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Connaissances locales et modes d'utilisation des plantes médicinales dans le traitement du paludisme et de la fièvre jaune dans la région des cascades. Cas du village de Diarrabakoko.

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par Saliou SANOGO
Université de Ouagadougou - Mîtrise 2014
  

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1.2- La construction sociale de la maladie

La construction sociale de la maladie peut être considérée comme l'ensemble des représentations, des perceptions qu'une société donnée se fait de la maladie, pour un énoncé étiologique à partir des formes nosologiques.

L'oeuvre de Fainzang (1986) est considérable en ce sens qu'elle s'articule autour de deux axes de recherche à savoir les énoncées étiologiques et les recours thérapeutiques des malades. Dans la première thématique, elle introduit une présentation des principales figures de la religion bissa (Dieu, ancêtres, génies) à l'oeuvre dans l'interprétation de la maladie ainsi qu'une tentative de mise en forme nosologique effectuée à partir des" noms de maladies" qui incluent et examinent de nombreuses maladies à étiologie "naturelle" appelées "simple" ou "maladie de Dieu" par les populations locales. Dans son deuxième axe de recherche relatif aux stratégies thérapeutiques, Fainzang examine le recours aussi bien aux guérisseurs aux devins qu'aux dispensaires. Elle y fait valoir la "non exclusivité" de ces différents recours et surtout celles des diverses représentations que chacun d'entre eux sous-tend. A partir de l'exemple de l'onchocercose, elle montre que la pensée symbolique fonctionne par accumulation non exclusive de représentation et non pas par esprit de synthèse ou une information peut en annuler une autre. A cet effet, elle signale que la relation entre médecine "traditionnelle"(guérisseurs, devins) et médecine « moderne » (infirmiers, médecins) semble parfois s'ajuster dans un rapport de complémentarité et non de rivalité en fonction des diverses pathologies.

C'est dans cette perspective que Bibeau (1978) analyse l'organisation Ngbandi des noms des maladies en examinant le système médical du point de vue de la nosologie, en faisant ressortir les principes présidents à la nomination des maladies ainsi qu'à "l'organisation différentielle" des formes pathologiques entre elles . Pour lui, les axes fondamentaux de la construction de la nosologie ngbandis ne peuvent être mis en évidence que par le biais d'une analyse culturelle centrée sur la réalité de la maladie dans le vécu physique psychologique de l'individu malade, dans l'interprétation socioculturelle de l'épisode pathologique et dans la stratégie thérapeutique mise en oeuvre pour lutter contre la maladie. Ainsi, il stipule que la maladie chez les A ngbandi ne peut pas être envisagée en dehors de leur insertion dans l'ensemble de leur système médical qui, par son caractère compréhensif, jette un pont entre l'approche biomédicale et l'approche culturelle. Enfin, le but de Biveau était de montrer qu'il existe un lien organique entre le model médical propre àune culture ; la conception que cette culture se fait de la maladie et de la terminologie qu'elle utilise pour se référer verbalement aux maladies.

Ce système de représentation est plus perceptible dans Sociologie de la Maladie et de la Médecine, ou Adam et Ehrlich (1994) opèrent une rupture avec la conception selon laquelle la maladie et la mort sont des réalités décryptables uniquement sur le plan biologique. C'est ainsi que ces auteurs nous montrent les différentes manières dont la maladie est dans notre société, liée au social et pour une analyse objective, on doit en premier lieu s'attacher à sa nature et à sa distribution car pour eux, les maladies sont différentes selon les époques et les conditions sociales. De ce fait, pour eux, la santé et la maladie se définissent donc en fonction des exigences et des attentes liées à notre environnement, à nos insertions, à nos relations familiales et professionnelles et constituent au sens propre, des états sociaux. Par ailleurs, nos deux auteurs stipulent que tout évènement important dans l'existence humaine demande une explication et on doit en comprendre la nature et lui trouver des causes. A cet effet, ils s'appuient sur "l'expérience de la douleur" développée par Zoboroswki pour dire que le "modelage culturel" englobe aussi au-delà de la perception et de l'expression des symptômes ce qui est défini comme maladie dans une société donnée

Le point de vue dans lequel se situe Freidson (1984), dans son ouvrage est celui d'appréhender La Profession Médicale dans la perspective d'une nouvelle compréhension de la maladie car l'évidence « physique » « naturelle » de la maladie, de la santé, de la mort est impossible à éluder. De ce fait, il entend montrer que la maladie et la santé sont aussi des catégories sociales construites par le savoir et la pratique du médecin. Avec l'apparition de la médecine comme profession consultante, la maladie donnera lieu à un diagnostic dans toutes les sociétés mais les façons de gérer sont très différentes. Raison pour laquelle on remarque que dans la plupart des sociétés certains individus passent pour avoir des connaissances spéciales en matière de la maladie et de traitement ; les malades ou leur famille ont donc recours à eux. La médecine semble alors régner l'idée que cette activité est liée au diagnostic, au traitement des maladies et le terme ainsi compris s'étend à des pratiques individuelles d'autodiagnostic et d'auto-thérapeutique que l'on observe dans les sociétés élémentaires (folk médecine ou médecine populaire) jusqu'aux recherches les plus ésotériques de la biochimie. En outre, dans la construction sociale de la maladie, Freidson analyse cette dernière comme déviance sociale du fait de son état social. Dans cette condition, le monopole de la médecine comprend le droit de" créer" la maladie en tant que "rôle" social "reconnu". Selon lui, le comportement du" malade" diffère d'une culture à une autre et il est souvent très indépendant de la maladie et constitue une réalité par lui-même. Il ajoute aussi que le comportement du guérisseur varie selon les cultures et de ce que Mechanic appelle le « comportement de maladie » du patient, le « comportement de diagnostic »et du « comportement thérapeutique » du médecin. La maladie est dans ces conditions, toujours une catégorie de déviation ou une déviance par rapport à un ensemble de normes qui représente la santé ou la normalité car nous la croyons indépendante de la culture humaine (bien que la culture puisse avoir de l'influence sur sa prévalence et son traitement) raison pour laquelle nous avons l'impression qu'elle est différente, plus "objective" et plus stable que des formes de déviance visiblement sociale, tel le crime.De ce point de vue, il souligne que le diagnostic et le traitement sont des actes sociaux aux hommes du fait qu'il découle de la connaissance humaine. Prise ainsi, l'étiologie de la maladie n'est pas biologique, mais sociale et elle provient des idées courantes dans la société sur ce qu'est la malaise limitée peut être quelque fois par des faits biologiques. Ainsi, sous sa forme sociale, la maladie est une signification attribuée au comportement par l'acteur ou par son entourage et par son entourage et qui commande le comportement de maladie. Les variations du lieu, d'époque, de perspective signifie que varie aussi la signification attribuée à tel ou tel comportement. L'importance relative d'une telle considération sociale pour définir une maladie à une époque donnée, constitue une indication importante sur la nature de la société de cette époque.

Par ailleurs, dans la représentation « profane » de la maladie, l'auteur défend la thèse selon laquelle les guérisseurs n'ont pas de problèmes dans une société élémentaire parce qu'ils se spécialisent uniquement dans un domaine que tout le monde connait : ils ne sont pas nettement séparés de leurs patients par leur conception de la maladie et du traitement, ils ont des chances de traiter tous ceux qu'ils estiment devoir traiter. Selon lui, les individus diffèrent naturellement entre eux par leurs réponses à la douleur et ses réponses à la douleur sont prévisibles à partir de l'appartenance à un groupe et les significations sociales qui lui sont attribuées sont communes aux membres d'un même groupe. Cependant l'utilisation des services médicaux dépendra aussi du niveau culturel des individus et la définition vulgaire des symptômes de la maladie seront importantes pour comprendre si les profanes se croient malades et si, se croyant malades, ils vont consulter un médecin. Cela dit, ils sont enclin à décrire leurs expériences de la maladie à l'aide des notions tout à fait "dépassées". Les connaissances et les attitudes manifestent d'une culture ou d'une "sous culture" qui a plus de chance de leur donner des conceptions sur la maladie. Il souligne qu'en imputant unesignification à son expérience, la personne souffrante n'invente pas par elle-même les significations, mais utilise celles que sa vie sociale lui fournit. Et c'est ainsi qu'on peut prévoir le comportement d'une série d'individus sans faire référence à leurs caractéristiques individuelles, mais seulement au continu de la vie sociale à laquelle ils participent.

Cependant, il fait remarquer que la vie sociale n'est pas seulement faite de son contenu mais aussi d'une structure : Une organisation des relations interpersonnelles, c'est aussi celle-ci qui soutient, impose, renforce la conformité à son contenu culturel. Il nous rappelle qu'un individu dépend des autres pour obtenir les privilèges de la maladie et le choix d'un médecin, la recherche d'une psychothérapie qui confirment l'importance de ce processus social. Ainsi, le « système référentiel » des profanes sera défini par leur culture, leur savoir en ce qui concerne la santé et les agents de santé, leur relation entre eux. Le système a donc un contenu culturel, qu'il soit d'origine ethnique ou socio-économique, un réseau ou une structure. La culture est prise ici comme la variable dépendante qui est la clé du processus social. De manière spécifique, Freidson dit que la structure ou l'organisation de la communauté locale profane est aussi un facteur qui joue sur l'utilisation des services médicaux. L'approche théorique de ces auteurs, dans le cadre de notre travail s'inscrit dans la perspective d'appréhension des choix thérapeutiques en fonction des représentations de la maladie liée aux « effets contextuels ».

Toujours dans la logique représentationnelle de la maladie, Bonnet (1986), s'inscrivant dans le contexte particulier du Burkina Faso montre à travers son étude « Représentations culturelles du paludisme chez les Moosé du Burkina » que la notion du paludisme dans cette société est assimilée aux maux de tête et au "corps chaud". A partir d'une analyse sémantique de cette notion, l'auteur montre la logique binaire opposant le chaud et le frais. Cette logique selon Bonnet serait commune à de nombreuses sociétés africaines et serait au fondement de la nosographie et de la thérapeutique traditionnelle.

Dans le même contexte et dans la même dynamique représentationnelle, l'étude de Dacher. (1992) sur « les Représentations de la maladie chez les goins du Burkina Faso » montre les différents procédés de nomination des affections ainsi que les énoncés étiologiques. En effet, à travers la logique binaire chaleur-fraicheur, l'auteur en vient à la terminologie et aux conditions d'énonciations tout en montrant que le mode goin de nomination des maladies dépend davantage des conditions d'énonciation que d'un système nosographique rigoureux. Selon Dacher, nommer une maladie, c'est souvent poser un diagnostic et donc prétendre à un savoir. Or, le savoir dit l'auteur, est fonction du statut social et selon qu'on interroge une femme ou un homme, un jeune ou un vieux, un villageois ou un citadin, un habitué des migrations en Côte-d'Ivoire, un scolarisé, etc., on n'obtient pas la même réponse. En outre, il signale que la dénomination des maladies part de ce que nous entendons par "maladie", ce que les villageois considèrent subjectivement comme une maladie qu'eux ou leurs proches ont subie (illness), à la fois les maladies socialement reconnues (sickness) sur lesquelles eux-mêmes et les guérisseurs peuvent fournir des informations.

Par ailleurs, l'analyse de l'auteur portant sur les maladies à dénomination étrangère insiste sur le problème du paludisme. En effet, il souligne que « la principale maladie "venue d'ailleurs" n'est pas une entité nosologique isolable, mais un continuum situé sur axe de gravité croissante : sumaya -sumaya ba-jokuajo ». (1992 : 165-166)

De façon générale, l'étude de Dacher montre le lien entre les conceptions de la maladie et le but ultime recherché par cette société à savoir la cohésion sociale.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo