonction au sein de la police, c'est-à-dire les infractions ordinaires, à combien plus forte raison le problème peut être soutenu pour les civils?

A ce stade, il paraît nécessaire de consulter la jurisprudence tant des cours et tribunaux que des organes internationaux en la matière.

B. Jurisprudence.

Il s'agit ici de la jurisprudence qui touche positivement ou négativement la compétence des juridictions militaires face aux civils. Elle est constituée des décisions des cours et tribunaux et des directives des organes oeuvrant sur la scène.

Concernant la constitutionalité de la loi judiciaire militaire congolaise à l'égard des civils, les juridictions militaires s'appuient sur une jurisprudence de la cour suprême de Justice libellée comme suit : « l'appréciation de la constitutionnalité d'un texte législatif doit être faite par référence à la constitution en vigueur au moment où ce texte a été écrit; ne peut dès lors être prise en considération une exception d'inconstitutionnalité reposant sur un texte de loi qui serait contraire à une disposition de la constitution actuelle en vigueur, alors que ledit texte de la loi avait été pris sous l'empire d'une constitution antérieure abrogée »229(*)

Malheureusement, cette décision de la Cour Suprême de Justice, n'est pas à soutenir d'autant plus qu'elle ouvre une porte à la violation de l'actuelle Constitution et des instruments juridiques que cette constitution reconnait l'autorité et la suprématie. D'ailleurs, si on doit remonter jusqu'à la constitution qui était en vigueur lors de l'adoption des codes judiciaire et pénal militaires de 2002, l'on s'accordera tout de même sur le fait que si cette constitution était favorable aux principes contenus dans ce deux lois, il n'en est pas le cas quant aux instruments juridiques internationaux qui étaient déjà ratifiés par la République à l'époque et qui continuent à être vigueur.

Donc, à la lumière de cette jurisprudence de la Cour Suprême de Justice qui s'était contredite, la constitutionnalité d'un texte législatif devra normalement être appréciée en référence aux instruments juridiques internationaux ratifiés dont cette constitution à laquelle ledit texte doit en être conforme reconnaît la suprématie.

En outre, on se permet d'admettre que toutes les constitutions de la République démocratique du Congo depuis l'indépendance (sauf une petite nuance à l'article 25 de la loi fondamentale sur les modalités d'intégration) jusqu'à ce jour, placent cet état dans la tradition moniste et reconnaissent aux traités internationaux dûment ratifiés un rang supérieur aux lois nationales.230(*)

A ce point de vue, les traités internationaux ratifiés faisant partie de notre droit interne avec suprématie sur la constitution à laquelle toutes les lois doivent être conformes, il convient à ce que la constitutionalité d'un texte législatif soit regardée en rapport avec le contenu des instruments internationaux supérieurs à la constitution par la constitution elle-même. Ainsi, cette hypothèse ne saurait être évacuée.

D'ailleurs, l'article 27 de la Convention de Vienne sur le droit des traités oblige l'Etat à appliquer le traité même si ce dernier contient des dispositions contraires au droit interne. En droit international, il a toujours été admis qu'un Etat qui a valablement contracté des obligations internationales est tenu d'apporter à sa législation les modifications nécessaires pour assurer l'exécution des engagements pris.231(*)

Ainsi, il incombe à chaque organe de l'Etat de prendre des mesures idoines pour procéder à l'application du traité. Le pouvoir exécutif procédera ainsi à la promulgation et à la publication, tandis que le pouvoir législatif s'adonnera à élaborer la législation nécessaire à l'exécution du traité de même que les juridictions l'appliqueront dans leur mission de dire le droit. Trois problèmes juridiques majeurs se posent à ce niveau : l'introduction des traités dans notre ordre juridique, le conflit éventuel entre le traité et la loi et enfin, la compétence du juge devant le traité. Ce trousseau des clés est digne d'ouvrir une grille de lecture intellectuelle essentielle pour l'intelligence de la notion de pyramide normative et de la place de certaines normes dans le contentieux constitutionnel232(*).

Dans le même ordre d'idée, le Professeur ESAMBO KANGASHE Jean-Louis opine que dans l'organisation de l'état et du pouvoir ou plus exactement, dans l'aménagement du pouvoir étatique, la Constitution représente tout aussi le fondement en même temps qu'elle en constitue le système. Or, poursuit-il, pour déterminer le contenu de ce système, il faut retracer l'histoire et la hiérarchie, les normes inférieures doivent obligatoirement être conformes aux normes supérieures desquelles elles tirent leur validité.233(*)

Pour ce faire, un civil qui se trouve devant une juridiction militaire, peut pendant la procédure en cours, saisir le juge constitutionnel pour soit demander directement au juge l'annulation de la loi (judiciaire ou pénale militaires) ou de la censurer et tous les citoyens vont en bénéficier. Soit soulever une exception au cours du procès demandant au juge militaire de se dessaisir et de ne pas lui faire appliquer les lois militaires, l'estimant contraire à constitution : on parle alors de l'exception d'inconstitutionnalité.234(*)

Il est cependant malheureux de constater que le Code judiciaire et le Code pénal militaires de 2002 ne répondent pas à ces règles de jeu, et que le juge militaire s'est toujours fondé abusivement sur cette jurisprudence de la Cour Suprême de Justice en violation des droits garantis aux individus sur la question d'inconstitutionnalité et de non-conformité de ces deux lois lorsque les parties en soulèvent les exceptions.

C'est ce qu'on peut remarquer dans les affaires Kutino Fernando, Nlandu, Maheshe et Ngyke pour ne citer que celles-là. En effet, parmi les six moyens d'annulation de l'arrêt en appel rendu par la Cour militaire de Kinshasa-Gombe le 02 octobre 2008 soulevés par Kutino Fernando et consorts dont le troisième parlait de l'incompétence des juridictions militaires pour juger les civils, moyen relatif à la violation de la compétence d'attribution du juge de droit commun, la Haute Cour a dit avoir déjà rendu un arrêt à ce sujet. Les civils sont jugés du fait qu'il y a eu des fusils de guerre dans cette opération.235(*) Dans les affaires Nlandu et Maheshe par exemple, le Tribunal militaire de la garnison de Kinshasa-Gombe et le Tribunal militaire de garnison de Bukavu, respectivement, ont directement répondu aux objections d'inconstitutionnalité soulevées par les civils, au lieu de « surseoir » et déférer les objections devant la Cour Suprême de justice comme l'exige la Constitution. Les deux tribunaux ont estimé que la loi mise en cause (le Code judiciaire militaire) étant antérieure à la Constitution n'a pas pu violer cette dernière. Ils ont ajouté que la Constitution elle-même établit une exception à la règle générale de compétence personnelle en prévoyant qu'une loi devra fixer les règles de compétence, d'organisation et de fonctionnement des juridictions.236(*) Or l'exception à la règle générale de compétence prévue à l'article 156 de la Constitution dont le juge militaire se réfère pour motiver sa décision, ne concerne en clair que les circonstances exceptionnelles : la guerre, l'état de siège ou d'urgence et les insurrections.

Quant à l'affaire Ngyke, par exemple, c'est la constitutionnalité de la peine de mort prévue par le Code pénal militaire qui a été contesté devant la Cour militaire de Matete à Kinshasa. Ici encore, la Cour a préféré répondre elle-même directement au fond de l'exception au lieu de la déférer à la Cour Suprême de Justice.237(*)

Pourtant la constitutionnalité concerne aussi la conformité aux traités et accords internationaux ratifiés dont la Constitution elle-même s'en réfère tant dans le préambule que dans les articles. Donc si une loi n'est pas conforme à ces instruments, elle tombe dans l'inconstitutionnalité et à ce sujet l'on sait qu'aucun traité ratifié ou dont la RDC est signataire ne prévoit la peine de mort comme sanction contre un crime, ni le Statut de Rome qui est essentiellement pénal.

Comme on le voit, les juridictions militaires dans ces affaires, ont violé les droits garantis aux civils de faire une demande d'inconstitutionnalité (article 162 de la Constitution) devant la cour constitutionnelle (compétence exercée momentanément par la Cour Suprême de Justice).

Dans les affaires Nlandu et Maheshe cités, les Tribunaux militaires des Garnisons de Kinshasa-Gombe et Bukavu ont nié la violation de la Constitution par les dispositions du Code judiciaire militaire au motif qu'il lui est antérieure et ils vont encore recourir à la même constitution en vigueur dans l'hypothèse d'une loi qui devra fixer les règles de compétences, d'organisation et fonctionnement des juridictions militaires. Mais il s'agit là d'une loi nouvelle ou de celle antérieure existante?

A cette préoccupation, il sied de rappeler que la loi prévue à l'alinéa 3 de l'article 156 de la Constitution devant fixer les règles de compétence, d'organisation et de fonctionnement des juridictions militaires, n'est nullement le Code judiciaire militaire de 2002, car depuis l'Accord global et inclusif il a toujours été question de reformer la Justice militaire rendue sous l'empire cette loi. Et que la Constitution de 2006 qui a parachevé les options pris à Sun City ne peut retenir ladite loi critiquée. On se trouve dès lors dans un cas d'une mauvaise interprétation de l'article 156 de la Constitution par le juge militaire, car cet article est clair et que la loi dont allusion doit fixer ces règles de compétence, d'organisation et de fonctionnement sur base de jalon jetée par l'alinéa 1er dudit article: « les juridictions militaires connaissent les infractions commises par les membres des Forces armées et de la Police. »

Par ailleurs, on ne peut interpréter une disposition que lorsque la signification est cachée, en raison des caractères des certains énoncés vagues et ambigus, qu'il faudrait interpréter; l'interprétation n'est donc pas nécessaire lorsque l'énoncé est clair (in claris cessat interpretatio).238(*)

C'est le cas de cet article 156 qu'il n'appartient pas au juge militaire de l'interpréter comme il le fait même s'il n'était pas clair, d'autant plus que c'est au pouvoir législatif de le faire par ce que ce lui qui en connaît la signification et il a le pouvoir de déterminer la signification de l'acte qui lui permet de refaire, de sorte qu'autoriser un autre que le législateur d'interpréter la loi reviendrait à cette hypothèse à lui transférer le pouvoir législatif.239(*)

Donc, l'interprétation du juge militaire concernant l'article 156 n'a pas son sens du fait qu'on s'accorde à dire que c'est la Constitution de 2006 qui face à la compétence des juridictions militaires à l'égards des civils a opéré à cet égard la rupture la plus nette avec le passé, en dehors de la faculté qu'elle reconnaît au Président de la République de substituer les Juridictions militaires à celles de Droit commun en période de guerre et sous certaines conditions, la Constitution limite clairement la compétence personnelles des tribunaux militaires aux seuls membres des Forces armées et de la police.240(*)

De ce fait, il n'y a point de doute que le constituant congolais soustrait les personnes civiles de la compétence des juridictions militaires241(*) et que le juge militaire est appelé à s'y conformer en évitant de ne faire allusion à la Constitution ou aux instruments juridiques internationaux que lorsque ces textes sont favorables à sa décision visant l'extension de sa compétence.

Le Tribunal militaire de Garnison de Mbandaka dans son jugement avant dire droit prononcé sous le RP no 086/05 du 12 janvier 2006 a reconnu par un argumentaire l'exaltation de l'autorité constitutionnelle et de la primauté du traité international, en l'espèce le Statut de Rome de la CPI, sur les lois internes aussitôt après sa ratification grâce au décret-loi no 0013/2002 du 30 mars 2002.242(*)Si le juge militaire avait pour qualifier les faits, reconnu la primauté du traité international, il devait aussi pour la bonne administration de la justice reconnaître la primauté du traité international sur l'attribution de sa compétence et à l'application des lois internes relatives à la peine de mort.

De ce fait, le Comité des droits de l'Homme des Nations Unies a considéré que certaines règles de protection des droits humains ont rang des normes impératives. Il en est ainsi de l'interdiction du génocide, de l'esclavage, de la torture et de la privation arbitraire de la vie. Des telles règles ne sauraient faire l'objet des réserves de la part des États, car ces dernières seraient incompatibles avec l'objet et le but du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.243(*)

C'est ainsi que dans l'affaire Michael DOMINGUES contre les États-Unis, la Commission interaméricaine des droits de l'Homme a, dans sa décision du 22 octobre 2002, proclamé l'existence d'une norme impérative qui interdit l'exécution de toute personne âgée de moins de dix-huit ans au moment des faits pour lesquels il a été poursuivi, jugé et condamné.244(*)

Pour sa part, la Commission Africaine des droits de l'Homme et des peuples comme il a été dit supra, consacre très clairement dans ses Directives le droit des civils à ne pas être jugés par un tribunal militaire au §L. Elle énonce que « les tribunaux militaires ne peuvent en aucune circonstance juger les civils », précisant que ceux-ci ont «  pour seul objet de connaître des infractions d'une nature purement militaire commise par le personnel militaire. »245(*)

En effet la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples a à la fois développé une jurisprudence et élaboré des principes à travers lesquels elle a dégagé les règles de base applicables à ces juridictions. Cet effort de la Commission est conforme à son mandat, en vertu de la Charte, de « formuler et élaborer, en vue de servir de base à l'adoption de textes législatifs par les Gouvernements africains, des principes et règles qui permettent de résoudre les problèmes juridiques relatifs à la jouissance des droits de l'homme et des peuples et des libertés fondamentales. » En vertu de ce mandat, la Commission a adopté en 1992 une résolution sur le Droit à un procès équitable et à l'assistance judiciaire, par laquelle elle a décidé de l'élaboration des Directives et principes généraux sur le droit à un procès équitable et à l'assistance judiciaire dans le cadre de la Charte africaine. Les Directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l'assistance judiciaire en Afrique ont ensuite été adoptés, d'après leur préambule, « en vue de leur incorporation dans la législation nationale des états parties à la Charte et de leur respect par ces derniers. »246(*)

Dans leur partie la plus pertinente, les Directives énoncent ainsi les principes fondamentaux devant régir l'étendue de la compétence personnelle et matérielle des tribunaux militaires, ainsi que les procédures à suivre devant ces tribunaux247(*) : notamment le droit des civils à ne pas être jugés par un tribunal militaire en ce sens que les tribunaux militaires ont pour seul objet de connaître des infractions d'une nature purement militaire commises par le personnel militaire.

De toutes ces considérations jurisprudentielles, il importe de relever que l'action répressive des juridictions militaires dans le contexte juridique actuel, est dépourvue de tout fondement utile. Droit particulier, il faut que le droit pénal militaire rentre dans les casernes pour ne s'occuper que de ce qui le regarde, d'autant plus que voulant s'occuper de ce qui ne le regarde pas, il le fait mal. Le droit pénal militaire doit s'occuper des infractions d'ordre militaire ou en rapport avec l'ordre militaire, et des infractions commises par les militaires.248(*)

A ce mot, il apparait cependant impérieux de voir comment d'autres Nations organisent l'action répressive des juridictions militaires.

Section 2ème : En Droit comparé.

La justice pénale est une création humaine. En tant que telle, elle ne peut atteindre la perfection la plus pure, cependant tous les efforts doivent tendre à l'amélioration le plus possible, à réduire le plus possible les défaillances.249(*)

C'est ainsi que la République démocratique du Congo est appelé à s'inspirer du modèle des autres législations en la matière pour essayer de revoir à tout prix son système actuel, car, quel serait le rendement d'une justice abrutissante des animateurs qui en période d'exception, c'est-à-dire de fragilité de l'autorité de l'État et d'hyper vulnérabilité des justiciables, voit sa compétence étendue jusqu'aux personnes civiles même pour des faits graves et complexes? Qui a dit que le bon exemple ne peut pas provenir de la R.D. Congo?250(*)

C'est à ce juste titre que cette section envisage la technique comparative qui favorise l'interaction des droits, car elle permet au juriste d'élargir son champ de vision, d'étudier, de comprendre et d'expliquer les différences entre les droits en procédant à des classifications, tout en l'invitant à approfondir la connaissance des fondements de son propre système juridique et, à partir de là, à opérer des rapprochements. Par sa contribution au mouvement d'influence et d'expériences croisées, c'est un puissant stimulateur de la circulation des modèles.251(*)

§1er : Textes de lois.

Il sera question à ce point de confronter les dispositions légales en matière judiciaire militaire de l'Allemagne, de l'Espagne, de l'Italie, du Royaume-Uni, de la Suisse et de la Centrafrique.

D'entrée de jeu, l'article 96 de la loi fondamentale allemande prévoit que des tribunaux pénaux militaires pour les forces armées puissent être institués en tant de guerre. Ces tribunaux spéciaux relèvent du Ministère de la Justice, et leurs juges titulaires doivent satisfaire aux conditions requises pour l'exercice de fonction de juge. De plus la loi fondamentale précise que la Cour Fédérale de Justice fait fonction de Cour suprême pour ces tribunaux. En temps de paix, les auteurs d'infractions pénales militaires sont jugés par les juridictions pénales de droit commun (il s'agit des infractions pénales militaires décrites par la loi pénale militaire du 24 mai 1974, modifiée par la loi du 26 janvier 1998).252(*)

En revanche, l'article 117-5 de la Constitution espagnole précise que la loi réglementera la juridiction militaire dans le domaine strictement limité à l'armée et dans le cas d'un état de siège conformément aux principes de la Constitution. Les juridictions militaires espagnoles sont les mêmes en temps de paix et en temps de guerre, mais leurs compétences diffèrent selon les circonstances. En temps de paix la justice militaire est essentiellement compétente pour juger des infractions du Code pénal militaire. En temps de paix, si des troupes espagnoles stationnement à l'étranger, la compétence de la Justice militaire est élargie aux infractions, déterminées par les accords passés avec les pays en question.253(*)

Comme on le voit, en Allemagne et en Espagne, bien qu'il y a de différence entre ces deux systèmes, mais les compétences des juridictions militaires sont limitées, selon l'objet même du droit pénal militaire né du souci du renforcement de la discipline au sein de l'Armée. Il n'y a pas extension comme en République démocratique du Congo qui soustrait les civils de la compétence de leur juge que la loi leur a assigné.

Par ailleurs, en Italie, l'article 103 de la Constitution prévoit que les tribunaux militaires, en temps de guerre, exercent la compétence fixée par la loi, en temps de paix, celle-ci se limite aux délits militaires commis par les membres des Forces armées.254(*)

Pour le Royaume-Uni par contre, chacune des trois armées applique son propre code militaire (Army, naval discipline, Air force). Le système de la justice militaire vient d'être renforcé avec l'entrée en vigueur le 2 octobre 2000 de l'Armed Forces Discipline Act 2000. Ce texte a pour objet de veiller à ce que la justice militaire respecte les droits de l'homme définis par la Convention européenne des droits de l'Homme.255(*)

En Suisse cependant, il y a eu une initiative de suppression de la Justice militaire en mai 1916. Elle avait en effet proposé d'ajouter un article 58 bis à la Constitution fédérale qui supprime la Justice militaire au sein de l'Armée suisse, laissant le soin à la Justice civile de traiter les délits liés au Code pénal militaire. Selon cette proposition, le jugement rendu pourrait être déféré au Tribunal fédéral par un pourvoir en cassation. Cette initiative a été prise dans ce contexte que le Code pénal militaire suisse de 1851 était jugé sévère et les peines prévues étaient disproportionnelles aux délits. Malheureusement l'initiative fut malgré les 50.000 signatures récoltées le 1er février 1916, rejetée le 30 janvier 1921.256(*)

Mais, comme c'est l'aspiration du peuple, la même question refait surface en 1990, lorsqu'un groupe de travail du Parlement sur la réforme de l'Armée suisse recommande de remplacer les tribunaux cantonaux civils ; et en 2009 une motion fut déposée au Conseil national par Hans WIDMER sur l'abolition de la Justice militaire. Dans tous les cas, ces propositions n'ont pas passé rampe des commissions où elles ont été refusées.257(*)

Toutefois, actuellement les Juridictions militaires suisses en principe, ne connaissent que des seules infractions militaires commises par les militaires en service. Toutefois en temps de guerre, leur compétence est élargie.258(*)

L'on peut observer dans ces pays que, soit la Justice militaire est temporaire, soit qu'elle s'intègre dans la Justice ordinaire, soit qu'elle ne s'exerce qu'en temps de paix et plus particulière elle ne concerne que les militaires pour des infractions susceptibles de troubler l'ordre public militaire. Les infractions de Droit commun relevant ainsi de la compétence du juge ordinaire.

§2ème : État de la question.

En France, la loi 82-261 du 21 juillet 1982 relative à l'instruction et du jugement des infractions en matière militaire et de sûreté de l'État et modifiant les codes de procédure pénale et de justice militaire a supprimé, en temps de paix, les tribunaux permanents des forces armées ainsi que le Haut tribunal permanent des Forces armées. Depuis l'entrée en vigueur de cette loi, les infractions au code de justice militaire ainsi que les crimes et délits de droit commun commis par les militaires dans l'exécution du service ne relèvent donc plus de la compétence des juridictions militaires, mais de celle des juridictions de droit commun.259(*)

L'on constate alors que le système judiciaire français s'oppose à celui du Congo qui non seulement qu'il maintien ces juridictions en temps de paix tout comme en temps de guerre, mais aussi les civils y sont jugés avec tous les risques et violations flagrantes de la Constitution et des instruments juridiques supérieurs à celle-ci selon la hiérarchie des normes.

L'Allemagne a comme la France supprimé les juridictions militaires en temps de paix et les auteurs des infractions pénales militaires sont jugés, en temps de paix par les juridictions pénales de droit commun. Toutefois, la loi fondamentale prévoit l'institution des tribunaux pénaux militaires en temps de guerre. Elle précise que les juges qui y siègent doivent satisfaire aux conditions requises pour l'exercice des fonctions de juges, et que la Cour Fédérale de Justice fait fonction de Cour militaire suprême.260(*)

Il s'agit là non seulement de la suppression de cette justice des bavures en temps de paix, mais que le système ne connaît pas les juges assesseurs non juristes comme le cas de la République démocratique du Congo, même si cette justice est prévue pendant la guerre. En outre la juridiction de cassation et même d'appel à certain degré demeure une juridiction de droit commun.

Les justices militaires anglaise, espagnole et italienne précise ce document de travail du Sénat français, sont plus ou moins intégrées à la Justice ordinaire, mais ne fonctionnent pas nécessairement selon les mêmes principes que la suisse. Au Royaume-Uni, la Justice militaire est, à partir du deuxième degré, rendue par des magistrats professionnels issus des Juridictions ordinaires. En Italie, il n'existe pas de code de procédure pénale militaire, c'est le Code de procédure pénale qui s'applique. En particulier, toutes les procédures simplifiées de la procédure pénale ordinaire s'appliquent devant les juridictions militaires.261(*)

Il est à noter enfin que malgré leur diversité, les différents systèmes étudiés se caractérisent à la fois par leur intégration croissante à la Justice pénale ordinaire et par leur fonctionnement de plus en plus proche de celui de la Justice pénale ordinaire, ainsi que par la professionnalisation de leurs acteurs.

C'est par exemple le cas du Conseil de guerre d'appel anglais qui présente très grandes similitudes la chambre criminelle de la Cour d'appel ordinaire et n'est composé que de magistrats professionnels très expérimentés. Ils sont en nombre impair et sont au moins trois. C'est le Président de la chambre criminelle de la Cour d'appel, en accord avec le Ministre de la Justice, qui les choisit. Le Président de la Cour d'appel peut en faire partie. En principe, cette juridiction siège à Londres, mais le Président de la Cour d'appel peut choisir un autre lieu262(*).

L'on comprend dès lors que les arguments poussés en République démocratique du Congo pour justifier que le recours aux assesseurs, est motivé en raison de l'expertise et de la maitrise de l'art militaire. A ce que l'on dit, le juge civil ne saura pas établir la culpabilité de l'auteur d'une infraction commise au moyen d'armes de guerre et qu'il lui faut l'assistance de quelqu'un qui saura dire comment l'arme a été manié ces assesseurs ou pas. Et l'on voit ces assesseurs en grand nombre même dans les juridictions de haut rang comme les Cours militaires et la Haute Cour militaire siégeant même au degré d'appel. Pourquoi ne pas suivre l'exemple anglais?

En Centrafrique, lors d'un atelier de validation du Code justice militaire le 11 juillet 2007, Madame Laura LINARES qui représentait le général Lamine CISSE, Représentant du Secrétaire général de l'ONU, a souligné que le projet de Code de justice militaire, qui prend en compte l'ensemble des infractions militaires, permet d'affermir la discipline au sein de l'armée quasiment désorganisée où les désertions, les infractions contre l'honneur ou le devoir et le non-respect de la discipline sont fréquents. Il faut noter que le projet du Code de justice militaire prend en compte certaines dispositions des conventions internationales protégeant les droits de l'Homme et le droit international humanitaire.263(*)

La justice militaire, sauf peut-être pour le cas de la République démocratique du Congo, elle n'a jamais été conçue pour réprimer les civils qui du reste ne sont nullement responsables de l'indiscipline au sein de l'Armée. Il est temps pour que dans ce pays, il soit fait application du principe de limitation des compétences des Juridictions des Forces armées comme en a décidé le constituant en 2006 en application des Directives de la Commission africaine de droits de l'Homme datant de 1992.

Si l'incompétence des Juridictions militaires congolaises a été démontrée en référence aux sources normatives, il en va tout de même pour l'intérêt de la protection des droits de l'Homme suite à un vide juridique en la matière, vide occasionné par le fait que, depuis l'avènement de la Troisième République congolaise instituée par la Constitution de 2006, la loi organique qui devait présider à l'action répressive des Juridictions militaires n'a pas encore été adoptée, et que celle qui existe ne peut pas dans la logique du Droit produire des effets légaux.

C'est ce que se propose d'aborder le chapitre deux de la partie et dernier de la présente étude.

Chapitre 2ème : Incompétence tirée de la nécessité de la sauvegarde des Droits de l'Homme.

Le concept ``droits de l'homme'' est difficile à définir de manière précise et exacte tant son contenu semble être imprécis. Et pourtant, au regard de l'usage, très courant de ce concept, on est parfois amené à banaliser cette notion comme si elle appartenait déjà à l'évidence; alors qu'en réalité, ce concept n'est pas aussi saisissable qu'il ne l'apparait et cette difficulté est d'autant plus accentué qu'il y a une multitude de droits de l'homme et une tendance à étendre de plus en plus le domaine d'application.264(*)

C'est ainsi que dans ce chapitre, il sera question du droit à la vie, à l'intégrité physique, du droit à un procès équitable, du droit reconnu à toute personne poursuivie à ce que sa cause soit entendue par un juge impartial et dans un délai raisonnable, du droit à la réparation pour le préjudice subi, droit de saisir le juge constitutionnel pour soulever l'exception de l'inconstitutionnalité d'une loi dont on craint l'application (...).

Lorsqu'une juridiction militaire siège, c'est pour juger un homme, lequel, a une histoire, une famille, une identité, une culture et une vie. C'est ainsi que la sensibilité et la délicatesse du procès pénal surtout dans cette justice, ne concerne pas que le prévenu, mais aussi sa communauté ou sa famille à tel enseigne que si lui-même risque ce qu'il a de plus précieux : la vie ou la liberté, la communauté auquel il appartient risque d'être privé d'un membre ou d'une ressource des moyens de subsistance.

On se trouve alors dans un cas délicat concernant les droits qui méritent d'être protégés tant chez le prévenu que chez la victime car le plus souvent l'infraction se commet, contre un individu et la répression constitue pour lui un moyen de réparation du préjudice qu'il a subi du fait d'une infraction.

Cette protection des droits de l'Homme au cours du procès pénal, ne peut être possible que si la juridiction pénale offre toutes les garanties possibles d'une justice ou d'un procès équitable. C'est à juste titre que Jean PRADEL a fait observer ceci : « alors que le juge civil ne doit considérer que la qualité juridique des parties et l'analyse objective de leurs protections, le juge pénal doit en outre tenir compte de leur condition subjective propre à la fois pour établir un degré de responsabilité et pour déterminer les moyens les plus aptes à assurer leur réinsertion sociale. »265(*)

Comme on le voit, cela ne peut être possible que si celui qui est appelé à siéger pour juger une personne humaine, est préparé et initié pour prendre en compte cet aspect du droit pénal.

Mais qu'en est-il du contexte congolais dans la composition des juridictions militaires et au niveau des droits mis en jeu?

Section 1ère : Problématique de la composition du siège des Juridictions militaires.

Le Professeur MATADI NENGA GAMANDA note que le procès pénal est par excellence, l'instance qui doit au maximum faire appel à toutes les garanties judiciaires qui constituent le droit à un procès équitable que recommande la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme et que prescrit, pour nous qui l'avons régulièrement ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politique en son article 14.266(*)

Or comme on le sait déjà, les garanties à un procès équitable ne voulaient pas seulement dire que le droit de la défense soit respecté, mais aussi la composition d'une juridiction de jugement concerne les acteurs qui seront à mesure de prendre l'enjeu et de prendre en compte par leur connaissance et maîtrise, les moyens de défense qui seront exposés. Sinon l'écart de connaissance et de langage entre les membres de la juridiction et les avocats, ne saurait garantir ni un procès équitable ni une bonne administration de la Justice.

Au niveau des juridictions militaires congolaises cependant, l'insuffisance des magistrats de carrière juristes de formation et la présence imminente des juges assesseurs, non-juristes, appelle à des hypothèses et observations.

§1er : Insuffisance des Magistrats de carrière dans les Juridictions Militaires.

Une société bien ordonnée écrit le Professeur NGOMA BINDA, est celle dans laquelle les règles d'établissement et de fonctionnement des rapports entre les personnes physiques et morales, sont correctement fixés et rigoureusement respectées par toutes les personnes concernées. Elle est une société ajoute-t-il, où règne l'ordre du fait d'un ensemble de lois et règles de vie publique justes, rationnelles et raisonnables reconnues nécessaires pour que prenne racine toute forme de vie en commun.267(*)

C'est ce qui n'est pas observé dans les rapports entre les juridictions militaires et les justiciables car, son organisation même n'est pas assise sur des règles justes, rationnelles et raisonnables reconnues nécessaires. L'État n'a juste intérêt qu'une juridiction militaire siège et rende un verdict de vengeance, il ne s'occupe pas de ce qui est admis dans toutes les sociétés modernes que seuls les juristes sont dignes et mieux placés pour composer une juridiction militaire pénale. L'organisateur des juridictions militaires congolaises ne se rend pas compte de la réalité et cette justice est rendue par un siège composé en majorité écrasante des non juristes recrutés parmi les officiers policiers et militaires pourvu que le coupable soit châtié.

A. Composition du siège dans les Juridictions Militaires.

Pour juger le présumé auteur d'une infraction en instruction à l'Auditorat militaire et déféré devant la juridiction militaire correspondant au rang de la personne poursuivie, celle-ci n'a besoin que d'un ou deux magistrats de carrière pour siéger valablement.

C'est ainsi que le tribunal militaire de police qui est une juridiction inférieure siège avec trois membres dont un seul magistrat de carrière268(*) qui est un juriste. Le tribunal militaire de garnison qui est à peu près l'équivalent du tribunal de grande instance, siège avec cinq membres dont au moins un magistrat de carrière269(*), or dans la pratique et le plus souvent il ne siège qu'avec ce seul magistrat de carrière président et c'est ce tribunal qui connaît beaucoup d'affaires dont les civils sont impliqués au premier degré, les autres membres de la composition quatre au total ne sont que des militaires choisis parmi les Officiers de l'Armée et de la Police.

Quant à la cour militaire qui connaît même de l'appel des jugements rendus au premier degré par les tribunaux militaires de garnison, elle n'a besoin que de deux magistrats de carrière,270(*) pour siéger, les autres membres ne sont que des policiers ou des militaires trois au total choisis dans le milieu des officiers. Cette dernière considération vaut également pour la cour militaire opérationnelle qui accompagne les fractions de l'armée en campagne et peut siéger avec un magistrat de carrière271(*) par les cinq membres.

Alarmant aussi regrettable, la Haute Cour Militaire qui est la plus haute juridiction de cette catégorie, n'a besoin pour sa part que de deux magistrats de carrière272(*) pour siéger valablement au premier degré et trois au degré d'appel parmi les cinq membres; heureusement que la loi organique no 13/011-B du 11 avril 2013 précitée a transféré à la Cour de cassation les compétences relatives à la cassation et à l'annulation qui lui étaient dévolues.

Cette situation est sans doute due à l'insuffisance des magistrats de carrière justifiant d'une formation en Droit avec le titre de licencié au moins et nommés à ces fonctions, selon la procédure de nomination de tous les magistrats. Car, la lecture des dispositions de la loi judiciaire militaire de 2002, laisse entendre que les juridictions peuvent siéger à plus de deux magistrats de carrière lorsqu'on considère le vocable `' au moins'' utilisé par le législateur. Or dans la pratique, on a toujours constaté malheureusement la présence d'un seul magistrat dans les juridictions inférieures et de deux dans les juridictions supérieures.

On ne le dira jamais assez, l'insuffisance des magistrats de carrière dans les juridictions militaires ne date pas d'aujourd'hui et l'État n'a jamais su prévoir; pourtant c'est une justice qui fonctionne dans ce pays depuis le 22 décembre 1888 date de la promulgation du décret créateur.

En effet, ces juridictions n'ont pas moins suscité des critiques virulents notamment de la part des participants à la conférence nationale souveraine (CNS) tenue entre 1991 et 1992. A l'aube de l'ouverture démocratique de la société congolaise et de la réforme de ses institutions, la Conférence a vivement stigmatisé la soumission de la Justice militaire à la double tutelle des ministres de la Justice et de la Défense, l'inféodation de la même justice au commandement militaire, la présidence du siège des juridictions militaires par les officiers militaires non revêtus de la qualité de magistrat, la dépendance du siège des juridictions militaires à l'égard du parquet (...). Parmi les recommandations de réformes décidées à la CNS, il faut mentionner l'abolition de la double tutelle de la Justice militaire à l'égard du Ministère de la Défense et celui de la Justice, l'affirmation de l'indépendance du siège à l'égard du parquet, et la présidence desdites juridictions par les officiers militaires non revêtus de la qualité de magistrat.273(*)

Il sied de rappeler malheureusement que parmi ces recommandations de la CNS et de tout ce qui a été soulevé, seules l'affirmation de l'indépendance du siège à l'égard du parquet et la présidence des juridictions militaires désormais par les officiers militaires revêtus de la qualité de magistrats sont prises en compte. Les autres problèmes n'ont pas cependant été résolus par les réformes qui s'en sont suivies.

B. Incidence de cette insuffisance sur les droits de l'Homme.

Bien que les juridictions militaires applique toute la loi pénale, mais leur champs d'application, c'est le Code pénal militaire et il est rare parfois difficile qu'une juridiction militaire prononce une condamnation sans application du code pénal militaire. Pourtant, ce code constitue sans doute une menace grave aux droits de l'Homme à cause de la sévérité des peines prévues avec cette particularité que la peine de mort peut toujours être prononcée pour toute infraction prévue dans ledit code toutes les fois qu'elle est déclarée aggravée. Plus de soixante articles de ce code prévoient cette sentence ridicule qui dans certains cas il est obligé au tribunal de la prononcer. Ainsi les civils tout comme les militaires risquent leur vie en ce sens.

Homo sum : humani nihil a me alienum puto274(*) disait ainsi le vieux romain Térence exprimant le sentiment de la solidarité humaine, c'est-à-dire je suis homme : rien de ce qui est humain ne m'est étranger. Étant congolais et que rien de ce qui est congolais ne pouvait lui échapper et s'étant rendu compte des méfaits du Code de Justice militaire, le Professeur KALOMBO MBANGA qualifia la Justice militaire de ``véritable boucherie humaine'': allusion faite à l'impressionnant cortège de dispositions légales qui prévoyaient la peine de mort, et particulièrement celles assorties de formules absolutistes, telles que la peine de mort doit être obligatoirement prononcée, ou impérativement appliquée.275(*)

De ce fait, l'application d'un tel code, avec des telles dispositions méritent un examen minutieux des dossiers avec des spécialistes de la matière, alors que l'insuffisance des magistrats militaires de carrière fait que certaines juridictions militaires surtout dans le Congo profond ne fonctionne qu'avec le seul président qui avant les audiences doit à lui seul examiner et traiter des tels dossiers. Et il arrive que faute du temps certains dossiers même sensibles passent aux débats et aux délibérés sans qu'une attention particulière leur fût accordée et ce sont les droits de l'Homme qui sont mis en jeu d'autant plus que la personne poursuivie peut toujours être privée si pas de sa liberté, de sa vie alors.

Souvent on m'a dit note le professeur MATADI NENGA GAMANDA déjà cité : `'mais quel mauvais jugement! Le magistrat a été corrompu''. Les choses analysées de près révèlent que le magistrat n'a jamais été corrompu mais qu'il est simplement ignorant d'une question de droit.276(*)

Par ailleurs, non seulement que le magistrat a été ignorant d'une question de droit, mais aussi il n'a pas eu le temps de bien examiner le dossier et qu'il n'est pas assisté par un collège qui peut apporter par son expertise ou concours des éclaircissements sur la position à prendre. L'essentiel pour ce magistrat dans ce cas de solitude et d'encombrement de dossiers, c'est de s'en débarrasser. Ce qui compromet à l'idée de garantie à un procès équitable qui est un droit de l'Homme même criminel.

C'est à ce juste titre que ce poète malgache touché par le déroulement du procès pénal en Afrique, s'est exprimé comme suit à travers ces vers : « tu parleras la langue de ton innocence pour ceux que l'on écrase de calomnie jusqu'à ce que leur peau en exsude, tu parleras de ton amour pour ce que l'on bat, pour ceux que l'on étouffe, pour ceux que l'on torture; pour les traqués, les condamnés, les déportés, pour les non jugés, les détenus, les interdits, les sans défense tu parleras. Pour ces milliers d'êtres morts parmi les morts que l'on destine à la rage et à la haine dans les ténèbres des prisons tu parleras.»277(*)

Il est un droit pour toute personne humaine à ce que la cause dont elle est directement ou indirectement impliquée à titre de prévenu ou de victime, soit jugée et traitée par une juridiction composée par des juges qui ont appris à juger et qui justifient non seulement d'une expérience mais aussi de technicité professionnelle, de moralité et d'humanisme, les membres agissant ainsi en collégialité pour le concours d'idées pouvant aboutir à une décision juste et convenable. Ce travail devant se dérouler de ce fait dans des bonnes conditions et dans un temps raisonnable.

Les juridictions pénales à juge unique ou à expert unique ne peuvent en aucun cas être tolérées, car elles ne sauraient ni respecter les règles ni offrir les garanties à un procès équitable. Les règles de procédure pénale, tout en visant à assurer la répression du coupable, doivent en même temps veiller à ce que le droit de la défense soient sauvegardés.278(*) Pourtant les droits de la défense ne doivent pas être envisagés que sur les règles de procédure, mais il faudrait les envisager même en ce qui concerne la composition du siège, car, les moyens soulevés par la défense ne peuvent se révéler utiles que si les membres du tribunal à qui ces moyens sont adressés, sont outillés pour être à mesure de les comprendre, et qu'ils disposent d'un temps pour les examiner.

Tout le problème alors, le nombre des magistrats militaires affectés dans les juridictions militaires est insignifiant et que le seul magistrat qui anime la juridiction vu son entourage ne saurait promettre à la protection des droits de l'Homme toutes les hypothèses envisagées : d'une part ceux du prévenu et d'autre part ceux de la victime.

Si l'on s'inquiète du seul magistrat de carrière dans le siège de juridictions militaires, que dire de ceux qui le complètent?

§2ème : Présence des Juges assesseurs militaires non-juristes.

Le droit est une étude compréhensive et interprétative des règles qui régissent les rapports des individus entre eux, ceux entre les individus et l'État et, ceux entre les États. De ce fait, un juriste qui, en cas des conflits, est sollicité pour jouer le rôle d'arbitre, est censé connaître parfaitement les us et coutumes, les règles et les bonnes manières qui régissent sa société. Il doit avoir une juste perception des intérêts de la société en tant que telle ainsi que ce qui conditionne l'agir des individus c'est-à-dire les valeurs et l'idéal qui animent sa société et sa destinée. Le droit intéresse au plus haut point le citoyen qui est aussi agent du progrès. Le citoyen qui connait le droit est l'arbitre des différends au sein de la société, et le développement se porte mieux dans un État de droit.279(*) Mais si le juriste congolais peut incarner ces valeurs, il se trouve cependant dans un environnement concurrentiel avec les non-juristes à qui on ne saura pas demander de faire montre desdites valeurs d'autant plus qu'il faut tout de même pour ce, une étude de longue haleine avec une conscience qui se prépare dès que le juriste à devenir s'inscrit à la Faculté de Droit.

Les juridictions militaires comme on peut le rappeler, sont essentiellement pénales, c'est-à-dire qu'elles ne connaissent que ce qui est en rapport avec la commission d'une infraction. Donc c'est au nom de l'ordre public et de la société que cette justice est rendue ou devait néanmoins être rendue. Il ne s'agit pas là d'une justice coutumière, ni d'une justice d'arbitrage, mais d'une justice à haute portée pénale.

Mais qu'est-ce qui justifie la présence dans une telle justice des juges assesseurs qui n'ont pas appris et ne maîtrisent ni les rouages, ni les enjeux moins encore les techniques et les différentes branches qui concourent au déroulement d'un procès pénal dans sa phase juridictionnelle?

En effet, le tribunal militaire de police siège avec trois membres dont deux juges assesseurs, le tribunal militaire de garnison siège avec cinq membres dont quatre juges assesseurs, le même nombre à la cour militaire opérationnelle, la cour militaire pour sa part siège avec cinq membres dont trois juges assesseurs et autant à la Haute Cour Militaire qui siègent avec trois juges assesseurs au premier degré et deux en appel parmi les cinq membres.280(*) Les raisons avancées pour justifier la composition du siège par les militaires ou policiers choisis en dehors du pouvoir judiciaires, poussent à penser à une sorte de vengeance que le commandement militaire exerce au nom du prolongement de l'action disciplinaire du Commandement sur les militaires coupables des infractions susceptibles de compromettre au respect du devoir propre aux éléments des forces.

Cette vengeance qui du temps du droit pénal classique n'était pas seulement individuelle, mais pouvait aussi être exercée par le groupe auquel appartient la victime. D'autant plus que dans le cas les plus graves ou la victime est elle-même incapable d'opérer la vengeance, soit par ce qu'elle est gravement blessée, choquée, ou carrément morte. Celui-ci peut agir sans limites, pouvant infliger une sanction sans proportion avec la faute commise. Et même du temps de l'église qui a prôné la modération, par exemple le droit d'asile, les trêves de Dieu, périodes pendant lesquelles la vengeance privée ne pouvait être exercée, certes, s'agissant du mécanisme de réaction, c'est toujours la victime ou son groupe, donc la partie lésée qui est à l'origine de la répression, et qui va l'exercer, et qui va aussi en bénéficier.281(*)

C'est à ce titre corroboré avec l'idée de prévention, avec la notion d'exemplarité du châtiment et par là même l'idée de dissuasion que pour se venger du militaire récalcitrants, le Commandement estimait que la juridiction militaire de jugement ne peut pas être composée de seuls magistrats militaires mais aussi des Officiers militaires pour rendre cette justice de discipline en exerçant de manière camouflée la vengeance envisagée.

Si pareille conception de justice militaire est dangereuse pour le temps moderne et à l'égard du justiciable militaire qui du reste est un humain, l'on s'imagine avec quel poids négatif cela pèse sur les droits de l'Homme lorsque les civils qui n'ont pas la responsabilité sur la discipline militaire sont néanmoins jugés en violation de tout principe d'équité, des dispositions constitutionnelles et des instruments juridiques internationaux dûment ratifiés.

A. Le travail des juges assesseurs militaires.

Du sommet à la base, au premier degré comme en appel, les juridictions militaires siègent avec les non-juristes appelée juges assesseurs. Ceux-ci sont choisis parmi les Officiers de l'Armée ou de la Police avec un grade égal ou supérieur au prévenu pour composer le siège à la vue de juger les personnes traduites devant elles. Mais pour les civils, cette considération de grade ne vaut pas en ce sens que les justiciables civils bénéficiaires du privilège de juridiction sont jugés par la Cour militaire ou la Haute Cour Militaire selon qu'ils relèvent de la Cour d'appel ou de la Cour de cassation.

Aux termes de l'article 32 du Code Judiciaire Militaire, le Président d'une juridiction militaire désigne, au sort et pour une session de trois mois, les juges assesseurs et leurs suppléants parmi les officiers des Forces armées et des corps assimilés (notamment la Police nationale).

Au début de la première audience à laquelle ils sont appelés à siéger, et sur réquisition du Ministère public, les membres non revêtus de la qualité de magistrat prêtent le serment suivant : « nous jurons devant Dieu et la Nation de remplir loyalement nos fonctions de président et membres de cette juridiction, d'en garder le secret des délibérations et de juger les personnes traduites devant nous sans haine, sans crainte, sans complaisance, avec la seule volonté d'exécuter la loi282(*). »

Ces juges assesseurs ne relèvent nullement du pouvoir judiciaire en ce qu'ils n'ont ni la qualité de magistrat ni d'un quelconque auxiliaire de justice. Loin d'être même expérimentés, ils sont choisis pour un temps (trois mois), ce qui écarte toute idée d'expérience ou d'expérimentation et ne viennent que dans les audiences pour composer le siège, pendant que chacun occupe une fonction dans une unité de l'Armée ou de la Police où il s'occupe des affaires du commandement militaire.

Dans ce cas, la justice au lieu d'être un instrument de la répression pour protéger et sauvegarder la jouissance aux droits garantis aux individus, elle devient un instrument de vengeance du commandement comme on l'a relayé ci-haut. A considérer le serment prévu à l'article 27 précité, même un membre non revêtu de la qualité de magistrat peut présider la juridiction, et pourtant ils ne sont désigner que pour les causes déjà nées et soumises à la Justice, et pendant la durée de trois mois comme on le voit, ils laissent certaines affaires non encore closes et les nouveaux assesseurs seront désignés pour la continuité surtout pour les affaires qui demandent de longs débats (article 36 du même code qui prévoit les assesseurs suppléants). Mais quelle justice à rendre sous cette légèreté?

Ces juges siègent depuis le déroulement du procès jusqu'à la clôture des débats et ils prennent part aux délibérés. Leurs voix comptent et ils en ont la majorité et la juridiction se prononce à la majorité des voix des membres qui ont siégés aux moins à la clôture des débats.

Dans la pratique, ils n'occupent pas des bureaux dans les sièges des juridictions pour traiter des dossiers. Leurs travaux ne sont visibles que dans les audiences et lorsque les membres du céans se retirent pour les délibérations.

B. Leur qualité et l'incidence sur les droits de l'Homme.

Les juges assesseurs des Juridictions militaires ont tous la qualité de policier ou de militaire et partant ils relèvent du commandement militaire ou policier, partant ils sont soumis à leurs chefs hiérarchiques de qui qu'ils reçoivent des ordres et des instructions. Ce qui s'écarte alors de toute idée d'une justice impartiale et équitable d'autant plus que ceux-ci agissent pour le compte du commandement et au nom de la sauvegarde de la discipline au sein de l'Armée ou de la Police.

C'est ce que prévoit du reste l'article 31 du Code Judiciaire Militaire qui fait à ce que l'observation ci-haut échappe à toute objection considérable et se veut de ce fait irréfutable. En effet, cet article dispose que le commandant militaire du siège d'une Cour ou d'un tribunal militaire peut proposer le renouvellement des membres de ces juridictions, chaque fois que cette mesure est nécessitée par les mouvements du corps de troupe de la garnison.283(*)

La présence de ces policiers et militaires dans les sièges des juridictions pénales qui, jugent même des civils, des personnes n'ayant aucunement la qualité de militaire ou celles qui l'ont déjà perdu, met en mal le fonctionnement de la justice et viole les droits fondamentaux reconnus à tout homme quel que soit son rang, sa race, sa tribu et ses opinions. Il est à remarquer de ce fait que le fonctionnement des juridictions militaires est perçu comme contraire aux instruments internationaux relatifs aux droits de l'Homme, notamment au regard du principe de célérité, des interférences du commandement, de la composition du siège militaire, de la protection des pairs (...). Néanmoins, cette célérité ne peut être bénéfique pour la collectivité nationale que lorsqu'elle procède d'une lecture judicieuse des dispositions légales facilitée par une constante contribution jurisprudentielle et doctrinale.284(*)

Pourtant si l'on doit tenir compte de la contribution doctrinale, les auteurs ne sont favorables ni sur la compétence des Juridictions militaires face aux civils ni à l'égard de la célérité qui est pratiquée d'une manière qui viole constamment les principes qui fondent la justice dans un État de droit constitutionnel.

Par ailleurs, si l'indépendance de l'appareil judiciaire militaire est consacrée constitutionnellement bon nombre d'analyses estiment qu'elle est torpillée, de manière accentuée dans la pratique par le commandement militaire. Cette critique revêt toute sa pertinence dans la mesure où les membres du siège non-juristes sont sans conteste moins outillés pour connaître de crimes internationaux dont la complexité et la gravité requièrent des connaissances approfondies en droit pénal classique et droit international humanitaire. De ce fait, l'immense et sensible tâche expertale pèse considérablement sur un ou deux juges, magistrats de carrière.285(*)

Les critiques faites par cet auteur haut magistrat militaire en fonction, méritent d'attirer l'attention et démontrent combien les droits de l'Homme notamment, le droit à un procès équitable sont mis en jeu. Il sied de rappeler à ce sujet in extenso l'article 10 précité de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1949 qui prévoit que : « toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, qui décidera, soit de ses droits et obligations, soit du bien fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. »

Mais quelle indépendance, quelle impartialité lorsqu'on sait que les juges assesseurs dépendent du commandement, ils agissent pour la discipline au nom de ce même commandement et de ce fait le tribunal ne saurait être ni indépendant ni impartial? Comment alors une cause peut être entendue équitablement lorsque l'on sait qu'au Congo les juridictions appliquent les traités, la constitution, la loi et la coutume autant pour qu'elle ne soit contraire à la loi, à l'ordre public et aux bonnes moeurs pendant que l'on sait encore que les juges assesseurs présents majoritairement dans la composition ne connaissent ni le droit des traités, ni la loi dans son ensemble envisagé moins encore pour cela le droit coutumier dans sa diversité?

Les juges assesseurs, militaires ou policiers en fonctions se retrouvant aux côtés des magistrats militaires, sont soumis à la discipline militaire applicable également aux policiers, et ils ne jouissent pas de l'indépendance nécessaire à l'exercice des fonctions judiciaires. Ils ne justifient d'aucune compétence en matière juridique. Ce qui contrevient aux obligations internationales de la République démocratique du Congo notamment la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des peuples telle qu'interprétée par la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples.286(*)

Dans un communiqué rendu public le jeudi 17 octobre 2013, le Président de l'Association congolaise pour l'accès à la justice (ACAJ) suite à la condamnation à mort de quatre étudiants par le Tribunal Militaire de Garnison de Lubumbashi, a déclaré avec force que la Justice militaire ne répond pas aux standards internationaux notamment en ce qui concerne la garantie d'un procès équitable. Plusieurs éléments laissent planer un doute quant à leur aptitude à offrir les mêmes garanties qu'une juridiction civile. La composition de ces juridictions, l'absence d'indépendance vis-à-vis de la hiérarchie et du pouvoir exécutif, l'esprit de corps de l'institution militaire les procédures d'exception qui les caractérisent, sont autant d'éléments qui permettent d'assurer aux justiciables quant à leur capacité à garantir les droits de l'Homme dans une procédure pénale moins heureuse.287(*)

La composition d'une juridiction pénale ne doit pas aux regards des questions à traiter, être motivée par les impératifs du commandement, ni par le seul souci fut-il au nom de la discipline de voir le prévenu être sanctionné. Elle doit plutôt se faire dans le seul intérêt de rendre une justice juste, impartial et équitable, ce qui requiert que les acteurs ou les animateurs de la justice militaire soient recrutés dans les milieux de ceux qui apprennent à rendre justice. C'est à ce prix que nonobstant la qualité de militaire qui leur sera conférée, la justice militaire qui est une justice pénale saura jouer son rôle de protection des droits de l'Homme, mais en ne jugeant que les militaires et pour des infractions susceptibles de troubler l'ordre public ou de compromettre à la discipline au sein de l'Armée ou de la Police nationale.

Quelles que soient les motivations, les justifications et pratiques, les juges assesseurs ne sont pas mieux placés pour juger les personnes civiles. Cela découle du fondement même de la nature de leurs fonctions justifiées par le fait qu'ils ont l'expérience dans l'art militaire et ils doivent être là pour éclairer les magistrats militaires sur les questions techniques qui leur échappent. Alors il est de notoriété que pour juger un civil qui a commis l'infraction même au moyen d'armes de guerre, il n'est pas question d'être expert militaire pour ce faire, c'est plutôt l'affaire du droit pénal et que le juge pénal civil ne manque pas de connaissance suffisante pour établir la culpabilité, surtout si l'on admet qu'à la phase pré-juridictionnelle l'on peut par une réquisition à expert recourir à la complémentarité et cet expert peut être militaire si cela se révèle nécessaire.

Comme le prévoit la Constitution de la République, la coutume peut dorénavant être évoquée par tout congolais indistinctement et devant toutes les juridictions civiles et militaires. Elle ne peut donc plus continuer à être considérée comme source d'un droit inférieur au droit écrit. Sur ce point, tout est clair et net.288(*) Cependant les prévenus des Juridictions militaires n'ont pas vraiment assez de chance pour invoquer la coutume devant ces juridictions du fait de leur composition hybride qui fait que beaucoup de questions de Droit échappent aux membres.

Dans les États qui ont supprimé les juridictions militaires en temps de paix ou ceux qui les ont intégré dans la justice ordinaire, ils ont connu certes les juges assesseurs militaires, mais vu l'évolution des facteurs d'administration de la justice, ils ont jugé bon de passer outre, notamment comme le cas de l'Angleterre qui confie cette justice aux magistrats des juridictions ordinaires.

C'est pour cette raison ultime d'ailleurs que dans la déclaration des États asiatiques des 1983 : « il est du devoir de tous les État et responsables civils de limiter strictement les activités et l'influence du personnel militaire en n'autorisant que ce qui requiert une défense efficace contre l'agression et d'interdire audit personnel d'exercer des fonctions publiques de nature civile.289(*)

Il est sans doute ici clair que ces États ne peuvent pas soumettre les civils à la compétence des juridictions militaires d'autant plus que la justice ordinaire dont relève les civils fait partie des fonctions publiques de nature purement civile.

Est-il aussi convenable à ce point de retenir que s'il a été jugé bon que le militaire soit jugé par ces pairs militaires, il n'est pourtant pas soutenable à raison d'humanisme à ce que le militaire et surtout celui qui n'a pas appris le droit de juger le civil. Car, est-il aussi louable de le dire, la psychologie d'un civil n'est pas la même que celle du militaire habitué aux rouages et à l'intimidation des hommes en armes. C'est ainsi qu'appelé à comparaître devant une juridiction militaire en face des membres de la composition vêtus en une uniforme qui en elle-même inspire la peur, un civil surtout si l'on se réfère à un habitant du village ou de la campagne, se sera trouvé dans une situation ou forme de torture morale au point de le faire passer aux aveux injustifiés loin de toute vérité, soit de lui faire perdre toute maîtrise pour sa défense personnelle.

Si hier la justice militaire était rendue par les officiers militaires, qui pouvaient présider même la juridiction sans pour autant qu'ils ne soient magistrats, aujourd'hui il faudrait à tout prix humaniser, car le monde se veut celui de compétition et de spécialisation; à ceux qui font du droit leur cheval de bataille, à eux seuls les affaires judiciaires.

Section 2ème : Les droits mis en jeu.

Les droits mis en jeu au cours d'un procès pénal, sont les Droits reconnus à tout être humain, entendus comme les droits inhérents à la vie humaine et spécialement protégés en tant que tels si bien que le législateur ne peut y porter atteinte. En d'autres termes, il s'agit des droits que chacun détient en tant qu'être humain.290(*)

Comme il a été relevé ci-haut, la juridiction pénale ne siège que pour juger une personne ou des personnes dont chacune a au moins une histoire, une culture, une identité et appartient à un groupe social ou une communauté. Et que dans bon nombre de cas, la personne est poursuivie pour des faits qui ont porté atteinte aux droits garantis directement à une personne ou à des personnes même indirectement. Il résulte de cette considération que la décision du juge pénal touchera d'une part sur les droits de la personne poursuivie et d'autre part sur les droits de la victime ou des victimes. C'est ainsi que les droits à la vie, à la liberté, au patrimoine, à un procès équitable, à la resocialisation et à la réparation du préjudice subi sont mis en jeu et mérite une attention particulière.

§1er : Au niveau du Prévenu.

Tout homme a droit à la vie et à tout ce qui est inhérente à cette vie qui est sacrée et doit à tout prix la protéger; peu importe l'état ou le rang de la personne. L'assassin, le voleur, le pilleur, l'instigateur, l'insurgé, l'incitateur, le violeur n'est pas à écarter de cet aspect de choses. C'est un être humain qui a droit à la vie et doit tout de même en jouir malgré ses écarts, ses inadaptations et ses revirements sociaux. C'est à ce prix que l'avenir de l'humanité comme il convient de le soutenir avec BANDINTER Robert, s'inscrit dans le respect de la vie qui est sacrée (article 16 de la constitution congolaise). Celui qui prend la vie d'autrui commet le pire des sacrilèges.291(*)

A. Menace de la mauvaise conception du Droit pénal sur les droits de l'Homme.

Lorsqu'une personne est condamnée à la peine de la honte et horrible qu'est la peine de mort, sa vie part et son droit de jouir à la vie est bafoué, en cas d'emprisonnement à vie désignée au nom de la servitude pénale à perpétuité au Congo-Kinshasa, c'est la jouissance à la vie et à la liberté qui partent emportant ainsi aux uns et aux autres le droit qui leur est reconnu d'avoir un mari, une femme, un enfant, un frère, un membre de la communauté qui doit d'ailleurs être un homme libre; mais quelle liberté par ce qu'il risque de croupir dans les ténèbres de prison; en cas de condamnation temporaire, c'est tout un projet de société qui part emportant toute garantie à un avenir meilleure, des emplois à perdre, des études à interrompre, des mariages voués à l'instabilité, des foyers déstabilisés.

Et en cas de condamnations aux amendes, c'est tout un patrimoine qui subit, pourtant c'est une succession future qui est menacée alors qu'il faut la protéger si du moins on pense aux droits de l'enfant qui peut être est encore dans le sein maternel. Poète, tu parleras la langue de la justice pour ceux dont on aveugle la vue au fer des barreaux.

Mais tout cela, O Dieu! Au nom de la justice, et de l'autre côté on crie aux droits de l'Homme, quel homme? Qui parmi les parlementaires (législateur), les juges, les victimes, les accusateurs, les spectateurs, les amoureux des sentences odieuses n'est pas assassin, meurtrier, voleur, violeur, détourneur, instigateur? Peut-être par ce qu'on est protégé, on n'a pas été attrapé, on est au-dessus de la loi par défaut et on est intouchable. Et si l'État avait l'oeil de Dieu?

Comme on le voit, le procès pénal est très délicat et constitue une menace aux droits de l'Homme envisagés dans l'ensemble, ces droits de l'Homme tant vantés de l'Est à l'Ouest, du Nord au Sud, que vais - je dire dans ce monde?292(*)

Le rôle traditionnel des droits de l'Homme, c'est de protéger du pénal, protéger la personne contre les menaces que fait planer l'intervention du droit pénal sur ses droits. En Europe historiquement, vous le savez aussi note Françoise TULKENS, la fameuse déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 a formulé des principes de base destinés à protéger l'individu contre ce qu'on appelait à l'époque la répression d'un pouvoir sans borne et sans limite. Et plus progressivement rapporte-t-elle, ces principes se sont inscrits dans le droit positif de nombreux pays, et punis dans tous les textes universels et régionaux portant reconnaissance des droits fondamentaux et qui ont jalonné l'histoire du vingtième siècle. Alors l'ensemble de ces garanties dit-elle encadrent, limitent l'intervention pénale dans ses quatre points cardinaux : l'infraction, l'auteur, la peine, le procès. Et on peut dire que ces garanties représentent aujourd'hui, ou, des valeurs universelles. Et ça fait du patrimoine commun.293(*)

Loin de prétendre à l'idée de faire perdre au Droit pénal son caractère sanctionnateur, toutefois devrait être évitée l'idée de limiter le droit pénal ou la justice pénal à un seul aspect; plus qu'un droit sanctionnateur, il se veut aujourd'hui par la resocialisation du coupable, un instrument de protection et de promotion des droits et libertés fondamentaux garantis aux personnes humaines de toute race, de tout rang et de tout sexe. Réprimer, condamner, oui. Mais hélas! Il faut qu'en instituant une juridiction pénale, tenir compte de la nature et de la valeur sociale indéniable de l'être humain. C'est-à-dire que l'organisation de la répression devant ainsi tenir compte de l'humanisation de la peine et de l'humanisme dans le déroulement de l'instance.

Étant une institution destinée à réguler les rapports des hommes vivant en société, la justice pénale doit être adaptée à leurs spécificités socioculturelles, et aux caractéristiques physiques et matérielles de leur environnement(...). Parmi les traditions, il en est qui se présente comme immuables intangibles, et qui caractérisent profondément un peuple au point tel que s'y attaquer équivaudrait à combattre l'identité même de ce dernier.294(*)

De ce point de vue, les juridictions militaires congolaises telles qu'elles fonctionnent aujourd'hui tenant compte des lois qui leur attribuent des compétences et dont elles sont appelées à appliquer en même temps, ne sauraient remplir cet autre rôle de la justice pénale dans un État de droit où les droits de l'Homme sont censés être protégés, ce qui est du reste le souhait des femmes et des hommes qui en sont membres.

Faut-il encore relever que plusieurs aspects démontent l'incompatibilité des juridictions militaires congolaises en ce qui concerne la promotion et la protection des droits de l'Homme. En effet, ces juridictions à ce que l'on dit et selon ce que renseigne l'expérience, font de la peine de mort leur cheval de bataille. Ceci n'est moins vrai qu'une simple affirmation d'autant plus que non seulement qu'il y a soixante et un articles du Code pénal militaire congolais qui prévoient expressément la peine de mort avec des dispositions qui obligent à la juridiction de la prononcer, mais aussi cette peine a plusieurs fois été prononcée même par des juridictions militaires instituées à l'échelon international.

Pour s'en convaincre, le Tribunal Militaire International de Nuremberg a prononcé douze condamnations à mort, trois peines d'emprisonnement à vie (...), tout comme ce dernier, le Tribunal Militaire de Tokyo est plus considérée comme un tribunal des vainqueurs contre les vaincus, et non comme un tribunal équitable et indépendant et il fut très politique.295(*)

Encore, le Comité des droits de l'Homme des Nations Unies a noté que l'existence dans des nombreux pays, des tribunaux militaires ou d'exception qui jugent des civils « risque de poser de sérieux problèmes en ce qui concerne l'administration équitable, impartiale et indépendante de la justice ». Très souvent d'après le Comité, « lorsque des tels tribunaux sont constitués, c'est pour permettre l'application de procédures exceptionnelles qui ne sont pas conformes aux normes ordinaires de la justice. S'il est vrai que le Pacte n'interdit pas la constitution de tribunaux de ce genre, les conditions qu'il énonce n'en indiquent pas moins pas moins clairement que le jugement de civils par ces tribunaux devrait être très exceptionnel et se dérouler dans des conditions qui respectent véritablement toutes les garanties stipulées à l'article 14. »296(*)

C'est le souci de la sauvegarde et de la protection des Droits de l'Homme qui motive ce genre d'observations et recommandations.

Cependant, le cas de la République démocratique du Congo ne peut que susciter et émettre des doutes sur l'administration d'une véritable justice. Le cas le plus frappant est celui récent du tribunal militaire de garnison de Lubumbashi qui pour plaire à qui on se demande, s'est précipité pour condamner sommairement quatre étudiants, à mort en violation de tous les principes de garantie à une justice équitable. En effet, le 13 septembre 2013, ce tribunal a, à la suite d'un procès organisé suivant la procédure de flagrance, condamné quatre personnes civiles, tous étudiants, à la peine de mort aux motifs qu'elles se seraient rendues coupables des infractions de détention d'armes de guerre et d'association de malfaiteurs, lit-on dans Kongo Times.297(*)

Il s'agit des étudiants Ngonga Kanku Jean, Mongwelega Nyakwako Éric, Lokoba Lwasondela et Kigana Lukisa. Le procès a été organisé en plein air, sur la place de la société nationale de chemin de fer du Congo (SNCC), dans la commune de Lubumbashi, en présence des autorités politico-administratives locales dont le Ministre provincial de l'intérieur, l'Inspecteur provincial de la Police et le Maire de la ville, rapporte Kongo Times! Si par faute de preuve l'on peut se réserver de toute affirmation, l'on pourra plutôt s'interroger sur les injonctions qui pouvaient peser sur le juge avant de statuer surtout que le verdict était tant attendu par cette foule hybride.

Violation des droits de l'Homme dans ce procès flou? Le Président de l'ONGDH ACAJ précité a souligné avec force dans ce site web que les condamnés ont été privés du droit de se faire assister de conseil de leur choix. Ceux qui les ont assistés a-t-il dit, leur ont été commis d'office par le tribunal sans possibilité d'en apprécier leur compétence et expérience par rapport à la gravité des faits leur imputés. D'après cette ONGDH, des mesures d'instruction supplémentaires qu'ils avaient sollicitées dont la descente sur terrain et comparution de témoins à décharge ont été écartées par le Tribunal sans aucune motivation objective. Deux de condamnés ont déclaré à ACAJ avoir été torturés lors de leur garde à vue à la Police du 09 au 10 octobre 2013, pour les contraindre à avouer les faits mis à leur charge. Le Tribunal avait comme relève ce rapport, arbitrairement refusé contre toute attente des prévenus de procéder à toutes mesures utiles pour la manifestation de la vérité, et des preuves pouvant conduire au non-lieu ont été arbitrairement écartées. Les auteurs de torture n'ont jamais été interpellés.298(*)

B. Cas particulier de la peine de mort.

Si un condamné pourra garder ses relations et continuer à bénéficier de l'affection de sa famille par des visites et assistance de tous ordres pendant le temps de la purge de sa peine, il n'est pas le cas pour le condamné à mort qui, non seulement qu'il est maudit par cette sentence, mais aussi étant voué à l'élimination, ne saura ni s'amender, ni réparer, moins encore voir les siens.

La répression aujourd'hui devrait jouer un rôle de protéger du pénal, protéger de cette menace que fait planer l'intervention du juge pénal sur la vie de la personne humaine en adoucissant les peines et en éliminant carrément certaines d'entre elles, cette vie pourtant sacrée, et sacralité affirmée sans ambigüité par le constituant congolais à l'article 16 précité .

O tempora! O mores!299(*)

En plein vingt et unième siècle, peut-on torturer au nom de la justice pénale alors que le droit pénal sanctionne la torture comme tout crime, comme celui qu'auraient commis les torturés et juste pour les faires avouer des faits qui vont conduire à la peine de mort? Mais quel amour à la peine de mort qui est pourtant le symbole de la honte pour un État qui se nomme démocratique?

Ubinam gentium sumus? In qua urbe vivimus? Quam rem publicam habemus?300(*)

Devant les Juridictions militaires congolaises, les droits les plus fondamentaux du prévenu sont mis en jeu. Car, il risque et il peut à tout moment être condamné rapidement à mort ou à toute autre peine et cela, même pour les faits dont le doute plane et qu'il n'y a pas une manifestation inébranlable de la vérité.

Pour autant qu'ils ne soient pas contraire à la présente constitution, prévoit l'article 221, les textes législatifs et réglementaires en vigueur restent maintenus jusqu'à leur abrogation ou leur modification. Cela revient à dire qu'un texte législatif antérieur à la constitution du 18 février 2006 telle que révisée le 20 janvier 2011 n'est maintenue que s'il n'est pas contraire à cette loi fondamentale qui a instituée la Troisième république congolaise. Or nulle part dans ces dispositions, cette Constitution ne consacre, n'affirme ou ne réaffirme ou encore ne fait même allusion à la peine de mort.

Si dans les constitutions antérieures la peine de mort n'était pas écartée et on le sait d'ailleurs parce qu'elle était une peine d'intimidation et de protection des pouvoirs dictatoriaux qu'a connu successivement le pays, il n'en est pas le cas aujourd'hui où l'État est organisé par consensus. En effet, la loi fondamentale en son article 15, alinéa 3 se réfère au droit à la vie et à la peine de mort. L'article 6, alinéa 3 de la Constitution du 24 juin 1967 retient les mêmes dispositions, ainsi jusqu'à l'Acte constitutionnel de la transition du 4 août 1922. Mais depuis l'Acte constitutionnel harmonisé de la période de la transition, il y a eu mention du qualificatif sacré en le rattachant à la personne humaine. Le constituant retenait également la peine de mort. La Constitution du 18 février 2006 constitue donc une véritable révolution en ce qui concerne la protection du droit à la vie et l'interdiction de la peine de mort. L'article 16 ne fait plus référence à la peine de mort même comme une peine exceptionnelle qui pourrait être occasionnellement prononcée comme le faisaient les dispositions analogues des constitutions antérieures.301(*)

De ce fait toute loi antérieure à la Constitution du 18 février 2006 qui contiendrait des dispositions prévoyant la peine de mort ou qui attribuerait la compétence aux juridictions pour la prononcer est contraire à la constitution et à la lumière de l'article 221 précité, ne peut être maintenue et elle entre ipso facto et de plano dans les musées, les archives ou tout simplement dans les oubliettes du passé. C'est le cas notamment des lois no 023 et 024/2002 en examen qui pour la première attribue la compétence et pour la deuxième prévoit la mort comme sanction aux infractions qu'elle définit. Grave alors, elle prévoit la mort même pour des faits de moindre gravité, pendant que le statut de Rome comme il a été souligné ci-haut, même pour les crimes qu'il qualifie de plus graves, n'a pas prévu le supplice comme sanction.

Les juridictions militaires, statuant ainsi sur ces faits, appliquant les dispositions de ces deux lois et prononçant la peine de mort ne peuvent pas rendre la justice au motif que la justice est aussi l'un des instruments utilisés non seulement pour protéger, mais pour lutter aussi contre les violations des droits de l'Homme. Pourtant, celle rendue par ces juridictions, est loin de protéger ces droits et en constitue à l'exemple du Congo une véritable menace.

Ce qui est vrai pour le droit en général, qu'on le souligne avec le Professeur Sam BOKOLOMBE, l'est d'avantage pour le droit criminel, dont les règles sont de stricte interprétation étant donné la sensibilité des valeurs tant individuelles que sociales qu'il met en jeu, notamment l'humanité, la vie, l'intégrité physique, l'intégrité sexuelle, la liberté, l'honneur, le crédit, le patrimoine, etc.302(*) Alors qu'au passage de la peine de mort, tout est emporté et tous ces droits perdent leur sens.

Ce raisonnement vaut pour le statut de Rome qui est aussi une loi pénale en ce que d'une part elle porte création d'une juridiction essentiellement pénale pour laquelle il prévoit l'organisation, le fonctionnement et lui attribue les compétences; d'une autre part ce statut définit les infractions et en prévoit les peines.

Concernant un prévenu poursuivi en R.D. Congo pour les crimes de la CPI, ce statut est plus favorable et protecteur des droits qui lui sont garantis, et que les peines qu'il peut encourir ne sont pas prévues par ledit statut. En plus de cela, les conditions d'incarcération à la CPI sont en conformité avec les principes qui prônent le respect de la dignité humaine. Malheureusement le principe de complémentarité de la CPI avec les juridictions internes, elle ne peut poursuivre que les juridictions internes ne sont pas à mesure de poursuivre. Or les juridictions internes comme on les voit bien n'ont été à mesure de poursuivre que les pauvres citoyens sans protection ou de basse classe. Les gros poissons en échappent toujours et commettent des crimes en toute impunité.

Les parties au statut de Rome qu'on le souligne, se sont rendus compte de la nécessité de la sacralité de la vie humaine et n'ont pas, malgré la gravité trouvée dans les infractions qu'elles ont défini dans ledit statut, prévu la peine de mort. Pour ceux qui peuvent chercher le motif, c'est seulement par ce que les États ont compris que : « ce n'est pas par ce que la peine de mort existe que les crimes ou infractions passibles de cette peine ont diminué en nombre ou en intensité »303(*); et qu'ils ont en outre compris que parmi les droits du prévenu mis en jeu lors d'un procès, le droit à la vie est celui-là qui est plus visé indirectement ou directement et c'est la vie qui est au centre de l'activité humaine. D'où il faut le protéger en évinçant la peine de mort.

Car, l'équité conduit à penser qu'on ne peut pas tuer au nom de la justice cette même personne dont on a institué la justice pour la protéger, elle et ses droits; la tuer par ce qu'elle a enfreint à la loi. Ainsi on appelle assassin celui qui tue par méditation et pour le condamner on voudrait au nom de la justice commettre le même acte, cela s'écarte de tout principe de justice et d'équité. Victor Hugo n'a-t-il pas écrit que `' la peine de mort est le signe spécial et éternel de la barbarie et à Robert BADINTER de soutenir que la peine de mort est une défaite pour l'humanité, en ce qu'elle ne protège pas la société des hommes libres, elle la déshonore, en faisant sienne la pratique de l'assassin en l'assassinat à son tour. Elle tombe ainsi dans le piège secret que lui tend le crime. Celui de verser le sang en l'appelant châtiment. Par l'exécution, l'acte du criminel devient celui de la justice. L'homme, on le sait, est un animal qui tue, non pour assurer sa subsistance, mais parce que la conscience et la maîtrise de soi sont, chez certains êtres et à certains moments, impuissants à arrêter la pulsion de mort. Si on veut la réduire, n'en faisons pas la loi et le rite de la cité.304(*)

Parce que au Congo de par la Constitution la vie humaine est sacrée et que dans aucune de ces dispositifs la constitution a privé la vie du prévenu de cette sacralité, une justice qui applique la peine de mort surtout dans le cas frappant de la justice militaire, elle ne peut pas juger les civils d'autant plus que dans aucun des États de la planète, il est confié aux Forces armées la mission de juger les civils, c'est la mission du juge pénal ordinaire. Si on le fait à titre d'exception, cela ne peut pas être érigé d'une manière tantôt d'une autre en un principe ou être plus étendue qu'une simple exception. Il y a un adage latin qui dit « Nec plus in accessione esse potest quam in principali : il ne peut y avoir dans l'accessoire plus que dans le principal. »305(*)

Le constituant congolais de 2006 du moins dans le texte a rencontré les aspirations des Congolaises et des Congolais en ce qui concerne la valeur qu'il a réservé à la vie en la sacralisant, car, de toutes les valeurs fondamentales de l'homme congolais, de tous les biens qu'il souhaite obtenir, la vie est le bien par excellence. Si les Congolais sont conscients que la vie qu'ils portent leur est transmise par leurs parents, leur plus grand souhait est que cette vie soit non seulement sauvegardée, mais aussi renforcée en cas de maladie ou d'une influence maléfique. La conception congolaise de l'Homme centrée sur la vie forte, la fécondité intense et l'union vitale considérées comme des valeurs fondamentales impose la réforme du Code pénal congolais actuel élaboré essentiellement sur base des présupposés philosophiques étrangers.306(*)

Elle ne dit pas le contraire, Madame SITA AKELE Angélique lorsqu'elle note parlant de la fonction du droit pénal qu'il protège les valeurs les plus essentielles de la société et consolide sur la base de cette protection l'ensemble du système juridique, l'examen du Code pénal ajoute-t-elle, montre que les valeurs protégées par ces peines sont : la personne humaine dont on protège la vie, la santé physique et morale, la dignité; la famille, nucléaire ou élargie par la parenté ou l'alliance, les biens, individuels ou collectifs, publiques ou privés, la communauté à divers échelon, les plus élevés étant la nation.307(*)

En ce sens, il est du bon droit que le procès pénal soit organisé en considération de tous ces aspects qui constituent ainsi les droits que la Constitution garantit au prévenu parmi lesquels la sacralité même de sa vie et le droit à un procès équitable avec les corollaires comme que la cause soit entendue par un juge impartial. Ce que n'offre pas la justice militaire actuelle qui juge selon les hypothèses évoquées dans la première partie les personnes civiles à tous les échelons.

Par ailleurs, il convient de le souligner avec le Professeur André MBATA qu'en droit constitutionnel, il existe plusieurs méthodes d'interprétation juridique. Il s'agit notamment de la méthode littérale ou grammaticale, de la méthode intentionnelle, de la méthode téléologique, de la méthode contextuelle, de la méthode comparative, et de la méthode d'interprétation par objectif fondé sur les valeurs protégées. Aucune de ces méthodes ne saurait justifier la persistance de la peine de mort en droit constitutionnel congolais.308(*)

Ceci vaut pour l'interprétation de l'alinéa premier de l'article 156 sur la compétence des juridictions militaires à l'égard des civils. Aucune de ces méthodes ne saurait justifiée cette compétence hormis l'hypothèse des circonstances exceptionnelles comme la guerre, l'état d'urgence ou de siège.

En outre, le doyen NYABIRUNGU note que la tendance abolitionniste du parlement, que celui de la transition ou celui de la troisième République, se manifeste par le fait qu'il n'a jamais voté une loi portant peine de mort.309(*) Par exemple, aucune disposition de la loi de 2006 sur les violations sexuelles et de la loi no 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant ne prévoient la peine de mort, même si l'article 89 de la loi no 13/011-B du 11 avril en fait allusion quant aux compétences des tribunaux de grande instance.

Les juridictions militaires congolaises par contre ne s'inscrivent pas dans cette logique et la répression assurée par elle s'écarte de plus en plus du respect des dispositions constitutionnelles en vigueur. Faisant de la loi constitutionnelle juge de l'exception d'inconstitutionnalité soulevée devant ou par une juridiction, l'article 162 de la constitution reconnaît aussi à toute personne le droit de saisir cette cour pour inconstitutionnalité de tout acte législatif ou réglementaire. Toute personne peut poursuit cet article, saisir la même cour, par la procédure de l'exception de l'inconstitutionnalité invoquée dans une affaire qui la concerne devant une juridiction; laquelle va surseoir à statuer pour saisir toutes affaires cessantes, la cour constitutionnelle.

Cependant, au niveau du juge militaire congolais, le prévenu ne jouit pas de cette prérogative car ce juge ne se borne qu'à prendre lui-même une décision sans pourtant surseoir estimant à tort que l'exception d'inconstitutionnalité soulevée concernant les lois judiciaire et pénale militaires du 18 novembre 2002 est dénuée de tout fondement en ce qu'elles sont antérieures à cette constitution et que selon le juge militaire, l'alinéa 3 de l'article 156 de cette même constitution, prévoit qu'une loi devrait fixer les compétences des juridictions militaires.

Or, si l'exception d'inconstitutionnalité prévue par cet article concerne tout citoyen qui a une cause devant un juge, elle est pourtant plus bénéfique au prévenu devant une juridiction militaire qui pose un problème d'inconstitutionnalité d'une part sur sa compétence face aux civils et d'autre part sur les dispositions du Code pénal militaire à appliquer.

D'ailleurs sur cette question, le Professeur ESAMBO KLANGASHE déjà cité, estime que la question préjudicielle de constitutionnalité est un moyen par excellence de protection et de préservation des droits et libertés publiques garantis par la constitution et laisse, en dépit de l'imprécision que s'offrent la plupart de constituants, entrevoir l'idée qu'elle relève des juridictions de jugements de l'ordre administratif et de l'ordre judiciaire.310(*)

Comme on peut le remarquer, il sied de comprendre que l'on ne saura peut-être pas évoquer tous les droits du prévenu mis en jeu lors d'un procès pénal. Cependant l'on sait bien qu'il est un droit pour tout prévenu de demander et d'obtenir la récusation d'un juge dont il doute la partialité, cela bien sur conformément aux dispositions prévues aux articles 49, 50, 51 et 52 de la loi organique no 13/011-B précitée.

Malheureusement pour le prévenu devant une juridiction militaire, il a moins de chance d'exercer et obtenir gain de cause sur cette prérogative, car, les juges militaires échappent aux dispositions légales organisant la récusation en ce sens que dans leurs composition hybride, ce sont les magistrats militaires de carrière qui confèrent à la composition toute la nature juridique d'une juridiction de jugement311(*), surtout que souvent la juridiction siège avec le seul magistrat de carrière qui le préside.

Dans ce cas, peut-on dans un État de droit soutenir la soumission des filles et fils du pays à une telle justice si l'on doit considérer ce brocard latin : « iustitia est constans et perpetua voluntas jus suum cuique tribuendi », c'est-à-dire la justice est la volonté inébranlable et incessante d'attribuer à chacun son droit.312(*)

Ainsi l'histoire on ne l'efface pas, l'on retiendra pour mémoire la triste condamnation à mort par une juridiction militaire d'exception, de Emmanuel BAMBA, Alexandre MAHAMBA, Évariste KIMBA et Jérôme ANANY ``les pendus de la pentecôte'' à la grande place de pont Cabu à Kinshasa dans localisation actuelle du stade dit des Martyrs de la pentecôte. En effet, ce tribunal militaire d'exception fut créé par l'ordonnance no 66-338 du 30 mai 1966 dont le siège était composé des officiers supérieurs INGILA, MALILA et NKULUFA LOMBINDO pour juger les sus-qualifiés dont on reprochait l'infraction d'atteinte à la sûreté de l'État par le fait qu'ils auraient tenté de renverser le régime né du coup d'État militaire du 24 novembre 1965 et projetaient d'assassiner les Généraux MOBUTU, MULAMBA et BOBOZO.313(*)

Alors qu'ils n'étaient pas en encore jugés, le Haut-commissaire à l'information de l'époque (équivalent du Ministre de communication et Média aujourd'hui) annonçait : « ils seront jugés par un tribunal militaire pour haute trahison. Ils risquent la peine de mort; ils pourraient être pendus sur la place publique. »314(*) Et c'est ce qui a été fait comme annoncé.

Au cours du procès qui du reste n'avait duré qu'une heure et trente minutes selon le rapport de la CNS, le juge-président avant la clôture des débats finira par conclure : « Messieurs, nous sommes ici devant le conseil de guerre, ce n'est pour discussion. Nous sommes ici, c'est pour punir quelqu'un, donc le tribunal militaire ne demande pas beaucoup de temps. Maintenant, en tant que président, nous allons à côté pour mettre les choses au point. ». Ces délibérations ne prirent que cinq minutes et le verdict tomba sec : la peine capitale pour les quatre prévenus. Le haut commandement exigea l'application immédiate de la sentence que confirma le conseil de ministres réuni à deux reprises dans la nuit du 1er et du 2 juin 1966. Le Chef de l'État refusa d'accorder la grâce, malgré les nombreuses interventions en faveur des condamnés. Ces derniers furent pendus le 2 juin, devant une foule estimée à 300.000 personnes.315(*)

Il n'y a pas que ça, sous le RP no 1078/02, MP contre le prévenu Eddy KAPEND et consorts, la COM a instruit le procès dit Kabila. 130 personnes civiles et militaires étaient poursuivies des chefs des préventions d'attentat contre la vie du chef de l'État, d'attentat dans le but de détruire le régime constitutionnel, de complot et autres préventions connexes. Elle a prononcé le 07 janvier 2003, dans cette cause historique portant contre la vie du Président Laurent Désiré KABILA, un arrêt sur dispositif, sans la moindre motivation, et qui est du reste introuvable. Trente personnes au total parmi les cent trente poursuivies ont été condamnées à mort, d'autres à perpétuité(...). Les décisions de cette cour de triste mémoire n'était pas appelable. Et même après l'abolition de ladite cour, l'article 378 du fameux code judiciaire militaire promulgué pendant que ce procès était en cours prive ces condamnés du droit d'appel. Conséquence, l'appel contre cet arrêt est toujours exclu. Il en est de même de la réouverture des procès de cette juridiction d'exception et de triste mémoire.316(*)

Les Suisses n'avaient-ils pas raison de militer pour l'abolition ou la suppression pure et simple de la Justice militaire pour éviter ce genre de revirement dans l'avenir ?

C'est sous ces concepts que la peine de mort depuis son histoire, a été instituée et prononcée dans la plupart de cas connus pour ces genres de procès. Il n'y a donc aucune raison que les juridictions militaires encrées dans ces pratiques puissent continuer à juger les civils et construire ainsi une pratique de violation des droits du prévenu pourtant protégé par les lois tant internes qu'internationales lesquelles ne le privent d'aucun droit parmi ceux reconnus et garantis à tout homme criminel soit-il.

De toute évidence, la justice doit être et resté juste. La peine de mort discrédite la justice et lui fait perdre tout son fondement, tout son sens dans un État qui se veut de Droit ou de Droit constitutionnel. En fait on ne juge pas un animal, mais une personne humaine. Certes, elle s'est écartée de normes de la société, mais il faut la resocialiser. Penser à des peines plus cruelles, c'est installer l'injustice au nom de la justice, c'est autant légaliser le crime que lutter contre.

Par conséquent, comptes tenu des valeurs profondes de l'humanité et par respect du caractère sacré de la vie, mais également pour faire triompher l'idéal de la resocialisation du délinquant que poursuit par ailleurs, le droit pénal contemporain, le Professeur LUZOLO propose l'abolition de la peine de mort, une abolition responsable tenant compte des exigences exprimés et qui, rationnellement, conditionnent la réussite de cette oeuvre d'humanisation de la justice.317(*)

Selon une enquête exhaustive conduite par l'Université de Columbia, sur les 5.697 condamnations capitales prononcées en première instance entre 1977 et 1995, les deux tiers avaient été acquises au terme d'un procès irrégulier.318(*) La République démocratique du Congo dans son contexte politique et dans la manière dont les affaires sont conduites au niveau de la Justice militaire, n'échappe aucunement à cette réalité car même ici il s'agit d'une justice humaine et c'est possible que les erreurs soient commises dans ce sens.

Seules les sociétés malades maintiennent la peine capitale.319(*) Loin d'être une injure plutôt qu'une vérité, cette phrase de BADINTER , doit avoir un accent particulier sur les juridictions militaires congolaises dont l'essentiel de l'activité est fortement assis dans les dispositions des lois qui trouvent en la peine de mort une politique criminelle même pour des faits de moindre gravité. Par exemple, si les pillages ont été commis en temps de guerre ou dans une région où l'état de siège ou d'urgence est proclamé ou à l'occasion d'une opération de police tendant au maintien ou au rétablissement de l'ordre public, les coupables sont punis de mort.320(*) Tout condamné à mort en vertu du présent code sera passé par les armes.321(*) Les justiciables des juridictions militaires condamnés à la peine de mort sont passés par les armes dans un lieu désigné par l'autorité militaire.322(*) C'est comme ça qu'on peut destiner au passage aux armes, quelqu'un qui lors des pillages susvisés, s'est contenté d'emporter les baffles d'un ordinateur comme ce fut le cas à Mbandaka en 2009 lors du procès dit des insurgés Enyele après l'insurrection de Dongo.

Toutefois, le fait pour la République démocratique du Congo de subordonner l'exécution de cette peine de pire sacrilège au rejet de la grâce présidentielle et que son silence à cet effet ne devant pourtant pas être interprété comme un rejet323(*) d'une part, et d'avoir ratifié en 2004 la résolution des Nations Unies sur le moratoire suspendant toute exécution, on peut dire que c'est un signe fort de la réprobation sociale face à cette peine, et que par là toute justice assise sur la condamnation à ladite peine doit être simplement écarté du jeu.

De tout ce qui précède, les juges assesseurs ne peuvent pas dans l'hypothèse et dans l'administration de la Justice militaire, siéger pour traiter d'une matière pénale où le prévenu risque de perdre toute sa valeur en tant que personne humaine. Cela se justifie du fait de l'inflation législative que connait le pays et la diversité de la coutume qui pourtant devant être appliquée par les cours et tribunaux civils et militaires.

Face à cette considération, le juge assesseur ne reste plus qu'un simple figurent , car c'est au cours même du procès qu'il découvre comme le public venu assister, les différentes dispositions légales ou coutumières qu'invoquent les avocats, le Ministère public et le Juge président, l'unique magistrat de carrière dans la composition.

Les sociétés modernes et complexes, note le Professeur AKELE ADAU, connaissent en effet des lois innombrables, instables, souvent incohérents et mal rédigées. Tant et si bien que le Droit ne s'enseigne plus comme un enchainement de certitudes. Il insinue le doute et, si l'on n'y prend garde, il apporte l'insécurité. On pouvait déjà poursuit-il, voir dans cette multiplication des droits susceptible d'avoir un effet destructeur sur l'État de droit, le germe de la guerre des droits. C'est que l'inflation normative dit-il encore, rend le juriste, mais cela n'est si sûr seul capable de reconnaitre dans la jungle juridique. En revanche, elle éloigne de plus en plus le profane (le cas du juge assesseur non-juriste) de la connaissance et de la compréhension du Droit324(*).

Voilà les difficultés auxquelles la Justice militaire congolaise se trouve, lorsque ces juridictions doivent siéger avec les juges assesseurs qui n'ont du reste qu'une durée de trois mois sans pour autant acquérir l'expérience pour ce faire.

Appuyer l'idée de la composition du siège par les non-juristes en évoquant la maxime ``nemo ignorare legem censetur'' c'est se faire de l'ullision et cela ferra dénuder la justice de toute son utilité sociale, car, l'éloignement de non-juristes à la connaissance et à la compréhension de la philosophie du Droit a pris une telle ampleur que c'est avec mauvaise conscience qu'on continue à penser que ``nul n'est censé ignorer la loi'' alors que même ceux qui sont appelés à la faire appliquer l'ignore. C'est ainsi qu'il est peut-être étonnant que le juge chargé d'appliquer la loi, parfois se rebelle contre elle.325(*) Il y a là un évident mépris des réalités et un amer constat de ce que le droit n'est pas consommé par la population à la base (les juges assesseurs y compris). Il est comme étranger à la vie de la population qui est ainsi confinée dans une attitude légaliste passive ou au contraire dans une attitude qui débouche notamment sur des déconnexions juridiques, d'insensibilité normative. Cette attitude débouche notamment écrit le Professeur AKELE, sur des phénomènes de justice populaire ou de justice informelle.326(*)

Cependant, cette réalité n'épargne pas le juge assesseur militaire issu des officiers militaires ou policiers pour venir composer la juridiction en vue de juger du moins un homme, et pourtant cette entreprise compte tenu du caractère sacrée de la vie humaine, nécessite donc l'intervention d'un juge pas spécialisé, mais spécialiste qui n'a pas qu'une simple psychologie humaine, mais aussi une psychologie judiciaire acquise après tant d'efforts et de sacrifices dévoués à la Faculté de Droit et des pratiques autour des branches des sciences tant humaines que juridiques qui doivent concourir à l'action répressive.

Dans le contexte particulier de la société congolaise, face à l'ampleur que prend le phénomène associatif, la guerre est susceptible, de déborder du cadre des professionnels classiques de la Justice officielle, pour emporter dans la tourmente ces nouvelles catégories d'agences et d'opérateurs judiciaires que sont ou que devraient être les para juristes.327(*)

Pour protéger enfin les droits de l'Homme et en éviter les violations par les instances judiciaires, les règles de procédure pénale, et particulièrement dans le cas spécifique de l'action judiciaire militaire, tout en évitant à assurer la répression du coupable, doivent en même temps veiller à ce que les droits de la défense soient sauvegardés.328(*) Cela devrait être pris en compte aussi au niveau de la composition du siège des juridictions pénales ordinaires ou spécialisées, en temps de paix comme pendant la période d'inquiétudes. Car, la défense n'a son sens que si le défenseur se trouve face à juré si instruit et outillé pouvant saisir tous les enjeux et comprendre les allégations soutenues au cours de l'instance. Que la défense ne soit pas là pour embellir seulement la procédure.

Il convient alors de retenir que la procédure pénale est le thermomètre de la température démocratique d'un État, car elle est l'expression vivante des libertés publiques reconnues par l'État aux individus. C'est pourquoi dit-on, là où l'État brime, opprime l'individu, constate que le déroulement du procès est rapide et secret ; on constate également que des pouvoirs excessifs sont accordés aux magistrats.329(*) Pour s'en convaincre, il importe de considérer l'arrestation cavalière330(*) (intervenue à 02 heures du matin) du Député national Fidèle BABALA cadre et Secrétaire général adjoint du MLC et son transfèrement à La Haye siège de la CPI en exécution au nom de la coopération internationale d'un mandat d'arrêt international émis le 20 novembre, alors qu'il n'en était pas ainsi lorsque la même Cour réclamait l'arrestation et la réédition de Bosco NTAGANDA alors sous mandat d'arrêt international, auteurs des crimes les plus graves qui défient la conscience commis à l'est du pays.

§2ème : Au niveau de la victime.

Si l'on s'est beaucoup penché du côté de la protection des droits du prévenu lors d'un procès pénal, il est aussi important de ne pas ignorer ceux de la victime qui peut dans une certaine mesure concerner le prévenu devenant victime de la victime originaire à son tour.

A. Position du Problème.

L'examen d'un dossier judiciaire pénal a aussi des retombés sur les droits reconnus à la victime de l'infraction et la composition du siège doit être motivée en considération des droits qui peuvent être mis en jeu à ce niveau. En effet, si le juge militaire exerce une action pénale qui est d'ailleurs sa mission orthodoxe, et n'a besoin que du droit pénal ou du droit disciplinaire militaire pour apprécier le degré de culpabilité du prévenu ou de son innocence, il n'en demeure pas le cas lorsqu'il est question de statuer sur l'action de la partie civile. Il a sans doute besoin dans ce cas de recourir à d'autres branches du Droit ou d'autres sources notamment le Droit civil et les usages. Ce qui échapperait de toute évidence à l'appréciation des juges assesseurs composant les Juridictions militaires.

B. Droits de la victime de l'infraction dans un procès pénal.

Il est un droit pour toute personne victime d'un fait pénal d'obtenir réparation à charge de la personne à sur qui la responsabilité sera établie. C'est ce qui résulte de la glose des articles 258 et 260 du décret du 30 juillet 1888 relatif aux contrats et obligations conventionnelles.

Cependant, la victime d'une infraction ne peut se faire justice à elle-même en ce que s'agissant de la répression l'État en a seul le monopôle, doit opter pour la voie pénale et entendre donc exercer son droit d'action ou, en d'autres termes, se constituer partie civile. Pour exercer son droit d'action civile devant une juridiction pénale, la victime doit, comme en procédure civile, avoir la capacité pour agir.331(*)

Les modalités de cette réparation peuvent être soit la restauration directe (restitution de la chose volée, extorquée ou escroquée, pillée, ou immeuble objet du stellionat) ou soit les dommages intérêts.

Malheureusement, au lieu de prendre en compte la condition du condamné et voir l'intérêt de la victime qui, lesquels doivent être conciliés pour donner à la Justice sa juste valeur, au niveau des Juridictions militaires se bornent à prononcer des sommes excessives sans tenir compte de la condition sociale du délinquant. C'est ainsi que l'on peut condamner un pauvre citoyen à réparer un préjudice estimé à des millions de Francs congolais. Cela est non seulement injuste, car, à son tour, le condamné devient une victime de la victime originaire, mais en sus, le pouvoir juridictionnel court le risque d'être discrédité aux yeux de la victime originaire à cause de l'inexécution qui pourrait s'en suivre du fait de l'insolvabilité manifeste et notoire du condamné, dont il était d'ailleurs au courant. Faut-il alors que la juridiction prononce une telle condamnation sachant bien qu'elle restera sans exécution possible ? N'est-ce pas faire perdre à la justice son crédit ?332(*)

Par contre, sous d'autres cieux, l'État pour résoudre le problème, prévoit des mécanismes de réparation de dommages subis du fait infractionnel. En effet, en Droit français avant même que les poursuites pénales aient été engagées, ou même si les poursuites engagées ne leur ont pas permis d'obtenir une réparation ou une indemnisation effective et suffisante, certaines victimes de dommages corporels, de viol ou d'attentat à la pudeur ou d'un dommage matériel résultant d'un vol, d'une escroquerie ou d'un abus de confiance, peuvent exercer un recours en indemnité devant une commission juridictionnel.332(*)

Toutefois au Congo-Kinshasa, la victime a aussi la possibilité d'obtenir réparation après les poursuites si la culpabilité a été établie, mais en exerçant une action civile devant le juge de Droit privé en brandissant devant ce juge, le jugement de condamnation de son bourreau. Malheureusement, cette procédure, non seulement elle est coûteuse, mais aussi elle prend du temps et parfois elle débouche par une issue infructueuse. Souvent, la victime n'opte qu'au désistement avec du moins une satisfaction si son bourreau a déjà été condamné à une peine de prison.

En outre, il est un droit pour la victime d'une infraction de saisir directement le juge pénal pour obtenir de lui réparation du dommage subi par elle du fait infractionnel. C'est ce qui résulte de la glose de l'article 8 de la DUDH. En effet, cette article dispose que toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la Constitution ou par la loi. C'est cette voie qu'on appelle ``citation directe.''

Il est pourtant regrettable de ce que le Droit judiciaire militaire n'offre la faculté à une personne, victime d'une infraction relevant de la compétence du juge militaire, d'exercer cette faculté, car, ce juge ne peut pas être saisi par voie de citation directe. Elle ne peut qu'attendre à ce que le Ministère public militaire ne puisse mouvementer l'action après instruction. En d'autres termes, en Droit judiciaire militaire, la personne lésée par le fait incriminé ne peut saisir le tribunal de l'action en réparation en se constituant partie civile que lorsque la juridiction militaire est saisie de l'action publique.333(*)

Ainsi, la citation directe est exclue par l'article 214 du Code judiciaire militaire qui ne l'a pas prévue parmi les modes de saisine du juge militaire. En effet, cet article dispose du reste que : « les juridictions militaires sont saisies par voie de traduction directe ou par décision de renvoi émanant de l'auditeur militaire près la juridiction compétente. Elles sont également saisies par voie de comparution volontaire du prévenu suivant les conditions prévues par le présent code. »334(*)

Or, comme on peut le remarquer, la citation directe qui n'est pas prévue d'ailleurs en violation de l'article 8 de la DUDH, permet à la victime d'une infraction de contourner la lanterne du Parquet ou même à son impartialité et la protection dont l'auteur de l'infraction qui l'a préjudicié peut en jouir ou en être bénécifiaire (homme fort, intouchable, influent...).

Il importe de noter aussi qu'il est reconnu à la victime le même droit consacré à l'article 162 susmentionné de la Constitution sur la saisine du juge constitutionnelle lorsqu'elle estime que la loi appliquée ayant conduit à l'acquittement de son bourreau et qui lui a fait perdre la réparation dont elle aurait pu obtenir est inconstitutionnelle.

Malheur cependant, comme il a été relevé supra, le juge militaire à tous les niveaux de juridictions n'obtempèrent pas à cette disposition de la Constitution qui lui demande de surseoir.

Conclusion Générale

L'étude des fondements théoriques et des modalités pratiques de l'exercice de la justice militaire face aux civils en République démocratique du Congo vient à la suite de la Constitution du 18 février 2006 et des instruments juridiques régionaux et internationaux ratifiés en ce jour. En effet, de manière pragmatique, il s'est agi tout au long de ce mémoire de voir ce qui est fondamentalement congolais dans la problématique de la compétence des Juridictions militaires telle qu'elle est organisée par le droit positif, de démontrer comment cette compétence ne peut plus se justifier aujourd'hui du fait de l'inconstitutionnalité des lois qui la régit. Mais au-delà on ne s'est pas empêché de s'interroger sur la pertinence logique de ce qui a conduit à l'institution de cette justice et de ses fondements.

Dans un Etat de Droit, la loi prévoit les voies et moyens de droit pour contester et même réduire à néant la décision d'une autorité judiciaire lorsque son action s'écarte de ce qui est prévu par la loi dont elle est appelée à faire application. Il y a nécessairement problème, lorsqu'il est recouru, par l'usage d'une liberté ou d'une prérogative légale quelconque, à une voie non prévue pour la finalité vers laquelle on l'utilise.335(*) C'est ce qui est prévue à l'article 162 de la Constitution de la République en la possibilité accordée aux citoyens de saisir le juge pour tout acte violant les lois du pays ou contre l'application de toute loi contraire à la Constitution.

Il est apparu que les origines de la justice militaire se situent historiquement sur le plan du droit positif écrit dans le décret du 22 décembre 1888 qui l'a instituée dès la création de la Force publique l'ancêtre des Forces armées de la République démocratique du Congo. En effet, les Juridictions militaires ont été créées avec la mission et dans l'intérêt de rétablir l'ordre public militaire et de renforcer la discipline au sein de l'Armée lorsque les sanctions disciplinaires prévues à cette fin se révèlent inefficaces. Question de temps et d'opportunité, on n'est pas allé dans les petits détails sur toute la question malgré que cela fût important.

Autorisé à juger les civils par les anciennes constitutions du pays, il a été expressément privé de cette faculté par le constituant de 2006 du moins pour le temps de paix. Toutefois, la lecture des instruments juridiques tant régionaux qu'internationaux relatifs aux droits de l'Homme, ne lui permet pas même à titre d'exception de continuer à diriger son action dans ce sens. Le faire, équivaudrait directement à la violation du droit interne qui intègre lesdits instruments dans l'arsenal juridique du pays.

Mais dans la pratique, on constate que le juge militaire continue à agir à l'égard des civils, en application des lois devenues non seulement fondamentalement et formellement inconstitutionnelles, mais aussi inappropriées par rapport à l'évolution sociale. Aujourd'hui, toute action qu'elle émane des institutions ou des individus, tourne autour de la considération de la personne humaine. L'élaboration des lois et leur application vont ainsi dans le même sens et on parle de l'humanisme et de l'humanisation tant des lois que des peines.

Humaniser en ce sens, c'est veiller à l'assainissement de la légifération nationale, en adaptant les lois pénales à la dynamique internationale. Il s'agit concrètement de dépouiller l'arsenal juridique interne de tous les textes « obsolètes », c'est-à-dire complètement dépassés et visiblement en marge des instruments juridiques internationaux quant à l'approche des matières réglementées. Humaniser, c'est aussi mettre en oeuvre un éventail de mécanismes susceptibles de sécuriser toutes les personnes traduites en justice.336(*)

Il apert donc en ce sens que, le jugement des civils pour toute infraction de quelque nature que ce soit, revienne à leur juge naturel qui de part ses atouts et sa collégialité répondant aux critères universels de l'administration de la justice, lui offre des garantis à un procès équitables. Les juridictions militaires composées des officiers dépendant de l'Armée et de la Police, n'ont pas leur place dans la répression des faits pénaux commis par des personnes qui pourtant doivent être protégées.

Permettre aux juges assesseurs militaires pour juger les civils mêmes dans les matières qui ne requièrent pas nécessairement une expertise ou technicité militaire, c'est provoquer une situation où on n'évite pas la possibilité, pour un pouvoir, le cas du commandement militaire, d'exercer des pressions sur d'autres par des interférences. Les organes ou autorités doivent être mutuellement indépendants.337(*)

S'il est nécessaire que les civils qui commettent des infractions dirigés contre l'Armée et la Police et ceux qui commettent des infractions aux moyens d'armes de guerre notamment les vols à mains armées, des mouvements insurrectionnels avec port d'armes et munitions, soient jugés par ceux qui connaissent et ont la maitrise sur la manipulation d'armes et munitions de guerre; de le ferenda, le législateur pourra élargir les compétences du Parquet militaire, lui permettant d'instruire sous l'oeil vigilent du juge concerné, tant pour les infractions commises par les militaires que celles commises par les civils, à la condition de renvoyer l'inculpé par une décision de renvoi devant son juge naturel.

Cela revient à dire que si un civil commun une infraction à caractère purement militaire, l'instruction préparatoire pourra se faire au Parquet militaire sous le contrôle du parquet ordinaire équivalent ou approximativement supérieur pour éviter les interférences du commandement militaire, et à la clôture de l'instruction, si le magistrat militaire chargé de la cause estime qu'il des indices de culpabilité susceptible à établir la condamnation, renverra simplement son inculpé devant son juge ordinaire compétent. En cas de connexité d'une même infraction ou des poursuites contre les civils et les militaires en participation, c'est la juridiction ordinaire compétent du rang le plus élevé qui connaitra de l'affaire, ce à la lumière de la disposition de l'article 100 de la loi organique du 11 avril 2013 sur les juridictions de l'ordre judiciaire.

Ainsi donc, rien ne peut justifier une quelconque hypothèse de traduction des personnes civils devant le juge des Forces armées qui du reste n'est en réalité qu'un disciplinaire plutôt qu'un juge de pure justice.

Cependant, il convient d'affirmer avec force qu'aux regards des dispositions du droit positif interne et des instruments juridiques internationaux qui d'ailleurs font partie du droit interne au nom du monisme congolais, les civils ne peuvent pas en temps de paix tout comme en temps de guerre malgré l'hypothèse des circonstances exceptionnels, être déférés devant une juridiction militaire. Cela se justifie par le fait que la Constitution de la République dans son article 156 alinéa 1er, a expressément limiter la compétence des Juridictions militaires. Cela aussi se justifie du fait de déphasage des Codes pénal et judiciaire militaires à l'évolution du Droit constitutionnel congolais et du Droit international en la matière. Aussi, fort est de rappeler l'incidence des dispositions de ces deux codes contenant la peine de mort et celles obligeant de la prononcer dans certains cas, sur la protection et la promotion des droits et du bien-être de l'Homme (hommes, femmes et enfants nés et à naître) devenues un cheval de bataille pour tous les États modernes et civilisés.

De ce fait donc, tout civil qui se verra traduit devant un juge militaire pour quelque motif que ce soit, si ce juge ne le renvois pas devant un juge ordinaire compétent, et se verra appliquer une disposition condamnant à la peine de mort, devrait saisir le juge constitutionnel pour l'inconstitutionnalité tant de la compétence du juge que de la loi lui appliquée. C'est ce qui est démontré sans conteste dans les lignes qui composent cet opus.

Enfin, l'assainissement de la justice tant civil et que militaire, consistera pour sauvegarder l'image d'un État de droit et aussi un État démocratique, en l'abolition pure et simple de la peine de mort, peine de la honte et de pire sacrilège qui fait du juge un assassin légaliste en commettant lui-même un crime contre celui qu'il qualifie de criminel par sa décision. Le toilettage de toute disposition légale donnant la possibilité de condamnation à des peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants s'avère indispensable.

Cicéron n'avait-il pas raison de dire que «  si l'âme ne pressentait rien pour l'avenir et si les frontières qui tiennent enclos l'espace de la vie servaient aussi de limites à toutes ses pensées, l'homme ne s'épuiserait pas à de si durs labeurs, il ne se tourmenterait pas dans tant de soucis et de veilles, il n'exposerait pas si souvent jusqu'à sa vie? »338(*)

En somme, l'évolution moderne des idées en faveur d'une plus grande justice et d'un meilleur respect de la liberté et de la dignité de la personne humaine exige un nouvel aménagement du Droit pénal militaire.339(*) Et la Justice militaire, doit rester dans les limites des camps militaires sans sortir de ses limites. Les civils n'ont pas besoin d'un juge militaire, juge de discipline, le droit n'étant nullement la morale.

Bibliographie

I. Textes Officiels.

A. Textes internationaux.

1. Charte Africaine des droits et du bien-être de l'enfant (Décret-loi n° 007/01 du 28 mars 2001).

2. Charte Africaine des droits de l'Homme et des Peuples (O-L n° 87-027 du 20 juillet 1987).

3. Déclaration Universel des Droits de l'Homme (Résolution 217A/III du 10 décembre 1948).

4. Pacte international relatif aux Droits civils et politiques (Résolution 2200A/XXI du 16 décembre 1966).

5. Statut de Rome de la CPI (D-L n° 013/2002 du 30 mars 2002).

B. Textes congolais.

1. Constitution de la République démocratique du Congo du 18 février 2006.

2. Décret du 30 janvier 1940 tel que modifié à ce jour portant Code pénal congolais.

3. Loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.

4. Loi n° 023/2002 du 18 novembre 2002 portant Code judiciaire militaire.

5. Loi n° 024/2002 du 18 novembre 2002 portant Code pénal militaire.

II. Jurisprudence.

1. CSJ, RA 5 et 33, 04 juin 1973, B.A., p.133.

2. Cour Militaire de Kinshasa-Matete, Auditeur Militaire Supérieur contre Munganda Kimbao Joël et consorts, RP 036/07, 22 décembre 2007.

3. Haute Cour Militaire sous le RP n° 003/09, HCM, 10 septembre 2010, B.A. /HCM, Années 2003-2010, 2ème Edition, p.15.

4. Tribunal Militaire de Garnison de Kinshasa-Gombe, Auditeur militaire c/ N'landu Mpolo Nene et consorts, RP 221/2006, 30 avril 2007 et Tribunal Militaire de Garnison de Bukavu, Auditeur Militaire contre Bokumbe Arthur et consorts RP NO 186/2007, 28 août 2007.

5. TMG Kinshasa-Gombe, jugement du 19 février 2013. RP 483/012, RMP 3787/NDV/12 Inédit. Disponible auprès de l'auteur.

6. Principes et Directives de la Commission Africaine des droits de l'Homme et des Peuples de 1992.

III. Doctrine.

A. Ouvrages.

1) Ouvrages Généraux.

1. AKELE ADAU (Pierre) et SITA MUILA AKELE (Angélique), Les crimes contre l'humanité en Droit congolais, CEPAS, Kinshasa, 2008, 80 pages.

2. AMISY HERADY, Droit civil, Volume I : les personnes, les incapacités, la famille, 1ère édition, EDUPC, Kinshasa, 2013, 526 pages.

3. BADINTER (Robert), Contre la peine de mort, Fayard, Paris, 2006, 320 pages.

4. BALANDA MIKUIN LELIEL (Gérard), Le Droit des Organisations Internationales : Théorie générale, CEDI, Kinshasa, 613 pages.

5. BOKOLOMBE BATULI YASEME (Sam), De la Prévention et de la répression des violations graves du Droit international humanitaire en R.D. Congo. Critique de la responsabilité pénale internationale, DES, Kinshasa, 2013, 539 pages.

6. CIZUNGU MUGARUKA NYANGEZI (Laurent), Les infractions de A à Z, Nomenclature, Eléments constitutifs, Régime répressif et jurisprudence, Edition Laurent NYANGEZI, Collection Connaissance et Chemin de la Justice, Kinshasa, 2011, 863 pages.

7. CORNU (Gérard), Vocabulaire juridique, PUF, Paris, 2011, 1095 pages.

8. DJOLI ESENG'EKELI (Jacques), Droit constitutionnel, Tome 1 : Principes Structuraux, Deuxième édition revue et augmentée, Collection DES, EUA, Kinshasa, 2012, 239 pages.

9. ESAMBO KANGASHE (Jean-Louis), Le Droit constitutionnel, Academia-L'harmattan, Louvain-La-Neuve, 2013, 319 pages.

10. FOFÉ DJOFIA MALEWA (Jean-Pierre), Justice pénale et Réalités sociétaires. De l'analyse du modèle R.D. Congo à la formulation d'une politique criminelle participative, L'Harmattan, Paris, 2007, 497 pages.

11. LUZOLO Bambi Lessa (Emmanuel-Janvier) et BAYONA ba Meya (Nicolas-Abel), Manuel de Procédure pénale, PUC, Kinshasa, 2011, 810 pages.

12. MBATA BETUKUMESU MANGU (André), Abolition de la peine de mort et constitutionnalisme en Afrique, L'Harmattan, Paris, 2011, 197 pages.

13. MPONGO BOKAKO BAUTOLINGA (Edouard), Institutions politiques et Droit constitutionnel, Collection ``DES'', EUA, Kinshasa, 2001, 328 pages.

14. MUKENDI WAFWANA (Emery) et Alii, Les Constitutions de la République démocratique du Congo de 1908 à 2011, Collection Juridoc, JURICONGO, Kinshasa, 2011, 284 pages.

15. NGOMA BINDA (Prosper) et Alii, Démocratie et participation à la vie politique : une évaluation des premiers pas dans la IIIème République, Une étude d'AfriMAP et de OSISA, Kinshasa, 2010, 264 pages.

16. NTUMBA LUABA LUMU, Droit Constitutionnel Général, EUA, Kinshasa, 2007, 383 pages.

17. PRADEL (Jean), Droit pénal Général, 19ème édition revue et augmentée, CUJAS, Paris, 2012, 756 pages.

18. SHOMBA KINYAMBA (Sylvain), Méthodologie de la Recherche scientifique : les ficelles de captage et les logiques d'analyses des données, PUK, Kinshasa, 2012, 223 pages.

19. TROPER (Michel), La Philosophie du Droit, PUF, Paris, 2011, 126 pages.

20. VUNDUAWE te PEMAKO (Félix), Traité de Droit administratif, Afrique éditions, Larcier, Bruxelles, 2007, 953 pages.

2) Ouvrages Spéciaux.

1. KAMBALA MUKENDI (Jean-Isaac Camille), Éléments de Droit judiciaire militaire congolais, EUA, Kinshasa 2009, 298 pages.

2. LIKULIA BOLONGO (Norbert), Droit pénal militaire zaïrois, Tome Premier : L'Organisation et la Compétence des Juridictions des Forces Armées, LGDJ, Paris, 1977, 282 pages.

3. Luhonge KABINDA NGOY et Alii, Les Codes Larcier de la République démocratique du Congo, Tome I : Droit civil et judiciaire, Larcier, Bruxelles, 2003, 485 pages.

4. MUTATA LUABA (Laurent), Droit pénal militaire congolais. Des peines et incriminations de la compétence des juridictions militaires en R.D. Congo, 2ème édition, Editions du Ministère de la Justice et Droits Humains, Kinshasa, 2012, 1011 pages.

5. NYABIRUNGU mwene SONGA, Droit international pénal : Crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité, DES, Kinshasa, 2013, 1054 pages.

6. WETSH'OKONDA KOSO (Marcel), République démocratique du Congo : La Justice militaire et le respect des droits de l'Homme. L'urgence du parachèvement de la réforme, Une étude d'AfriMAP et de OSISA, Johannesburg, 2009, 89 pages.

B. Cours, Thèses, Mémoires et autres publications.

1. AKELE ADAU (Pierre), Réforme du Code pénal congolais : A la recherche des options fondamentales du Code pénal congolais, Tome II, (sous la direction de), CEPAS, Kinshasa, 2008, 725 pages.

2. Annales de la Faculté de Droit, PUK, Kinshasa, 2007, 421 pages.

3. Anthologie 5 refondue et enrichie de questionnaires, CRP, Kinshasa, 2000, 400 pages.

4. CNS, Rapport sur les Assassinats et violations des Droits de l'Homme : Livre 2 Deuxième République, Commission des Assassinats et violations des Droits de l'Homme, Palais du Peuple, Kinshasa 1992, in YERODIA ABDOULAYE NDOMBASI, « Qui est qui ? Qui a fait quoi ? », Kinshasa, 2004, 216 pages.

5. Fédéralisme et Régionalisme, Liège, 2004-2005, 215 pages.

6. La consolidation du cadre démocratique en R.D. Congo, Modules de renforcement des capacités à l'intention des Institutions parlementaires, PNUD, Kinshasa, 2012, 328 pages.

7. La Justice Militaire Congolaise, Recueil de Modules de formation à l'intention des Officiers d'État Major des FARDC, RDC, MONUC, Kinshasa, 2010, 107 pages.

8. Le Petit Larousse illustré 2010, Larousse, Paris, 2009, 1808 pages.

9. KALUBA DIBWA (Dieudonné), Du Contentieux Constitutionnel en République démocratique du Congo. Contribution a l'étude des fondements et des modalités d'exercice de la justice constitutionnelle, Thèse de Doctorat en Droit, UNIKIN, 2009-2010, 533 pages.

10. KIENGE-KIENGE INTUDI (Raoul), Cours d'Initiation à la Recherche Scientifique, Faculté de Droit, UNIKIN, 2009-2010, 122 pages. Inédit.

11. MWANZO idin'AMINYE (Eddy), Cours d'Initiation à la Recherche Scientifique, Faculté de Droit, UNIKIN, 2012. Inédit.

12. TONA MBENZA (Alphonse), La compétence des Juridictions Militaires à l'égard des personnes non-militaires, Mémoire de Graduat, ISEJC, Kananga, 1992, 44 pages. Inédit.

13. TSHILOMBO SEND (Toussaint), Education à la citoyenneté, Notes de Cours 1er Graduat, Université de Kinshasa, Université protestante au Congo, Océan, Kinshasa, 2013, 152 pages.

14. WANE BAMEME (Bienvenu-Alphonse), La justice pénale internationale face aux Etats : cas de la République démocratique du Congo, Mémoire de DES, Département de Droit pénal et de Criminologie, Faculté de Droit de l'UNIKIN, 2003-2005.

- Cours de Droit pénal et Procédure pénale Militaires, Faculté de Droit, Département de Droit Privé et Judiciaire, Troisième Graduat, UNIMBA, 2010-2011, Inédit.

- La Responsabilité pénale pour crime de guerre. Etude comparée des Droits français et congolais, Thèse de Doctorat en Droit, Aix-Marseille Université, France, 14 mai 2012, 627 pages, Inédit.

IV. Webographie.

www.legifrance.gov.fr

www.google.com

www.afrimap.org/english/images/treaty/ACHPR_Directives&Principes_ProcesEquitable, Consulté le 08 octobre 2013.

http://www.barreaudelagombe.cd/index.php?option=com_content&... Consulté le 08 octobre 2013, 13 heures 00'.

http//:www.Kongo Times! Consulté le 10 octobre 2013, 08 heures 16'.

http://centrafrique-presse.over-blog.com/article-dongo-rdc-une-insur. Consulté le 30/10/2013, 14 heures :44'

http//:www.africarabia2.blogs.courrierinternational.com/archive/2009/12/...consultaiondu 30/10/2013, 14 heures 38 `

http://reliefweb.int(report)demoicratic-republic-congo/rdc-cesoirrr...consultationdu30/10/2013,14heures 42'.

http://radiotvlavde.wordpress.com/2009/07/27/rdc-la-haute-cour-mil...Consulté le 30/10/2013, 14 heures 35'.

http://radiotv.wordpress.com/2009/07/27/rdc-la-haute-cour-mil...

http://fr.wikipedia.org/wiki/initiative-populaire, consulté le 08/10/2013, 12 heures 08'

http://acap-cf-info/centrafrique-société, consulté le 09/11/2013, 14 heures 52'.

http://www.cours-de-droit.net/cours-de-droit-penal Consulté le 12/11/2013 à 15 heures 42'.

Tables des Matières

Epigraphe i

In memoriam iii

Dédicace Erreur ! Signet non défini.

Remerciements v

Liste des Principales Abréviations vii

Sommaire ix

Introduction générale 1

O1. Problématique. 1

02. Intérêt du Sujet. 4

A. Intérêt théorique. 4

B. Intérêt pratique. 4

03. Délimitation de l'étude. 5

04. Méthodes et Techniques d'approche. 5

A. Méthodes. 5

B. Techniques de Recherche. 7

PARTIE I: 8

Chapitre 1er : La compétence des Juridictions militaires congolaises face aux civils en temps de paix. 14

Section 1ère : Du personnel civil oeuvrant ou embarqué au sein des Forces armées ou de la Police nationale. 17

§1er : Du personnel civil des Forces armées ou de la Police nationale. 18

A. Personnes concernées. 18

B. Les infractions visées dans le Code judiciaire militaire. 20

a. Les infractions prévues par le Code pénal militaire. 21

1. Abus du droit de réquisition. 21

2. Des faux, falsification, détournements, concussions et corruptions. 21

3. La divulgation des informations secrètes. 23

4. De l'usurpation d'uniformes, décorations, signes distinctifs et emblèmes. 24

5. De la rébellion. 24

6. Du refus d'obéissance. 25

7. Des voies de fait et outrages envers des supérieurs. 25

8. Des insultes à sentinelle. 25

9. Des infractions aux consignes. 25

10. Du défaut de dénonciation d'une infraction relevant de la juridiction militaire. 26

11. De la non-assistance à personne en danger. 26

b) Infractions de Droit commun. 27

§2ème : Des individus à bord des embarcations des Forces armées ou de la Police. 29

A. Personnes concernées. 30

B. Infractions visées. 31

a) Les infractions au Code pénal militaire. 31

1. De la désertion à l'ennemi ou en présence de l'ennemi. 31

2. Des pillages. 31

3. Des destructions. 32

4. De la rébellion, du refus d'obéissance, des voies de fait et outrages envers des supérieurs, de l'insulte à sentinelle, de la violation des consignes, de l'abstention de dénoncer une infraction relevant de la compétence des juridictions militaires, du refus d'assistance à personne en danger(...). 32

b) Infractions de Droit commun. 33

Section 2ème : Des civils impliqués aux infractions militaires. 33

§1er : Assistance ou incitation des militaires et Policiers. 34

A. Notions. 34

B. Etudes des cas. 34

§2ème : Des civils coupables des infractions dirigées contre l'Armée, des infractions commises au moyen d'armes de guerre et des dispositions diverses. 37

A. Des infractions dirigées contre l'Armée et la Police nationale. 37

1. Outrage à l'armée. 38

2. Des destructions. 38

3. De l'usurpation de commandement, de la levée des Forces armées et de l'incitation à s'armer illégalement. 39

4. Des atteintes à la sécurité des Forces armées et aux zones protégées intéressant la défense nationale. 39

5. De la contrefaçon ou falsification des sceaux, timbres, poinçons, marques(...). 39

6. De l'usurpation de fonctions publiques. 40

7. Du port illégal de décorations. 40

8. De l'association formée dans le but d'attenter aux personnes et aux propriétés. 40

B. Des infractions commises au moyen d'armes de guerre. 41

1. Participation à un mouvement insurrectionnel. 41

2. Du Terrorisme. 42

3. La détention illégale d'armes et munitions de guerre. 42

4. Vol à main armée. 42

5. De la fourniture d'armes, munitions, instruments d'infraction à une bande ou une association de malfaiteurs. 43

6. De la trahison. 43

7. Infraction contre l'autorité de l'Etat. 43

C. Extension de compétence résultant des dispositions diverses. 43

1. De l'insoumission. 48

2. De la provocation à la désertion et du recel de déserteur. 48

3. De la mutilation volontaire. 49

4. Des pillages. 49

5. Des faux et falsifications. 49

6. De l'espionnage. 50

7. Des détournements et corruptions. 50

Chapitre 2ème : La Compétence des Juridictions Militaires congolaises face aux civils en période troublée. 52

Section 1ère : La compétence des Juridictions Militaires face aux civils pendant la guerre. 52

§1er : Notions. 52

A. La Guerre. 53

B. L'état de siège. 54

C. Etat d'urgence. 55

§2ème : Etendu des compétences dites exceptionnelles des juridictions militaires. 56

A. Application de l'extension de compétence des juridictions militaires résultant du temps de guerre, de l'état de siège ou d'urgence. 57

B. Les infractions prévues par le Décret-loi du 24 novembre 1964. 59

Section 2ème : Pendant l'insurrection. 63

§1er : Des civils participants à une insurrection. 64

A. État de la question en Droit pénal congolais. 65

B. Cas de l'insurrection des Enyele et Monzaya dirigée par Udjani et Ibrahim Mangbama. 65

§ 2ème : Des civils qui apportent assistance aux insurgés. 68

A. Position du problème. 68

B. Critiques. 69

PARTIE II: 72

Chapitre 1er : Incompétence tirée des sources normatives. 74

Section 1ère : En Droit congolais. 75

§1er : Textes des lois. 75

A. Dispositions purement internes. 75

B. Dispositions internationales consacrées en Droit interne. 81

§2ème : Doctrine et Jurisprudence. 87

A. Doctrine. 88

B. Jurisprudence. 98

Section 2ème : En Droit comparé. 105

§1er : Textes de lois. 106

§2ème : État de la question. 108

Chapitre 2ème : Incompétence tirée de la nécessité de la sauvegarde des Droits de l'Homme. 111

Section 1ère : Problématique de la composition du siège des Juridictions militaires. 112

§1er : Insuffisance des Magistrats de carrière dans les Juridictions Militaires. 113

A. Composition du siège dans les Juridictions Militaires. 113

B. Incidence de cette insuffisance sur les droits de l'Homme. 115

§2ème : Présence des Juges assesseurs militaires non-juristes. 117

A. Le travail des juges assesseurs militaires. 119

B. Leur qualité et l'incidence sur les droits de l'Homme. 121

Section 2ème : Les droits mis en jeu. 125

§1er : Au niveau du Prévenu. 125

A. Menace de la mauvaise conception du Droit pénal sur les droits de l'Homme. 126

B. Cas particulier de la peine de mort. 129

§2ème : Au niveau de la victime. 141

A. Position du Problème. 141

B. Droits de la victime de l'infraction dans un procès pénal. 142

Conclusion Générale 145

Bibliographie 149

Tables des Matières 154

* 1 Exposé des motifs des lois n° O23 et 024/2002 du 18 novembre 2002 portant Code judiciaire et Code pénal militaires, in JORDC, 44ème Année, Numéro Spécial, Kinshasa, 20 mars 2003, p.5.

* 2 Général N. LIKULIA BOLONGO, Droit pénal militaire zaïrois, Tome premier, L'organisation et la Compétence des Juridictions des Forces armées, LJDJ, Paris, 1977, p.2.

* 3 J.I.C. KAMBALA MUKENDI, Eléments de Droit judiciaire militaire congolais, EUA, Kinshasa, 2009, p.15.

* 4 In http://www.afrimap.org/english/images/treaty/ACHPR_Directives&Principes_ProcesEquitable, Consulté le 08 octobre 2013.

* 5 In L. MUTATA LUABA, Droit pénal militaire congolais. Des peines et incriminations de la compétence des juridictions militaires en R.D. Congo, Editions du Service de documentation du Ministère de la Justice et Droits humains, 2ème édition, Kinshasa, 2012, p.34.

* 6 E.J. LUZOLO Bambi Lessa et N.A. BAYONA ba Meya, Manuel de Procédure pénale, PUC, Kinshasa, 2011, p.27.

* 7 F.TULKENS, «Politique criminelle et droits de l'Homme en Afrique », in P.AKELE ADAU (sous dir.), Réforme du Code pénal congolais. A la recherche des options fondamentales du Code pénal, Tome II, CEPAS, Kinshasa, 2008, p.86.

* 8 J.DJOLI ESENG'EKELI, Droit constitutionnel, Tome 1 : Principes Structuraux, Deuxième édition revue et augmentée, Collection DES, EUA, Kinshasa, 2012, p.27.

* 9 P.AKELE ADAU et A.SITA MUILA AKELE, Les crimes contre l'humanité en droit congolais, CEPAS, Kinshasa, 1999, p.7.

* 10 E.MWANZO idin'AMINYE, Cours d'Initiation à la Recherche Scientifique, Deuxième année de Graduat, Faculté de Droit, UNIKIN, 2009-2012. Inédit.

* 11 S.SHOMBA KINYAMBA, Méthodologie de la Recherche Scientifique, les ficelles de captage et les logiques d'analyse des données, PUK, Kinshasa, 2012, p.28.

* 12 Cité par R. KIENGE-KIENGE INTUDI, Cours d'Initiation à la Recherche Scientifique, Deuxième année de Graduat, Faculté de Droit, UNIKIN ,2009-2010, p.13. Inédit.

* 13 P-C. KASONGO MUIDINGE MALUILO, « La place des coutumes dans le nouveau Droit pénal congolais », in P.AKELE ADAU, op.cit., p.168.

* 14 J.DJOLI ESENG'EKELI, op.cit., p.27.

* 15 P.C.KASONGO, art.cit., p. 168.

* 16 S.SHOMBA KINYAMBA, Méthodologie de Recherche Scientifique, Edition MES, Kinshasa, 2003, p.60.

* 17 G. CORNU, Vocabulaire juridique, PUF, Paris-Quadrige, 2011, pp.210-212.

* 18 In idem loco, p.584.

* 19 M.WETSH'OKONDA KOSO, La justice militaire et le respect des droits de l'homme : L'urgence du parachèvement de la réforme. Une étude d'AfriMAP et de l'Open Society Initiative for Southern Africa, UNE PUBLICATION DU RÉSEAU OPEN SOCIETY INSTITUTE, Kinshasa, 2009, pp.35-36.

* 20 M. WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., p. 3.

* 21 Article 17, Loi sur le Gouvernement du Congo-belge, in E.MUKENDI MAFWANA et Alii, Les Constitutions de la République démocratique du Congo de 1908 à 2011, JURICONGO, Collection JURIDOC, Kinshasa, 2011, p.12.

* 22 Article 191, Loi fondamentale de 1960, in idem loco, p.34.

* 23 Article 124, Constitution du 1er août 1964, ibidem, p.73.

* 24 In Les Constitutions de la République démocratique du Congo de 1908 à 2011, op.cit., pp.12-96.

* 25 General N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.9.

* 26 In idem loco.

* 27 ibidem p.15.

* 28 Ibidem p.16.

* 29 J.D. MOBUTU, cité par Général N. LIKULIA BOLONGO, ibidem, p.17.

* 30 Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.165.

* 31 Article 59, Constitution de la République démocratique du Congo du 24 juin 1967 telle qu'elle fut plusieurs fois révisée.

* 32 Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.24.

* 33 L. MUTATA LUABA, op.cit., p.142.

* 34 E.J. LUZOLO Bambi Lessa et N.A. BAYONA ba MEYA, op.cit., p.309.

* 35 In Luhonge KABINDA NGOY et Alii, Les Codes Larcier de la République démocratique du Congo, Tome I : Droit civil et judiciaire, Larcier, Bruxelles, 2003, p.395.

* 36 Article 73, Code judiciaire militaire précité.

* 37 Article 74 CJM

* 38 Article 76, alinéas 1 et 2, CJM.

* 39 Article 79, CJM.

* 40 Article 104, CJM.

* 41 Article 120, CJM.

* 42 Article 121, in idem loco.

* 43 Article 108, CJM.

* 44 F. VUNDUAWE te PEMAKO, Traité de Droit Administratif, Afrique éditions, Larcier, Bruxelles, 2007, p.586.

* 45 In idem loco p.597.

* 46 F. VUNDUAWE te PEMAKO, op.cit., p.597.

* 47F. VUNDUAWE te PEMAKO, op.cit., p.588.

* 48 Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.169.

* 49 In idem loco p.167.

* 50 F. VUNDUAWE te PEMAKO, op.cit., p.601.

* 51 Article 110, CPM.

* 52 Article 74, CPM.

* 53 R. BADINTER, Contre la peine de mort, Editions Fayard, Paris, 2006, p.12.

* 54 Article 75 CPM.

* 55 Article 189, CPM.

* 56Article 149, alinéa 1, CPM.

* 57Article 150, alinéa 1, CPM.

* 58L. CIZUNGU MUGARUKA NYANGEZI, Les infractions de A à Z : nomenclatures, éléments constitutifs, régime répressif et jurisprudence, Collection connaissance et chemin de la Justice, Edition Laurent NYANGEZI, Kinshasa, 2011, p.315.

* 59In Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.172.

* 60Article 91, alinéa 1, CPM.

* 61 Alinéa 1 de l'article 93, CPM.

* 62 Article 95, alinéa 1, CPM.

* 63 Article 113, alinéa 2, CPM.

* 64 Article 195, CPM.

* 65 Article 187, CPM.

* 66 Article 66 du décret du 30 janvier 1940 portant Code pénal ordinaire tel que modifié et complété en date du 30 novembre 2004, in JORDC, 4ème année, Numéro spécial, Kinshasa, 2004, p.16.

* 67(Le zaïre monnaie a été depuis 1997 remplacé par le Franc congolais, mais le législateur n'a pas encore actualisé pour qu'on ait des équivalences nettes).

* 68 Article 66 ter, CPO.

* 69 Article 188, CPM.

* 70 Article 108 déjà cité, CJM.

* 71 N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.176.

* 72 Article 113 CPM.

* 73 General N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.178.

* 74 In idem loco p.179.

* 75 Article 112, alinéas 1 et 2, CJM.

* 76 J.I.C. KAMBALA MUKENDI, op.cit., p.93.

* 77 Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.180.

* 78 L. MUTATA LUABA, op.cit., p.184.

* 79 Article 51, alinéa 1er, CPM.

* 80 L. MUTATA LUABA, op.cit., pp.184-185.

* 81 In idem loco p.242.

* 82 Article 64 alinéa 2, CPM.

* 83Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.186.

* 84 Article 103, CPO.

* 85 Article 112.7 et 8, CJM.

* 86 L. MUTATA LUABA, op.cit., p.154.

* 87 Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.187.

* 88 Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.188.

* 89 Radio Okapi, in http://www.barreaudelagombe.cd/index.php?option=com_content&... Consulté le 08 octobre 2013, 13 heures 00'.

* 90 TMG Kinshasa-Gombe, jugement du 19 février 2013. Inédit. Disponible auprès de l'auteur.

* 91 L. MUTATA LUABA, op.cit., p.471.

* 92 Article 111 alinéa 2, CJM.

* 93 Article 112, 7 b, CJM.

* 94Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.189.

* 95 Général N.LIKULIA BOLONGO, op.cit., p. 189.

* 96 Article 87 CPM.

* 97 Alinéa 2, article 69, CPM.

* 98 Article 140, alinéas 1 et 2, CPM.

* 99 Article 85, CPM.

* 100 Article 156, CPO.

* 101 Article 157.3, CPM.

* 102 HCM, 10 septembre 2010, B.A. /HCM, Années 2003-2010, 2ème Edition, p.15. In CIZUNGU MUGARUKA NYANGEZI, op.cit., p.301.

* 103 In http//:www.Kongo Times! Consulté le 10 octobre 2013, 08 heures 16'.

* 104 Article 81 bis, CPO.

* 105 Article 79, CPO.

* 106 Article 76 alinéa 1er, CJM.

* 107 Article 112 in fine CJM.

* 108 Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., pp.186-189.

* 109 Article 79 CJM.

* 110 Article 207, CPM.

* 111 Article 117, CJM.

* 112 Article 119, CJM.

* 113 Article 161, CPM.

* 114 Article 115, CJM.

* 115 J.M. TASOKI MANZELE, « L'exécution des demandes d'arrestation et de remise du juge pénal international. A propos de la politique d'adaptation de la législation congolaise au statut de Rome de la C.P.I.», in Les Annales de la Faculté de Droit sous la Direction de G. BAKANDEJA wa MPUNGU et O. NDESHYO RURIHOSE, PUK, Kinshasa, 2007, p.141.

* 116 In idem loco p.140.

* 117 J.M. TASOKI MANZELE, art.cit., pp.141-142.

* 118 R. NYABIRUNGU mwene SONGA, Droit international pénal : Crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité, Editions Droit et Société ``DES'', Kinshasa, 2013, p.3.

* 119 M. WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., p.21.

* 120B-A. WANE BAMEME, La justice pénale internationale face aux Etats : cas de la République démocratique du Congo, Mémoire de DES, Département de Droit pénal et de Criminologie, Faculté de Droit de l'UNIKIN, 2003-2005, p.230.

* 121 Article 91 de la Loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l'ordre judiciaire, in JORDC, Numéro spécial du 4 mai 2013, Kinshasa, p.24.

* 122 Article 54 CPM.

* 123 Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.193.

* 124 Article 56 CPM.

* 125 Article 64 alinéa 2, CPM.

* 126 Article 1er, alinéa 4, Protocole additionnel I de 1197, complétant et modifiant la Convention de Genève du 12 août 1949 sur le traitement des prisonniers de Guerre.

* 127 Article 2.11, Loi n° 04/023 du 12 novembre 2004 portant organisation générale de la Défense des Forces armées, déjà citée, p.8.

* 128 L. MUTATA LUABA, op.cit., pp.146-147.

* 129 Article 129 CJM.

* 130 Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.223.

* 131 L. MUTATA LUABA, op.cit., p.143.

* 132 Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.207.

* 133 In idem loco.

* 134 D.A. NTUMBA LUABA LUMU, Droit Constitutionnel Général, EUA, Kinshasa, 2007, p.143.

* 135 In E. MUKENDI WAFUANA et Alii, op.cit., p.13.

* 136 In idem loco p.34.

* 137 http//www.afrimap.org/english/images/treaty/ACHPR-Directives&Principes-ProcesEquitable-FR.pdf

* 138 Article 124, alinéa 1, constitution du 1er août 1964, op.cit., p.73.

* 139 Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.208.

* 140 Commission africaine des droits de l'Homme, In L. MUTATA LUABA, op.cit., p.35.

* 141 Article 3 du Décret-loi du 24 novembre 1964 sur l'Organisation de l'action répressive des juridictions militaires lorsque celles-ci sont substituées aux cours et tribunaux de droit commun, in Les codes Larcier de la République démocratique du Congo, op.cit., p.390.

* 142 Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.221.

* 143 In Les Codes Larcier, op.cit., p. 390.

* 144 Art. 195 CPO

* 145 Art. 196 CPO

* 146 Art. 19 CPO

* 147 Art. 201 CPO

* 148 Art. 135bis CPO

* 149 Art. 211 CPO

* 150 G. BALANDA MIKUIN LELIEL, Le Droit des Organisations internationales : Théorie générale, Editions CEDI, Kinshasa, pp.187-188.

* 151 Le Petit Larousse illustré 2010, Larousse, Paris, 2009, p.542.

* 152 N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.221.

* 153 In Les codes Larcier de la République Démocratique du Congo.

* 154 Article 1er de l'ordonnance précitée.

* 155 Article 2, in idem loco.

* 156 L. MUTATA LUABA, op.cit., p.448.

* 157 http://centrafrique-presse.over-blog.com/article-dongo-rdc-une-insur. Consulté le 30/10/2013, 14 heures :44'

* 158 In idem loco.

* 159 http//:www.africarabia2.blogs.courrierinternational.com/archive/2009/12/...consultaiondu 30/10/2013, 14 heures 38 `

* 160 http://reliefweb.int(report)demoicratic-republic-congo/rdc-cesoir-arr...consultationdu30/10/2013,14heures 42'.

* 161 Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.221.

* 162 LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.222.

* 163 G MINEUR, Commentaire du code pénal congolais, 2ème édition, Bruxelles, 1953, p.80, cité par L. MUTATA LUABA, op.cit., pp. 22-23.

* 164 Article 22 CPO Livre I.

* 165 In L. MUTATA LUABA, op.cit., p.80.

* 166 Exposé des motifs, Constitution du 18 février 2006, in MUKENDI WAFUANA, op.cit., p.244.

* 167 M.WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., p.18.

* 168 In idem loco.

* 169 In Constitutions de la RDC de 1908 à 2011, op.cit., p.243.

* 170 Article 215 de la Constitution, in JORDC, Cabinet du Président de la République, 53ème Année, Numéro Spécial, Kinshasa, 29 septembre 2012, p.54.

* 171 Article 221 de la Constitution.

* 172 D.KALUBA DIBWA, Du Contentieux Constitutionnel en République démocratique Du Congo : Contribution à L'étude des Fondements et des Modalités d'exercice de la Justice Constitutionnelle, Thèse de Doctorat en Droit public, Faculté de Droit, Université de Kinshasa, 2009-2010, p.316. Inédit.

* 173 Lire article 162 de la constitution du 18 février 2006.

* 174 Article 6, alinéa 3, Loi organique no 13/011-B du 11 avril 2013, in JORDC, 54ème année, Numéro Spécial, Kinshasa, 4 mai 2013, p.5.

* 175 Article 95 de la loi organique précitée, p.24.

* 176 In http://radiotvlavde.wordpress.com/2009/07/27/rdc-la-haute-cour-mil... Consulté le 30/10/2013, 14 heures 35'.

* 177 Article 99, Loi organique du 11 avril 2013, JORDC, P.5

* 178 B-A.WANE BAMEME, op.cit., p.230.

* 179 Article 153, Loi organique, JORDC, p.36.

* 180 In JORDC, Cabinet du Président de la République, 43ème année, Numéro spécial, 5 décembre 2002, p.7.

* 181 In idem loco p.9.

* 182 In JORDC, op.cit., p.9.

* 183 In idem loco p.169.

* 184 Ibidem.

* 185 Article 77 du Statut de Rome, In JORDC, p. 218.

* 186 In. JORDC, p. 246

* 187 Article 209 CJM.

* 188Article 26 de la Charte africaine des droits de l'Homme et des Peuples, in JORDC, P.250.

* 189Article 30 de la Charte africaine des droits de l'Homme et des Peuples.

* 190 Article 19 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant.

* 191 Article 30 de la Charte des droits et du bien-être de l'enfant.

* 192 L. MUTATA LUABA, op.cit., p.47.

* 193 In idem loco p.35.

* 194 E. MPONGO BOKAKO BAUTOLINGA, Institutions politiques et Droit constitutionnel, Collection Droit et société « DES », EUA, Kinshasa, 2001, p.88.

* 195 In idem loco.

* 196 J.DJOLI ESENG'EKELI, op.cit., p.155.

* 197 P. NGOMA BINDA et Alii, Démocratie et participation à la vie politique : une évaluation des premiers pas dans la IIIème République, une étude d'AfriMAP et de OSISA, Novembre 2010, Kinshasa, p.21.

* 198 M. KUMBU ki NGIMBI et Alii, « La constitution de la RD. Congo », in Modules de renforcement des capacités à l'intention des Institutions parlementaires, PNUD, Kinshasa, 2012, p.13.

* 199 P. VERJANS, Fédéralisme et Régionalisme, Liège, 2004-2005, p.124.

* 200 A ce sujet lire le Général N.LIKULIA BOLONGO, op.cit., pp.4-6.

* 201 L. MUTATA LUABA, op.cit., p.34.

* 202 NYABIRUNGU mwene SONGA, Droit international pénal : crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité, Éditions DES, Kinshasa 2013, p.197.

* 203In idem loco p. 28

* 204 R.NYABIRUNGU mwene SONGA, op.cit., p.195.

* 205 B-A.WANE BAMEME, op.cit., p.201.

* 206 R. NYABIRUNGU mwene SONGA, op.cit., pp.195-196.

* 207 J. DJOLI ESENG'EKELI, « Les éléments de la politique criminelle découlant de la Constitution de la troisième République », in AKELE ADAU, op.cit., p.240.

* 208 P.AKELE ADAU, « Professer un droit positif moniste...» in La Pertinence de la Recherche en criminologie dans le contexte de la RDC, en hommage à Madame IDZUMBUIR ASSOP Marie -Joséphine, Professeur Émérite, à l'occasion de la réouverture du Centre de Criminologie et de Pathologie Sociale à la Faculté de Droit de l'UNIKIN, jeudi 16 mai 2013, Inédit.

* 209 M.WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., p.31.

* 210 P. AKELE ADAU, « Le nouveau Droit judiciaire et pénal militaire transitoire, un soft landing pour la Cour d'ordre militaire », in Congo Afrique..., cité par M.WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., p.31.

* 211 M.WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., p.10.

* 212 J.I.C. MUKENDI KAMBALA, op.cit., p.228.

* 213 R. NYABIRUNGI Mwene SONGA, op.cit., pp.175-198.

* 214 E.J. LUZOLO Bambi Lessa et BAYONA ba Meya, op.cit., pp.749-750.

* 215 E.J. LUZOLO Bambi Lessa et BAYONA ba Meya, op.cit., p. 750.

* 216 B-A.WANE BAMEME, op.cit., p.230.

* 217 R. NYABIRUNGU mwene SONGA, op.cit., pp.197-198.

* 218 R. NYABIRUNGU mwene SONGA, op.cit., p.142.

* 219 D.KALUBA DIBWA, op.cit., p.350.

* 220 R. NYABIRUNGU mwene SONGA, op.cit., p.196.

* 221 S. BOKOLOMBE BATULI YASEME, De la Prévention et de la répression des violations graves du droit international humanitaire en RD Congo. Critique de la responsabilité pénale internationale, DES, Kinshasa, 2013, p.123.

* 222 Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p.2.

* 223 A. BULA KASOLA, « La Justice militaire congolaise », in Recueil des modules de formation à l'intention des Officiers d'État-major des FARDC, RDC, MONUC, 2010, p.47.

* 224 A.TONA MBENZA, La compétence des Juridictions militaires, Mémoire de Graduat, Institut Supérieur d'Études Juridiques et de Criminologie (ISEJC), Kananga, 1992, pp.38-41.

* 225 LIKULIA BOLONGO, Cité par L. MUTATA LUABA, op.cit., p.20.

* 226 In idem loco p.33.

* 227 M.WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., p.10.

* 228 In idem loco.

* 229 CSJ, RA 5 et 33, 04 juin 1973, B.A., p.133. , arrêt cité par L. MUTA LUABA, op.cit., pp. 37-38.

* 230 E.J. LUZOLO Bambi Lessa et N.A. BAYONA ba Meya, op.cit., p. 697.

* 231 Lire Avis n° 170 de la Cour permanente de justice internationale, Affaire de la compétence des tribunaux de Dantzig, repris par D.KALUBA DIBWA, op.cit, pp 387-388.

* 232 D.KALUBA DIBWA, in idem loco, p. 388.

* 233 J.L. ESAMBO KANGASHE, Le Droit constitutionnel, Academia-L'harmattan, Louvain-La-Neuve, 2013, p. 94.

* 234 J.DJOLI ESENG'EKELI, op.cit., p. 155.

* 235 http://radiotv.wordpress.com/2009/07/27/rdc-la-haute-cour-mil...

* 236 Tribunal Militaire de Garnison de Kinshasa-Gombe, Auditeur militaire c/ N'landu Mpolo Nene et consorts, RP 221/2006, 30 avril 2007 et Tribunal Militaire de Garnison de Bukavu, Auditeur Militaire contre Bokumbe Arthur et consorts RP NO 186/2007, 28 août 2007, cités par M.WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., p. 37.

* 237 Cour Militaire de Kinshasa-Matete, Auditeur Militaire Supérieur contre Munganda Kimbao Joël et consorts, RP 036/07, 22 décembre 2007, in M.WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., p. 37.

* 238M. TROPER, La Philosophie du Droit, PUF, Paris, 2011, p. 99.

* 239 M. TROPER, op.cit., p. 100.

* 240 M.WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., p. 10.

* 241L.MUTATA LUABA, op.cit., p. 35.

* 242 In idem loco p. 39.

* 243 In R.NYABIRUNGU mwene SONGA, op.cit., p. 81.

* 244 In idem loco.

* 245 In L.MUTATA LUABA, op.cit., p. 34.

* 246 In M.WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., pp. 21-22.

* 247 http://www.afrimap.org/english/images/treaty/ACHPR_Directives&Principes_ProcesEquitable, consulté le 08 octobre 2013.

* 248 R. NYABIRUNGU mwene SONGA, op.cit., p. 196.

* 249 J.P. FOFÉ DJOFIA MALEWA, Justice Pénale et Réalités Sociétales. De l'analyse du modèle R.D. Congo à la formation d'une politique criminelle participative, L'Harmattan, Paris, 2007, p. 421.

* 250 L. MUTATA LUABA, op.cit., p. 50.

* 251 S. BOKOLOMBE BATULI YASEME, op.cit., p. 56.

* 252 SENAT FRANÇAIS, Les documents de travail du Sénat; Série législation comparée : La justice militaire, 5 décembre 2000, Paris, p. 7.

* 253 In idem loco p. 9.

* 254 SENAT FRANÇAIS, op.cit. p. 15.

* 255 In idem loco p. 21.

* 256 http://fr.wikipedia.org/wiki/initiative-populaire, consulté le 08/10/2013, 12 heures 08'

* 257 In idem loco.

* 258SENAT FRANÇAIS, op.cit., p. 25.

* 259 SENAT FRANÇAIS, op.cit., p. 1.

* 260 In idem loco p. 2.

* 261 SENAT FRANÇAIS, op.cit., pp. 3-4.

* 262 In idem loco p. 22.

* 263 http://acap-cf-info/centrafrique-société, consulté le 09/11/2013, 14 heures 52'.

* 264 KAHISHA ALIDOR MUNEMEKA, cité par HAMISY HERADY, Droit civil, Volume I : les personnes, les incapacités, la famille, 1ère édition, EDUPC, Kinshasa, 2013, p. 126.

* 265 J. PRADEL, Droit Pénal Général, 19ème édition revue et augmentée, Édition CUJAS, Paris, 2012, p. 68.

* 266 MATADI NENGA GAMANDA, « Quel Droit judiciaire pour une meilleure prise en compte de la réforme du Code pénal? », in P.AKELE ADAU, op.cit., p. 525.

* 267 P.NGOMA BINDA, Devoirs du citoyen dans le maintien de l'ordre public, cité par L.MUTATA LUABA, op.cit., p. 20.

* 268 Article 24 du Code Judiciaire Militaire.

* 269 Article 22 CJM.

* 270 Article 16 CJM.

* 271 Article 20 CJM.

* 272 Article 10 CJM.

* 273 M. WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., p. 19.

* 274 TERENCE, Le Bourreau de soi-même, I, I, 25, in Le Petit Larousse illustré, op.cit., p. LXXIII.

* 275 KALOMBO MBANGA, cité par L. MUTATA LUABA, op.cit., p. 14.

* 276 MATADI NENGA GAMANDA, art.cit., p. 528.

* 277 T. RAHANDRAHA, Poète, tu parleras, Présence africaine, in Anthologie 5, refondue et enrichie de questionnaires, CRP, Kinshasa, 2000, p. 7.

* 278 EJ. LUZOLO BAMBI LESSA et N.A. BAYAONA ba MEYA, op.cit., p. 26.

* 279 T.TSHILOMBO SEND, Education à la citoyenneté, Notes de Cours 1er Graduat, Université de Kinshasa, Université protestante au Congo, Océan, Kinshasa, 2013, p. 17.

* 280 Il convient de lire les articles 10, 16, 20, 22 et 24 du Code Judiciaire Militaire.

* 281 http://www.cours-de-droit.net/cours-de-droit-penal Consulté le 12/11/2013 à 15 heures 42'.

* 282 Article 27 CJM.

* 283 Article 31 CJM.

* 284 L. MUTATA LUABA, op.cit., pp. 41-42.

* 285L. MUTATA LUABA, op.cit., pp. 43-44.

* 286 E. LAMBERT ABDELGAWAD, « Les tribunaux militaires et juridictions pénales d'exception sous le contrôle de la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples », cité par M. WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., p. 31.

* 287 G. KAPIAMBA, in www.kongotimes.info-(c)Kongo Times! -All Rights Reserved.

* 288 P.C. KASONGO MWIDINGE MALUILO, art.cit., p. 168.

* 289 R. NYABIRUNGU mwene SONGA, op.cit., p. 196.

* 290 J.DENNELY, Qu'est-ce que les Droits de l'homme ?, cité par AMISY HERADY, op.cit., p. 126.

* 291 R. BADINTER, Contre la peine de mort, Fayard, Paris, 2006, p. 12.

* 292 KALONJI Bill Clinton, Chanson populaire, Album Miracle, in Les Marquis de Maison Mère, N'diaye Productions, Kinshasa 2005, inédit.

* 293 F. TULKENS, art.cit., p. 86.

* 294 J.P. FOFE DJOFIA MALEWA, op.cit., p. 421.

* 295 E.J. LUZOLO BAMBI LESSA et N.A. BAYONA ba MEYA, op.cit., pp. 667-668.

* 296 Observation Générale no 13 relatif aux Droits civils et politiques, Nations Unies, in M.WETSH'OKONDA KOSO, op.cit., p. 21.

* 297 http//:www.Kongo Times! Info, consulté le 18/10/2013, 08 heures 16'.

* 298 In idem loco.

* 299 CICERON, Premières Catilinaires, in EGLOGA, p. 196.

* 300 In idem loco, p. 198.

* 301 A. MBATA BETUKUMESU MANGU, Abolition de la peine de mort et constitutionnalisme en Afrique, l'Harmattan, Paris, 2011, p. 60.

* 302 S. BOKOLOMBE BATULI YASEME, op.cit., p. 54.

* 303 A. MBATA BETUKUMESU MANGU, op.cit., p. 53.

* 304 R. BADINTER, op.cit., pp. 10-11.

* 305 G. CORNU, op.cit., p. 1090.

* 306 M. MBAMBI MONGO, « La personne humaine au coeur de la réforme du code pénal. Approche de la philosophie et d'anthropologie juridiques », in AKELE ADAU, op.cit., p. 120.

* 307 A. SITA MUILA AKELE, « Comment intégrer la démarche de la réforme du code pénal dans une véritable politique de civilisation », In AKELE ADAU, op.cit., pp. 127-133.

* 308 A. MBATA BETUKUMESU MANGU, op.cit., p. 61.

* 309 R. NYABIRUNGU mwene SONGA, op.cit., pp. 27-28.

* 310 J. L. ESAMBO KANGASHE, op.cit., p. 111.

* 311 L. MUTATA LUABA, op.cit., p. 26.

* 312 G. CORNU, op.cit., p. 1090.

* 313 CNS, Commission des assassinats et violations des droits de l'Homme, Rapport sur les assassinats et violations des droits de l'Homme, Livre 2 : Deuxième République, Kinshasa, 2004 in YERODIA Abdoulaye NDOMBASI, Qui est qui? Qui a fait quoi?, p. 12.

* 314In idem loco, p. 15.

* 315 CNS, pp. 15-16.

* 316 L.CIZUNGU MUGARUKA, op.cit., p. 95.

* 317 E.J. LUZOLO Bambi Lessa et N.A. BAYONA ba Meya, op.cit., p. 521.

* 318 R. BADINTER, op.cit., p. 21.

* 319 In idem loco p. 29.

* 320 Article 65 CMP.

* 321 Article 28 alinéa 1er CMP.

* 322 Article 352 CJM.

* 323 J.I.C. MUKENDI KAMBALA, op.cit., p. 271.

* 324 P.AKELE ADAU, « Pluralisme juridique et réforme du Code pénal en République démocratique du Congo, in P.AKELE ADAU (sous dir.), op.cit., p. 194.

* 325 J.PRADEL, op.cit., p.20.

* 326 P.AKELE ADAU, art.cit., p. 195.

* 327 In idem loco.

* 328 E.J. LUZOLO Bambi Lessa et N.A. BAYONA ba Meya, op.cit., p. 26.

* 329 E.J. LUZOLO Bambi Lessa et N.A. BAYONA ba Meya, op.cit., p. 27.

* 330 G.KAMBINGA KATOMBA, Député national, Porte-parole du MLC (Parti chair à Jean-Pierre BEMBA GOMBO et Fidèle BABALA arrêté) lors d'une interview lui accordée par la rédaction de Télé 50, chaine de télévision privée émettant de Kinshasa, suivie le 27 novembre 2013, édition du soir.

* 331 S.GUINCHARD et J.BOUISSON, cités par E.J. LUZOLO Bambi Lessa et N.A. BAYONA ba Meya, op.cit., p. 21.

* 327 E.J. LUZOLO Bambi Lessa et N.A. BAYONA ba Meya, op.cit., p. 22.

* 332 B.BOULOC, Procédure pénale, 20ème édition, Dalloz, Paris, 2006, p.307. Cité par E.J. LUZOLO Bambi Lessa et N.A. BAYONA ba Meya, op.cit., p. 26.

* 333 J.I.C. MUKENDI KAMBALA, op.cit., p. 188.

* 334 Article 214, CJM.

* 335 D.KALUBA DIBWA, op.cit., p. 477.

* 336 L. MUTATA LUABA, op.cit., pp.14-15.

* 337 A.D. NTUMBA LUABA LUMU, op.cit., p.338.

* 338 CICERON, « Plaidoyer pour le poète A. Licinius Archias », 29, in Le Vade mecum de 6ème Littéraire., INILU, 1990, P.16.

* 339 R.GASSIN, Avant-propos, in Général N. LIKULIA BOLONGO, op.cit., p. VI.






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