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Logiques d'aménagement d'un marché urbain ou construction du risque environnemental. L'exemple du marché de Mont-Bouët de Libreville (Gabon).

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par REGIS ARNAUD MOUNDOUNGA NZIGOU
Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis - Master de Géographie Première Année 2009
  

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IV.2 - Un espace désarticulé et malsain

Le basculement démographique du rural vers l'urbain à partir des années post indépendances est le changement le plus spectaculaire qu'a connu Libreville au cours des dernières décennies. Cette région, rural à plus de 75% au moment de l'indépendance, a été avec l'apport des populations venues de l'intérieur du pays, urbanisée à plus de 65%. Pourcentage auquel il faut ajouter les populations venues de l'étranger, une tendance qui devrait se poursuivre au cours des prochaines années. La ville a pris au fil des ans une ampleur qui dépasse aujourd'hui les capacités locales de gestion, d'absorption et de financement.

Au sein d'un arrondissement densément peuplé, les limites du marché qui n'ont à l'origine pas été définies avec précision, se sont étendues de manière anarchique. Dans la mesure où les différents outils mis en place au fil du temps pour maîtriser l'espace du marché ont été de moins en moins adaptés et pour certains n'ont guère répondu à la situation économique et sociale de Libreville.

En dépit des efforts réalisés par les pouvoirs publics pour réhabiliter, rénover, construire et reconstruire, les conditions dans lesquelles fonctionnent les équipements restent dans la majorité des cas problématiques. Souvent mal drainés, soumis à des inondations, pas ou peu desservis en réseaux (eau, électricité, assainissement, éclairage), encombrés des décharges sauvages obstruant les voies d'évacuations, sous-équipés en toilettes publiques, sur densifiés, le marché de Mont-Bouët connait une situation sanitaire critique. Cette situation est d'autant plus préoccupante dans le cas ce marché de produits vivriers peut être à l'origine de la diffusion en ville d'épidémies, notamment de maladies hydriques.

Congestionné par les sureffectifs, les équipements marchands à Mont-Bouët sont depuis longtemps sortis de leurs limites. Les commerçants fixes et les nombreux ambulants ont pris possession des espaces publics voisins, des emprises de la voirie et dans bien des cas de la chaussée elle-même. Les conditions de circulation sont dans la plupart des cas extrêmement dégradées. Les temps de transports des personnes et des marchandises sont démultipliés, la pollution atmosphérique et la pollution par les effluents dépassent les seuils admissibles...

Ces dysfonctionnements affectent en premier lieu les équipements marchands eux-mêmes : les localisations centrales, autrefois les plus recherchées, sont dépréciées dans la mesure où il est de plus en plus difficile d'y accéder. Le marché dans son périmètre entier finit par perdre de son attractivité : beaucoup de biens sont disponibles à l'extérieur du marché, dans les rues avoisinantes, à des prix souvent inférieurs, auprès de "vendeurs à la sauvette" ou de boutiques informelles. Cette situation a créé avec le temps d'importantes nuisances telles que :

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- voies génératrices, selon les saisons de poussière ou de boue (image 9) ;

- voies non adaptées aux nouveaux engins de transports : embarras de la circulation, déchargements sauvages et stockages de produits parfois à même la voie ;

- réseau d'eau potable inadapté, insuffisant dans certains cas inexistants ;

- insalubrité liée aux mesures d'assainissement et d'approvisionnement en eau potable (absence ou engorgement des canalisations, absence en certain endroit du marché de bennes et bac à ordures) ;

- réseau électrique insuffisant et non adapté au développement des équipements nécessaires au conditionnement, à la manutention ou au stockage des produits et autres marchandises ;

- réseau d'éclairage public non adapté, accentuant ainsi les problèmes de sécurité sur le marché ;

- réseaux d'évacuations des eaux pluviales, domestiques et sanitaires inadaptés et

insuffisants, pouvant nuire à la qualité hygiénique des marchandises exposées ; - bâtiments mal adaptés aux conditions hygiéniques requises et aux méthodes de

confinement modernes des marchandises périssables ;

- sanitaires et toilettes publiques en nombre insuffisant ;

- collecte, traitement et évacuation des déchets liquides et solides mal organisés, non coordonnés ou insuffisants ce qui créent des problèmes d'hygiène et de santé publique ;

- absence de services à la personne (dispensaire, unité médicale) au sein du marché ;

- comportement des commerçants dont les pratiques ne garantissent pas l'innocuité des aliments, source indéniable de contamination (aliments à même le sol ou sur des étales inappropriées...) ;

- conflits de compétences ;

- absence de bornes incendie et de couloirs d'évacuations.

Finalement, c'est l'ensemble de la ville et de ses habitants qui sont affectés par les externalités négatives. Les coûts économiques engendrés par ces externalités imputables aux équipements marchands sont supportés par la collectivité.

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Image n°9 : le marché après les intempéries

'Rue d'un peu de tout", le commerce des produits vivriers se fait dans des conditions d'insalubrité inimaginables. Les commerçantes de plantain exposent à même le sol et vendent dans la boue et sous la pluie.

Cliche : Régis Arnaud MOUNDOUNGA, novembre 2007

- les inondations à Mont-Bouët

Le phénomène d'inondation dans le quartier Mont-Bouët est la réponse à la logique selon laquelle, l'occupation du sol précède la planification urbaine comme c'est le cas dans de nombreuses villes africaines. Cet espace alluvial jadis marécageux est composé d'un sol argilo-sableux à très forte perméabilité et par conséquent favorable aux engorgements. A cette situation il faut ajouter un bâti incontrôlé et un fort drainage de ce secteur marqué par le phénomène d'apparition de cours d'eau saisonniers dans le périmètre du marché durant la saison pluvieuse.

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Image n° 10 et 11 : Mont-Bouët après la pluie

Des secteurs entiers du marché sont occupés par les eaux après un épisode pluvieux à Libreville.

Rue "d'un peu de Tout"

Cliche : Régis Arnaud MOUNDOUNGA, novembre 2007.

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- le risque électrique

La précarité des aménagements et des installations électrique dans certain secteur du marché expose le site et les animateurs à une multitude de dangers. Ce dernier s'explique par la présence ça et là de nombreux câbles électriques "abandonnés" à l'air libre. Dans ce cafouillage l'ensemble des systèmes d'approvisionnement du marché se trouve ainsi saturé et nul ne saurait distinguer les conducteurs actifs des non fonctionnels vu que des poteaux électriques sont détournés de leur fonction première.

Image n° 12 : branchements en toiles d'araignée

Tissus et branchements anarchiques, exploitation des poteaux électriques à des fins logistiques et commerciales.

Cliche : Régis Arnaud MOUNDOUNGA, novembre, 2007.

IV.2.1 - Mont-Bouët : un environnement insalubre

Les difficultés de circulation dans la ville et sur le marché, l'absence de parking, s'ajoutent aux difficultés de ramassage de stockage et de recyclage des ordures et déchets de toute origine. En milieu urbain, le développement durable48 implique la participation de tous les acteurs (publics et privés, individuels et collectifs) à prendre conscience des "effets néfastes" de la gestion urbaine sur l'environnement. Le pari est loin d'être gagné dans une ville où les problèmes environnementaux se posent en termes de gestion des déchets, de pollution de l'air, de l'eau et en nuisances de toutes sortes. La question y est d'autant plus complexe que chaque fonction de la ville renvoie à un aspect de l'environnement urbain. Faute d'infrastructure de conservation et d'équipement de stockage, dans l'impossibilité d'écouler rapidement et de façon rentable des denrées alimentaires essentiellement périssables.

C'est à partir de 1975 que les autorités municipales de Libreville intègrent le traitement des déchets dans leur politique de gestion urbaine. Mais elles restreignent leurs interventions aux seuls quartiers administratifs et résidentiels. Les quartiers péri centraux populaires sont alors exclus de ce privilège. Au début des années 1980, pour pallier à ces insuffisances, la commune cède l'hygiène et la salubrité de la ville à la Société Gabonaise d'Assainissement (SGA) et depuis 1998 à la Société de Valorisation des Ordures Générale (SOVOG). Ces sociétés privées détiennent le monopole sur les marchés en ce qui concerne la collecte et l'évacuation des ordures et autres déchets. Toutefois, le constat sur le marché de Mont-Bouët est des plus alarment. Les bacs à ordures sont noyés sous le poids de leurs contenus et de fortes nuisances étouffent les commerçants et les autres animateurs non seulement du marché mais aussi de ses alentours.

Répondre aux besoins des générations actuelles sans pour autant compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Il s'est construit comme une réponse objective des institutions et des entreprises aux nombreuses préoccupations de la société civile et de certaines organisations, relatives aux impacts environnementaux et sociaux de l'activité des principaux agents économiques sur la planète.

Tous les secteurs d'activité sont concernés par ce développement : l'agriculture, l'industrie, le commerce, mais aussi les services.

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De manière générale, la gestion des déchets à Libreville est marquée par de nombreux dysfonctionnements en matière de financement, de choix techniques et de schéma organisationnel. Les ordures non collectées sont déversées dans les drains et les cours d'eau, dans les caniveaux ou dans les décharges sauvages. Ces déchets causent des nuisances à l'environnement avec pour conséquence la dégradation de la qualité de l'eau, de l'air, du sol et de la santé publique. Les eaux de ruissellement sont généralement chargées en matières polluantes et peuvent souiller les sources, nuire à la faune et à la flore aquatique. L'air est pollué par le dégagement d'odeurs nauséabondes, résultat de la rapide fermentation des matières organiques arrosées par les eaux de pluies. Ceci entraîne

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la pollution de la nappe phréatique en contrebas de la Loubila49 où s'approvisionnent les citadins les plus défavorisés. Ces eaux qui s'infiltrent dans les sols sont d'autant plus dangereuses pour la santé publique qu'elles contiennent des germes pathogènes. La contamination de la nappe phréatique par les ordures ménagères, les déchets industriels et ceux des marchés vivriers favorise la prolifération des maladies hydriques comme la diarrhée, la dysenterie amibienne, la gale ou la typhoïde. La salubrité et l'hygiène du cadre de travail et de vie constituent avec la garantie de la sécurité les principales pommes de discorde entre les commerçants et l'autorité municipale. Si la communauté urbaine est pointée du doigt comme le principal responsable de l'insalubrité de la ville de Libreville et de ses marchés, c'est parce qu' « on ne sait pas à quoi servent les sommes collectées sous forme de taxes si ce n'est pour enrichir les amis et la famille du délégué du gouvernement auprès de la Communauté ».

Toutefois, il faut ajouter à ces problèmes de gestion humaine des contraintes techniques. Les inondations fréquentes de certaine partie du marché sont liées aux difficultés à gérer l'eau dans cette ville construite sur les marécages, où tombe beaucoup de pluie alors que le site est plat. Et ceci est aggravé par la forte croissance démographique. Les déficiences des services urbains à Libreville ne résultent pas seulement de l'insuffisance des ressources financières, mais d'abord de contraintes d'ordre institutionnel. Le plus grave est la forte concentration du pouvoir de décision au niveau central. Les structures actuelles sont intrinsèquement incapables d'une gestion attentive des besoins, même si elles étaient à l'écoute de ceux-ci. Les préoccupations propres de l'administration centrale s'accentuent au fur et à mesure que le centre des décisions s'éloigne des administrés. Les coûts des décisions augmentent avec leur centralisation et la qualité de l'information se détériore au fur et à mesure qu'elle passe des agents de terrain au pouvoir central.

IV.2.1.1 - l'évacuation des déchets liquides

Malgré les efforts soutenus par les services compétents de la voirie de Libreville, l'insalubrité dans les principaux marchés de la capitale persiste et risque de durer encore longtemps. Le marché de Mont-Bouët est de loin le plus touché par ce phénomène d'insalubrité. Il faut dire tout de suite que pour ce marché, la production des ordures et des déchets est massive et très diversifiée (liquides, solides et organiques). Les rejets se faisant d'une manière incontrôlée et le plus souvent à même le sol, on aboutit à des nuisances de tous ordres qui rendent par la suite le milieu impraticable. C'est surtout la forte accumulation des déchets qui pose aujourd'hui de nombreux soucis.

49 Rivière qui traverse le marché

En effet, il manque au sein du marché de Mont-Bouët les infrastructures nécessaires à la collecte, au stockage et à l'évacuation dans les meilleures conditions des déchets. Les rues à Mont-Bouët ne possèdent pas de bouches d'égouts pour l'évacuation des déchets liquides, les eaux usées ruissellent librement sur la chaussée dégageant ainsi des odeurs pestilentielles. Sur toute la Rue Bivouli, ces nuisances ne semblent pas pour autant déranger les commerçants qui y sont presque accoutumés. Les parties couvertes des principaux bâtiments sont très difficiles à nettoyer, car n'a pas été prévu dans les plans de constructions des canalisations pour l'évacuation des déchets de quelque nature que ce soit, alors que c'est sous ces même bâtiments que sont écoulées une grande partie des marchandises et autres denrées qui produisent les déchets nocifs à l'environnement (produits de boucherie, de pêche, fruits et légumes, etc.).

Aujourd'hui, le marché de Mont-Bouët ainsi que son air d'influence produisent une quantité impressionnante de déchets et de rebuts qui ne sont pas évacués à temps50. Les services de nettoyage paraissent déborder, dans la mesure où les équipes qui ont en charge le nettoyage du marché et de ses abords ne remplissent pas efficacement leur mission ; à cause d'une part du manque de personnel, et d'autre part de la grandeur du site. Bien que disposant du matériel et des outils (camions, brouettes, balais, pelles, râteaux, etc.).

Depuis 1979, le marché ferme ses portes pour son nettoyage quotidien entre 18h et 20 heures. Les pouvoirs publics sont allés plus loin en instituant un jour spécial dans la semaine durant lequel le marché est entièrement fermé pour être nettoyé (lundi).

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50 Nous n'avons pas pu avoir le volume en déchet que génèrent quotidiennement le marché de Mont-Bouët

et son air d'influence.

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Canal d'évacuation des eaux du marché détourné de sa fonction première et obstrué par des déchets de toutes sortes.

Effluent de la Loubila

Cliche : Régis Arnaud MOUNDOUNGA, novembre, 2007.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo